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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1164/2023

ATA/586/2024 du 14.05.2024 sur JTAPI/899/2023 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1164/2023-PE ATA/586/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 14 mai 2024

1ère section

 

dans la cause

 

E______, enfant mineure, agissant par ses parents C______ et B______

D______, devenu majeur

C______ et B______ recourants

représentés par Me Guy ZWAHLEN, avocat

 

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 24 août 2023 (JTAPI/899/2023)


EN FAIT

A. a. B______, ressortissant du Kosovo né le ______1971, est arrivé en Suisse le 7 février 1998. Il a déposé, trois jours plus tard, une demande d’asile auprès de l’office fédéral des migrations, devenu depuis lors le secrétariat d’État aux migrations (ci-après : SEM). Cette demande a été rejetée le 21 juillet 1998 et la décision de renvoi prononcée a été exécutée le 24 novembre 2000.

b. Par la suite, B______ a été interpellé à diverses reprises par les forces de l’ordre, deux interdictions d’entrer en Suisse (ci-après : IES) ont été prononcées à son encontre par le SEM et il a été renvoyé, à quatre reprises, dans son pays d’origine par les autorités suisses.

c. Le 18 septembre 2002, B______ a épousé au Kosovo C______, ressortissante du Kosovo née le ______1976. De cette union sont nés, au Kosovo, A______ le ______2003 et D______ le ______2005 – arrivés à Genève avec leur mère en 2011 – ainsi que, à Genève, E______ le ______2012.

B. a. Par décision du 19 avril 2016, l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) a refusé de donner une suite positive à la demande d’octroi d'autorisations de séjour pour cas individuel d'extrême gravité déposée le 1er décembre 2014 par la famille B______ et C______ et de transmettre leur dossier avec un préavis positif au SEM, a prononcé leur renvoi de Suisse et leur a imparti un délai au 30 juin 2016 pour quitter la Suisse.

La durée du séjour de B______ n’était pas établie et sa présence en Suisse entre 1995 et 1997, 2001 et 2003 et en 2013 n’était pas démontrée. Il avait encore d’étroites attaches avec sa famille au Kosovo. La durée de la présence en Suisse de son épouse, qui y séjournait illégalement depuis 2011, ne permettait pas une suite différente. La réintégration d’A______ et D______ au Kosovo ne relevait pas d’une rigueur excessive. L'aîné y avait été scolarisé deux ans. E______ n’avait pas encore commencé sa scolarité et son intégration dans son pays d’origine était évidente. L’intégration professionnelle de B______ n’était pas remarquable. Sa famille et lui‑même étaient assistés par les services sociaux. Il avait fait l’objet d’une condamnation pénale à une peine pécuniaire avec sursis de 100 jours-amende à CHF 20.- le jour, avec un délai d’épreuve de trois ans, prononcée par le Tribunal de police le 25 mars 2015, pour escroquerie, séjour illégal et activités lucratives sans autorisation. Le suivi médical de la mère pouvait être fait au Kosovo. Malgré les demandes de l’OCPM, les détails des traitements que le père devait suivre n’avaient pas été communiqués. Les médicaments antidouleur et la physiothérapie étaient disponibles dans son pays d’origine.

b. Par jugement du 24 janvier 2017 (JTAPI/89/2017), le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) a rejeté le recours formé le 19 mai 2016 contre cette décision.

c. Par arrêt du 17 octobre 2017 (ATA/1407/2017), la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a rejeté le recours interjeté le 23 février 2017 contre ce jugement.

La durée du séjour en Suisse de B______ devait être qualifiée d’importante, mais néanmoins relativisée, au vu des renvois et retours en Suisse illégaux qui l’avaient ponctuée. Si B______ souffrait d'une hernie discale, l'évolution était lentement favorable et une intervention chirurgicale n'était indiquée qu’en cas de péjoration. Les documents médicaux, datés de mai 2015 et 2016, n’avaient pas été actualisés depuis lors, ce qui permettait de penser qu’une telle péjoration n’avait pas eu lieu. B______ avait été condamné à une peine pécuniaire de 100 jours-amende, notamment pour escroquerie, soit un crime. Il ne disposait pas d’un revenu, n’avait pas de travail alors même que la chambre des assurances sociales de la Cour de justice avait considéré qu’il n’avait pas droit à une rente d’invalidité, et bénéficiait de l’aide sociale. Les deux aînés avaient passé le début de leur vie dans leur pays d’origine. La plus jeune n’avait pas encore atteint un âge où une intégration dans sa patrie ne pouvait être exigée. L’intégration en Suisse de la mère, arrivée à 35 ans, n’avait rien de remarquable. Elle n’avait commencé à apprendre le français que peu de temps avant le début de la procédure, en 2015, et s’occupait de sa famille. L'exécution du renvoi était raisonnablement exigible. Les problèmes médicaux du père, que cela soit d’un point de vue psychique ou physique, ne nécessitaient pas en l’état de soins qui ne pourraient être prodigués dans son pays d’origine.

Le recours déposé contre cet arrêt a été déclaré irrecevable par le Tribunal fédéral le 22 novembre 2017 (arrêt 2D_47/2017).

d. L’OCPM a ensuite imparti un délai au 30 juin 2018 à la famille B______ et C______ pour quitter la Suisse.

C. a. Le 15 mai 2018, B______ a déposé auprès de l’OCPM « une demande de régularisation et de révision totale de [son] dossier et de [sa] famille pour nouveaux motifs conformément à l’ordonnance fédérale de madame Ruth Metzler de 2001 et conformément à l’Art. 33 de la Constitution Suisse Fédérale sur le droit de pétition ».

b. Par décision du 7 juin 2018, l’OCPM a refusé d’entrer en matière sur cette demande de régularisation, qualifiée de demande en reconsidération. La famille était tenue de quitter la Suisse au plus tard le 30 juin 2018.

c. Par jugement du 24 octobre 2018 (JTAPI/1022/2018), le TAPI a rejeté le recours de la famille B______ et C______ contre cette décision.

D. a. Le 31 décembre 2018, les époux B______ et C______ ont déposé une demande d’autorisation de séjour pour cas de rigueur dans le cadre de l'« opération Papyrus ».

b. Par décision du 16 janvier 2020, l’OCPM a refusé d’entrer en matière sur la demande d’octroi d’autorisation de séjour pour cas de rigueur dans le cadre de l’« opération Papyrus », qualifiée de demande en reconsidération.

Aucun fait nouveau et important n’était à relever et les circonstances ne s’étaient pas notablement modifiées depuis le prononcé des décisions antérieures en force.

c. Par arrêt du 24 février 2020 (AARP/76/2020), la chambre pénale d’appel et de révision de la Cour de justice a déclaré B______ coupable d’obtention de prestations d'aide financière indues, d’obtention illicite de prestations sociales et de séjour illégal, le condamnant à une peine pécuniaire de cent vingt jours-amende et à une amende de CHF 600.-. Son expulsion de Suisse pour une durée de cinq ans a également été ordonnée.

d. Par injonction du 7 avril 2020, le Ministère public a enjoint le service des peines et mesures et l’OCPM d’ordonner l’exécution des peines et mesures prononcées à l’encontre de B______ relevant de leurs compétences respectives.

e. Par jugement du 25 novembre 2020 (JTAPI/1036/2020), le TAPI a rejeté le recours contre la décision du 16 janvier 2020.

f. Par arrêt du 9 novembre 2021 (ATA/1196/2021), la chambre administrative a rejeté le recours interjeté contre ce jugement.

Même en prenant en compte que les époux B______ et C______ n'étaient plus aidés par l'hospice, ils ne fournissaient aucune indication sur leurs revenus. L'allégation selon laquelle ils remboursaient l'aide perçue était battue en brèche par l'attestation indiquant que le plan de paiement était peu respecté. La balance des intérêts en matière d'intégration ne penchait pas en faveur des époux B______ et C______ et de leurs enfants, au vu de la condamnation pénale récente du père. Les problèmes psychiques engendrés par l'imminence d'un renvoi n’étaient pas susceptibles de justifier la reconnaissance d'un cas de rigueur et les menaces de suicide n'astreignaient pas l'État concerné à s'abstenir d'exécuter la mesure envisagée s'il prenait des mesures concrètes pour en prévenir la réalisation. B______ était entouré par sa famille, que celle-ci soit en Suisse ou au Kosovo. Les moyens de preuve fournis, notamment quant au parcours d’A______ et d’D______, relevaient de l'écoulement du temps et ne pouvaient être considérés comme une modification notable des circonstances, sous peine de récompenser la persistance du non-respect des décisions en force.

g. Par trois courriers du 23 janvier 2023, l’OCPM a imparti à C______ et à ses deux enfants mineurs D______ et E______, à B______ et, finalement, à A______, devenu majeur, un ultime délai au 28 février 2023 pour quitter la Suisse et l’espace Schengen et leur a fixé un entretien de départ le 17 février 2023.

E. a. Par demande du 15 février 2023, C______ et B______ ont formulé auprès de l'OCPM, en leur nom propre et pour leurs enfants, A______, D______ et E______, une demande de réexamen pour faits nouveaux.

Depuis l'arrêt de la chambre administrative du 9 novembre 2021, l'état de santé du père s'était notablement détérioré. Il venait d'être mis au bénéfice d'une rente entière d'invalidité. Un réexamen de ses conditions de séjour et de celles de sa famille devait être effectué. Il se trouvait dans un état de santé permettant le prononcé de son admission provisoire. A______ suivait une formation de certificat fédéral de capacité (ci-après : CFC) et pouvait se prévaloir d'une intégration particulièrement aboutie. D______ et E______ étaient scolarisés à Genève depuis l'âge le permettant et la cadette y était née. Le renvoi violerait le droit conventionnel au respect de la vie privée et familiale au vu du long séjour en Suisse.

À l'appui de leur demande, ils ont produit plusieurs pièces.

Selon une attestation du centre de formation pré-professionnelle (ci-après : CFPP) du 6 février 2023, D______ était scolarisé dans le secteur plein temps du 30 août 2021 à fin juin 2023. Le projet de formation initiale qu’il était en train de construire avait de bonnes chances de démarrer à la rentrée scolaire 2023-2024. À teneur d'une attestation du G______ FOOTBALL CLUB du 9 février 2023, D______ œuvrait à satisfaction comme éducateur et était engagé jusqu'au 30 juin 2023.

Conformément à un courrier de la Docteure H______, pédiatre, E______ était en bonne santé et pouvait se prévaloir d’une très bonne scolarisation dans le canton. Elle ne connaissait pas le Kosovo et parlait beaucoup mieux le français que l’albanais. Un changement de pays et d’école à son âge serait très compliqué. Une attestation de scolarité du 16 février 2023 faisait état de l’assiduité et de la bonne intégration d’E______.

b. Par décision du 2 mars 2023, déclarée exécutoire nonobstant recours, l'OCPM a refusé d'entrer en matière sur les demandes de reconsidération de B______, C______, D______ et E______, qui étaient tenus de se conformer à la décision de renvoi dont ils faisaient l'objet et de quitter la Suisse et l'espace Schengen sans délai.

Le père ayant fait l'objet d'une décision d'expulsion pénale obligatoire, il n'était pas possible d'entrer en matière sur un quelconque examen pour l'octroi d'une autorisation de séjour. C______, D______ et E______ faisaient l'objet de plusieurs décisions administratives, toutes confirmées par les instances judiciaires, notamment le dernier arrêt relativement récent de la chambre administrative. Ils n'avaient jamais bénéficié d'autorisations de séjour et ne disposaient d'aucune tolérance depuis le 30 juin 2018. Aucun fait nouveau et important n'était allégué. Les conditions d'une reconsidération n'étaient pas remplies.

c. Par décision séparée du même jour, également déclarée exécutoire nonobstant recours, l’OCPM a aussi refusé d’entrer en matière sur la demande de reconsidération concernant A______, qui était lui aussi tenu de se conformer à la décision de renvoi dont il faisait l’objet et de quitter la Suisse et l’espace Schengen sans délai.

F. a. Par acte du 31 mars 2023, C______, B______, D______ et E______ ont recouru auprès du TAPI contre la décision les concernant, concluant à son annulation et à l'octroi d'autorisations de séjour en leur faveur.

Durant la procédure devant le TAPI, ils ont versé différentes pièces à la procédure.

Un rapport du service médical régional de l'assurance-invalidité (ci-après : AI) pour la Suisse romande (ci-après : SMR) du 27 juin 2022 faisait état d'un épisode dépressif sévère chez B______ en juillet 2020, désormais en rémission partielle. Selon un formulaire du 27 mars 2023, une demande d’admission de B______ avait été effectuée auprès de la Clinique du Grand-Salève en psychiatrie en raison de la recrudescence de la symptomatologie dépressive et des idées de mort passive. Selon la motivation d'une décision non datée, une rente entière d'invalidité avait été octroyée à compter du 1er février 2021 à B______ en raison d'une incapacité de travail durable de 50% dès févier 2020 puis de 100% de la 1er juillet 2020. Selon son « recours en grâce », B______ avait demandé le 16 avril 2021 une grâce concernant son expulsion.

À teneur d'un courrier de l’office cantonal des assurances sociales (ci-après : OCAS) du 12 avril 2023, D______ avait déposé une demande de mesures professionnelles pour mineur, sous la forme d’une formation professionnelle initiale, auprès de l’assurance-invalidité (ci-après : AI) le 2 décembre 2019. Il avait effectué sa scolarité en cursus ordinaire puis, dès 2019, en cursus spécialisé. L'OCAS intervenait au terme de sa scolarité dans le cadre de son orientation professionnelle, compte tenu de son atteinte à la santé. Il avait effectué plusieurs stages, notamment un stage probatoire auprès de l'I______de Vernier du 6 au 10 mars 2023. Un autre stage au sein de la J______ était en cours d’organisation et le choix de l’institution formatrice serait à déterminer à la fin du stage. En vue de l’approche de sa majorité, il était tenu de déposer une demande auprès de l'AI pour adulte dans les meilleurs délais. Conformément à un courriel de l’OCAS du 5 mai 2023, la mesure d’orientation en faveur d’D______ pour la rentrée 2023 au sein de l’I______de Vernier était confirmée.

b. Par réponse du 6 avril 2023, l'OCPM a conclu au rejet du recours.

Durant la procédure, l'OCPM a transmis au TAPI un rapport du 10 avril 2023 du Docteur K______ concernant les troubles dépressifs récurrents de B______, dont l'évolution était stationnaire et dont le pronostic sans traitement était sombre et avec traitement moyen, ainsi qu'une lettre de sortie du 3 mai 2023 de la Clinique du Grand-Salève, dans laquelle B______ avait séjourné du 3 au 16 avril 2023 en raison d'un décompensation anxio-dépressive sévère à la suite de l'annonce par l'OCPM du renvoi de la famille. Le diagnostic principal était un trouble dépressif récurrent avec épisode actuel de dépression sévère, sans symptômes psychotiques. Dans le contexte d'évolution favorable, la sortie définitive avait pu être prévue le 16 avril 2023 pour un retour à domicile avec reprise du suivi habituel.

c. Par jugement du 24 août 2023, le TAPI a rejeté le recours.

La décision du 19 avril 2016 était entrée en force. L'OCPM avait refusé d'entrer en matière sur deux précédentes demandes de reconsidération, la deuxième décision ayant été confirmée par le TAPI puis par la chambre administrative. L'état dépressif sévère de B______ et les idées suicidaires avaient été prises en compte par les instances judiciaires ayant examiné les précédentes demandes de reconsidération. Cette situation ne constituait pas un fait nouveau. Il ne s'agit pas non plus d'un fait notable, les problèmes psychiques engendrés par l'imminence d'un renvoi n'étant pas susceptibles de justifier la reconnaissance d'un cas de rigueur. Les menaces de suicide n'astreignaient pas la Suisse à s'abstenir d'exécuter le renvoi, mais à prendre des mesures concrètes pour en prévenir la réalisation. La situation médicale du père évoluait favorablement. Sa dépression pouvait être prise en charge dans son pays d'origine, tout comme son diabète et son hypertension artérielle. La rente AI était exportable au Kosovo et un retour dans son pays ne l'empêcherait pas d'en bénéficier. Rien dans le dossier ne précisait quels seraient les problèmes de santé d'D______. Rien ne laissait à penser que la situation médicale de ce dernier constituaient une modification notable des circonstances. Les arguments relatifs au respect de l'intérêt de leurs deux enfants mineurs reposaient sur des éléments (durée de séjour, de la scolarisation en Suisse, intégration) uniquement dus à l'écoulement du temps et au non-respect de la décision du 19 avril 2016. Il n'y avait aucune modification notable des circonstances justifiant l'entrée en matière sur la demande de reconsidération. À titre superfétatoire, même si l'OCPM était entré en matière, la famille n'aurait pas pu être mise au bénéfice d'une autorisation de séjour pour cas de rigueur, vu l'expulsion judiciaire, la demande déposée auprès de la commission des grâce ne modifiant pas la situation. Le renvoi avait été ordonné par décision du 10 avril 2016 et non par la décision litigieuse.

d. Par un autre jugement du même jour (JTAPI /1158/2023), le TAPI a également rejeté le recours d'A______ contre la décision du 2 mars 2023 le concernant.

G. a. Par acte du 29 septembre 2023, C______ et B______, agissant en leur nom propre et pour le compte de leurs enfants mineurs D______ et E______, ont recouru auprès de la chambre administrative contre ce jugement, concluant à son annulation, à l'octroi d'autorisations de séjour en leur faveur et à la condamnation de l'OCPM aux dépens.

Depuis l'arrêt de la chambre administrative du 9 novembre 2021, l'état de santé au niveau psychique de B______ s'était aggravé, avec un état dépressif sévère et un risque de suicide concret. Une expulsion n'était pas possible. Il y avait aussi une aggravation des atteintes à la colonne cervicale, avec la nécessité d'une opération dans les mois à venir, non réalisable au Kosovo pour une personne aux moyens financiers très modestes. Il se trouvait en Suisse depuis bientôt 20 ans. Il pouvait se prévaloir d'une intégration particulièrement réussie et sa réintégration au Kosovo serait difficile. Il se trouvait dans un cas individuel d'extrême gravité. Il y avait lieu à révision. Il y avait un autre fait nouveau, soit sa mise au bénéfice d'une rente d'invalidité, ce qui faisait qu'il n'était pas sur le marché du travail.

Une expulsion dans un pays qui n'était plus le leur constituerait un traumatisme irréparable pour les enfants, qui étaient scolarisés à Genève depuis de très nombreuses années, y avaient des amis et même, pour la cadette, y était née. Ils étaient protégés par le droit conventionnel. Sa femme et ses enfants devaient être mis au bénéfice d'une autorisation de séjour au titre du regroupement familial.

b. Par réponse du 31 octobre 2023, l'OCPM a conclu au rejet du recours, se référant au jugement attaqué et à ses observations produites devant le TAPI.

c. Le 30 octobre 2023, les époux B______ et C______ ont versé à la procédure une attestation du 12 octobre 2023 selon laquelle D______ était au bénéfice de prestations d'orientation professionnelle selon la législation sur l'AI à l'I______de Vernier du 21 août 2023 au 18 août 2024. Si cette année était concluante, il débuterait une formation professionnelle initiale qui se terminerait en juillet 2026.

d. Par réplique du 11 décembre 2023, les époux B______ et C______ ont maintenu leur recours.

Si les idées suicidaires envahissantes avaient désormais disparu, cette situation n'était pas pérenne car elles réapparaîtraient avec force en raison du contexte lié à une éventuelle expulsion vers le Kosovo. En cas de retour dans ce pays, il ne pourrait plus suivre le traitement qui avait permis de stabiliser son état. La réapparition d'une situation marquée par un risque concret et accru de suicide serait d'autant plus évidente qu'en cas de renvoi, il ne pourrait pas y assurer la survie de sa famille et l'éducation de ses enfants. Il y avait aggravation de son état de santé depuis 2021.

D______ nécessitait des mesures éducatives qui ne pouvaient lui être assurées qu'en Suisse. Il bénéficiait des prestations professionnelles de l'AI. E______ était en 8P, était une excellente élève très diligente et un renvoi serait très compliqué.

Le principe de coordination était violé dès lors que des services de l'État, comme l'I______de Vernier, soutenaient l'octroi du permis de séjour et l'OCPM s'y opposait.

Ils ont produit plusieurs pièces.

Selon un certificat médical de la Docteure L______, psychiatre psychothérapeute, du 29 novembre 2023, B______ souffrait d'un trouble dépressif récurrent et d'un syndrome douloureux somatoforme persistant. Il avait fait l'objet de trois hospitalisations, dont la dernière en avril 2023. Pendant ces séjours, une amélioration clinique avait été notée. Les améliorations n'étaient cependant pas durables puisque la symptmatologie s'aggravait de nouveau par la suite, dans le contexte multifactoriel (douleurs et limitation fonctionnelle consécutive, menace d'expulsion de Suisse et situation économique difficile). Il suivait plusieurs traitements antidépresseurs, voyait sa psychiatre environ une fois par mois, occassionnellement le Dr K______ et une psychologue une fois par mois. À teneur d'une attestation d'M______, psychologue, du 23 novembre 202,3, les premières observations de B______ révélaient une symptomatologie anxieuse avec principalement des angoisses régulières, des troubles du sommeil ainsi qu'une irritabilité accentuée. Un potentiel trouble dépressif sous-jacent devait être investigué.

Conformément à un courrier de l'I______de Vernier du 30 mai 2023, l'inscription d'D______ pour la rentrée scolaire 2023-2024 était confirmée. Selon une attestation de scolarité du 4 décembre 2023, E______ était inscrite en 8P à l'école ______ en 2023-2024. Dans un courrier du 14 novembre 2023, la Dre H______ attestait qu'E______ était une bonne élève et qu'elle allait entrer au cycle d'orientation l'année suivante.

e. Le 4 janvier 2024, les époux B______ et C______ ont produit un courrier de soutien relatif à E______ du 18 décembre 2023.

f. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Le litige porte sur le bien-fondé du refus de l’OCPM du 30 mars 2023 d’entrer en matière sur la demande d’autorisation de séjour des recourants pour cas de rigueur, traitée comme une demande de reconsidération.

3.             Les recourants affirment que des autorisations de séjour devraient leur être délivrées.

3.1.1 L'autorité administrative qui a pris une décision entrée en force n'est obligée de la reconsidérer que si sont réalisées les conditions de l'art. 48 al. 1 LPA. Une telle obligation existe lorsque la décision dont la reconsidération est demandée a été prise sous l'influence d'un crime ou d'un délit (art. 80 let. a LPA) ou que des faits ou des moyens de preuve nouveaux et importants existent, que le recourant ne pouvait connaître ou invoquer dans la procédure précédente (art. 80 let. b LPA ; faits nouveaux « anciens » ; ATA/1111/2023 du 10 octobre 2023 consid. 3.1).

Une telle obligation existe également lorsque la situation du destinataire de la décision s'est notablement modifiée depuis la première décision (art. 48 al. 1 let. b LPA). Il faut entendre par là des faits nouveaux « nouveaux » ou novæ véritables, c'est-à-dire survenus après la prise de la décision litigieuse, qui modifient de manière importante l'état de fait ou les bases juridiques sur lesquels l'autorité a fondé sa décision, justifiant par là sa remise en cause. Pour qu'une telle condition soit réalisée, il faut que survienne une modification importante de l'état de fait ou des bases juridiques, ayant pour conséquence, malgré l'autorité de la chose jugée rattachée à la décision en force, que cette dernière doit être remise en question (ATA/1111/2023 précité consid. 3.1 et les références citées).

Bien que l'écoulement du temps et la poursuite d'une intégration socioprofessionnelle constituent des modifications des circonstances, ces éléments ne peuvent pas être qualifiés de notables au sens de l'art. 48 al. 1 let. b LPA lorsqu'ils résultent uniquement du fait que l'étranger ne s'est pas conformé à une décision initiale malgré son entrée en force (ATA/1274/2023 du 28 novembre 2023 consid. 2.3).

3.1.2 Une demande de reconsidération ne doit pas permettre de remettre continuellement en cause des décisions entrées en force et d'éluder les dispositions légales sur les délais de recours (ATF 136 II 177 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_883/2018 du 21 mars 2019 consid. 4.3 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2e éd., 2018, n. 1417). C'est pourquoi, en principe, l'administré n'a aucun droit à ce que l'autorité entre en matière sur sa demande de reconsidération, sauf si une telle obligation de l'autorité est prévue par la loi ou si les conditions particulières posées par la jurisprudence sont réalisées (ATF 120 Ib 42 consid. 2b ; Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 1417).

3.1.3 Saisie d'une demande de reconsidération, l'autorité examine préalablement si les conditions de l'art. 48 LPA sont réalisées. Si tel n'est pas le cas, elle rend une décision de refus d'entrer en matière qui peut faire l'objet d'un recours dont le seul objet est de contrôler la bonne application de cette disposition (ATF 117 V 8 consid. 2 ; 109 Ib 246 consid 4a). Si lesdites conditions sont réalisées, ou si l'autorité entre en matière volontairement sans y être tenue, et rend une nouvelle décision identique à la première sans avoir réexaminé le fond de l'affaire, le recours ne pourra en principe pas porter sur ce dernier aspect. Si la décision rejette la demande de reconsidération après instruction, il s'agira alors d'une nouvelle décision sur le fond, susceptible de recours. Dans cette hypothèse, le litige a pour objet la décision sur réexamen et non la décision initiale (arrêts du Tribunal fédéral 2C_319/2015 du 10 septembre 2015 consid. 3 ; 2C_406/2013 du 23 septembre 2013 consid. 4.1).

L'autorité administrative n'est ainsi tenue d'entrer en matière sur une nouvelle demande que lorsque les circonstances ont subi des modifications notables ou lorsqu'il existe un cas de révision, c'est-à-dire lorsque l'étranger se prévaut de faits importants ou de preuves dont il n'avait pas connaissance dans la procédure précédente, qu'il lui aurait été impossible d'invoquer dans cette procédure pour des motifs juridiques ou pratiques ou encore qu'il n'avait alors pas de raison d'alléguer (ATF 136 II 177 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_556/2018 du 14 novembre 2018 consid. 3 et les références citées).

3.1.4 En droit des étrangers, le résultat est identique que l'on parle de demande de réexamen ou de nouvelle demande d'autorisation : l'autorité administrative, laquelle se base sur l'état de fait actuel, qui traiterait une requête comme une nouvelle demande, n'octroiera pas une autorisation de séjour dans un cas où elle l'a refusée auparavant si la situation n'a pas changé ; et si la situation a changé, les conditions posées au réexamen seront en principe remplies (arrêt du Tribunal fédéral 2C_715/2011 du 2 mai 2012 consid. 4.2 ; ATA/1620/2019 précité consid. 3e ; ATA/1244/2019 précité consid. 5b).

La juridiction saisie d'une demande de réexamen doit procéder à la mise en balance des intérêts en tenant compte des faits nouveaux, et peut à cet égard se limiter à l'examen de l'incidence sur le plan juridique des faits nouveaux survenus depuis la dernière décision entrée en force (arrêt du Tribunal fédéral 2C_203/2020 du 8 mai 2020 consid. 4.5).

3.1.5 Il ressort de la jurisprudence de la chambre administrative que l'OCPM a retenu que la survenance de problèmes urologiques constituait un fait nouveau justifiant l'entrée en matière sur une demande de reconsidération une décision de refus de reconnaissance d'un cas individuel d'extrême gravité (ATA/1274/2023 du 28 novembre 2023 consid. 2.4). La chambre administrative a par ailleurs dans un autre cas retenu que l'évolution de l'état de santé d'un enfant depuis le prononcé de la décision de refus de reconnaissance d'un cas individuel d'extrême gravité dont la reconsidération était demandée constituait un fait nouveau de reconsidération obligatoire, lequel devait amener l'OCPM à entrer en matière sur la demande de reconsidération et à l'instruire, en cas de besoin (ATA/93/2019 du 29 janvier 2019 consid. 5).

3.2 Les étrangers qui menacent la sécurité du pays peuvent être expulsés de Suisse (art. 121 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101). Ils sont privés de leur titre de séjour, indépendamment de leur statut, et de tous leurs droits à séjourner en Suisse s’ils ont perçu abusivement des prestations des assurances sociales ou de l’aide sociale (art. 121 al. 3 let. b Cst.). Les étrangers qui, en vertu des al. 3 et 4, sont privés de leur titre de séjour et de tous leurs droits à séjourner en Suisse doivent être expulsés du pays par les autorités compétentes et frappés d’une interdiction d’entrer sur le territoire allant de 5 à 15 ans. En cas de récidive, l’interdiction d’entrer sur le territoire sera fixée à 20 ans (art. 121 al. 5 Cst.).

Le juge expulse de Suisse l’étranger qui est condamné pour escroquerie (art. 146 al. 1 du code pénal suisse du 21 décembre 1937 - CP - RS 311.0) à une assurance sociale ou à l’aide sociale ou obtention illicite de prestations d’une assurance sociale ou de l’aide sociale (art. 148a al. 1 CP), quelle que soit la quotité de la peine prononcée à son encontre, pour une durée de cinq à quinze ans (art. 66a al. 1 let. e CP).

L’autorisation prend notamment fin lorsque l’expulsion au sens de l’art. 66a CP entre en force (art. 61 al. 1 let. e de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 - LEI - RS 142.20).

L’expulsion englobe la perte du titre de séjour et de tous les droits à séjourner en Suisse (phrase introductive de l’art. 121 al. 3 Cst.), l’obligation de quitter le pays (expulsion proprement dite) et une interdiction d’entrer sur le territoire allant de cinq à quinze ans. En cas de récidive, l’interdiction est prononcée pour 20 ans (art. 121 al. 5 Cst. ; FF 2013 5373, p. 5394). L’autorisation de séjour dont bénéficie l’étranger, quelle qu’elle soit (de courte durée, de séjour, d’établissement, de frontalier) prend fin automatiquement au moment où la décision d’expulsion entre en force (FF 2013 5373, p. 5439).

3.3 La procédure administrative est régie par la maxime inquisitoire, selon laquelle le juge établit les faits d’office (art. 19 LPA), sans être limité par les allégués et les offres de preuves des parties. Dans la mesure où l'on peut raisonnablement exiger de l’autorité qu’elle les recueille, elle réunit ainsi les renseignements et procède aux enquêtes nécessaires pour fonder sa décision. Elle apprécie les moyens de preuve des parties et recourt s’il y a lieu à d'autres moyens de preuve (art. 20 LPA). Le principe d’instruction d’office est toutefois contrebalancé par le devoir des parties de collaborer à leur établissement dans les procédures qu’elles introduisent elles‑mêmes (art. 22 LPA), en particulier d’étayer leurs propres thèses et d’indiquer à l’autorité les moyens de preuves disponibles, spécialement lorsqu'il s'agit d'élucider des faits qu'elles sont le mieux à même de connaître (ATA/111/2024 du 30 janvier 2024 consid. 3.1).

L'étranger est tenu de collaborer à la constatation des faits et en particulier de fournir des indications exactes et complètes sur les éléments déterminants pour la réglementation du séjour (art. 90 al. 1 let. a LEI ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_161/2013 du 3 septembre 2013 consid. 2.2.1). Il est tenu de fournir sans retard les moyens de preuves nécessaires ou s’efforcer de se les procurer dans un délai raisonnable (art. 90 al. 1 let. b LEI).

Selon la jurisprudence, l'art. 90 LEI met un devoir spécifique de collaborer à la constatation des faits déterminants à la charge de l'étranger ou des tiers participants (arrêts du Tribunal fédéral 2C_787/2016 du 18 janvier 2017 consid. 3.1 et 2C_777/2015 du 26 mai 2016 consid. 3.3, non publié in ATF 142 I 152).

Lorsque les preuves font défaut ou s’il ne peut être raisonnablement exigé de l’autorité qu’elle les recueille, pour les faits constitutifs d’un droit, le fardeau de la preuve incombe à celui qui entend se prévaloir de ce droit. Il appartient ainsi à l’administré d’établir les faits qui sont de nature à lui procurer un avantage et à l’administration de démontrer l’existence de ceux qui imposent une obligation en sa faveur (ATA/442/2024 du 27 mars 2024 consid. 6.1.12 ; ATA/12/2020 du 7 janvier 2020 consid. 6 et l’arrêt cité).

3.4 En l'espèce, la présente procédure concerne les deux parents, leur enfant D______, devenu majeur pendant la procédure devant la chambre administrative, ainsi que leur enfant mineure E______.

3.4.1 En ce qui concerne le père, il fait l'objet d'une expulsion pénale entrée en force, de sorte qu'aucun des faits allégués le concernant, y compris sa situation médicale, n'est susceptible de constituer un fait nouveau pertinent pour une reconsidération du refus de délivrance d'une autorisation de séjour. Une éventuelle révision de l'expulsion pénale, à supposer qu'elle soit possible, ne relève par ailleurs ni de l'objet du présent litige, ni de la compétence de la chambre de céans.

L'autorité intimée était par conséquent fondée à refuser d'entrer en matière sur la demande de reconsidération le concernant.

3.4.2 Les recourants font ensuite valoir qu'D______ nécessiterait des mesures éducatives ne pouvant lui être prodiguées qu'en Suisse, bénéficie de prestations professionnelles de l'AI et est inscrit à l'I______de Vernier pour l'année scolaire 2023‑2024.

Il ressort du courrier de l'OCAS du 12 avril 2023 qu'D______ a fini sa scolarité en cursus spécialisé, qu'il souffre d'une atteinte à la santé, que l'OCAS intervient pour son orientation professionnelle et qu'en vue de sa majorité, il devait déposer une demande auprès de l'AI pour adulte dans les meilleurs délais. D______ est entretemps devenu majeur, le 1er octobre 2023.

Contrairement à ce qu'a retenu le TAPI, ces éléments, postérieurs à 2017, suffisent à démontrer la survenance de faits nouveaux depuis l'entrée en force de la décision de refus d'autorisation de séjour initiale. Par ailleurs, ces faits n'ont pas été invoqués à l'appui des précédentes demandes de considération, de sorte qu'ils ne font pas l'objet d'une non-entrée en matière entrée en force. Au surplus, certains faits nouveaux sont postérieurs au dernier examen de la chambre administrative, puisqu'D______ a désormais terminé sa scolarité et bénéficie de mesures de l'AI.

Ces faits nouveaux ne découlent pas uniquement de l'écoulement du temps et modifient de manière importante l'état de fait, de sorte qu'ils dictent un nouvel examen de la situation d'D______ sous l'angle du cas individuel d'extrême gravité.

Autre est la question de savoir si les faits allégués et moyens de preuve fournis, dépourvus de toutes précision et ne permettant notamment pas de déterminer de quelle atteinte à la santé souffre D______, doivent conduire à une appréciation différente s'agissant de l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, question exorbitante au présent litige.

De plus, à ces faits nouveaux s'ajoute le fait que si D______ est resté en Suisse en dépit de la décision de refus d'autorisation de séjour et de renvoi de la famille et malgré les délais impartis pour l'exécution de celui-ci, il était, lors du prononcé de cette décision, âgé de 10 ans. Il était par ailleurs adolescent aux moments des refus d'entrée en matière de l'autorité intimée sur les précédentes demandes de reconsidération. Ainsi, ce sont ses parents qui ne se sont en tant que tels pas conformés à la décision dont la famille a fait l'objet, plus qu'D______, qui était lui encore mineur et sous leur autorité. Il apparaît dans ce contexte difficile de reprocher à D______ lui‑même de ne pas s'être conformé à la décision de refus d'autorisation de séjour et de renvoi. Il a depuis lors passé l'entier de son adolescence en Suisse, période décisive pour la formation de la personnalité, étant aujourd'hui âgé de 18 ans.

Si ces éléments découlent de l'écoulement du temps, ils doivent dans le cas particulier tout de même être pris en compte à titre de modification de circonstances justifiant un nouvel examen des conditions de délivrance d'une autorisation de séjour pour cas individuel d'extrême gravité, le non-respect de la décision du 19 avril 2016 n'étant pas directement imputable à D______.

Au vu de l'ensemble de ce qui précède, il revient à l'autorité intimée d'entrer en matière sur la demande de reconsidération et, le cas échéant, l'instruire, pour ensuite prononcer une décision au fond sur la demande de délivrance d'une autorisation de séjour pour cas individuel d'extrême gravité à D______.

3.4.3 S'agissant d'E______, les recourants font valoir la poursuite de sa scolarité, à pleine satisfaction à teneur des attestations versées à la procédure, E______ étant à présent en 8P et s'apprêtant à rentrer au cycle d'orientation l'année prochaine.

Toutefois, E______ n'est aujourd'hui qu'à l'orée de l'adolescence et les éléments avancés relèvent uniquement de l'écoulement du temps. Ils ne sauraient partant être pris en compte à titre de modification notable des circonstances, sous peine de récompenser la persistance dans le non‑respect des décisions en force, comme l'a déjà relevé la chambre de céans en 2021 (ATA/1196/2021 précité consid. 5).

3.4.4 Pour le reste, les recourants n'allèguent pas d'élément nouveau relatif à la mère.

Finalement, l'existence d'un fait nouveau justifiant l'entrée en matière sur la reconsidération concernant D______ ne constitue pas à elle seule un fait nouveau justifiant l'entrée en matière sur la reconsidération pour le reste de la famille, puisqu'D______ est majeur et qu'il n'y a donc plus de droit au regroupement familial, aucun lien de dépendance n'étant au surplus invoqué.

Il n'existe pas conséquent pas de motif de reconsidération obligatoire concernant C______ et E______. C'est dès lors conformément au droit que l'autorité intimée a refusé d'entrer en matière sur la demande de reconsidération les concernant.

4.             Les recourants invoquent des éléments médicaux concernant le père, de sorte qu'il convient d'examiner si la requête doit également être considérée comme une demande de reconsidération sous l'angle de l'admission provisoire.

4.1 L’admission provisoire n’est pas ordonnée ou prend fin avec l’entrée en force d’une expulsion obligatoire au sens des art. 66a CP (art. 83 al. 9 LEI).

Le département est compétent pour statuer sur le report de l'exécution de l'expulsion (art. 66D CP ; art. 5 al. 2 let. e de la loi d’application du code pénal suisse et d’autres lois fédérales en matière pénale du 27 août 2009 - LaCP - E 4 10). L'OCPM est compétent pour prendre les dispositions de mise en œuvre de l'expulsion prononcée par le juge pénal (art. 66a à 66b CP) ainsi que pour se prononcer sur le report de l'exécution de cette mesure (art. 66d CP ; art. 18 al. 1 du règlement sur l'exécution des peines et mesures du 19 mars 2014 - REPM - E 4 55.05).

Toute décision sur le report de l'exécution de l'expulsion est sujette à recours auprès de la chambre pénale de recours de la Cour de justice. Il en va de même de toute décision de l'OCPM relative au décision de l'OCPM relative au défaut de nouvelles circonstances permettant de reporter l'exécution de l'expulsion (arrêt du Tribunal fédéral 7B_132/2023  du 12 mars 2024 consid. 3.4.3).

4.2 En l'espèce, le père fait l'objet d'une expulsion pénale, de sorte qu'il ne peut bénéficier d'une admission provisoire, la décision litigieuse ne traitant au surplus pas de la question du report de l'exécution pénale, pour laquelle la chambre de céans ne serait au demeurant pas compétente.

Les recourants n'invoquent pour le reste pas d'éléments remettant en cause l'exécutabilité des renvois de la recourante et de l'enfant mineure.

Dans ces circonstances et au vu de l'irrecevabilité de la conclusion en délivrance des autorisations de séjour, exorbitante au présent litige, le recours sera rejeté dans la mesure de sa recevabilité en tant qu'il concerne C______, B______ et E______ et sera partiellement admis dans la mesure de sa recevabilité en tant qu'il concerne D______. Le jugement du TAPI et la décision de l'OCPM seront annulés en tant que le premier confirme et la seconde refuse l'entrée en matière sur la demande de reconsidération concernant D______. Le dossier sera renvoyé à l'autorité intimée pour entrée en matière sur la demande de reconsidération concernant D______, au besoin, instruction du dossier et, dans tous les cas, décision sur la délivrance ou non d'une autorisation de séjour pour cas individuel d'extrême gravité.

5.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge solidaire des époux B______ et C______ (art. 87 al. 1 LPA) et une indemnité de procédure de CHF 400.- sera allouée à D______, à la charge de l'État de Genève (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette, dans la mesure de sa recevabilité, le recours interjeté le 29 septembre 2023 par C______ et B______, agissant en leur nom propre et pour le compte de leur enfant mineure E______, contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 24 août 2023 ;

admet, dans la mesure de sa recevabilité, le recours interjeté le 29 septembre 2023 par D______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 24 août 2023 ;

annule le jugement du Tribunal administratif de première instance du 24 août 2023 en tant qu'il confirme le refus d'entrée en matière sur la demande de reconsidération du 15 février 2023 concernant D______ ;

le confirme pour le surplus ;

annule la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 2 mars 2023 en tant qu'elle refuse l'entrée en matière sur la demande de reconsidération du 15 février 2023 concernant D______ ;

renvoie le dossier à l'office cantonal de la population et des migrations pour nouvelle décision au sens des considérants ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge solidaire d'C______ et B______ ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 400.- à D______, à la charge de l'État de Genève ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Guy ZWAHLEN, avocat des recourants, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Eleanor McGREGOR, présidente, Patrick CHENAUX, Michèle PERNET, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

D. WERFFELI BASTIANELLI

 

 

la présidente siégeant :

 

 

E. McGREGOR

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.