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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2862/2022

ATA/154/2023 du 14.02.2023 ( FPUBL ) , REJETE

Descripteurs : CONDITION DE RECEVABILITÉ;QUALITÉ POUR RECOURIR;DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE;RAPPORTS DE SERVICE DE DROIT PUBLIC;RÉSILIATION;LICENCIEMENT ADMINISTRATIF;POUVOIR D'APPRÉCIATION;INTERDICTION DE L'ARBITRAIRE;PROPORTIONNALITÉ
Normes : LPA.65; LPA.60.al1.letb
Résumé : Confirmation de la résiliation des rapports de service durant la période probatoire, de nombreux manquements professionnels ayant été relevés. Rejet du recours.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2862/2022-FPUBL ATA/154/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 14 février 2023

 

dans la cause

 

Madame A______

contre

COMMUNE DU B______
représentée par Me Lorella Bertani, avocate



EN FAIT

1) Madame A______, née en 1975, a été engagée par la commune du
B______ (ci-après : la commune) dès le 1er avril 2019 en qualité d’adjointe à la cheffe du service des bâtiments à 100 % avec une période probatoire de
trois ans.

2) Selon le cahier des charges de Mme A______, sa mission consistait à gérer et entretenir les bâtiments du patrimoine financier et administratif de la commune, améliorer les bâtiments sur le plan énergétique, gérer les concierges et responsables de concierges, et suppléer la cheffe de service.

3) Lors de l’entretien d’évaluation après trois mois d’activité, Madame C______, cheffe de service et supérieure hiérarchique directe de Mme A______, a considéré que l’évaluation des compétences générales correspondait aux exigences requises pour le poste, relevant que l’intéressée était très impliquée dans son travail, avait su s’intégrer au sein du service et avait le sens des responsabilités et du service public. Mme A______ s’est, pour sa part, déclarée motivée par son poste et très satisfaite de ses conditions d’encadrement, louant les qualités de sa supérieure.

4) À l’occasion du deuxième entretien de collaboration portant sur les mois de juillet à septembre 2019, Mme C______ a souligné le sens de l’organisation de
Mme A______ ainsi que sa disponibilité, sa souplesse et ses facultés d’adaptation et de communication. L’intéressée a indiqué être satisfaite de son poste et de l’encadrement.

5) L’évaluation menée par Mme C______ après un an d’activité s’est déroulée le 15 juillet 2020. La cheffe de service a confirmé que les compétences générales de Mme A______ répondaient aux attentes. Elle était très contente du travail et de la réactivité de la collaboratrice, persévérante et toujours orientée « solutions ». L’employée a également manifesté sa satisfaction générale, relevant cependant que certaines tâches ne lui paraissaient pas en adéquation avec ses compétences et devraient être traitées par d’autres services.

6) L’entretien de collaboration effectué après deux ans a été conduit le
26 août 2021 par Monsieur D______, secrétaire général, et
Monsieur E______, conseiller administratif, Mme C______ étant en arrêt maladie. Mme A______ a alors émis de nombreuses critiques à l’encontre de sa cheffe de service, estimant que cette dernière choisissait mal ses priorités, déléguait ce qu’elle ne savait pas faire, avait une « image superficielle », n’était pas honnête, agissait « plutôt par la menace que par la conviction » et ne communiquait pas clairement et précisément. Après avoir relevé qu’elle avait dû pallier les absences de sa supérieure et faire face à un surcroît de travail, les évaluateurs ont invité l’employée à bien étudier les alternatives lorsqu’il y en avait et à ne pas préjuger la solution qui paraissait la plus adaptée de prime abord. La gestion et l’utilité des piquets sur les différents sites étaient à améliorer. Ils ont noté que Mme C______ avait démissionné et qu’ils espéraient que cela permettrait au service de repartir sur des bases saines et efficientes.

7) Par courriel du 14 janvier 2022 adressé à Monsieur F______, responsable des ressources humaines, Monsieur G______, chef du service des bâtiments et équipements publics depuis le 22 novembre 2021, a relevé des manquements dans le comportement et le travail de Mme A______, détaillant de nombreux incidents survenus depuis son entrée en fonction. Il a joint des échanges de messages électroniques entre l’employée d’une part, et le secrétaire général et le chef du service des finances d’autre part.

8) Le 28 janvier 2022, Mme A______ a été convoquée à un entretien de service en présence de MM. G______ et F______. Le supérieur hiérarchique a relevé des comportements inappropriés de l’employée à son égard et à l’endroit d’un conseiller administratif, un traitement inadéquat des demandes des clients internes ainsi que la volonté d’imposer à tout prix son point de vue sans écouter les arguments des autres, y compris ceux du conseiller administratif. À la question de savoir pour quelle raison, malgré divers échanges oraux, son attitude à l'égard de son supérieur ne s'était pas améliorée, Mme A______ a répondu que son chef avait, dès son arrivée, « foncé et voulu tout prendre sans prioriser », alors qu’il « aurait fallu prendre du recul avant d’avancer et du coup », elle s’était « renfermée ». Elle avait eu le sentiment de ne pas avoir été entendue lors de la mise au courant des dossiers. Concernant une commande de mobilier qui ne correspondait pas à la demande initiale, elle a indiqué qu’elle n’avait pas eu l’impression d’avoir fait une « faute grave », « qu'il n'y avait pas eu mort d'homme » et qu’il « n’y avait pas une telle gravité » qu'elle doive présenter des excuses. Interrogée sur son comportement « extrêmement désagréable » avec le conseiller administratif qui avait dû la recadrer sèchement lors d’une séance le 13 décembre 2021 car elle le contredisait systématiquement et faisait l'inverse de ce qu'il lui demandait, Mme A______ a indiqué : « Je ne m'explique pas ce comportement, mea culpa. Je pense qu'on a tous le droit à un pétage de câble ( ) Je n’ai pas d’excuse ». M. G______ a rappelé qu’il lui avait signifié le lendemain qu’il ne pouvait admettre de tels comportements et que, malgré cette mise au point, la situation ne s'était pas améliorée. Mme A______ a rétorqué « Est-ce qu'on peut changer un comportement en un jour ? ». S’agissant d’une séance le 11 janvier 2022, au cours de laquelle elle avait répondu à son supérieur de manière exaspérée, se comportant de façon négative, tout en justifiant ses erreurs, elle a indiqué « Je n'aurais pas dû répondre ainsi. Je ne m'en suis pas rendu compte ». Enfin, deux autres exemples ont été évoqués au sujet de la qualité de son travail et du manque de respect des instructions données. La collaboratrice a conclu qu’elle ne pouvait pas supprimer son vécu au cours des six mois de stress intensif avant l’arrivée du nouveau chef, qu’elle n’avait pas d’excuse pour son comportement et qu’elle devait « clairement faire des efforts ».

9) Par décision du 15 février 2022 entrée en force, la commune a prononcé un blâme à l’encontre de Mme A______, suite aux manquements relevés lors de l'entretien du 28 janvier 2022. Elle attendait de sa collaboratrice qu’elle respecte les instructions, soit « orientée services » et fasse preuve d'une collaboration irréprochable avec les services de l'administration communale ainsi que ses supérieurs hiérarchiques. Tout nouveau manquement à ses obligations pourrait conduire le Conseil administratif à mettre fin aux rapports de service.

10) Lors de l’entretien de collaboration portant sur la période du 27 août 2021 au
17 février 2022, MM. D______ et G______ ont rappelé à Mme A______ qu’un important effort d’amélioration était attendu de sa part, en particulier en termes de communication, de collaboration, d’esprit d’équipe, d’ouverture au changement et d’attitude constructive. Ils lui ont reproché d'avoir adjugé des travaux sans en référer aux supérieurs, laissé plusieurs dossiers sans traitement pendant la période d'intérim, manqué de précision et de suivi des travaux jusqu'à leur réception, de systématique dans les contre-offres, de maîtrise de soi vis-à-vis du conseiller administratif. Mme A______ s'adaptait mal au changement de supérieur hiérarchique et aux nouvelles méthodes de travail. L'appréciation globale des prestations était insatisfaisante et un changement radical était indispensable pour envisager la poursuite de la collaboration. Mme A______ a contesté certains points, mais admis avoir confié des travaux en se fiant à ce qui avait été exécuté par le passé, sans vérifier avant de signer. Elle s’est déclarée satisfaite dans son poste, mais pas des conditions d'encadrement, reprochant à son chef de ne pas avoir traité les dossiers selon les priorités qu'elle avait prévues. Elle a indiqué : « Je suis désolée d'avoir été froide au début de notre collaboration. J'ai besoin de me sentir en confiance et peut-être était-il nécessaire d'aller au "clash" afin de crever l'abcès ».

11) Par courrier du 14 mars 2022, la commune a prolongé la période probatoire de Mme A______ pour une durée de six mois, en raison du blâme et des prestations insuffisantes. Une nette amélioration était attendue de la part de l’employée sur plusieurs points précisés qui feraient l’objet d’évaluations régulières. Si les prestations ne devaient pas s'améliorer de manière significative, le Conseil administratif pourrait décider de mettre fin au contrat de travail.

12) Lors de son bilan pour la période du 18 février au 21 avril 2022, le chef de service a constaté que les prestations et le comportement de Mme A______ n’avaient pas changé de manière radicale. La communication de l’employée et la collaboration avec lui et les services de l’administration communale n’étaient pas satisfaisantes, tout comme le suivi des travaux et l’implication dans les dossiers importants.

13) Le 12 mai 2022, le Conseil administratif a reçu Mme A______ et M. G______, en présence de M. F______, et leur a proposé une médiation. Cette dernière n'a pas abouti.

14) Dans son rapport d'évaluation pour la période du 21 avril au 8 juillet 2022,
M. G______ a noté une dégradation de la collaboration. Sa santé commençait à être affectée par cette « guerre des tranchées » menée par sa collaboratrice, dont la communication se limitait à « bonjour » et « au revoir ». Elle montrait régulièrement de l'agacement ou de l'exaspération à son égard, et le tournus des entreprises n'était exécuté que s’il insistait à plusieurs reprises. Diverses lacunes étaient constatées dans le contrôle des offres reçues et les demandes de
contre-offres. Aucun changement n'avait eu lieu concernant le suivi des travaux, la collaboration et l'implication.

Le 12 juillet 2022, Mme A______ a fait part de ses commentaires par écrit, répondant avec précision aux manquements reprochés. À plusieurs reprises, elle a rappelé que son cahier des charges était celui d’une adjointe et non d’une secrétaire de direction, et qu’il requérait une certaine autonomie sans avoir à solliciter son supérieur pour toutes les demandes relevant de sa compétence. Il lui semblait clair que M. G______ recherchait une assistante pour diriger son personnel comme bon lui semblait, ajoutant qu’il aimait lui rappeler qu’il était le chef et prendre un ton menaçant.

15) Le 14 juillet 2022, le Conseil administratif a constaté l’absence d’amélioration dans la relation entre Mme A______ et M. G______. Au contraire, la situation se détériorait et devenait intenable. Il a demandé au secrétaire général et au responsable des ressources humaines de convoquer séparément ces collaborateurs, en application de l'art. 87 du statut du personnel de la commune du 13 décembre 2021 (ci-après : le statut).

16) Le 20 juillet 2022, Mme A______ a été entendue par M. D______. Elle a exposé que les évaluations de son chef de service étaient faussées et ne relevaient que des points négatifs, sans soulever les positifs. Son supérieur ne lui reconnaissait pas une certaine autonomie et occultait ou dénigrait tout ce qu’elle proposait. Elle lui a reproché un manque de confiance et de soutien, des contrôles excessifs et des évaluations injustes. Dans le délai accordé à cet effet, elle a formulé des commentaires complémentaires.

17) Par décision du 11 août 2022 remise en mains propres le jour même, la commune a résilié les rapports de service de Mme A______ pour le 31 octobre 2022. Après avoir rappelé que le droit d'être entendu avait été respecté, le Conseil administratif a constaté que le lien de confiance était irrémédiablement rompu et qu’il n'y avait d'autres solutions que de mettre fin aux rapports de travail. En effet, depuis la décision de prolongation de la période probatoire de six mois, les améliorations attendues ne s’étaient pas concrétisées. Les deux derniers rapports n’avaient pas relevé une prise de conscience de la part de la collaboratrice sur les attentes de l'administration communale. Au contraire, le Conseil administratif avait constaté une dégradation de la relation de travail avec le supérieur et une absence totale de remise en question.

18) Par acte du 9 septembre 2022, Mme A______ a interjeté recours par-devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant à l’octroi d’un délai supplémentaire pour compléter son recours, à l’annulation de la décision contestée, à pouvoir garder son poste et à la « revue » de sa nomination en fonction des évaluations avant le
15 novembre 2022. Subsidiairement, elle a sollicité un dédommagement de six mois de salaire pour le préjudice moral subi, la prise en charge des frais de présentation aux examens de management afin qu’elle puisse terminer cette formation et un certificat de travail.

La recourante a soutenu qu’elle avait subi des propos et des comportements dénigrants de la part de M. G______ dès son entrée en fonction, qu’il avait exercé une pression malsaine et adopté des comportements inacceptables afin de la fragiliser et l’isoler, qu’il avait négativement interprété ses conseils alors qu’elle avait tout mis en œuvre pour l’aider dans ses nouvelles fonctions. Il avait injustement perçu ses contributions professionnelles comme des atteintes à la sécurité de son poste et leur relation s’était encore plus dégradée lorsqu’il avait appris qu’elle avait postulé pour la fonction qu’il occupait. Son licenciement se basait uniquement sur des évaluations établies par un supérieur injustement virulent à son égard, qui avait été reconnu inapte et incompétent dans ses nouvelles fonctions et licencié le 15 août 2022. Il était absent pour cause de maladie depuis le
16 août 2022 et elle avait dû rattraper ses erreurs. Elle avait souhaité attirer l’attention des conseillers administratifs sur ces dernières, mais sa demande de séance était restée sans suite. Ses évaluations professionnelles avaient été excellentes jusqu’au 26 août 2021 et son travail irréprochable. Elle avait remplacé la précédente cheffe de service pendant ses périodes de vacances, ses arrêts maladie longs et répétés, et l’avait même remplacée ad intérim pendant plus de six mois en 2021, à l’entière satisfaction de sa hiérarchie. Elle avait fait preuve d’implication entière et efficace en dépit de la pression et du conflit, et démontré un dévouement actif malgré la charge de travail et les impératifs toujours plus pressants. Les collaborateurs, les chefs de service et les conseillers administratifs avaient souvent préféré s’adresser à elle, toujours agréable dans sa collaboration et proactive, pour trouver des solutions. Malgré la décision litigieuse, elle continuait à collaborer avec M. E______ et les différents chefs de service. À aucun moment, il n’avait été demandé aux collaborateurs ou aux autres services de témoigner sur son travail ou ses relations professionnelles irréprochables.

19) Le 13 septembre 2022, la chambre administrative a accordé à la recourante un délai au 20 septembre 2022 pour compléter son recours, ce que l’intéressée n’a pas fait.

20) Le 31 octobre 2022, l’intimée a transmis un certificat de travail à
Mme A______.

21) En date du 16 novembre 2022, l’intimée a conclu à ce que la recourante soit invitée à indiquer si elle avait trouvé un nouvel emploi et, dans l’affirmative, depuis quelle date, à ce qu’il soit dans un tel cas constaté que le recours était irrecevable en l’absence d’un intérêt actuel, à ce qu’il soit constaté que toutes les conclusions étaient irrecevables faute d’être fondées sur une base légale, au rejet du recours, à ce que la décision de licenciement soit confirmée, et à ce qu’il soit constaté que la demande relative à la délivrance d’un certificat de travail était sans objet. Subsidiairement, elle a conclu au rejet du recours, à la confirmation de la décision de licenciement et à ce qu’il soit constaté que la demande tendant à la délivrance d’un certificat de travail était sans objet.

22) Le 16 novembre 2022, la chambre administrative a transmis cette écriture à la recourante et lui a imparti un délai au 1er décembre 2022 pour formuler toute requête ou répliquer.

23) Sans nouvelles de la recourante, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 -
LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du
12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 95 al. 1 du statut).

2. a. À teneur de l’art. 65 LPA, l’acte de recours contient, sous peine d’irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant (al. 1). L’acte de recours contient également l’exposé des motifs ainsi que l’indication des moyens de preuve. Les pièces dont dispose le recourant doivent être jointes. À défaut, la juridiction saisie impartit un bref délai au recourant pour satisfaire à ces exigences, sous peine d’irrecevabilité (al. 2).

b. L’écriture du 9 septembre 2022 répond à ces exigences et il n’incombait pas à la recourante de préciser sur quelles bases légales se fondaient ses conclusions, contrairement à ce que soutient l’intimée.

3. a. Conformément à l'art. 60 al. 1 let. b LPA, ont qualité pour recourir toutes les personnes qui sont touchées directement par une décision et ont un intérêt digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée.

Le recourant doit avoir un intérêt pratique à l’admission du recours, soit que cette admission soit propre à lui procurer un avantage, de nature économique, matérielle ou idéale (ATF 138 II 162 consid. 2.1.2 ; ATF 137 II 30 consid. 2). Un intérêt digne de protection suppose un intérêt actuel à obtenir l’annulation de la décision attaquée, exigence qui s’apprécie non seulement au moment du dépôt du recours, mais aussi lors du prononcé de la décision sur recours (ATF 138 II 42 consid. 1 ; ATF 137 I 296 consid. 4.2) ; si l'intérêt s'éteint pendant la procédure, le recours, devenu sans objet, doit être simplement radié du rôle (ATF 125 V 373 consid. 1) ou déclaré irrecevable (ATF 123 II 285 consid. 4 ; ATA/322/2016 du 19 avril 2016; ATA/308/2016 du 12 avril 2016).

b. La question de savoir si la recourante a trouvé un nouvel emploi est sans pertinence puisque celle-ci a notamment conclu à l’octroi d’un dédommagement financier, ce que permet dans une certaine mesure le statut (art 95 al. 2 du statut). Indépendamment de sa situation professionnelle actuelle, l’intéressée dispose donc d'un intérêt à recourir contre la décision du 11 août 2022.

4. Le litige porte sur la conformité au droit de la décision de résiliation des rapports de service de la recourante du 11 août 2022 pour le terme du
31 octobre 2022.

5. a. Les rapports de travail des membres du personnel de la commune sont régis par le statut et par les clauses du contrat de travail. Ils sont soumis au droit public
(art. 5 du statut).

Le statut du personnel de la commune du 9 novembre 2015 a été annulé et remplacé par la version du 13 décembre 2021, entrée en vigueur le 12 février 2022 (art. 106 du statut), immédiatement applicable à tous les membres du personnel travaillant au sein de la ville au jours de son adoption (art. 107 du statut).

b. Selon l’art. 2 du statut, la personne employée est engagée, à temps complet ou partiel, pour occuper une fonction permanente et accomplir une période probatoire de trois ans.

À teneur de l’art. 3 du statut, a la qualité de fonctionnaire, la personne ainsi nommée pour une durée indéterminée par le Conseil administratif pour exercer, à temps complet ou partiel, une fonction permanente au sein de la ville (al. 1). La nomination en qualité de fonctionnaire est précédée d’une période probatoire de trois ans, effectuée en qualité de personne employée (al. 2).

Conformément à l’art. 13 du statut, pour pouvoir être nommée en qualité de fonctionnaire, la personne employée doit avoir occupé la fonction au service de la ville et ce, pour une période probatoire de trois ans (al. 1). Si la nomination ne s’avère pas possible, le Conseil administratif peut, soit prolonger la période probatoire pour une durée maximum de six mois, soit résilier l’engagement selon les modalités prévues aux art. 83ss du statut. Dans les deux cas, la personne concernée peut demander à être entendue par la personne exerçant la fonction de secrétaire général, qui l’informera des motifs.

Ces dispositions correspondent à ce que prévoyait déjà le statut en vigueur jusqu’au 11 février 2022 (art. 2, 3 et 12 du statut).

c. Les personnes membres du personnel sont soumises aux devoirs généraux précisés aux art. 23ss du statut. Elles sont notamment tenues d’agir en toutes circonstances conformément aux intérêts de la commune et de s’abstenir de tout ce qui pourrait lui porter préjudice (art. 23 al. 1 du statut), de se conformer avec loyauté aux décisions prises par les autorités politiques de la commune et à celles de la personne assurant le rôle de responsable hiérarchique (art. 23 al. 2 du statut), d’entretenir par leur attitude des relations dignes et correctes avec la personne assurant le rôle de responsable hiérarchique, leurs collègues et les personnes sous leurs conduites, permettre et faciliter la collaboration entre ces personnes (art. 24 let. a du statut), d’être en tout temps aptes à remplir leurs obligations avec diligence, fidèlement et consciencieusement (art. 25 al. 1 du statut), de s’entraider et se remplacer dans leur travail, selon les besoins du service et notamment lors de maladies et ou de congés (art. 25 al. 5 du statut), de se conformer aux instructions des personnes assurant le rôle de responsable hiérarchique et en exécuter les ordres avec conscience et discernement (art. 25 al. 6 du statut). Il leur est notamment interdit de faire quoi que ce soit qui puisse entraver la bonne marche du service
(art. 22 al. 4 in fine du statut). Ils doivent se conformer aux instructions de leurs supérieurs et en exécuter les ordres avec conscience et discernement (art. 22
al. 6 du statut).

Ces devoirs généraux étaient précédemment énoncés aux art. 20ss de l’ancien statut.

d. L’art. 83 du statut prévoit que le Conseil administratif est l'autorité compétente pour prononcer la fin des rapports de travail et des rapports de service (al. 1). Il peut déléguer cette compétence à la personne exerçant la fonction de secrétaire général (al. 2). L’art. 84 du statut régit les délais de résiliation des personnes employées et précise que, pendant la période d’essai d’un à trois mois, le rapport de travail d’une personne employée peut être librement résilié, de part et d’autre, une semaine à l’avance, pour la fin d’une semaine. Ce délai est porté, après la période d’essai et durant la première année, à un mois à l'avance pour la fin d'un mois (al. 1). Dès la deuxième année, le délai est porté à deux mois pour la fin d'un mois (al. 2). Lorsque la résiliation est le fait de l’employeur, la personne employée doit être entendue par la personne exerçant la fonction de secrétaire général et être informée des motifs de la résiliation conformément à l’art. 87 du statut (al. 3).

Le licenciement d'employés en période probatoire tel que prévu par le statut est identique à celui prévu par la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05 ; art. 21 al. 1 LPAC).

Contrairement aux fonctionnaires qui ne peuvent être licenciés qu’en présence d’un motif objectivement fondé, dûment constaté, démontrant que la poursuite des rapports de service est rendue difficile en raison de l’insuffisance des prestations, du manquement grave ou répété aux devoirs de service ou de l’inaptitude à remplir les exigences du poste, la présence d’un motif fondé n’est pas nécessaire pour licencier un employé (art. 21 al. 1 ; 21 al. 3 et 22 LPAC a contrario ; ATA/1266/2021 du 23 novembre 2021 consid. 5b). La seule condition s'agissant des motifs de la résiliation est celle de leur communication à l'employé concerné (ATA/453/2022 du 3 mai 2022 consid. 4b).

L’objectif poursuivi par le législateur en prévoyant une période probatoire est de donner la possibilité à l’employeur étatique de tester sur la durée les capacités professionnelles d’un agent public avant de le nommer. Dans ce cadre, ce ne sont pas seulement les compétences professionnelles de ce dernier, mais également ses capacités à s’intégrer au sein de l’équipe de collaborateurs existants qui sont testées, ainsi que les relations avec les usagers. La prise en compte de ces différentes exigences est susceptible de l’amener, sans que cela soit constitutif d’arbitraire, à licencier une personne nouvellement engagée, quelles que soient l’expérience ou les compétences de celle-ci, et même s’il peut être admis qu’elle ait pu accomplir certaines de ses tâches à satisfaction (ATA/1274/2022 du 20 décembre 2022
consid. 7).

L'administration doit jauger, au vu des prestations fournies par l'employé et du comportement adopté par celui-ci pendant la période probatoire, les chances de succès de la collaboration future et pouvoir y mettre fin si nécessaire avant la nomination s'il s'avère que l'engagement à long terme de l'agent public ne répondra pas aux besoins du service. Elle dispose dans ce cadre d’un très large pouvoir d’appréciation quant à l’opportunité de la poursuite des rapports de service. Dans sa prise de décision, elle reste néanmoins tenue au respect des principes et droits constitutionnels, notamment celui de la légalité, de la proportionnalité, de l’interdiction de l’arbitraire et du droit d’être entendu (ATA/453/2022 du
3 mai 2022 consid. 4c ; ATA/182/2022 du 22 février 2022 consid. 6c ; ATA/1784/2019 du 10 décembre 2019 consid. 5b ; ATA/115/2016 du 9 février 2016 et les arrêts cités).

e. Le principe de la proportionnalité exige que les mesures mises en œuvre soient propres à atteindre le but visé (règle de l'aptitude) et que celui-ci ne puisse être atteint par une mesure moins contraignante (règle de la nécessité) ; il doit en outre y avoir un rapport raisonnable entre ce but et les intérêts compromis (principe de la proportionnalité au sens étroit, impliquant une pesée des intérêts ; ATA/1218/2021 du 16 novembre 2021 consid. 6a ; ATA/997/2021 du
28 septembre 2021 consid. 7g).

Le grief d'arbitraire ne doit être admis que dans des cas exceptionnels, par exemple lorsque les motifs allégués sont manifestement inexistants, lorsque des assurances particulières ont été données à l'employé ou en cas de discrimination. En revanche, l'autorité de recours n'a pas à rechercher si les motifs invoqués sont ou non imputables à une faute de l'employé ; il suffit en effet que la continuation du rapport de service se heurte à des difficultés objectives, ou qu'elle n'apparaisse pas souhaitable pour une raison ou une autre (arrêt du Tribunal fédéral 8C_182/2013 du 7 novembre 2013 consid. 2.2 ; ATA/1266/2021 précité consid. 5c).

f. Selon l’art. 61 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (al. 1 let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (al. 1 let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2), non réalisée dans le cas d’espèce.

La résiliation des rapports de service pendant la période probatoire peut être attaquée devant la chambre administrative, mais compte tenu du large pouvoir d’appréciation laissé à l’autorité compétente, le pouvoir d’examen de celle-ci sera limité, sauf violation des droits et principes constitutionnels, à l’application des délais légaux de congé (ATA/1266/2021 du 23 novembre 2021 consid. 5c ; ATA/1140/2018 du 30 octobre 2018 consid. 5a et les références citées).

6. a. En l’espèce, la recourante a été engagée à partir du 1er avril 2019, pour une période probatoire de trois ans, valablement prolongée de six mois par courrier du 14 mars 2022. Son licenciement, notifié le 11 août 2022, est donc intervenu avant l’échéance de la période probatoire, ce qui est admis par l’intéressée.

La décision de résiliation, signée par la conseillère administrative et le secrétaire général, émane de l’autorité compétente et a été prise après que la recourante a exercé son droit d’être entendue et que les motifs de son licenciement lui ont été communiqués, ce qui n’est au demeurant pas contesté par la recourante. Par ailleurs, le délai de résiliation de deux mois pour la fin d’un mois a été respecté.

La décision de licenciement répond donc aux exigences formelles.

b. La recourante considère que son licenciement serait inéquitable, car uniquement fondé sur sa relation avec M. G______ et les évaluations de ce dernier, incompétent et virulent à son égard. Elle soutient avoir toujours travaillé à l’entière satisfaction de l’intimée et avoir entretenu d’excellentes relations avec l’ensemble des collaborateurs ainsi qu’avec les chefs de service et les conseillers administratifs.

Il ressort cependant du dossier que la recourante a rencontré d’importantes difficultés relationnelles, non seulement avec son chef de service, mais également avec sa précédente supérieure hiérarchique, le secrétaire général, un conseiller administratif et un chef de service. En outre, plusieurs manquements professionnels ont été relevés par la hiérarchie de la recourante et ont justifié des remarques et des rappels.

Ainsi, si les trois premiers entretiens d’évaluation font état d’excellentes prestations et de très bonnes relations entre la recourante et Mme C______, l’évaluation après deux ans révèle l’existence d’importantes dissensions, puisque la recourante a tenu des propos peu courtois à l’encontre de sa supérieure directe, alors en arrêt maladie, dont elle a en outre remis en cause les compétences professionnelles. En outre, MM. D______ et E______ ont souligné que la gestion et l’utilité des piquets sur les différents sites étaient à améliorer.

Dans son courriel du 14 janvier 2022, soit moins de deux mois après son entrée en fonction, M. G______ a détaillé plusieurs incidents survenus depuis la fin du mois de novembre 2021. Il ressort notamment des messages joints que le secrétaire général a écrit à la recourante, après plusieurs échanges, que sa réponse ne lui convenait pas, « ni sur le fond, ni sur la forme » et lui a donné l’ordre formel de suspendre une commande de meuble et de chercher des alternatives.

La recourante a par ailleurs admis des erreurs et des comportements inadéquats avec un conseiller administratif et plusieurs cadres supérieurs lors de l’entretien de service du 28 janvier 2020. Elle a ainsi déclaré qu’elle ne s’expliquait pas son comportement avec M. E______, qu’elle n’avait pas d’excuse et qu’elle avait « pété un câble ». Concernant ses échanges avec le secrétaire général, elle a admis s’être trompée en affirmant que le meuble demandé n’existait pas dans l’assortiment du fournisseur, mais qu’il n’y avait « pas eu mort d’homme » et de raison de s’excuser. Selon elle, le ton des messages était excessif, de part et d’autre. S’agissant de ses échanges avec le chef du service des finances, elle avait finalement fait le nécessaire. Enfin, elle a admis qu’elle n’aurait pas dû répondre de manière « exaspérée » à son chef de service lorsqu’il l’avait priée de traiter une demande au début du mois janvier 2021.

De même, au cours de l’entretien du 17 février 2022, la recourante a concédé avoir confié certains travaux sans avoir procédé aux vérifications nécessaires. Elle s’est dite désolée d’avoir été « froide » au début de sa collaboration avec
M. G______. Elle a derechef reproché à son chef de service de ne pas avoir traité les dossiers selon les priorités qu’elle avait prévues. La recourante a été informée qu’un changement radical était indispensable pour envisager la poursuite des rapports de service.

Suite au prononcé du blâme et de la prolongation de la période probatoire,
M. G______ a relevé de nouveaux manquements dans ses bilans des 21 avril et
12 juillet 2022.

Les allégations de la recourante selon lesquelles M. G______ aurait été virulent et dénigrant envers elle ne trouvent aucune assise dans le dossier. Jusqu’au prononcé du blâme, la recourante n’a d’ailleurs émis aucun grief à l’encontre de son chef de service, si ce n’est ceux d’avoir traité les dossiers sans recul et sans tenir compte des priorités qu’elle avait elle-même établies, et d’avoir une « manière de parler rigide ». À ce propos, il convient de relever, d’une part que les remarques réitérées de la recourante, quant au fait que son supérieur n’avait pas traité les dossiers dans l’ordre qu’elle préconisait, démontrent ses difficultés à accepter le lien de subordination avec un chef de service, étant rappelé qu’elle avait déjà reproché à sa précédente supérieure de mal choisir ses priorités. D’autre part, lors de l’entretien du 17 février 2022, la recourante a mentionné des propos « pas corrects » de son supérieur « envers certains collaborateurs », ce qui permet de conclure qu’il n’en a pas eu à son égard. Cela étant, même si certains conflits pouvaient être imputables au responsable hiérarchique, cela n’empêcherait pas l’intimée de constater que la poursuite de l'engagement de la recourante ne répondait pas aux besoins du service.

L’intimée a en conséquence, à réitérées reprises, attiré l’attention de la recourante sur ses manquements en termes de savoir-faire et savoir-être, et lui a rappelé qu’un changement radical s’imposait. En dépit d’un entretien de service, du prononcé d’une sanction disciplinaire et de la prolongation de la période probatoire, les relations entre la recourante et son chef de service se sont encore détériorées et les manquements professionnels n’ont pas connu d’amélioration. Les objectifs clairement fixés n’ont pas été atteints.

Dans ces circonstances, et étant rappelé le contrôle restreint de la chambre de céans en matière de résiliation des rapports de service durant la période probatoire et la liberté laissée à l'employeur, l’intimée était fondée à constater une rupture du lien de confiance et à considérer que la poursuite des rapports de travail ne pouvait pas être envisagée. Elle n'a ainsi pas mésusé du très large pouvoir d'appréciation, et sa décision de licenciement apparaît nécessaire, apte à atteindre le but voulu, et proportionnée au sens étroit.

c. Au vu de ce qui précède, les conclusions de la recourante tendant à la « revue » de sa nomination et au paiement d’une indemnité pour tort moral sont sans objet.

Il en va de même de sa conclusion relative à la remise d’un certificat de travail, l’intimée ayant exposé lui avoir envoyé un tel document daté du
31 octobre 2022, ce que la recourante n’a pas contesté.

Mal fondé, le recours du 9 septembre 2022 sera par conséquent rejeté et la décision litigieuse confirmée.

7. Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge de la recourante qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée à la commune, qui compte plus de dix mille habitants, soit une taille suffisante pour disposer d'un service juridique et est par conséquent apte à assurer la défense de ses intérêts sans recourir aux services d'un avocat (art. 87 al. 2 LPA ; ATA/453/2022 du 3 mai 2022 ; ATA/1223/2021 du 16 novembre 2021).

Compte tenu des conclusions du recours, la valeur litigieuse est supérieure à CHF 15'000.- (art. 112 al. 1 let. d de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du
17 juin 2005 [LTF - RS 173.110]).

 

 

 

* * * * *


PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 9 septembre 2022 par Madame A______ contre la décision de la commune du B______ du 11 août 2022 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'000.- à la charge de Madame A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du
17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière de droit public ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Madame A______ ainsi qu'à Me Lorella Bertani, avocate de la commune du B______.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Krauskopf, M. Verniory, Mmes Lauber et McGregor, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. Michel

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :