Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public
ATA/1387/2024 du 26.11.2024 ( CPOPUL ) , REJETE
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
| POUVOIR JUDICIAIRE A/247/2024-CPOPUL ATA/1387/2024 COUR DE JUSTICE Chambre administrative Arrêt du 26 novembre 2024 1ère section |
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dans la cause
A______ recourant
contre
DÉPARTEMENT DES INSTITUTIONS ET DU NUMÉRIQUE intimé
et
B______ appelée en cause
représentée par Me Anaïs BRODARD, avocate
A. a. A______, né le ______1969, et B______, née le ______1981, se sont mariés à C______ (Émirats Arabes Unis) le 11 septembre 2003.
b. Deux enfants sont issus de cette union : D______, née le ______2008 à Genève, et E______, né le ______2010 à Genève, tous deux de nationalité suisse.
c. Selon le registre de l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), A______, ressortissant libyen, a acquis la nationalité suisse par naturalisation le 15 juin 2004 à Genève, canton dans lequel il a résidé jusqu'à son départ pour le canton de Vaud le 31 mars 2007.
B______ est arrivée dans le canton de Genève le 25 septembre 2003 avant son départ pour le canton de Vaud le 30 mars 2007.
d. B______, binationale libyenne et britannique, a acquis la nationalité suisse par naturalisation en 2023.
e. Depuis le 1er mars 2021, les époux sont séparés.
f. Le 18 mars 2021, B______ a déposé une requête de mesures protectrices de l'union conjugale (ci-après : MPUC) auprès du Tribunal civil d'arrondissement de La Côte.
B. a. Le 16 août 2021, A______ a introduit auprès du Tribunal de F______ (Libye) une demande en validation de divorce prononcé par répudiation le 14 avril 2021.
b. Par jugement du 12 juin 2022, ce tribunal a validé le divorce par répudiation prononcé par A______ à l'égard de B______ en date du 17 avril 2021.
Selon la teneur de la traduction du jugement, A______ résidait à Genève et B______ au 48A, rue G______, commune 1______, Suisse. L'instruction de la demande avait donné lieu à la tenue de cinq audiences. Il ressort de ce jugement ce qui suit :
« Le Procureur de la République a intenté son action en vertu d'un procès-verbal sur lequel il a acquitté les frais judiciaires légalement prescrits, et a fait une notification valable au prévenu […]. Et à propos de la fissuration de la vie conjugale obligée de divorcer de sa femme le 17-04-2021, et d'intenter une action en justice pour prouver le divorce en application de […]. Il a conclu par une demande : le jugement de prouver et de valider le divorce signé par le demandeur, A______, sur son épouse, la défenderesse, B______, le ______2021, et le considérant comme le premier divorce irrévocable (étrémissible) mineur […]. Et puisque le plaignant s'était présenté en la personne de sa défense, l'avocate H______, le jugement contre lui se ferait en sa présence […], et puisque la défense du demandeur a déclaré, interrogé par le tribunal, que son client, le demandeur, avait répondu qu'il avait divorcé de son épouse le ______2021, qu'il s'agissait du premier divorce, et qu'il n'avait pas rendu l'épouse du défendeur après le divorce, et qu'il n'avait jamais divorcé auparavant, et que le mari de la défenderesse avait l'intention de divorcer, et que sa volonté était stable au moment du divorce de son épouse défenderesse, rendant le divorce valide et ferme […], et il s'agit d'un premier divorce en présence du mari et en l'absence de l'épouse qui ne s'est pas présentée et n'a pas comparu pour contester le droit du demandeur, qui vaut l'acceptation des demandes du demandeur […] ».
c. Le 18 octobre 2022, A______ a requis la légalisation du jugement libyen auprès de la représentation suisse à I______, dont la compétence s'étendait à la Libye.
d. Le 14 novembre 2022, le service état civil et légalisations (ci-après : SECL), anciennement le service état civil, naturalisations et légalisations, a reçu un acte de transmission de documents en provenance de la représentation suisse à I______ en vue de la reconnaissance et de la transcription du jugement libyen dans les registres d'état civil. Cette représentation observait ceci :
« Le respect des droits des deux parties : l'Ambassade ne peut confirmer avec certitude que les droits de l'épouse ont été préservés. Madame n'a pas été représentée par un avocat et n'a pas été présente personnellement à l'audience. Il est à noter qu'une confirmation de l'ouverture de cette décision à Madame est jointe au dossier. Madame aurait été informée par voie diplomatique.
Date de décision et date d'entrée en force : selon le jugement, Monsieur a répudié son épouse et le jugement en annexe n'a pour but que de valider ce divorce selon la loi islamique. Monsieur a répudié son épouse en date du ______2021, date effective du divorce selon ce jugement. C'est pour cette raison que la date de la décision vient après la date d'entrée en force qui a été confirmée rétroactivement.
Qualité de la traduction et données du [formulaire] 801 : les traductions contiennent des erreurs ou omettent certains passages. Toutes les données du 801 se basent donc sur les versions originales en langue arabe.
Documents originaux : les documents originaux ont été remis à cette représentation. En raison de la situation actuelle en Libye, il sera cependant difficile de se procurer un duplicata, raison pour laquelle les originaux ont été remis au client ».
e. Le 2 décembre 2022, B______ a contesté le bien-fondé du jugement libyen et sa reconnaissance en Suisse pour le motif que la procédure s'était déroulée à son insu. Elle relevait qu'une procédure de MPUC était encore pendante.
f. Le 13 février 2023, le SECL a sollicité de A______ la remise de citations à comparaître aux audiences, « lettres d'invitation » ou tout autre document prouvant que B______ avait été régulièrement citée ou avait participé à la procédure.
g. Le 23 février 2023, A______ a répondu que les parties à un divorce étaient automatiquement notifiées de l'ouverture d'une telle procédure par le ministère public libyen, comme cela ressortait du jugement auquel était jointe une attestation de sa notification en mains propres le 3 août 2022 à B______ au 48A, rue G______, commune 1______, Suisse.
h. Le 13 mars 2023, A______ a indiqué que, lors d'une audience de MPUC tenue le 10 mars 2023 devant le Tribunal d'arrondissement de La Côte, B______ avait reconnu avoir été valablement convoquée par le tribunal libyen. À teneur du procès-verbal, elle avait déclaré : « je sais qu'[A______] a pu se payer un avocat en Lybie parce qu'il a fait toutes les démarches là-bas et j'ai reçu le document du tribunal. Il est allé en Libye parce qu'il sait que je n'aurai aucun droit là-bas et qu'il obtiendrait tout ce qu'il voulait. Quand j'ai reçu la convocation, est-ce que je devais laisser mes enfants pour y aller ? Je ne pouvais pas faire ça, surtout pas pour participer à un jugement qui ne serait de toute manière pas équitable ».
i. Le 6 avril 2023, B______ a déposé une demande unilatérale de divorce auprès du Tribunal d'arrondissement de La Côte.
j. Le 25 mai 2023, à la suite de la demande de A______ qu'il rende une décision sur la reconnaissance du jugement libyen, le SECL lui a rappelé qu'il n'avait toujours pas transmis les copies des convocations de B______ aux audiences du tribunal libyen et qu'à défaut de ces documents, une attestation de ce tribunal indiquant la date, le lieu et le moyen de convocation aux audiences pouvait être produite.
k. Le 29 juin 2023, A______ a transmis, en guise d'ordre de convocation officiel notifié à B______, un document signé le 2 septembre 2021, et rédigé en arabe accompagné de ce qui semblait être une capture d'écran d'une version française traduite sur Google Lens. Ce document, ayant pour objet la convocation à une audience devant se tenir le 12 septembre 2021, mentionnait comme destinataire « J______demeurant en Suisse, Genève, rue G______, K______1______Ad ». Y étaient jointes trois quittances de courriers recommandés, deux émises le 10 septembre 2021 et une troisième le 23 novembre 2021.
l. Le 30 juin 2023, B______ a confirmé les déclarations tenues lors de l'audience du 10 mars 2023 relativement à la réception d'un document d'un tribunal libyen, en précisant s'être vue en réalité remettre le 13 septembre 2021 une copie de la demande en validation du divorce prononcé par A______. L'ordre de convocation officiel auquel se référait ce dernier ne lui était jamais parvenu, pas plus que la notification du jugement libyen.
m. Le 7 août 2023, le SECL a requis en vain auprès de l'ambassade de Libye à Berne des renseignements relatifs à l'envoi des courriers recommandés dont les quittances étaient jointes.
n. Le 18 août 2023, B______ a remis à la demande du SECL une copie originale, accompagnée d'une traduction de la demande en justice en vue de validation du divorce prononcé, reçue le 13 septembre 2021, lui enjoignant de se présenter à l'audience prévue le 12 septembre 2021 au tribunal libyen ayant prononcé le divorce. Était également produite une attestation de sa résidence au chemin de la G______ 48a, L______(VD).
o. Le 11 septembre 2023, A______ a fait parvenir au SECL une feuille sur laquelle celui-ci apportait des réponses aux questions posées par ce service par courrier du 8 août 2023 en rapport avec l'ordre de convocation officiel transmis le 29 juin 2023.
Selon ses indications, l'ordre de convocation avait été envoyé par le tribunal libyen au ministère des affaires étrangères libyen qui l'avait fait suivre à l'ambassade libyenne à Berne. Sur suggestion de son avocate libyenne, il avait pris contact avec cette ambassade qui lui avait confirmé l'envoi de la convocation à B______ par courriers recommandés et l'absence de retour à l'expéditrice, « ce qui signifiait que le nécessaire avait été bien envoyé ». C'était également l'ambassade qui lui avait transmis une copie de la lettre du ministère des affaires étrangères (transmis au SECL le 29 juin 2023) en lien avec la convocation de la mère de ses enfants ainsi qu'une copie des récépissés. Il n'avait pas pu obtenir une copie de la convocation elle-même puisqu'elle ne le concernait pas.
L'adresse bernoise mentionnée dans le courrier du service correspondait à l'office postal par lequel les envois avaient été effectués par l'ambassade.
Le courrier expédié par l'ambassade le 23 novembre 2021 contenait le jugement de divorce envoyé par voie diplomatique de l'ambassade de Suisse à I______ pour transmission à l'autorité d'état civil.
En complément d'information, il précisait que B______ avait reçu trois différents récépissés de l'ambassade à trois différentes dates et heures. Cette dernière avait produit le 18 août précédent une traduction officielle de l'ordre de convocation dont la validité devait être admise.
p. Le 9 novembre 2023, le Tribunal cantonal vaudois a confirmé, à la demande du SECL, qu'aucune demande de notification émanant de la Libye ne lui avait été adressée entre août 2021 et juin 2022 concernant B______.
q. À une date non indiquée, le SECL a, selon ses propres indications, interrogé l'office fédéral de la justice (ci-après : OFJ), lequel a confirmé qu'aucune demande de notification émanant de la Libye ne [lui] avait été adressée entre août 2021 et juin 2022 au sujet de B______.
r. Par décision du 21 décembre 2023, le département des institutions et du numérique (ci-après : DIN) a rejeté la demande de reconnaissance et de transcription du jugement libyen.
B______ résidait en Suisse depuis seize ans et avait acquis la nationalité suisse en 2023. A______ était naturalisé depuis 19 ans et vivait en Suisse depuis seize ans. Les deux enfants issus de leur union étaient tous deux de nationalité suisse et y résidaient. Les parties avaient donc des liens étroits avec la Suisse.
Le jugement libyen avait été rendu en l'absence de B______, de sorte qu'il s'agissait du prononcé d'un divorce unilatéral par défaut, procédure à laquelle elle n'avait pas consenti. La séparation de fait du couple s'était produite le 1er mars 2021 et la répudiation de B______, validée par le jugement, était intervenue le 14 avril 2021 (recte : le 17 avril 2021). Il en découlait que seuls 45 jours (recte : 47) s'étaient écoulés entre les deux événements. Le juge libyen n'avait pas procédé à un examen in concreto de la rupture du lien conjugal qui avait dès lors été présumée sur la seule base d'une séparation de fait inférieure à six mois. Le jugement libyen était de ce fait incompatible avec l'ordre public matériel suisse.
Aucune entraide judiciaire relative aux actes de procédure afférents au divorce prononcé le 12 juin 2022 par le tribunal libyen n'avait été mise en œuvre, si bien que la notification faite par les autorités judiciaires libyennes ne respectait pas la convention de La Haye du 1er mars 1954 relative à la procédure civile (ci-après : CLaH54 ; RS 0.274.12). Aucune preuve d'une quelconque notification à B______ de la convocation aux audiences indiquées dans le jugement n'avait été fournie. Celui‑ci ne mentionnait pas la date de l'audience du 12 septembre 2021 figurant dans les documents remis à cette dernière. Les trois quittances produites par A______ ne permettaient pas de déterminer le destinataire des courriers recommandés, l'adresse de B______ ne se trouvant pas sur les documents versés au dossier par ce dernier et ses explications relatives aux échanges avec l'ambassade n'étant corroborées par aucun document écrit. Si celle‑ci reconnaissait avoir reçu, le 13 septembre 2021 par courrier recommandé, la demande en justice en vue de la validation du divorce prononcé, rien ne permettait de déduire qu'elle avait été notifiée en temps utile d'une convocation à l'audience du 12 septembre 2021. Même à supposer que les deux envois sous plis recommandés remis à la poste suisse le 10 septembre 2021 contenaient une telle convocation, il fallait retenir qu'ils ne pouvaient dans tous les cas atteindre la destinataire avant le lendemain, le 11 septembre 2021, soit la veille de l'audience. Au vu de ces éléments, B______ n'avait pas été en mesure de faire valoir ses moyens de fait et de droit. Rien ne permettait non plus de retenir qu'elle aurait procédé au fond sans formuler de réserves ou renoncé à ses droits procéduraux.
C. a. Par acte du 22 janvier 2024, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant à son annulation et à ce que le jugement du 12 juin 2022 rendu par le Tribunal de F______ soit reconnu et transcrit dans les registres d'état civil. Il a également conclu à l'admission de nova, à savoir que les époux A______ et B______ n'avaient pas repris la vie commune et étaient en instance de divorce.
Depuis la séparation suivie de la répudiation de B______ validée par le jugement libyen, les époux n'avaient pas repris la vie commune. Le délai de deux ans étant échu, cette dernière avait ouvert une action en divorce en Suisse. Le DIN ne pouvait dès lors soutenir que le lien conjugal n'était pas rompu. Au surplus, B______ pouvait ester devant le tribunal libyen jusqu'au jour du jugement, le 12 juin 2022, soit presque quatorze mois après la séparation du 14 avril 2021. Contrairement à ce que retenait le DIN dans la décision querellée, cette durée était largement suffisante pour rendre concrète la rupture du lien conjugal.
L'invocation par le DIN de la violation de l'art. 1 CLaH54 prévoyant la transmission des actes par voie consulaire était contredite par les faits de la cause. En effet, il figurait dans le dossier des récépissés d'envois des courriers recommandés par l'ambassade de Libye à Berne. La notification de la citation à comparaître avait été faite à B______ par la voie consulaire. Celle-ci avait elle-même reconnu, lors d'une audience devant le Tribunal d'arrondissement de la Côte, avoir été convoquée par le tribunal libyen. Dès lors, nier la réalité et l'efficacité de cette convocation constituait un abus manifeste de droit qui ne pouvait être protégé par l'ordre public suisse.
Il peinait à comprendre l'affirmation du DIN selon laquelle B______ ne pouvait pas avoir été convoquée en temps utile. Il fallait admettre qu'elle avait été régulièrement citée à comparaître. Étant donné que celle-ci avait admis avoir été convoquée le 13 septembre 2021 et que l'audience du jugement s'était tenue le 12 juin 2022, soit huit (recte : neuf) mois plus tard, elle avait eu le temps d'organiser sa défense, de consulter un avocat et de faire valoir ses droits.
Enfin, les erreurs d'adresse relevées dans les chiffres 13 et 19 de la décision attaquée étaient dues à des confusions dans la retranscription des chiffres, et liées à des difficultés de traduction.
b. Par décision du 8 février 2024, la chambre administrative a ordonné l'appel en cause de B______.
c. Le 28 février 2024, le DIN a conclu au rejet du recours.
Pour calculer la durée de la séparation de fait sur laquelle se fondait la présomption de rupture du lien conjugal, il y avait lieu de se placer au moment de la répudiation, soit plus précisément le 17 avril 2021 et donc 45 jours (recte : 47) après la fin de la vie commune, durée largement en deçà de celle de 24 mois prévue par le droit suisse. Rien n'indiquait au surplus que cette répudiation était fondée à l'époque sur une volonté mutuelle et réciproque des conjoints de divorcer, étant précisé qu'il y avait lieu d'évaluer cette volonté au moment de la répudiation et non au jour de la demande de transcription de la décision querellée. La répudiation ne constituait donc pas, dans le cas d'espèce, une forme de divorce fondée sur le consentement mutuel des époux.
En se prévalant des difficultés de traduction, le recourant méconnaissait l'obligation lui incombant de produire des pièces dont la traduction n'était pas entachée d'erreurs. Il était rappelé que celui-ci avait été invité à plusieurs reprises par le DIN à produire des traductions conformes.
d. Le 6 mai 2024, la demande d'assistance juridique de B______ a été rejetée.
e. Le 8 mai 2024, B______ a conclu au rejet du recours, faisant siens les motifs retenus dans la décision querellée, ainsi que dans les observations sur recours du DIN.
f. Sur ce, et en l'absence de réplique du recourant, la cause a été gardée à juger.
1. Selon l’art. 90 al. 2 de l'ordonnance fédérale sur l'état civil du 28 avril 2004 (OEC - RS 211.112.2), les décisions de l’autorité de surveillance peuvent être attaquées devant les autorités cantonales compétentes. Le DIN est l'autorité de surveillance de l'état civil (art. 5 de la loi sur l'état civil du 19 décembre 1953 - LEC - E 1 13). En application de l’art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre administrative est compétente dans le cas d’espèce (ATA/163/2023 du 21 février 2023 ; ATA/793/2012 du 20 novembre 2012).
Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 LOJ ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).
2. Le recourant a conclu à l'admission d'un nova relatif à la disparition du lien conjugal.
2.1 Selon l’art. 61 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (al. 1 let. a), et pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (al. 1 let. b).
2.2 En l'occurrence, il est constant que le couple n'a pas repris la vie commune depuis leur séparation le 1er mars 2021 et que l'appelée en cause a introduit auprès du Tribunal d'arrondissement de La Côte une demande unilatérale de divorce le 6 avril 2023, soit postérieurement au jugement libyen dont la reconnaissance est requise, mais antérieurement au prononcé de la décision contestée. Non contesté, ce fait a déjà été intégré à l'état de fait pris en considération par la chambre de céans au considérant B ci-dessus.
3. Le litige porte sur le bien-fondé du refus de reconnaître et de transcrire dans les registres d'état civil le divorce par répudiation validé par le jugement libyen du 12 juin 2022.
3.1 En raison de l'élément d'extranéité que représente le jugement libyen dont la reconnaissance est requise, le présent litige présente un caractère international.
Contrairement à la Suisse, la Libye n'est pas partie contractante à la Convention de la Haye du 1er juin 1970 sur la reconnaissance des divorces et des séparations de corps (RS 0.211.212.3). Il n’existe entre la Suisse et la Libye aucune convention bilatérale sur la reconnaissance d'actes de dissolution du mariage. Dès lors, les conditions de la reconnaissance en Suisse d’un divorce prononcé en Libye sont exclusivement régies par la loi fédérale sur le droit international privé du 18 décembre 1987 (LDIP - RS 291).
3.2 Une décision ou un acte étranger concernant l’état civil est transcrit dans les registres de l’état civil en vertu d’une décision de l’autorité cantonale de surveillance en matière d’état civil (art. 32 al. 1 LDIP). Cette compétence, prévue également à l'art. 23 OEC, ressortit dans le canton de Genève au DIN selon l'art. 5 LEC. La transcription est autorisée lorsque les conditions fixées aux art. 25 à 27 sont remplies (art. 32 al. 2 LDIP).
3.3 En l'occurrence, le DIN est compétent pour statuer sur la demande de reconnaissance et le droit suisse s'applique (art. 77 al. 1 LDIP). Au demeurant, cette compétence n'est pas disputée.
3.4 À teneur de l'art. 65 al. 1 LDIP, un jugement de divorce étranger est reconnu en Suisse lorsqu'il a été rendu dans l'État du domicile ou de la résidence habituelle, ou dans l'État national de l'un des époux (let. a), ou s'il est reconnu dans l'un de ces États (let. b).
3.5 Cette disposition doit être lue en relation avec les normes générales des art. 25 ss LDIP. Selon l'art. 27 LDIP, la reconnaissance d'une décision étrangère doit être refusée en Suisse si elle est manifestement incompatible avec l'ordre public suisse (al. 1), exigence du respect de l'ordre public matériel, qui a trait au fond du litige, ou si elle viole certaines règles fondamentales de procédure civile, énoncées exhaustivement à l'al. 2, exigences de l'ordre public procédural (ATF 126 III 327 ; arrêt du Tribunal fédéral 5A_697/2007 du 3 juillet 2008). On distingue ainsi entre l’ordre public « matériel » et l’ordre public « procédural » ou « formel »
En tant que clause d'exception, la réserve de l'ordre public s'interprète de manière restrictive, spécialement en matière de reconnaissance et d'exécution de jugements étrangers, où sa portée est plus étroite que pour l'application directe du droit étranger. Dans cette optique, l’intervention de la clause de réserve suppose, d’après la jurisprudence, que l’affaire présente un « lien suffisant » avec l’État du juge requis (exigence de la « Binnenbeziehung » ; ATF 143 III 51 consid. 3.3.2 et les références citées). Selon la théorie de la « Binnenbeziehung », qui s’applique tant à l’effet direct de l’ordre public (à savoir en cas d’application directe du droit étranger par une autorité suisse) qu’à son effet indirect (à savoir en matière de reconnaissance et d’exécution de jugements étrangers), l’intervention de la clause sera d’autant plus énergique que les liens avec l’État concerné sont étroits. Inversement, si ces liens existent mais sont lâches, l’ordre public n’intervient qu’à l’encontre de résultats absolument intolérables (ATF 143 III 51). L'ordre public est apprécié au regard du résultat auquel aboutit la décision et non sur la base des motifs de celle-ci ou du contenu de la loi étrangère appliquée (ATF 120 II 155 ; Andreas BUCHER, Commentaire romand, Loi sur le droit international privé et Convention de Lugano, 2011, ad art. 27 n° 3 ss).
S'agissant plus particulièrement de la reconnaissance des jugements de divorce étrangers, le Tribunal fédéral a précisé que l'expression de la volonté de divorcer fait partie de l'ordre public suisse. La volonté de divorcer ne doit pas nécessairement faire l'objet d'une audition personnelle devant le juge du divorce. Elle peut aussi se manifester dans un document écrit, à l'instar d'une procuration, dans la mesure où celui-ci permet au juge d'acquérir, de manière suffisamment sûre, la conviction que les parties veulent divorcer. Il est dès lors possible de reconnaître un jugement de divorce étranger, qui est issu d'une procédure au cours de laquelle les époux n'ont pas personnellement comparu (ATF 131 III 182 consid. 3 & 4.3).
Même si le motif de divorce à la base de la décision heurte, en soi, l’ordre public suisse, celui-ci n’est pas lésé si les circonstances du cas particulier démontrent que la rupture de l’union a été consommée en fait au moment du divorce. Le respect de l’ordre public suisse doit être apprécié en fonction du résultat de l’atteinte, sous tous les angles pertinents. Il n’est pas violé si la reconnaissance de la décision étrangère aboutit à une situation qui n’est pas fondamentalement éloignée de celle qui se serait produite en application du droit suisse (Andreas BUCHER, op. cit., 2011, n. 12 ad art. 65 LDIP).
D'après la conception suisse, le divorce sanctionne l'échec du mariage (ATF 126 III 404 consid. 4a). Sous réserve de l'hypothèse où un tel constat se fonde sur une déclaration commune des époux, l’ordre public suisse refuse la reconnaissance lorsque le juge du divorce a donné suite à la demande sans vérifier la rupture de l’union conjugale. Que cette rupture ait été examinée sur la base des circonstances concrètes, ou simplement déduite d’une certaine durée de vie séparée des époux, n’est pas déterminant. Cette durée ne doit cependant pas avoir été trop courte, au point de donner effet, en définitive, à un divorce purement unilatéral, proche d’une répudiation. Il a été jugé que l’ordre public ne tolère pas qu’un tel échec soit présumé après un délai de six mois seulement (ATF 103 Ib 69 ss, 72 s.). Par contre, une séparation de fait de trois ans, constitutive d’une cause déterminée de divorce, n’a pas heurté l’ordre public (ATF 94 I 247). On peut estimer qu’aujourd’hui, une séparation d’une année ne serait pas davantage choquante du point de vue suisse (Andreas BUCHER, op. cit., n° 10 ad art. 65 LDIP).
L’ordre public suisse s’oppose par conséquent à la transcription dans les registres d’état civil suisse d’une répudiation prononcée par un tribunal étranger en cas de procédure unilatérale et en l'absence de l'épouse (ATF 126 III 327 consid. 4).
3.6 L’art. 27 al. 2 LDIP concrétise quant à lui l’ordre public procédural en prévoyant le refus de la reconnaissance lorsqu'une partie établit notamment qu’elle n’a été citée régulièrement, ni selon le droit de son domicile, ni selon le droit de sa résidence habituelle, à moins qu’elle n’ait procédé au fond sans faire de réserve (let. a) ou que la décision a été rendue en violation de principes fondamentaux ressortissant à la conception suisse du droit de procédure, notamment que ladite partie n’a pas eu la possibilité de faire valoir ses moyens (let. b).
L'art. 29 al. 1 let. c LDIP précise à cet égard qu'en cas de jugement par défaut, la requête en reconnaissance ou en exécution adressée à l'autorité compétente doit être accompagnée d'un document officiel établissant que le défaillant a été cité régulièrement et qu'il a eu la possibilité de faire valoir ses moyens.
La garantie d'une « citation régulière » a pour but d'assurer à chaque partie le droit de ne pas être condamnée sans avoir été mise en mesure de défendre ses intérêts ; elle concrétise le droit d'être entendu (ATF 117 Ib 347 consid. 2b/bb et les arrêts cités). La notification doit être effectuée régulièrement selon le droit de procédure applicable. L'art. 27 al. 2 let. a LDIP entend ainsi refuser la reconnaissance à un jugement étranger rendu dans une procédure menée de manière incorrecte à l'égard du défendeur (ATF 122 III 439 consid. 4b).
La notification du premier acte introductif d'instance est régulière au sens de l'art. 27 al. 2 let. a LDIP si elle est valable au regard des règles applicables dans l'État de domicile du destinataire (subsidiairement de sa résidence habituelle). Lorsque celui-ci est domicilié ou établi en Suisse et que l'État d'origine est partie à la Convention de La Haye du 15 novembre 1965 relative à la signification et la notification à l'étranger des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale (ci-après : CLaH65 - RS 0.274.131), c'est au regard des règles de cette convention qu'il y a lieu de contrôler la validité de la notification. Lorsque cette convention est inapplicable, la Suisse se réfère à la CLaH54 (art. 11a al. 4 LDIP ; Andreas BUCHER, op. cit., n° 26 ad art. 27 LDIP). Cette convention a instauré la voie consulaire pour la transmission d’actes de l'étranger et à destination de l'étranger, laquelle s'opère en Suisse par l’intermédiaire de l’OFJ (art.11 LDIP).
3.7 Alors que l’art. 27 al. 2 let. a LDIP exige que le défendeur ait été régulièrement cité à la première audience du tribunal d’origine, le Tribunal fédéral, qui, en soi, partage cette interprétation (ATF 122 III 439 ss, 447 ; 120 II 83 ss, 85 ; 105 Ib 46 s.), a néanmoins jugé qu’il n’était pas arbitraire de renoncer à cette exigence stricte lorsque le défendeur avait eu connaissance d'une autre manière de l’instance introduite contre lui et qu’il aurait en outre pu se présenter à une audience contradictoire ultérieure à laquelle ses intérêts ont été défendus par son avocat (ATF 122 III 447 s.). Cet arrêt a été rendu dans les limites de l’arbitraire et ne se prête pas à des généralisations. Dans un arrêt ultérieur, le Tribunal fédéral a refusé la reconnaissance d’un divorce prononcé en Serbie, au motif que l’épouse défenderesse n’avait pas été valablement notifiée de la demande du mari et de l’acte introductif d’instance par le canal prévu à la CLaH54, mais simplement par la voie postale (arrêt du Tribunal fédéral 5A_544/2007 du 4 février 2008 consid. 3). La Suisse n'accepte pas que des actes judiciaires étrangers soient notifiés par la poste (ATF 135 III 623 consid. 2 et 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 5A_544/2007 du 4 février 2008, consid. 3). Toutefois, elle admet les notifications par des agents diplomatiques ou consulaires lorsque le destinataire a la nationalité de l’État d’origine, ces agents ne pouvant cependant en aucun cas faire usage de moyens de contrainte (art. 6 ch. 3 CLaH54 ; voir les lignes directrices de l'OFJ en matière d'entraide judiciaire internationale en matière civile, état au 1er juillet 2024, p. 11).
La jurisprudence a rappelé à maintes reprises que, sous l'angle de l'ordre public suisse, le délai d'assignation devait être suffisant pour permettre à la partie défenderesse de consulter un avocat et de préparer sa défense devant le tribunal étranger. Quelques jours ne sont pas suffisants, mais une semaine peut déjà représenter un « temps utile », tout au moins pour désigner un avocat ou pour demander que la première audience soit reportée (arrêt 4A_120/2015 du 19 février 2016 consid. 3.3.3 et les références citées).
S'il existe des exigences particulières relativement à la notification de l'acte introductif d'instance, tel n'est pas le cas des actes ultérieurs de la procédure. Le Tribunal fédéral a ainsi admis une notification postale d'actes judiciaires étrangers en considérant que le recourant avait procédé sans réserve conformément à une citation de comparaître, de telle sorte qu'il ne pouvait pas invoquer après coup les défauts de notification sans violer le principe de bonne foi (ATF 105 Ia 307 ss, 311 s).
3.8 L’art. 27 al. 2 let. b LDIP consacre une règle spéciale à la garantie des principes fondamentaux de procédure, dont il est précisé qu’ils ressortissent « à la conception suisse du droit de procédure ». Il s'agit de s’en tenir aux règles fondamentales de la procédure civile découlant de la protection constitutionnelle contre l’arbitraire, qui garantissent notamment le droit à un procès équitable et celui d’être entendu (ATF 116 II 625 ss, 629 ; 126 III 327 ss, 330). Parmi les principes visés, la loi met en évidence « la possibilité de faire valoir ses moyens » (Andreas BUCHER, op. cit., n 42 ad art. 27 LDIP).
4. En l'espèce, le recourant et l'intimée se divisent sur la question de la compatibilité du jugement libyen avec l'ordre public suisse.
4.1 Le recourant et l'appelée en cause étant ressortissants suisses et domiciliés en Suisse, où vivent leurs deux enfants communs, c'est à juste titre que l'autorité cantonale a considéré que la cause présentait un rapport étroit avec la Suisse (« Binnenbeziehung »).
4.2 Critiquant l'intimé, le recourant allègue que, depuis la séparation de son couple le 1er mars 2021, suivie de la répudiation fixée dans le jugement libyen au 17 avril 2021, les époux n'ont pas repris la vie commune et que l'épouse a même introduit en Suisse une procédure de divorce après l'échéance du délai de deux ans de séparation. De plus, entre la séparation du 17 avril 2021 et la date du prononcé du jugement, il s'était écoulé presque quatorze mois, durée largement suffisante pour admettre la rupture du lien conjugal.
Cette argumentation que contredit la jurisprudence précitée (voir considérant 3.5 ci-dessus) ne saurait être suivie. Selon la teneur du jugement libyen, le juge s'est contenté, lors de l'homologation de la répudiation, de recevoir la volonté du recourant. Contrairement à celle-ci, il ne constate nullement la volonté de l'appelée en cause. Tout au plus, il admet que l'absence de comparution de cette dernière et de contestation de la demande en justice équivaut à son acceptation de celle-ci. Or, il ne ressort du jugement libyen aucun élément susceptible d'établir, même par actes concluants, une quelconque manifestation de la volonté de l'appelée en cause de divorcer aussi bien au moment de la répudiation présumée que durant toute la procédure devant le juge libyen.
Outre l'absence de consentement de l'appelée en cause, le jugement libyen ne contient aucun véritable examen de la rupture du lien conjugal. Dans sa version approximativement traduite figurant au dossier, il est fait allusion, de manière difficilement compréhensible, à une « fissuration » de la vie conjugale qui aurait obligé le recourant à divorcer ; cela ne démontre pas une rupture du lien conjugal, pas plus que la durée de la séparation du couple.
Le recourant se méprend à cet égard lorsqu'il soutient que la durée de séparation de presque quatorze mois (recte : quinze) entre la date de répudiation et la date du jugement était suffisante pour présumer la disparition du lien conjugal. En effet, le dies a quo pour la comptabilisation de cette durée correspond au jour de la séparation effective des époux et le dies ad quem à la date de la répudiation. Il faut donc se placer au jour de la répudiation pour examiner si la condition de durée telle que définie par la jurisprudence est réalisée. Il apparaît qu'entre la séparation de fait du 1er mars 2021 et la date de la répudiation le 17 avril 2021, 47 jours s'étaient écoulés, soit une durée inférieure à six mois jugés insuffisants dans la jurisprudence pour admettre la rupture du lien conjugal. Cette durée est au demeurant plus brève que celle d'une année recommandée en doctrine et encore plus largement en dessous des deux ans prévus en droit suisse. Par conséquent, la conclusion de l'intimé sur l'absence de présomption de la rupture du lien conjugal au moment de la répudiation n'est pas critiquable.
Pour le surplus, l'appelée en cause n'a initialement pas déposé de demande de divorce mais bien, le 18 mars 2021 (un mois avant la répudiation), une requête en MPUC auprès du Tribunal d'arrondissement de La Côte, ayant abouti à la mise en place de mesures régissant les relations du couple jusqu'à l'introduction ultérieure d'une demande unilatérale de divorce le 6 avril 2023, soit postérieurement au prononcé du jugement libyen. Cette introduction qui ne saurait, en tant qu'expression de la volonté de divorcer de l'appelée en cause, rétroagir au jour du jugement, et encore moins à celui de la répudiation, n'est donc pas de nature à justifier la réalité de l'échec du mariage lors du prononcé libyen.
Au vu de ce qui précède, il y a lieu de considérer qu'en l'absence du consentement de l'appelée en cause et de la brièveté de la durée de la séparation des époux lors de la répudiation de cette dernière par le recourant, la procédure de divorce menée par le tribunal libyen constituait une procédure unilatérale visant la simple validation judiciaire de cette répudiation. Dans ces circonstances, celle-ci est incompatible avec l'ordre public suisse, de sorte que l'intimé était fondé à refuser la reconnaissance et la transmission du jugement libyen dans les registres d'état civil.
4.3 À titre superfétatoire, il convient d'examiner, à l'instar de l'intimé, si les droits procéduraux de l'appelée en cause ont été respectés.
Le recourant a, dans un premier temps, allégué en se fondant sur trois quittances de la poste suisse qu'un ordre de comparution officiel a été envoyé par le tribunal libyen au ministère des affaires étrangères libyen qui l'avait fait suivre à l'ambassade libyenne à Berne en vue de sa notification par courrier recommandé à l'appelée en cause. À la suite de production par cette dernière de la copie de la demande en justice reçue, il a ensuite prétendu que celle-ci valait ordre de comparution officiel.
Il n'est pas contesté que l'appelée en cause a effectivement reçu la demande en justice du recourant. La question de savoir si cette notification était conforme aux règles prescrites peut toutefois rester indécise au vu des considérations suivantes.
Pour ce qui est de l'ordre de comparution, il n'est pas établi, en dépit de sa teneur, que la demande en justice effectivement reçue par l'appelée en cause ait été accompagnée d'une citation à comparaître, pas plus que les envois des plis recommandés attestés par les quittances de la poste suisse produites. En tant que cette dernière conteste avoir reçu un ordre de convocation formelle et que la mention d'une adresse erronée dans l'ordre de convocation produit rend vraisemblable une erreur de distribution, la chambre de céans retiendra que la notification d'une citation à comparaître n'est, à cet égard, pas prouvée.
Même à considérer que la demande en justice comportait une citation à comparaître à la première audience, ce document comme celui du 2 septembre 2021 en partie illisible, valant selon le recourant ordre de convocation officiel, font état d'une audience fixée au 12 septembre 2021. Or, l'appelée en cause a allégué sans être contredite avoir reçu la demande en justice le 13 septembre 2021. On relèvera que les quittances d'envois postaux portent les dates du 10 septembre et du 23 novembre 2021. Dans ces conditions, il aurait été impossible à l'appelée en cause de prendre part à ladite audience ou même de constituer un avocat pour assurer sa défense ou demander un report d'audience, étant précisé que la jurisprudence a considéré le délai d'une semaine comme suffisant pour une notification en temps utile. En tout état de cause, outre que le jugement libyen ne fait aucune allusion à l'audience du 12 septembre 2021, le recourant n'allègue pas que l'appelée en cause aurait été assignée à comparaître aux différentes audiences dont les dates y sont en revanche indiquées.
L'argument du recourant selon lequel, dès la réception de l'acte introductif d'instance, il appartenait à l'appelée en cause d'organiser sa défense, au besoin en désignant un avocat pour faire valoir ses droits, ne peut être retenu. La répudiation islamique étant une simple formalité de nature probatoire, une épouse valablement convoquée qui refuse de comparaître pour faire valoir ses moyens de droit ne commet en effet pas d'abus dès lors que l'ordre public est en jeu (ATF 126 III 327 consid. 4 in fine et la référence citée).
Dans ces circonstances, dès lors que rien ne permet de retenir que l'appelée en cause aurait procédé au fond sans faire de réserve, c'est à juste titre que l'intimé a également tenu pour contraire à l'ordre public formel la reconnaissance et à la transcription du jugement libyen.
Entièrement infondé, le recours sera rejeté.
5. Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1’000.-, y compris la décision sur l'appel en cause, sera mis à la charge du recourant qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de procédure de CHF 500.- sera allouée à l'appelée en cause à la charge du recourant (art. 87 al. 2 LPA).
* * * * *
PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE
à la forme :
déclare recevable le recours interjeté le 22 janvier 2024 par A______ contre la décision du département des institutions et du numérique du 21 décembre 2023 ;
au fond :
le rejette ;
met un émolument de CHF 1’000.- à la charge de A______ ;
dit qu’une indemnité de procédure de CHF 500.- sera allouée à B______ à la charge de A______ ;
dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;
communique le présent arrêt à Monsieur A______, au département des institutions et du numérique, à Me Anaïs BRODARD, avocate de l'appelée en cause, ainsi qu'à l'office fédéral d'état civil.
Siégeant : Patrick CHENAUX, président, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Eleanor McGREGOR, juges.
Au nom de la chambre administrative :
le greffier-juriste :
F. SCHEFFRE
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| le président siégeant :
P. CHENAUX |
Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.
Genève, le
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| la greffière :
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