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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2653/2023

ATA/222/2024 du 16.02.2024 sur JTAPI/2/2024 ( PE ) , REFUSE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2653/2023-PE ATA/222/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 16 février 2024

sur mesures provisionnelles

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Butrint Ajredini, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 3 janvier 2024 (JTAPI/2/2024)


Attendu, en fait, que

1) Par jugement du 3 janvier 2024, le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) a rejeté le recours formé par A______ (ci-après : le requérant) contre la décision du 21 juin 2023, déclarée exécutoire nonobstant recours, par laquelle l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) est entré en matière sur sa requête du 30 janvier 2023 mais a refusé de considérer la décision du 12 août 2021.

Le requérant n’avait pas produit de pièces probantes, telles qu'un certificat médical, confirmant le mauvais état de santé de son père, dont le statut et la présence en Suisse n’étaient par ailleurs aucunement établis. De la même manière, il n'avait pas démontré que celui-ci ne pourrait plus vivre de manière indépendante et nécessiterait une assistance constante dans ses tâches quotidiennes qu'il serait seul en mesure de lui prodiguer. En se limitant à alléguer que son frère, vivant à Genève, était en incapacité d'apporter toute aide à leur père, le requérant ne fournissait, une nouvelle fois, aucun élément pour corroborer cela. Partant, il n'avait pas démontré que son père se trouvait dans un état de dépendance à son égard, tel que défini par la jurisprudence relative à l'art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101).

2) Par acte du 5 février 2024, le requérant a recouru devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement, concluant à son annulation et à ce que l’OCPM reconsidère sa décision du 12 août 2021 et lui octroie une autorisation de séjour. Il a sollicité son audition ainsi que celle de témoins.

L’effet suspensif devait être octroyé au recours.

Il a repris les arguments précédemment développés. Outre sa très longue durée de séjour, il devait s’occuper de son père en sa qualité de proche aidant. Un renvoi en Turquie, après 22 ans de vie en Suisse, constituait une grave atteinte à ses intérêts privés, qui n’étaient justifiés par aucun intérêt prépondérant. En ne procédant pas à un examen complet de sa situation sous l’angle du cas de rigueur, le TAPI avait violé la jurisprudence et l’art. 8 CEDH.

3) Le 13 février 2024, l’OCPM s’est opposé à l’octroi de l’effet suspensif pour les motifs déjà exposés en première instance.

4) Le 15 février 2024, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger sur effet suspensif.

 

 

Considérant, en droit, que :

1) Les décisions sur mesures provisionnelles sont prises par la présidente ou le
vice-président de la chambre administrative ou, en cas d’empêchement de ceux-ci, par un autre juge (art. 21 al. 2 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 et art. 9 al. 1 du règlement interne de la chambre administrative du 26 mai 2020).

2) Aux termes de l’art. 66 LPA, sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l’autorité qui a pris la décision attaquée n’ait ordonné l’exécution nonobstant recours (al. 1) ; toutefois, lorsque aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s’y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l’effet suspensif (al. 3).

3) L’autorité peut d’office ou sur requête ordonner des mesures provisionnelles en exigeant au besoin des sûretés (art. 21 al. 1 LPA).

4) Selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, des mesures provisionnelles – au nombre desquelles compte la restitution de l'effet suspensif (Philippe WEISSENBERGER/Astrid HIRZEL, Der Suspensiveffekt und andere vorsorgliche Massnahmen, in Isabelle HÄNER/Bernhard WALDMANN [éd.], Brennpunkte im Verwaltungsprozess, 2013, 61-85, p. 63) – ne sont légitimes que si elles s’avèrent indispensables au maintien d’un état de fait ou à la sauvegarde d’intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/1112/2020 du 10 novembre 2020 consid. 5 ; ATA/1107/2020 du 3 novembre 2020 consid. 5).

Elles ne sauraient, en principe tout au moins, anticiper le jugement définitif ni équivaloir à une condamnation provisoire sur le fond, pas plus qu’aboutir abusivement à rendre d’emblée illusoire la portée du procès au fond (arrêts précités). Ainsi, dans la plupart des cas, les mesures provisionnelles consistent en un minus, soit une mesure moins importante ou incisive que celle demandée au fond, ou en un aliud, soit une mesure différente de celle demandée au fond (Isabelle HÄNER, Vorsorgliche Massnahmen in Verwaltungsverfahren und Verwaltungsprozess in RDS 1997 II
53-420, 265).

5) L'octroi de mesures provisionnelles présuppose l'urgence, à savoir que le refus de les ordonner crée pour l'intéressé la menace d'un dommage difficile à réparer (ATF 130 II 149 consid. 2.2 ; 127 II 132 consid. 3 = RDAF 2002 I 405).

6) L'effet suspensif ne peut être restitué lorsque le recours est dirigé contre une décision à contenu négatif, soit contre une décision qui porte refus d’une prestation ou d'une autorisation. La fonction de l’effet suspensif est de maintenir un régime juridique prévalant avant la décision contestée. Si, sous le régime antérieur, le droit ou le statut dont la reconnaissance fait l’objet du contentieux judiciaire n’existait pas, l’effet suspensif ne peut être restitué car cela reviendrait à accorder au recourant un régime juridique dont il n’a jamais bénéficié (ATF 127 II 132 ; 126 V 407 ; 116 Ib 344). Dans cette dernière hypothèse, seul l’octroi de mesures provisionnelles est envisageable (ATA/1369/2018 du 18 décembre 2018 consid. 3a ; ATA/70/2014 du 5 février 2014 consid. 4b ; ATA/603/2011 du 23 septembre 2011 consid. 2).

7) En l’espèce, le recourant fait l’objet d’une décision définitive et exécutoire de renvoi. Par décision du 30 janvier 2023, l’OCPM a rejeté la demande de reconsidération. Il s’agit donc d’une décision négative ne pouvant pas faire l’objet d’un octroi ou d’une restitution de l’effet suspensif. Seules des mesures provisionnelles sont dès lors envisageables.

Or, octroyer au recourant, sous la forme de mesures provisionnelles, le droit de rester en Suisse durant la procédure par-devant la chambre de céans reviendrait à annuler provisoirement la décision de renvoi, ce qui n’est pas admissible. Sa présence à Genève n'est du reste pas nécessaire pour maintenir l'état de fait, la procédure étant écrite et les pièces utiles ainsi que les diverses écritures de l’intéressé – assisté d’un conseil – figurant au dossier.

Il n'est, au demeurant, pas possible de retenir que les chances du recourant d’obtenir une autorisation de séjour sont significativement plus élevées que celles d’un refus. Les constats établis par le TAPI dans son jugement au sujet de l’absence de pièces probantes restent en effet d'actualité : le recourant n’a toujours pas produit de certificat médical confirmant le mauvais état de santé de son père, ni démontré que celui-ci ne pourrait plus vivre de manière indépendante. Enfin, en tant que le recourant se plaint de ce que l’autorité n’a pas examiné l’ensemble des critères du cas de rigueur, force est de relever que, selon la jurisprudence, si l'autorité entre en matière et rend une nouvelle décision identique à la première sans avoir réexaminé le fond de l'affaire, le recours ne pourra en principe pas porter sur ce dernier aspect (arrêts du Tribunal fédéral 2C_319/2015 du 10 septembre 2015 consid. 3 ; 2C_406/2013 du 23 septembre 2013 consid. 4.1). 

L’octroi de mesures provisionnelles sera dès lors refusé.

8) Le sort des frais sera réservé jusqu'à droit jugé au fond.

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette la demande de mesures provisionnelles ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond ;

dit que les éventuelles voies de recours contre la présente décision, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;

communique la présente décision à Me Butrint Ajredini, avocat du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu’au secrétariat d’État aux migrations.

 

 

Le président :

 

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

la greffière :