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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2865/2021

ATAS/805/2022 du 14.09.2022 ( PC ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2865/2021 ATAS/805/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 14 septembre 2022

4ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée au PETIT-LANCY, représentée par INCLUSION HANDICAP

 

 

recourante

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES, sis route de Chêne 54, GENÈVE

intimé

 


 

EN FAIT

A. a. Madame A______ (ci-après : l’intéressée ou la recourante), née le ______ 1978 et mère de deux filles nées le ______ 2008 et le ______ 2011, est au bénéfice d’une rente entière d’invalidité depuis le 1er septembre 2013, selon une décision de l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève du 25 novembre 2013. Elle a également droit à des rentes pour enfants liées pour ses deux filles, B______, née le ______ 1978 et C______, née le ______ 2008.

b. Le 8 novembre 2019, le service des prestations complémentaires (ci-après : le SPC ou l’intimé) a entrepris une révision périodique de son dossier.

c. Le 5 décembre 2020, le SPC a informé l’intéressée que l’année 2021 était une année charnière pour les bénéficiaires de prestations complémentaires en raison de l’entrée en vigueur au 1er janvier 2021 de la réforme de la loi fédérale sur les prestations complémentaires, applicable également en matière de prestations complémentaires cantonales, qui modifiait la prise en compte de diverses ressources et charges dans le calcul du montant des prestations.

d. Par décision du 5 décembre 2020, le SPC a informé l’intéressée avoir recalculé le montant de ses prestations dès le 1er janvier 2021, en tenant compte notamment de l’indexation des barèmes destinés à la couverture des besoins vitaux, des montants des primes moyennes cantonales de l’assurance-maladie pour l’année 2021 dans les dépenses (ancien droit) ainsi que de l’entrée en vigueur le 1er janvier 2021 de la réforme de la loi fédérale sur les prestations complémentaires (réforme PC), également applicable en matière de prestations complémentaires cantonales (PC nouveau droit). Le SPC constatait que le calcul du montant des prestations selon le nouveau droit était défavorable à l’intéressée. Si la réforme précitée était appliquée, le montant des prestations serait inférieur à celui calculé selon l’ancien droit, voire le droit aux prestations devrait être supprimé.

Cependant, pour les personnes déjà au bénéfice de prestations complémentaires au 1er janvier 2021, les prestations étaient calculées en application de l’ancien droit au plus tard jusqu’au 31 décembre 2023, si l’application des nouvelles dispositions entraînait leur diminution ou leur suppression. En conséquence, le calcul du montant des prestations était effectué en application de la loi qui était en vigueur avant le 1er janvier 2021. Son droit aux prestations dès le 1er janvier 2021 s’élevait à CHF 1'400.- par mois.

À teneur du plan de calcul des prestations complémentaires favorable dès le 1er janvier 2021, le SPC avait notamment pris en compte un loyer net de CHF 22'020.- et des charges locatives de CHF 6'000.- dans le montant présenté et de CHF 9'340.- pour prestations complémentaires fédérales (ci-après : PCF) et cantonales (ci-après : PCC). Sous commentaires, il était indiqué que les filles de l’intéressée étaient exclues des prestations complémentaires fédérales et cantonales (ci-après PCF et PCC), leurs ressources excédent leurs dépenses reconnues.

Selon son plan de calcul des prestations complémentaires défavorable, dès le 1er janvier 2021, le SPC avait pris en compte un loyer net de CHF 22'020.- et des charges locatives de CHF 6'000.- dans le montant présenté et CHF 9'340.- sous PCF et CHF 18'680.- sous PCC.

e. Le 24 novembre 2020, l’intéressée a informé le SPC qu’elle faisait un stage non rémunéré auprès de D______ SA, qui lui proposait un contrat de travail à durée indéterminée à 25% dès le 1er décembre 2020.

f. Le 8 janvier 2021, l’intéressée a transmis au SPC son contrat de travail pour un emploi à durée indéterminée de 15% pour D______ SA dès le 4 janvier 2021 pour un salaire brut de CHF 614.-.

g. Le 22 janvier 2021, l’intéressée a formé opposition à la décision du 5 décembre 2020. Elle contestait le loyer retenu à hauteur à hauteur de CHF 9'340.- faisant valoir que c’était le montant de CHF 13'200.- qui devait être retenu, dès lors qu’il y avait lieu d’appliquer l’ancien droit en vigueur jusqu’au 31 décembre 2020, puisqu’il lui était plus favorable. Ce montant serait du reste encore plus élevé en fonction des nouvelles règles depuis le 1er janvier 2021.

h. Par décision du 3 mars 2021, le SPC a informé l’intéressée avoir recalculé son droit aux prestations complémentaires. Le calcul du montant des prestations était effectué en application des dispositions entrées en vigueur le 1er janvier 2021 dès lors qu’elles étaient plus favorables que le droit en vigueur jusqu’au 31 décembre 2020. Le calcul des prestations laissait apparaître un trop-versé pour la période rétroactive, soit les prestations versées en trop du 1er décembre 2020 au 31 mars 2021, dont le remboursement lui était demandé.

À teneur du plan de calcul des prestations complémentaires pour la période du 1er au 31 décembre 2020, le SPC avait pris en compte un loyer de CHF 22'020.- et CHF 6'000.- de charges locatives sous montant présenté et CHF 13'200.- sous PCF et PCC. Sous commentaires, il était indiqué que les filles de l’intéressée étaient exclues des prestations complémentaires fédérales et cantonales (ci-après PCF et PCC), leurs ressources excédant leurs dépenses reconnues.

Pour la période courant dès le 1er janvier 2021, selon le plan de calcul favorable, le SPC avait pris en compte, dans son plan de calcul favorable (selon la réforme PC 21) un loyer de CHF 22'020.- et CHF 6'000.- de charges locatives sous montant présenté et CHF 9'340.- sous PCF et CHF 18'680.- sous PCC. Il avait pris en compte, dans son plan de calcul défavorable (selon la réforme PC 21) un loyer de CHF 22'020.- et CHF 6'000.- de charges locatives sous montant présenté et CHF 9'340.- sous PCF et CHF 15'000.- sous PCC. Sous commentaires, il était précisé que le montant du loyer retenu tenait compte du nombre de personnes partageant le logement ainsi que du nombre de personnes pris en compte dans le calcul de son dossier. Il était précisé que C______ était exclue des PCF et PCC et que sa sœur était exclue des PCF seulement.

i. Le 11 mars 2021, le SPC faisant suite à un courrier du mandataire de l’intéressée a confirmé qu’il avait appliqué l’ancien droit dans sa décision du 11 décembre 2020. Concernant la prise en compte du loyer de l’intéressée dès le 1er janvier 2021, le SPC avait appliqué le droit indépendamment du calcul favorisé. En effet, ses deux filles étant exclues du calcul des PCF et/ou PCC, un calcul individuel était appliqué pour chaque ayant droit. Ainsi la somme du montant pris en compte était divisée par le nombre de personnes vivant dans le foyer. Dès lors, c’était à juste titre que la décision tenait compte d’un loyer proportionnel dans le calcul des prestations (loyer : CHF 22'020.- + charges : CHF 6'000.- = CHF 28'020.- / 3 personnes = CHF 9'340.-).

j. Le 19 avril 2021, l’intéressée a formé opposition à la décision du SPC du 3 mars 2021, contestant le loyer pris en compte de CHF 9'340.-, car il y avait lieu de prendre en compte un loyer de CHF 13'200.- avec l’application de l’ancien droit, qui était plus favorable.

k. Le 27 avril 2021, le SPC a reçu de l’assistante sociale de l’intéressée un courrier adressé à celle-ci le 25 mars 2021 par la Caisse Inter-Entreprises de Prévoyance Professionnelle (CIEPP) faisant référence à sa correspondance du 8 janvier 2021, qui confirmait son début d’activité auprès de la société D______ SA. Conformément aux dispositions légales et réglementaires en matière de surindemnisation, elle devait vérifier que le cumul des revenus à prendre en compte ne dépasse pas le 90% du gain dont on pouvait présumer que l’intéressée était privée. Ainsi, elle avait procédé à un calcul de surindemnisation en tenant compte des rentes versées par l’assurance-invalidité ainsi que du salaire réalisé auprès de son nouvel employeur depuis janvier 2021 sur la base du contrat de travail reçu. Le cumul de ces revenus pris en considération accentuait les effets de la surindemnisation, ce qui l’amenait à devoir réduire le montant des prestations qu’elle pouvait lui verser. Ainsi, dès le 1er janvier 2021, sa rente annuelle d’invalidité s’élevait à CHF 2'426.- et chaque rente d’enfant d’invalide à CHF 492.-. Dans la mesure où la caisse lui avait déjà versé des rentes durant la période de janvier à mars 2021, il en ressortait un solde en faveur de la caisse de CHF 2'022.-. Elle ne lui verserait pas la rente d’invalidité de CHF 203.- par mois rétroactivement au 1er janvier 2021 en compensation avec les prestations versées indûment. Ainsi sa rente ne pourrait lui être versée à nouveau qu’à partir du mois de décembre 2028 (soit au terme de la compensation). Elle ne procédait pas à une retenue sur les rentes des enfants et celles-ci lui seraient versées dès le 1er mars 2021 pour un montant total mensuel de CHF 82.-.

l. Par décision sur opposition du 28 juin 2021, le SPC a rejeté les oppositions formées contre ses décisions du 5 décembre 2020 et du 3 mars 2021.

B. a. Le 30 août 2021, l’intéressée a formé recours contre la décision sur opposition précitée auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice, faisant valoir que l’intimé n’aurait pas dû tenir compte d’un loyer proportionnel et qu’il ne pouvait pas lui réclamer le remboursement du montant de CHF 1'510.- ni lui reconnaître seulement le droit à des PCC à hauteur de CHF 794.-.

b. Le 29 septembre 2021, l’intimé a conclu au rejet du recours.

c. La recourante a répliqué.

d. Les parties ont été entendue lors d’une audience du 11 mai 2022.

e. Le 19 mai 2022, la recourante a persisté dans ses conclusions et dit que le fait qu’aucun revenu ne devait être pris en compte pour le mois de décembre 2020 et que le décompte de l’institution de prévoyance du 25 mars 2021 devait être pris en compte était admis par les deux parties.

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Les dispositions de la LPGA s’appliquent aux prestations complémentaires fédérales à moins que la LPC n’y déroge expressément (art. 1 al. 1 LPC). En matière de prestations complémentaires cantonales, la LPC et ses dispositions d’exécution fédérales et cantonales, ainsi que la LPGA et ses dispositions d’exécution, sont applicables par analogie en cas de silence de la législation cantonale (art. 1A LPCC).

3.             Interjeté dans les forme et délai légaux, le recours est recevable (art. 60 al. 1 LPGA, art. 9 de la loi cantonale du 14 octobre 1965 sur les prestations fédérales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité [LPFC ; J 4 20], art. 43 LPCC et 89B de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ; LPA - E 5 10).

4.             Le litige porte sur le bien-fondé de la prise en compte par l’intimé dans la décision querellée d’un loyer proportionnel pour la recourante et ses deux filles mineures.

5.              

5.1  

5.1.1 La recourante a fait valoir dans son opposition du 19 avril 2021 que c’était un loyer de CHF 13'200.- qui devait être retenu dans les calculs du SPC, en application de l’ancien droit en vigueur jusqu’au 31 décembre 2020, qui lui était plus favorable. Dans son recours, elle a invoqué que selon la jurisprudence fédérale, il y avait des exceptions au principe du partage du loyer. Dans son cas, ses deux filles étaient âgées de 9 et 12 ans et elle avait une obligation d’entretien envers elles. Elle ne voyait pas quelle aide spécifique de l’État entrerait en ligne de compte pour l’entretien de ses filles mineures et aucun organisme n’était tenu de payer la part de loyer proportionnel mise à leur charge. L’intimé n’aurait donc pas dû prendre en compte un loyer proportionnel.

5.1.2 L’intimé a fait valoir que jusqu’au 31 décembre 2020, lorsqu’un enfant était exclu des calculs de prestations complémentaires à l’AVS/AI, il tenait compte dans ses calculs du loyer effectif plafonné à CHF 13'200.- (montant annuel maximal pour les personnes seules). Cette manière de faire, favorable aux assurés, était cependant contraire au droit. En effet, le SPC aurait dû tenir compte d’un loyer proportionnel. Dès le 1er janvier 2021, il avait décidé de se conformer strictement à la législation, qui n’avait pas changé sur ce point, que soit applicable l’ancien ou le nouveau droit en fonction de la situation des assurés au regard des règles transitoires. Dans le cas de la recourante, le maintien de l’ancien droit, tel qu’il devait être correctement appliqué et non comme il l’était par erreur jusqu’au 31 décembre 2020 lui était favorable. Comme ses filles étaient exclues des calculs des prestations complémentaires à l’assurance-invalidité, car leurs ressources excédaient leurs dépenses reconnues, un loyer proportionnel d’un tiers avait été pris en compte. Une mauvaise application de l’ancien droit jusqu’au 31 décembre 2020 ne conférait pas de droit acquis à partir du 1er janvier 2021.

Le loyer proportionnel retenu se fondait sur le droit applicable et la part de loyer imputée à chaque enfant était couverte par leurs propres ressources (rentes pour enfant de l’assurance-invalidité et de la loi sur la prévoyance professionnelle, allocations familiales et pension alimentaire).

5.2  

5.2.1 Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la réforme PC 2021. Selon la disposition transitoire relative à la modification du 22 mars 2019 (réforme des PC), l’ancien droit reste applicable pendant trois ans à compter de l’entrée en vigueur de la modification aux bénéficiaires de prestations complémentaires pour lesquels la réforme des PC entraîne, dans son ensemble, une diminution de la prestation complémentaire annuelle ou la perte du droit à la prestation complémentaire annuelle.

5.2.2 Aux termes de l'art. 16c de l’ordonnance sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 15 janvier 1971 (OPC-AVS/AI - RS 831.301), qui n’a pas été modifié dans le cadre de la réforme PC, lorsque des appartements ou des maisons familiales sont aussi occupés par des personnes non comprises dans le calcul des prestations complémentaires, le loyer doit être réparti entre toutes les personnes. Les parts de loyer des personnes non comprises dans le calcul des prestations complémentaires ne sont pas prises en compte lors du calcul de la prestation complémentaire annuelle (al. 1). En principe le montant du loyer est réparti à parts égales entre toutes les personnes (al. 2).

Cette disposition est conforme à la loi, dans la mesure où elle vise à empêcher le financement indirect de personnes non comprises dans le calcul des prestations complémentaires (ATF 127 V 16).

Selon la jurisprudence, le critère déterminant est le logement commun, indépendamment du fait de savoir s'il y a bail commun ou si l'un des occupants paie seul le loyer (ATF 127 V 10 consid. 6b).

Des dérogations sont toutefois admises à la règle générale de la répartition du montant du loyer à parts égales, avec prudence pour éviter le risque de graves abus (ATF 105 V 271 consid. 2). En effet, l'art. 16c OPC vise à empêcher que les prestations complémentaires aient également à « intervenir à l'endroit de personnes qui ne sont pas comprises dans le calcul des prestations complémentaires » (VSI 1998 p. 34).

Il peut ainsi se présenter des situations où un intéressé a des motifs valables de supporter à lui seul le loyer, bien qu'il partage l'appartement avec un tiers, et de ne demander à ce tiers aucune participation. Ces motifs sont d'ordre juridique (obligation d'entretien de droit civil). Ils peuvent également être d'ordre moral (ATF 105 V 271 consid. 2). Ainsi, une exception à la règle doit en tous les cas intervenir si la cohabitation (non pécuniaire) découle d'une obligation d'entretien du droit civil. À défaut, une répartition du loyer devrait être opérée même dans l'hypothèse où le bénéficiaire de prestations complémentaires ferait ménage commun avec ses propres enfants mineurs (non compris dans le calcul des prestations complémentaires). Sinon, il en résulterait une inégalité de traitement flagrante, puisque des assurés avec enfants sans droit à la rente seraient désavantagés non seulement par rapport aux assurés sans enfants, mais en règle générale également envers les assurés dont les enfants auraient droit à une rente (arrêt du Tribunal fédéral des assurances P.56/00 du 5 juillet 2001 in Pratique VSI 5/2001, p. 237).

Par arrêt du 21 novembre 2012, la chambre de céans a estimé qu'une bénéficiaire de prestations n'avait pas un devoir moral envers sa fille majeure et sa petite-fille qui partageaient son logement, dès lors que sa fille pouvait s'adresser, en dernier ressort, à l'Hospice général pour subvenir à son entretien et à celui de sa fille (ATAS/1396/2012). La chambre de céans a également estimé qu'une bénéficiaire, qui partageait son logement avec sa fille et sa petite-fille, n'était tenue envers sa fille, ni à une obligation d'entretien, ni à une obligation d'ordre moral (ATAS/28/2007 du 17 janvier 2007).

5.2.3 Selon la jurisprudence, le principe de la légalité de l’activité administrative prévaut sur celui de l’égalité de traitement. Par conséquent, le justiciable ne peut généralement pas invoquer une inégalité devant la loi, lorsque celle-ci est correctement appliquée à son cas, alors qu’elle l’aurait été faussement, voire pas appliquée du tout, dans d’autres cas (ATF 134 V 34 consid. 9 p. 44 et les références). Cela suppose cependant, de la part de l’autorité dont la décision est attaquée, la volonté d’appliquer correctement à l’avenir les dispositions légales en cause. Autrement dit, le justiciable ne peut prétendre à l’égalité dans l’illégalité que s’il y a lieu de prévoir que l’administration persévérera dans l’inobservation de la loi. Encore faut-il que les situations à considérer soient identiques ou du moins comparables (ATF 126 V 390 consid. 6a ; ATF 116 V 231 consid. 4b ; ATF 115 Ia 81 consid. 2 et les références citées).

Dans un arrêt du 27 janvier 2022 (ATAS/60/2022 consid. 10), la chambre de céans a eu à juger un cas relatif à la prise en compte des primes d'assurance-maladie, dans lequel le SPC avait appliqué l’ancien droit non tel qu’il était appliqué en pratique, mais tel qu’il devait l’être selon la loi. Elle a considéré qu’en l’occurrence, rien ne laissait supposer que l'intimé continuerait à appliquer son ancienne pratique dans d'autres cas et que nonobstant le fait que cette ancienne pratique était plus favorable au recourant, celui-ci ne pouvait s'en prévaloir dès lors qu'elle était contraire à la loi.

5.3  

5.3.1 En l’espèce, il résulte de la jurisprudence précitée que la recourante ne peut se prévaloir de l’ancienne pratique de l’intimé en matière de prise en compte du loyer, dès lors que celle-ci était contraire à la loi et que la nouvelle pratique de l’intimé, conforme à la loi, est durable, puisqu’il a indiqué avoir fait le choix de respecter la loi dorénavant.

5.3.2 Le bien-fondé de la décision de l’intimé doit ainsi être examiné au regard de l’art. 16a OPC-AVS et de la jurisprudence rendue en la matière. En l’espèce, dans la mesure où les filles mineures de la recourante ne sont pas comprises dans le calcul de prestations complémentaires et qu’elles sont bénéficiaires de rentes de l’assurance-invalidité et de la prévoyance professionnelle, ainsi que des allocations familiales et d’une pension alimentaire, la recourante n'était pas tenue envers elles à une obligation d'entretien, ni à une obligation d'ordre moral. Il en résulte que les conditions d’une exception à la règle - selon laquelle les parts de loyer des personnes non comprises dans le calcul des prestations complémentaires ne sont pas prises en compte lors du calcul de la prestation complémentaire annuelle - n’étaient pas remplies et que le montant du loyer devait être réparti à parts égales entre la recourante et ses filles, en application de l’art. 16c al. 2 OPC-AVS/AI. La décision de l’intimé doit ainsi être confirmée s’agissant du montant du loyer.

5.4 La créance en restitution étant fondée dans son principe, encore faut-il examiner si le droit de l’intimé d’exiger la restitution n’était pas prescrit.

5.4.1 Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA.

5.5 Aux termes de l’art. 25 al. 2 LPGA, entré en vigueur le 1er janvier 2021, le droit de demander la restitution de prestations indûment touchées s’éteint un an après le moment où l’institution d’assurance a eu connaissance du motif de restitution, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation. Si la créance naît d’un acte punissable pour lequel le droit pénal prévoit un délai plus long, celui-ci est déterminant.

Selon l’art. 25 al. 2 1ère phrase LPGA dans sa teneur jusqu’au 31 décembre 2020, le droit de demander la restitution s'éteint trois ans après le moment où l'institution d’assurance a eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation.

Dans la mesure où la demande de restitution porte sur les prestations perçues à tort entre décembre 2020 et mars 2021, soit partiellement sur une période antérieure à l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2021 de l’art. 25 al. 2 LPGA, la demande de restitution est soumise à l'ancien droit pour les prestations perçues en décembre 2020, en l'absence de dispositions transitoires prévoyant une application rétroactive du nouveau droit, et au nouveau droit pour les prestations versées en 2021.

Au niveau cantonal, l'art. 24 al. 1 1ère phrase LPCC prévoit que les prestations indûment touchées doivent être restituées.

L'art. 14 du règlement relatif aux prestations cantonales complémentaires à l'assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité du 25 juin 1999 (RPCC-AVS/AI - J 4 25.03) précise que le SPC doit demander la restitution des prestations indûment touchées au bénéficiaire, à ses héritiers ou aux autres personnes mentionnées à l'art. 2 OPGA appliqué par analogie (al. 1). Il fixe l'étendue de l'obligation de restituer par décision (al. 2).

5.6 En l’espèce, l’intimé a demandé la restitution le 3 mars 2021, pour les prestations versées en trop après avoir recalculé les prestations de la recourante en raison du début de son activité lucrative dont il a été informé par courrier de celle-ci du 8 janvier 2021, les délais de péremption d’un an selon l’ancien droit, et de deux ans selon le nouveau droit, n’étaient pas périmés. Le délai de péremption de cinq ans n’était pas non plus périmé, les prestations en cause ayant été versées entre le 1er décembre 2020 et le 31 mars 2021.

6.              

6.1 Les parties se sont déclarées d’accord sur le fait que la recourante a commencé à toucher un salaire en janvier 2021 et non en décembre 2020, comme cela avait été retenu dans la décision du 3 mars 2021, et sur le fait que cette décision devait être révisée pour tenir compte du décompte LPP du 25 mars 2021.

6.2 Selon l'art. 50 al. 1 LPGA, les litiges portant sur des prestations d'assurances sociales peuvent être réglés par transaction, y compris durant la procédure de recours (al. 3).

La décision par laquelle le juge des assurances sociales appelé à se prononcer sur une convention conclue par les parties en vertu de cette disposition doit s’assurer que rien ne s’oppose à l’approbation de la transaction, du point de vue de la concordance des volontés des parties à mettre fin à la procédure de cette manière comme de l’adéquation de son contenu à l’état de fait de la cause et de sa conformité aux dispositions légales applicables (ATF 135 V 65).

En l'espèce, les parties ont réglé une partie du litige par un accord. Cette transaction paraissant conforme au droit fédéral, sur la base des pièces au dossier et des arguments des parties, il convient d'en prendre acte.

6.3 Au vu de l’accord de l’intimé de réviser sa décision, il se justifie d’annuler la décision querellée en tant qu’elle concerne la décision du 3 mars 2021 et de renvoyer la cause à l’intimé pour nouvelle décision, et de confirmer la décision sur opposition du 28 juin 2021, pour le surplus.

7.             Le recours n’est que très partiellement admis, de sorte que des dépens limités seront accordés à la recourante (art. 61 let. g LPGA).

8.             La procédure est gratuite (art. 61 let. fbis a contrario LPGA).


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet très partiellement.

3.        Prend acte de l’accord intervenu entre les parties.

4.        Annule la décision sur opposition du 28 juin 2021 en tant qu’elle concerne la décision du 3 mars 2021 et renvoie la cause à l’intimé pour nouvelle décision, au sens des considérants.

5.        Confirme cette décision pour le surplus.

6.        Alloue à la recourante CHF 500.- à titre de dépens, à la charge de l’intimé.

7.        Dit que la procédure est gratuite.

8.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le