Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public
ATA/1332/2024 du 12.11.2024 sur DITAI/320/2024 ( PE ) , REJETE
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
| POUVOIR JUDICIAIRE A/1385/2024-PE ATA/1332/2024 COUR DE JUSTICE Chambre administrative Arrêt du 12 novembre 2024 2ème section |
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dans la cause
A______ et B______ recourants
contre
OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé
_________
Recours contre la décision sur demande de jonction, effet suspensif et mesures provisionnelles du Tribunal administratif de première instance du 24 mai 2024 (DITAI/320/2024)
A. a. B______, ressortissant kosovar, est né le ______ 1996.
b. A______, ressortissante albanaise, est née le ______ 1989. Après avoir épousé B______ le 21 juin 2018, elle a obtenu une autorisation de séjour en vue du regroupement familial avec son mari, alors au bénéfice d'une autorisation d'établissement.
B. a. Par décision du 22 novembre 2021, l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), a constaté la caducité de l'autorisation d'établissement de B______, refusé de lui délivrer une nouvelle autorisation de séjour, révoqué l’autorisation de séjour pour regroupement familial d'A______ et prononcé leur renvoi de Suisse et de l’espace Schengen. La famille avait en effet emménagé en France, où elle était restée plus de six mois.
Cette décision a été confirmée par arrêt de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) du 3 octobre 2023 (ATA/1081/2023), entré en force.
b. Le 19 décembre 2023, l'OCPM a imparti aux époux un nouveau délai au 19 mars 2024 pour quitter le territoire suisse.
C. a. Par courriers des 16 janvier, 22 février, 6 mars et 14 mars 2024, les époux ont demandé la reconsidération de la décision du 22 novembre 2021.
Les autorités de l'Union européenne (ci-après : UE) avaient adopté, le 19 avril 2023, un règlement mettant fin à l'obligation de visa pour les Kosovars détenteurs d'un passeport biométrique qui souhaitaient se rendre dans l'espace Schengen pour y séjourner jusqu'à 90 jours. Il s'agissait là d'un développement de l'acquis de Schengen que la Suisse était tenue de reprendre, ce qui avait entraîné la modification de l'ordonnance sur l'entrée et l'octroi de visas du 15 août 2018 (OEV - RS 142.204).
Le renvoi de Suisse qui avait été prononcé violait cette nouvelle législation, eu égard à l'adhésion du Kosovo à l'espace Schengen. Ceci permettait de traiter la question sous l'angle de la révision.
De plus, A______ était désormais gérante d'une société active dans le second œuvre et employant quatre personnes, la dernière ayant été engagée postérieurement à l'arrêt de la chambre administrative. B______ était lui aussi gérant d'une société employant quatre personnes. Tous ces travailleurs perdraient leur emploi si les époux devaient être renvoyés.
b. Par décision du 21 mars 2024, déclarée exécutoire nonobstant recours, l'OCPM a refusé d'entrer en matière sur la demande de reconsidération de sa décision du 22 novembre 2021.
La modification liée aux procédures d’entrée et aux séjours de courte durée dans l’espace Schengen n’avait aucun lien avec l’état de fait et les conclusions de la décision dont la reconsidération était demandée et n’ouvrait par ailleurs aucun droit à une autorisation de séjour en Suisse.
Le fait que les époux soient tous deux chefs d'entreprise n'était pas un fait nouveau et avait été pris en compte dans la procédure antérieure. L’embauche de personnes qui semblaient a priori dépourvues d’autorisation de séjour et de travail en Suisse n’était pas un élément favorable ; au contraire, elle constituait une violation au sens de l’art. 117 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et la situation allait être dénoncée au service compétent en matière de travail au noir.
Force était ainsi de constater qu’aucun élément nouveau et important n’était allégué et que la situation des intéressés ne s’était pas modifiée de manière notable depuis sa décision du 22 novembre 2021 et son entrée en force en octobre 2023. Les conditions de l’art. 48 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) n’étaient en conséquence pas remplies et les intéressés étaient tenus de quitter la Suisse et l’espace Schengen sans délai.
D. a. Par acte du 22 avril 2024, les époux ont recouru auprès du TAPI contre la décision de l’OCPM du 21 mars 2024, concluant à ce qu’il soit dit qu’ils disposaient de « vrais nova », à ce qu’il soit constaté que l’OCPM avait violé l’OEV, le droit international, ainsi que l’art. 48 al. 1 let. b LPA en refusant d’entrer en matière sur leur demande de reconsidération, à ce qu’il soit dit que l’OCPM avait violé l’art. 48 al. 1 let. b LPA en omettant d’expliquer pourquoi ils ne disposait pas de faits nouveaux, à ce qu’il soit dit que l’OCPM avait commis un déni de justice, à ce qu’il soit constaté que la décision querellée violait le principe de la proportionnalité, était arbitraire et constituait un formalisme excessif et, cela fait, au renvoi de la cause à l’OCPM et à ce qu’il lui soit ordonné de statuer à nouveau sur la demande de reconsidération et de se prononcer sur les faits nouveaux présentés en motivant sa décision. Ils sollicitaient également la restitution de l’effet suspensif s’agissant de leur renvoi, ainsi que la jonction de la cause avec celle concernant les parents et le frère cadet de B______ (procédure A/1363/2024).
La décision querellée ayant été déclarée exécutoire nonobstant recours, ils courraient le risque d’être renvoyés de 29 pays, ce qui les exposerait à un dommage colossal. A______ risquait également de perdre la gestion de sa société qui employait ordinairement quatre personnes. Dans ces conditions et en l’absence d’intérêt public ou privé prépondérant qui s’y opposerait, il convenait de restituer l’effet suspensif au recours.
Au fond, le maintien de leur renvoi constituait une violation des art. 8 al. 3 OEV et du droit international, puisque depuis le 1er janvier 2024, ils avaient accès à tous les pays de l’espace Schengen pour des séjours de courte durée sans devoir obtenir de visas. Ce changement législatif constituait un fait nouveau « nouveau » ayant modifié de manière importante leur situation et qui justifiait ainsi la remise en cause de la décision de renvoi prononcée à leur encontre. Partant, l’OCPM avait violé l’art. 48 al. 1 let. b LPA en refusant d’entrer en matière sur leur demande de reconsidération, commettant par ailleurs un déni de justice sur ce point. L’OCPM n’expliquait pas en quoi les nouvelles possibilités offertes aux ressortissants kosovars de séjourner dans l’espace Schengen et en Suisse sans obligation de visa pour une courte durée ne constituaient pas des faits nouveaux « nouveaux », ni pourquoi ils n’étaient pas importants. Ce faisant, l’OCPM avait commis un déni de justice.
Le maintien de la décision de renvoi de Suisse et de l’espace Schengen, soit de 29 pays, était disproportionné et violait gravement leur liberté de mouvement. L’intérêt public à les renvoyer faisait défaut, dès lors que leur renvoi découlait d’une faute commise essentiellement par le père de B______ et d’autres mesures moins incisives étaient envisageables et préférables. Leur renvoi de 29 pays auxquels ils avaient pourtant désormais accès les exposait par ailleurs à un dommage irréparable, d’autant plus qu'A______ risquait aussi de perdre la gestion de sa société ainsi que ses engagements au sein de celle-ci. La décision querellée était également arbitraire et relevait d’un formalisme excessif, compte tenu de la sévérité de la mesure.
b. Le 6 mai 2024, l’OCPM s’est opposé à la restitution de l’effet suspensif et à l’octroi de mesures provisionnelles, et a conclu au rejet du recours.
Les époux faisaient l’objet d’une décision de renvoi de Suisse et de l’espace Schengen, définitive et exécutoire, suite au refus de leur délivrer une autorisation de séjour en application de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20). Ils ne bénéficiaient donc d’aucun statut légal en Suisse. La modification de l’OEV, suite à la reprise d’un développement de l’acquis de Schengen exonérant les ressortissants kosovars de l’obligation de visa pour y séjourner jusqu’à 90 jours (soit un visa touristique) n’avait aucune conséquence sur leur situation administrative à ce stade. L’intérêt public à l’établissement d’une situation conforme au droit paraissait ainsi l’emporter sur l’intérêt privé des recourants à demeurer en Suisse jusqu’à l’issue de la procédure.
Au fond, les intéressés perdaient de vue que le renvoi prononcé à leur endroit l’avait été suite au refus de délivrance d’un titre de séjour, prononcé en application de la LEI. L’OEV, qui traitait de la délivrance des visas, ne pouvait fonder un droit à un long séjour. Une fois qu’ils seraient retournés au Kosovo ou en Albanie, la décision de renvoi prononcée en 2021 serait considérée comme exécutée. Ils pourraient ainsi voyager, sans visa, sur tout le territoire Schengen en qualité de touristes, soit jusqu’à 90 jours par période de 180 jours, étant rappelé qu’aucune décision d’interdiction d’entrée en Suisse et dans l’espace Schengen n’avait été prononcée.
c. Le 14 mai 2024, les époux ont persisté dans leurs conclusions sur effet suspensif et sur jonction. À ce dernier égard, le traitement séparé des recours des différents membres de la famille était problématique. Il était important d’éviter de mettre à mal la vie familiale en séparant la famille, et ainsi d’empêcher la survenance de dommages considérables pour certains membres de la famille pendant la procédure. Il était donc préférable de traiter tous les membres de la famille comme une unité familiale.
d. Par décision du 24 mai 2024, le TAPI a rejeté tant la demande de jonction des causes A/1363/2024 et A/1385/2024 que la demande d'effet suspensif et de mesures provisionnelles.
Les deux causes concernaient des personnes différentes, bien qu'elles fussent membres d’une même famille. En outre, dès lors que le fils aîné des époux AB______ formait, avec son épouse, une famille distincte, il ne pouvait être exclu que sa situation fût appréciée différemment de celle de ses parents et de son frère mineur. Il n'y avait dès lors pas lieu d'ordonner la jonction des causes.
La décision attaquée avait pour seul objet le refus d’entrer en matière sur la demande de reconsidération. Sa portée ne s’étendait donc pas à l’obligation pour les époux de quitter la Suisse, qui résultait de la décision de l’OCPM du 22 novembre 2021, exécutoire. En tant qu’elle refusait d’entrer en matière sur la demande de reconsidération, la décision attaquée avait un contenu négatif. Contrairement à ce qui était soutenu par les époux, la précision selon laquelle ils étaient « tenus de quitter la Suisse et l’espace Schengen sans délai » ne conférait pas à la décision un contenu positif ; il ne s’agissait que d’un simple rappel de leur obligation de se conformer à la décision de renvoi en force dont ils faisaient l’objet.
À l’appui de leur demande tendant à ce qu’il soit sursis à l’exécution de leur renvoi, les époux se prévalaient essentiellement de la modification de l’OEV. Or, cette modification législative était sans incidence à ce stade. Ils faisaient également valoir qu'A______ était gérante d’une société qui emploierait désormais quatre personnes et qu’un renvoi les exposerait à un « dommage colossal » car ils seraient contraints de quitter le territoire du pays et de l’espace Schengen. Sur la base d’un examen prima facie du dossier, il s'agissait là soit d’éléments déjà pris en compte dans la procédure antérieure, soit des conséquences inéluctables liées à un renvoi de Suisse. Partant, le respect de l’ordre juridique et des procédures devait dans le cas présent l’emporter sur l’intérêt privé des recourants à pouvoir continuer à séjourner en Suisse jusqu’à droit jugé sur leur recours.
E. a. Par acte posté le 7 juin 2024, les époux ont interjeté recours auprès de la chambre administrative contre le jugement précité, concluant principalement à ce que la chambre administrative ordonne la restitution de l'effet suspensif s'agissant de leur renvoi ainsi qu'à l'octroi d'une indemnité de procédure, et subsidiairement leur maintien en Suisse et dans l'espace Schengen, par voie de mesures provisionnelles, le temps de la procédure.
Ils reprenaient leur précédente argumentation en la précisant.
La condition de l'urgence était remplie, dès lors que si des mesures provisionnelles n'étaient pas accordées, ils s'exposaient de manière immédiate au dommage important et irréparable en lien avec leur renvoi de l'espace Schengen. Il leur était reproché d'avoir séjourné hors de Suisse pendant un peu plus de deux ans, ce qui n'était pas grave au point de prendre une mesure aussi sévère que de leur refuser l'octroi de l'effet suspensif ou de mesures provisionnelles.
b. Le 27 juin 2024, l'OCPM a conclu au rejet du recours, se référant aux considérants du jugement attaqué.
c. Le 2 juillet 2024, les recourants ont régularisé leur recours, qui n'était pas signé.
d. Le juge délégué a fixé aux parties un délai au 16 août 2024 pour formuler toutes requêtes ou observations complémentaires, après quoi la cause serait gardée à juger.
e. Le 14 août 2024, l'OCPM a indiqué ne pas avoir de requêtes ni d'observations complémentaires à formuler.
f. Les recourants ne se sont quant à eux pas manifestés.
1. Les décisions du TAPI peuvent faire l’objet d’un recours auprès de la chambre administrative (art. 132 al. 1 et 2 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05).
1.1 La décision refusant l’effet suspensif ou des mesures provisionnelles étant une décision incidente, le délai de recours est de dix jours (art. 62 al. 1 let. b LPA).
1.2 Selon l'art. 57 LPA, le recours contre une décision incidente est recevable si un dommage irréparable peut être causé. Tel est le cas en l'espèce, le renvoi des recourants à l'étranger pouvant causer un tel dommage (ATA/108/2024 du 30 janvier 2024 consid. 1 ; ATA/1203/2023 du 7 novembre 2023 consid. 1 ; ATA/191/2023 du 28 février 2023 consid. 2).
Le recours est ainsi recevable.
2. Il convient d’examiner si le refus de restituer l’effet suspensif et d’accorder des mesures provisionnelles était fondé.
2.1 Sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l’autorité qui a pris la décision attaquée n’ait ordonné l’exécution nonobstant recours (art. 66 al. 1 LPA). Lorsqu’aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s’y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l’effet suspensif (art. 66 al. 3 LPA).
2.2 Lorsque l'effet suspensif a été retiré ou n'est pas prévu par la loi, l'autorité de recours doit examiner si les raisons pour exécuter immédiatement la décision entreprise sont plus importantes que celles justifiant le report de son exécution. Elle dispose d'un large pouvoir d'appréciation qui varie selon la nature de l'affaire. La restitution de l'effet suspensif est subordonnée à l'existence de justes motifs, qui résident dans un intérêt public ou privé prépondérant à l’absence d’exécution immédiate de la décision ou de la norme (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1161/2013 du 27 février 2014 consid. 5.5.1).
2.3 L'effet suspensif ne peut être restitué lorsque le recours est dirigé contre une décision à contenu négatif, soit contre une décision qui porte refus d'une prestation ou d'une autorisation. La fonction de l'effet suspensif est de maintenir un régime juridique prévalant avant la décision contestée. Si, sous le régime antérieur, le droit ou le statut dont la reconnaissance fait l'objet du contentieux judiciaire n'existait pas, l'effet suspensif ne peut être restitué car cela reviendrait à accorder au recourant un régime juridique dont il n'a jamais bénéficié (ATF 127 II 132 ; 126 V 407 ; 116 Ib 344). Dans cette dernière hypothèse, seul l'octroi de mesures provisionnelles est envisageable (ATA/721/2024 du 18 juin 2024 consid. 9 ; ATA/320/2024 du 4 mars 2024 consid. 2c ; ATA/287/2023 du 21 mars 2023 consid. 3.5).
2.4 En l’espèce, les recourants font l’objet d’une décision définitive et exécutoire de renvoi. La nouvelle décision de l’OCPM querellée devant le TAPI constitue un refus d'entrée en matière sur une demande de reconsidération, les recourants s'étant auparavant vu refuser une autorisation de séjour pour cas de rigueur. Les recourants n’étant pas, avant ce refus, en possession d'un droit de séjour, la restitution de l'effet suspensif demeurerait sans portée. Le TAPI a donc, à juste titre, traité leur requête comme une requête de mesures provisionnelles.
3. L'autorité peut, d'office ou sur requête, ordonner des mesures provisionnelles en exigeant au besoin des sûretés (art. 21 al. 1 LPA).
3.1 Selon la jurisprudence, des mesures provisionnelles ne sont légitimes que si elles s'avèrent indispensables au maintien d'un état de fait ou à la sauvegarde d'intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/320/2024 précité consid. 3d ; ATA/287/2023 précité consid. 4.1).
3.2 L'octroi de mesures provisionnelles présuppose l'urgence, à savoir que le refus de les ordonner crée pour l'intéressé la menace d'un dommage difficile à réparer (ATF 130 II 149 consid. 2.2 ; 127 II 132 consid. 3). Elles ne sauraient, en principe, anticiper le jugement définitif ni équivaloir à une condamnation provisoire sur le fond, pas plus qu'aboutir à rendre d'emblée illusoire la portée du procès au fond (ibid.). Ainsi, dans la plupart des cas, les mesures provisionnelles consistent en un minus, soit une mesure moins importante ou incisive que celle demandée au fond, ou en un aliud, soit une mesure différente de celle demandée au fond (Isabelle HAENER, Vorsorgliche Massnahmen in Verwaltungsverfahren und Verwaltungs-prozess, RDS 1997 II 253-420, p. 265).
Pour effectuer la pesée des intérêts en présence, l'autorité de recours n'est pas tenue de procéder à des investigations supplémentaires, mais peut statuer sur la base des pièces en sa possession (ATF 145 I 73 consid. 7.2.3.2 ; 117 V 185 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_516/2019 du 22 octobre 2019 consid. 2.2) et tenir compte de l'issue probable de la cause si celle-ci est clairement prévisible (ATF 129 II 286 consid. 3 ; ATF 106 Ib 115 consid. 2a).
3.3 En l'espèce, quand bien même un sursis à l'exécution du renvoi jusqu'à droit jugé sur le recours constitue un aliud admissible au regard de la jurisprudence (ATA/108/2024 précité consid. 3.3), on peut douter que la condition de l'urgence soit donnée, dès lors que les recourants ne font état d'aucune démarche entamée ou même prévisible à court terme de la part de l'intimé visant à l'exécution de leur renvoi.
Aussi et surtout, les chances de succès du recours apparaissent, à première vue, ténues dès lors que le changement de législation concernant l'obligation de visa pour les ressortissants du Kosovo dans l'espace Schengen constitue une modification du droit et non un fait nouveau, et que l'on ne voit pas en quoi cela pourrait affecter la situation des recourants sur la question principale liée à leur statut, à savoir le refus d'octroi d'autorisations de séjour pour cas d'extrême gravité. Quant aux allégués des recourants relatifs à leur entreprise respective, il apparaît à première vue que ces éléments ont déjà, globalement, été pris en compte par la chambre de céans dans la procédure antérieure (ATA/1181/2023 précité consid. B.c et 4.8).
C'est ainsi à juste titre que le TAPI a refusé d'octroyer les mesures provisionnelles sollicitées.
4. La décision attaquée, dont l'annulation est demandée, portait également sur la jonction des procédures A/1363/2024 et A/1385/2024.
4.1 Selon l’art. 70 LPA, l’autorité peut, d’office ou sur requête, joindre en une même procédure des affaires qui se rapportent à une situation identique ou à une cause juridique commune (al. 1). La jonction n’est toutefois pas ordonnée si la première procédure est en état d’être jugée alors que la ou les autres viennent d’être introduites (al. 2).
4.2 Selon la jurisprudence de la chambre de céans, il n’y a pas lieu de procéder à une jonction de causes lorsque des procédures portant sur des décisions rendues par la même autorité et prises en vertu des dispositions de la même loi visent un complexe de faits différent ou ne concernent pas les mêmes parties (ATA/1113/2024 du 24 septembre 2024 consid. 3.2 ; ATA/557/2021 du 25 mai 2021 consid. 3a).
4.3 En l'espèce, l'acte de recours devant la chambre de céans ne contient plus de grief relatif à la jonction de ces procédures. L'art. 70 LPA est, comme déjà indiqué, de nature potestative et n'oblige pas le juge à joindre des causes quand bien même celles-ci seraient connexes.
Le TAPI a de plus retenu que les deux causes concernaient des personnes différentes, bien qu'elles soient membres d’une même famille, et que le fils aîné des recourants formait, avec son épouse, une famille distincte, si bien qu'il ne pouvait être exclu que sa situation soit appréciée différemment de celle de ses parents et de son frère mineur. Ce raisonnement échappe à toute critique, si bien qu'il n'y avait pas lieu d'ordonner la jonction des causes.
Il résulte que le recours est entièrement mal fondé et doit être rejeté.
5. Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge solidaire des recourants (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).
* * * * *
PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE
à la forme :
déclare recevable le recours interjeté le 7 juin 2024 par A______ et B______ contre la décision du Tribunal administratif de première instance du 24 mai 2024 ;
au fond :
le rejette ;
met à la charge solidaire d'A______ et de B______ un émolument de CHF 400.- ;
dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;
dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession des recourants invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;
communique le présent arrêt à A______ et B______, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.
Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Jean-Marc VERNIORY, juges.
Au nom de la chambre administrative :
le greffier-juriste :
F. SCHEFFRE
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| le président siégeant :
C. MASCOTTO |
Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.
Genève, le
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| la greffière :
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Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html
Recours en matière de droit public | Recours constitutionnel subsidiaire |
Art. 82 Principe Le Tribunal fédéral connaît des recours : a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ; … Art. 83 Exceptions Le recours est irrecevable contre : … c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent : 1. l’entrée en Suisse, 2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit, 3. l’admission provisoire, 4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi, 5. les dérogations aux conditions d’admission, 6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ; d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues : 1. par le Tribunal administratif fédéral, 2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ; … Art. 89 Qualité pour recourir 1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque : a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ; b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification. … Art. 95 Droit suisse Le recours peut être formé pour violation : a. du droit fédéral ; b. du droit international ; c. de droits constitutionnels cantonaux ; d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ; e. du droit intercantonal. Art. 100 Recours contre une décision1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète. ______________________________________________ | Art. 113 Principe Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89. Art. 115 Qualité pour recourir A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque : a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée. Art. 116 Motifs de recours Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels. Art. 100 Recours contre une décision 1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète. ___________________________________________
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Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)
1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.
2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.
3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.