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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3387/2022

ATAS/261/2024 du 16.04.2024 ( PC ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3387/2022 ATAS/261/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 16 avril 2024

Chambre 15

 

En la cause

A______
représentée par Me Claude ABERLE, avocat

recourante

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES

intimé

 


EN FAIT

 

A. Madame A______ (ci-après : la bénéficiaire ou la recourante), née le ______ 1945, et Monsieur B______ (ci-après : le requérant ou le bénéficiaire), né le ______ 1942, sont mariés depuis le 20 avril 1968.

B. a. Le 15 juin 2011, le requérant a saisi le service des prestations complémentaires (ci-après : le SPC ou l’intimé) d’une demande de prestations complémentaires à la rente de vieillesse qu’il percevait depuis le 1er janvier 2010. À teneur de la demande précitée et de son courrier d’accompagnement, le requérant habitait alors à C______ (France).

b. Compte tenu du domicile à l’étranger du requérant, le SPC a refusé la demande de prestations du 15 juin 2011, par décision du 16 juin 2011, confirmée sur opposition le 25 juillet 2011, le requérant étant invité à déposer une nouvelle demande de prestations après un éventuel déménagement à Genève.

c. Le 10 août 2011, le requérant a déposé une nouvelle demande de prestations, complémentaires à la rente de vieillesse qu’il percevait, demande dont il ressort qu’il était désormais domicilié à D______, canton de Genève.

d. Par courrier du 2 septembre 2011, et par rappels des 3 octobre et 2 novembre 2011, le SPC a sollicité la production de plusieurs pièces et notamment une copie du contrat de sous-location et un justificatif mentionnant la date effective de la fin de la location à C______.

e. Les pièces demandées n’ayant pas été produites dans les délais impartis, le SPC a refusé d’entrer en matière sur la nouvelle demande de prestations par décision du 1er décembre 2011.

C. a. Le 6 janvier 2014, les époux ont annoncé à l’office cantonal de la population et des migrations (OCPM) du canton de Genève leur départ pour E______(canton de Vaud).

b. À une date inconnue, le requérant et son épouse ont été mis au bénéfice de prestations complémentaires dans le canton de Vaud.

c. Le 27 novembre 2019, les époux ont annoncé leur retour à Genève.

d. Par décision du 1er janvier 2020, la Caisse cantonale vaudoise de compensation AVS a supprimé, avec effet au 1er février 2020, les prestations complémentaires et le remboursement des frais de maladie compte tenu du transfert du domicile du couple dans le canton de Genève.

D. a. Le 18 février 2020, le requérant a déposé une nouvelle demande de prestations auprès du SPC, à Genève.

b. Par décision du SPC du 29 juin 2020, le requérant a été mis au bénéfice de prestations complémentaires fédérales et cantonales, à compter du 1er février 2020.

c. Ces prestations ont été mises à jour pour 2021 et 2022.

d. Le 28 avril 2022, le requérant est décédé à Genève.

e. Le 10 mai 2022, ayant appris le décès du requérant, le SPC a :

-          informé l’épouse du défunt de la fin du droit aux prestations avec effet au 30 avril 2022 ; les prestations pour le mois de mai ayant déjà été versées, leur restitution était requise, pour un montant total de CHF 1'192.- ;

-          mis l’épouse du défunt au bénéfice de prestations complémentaires d’un montant de CHF 1'110.-, venant toutefois en remboursement d’une dette existante ; dès le 1er juin 2022, l’épouse du défunt avait droit à des prestations complémentaires pour un montant total de CHF 1'709.- ;

-          adressé à l’épouse du défunt un formulaire demande, en lui demandant de bien vouloir transmettre une copie de la décision de rente AVS prenant effet au 1er mai 2022 suite au décès de son conjoint.

f. Le 8 juin 2022, la requérante a transmis au SPC une demande de prestations à son seul nom, dont il ressort notamment qu’elle percevait une rente LPP depuis le 1er novembre 2009.

g. Ladite rente LPP n’ayant jamais été portée à la connaissance du SPC, ce dernier a repris le calcul des prestations complémentaires avec effet au 1er février 2020, soit dès le début du droit aux prestations complémentaires à Genève. À la suite du nouveau calcul, il apparaissait que la requérante et feu son époux avaient perçu, à tort, CHF 28'049.- pour la période du 1er février 2020 au 31 juillet 2022, montant dont la restitution était demandée par courrier du 26 juillet 2022, auquel étaient annexés les nouveaux plans de calcul. Dès le 1er mai 2022, la bénéficiaire n’avait plus droit à des prestations complémentaires.

h. Par courrier du 29 juillet 2022, la bénéficiaire a estimé ne pas être concernée par la décision précitée, étant donné que feu son époux s’était toujours occupé seul du côté administratif du ménage et qu’elle avait notamment répudié sa succession, son courrier devant toutefois, au besoin, être considéré comme une opposition.

i. Le 13 septembre 2022, le SPC a rejeté l’opposition précitée et confirmé la décision de restitution du 18 juillet 2022, considérant que la bénéficiaire avait perçu une rente AVS pendant toute la période litigieuse et qu’elle avait ainsi revêtu la qualité de bénéficiaire directe des prestations complémentaires, aux côtés de feu son époux. Enfin, elle avait contresigné la demande de prestations complémentaires datées du 18 février 2020, dans laquelle il n’y avait aucune mention d’une rente LPP.

E. a. Par écriture du 13 octobre 2022, complétée le 7 décembre 2022, la bénéficiaire, sous la plume de son conseil, a interjeté recours à la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) contre la décision sur opposition précitée, concluant sous suite de frais et dépens, principalement à son annulation et, subsidiairement au renvoi de la cause au SPC pour nouvelle décision. À l’appui de sa position, la recourante a notamment contesté le calcul relatif aux dépenses du couple pour la période du 1er février au 31 décembre 2020, considérant que les frais relatifs à l’assurance obligatoire des soins, de CHF 7'224.- par adulte pour l’année 2020, auraient dû être pris en considération dans le calcul.

b. Les 11 novembre 2022 et 10 janvier 2023, le SPC a persisté dans les termes de la décision sur opposition. Il relevait que sa pratique consistant à ne pas intégrer les primes moyennes d’assurance-maladie dans les dépenses, mais à octroyer des subsides lorsque l’excédent de revenu déterminant ne permettait pas de couvrir lesdites primes, était conforme au droit. Par ailleurs, en application de cette pratique, la recourante et son défunt époux avaient conservé le droit aux subsides, lesquels n’avaient pas été demandés en remboursement.

c. Par courrier du 2 février 2023, la recourante a encore constaté que l’intimé n’avait produit aucun document attestant de la prise en charge intégrale de la prime moyenne d’assurance-maladie et a persisté à contester la méthode de calcul.

d. Le 16 février 2023, l’intimé a transmis à la chambre de céans un courriel du service de l’assurance-maladie du canton de Genève (ci-après : le SAM) du 9 février 2023, dont il ressort qu’un subside avait été versé pour l’année 2020, par l’office vaudois de l’assurance-maladie (ci-après : l’OVAM).

e. Par courrier du 13 mars 2023, la recourante a persisté dans ses conclusions, considérant que le SPC n’avait pas motivé à satisfaction de droit sa pratique, consistant à ne pas prendre en considération la prime moyenne d’assurance-maladie dans les dépenses.

f. Le 11 avril 2023, l’intimé a suggéré à la chambre de céans de s’adresser au SAM et/ou à l’OVAM pour avoir confirmation de la prise en charge de la prime. Par ailleurs, si, pour la période du 1er février au 31 décembre 2020, les primes d’assurance-maladie obligatoire devaient être prises en compte à titre de dépenses reconnues, un montant équivalent, correspondant aux subsides accordés par l’OVAM, devrait être retenu dans le revenu déterminant afin d’éviter la double prise en considération desdites primes.

g. Par courrier du 11 octobre 2023, la recourante a confirmé que l’OVAM avait bien pris en charge les primes d’assurance-maladie de feu son époux.

h. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

 

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.              

2.1 Les dispositions de la LPGA s’appliquent aux prestations complémentaires fédérales à moins que la LPC n’y déroge expressément (art. 1 al. 1 LPC).

En matière de prestations complémentaires cantonales, la LPC et ses dispositions d’exécution fédérales et cantonales, ainsi que la LPGA et ses dispositions d’exécution, sont applicables par analogie en cas de silence de la législation cantonale (art. 1A LPCC).

2.2 Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Dans la mesure où le recours a été interjeté postérieurement au 1er janvier 2021, il est soumis au nouveau droit (cf. art. 82a LPGA).

3.             Des modifications législatives et réglementaires sont entrées en vigueur au 1er janvier 2021 dans le cadre de la Réforme des prestations complémentaires (LPC, modification du 22 mars 2019, RO 2020 585, FF 2016 7249 ; ordonnance sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 15 janvier 1971 [OPC-AVS/AI - RS 831.301], modification du 29 janvier 2020, RO 2020 599).

Toutefois, dans la mesure où la recourante conteste uniquement le montant des prestations complémentaires demandées en restitution pour la période du 1er février au 31 décembre 2020, soit pendant une période antérieure à l’entrée en vigueur des modifications législatives, le nouveau droit n’est pas applicable.

4.             Le litige porte uniquement sur le montant demandé en restitution pour la période du 1er février au 31 décembre 2020, singulièrement sur la prise en considération, dans le calcul, de la prime moyenne pour l’assurance-maladie obligatoire au chapitre des dépenses. Les montants demandés en restitution pour la période du 1er janvier 2021 au 30 avril 2022 ne sont pas contestés.

 

 

5.              

5.1 Au niveau fédéral, l’art. 2 al. 1 LPC dispose que la Confédération et les cantons accordent aux personnes qui remplissent les conditions fixées aux art. 4 à 6 des prestations complémentaires destinées à la couverture des besoins vitaux. Le montant de la prestation complémentaire annuelle correspond à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants (art. 9 al. 1 LPC).

Selon l’art. 11 LPC, les ressources comprennent notamment le produit de la fortune mobilière (let. b), un dixième de la fortune nette, dans la mesure où elle dépasse CHF 60'000.- pour les couples (let. c), les rentes, pensions et autres prestations périodiques y compris les rentes de l’AVS et de l’AI) (let. d).

Quant aux dépenses, elles comprennent notamment, selon l’art. 10 al. 1 LPC, les montants destinés à la couverture des besoins vitaux d’un montant de CHF 29'175.- en 2020 pour les couples (let. a), le loyer d’un appartement et les frais accessoires y relatifs pour un montant maximal de CHF 15'000.- pour les couples (let. b) ainsi que le montant forfaitaire pour l’assurance obligatoire des soins, correspondant au montant de la prime moyenne cantonale ou régionale pour l’assurance obligatoire des soins (couverture accidents comprise) (art. 10 al. 3 let. d LPC).

5.2 Comme indiqué précédemment, à teneur de l’art. 10 al. 3 let. d LPC la prime annuelle moyenne d’assurance-maladie pour le canton en question doit être prise en considération à titre de dépense. La part des prestations complémentaires qui couvre cette dépense ne peut être qualifiée de prestation complémentaire ordinaire, dès lors qu’elle correspond, en réalité, à une réduction de primes individuelle. Cette qualité ressort également de l’art. 26 OPC-AVS/AI qui précise que les bénéficiaires de prestations complémentaires annuelles ont droit à un versement global (prestation complémentaire et montant de la différence avec la réduction de prime) d’un montant au moins égal à celui de la réduction de prime à laquelle ils ont droit, ainsi que de l’art. 54a al. 1 OPC-AVS/AI (CARIGIET / KOCH, Ergäzungsleistungen zur AHV/IV, 2009, p. 88 ; Jöhl, Die Ergänzungsleistung und ihre Berechnung, in: Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], 2ème éd., 2007, n° 152 et ss, p. 1737 ss).

Dans un tel cas, la coordination voudrait que le SPC ne verse pas de prestation complémentaire mais uniquement une réduction de prime ou en d’autres termes un subside. Cette manière de procéder a été confirmée par le Tribunal fédéral des assurances dans un arrêt non publié du 29 octobre 2001, dans lequel il a jugé que dans la mesure où le recourant ne devait pas s’acquitter personnellement de ses cotisations à l’assurance-maladie, dès lors qu’il bénéficiait de subsides mensuels versés directement à son assureur pour être intégralement déduit de ses primes, il ne saurait revendiquer le paiement, en sa faveur, d’une somme équivalent à ses cotisations, par le biais des prestations complémentaires (arrêt du Tribunal fédéral des assurances P 22/01 du 29 octobre 2001, consid. 2).

5.3 Jusqu’au 31 décembre 2020, l’art. 21a LPC prévoyait qu’en dérogation à l’art. 20 LPGA, le montant forfaitaire annuel pour l’assurance obligatoire des soins visé à l’art. 10 al. 3 let. d était versé directement à l’assureur-maladie.

L’art. 21a LPC a été complété et, depuis le 1er janvier 2021, il comporte deux alinéa supplémentaires selon lesquels si la prestation complémentaire annuelle est inférieure au montant pour l’assurance obligatoire des soins, le montant de la prestation complémentaire annuelle est versé à l’assureur-maladie (al. 2). Le montant de la prestation complémentaire annuelle pour le séjour dans un home ou un hôpital au sens de l’art. 10, al. 2, let. a, peut, en dérogation à l’art. 20 LPGA, être cédé et versé directement au fournisseur de prestations (al. 3).

À noter que le nouvel alinéa 2 n’a pas entraîné des conséquences matérielles, étant donné qu’il correspondait à la pratique courante (FF 2016 7249 7323).

6.              

6.1 Les personnes domiciliées à Genève et au bénéfice d’une rente de vieillesse, dont le revenu annuel déterminant n'atteignait pas le revenu minimum cantonal d'aide sociale applicable, ont droit aux prestations complémentaires cantonales (art. 2 et 4 LPCC). Le montant de la prestation complémentaire correspond à la différence entre les dépenses reconnues et le revenu déterminant du requérant (art. 15 al. 1 LPCC).

L’art. 5 LPCC prévoit que le revenu déterminant est calculé conformément aux règles fixées dans la loi fédérale et ses dispositions d'exécution, moyennant certaines adaptations. Ainsi, les prestations complémentaires fédérales doivent être ajoutées au revenu déterminant (let. a). Par ailleurs, en dérogation à l'art. 11, al. 1, let. c, de la loi fédérale, la part de la fortune nette prise en compte dans le calcul du revenu déterminant est d’un cinquième pour les bénéficiaires de rentes de vieillesse, et ce après déduction, notamment, des franchises prévues par cette disposition (let. c n° 1).

Selon l’art. 6 LPCC, les dépenses déductibles sont celles énumérées par la loi fédérale et ses dispositions d'exécution, à l'exclusion du montant destiné à la couverture des besoins vitaux, remplacé par le montant destiné à garantir le revenu minimum cantonal d'aide sociale défini à l'art. 3.

6.2 À Genève, la dépense relative aux primes d’assurance-maladie est prise en charge par le SAM, sous la forme d’un subside pour le paiement des primes de l’assurance obligatoire des soins. Ce système reste conforme à l’art. 10 al. 3 let. d LPC (voir Jöhl, op.cit., n° 152 p. 1737 ss).

Jusqu'au 30 juin 2015, l'art. 22 al. 6 LaLAMal prévoyait ainsi que les bénéficiaires de prestations complémentaires à l'AVS/AI avaient droit à un subside égal au montant de leur prime d'assurance obligatoire des soins, mais au maximum au montant correspondant à la prime moyenne cantonale fixée par le département fédéral de l'intérieur.

Depuis le 1er juillet 2015, cette même disposition prévoit que les bénéficiaires d'une prestation annuelle, fédérale et/ou cantonale, complémentaire à l'AVS/AI versée par le service ont droit à un subside égal au montant de leur prime d'assurance obligatoire des soins, mais au maximum au montant correspondant à la prime moyenne cantonale fixée par le Département fédéral de l'intérieur. Les personnes qui ont un excédent de ressources inférieur à la prime moyenne cantonale ont droit à un subside équivalent à la différence entre la prime moyenne cantonale et l'excédent de ressources.

Malgré la modification de l’art. 22 al. 6 LaLaMal entrée en vigueur le 1er juillet 2015, le SPC procédait, jusqu’au 31 décembre 2020, au calcul des dépenses du bénéficiaire sans prendre en considération les primes d’assurance-maladie, puis il admettait le droit au subside en fonction du montant de l’excédent de ressources, afin que le SAM dispose de la possibilité de payer directement la somme due à l’assurance (ATAS/1251/2012 du 16 octobre 2012 consid. 9a). Selon cette pratique, les assurés avaient droit à la couverture de leur prime d’assurance-maladie, à concurrence du maximum de la prime moyenne si, malgré l’absence du droit aux prestations complémentaires elles-mêmes, les excédents de revenus étaient inférieurs au montant de la prime annuelle moyenne d’assurance-maladie, dès lors que cette prime n’était pas prise en compte au titre de dépenses par l'intimé (ATAS/262/2011 du 17 mars 2011 consid. 5f). Ils avaient également droit au remboursement des frais de maladie.

Comme l’a déjà relevé la chambre de céans (ATAS/1251/2012 du 16 octobre 2012 consid. 9a), cette manière de procéder était contestable, dans la mesure où les dispositions légales applicables prévoyaient expressément la prise en considération, à titre de dépenses, de la prime d’assurance-maladie moyenne payée dans le canton en question.

Dans la mesure où le bénéficiaire de prestations complémentaires pouvait également prétendre à la prise en charge des frais de maladie et d’invalidité, la chambre de céans a relevé, toujours dans l’arrêt précité, que la décision du SPC aurait dû expressément reconnaître le droit aux prestations du requérant mais indiquer que celles-ci allaient lui être versées, à tout le moins partiellement, sous forme d’un subside total directement payé à l’assureur-maladie.

Depuis le 1er janvier 2021, les décisions du SPC incluent les primes d’assurance-maladie.

7.             À teneur de l’art. 54a al. 4 OPC-AVS/AI, en cas de changement de domicile du bénéficiaire de prestations complémentaires, le canton compétent pour verser la prestation complémentaire – montant forfaitaire pour l’assurance obligatoire des soins compris – est :

a. l’ancien canton de domicile, jusqu’à l’extinction du droit à la prestation complémentaire mensuelle ;

b. le nouveau canton de domicile, à compter du début du droit à la prestation complémentaire mensuelle.

8.             Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; ATF 126 V 353 consid. 5b ; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

9.              

9.1 En l’espèce, dans sa décision de restitution du 18 juillet 2022, l’intimé a recalculé le droit aux prestations complémentaires du couple, selon deux méthodes différentes :

-          pour la période du 1er février 2020 au 31 décembre 2020, le service intimé a appliqué sa pratique alors en vigueur et n’a pas pris en considération les primes d’assurance-maladie au chapitre des dépenses ;

-          pour la période du 1er janvier 2021 au 30 avril 2022, le service intimé a pris en considération les primes d’assurance-maladie à titre de dépenses.

Le montant réclamé en restitution s’élève à CHF 25'418.-, soit :

-          CHF 10'230.- pour la période du 1er février au 31 décembre 2020, ce qui correspond à l’intégralité des prestations complémentaires stricto sensu versées ;

-          CHF 11'388.- pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2021 ;

-          CHF 3'800.- pour la période du 1er janvier au 30 avril 2022.

La recourante conteste la pratique appliquée par le SPC pour le calcul des prestations complémentaires dues pour l’année 2020 et conclut à la prise en considération de la prime moyenne de l’assurance-maladie obligatoire des soins au chapitre des dépenses.

De son côté, l’intimé estime que sa pratique de l’époque était conforme au droit et que, dans l’hypothèse où la prime moyenne devait tout de même être intégrée dans le calcul, il conviendrait alors de prendre en considération, à titre de revenus, le subside versé par l’OVAM.

9.2 La pratique du SPC en vigueur jusqu’au 31 décembre 2020 a été qualifiée de contestable par la chambre de céans (voir ci-dessus consid. 6.2). Le système selon lequel la dépense relative aux primes d’assurance-maladie est prise en charge par le SAM sous la forme d’un subside pour le paiement des primes de l’assurance obligatoire des soins a été considéré, par la chambre de céans, comme étant conforme à l’art. 10 al. 3 let. d LPC (ATAS/752/212 du 31 juillet 2013 consid. 7, 1er paragraphe).

10.         Dans le cas d’espèce, comme cela ressort du dossier, la recourante et feu son époux ont bénéficié d’une réduction de primes à 100%, versée par l’OVAM pour l’année 2020 (cf. courriel du SAM du 9 février 2023 annexé au courrier du SPC du 16 février 2023 et courrier de la recourante du 11 octobre 2023, à tout le moins en ce qui concerne les primes de feu son époux).

Certes, la recourante et feu son mari n’ont pas perçu personnellement les subsides versés par l’OVAM. Ils en ont cependant tiré avantage, dès lors qu’à défaut de subsides, ils auraient dû s’acquitter des primes d’assurance-maladie.

Cet avantage doit, par conséquent, être intégré, d’une manière ou d’une autre, dans le calcul des prestations complémentaires.

Il faut constater que la réduction de prime concernant la recourante et feu son époux a été versée à leur assureur-maladie par l’OVAM pour toute l’année 2020. Dans la mesure où les subsides n’ont pas été payés par le SAM, qui est l’organisme compétent selon la pratique dans le canton de Genève, leurs versements doivent être pris en considération dans les plans de calcul comme des « autres prestations périodiques ». Le Tribunal fédéral a déjà statué, en ce sens qu’il a qualifié la gratuité du logement d'« autres prestations périodiques » au sens de l'art. 11 al. 1 let. d LPC (consid. 3.3.3) ou encore dans son arrêt 9C_511/2013 du 8 mai 2013, dans lequel il a considéré que dans la mesure où la bénéficiaire de prestations complémentaires n'avait pas de frais de logement, il n'y avait aucune raison de prendre en considération un loyer à titre de dépense reconnue. À défaut, il faudrait tenir compte simultanément, au titre d'une autre prestation périodique, de l'entretien gratuit dont elle bénéficie (consid. 3.3).

Ce raisonnement doit s’appliquer mutatis mutandis aux primes d’assurance-maladie.

Ainsi, soit on procède exceptionnellement comme l’a fait le SPC, en n’intégrant pas les primes d’assurance-maladie dans les dépenses.

Soit, on intègre les primes d’assurance-maladie dans les dépenses et l’on tient compte, simultanément, des réductions de primes versées par l’OVAM au titre d’autres prestations périodiques, Dans cette hypothèse, pour la période du 1er février au 31 décembre 2020, la situation est la suivante :

 

 

PCF

PCC

Dépenses reconnues

 

 

 

Besoins/forfait

 

29'175.00

38'811.00

Loyer net

 

15'000.00

15'000.00

Primes d’assurance-maladie

 

14'448.00

14'448.00

Total dépenses reconnues

58'623.00

68'259.00

 

 

 

 

Revenu déterminant

 

 

 

Prestations de l’AVS

42'660.00

42'660.00

Fortune (186.00)

 

0.00

0.00

Rente LPP

11'386.80

11'386.80

Autres prestations périodiques

14'448.00

14'448.00

Total revenu déterminant

68'494.80

68'494.80

 

 

 

 

Dépenses reconnues - revenu déterminant

- 9'871.80

- 235.80

Les ressources sont suffisantes pour couvrir les dépenses reconnues, y compris les primes d’assurance-maladie. Aucune prestation complémentaire stricto sensu n’est donc due.

Le résultat serait similaire si l’on devait procéder en prenant en considération le changement de compétence pour le versement des prestations conformément à l’art. 54a al. 4 OPC-AVS/AI et considérer que le SAM aurait dû rembourser à l’OVAM les subsides que celui-ci a versés.

Ainsi, le calcul serait le suivant :

 

 

 

PCF

PCC

Dépenses reconnues

 

 

 

Besoins/forfait

 

29'175.00

38'811.00

Loyer net

 

15'000.00

15'000.00

Primes d’assurance-maladie

 

14'448.00

14'448.00

Total dépenses reconnues

58'623.00

68'259.00

 

 

 

 

Revenu déterminant

 

 

 

PCF

 

 

4'576,20

Prestations de l’AVS

42'660.00

42'660.00

Fortune (186.00)

 

0.00

0.00

Rente LPP .

11'386.80

11'386.80

Total revenu déterminant

54'046.80

58'623.00

 

 

 

 

Dépenses reconnues - revenu déterminant

4'576.20

9'636.00

 

Dans cette hypothèse, la recourante et feu son époux auraient certes eu droit à des prestations complémentaires tant fédérales que cantonales, pour un montant total de CHF 14'212,20, comme la recourante le réclame dans son écriture du 7 décembre 2022. Cependant, dans la mesure où la prime moyenne s’élève à CHF 14'448.-, le montant de CHF 14'212,20 aurait dû être versé directement à l’assureur-maladie des époux, conformément à l'art. 21a LPC. Or, comme lesdites primes ont été acquittées par le bais d’un subside versé par l’OVAM, c’est à cet office que le SAM aurait dû verser les prestations complémentaires en remboursement des avances.

Ainsi, dans ce cas également, la recourante et son époux n’auraient pas pu prétendre à des prestations complémentaires stricto sensu, sauf à voir leurs primes d’assurance-maladie couvertes par deux fois.

Il ressort donc de ce qui précède que même en intégrant les primes d’assurance-maladie dans les dépenses, la recourante et son époux ne pouvaient pas prétendre à des prestations complémentaires stricto sensu pour la période du 1er février au 31 décembre 2020. Dans cette mesure, les prestations complémentaires versées pendant cette période l’ont été à tort et la recourante, en tant que bénéficiaire directe desdites prestations, est tenue de les restituer.

La décision sur opposition querellée doit donc être confirmée, étant encore précisé que la recourante ne formule aucune autre critique.

11.         Au vu de ce qui précède, le recours est rejeté.

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario et 89H al. 1 LPA).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Nathalie KOMAISKI

 

La présidente

 

 

 

 

Marine WYSSENBACH

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le