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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/554/2023

ATA/771/2024 du 25.06.2024 sur JTAPI/1441/2023 ( ICCIFD ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/554/2023-ICCIFD ATA/771/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 25 juin 2024

4ème section

 

dans la cause

 

A______ recourante

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

et

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS intimées

_________

Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 18 décembre 2023 (JTAPI/1441/2023)


EN FAIT

A. a. A______, dont le siège est dans le canton de Genève, a pour but l’acquisition, la détention, la gestion et la vente de participations, directes ou indirectes, dans les sociétés de tout type, en Suisse et à l'étranger.

b. Elle détient la totalité de la société immobilière B______ SA (ci-après : SI), également sise à Genève.

c. En 2012, la SI a acquis une parcelle de la commune de C______, pour le prix de CHF 768'000.-, moyennant un emprunt consenti par A______.

d. Selon les comptes de la SI 2017 à 2021, celle-ci n’exerce aucune activité, son actif principal étant la parcelle sise à C______.

e. Dans le bilan de la SI au 31 décembre 2017, la valeur de cette parcelle figurait pour CHF 960'371,35 et l’emprunt de la holding pour CHF 1'023'173.05, y compris les intérêts y relatifs de CHF 22'514.80.

f. Dans son bilan au 31 décembre 2017, joint à sa déclaration fiscale 2017, la holding a notamment fait état d’un actif de CHF 4'744'539.63, libellé « Créances liées aux participations ». Dans ses comptes de résultat, elle a porté en déduction de ses produits une « provision pour pertes sur comptes courants » de CHF 621'821.50. Dans une annexe aux comptes, il était précisé que ledit actif de CHF 4'744'539.63 comprenait sa créance de CHF 1'023'173.05 envers la SI et que cette créance était postposée à concurrence de CHF 1'000'658.25 et provisionnée à hauteur de CHF 511'500.-.

g. Le 24 juin 2022, la contribuable a indiqué à l’administration fiscale cantonale (ci‑après : AFC-GE) que la SI détenait le terrain de la commune de C______ en vue d'y développer une promotion immobilière mais que ce projet était bloqué.

h. En taxant la holding pour l’année fiscale 2017, par bordereaux du 28 juillet 2022, l'AFC-GE a rajouté la provision de CHF 511'500.- tant à son bénéfice qu’à son capital imposable.

i. Dans sa réclamation, A______ a exposé que la commune de C______ avait procédé à la révision générale de sa planification et adopté un nouveau plan général d'affectation (ci-après : PGA) des zones à bâtir. En 2017, ce plan avait fait l'objet d'un recours au Tribunal cantonal, puis, en 2019, d’un recours au Tribunal fédéral, ce qui avait créé une incertitude sur la possibilité de procéder à la construction sur certaines parcelles, dont celle détenue par la SI. Depuis lors, ce projet était resté « au point mort ». Dans son arrêt du 16 avril 2020 (ATF 146 II 289), le Tribunal fédéral avait annulé ce PGA, ce qui avait rendu caducs tous les projets. Elle avait donc procédé à une évaluation des chances de réaliser le projet initialement prévu, pour lequel elle avait octroyé à la SI le prêt provisionné. Celle‑ci était en surendettement, de sorte que ses fonds propres n'étaient plus couverts.

Dans ces conditions, le recouvrement de sa créance était partiellement compromis si l'on procédait à une évaluation du terrain au 31 décembre 2017. Au regard de ces grandes incertitudes, elle avait estimé qu'une provision devait être comptabilisée, selon le principe de prudence. Cette provision respectait les conditions légales (comptabilisation, justification par l'usage commercial et périodicité).

j. Par décisions du 11 janvier 2023, l'AFC-GE a rejeté la réclamation.

Selon les états financiers 2017 de la SI, ses actifs ne faisaient pas l'objet de dépréciations, ce qui signifiait que leur valeur n'était pas remise en question par le sort du projet immobilier en cours. Elle était ainsi en mesure de rembourser le prêt. De plus, elle n’avait pas provisionné sa participation dans la SI, ce qui sous-entendait qu’elle avait estimé qu'une liquidation théorique de sa filiale n'entraînerait pas de perte. La provision litigieuse n’était ainsi pas fiscalement justifiée.

B. a. Par acte du 16 février 2023, A______ a recouru contre ces décisions auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), concluant à l’admission de la provision de CHF 511'500.-.

À la suite à l’arrêt susmentionné du Tribunal fédéral, le projet immobilier de la SI était à l’arrêt et la finalisation d'un nouveau PGA pouvait prendre encore huit ans. L’objectif de la municipalité concernée semblait être de revoir les zones réservées et de réduire celles à bâtir. La parcelle n'avait donc plus la même valeur qu'à son achat. Elle avait une valeur incertaine dès lors qu’il n’y avait aucune « visibilité quant à savoir quand et si une construction sera envisageable un jour ».

Sur la base d’une évaluation fondée sur son expérience et les nombreuses opérations qu'elle avait menées, elle avait estimé qu'une dévaluation de 50% du prix au mètre carré du terrain semblait réaliste, compte tenu du fait que celui-ci ne pouvait être considéré comme constructible en raison du recours au Tribunal fédéral. Le fait que la SI n’avait pas comptabilisé une dépréciation du terrain ne justifiait pas le refus de la provision en cause.

Depuis la postposition de sa créance, la SI ne lui versait plus les intérêts y relatifs.

b. L'AFC-GE a conclu au rejet du recours.

L'absence d'amortissement extraordinaire au niveau de la SI témoignait du fait que le terrain n'avait pas perdu de valeur depuis son acquisition en 2012. Les incertitudes juridiques existantes n'avaient pas pour effet de diminuer la valeur du terrain, mais d'empêcher l’augmentation de celle-ci.

Le Tribunal fédéral s’était limité à renvoyer la cause à la commune de C______ pour qu’elle adapte son PGA, en prévoyant une affectation conforme au droit fédéral des portions de territoire comprises dans la zone réservée. Ainsi, il n’était pas possible de déterminer si une construction sur la parcelle de la SI était réalisable à l’avenir. Il était donc erroné d'affirmer que l'arrêt du Tribunal fédéral avait eu pour conséquence une perte de la valeur du terrain. L’intéressée n'avait pas produit d'expertise immobilière confirmant cette perte.

La postposition de la créance ne justifiait aucunement la provision en cause. Cette opération comptable n’avait pas empêché le paiement des intérêts en 2017, calculés sur l’entier de la créance, ce qui corroborait le fait que la provision était illégitime. La provision était par ailleurs excessive, rien ne permettant de retenir que le terrain avait la moitié de sa valeur.

c. Dans sa réplique, la contribuable a relevé que la commune de C______ avait adopté un règlement en 2021, prévoyant que la parcelle détenue par la SI était classifiée en zone réservée n° 3. Cette zone était destinée à empêcher provisoirement toute construction nouvelle. Seules étaient autorisées des interventions sur des bâtiments existants, à savoir l'entretien, la transformation intérieure, la transformation extérieure sans augmentation de volume, la transformation extérieure avec surélévation dans les limites prévues dans le présent règlement et la démolition ou reconstruction des bâtiments. En l’occurrence, le terrain ne comportait pas de construction et ne permettait donc aucun développement, ni aucune mise en valeur.

d. Par jugement du 18 décembre 2023, le TAPI a rejeté le recours.

La constitution d’une provision de CHF 511'500.- pour risque de perte de la moitié de la créance envers la SI était injustifiée. Rien ne permettait de considérer, en 2017, que cette perte était certaine ou même quasi-certaine. Les états financiers 2017 de la SI n’attestaient pas d’une incapacité durable de remplir ses obligations financières envers la contribuable. Au contraire, la SI avait comptabilisé tant l’intégralité de sa dette, y compris les intérêts dus, que l’entier de la valeur de sa parcelle. La holding n’avait pas requis, en 2017, le remboursement de sa créance et il n’apparaissait pas que la SI était incapable de la rembourser. Enfin, en 2017, le terrain n’avait pas perdu de sa valeur du seul fait que le PGA de la commune de C______ était contesté, puisque l’issue de cette contestation n’avait été connue qu’en 2021. Le risque de perte allégué n’était pas imminent en 2017.

C. a. Par acte expédié le 25 janvier 2024 à la chambre administrative de la Cour de justice, A______ a recouru contre ce jugement, dont elle a demandé l’annulation, concluant à l’admission de la provision querellée.

Aux 31 décembre 2016 et 2017, la SI se trouvait en situation de surendettement. C’était ainsi que la recourante avait accepté de postposer sa créance. Le projet de développement de la parcelle était sujet à caution dès 2017, année durant laquelle un recours avait été déposé auprès du Tribunal cantonal. Depuis lors, plus aucun développement n’avait pu avoir lieu sur la parcelle. Compte tenu des recours pendant en 2017 contre le PGA, aucun acheteur ne se serait aventuré à acquérir un bien immobilier au sujet duquel les possibilités de développement étaient suspendues à une décision judiciaire. Le risque d’une perte temporaire justifiait la provision de la moitié de sa créance. Il était normal qu’au vu de la convention de postposition, la recourante n’exige pas le remboursement de sa créance.

b. L’AFC-GE a conclu au rejet du recours.

Le Tribunal cantonal vaudois n’avait, le 17 janvier 2018, admis le recours que très partiellement. Le renvoi à l’autorité cantonale pour nouvelle décision n’avait en tant que tel pas d’impact sur la valeur du terrain. La situation prétendument précaire de la SI n’avait pas conduit à un correctif de la valeur de sa participation. La postposition ne constituait pas une mesure d’assainissement.

c. Dans sa réplique, la recourante a relevé qu’en 2017, il était difficile d’estimer la valeur intrinsèque de la parcelle détenue par la SI. La procédure judiciaire avait bloqué le marché. Après l’arrêt du Tribunal fédéral, il était aisé d’estimer sa valeur. En 2017 déjà, l’ampleur de la perte pouvait être estimée, en tout cas, à 50% de la créance. Peu importait la manière dont la SI avait procédé à un correctif à cet égard dans sa comptabilité.

d. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Il convient au préalable de déterminer le droit matériel applicable.

2.1 En l'absence d'une réglementation expresse contraire, le droit applicable à la taxation est celui en vigueur pendant la période fiscale en cause (ATF 140 I 68 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_715/2022 du 19 juillet 2023 consid. 5).

2.2 En l'espèce, le litige porte sur la taxation ICC et IFD pour l’année 2017. La cause est ainsi régie par le droit en vigueur en 2017, à savoir pour l’IFD par les dispositions de la LIFD et pour l'ICC celles de la loi sur l'imposition des personnes morales du 23 septembre 1994 (LIPM - D 3 15), de la loi fédérale sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes du 14 décembre 1990 (LHID - RS 642.14) et de la LPFisc.

La question à trancher étant traitée de la même manière en droit fédéral et en droit cantonal harmonisé, le présent arrêt traite simultanément des deux impôts, comme l'admet la jurisprudence (ATF 135 II 260 consid. 1.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_662/2014 du 25 avril 2015 consid. 1).

3.             Le litige porte sur l’admissibilité, pour la période fiscale 2017, de la provision pour risque de perte de la moitié de la créance de la recourante envers la SI.

3.1 L’impôt sur le bénéfice a pour objet le bénéfice net (art. 57 LIFD). Selon l’art. 58 al. 1 LIFD, dans sa teneur applicable en l'occurrence, le bénéfice net imposable comprend notamment le solde du compte de résultats (let. a), ainsi que tous les prélèvements opérés sur le résultat commercial avant le calcul du solde du compte de résultats, qui ne servent pas à couvrir des dépenses justifiées par l’usage commercial (let. b). Au nombre de ces prélèvements figurent notamment les amortissements et les provisions qui ne sont pas justifiés par l’usage commercial (let. b 2e tiret).

En droit cantonal, constitue le bénéfice net imposable celui qui résulte du compte de pertes et profits (art. 12 al. 1 let. a LIPM), augmenté notamment des amortissements et provisions qui ne sont pas justifiés par l’usage commercial (art. 12 al. 1 let. e LIPM ; également dans ce sens l'art. 16B al. 2 LIPM). L'art. 12 LIPM, même rédigé différemment, est de même portée que l'art. 58 al. 1 LIFD (ATA/705/2023 du 27 juin 2023 consid. 4.2 et l'arrêt cité).

3.2 Des provisions peuvent être constituées à la charge du compte de résultats, notamment, pour les engagements de l’exercice dont le montant est encore indéterminé, les risques de pertes sur des actifs circulants, notamment sur les marchandises, les débiteurs et les autres risques de pertes imminentes durant l’exercice (art. 63 let. a à c LIFD ; art. 16B al. 1 let. a à c LIPM). Les provisions qui ne se justifient plus sont ajoutées au bénéfice imposable (art. 63 al. 2 LIFD, art. 16B al. 2 LIMP).

3.3 L'admissibilité d'une provision au plan fiscal suppose qu'elle soit justifiée par l'usage commercial, qu'elle ait été dûment comptabilisée (arrêt du Tribunal fédéral 2C_455/2017 du 17 septembre 2018 consid. 6.3) et qu'elle porte sur des faits dont l'origine se déroule durant la période de calcul (principe de périodicité ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_723/2021 du 16 août 2022 consid. 5.2 et les arrêts cités).

3.3.1 Est justifiée par l'usage commercial toute provision portée au passif du bilan qui exprime le fait que le résultat de l'exercice ne peut pas être tenu pour définitif ; cette correction prévient le risque que le résultat ne soit pas conforme à la réalité et qu'une perte apparaisse ultérieurement, qui existait déjà au moment du bouclement des comptes. Encore faut-il que ce risque de perte soit réel, concret et imminent (arrêt du Tribunal fédéral 2C_581/2010 du 28 mars 2011 consid. 3.1).

Dans la mesure où une provision ne peut avoir pour objet que des pertes imminentes (art. 63 al. 1 let. c LIFD ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_478/2011 du 10 novembre 2011 consid. 2.1 ; 2C_581/2010 précité consid. 3.1), elle doit, pour être acceptée, parer à des risques menaçants découlant d'engagements ou de charges encourues, et non pas couvrir des risques aléatoires. Le droit fiscal n'admet ainsi pas la diminution artificielle du bénéfice par le biais de provisions injustifiées (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1101/2014 du 23 novembre 2015 consid. 3).

3.3.2 L'appréciation du risque doit être faite en tenant compte de tous les faits connus à la date du bouclement des comptes, et non de faits ultérieurs qui viendraient confirmer ou infirmer le montant de la provision (arrêts du Tribunal fédéral 2C_581/2010 précité consid. 3 ; 2C_392/2009 du 23 août 2009 consid. 2.1 et les références citées ; ATA/223/2020 du 25 février 2020 consid. 4c).

3.3.3 Les provisions constituant des déductions autorisées par la loi, leur caractère d'exception à l'impôt doit entraîner une interprétation restrictive de leur nature et de leur étendue (ATA/858/2018 du 21 août 2018 ; ATA/958/2014 du 2 décembre 2014 et les références citées).

3.4 Les art. 959 ss CO traitent des comptes annuels et de la tenue du bilan.

3.4.1 L’art. 960e CO traite des dettes qui doivent être comptabilisées à leur valeur nominale (al. 1). Lorsque, en raison d’événements passés, il faut s’attendre à une perte d’avantages économiques pour l’entreprise lors d’exercices futurs, il y a lieu de constituer des provisions à charge du compte de résultat, à hauteur du montant vraisemblablement nécessaire (al. 2). En outre, des provisions peuvent être constituées notamment aux titres suivants : 1. charges régulières découlant des obligations de garantie ; 2. remise en état des immobilisations corporelles ; 3. restructuration ; 4. mesures prises pour assurer la prospérité de l’entreprise à long terme (ch. 3). De plus, les provisions qui ne se justifient plus ne doivent pas obligatoirement être dissoutes (ch. 4).

3.4.2 Le droit fiscal et le droit comptable suisses poursuivent des objectifs différents. Le premier recherche une présentation qui fasse ressortir au mieux le résultat effectif et la réelle capacité contributive de l'entreprise, tandis que le second est avant tout orienté sur la protection des créanciers et fortement marqué par le principe de prudence (ATA/778/2016 du 13 septembre 2016 consid. 8 et les références citées). Dans ce contexte, les règles correctrices fiscales figurant à l’art. 58 al. 1 let. b et c LIFD visent à compenser le fait que le résultat comptable puisse s’éloigner de la réalité économique ; elles assurent une imposition du bénéfice qui tienne compte au mieux de la réelle situation patrimoniale d’une société. Par leur intermédiaire, le droit fiscal cherche à se rapprocher d’un système fondé sur le principe de l’image fidèle (« true and fair »), comme celui prévalant dans les normes de comptabilité internationales (Pierre-Marie GLAUSER, Apports et impôt sur le bénéfice, vol. 2, 2005, p. 96-97).

3.4.3 Les comptes établis conformément aux règles du droit commercial lient les autorités fiscales, à moins que le droit fiscal ne prévoie de règles correctrices spécifiques. L’autorité peut en revanche s’écarter du bilan remis par le contribuable lorsque des dispositions impératives du droit commercial sont violées ou des normes fiscales correctrices l’exigent (ATF 137 II 353 consid. 6.2 ; 136 II 88 consid. 3.1).

3.5 En l’espèce, il convient en premier lieu de relever qu’au 31 décembre 2017, la procédure de recours concernant le PGA était encore pendante devant le Tribunal cantonal vaudois. Celui-ci a, en effet, rendu son arrêt le 17 janvier 2018. Par ailleurs, l’autorité cantonale a rejeté l’un des recours et n’a que très partiellement admis l’autre. Il n’était ainsi, à fin 2017, pas possible de considérer, avec une certitude suffisante, que le prétendu risque lié à l’impossibilité de valoriser la parcelle dont la recourante avait financé l’acquisition soit quasi-certain et imminent.

En outre, l’arrêt du Tribunal fédéral, rendu trois ans plus tard, soit en avril 2020, ordonne le renvoi de la cause à la commune de C______ pour nouvelle décision. Selon les informations produites par la recourante devant le TAPI, la zone 3 dans laquelle est située la parcelle en question est destinée à empêcher provisoirement toute nouvelle construction. Il ne s’agit donc pas non plus d’un élément rendant vraisemblable que la valorisation de la parcelle serait à terme impossible.

Par ailleurs, le dossier ne comporte aucun élément permettant d’estimer la valeur du terrain ni de retenir que celle-ci aurait fortement diminué. Si l’architecte mandaté par la recourante se réfère à la perte de la valeur « intrinsèque » de la parcelle, il ne précise pas ce qu’il entend par ce terme ni si la valeur d’acquisition correspondait à cette notion. Ainsi, aucun élément ne rend vraisemblable la perte de la valeur de la parcelle de 50% du prix d’acquisition ; une telle perte n’est a fortiori pas non plus rendue quasi-certaine ou imminente à fin 2017.

La postposition de la créance de la recourante ne constitue pas non plus un indice permettant de retenir l’existence en 2017 d’un risque de perte imminent de la moitié de la créance de la recourante. Certes, si elle a accepté de postposer sa créance envers la SI en 2016, c’était pour éviter de devoir annoncer le surendettement de la SI au juge, comme l’impose l’art. 725a CO. Il ressort cependant des comptes produits par la recourante que la SI n’a, en tout cas depuis 2016, aucune activité. L’on comprend des explications de la recourante que la SI reste dans l’attente de pouvoir promouvoir et vendre sa parcelle ; elle a d’ailleurs retenu, en tout cas depuis 2016, dans ses actifs un montant d’environ CHF 150'000.- au titre de « développement promotion ». Dès que cette promotion sera réalisée, la recourante pourra recouvrer son investissement. Or, comme exposé ci-dessus, à fin 2017, il ne pouvait être considéré que cette promotion était compromise au point de retenir un risque, même partiel, de perte imminente en 2017 déjà.

Au vu de ce qui précède, l’AFC-GE a retenu à juste titre que la provision n’était fiscalement pas justifiée. Partant, le recours, mal fondé, sera rejeté.

4.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 700.- sera mis à la charge de la recourante, qui ne peut se voir allouer d’indemnité de procédure (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 25 janvier 2024 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 18 décembre 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 700.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession de la recourante, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;

communique le présent arrêt à A______, à l'administration fiscale cantonale, à l'administration fédérale des contributions ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Jean-Marc VERNIORY, président, Florence KRAUSKOPF, Michèle PERNET, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

M. MAZZA

 

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. VERNIORY

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :