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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/25085/2022

AARP/244/2025 du 26.06.2025 sur JTCO/4/2025 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : ACTE D'ORDRE SEXUEL AVEC UN ENFANT;ACTE D'ORDRE SEXUEL SUR UN INCAPABLE DE DISCERNEMENT;SÉJOUR ILLÉGAL;ALCOOL;IN DUBIO PRO REO;EXPULSION(DROIT PÉNAL);PARTIE CIVILE
Normes : CP.187.al1; aCP.191; LEI.115.al1.letb; CP.66a.al1; CO.47
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/25085/2022 AARP/244/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 26 juin 2025

 

Entre

A______, actuellement détenu à la prison de Champ-Dollon, chemin de Champ-Dollon 22, 1241 Puplinge, comparant par Me B______, avocat,

appelant,

 

contre le jugement JTCO/4/2025 rendu le 9 janvier 2025 par le Tribunal correctionnel,

 

et

C______, partie plaignante, représentée par sa curatrice, Me D______, avocate,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement JTCO/4/2025 du 9 janvier 2025, par lequel le Tribunal correctionnel (TCO) l'a reconnu coupable d'actes d'ordre sexuel avec des enfants (art. 187 ch. 1 du code pénal [CP]), d'actes d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance (art. 191 aCP) et de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration [LEI]), l'a condamné à une peine privative de liberté de quatre ans et lui a interdit, à vie, l'exercice de toute activité professionnelle et non professionnelle organisée impliquant des contacts réguliers avec des mineurs. Le TCO a en outre prononcé son expulsion du territoire suisse pour une durée de cinq ans, mesure dont le signalement a été ordonné dans le système d'information Schengen (SIS). Tout en constatant que A______ acquiesçait aux conclusions civiles relatives à la réparation du dommage matériel, il l'a condamné à payer à C______ CHF 368.40, CHF 655.85 et CHF 587.20 à titre de réparation de son dommage matériel pour les années 2021, 2022 et 2023, et CHF 15'000.- à titre de réparation de son tort moral, lesdits montants portant intérêts. Les premiers juges ont enfin restitué son téléphone au prévenu et l'ont condamné aux frais de la procédure en CHF 2'903.-.

A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant à son acquittement des chefs d'actes d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance et de séjour illégal.

b. Selon l'acte d'accusation du Ministère public (MP) du 23 septembre 2024, il est encore reproché ce qui suit à A______, lequel ne conteste plus sa condamnation pour acte d'ordre sexuel avec des enfants s'agissant des faits visés sous ch. 1.1 de l'acte d'accusation :

Le 5 juin 2021, au domicile de C______, à Genève, il a donné à cette dernière, alors âgée de 13 ans, ce qu'il savait, de l'alcool, notamment des shots de vodka, alors qu'il l'avait déjà vue boire de la vodka ou du whisky, puis, à l'issue du repas, la sachant totalement ivre, au point de tituber pour rejoindre sa chambre, de vomir et de se trouver en état de demi-sommeil sur son lit, il s'est rendu dans cette pièce et, prétextant vouloir apporter son aide en changeant ses draps et profitant de son état, il s'est placé sur le lit derrière la jeune fille, couchée sur le côté, lui a baissé son pantalon et sa culotte et l'a forcée à entretenir un rapport sexuel, en la pénétrant vaginalement avec son sexe. A______ l'a ensuite tournée pour la placer sur le dos face à lui, lui a relevé les jambes sur ses propres épaules et l'a à nouveau pénétrée vaginalement avec son sexe, étant précisé qu'elle lui avait demandé d'arrêter, sans réussir à opposer physiquement une résistance au vu de son état d'alcoolisation avancé et de demi-sommeil (ch. 1.2) ;

Depuis le 9 janvier 2018, il a séjourné sans les autorisations nécessaires en Suisse, plus particulièrement à Genève, étant précisé que les faits constitutifs d'entrée illégale et de séjour illégal antérieurs à cette date ont été classés car atteints par la prescription (ch.1.3).

B. Les faits encore pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. Selon le constat d'agression sexuelle établi le 27 avril 2022 par le Centre universitaire romand de médecine légale (CURML), C______, alors âgée de
13 ans, a relaté, le 6 juin 2021, que la veille sa mère, E______, avait invité des amis à dîner, dont A______, lequel ne l'intéressait pas du tout. Elle avait bu une bouteille de vodka SMIRNOFF ICE ainsi que du champagne, de sorte qu'elle s'était sentie mal. Aux alentours de 23h30, elle avait ressenti une extrême fatigue et ne s'était plus montrée maîtresse d'elle-même à cause de l'alcool. Ensuite, après que A______ en avait changé les draps, elle s'était allongée sur son lit, en décubitus latéral gauche. Il s'était placé derrière elle, lui avait retiré son training et sa culotte, avant de la pénétrer au niveau vaginal avec son pénis, sans préservatif. Elle ne pouvait pas dire s'il avait éjaculé ou non. Elle lui avait demandé d'arrêter à plusieurs reprises car elle avait mal. Il lui avait répondu "chut c'est normal", ne voulant pas qu'elle fasse de bruit. Toujours placé derrière elle, il avait tenté de l'embrasser sur la bouche en se penchant sur elle. Comme elle avait bu, elle n'était pas capable de se défendre. Elle s'était sentie "comme dans un rêve" et "n'avait pas l'impression d'être dans la réalité". Ensuite, elle s'était rendue dans la salle de bains, où elle avait pleuré, avant de se confier à sa mère.

b. Le 14 juillet 2022, E______ s'est présentée à un poste de police, accompagnée d'un travailleur social, pour signaler que sa fille C______ avait été agressée sexuellement le 14 [recte : 5] juin 2021 par A______, le neveu de son amie, F______.

c.a. C______, mineure, a été entendue, le 22 septembre 2022, en audition EVIG. Elle a expliqué que le Service de protection des mineurs (SPMi) avait encouragé sa mère à porter plainte au sujet d'une agression qu'elle avait vécue l'année précédente. Même si elle n'en avait pas envie, elle était venue, le SPMi les ayant "obligées" à le faire, sa mère et elle-même.

Le soir des faits, sa mère avait invité pour un repas colombien un couple d'amis, soit F______, son compagnon, ainsi que leurs deux neveux, qu'elle avait déjà vus lorsqu'elle était beaucoup plus petite. Des petits verres d'alcool leur avaient été offerts, sa mère sachant qu'elle en consommait. Elle avait bu quelques bouteilles de bière EVE et l'un des jeunes hommes, soit A______, lui avait servi un ou deux verres de vodka ABSOLUT, qu'elle avait mélangée un peu. Il ne lui avait rien dit pendant la soirée, mais ses yeux "vénères", blancs, globuleux et fixant, lui avaient fait peur. Ensuite, elle ne se souvenait pas trop de ce qu'il s'était passé ; elle s'était rendue aux toilettes, puis avait vomi sur son lit. Elle était vraiment "bourrée", même si elle considérait qu'elle n'avait pas beaucoup bu. Sa mère lui avait raconté que le précité avait demandé à changer ses draps. Elle trouvait "bizarre" que cette dernière l'ait laissé faire.

Après avoir éteint toutes les lumières, A______ était entré dans sa chambre et elle avait senti, précisant être vierge, "quelque chose qui [la] tapait", mais que ce n'était pas ses doigts à lui. Elle s'était sentie "un peu comme dans un rêve", tout en sachant qu'elle avait mal. Il était ensuite vite sorti de sa chambre. Immédiatement après, elle était allée dans la salle de bains, où sa mère l'avait rejointe et où elle avait voulu se confier rapidement, sinon cet épisode n'aurait pas été réel.

Sur questions de l'inspectrice, la jeune fille a encore précisé qu'elle n'était pas consciente, car elle avait bu de l'alcool. Elle ne se souvenait même pas s'il avait réellement changé les draps. Elle avait de la peine à expliquer ce qu'il s'était passé, dès lors que ce n'était "pas clair". Elle "planait", tout en sachant que c'était réel, et avait l'impression d'avoir été "sous drogue". Selon elle, le prévenu avait mis quelque chose dans son verre. Lorsqu'il était venu dans sa chambre, elle pensait qu'il l'avait portée pour la poser sur son lit, sans la mettre dans une position particulière, puis qu'il l'avait embrassée. Il lui avait ensuite baissé son pantalon, mais pas entièrement, et avait retiré son propre jeans, mais avait gardé son t-shirt. Alors qu'elle se trouvait sur le ventre sur son lit, il était sur elle et donnait "des coups avec son pénis" dans son vagin. Elle avait perçu "quelque chose de gros qui entrait en [elle] et qui tapait l'intérieur", ce qu'elle n'avait jamais connu. Elle n'avait pas senti la texture de son pénis. Ce qui l'avait le plus dérangée et "dégoûtée" était sa forte respiration, comme une personne excitée, et sa chaleur, qui l'avait "envahie", sans savoir comment l'expliquer ou le montrer à la policière. Cela était resté longtemps "imprégné" en elle. Elle avait également senti son gros ventre gonflé contre son dos, se frotter contre elle. Lorsqu'il l'avait embrassée dans la nuque, sur le cou et sur la bouche, elle avait ressenti sa langue, ce qui l'avait dégoûtée. Elle ne se souvenait pas s'il avait touché d'autres endroits de son corps. En pleurs, elle a expliqué que c'était comme si ce jour n'avait jamais existé. Elle avait "fait des bruits" et crié, de la même manière que si elle avait mal, de sorte qu'elle était étonnée que G______, sa sœur adoptive, n'ait rien entendu. Après avoir ouï que sa tante était sur le point de partir, le prévenu avait eu peur, s'était relevé, lui avait vite remis son pantalon et était parti. Elle avait eu comme un "déclic" à ce moment-là. Elle était allée dans la salle de bains pleurer car elle était choquée par ce qu'il venait de lui arriver. Elle avait alors demandé à G______ d'appeler sa mère, à laquelle elle avait expliqué que le prévenu lui avait fait du mal et l'avait "violée". Cette dernière avait semblé "choquée" et "déçue", tout en lui rapportant s'être doutée de quelque chose, car il était resté longtemps dans sa chambre.

Sa mère avait alors immédiatement demandé au prévenu de "dégager", avant de lui dire qu'elles allaient à l'hôpital. Sur place, elle avait passé des tests. Elle avait été informée que son hymen était seulement fissuré, alors que sa gynécologue lui avait dit le contraire. Sa mère avait écrit à A______, lequel avait répondu n'avoir mis que les doigts, ce qui n'était pas possible, vu qu'elle avait attrapé une bactérie, qui avait rapidement disparu grâce aux médicaments prescrits, en sus des traces de frottements sous forme de rougeurs. Il avait alors admis ce qu'il avait fait. Sa mère avait également prévenu le père du précité, puis l'avait forcée à porter plainte, mais elle ne voulait vraiment pas, de peur que A______ soit renvoyé dans son pays.

Elle ne pensait pas que le prévenu portait un préservatif ni qu'il avait éjaculé. Elle avait retrouvé un peu de sang dans sa culotte. Il s'agissait de sa première relation sexuelle. Ce dernier n'était vraiment pas beau et elle n'aurait jamais imaginé "faire quelque chose" avec lui. Elle était "déçue" d'elle-même et de n'être pas parvenue à se défendre, comme elle se l'était imaginé en pareille situation, mais ne se sentait pas coupable de cette histoire qu'elle voulait oublier. Elle s'était laissée faire, car elle était "comme dans un rêve" et voulait dormir. Après les faits, elle en avait voulu à sa mère, qui l'avait forcée à passer la soirée avec ses amis, ainsi qu'à G______, qui était à proximité immédiate mais n'avait rien entendu. Elle en avait discuté avec son père, qui avait vécu la même chose. Elle avait ressenti le "besoin de lui en parler", tout comme à certains de ses amis et à sa psychiatre. Elle avait été hospitalisée le 5 juillet 2022. De manière générale, elle faisait beaucoup de crises de nerfs et se sentait mal.

c.b. Par courrier du 18 mars 2024, C______, par le biais de sa curatrice, a contesté les propos tenus par le prévenu devant le MP. En particulier, il n'avait pas été "facile de rentrer" car elle était sur le ventre, il l'avait forcée et elle avait eu "super mal". Lorsque A______ avait baissé son pyjama, elle lui avait dit "non, non, non".

c.c. Entendue en audiences de jugement et d'appel, C______ a déclaré que durant la soirée, elle avait bu un verre de Prosecco servi par sa mère. Ensuite, A______ avait sorti une bouteille de vodka, alcool que E______ l'avait autorisée à goûter. Les garçons avaient néanmoins continué à leur servir d'autres shots, sans que sa mère s'en aperçoive. Elle se souvenait qu'elle avait ri "pour rien" avec sa sœur et que le prévenu l'avait fixée de manière "un peu bizarre", en ce sens que la pesanteur dans son regard l'avait gênée. À un moment, elle était allée aux toilettes, avant de se coucher sur son lit. Elle n'avait pas eu conscience d'avoir vomi, mais se souvenait vaguement avoir pris une douche. Elle ne se rappelait pas s'être habillée, mais elle l'était car le prévenu lui avait baissé son pantalon au moment de l'acte. Elle a expliqué aux juges d'appel que les faits étaient toujours un peu flous. Si elle pensait initialement avoir été droguée, elle avait compris que son état était lié au fait d'avoir bu de l'alcool. Bien qu'elle en ait déjà consommé, cela ne lui avait jamais fait "cet effet-là".

Lorsqu'elle était revenue de la salle de bains, le prévenu était assis sur son lit, la lumière de la chambre éteinte. Elle s'était couchée à plat ventre sur son lit. Il n'y avait eu ni jeu de séduction, ni regards. D'ailleurs, compte tenu de son état d'alcoolisation, elle devait avoir les yeux à moitié fermés. Elle se souvenait qu'il avait essayé de l'embrasser, mais c'était "comme un rêve". Elle n'était pas dans son état normal, elle était "dans les vapes" et dormait en même temps. Ensuite, il avait baissé son pantalon et l'avait pénétrée, ce qui lui avait fait mal, étant encore vierge. Elle s'était réveillée lorsqu'elle avait senti que "ça forçait" car elle était "sèche" et qu'il "se passait un truc". Elle s'était ainsi rendue compte qu'il la pénétrait car la douleur l'avait réveillée et elle avait eu mal. Elle n'avait aucun souvenir d'un changement de position. Elle avait fait des bruits. G______ lui avait rapporté en avoir entendu, mais ne pas y avoir prêté attention. Elle pensait avoir signifié au prévenu d'arrêter sans pouvoir dire si elle avait employé ce mot. Elle s'était agitée, à savoir qu'elle avait serré les fesses, s'était débattue, et avait essayé de crier, sans savoir si elle l'avait fait fort ou non. Elle ne se souvenait pas s'il avait arrêté lorsqu'elle le lui avait demandé. Il avait quitté la chambre après lui avoir remonté son pantalon, sans rien lui dire, alors qu'elle se trouvait sur le ventre. Elle s'était immédiatement rendue dans la salle de bains pour pleurer.

Elle avait déjà des problèmes avec l'alcool avant les faits, mais depuis ceux-ci cela avait empiré. Elle avait modifié sa chambre, qui la dégoûtait, et éprouvait également du dégoût pour elle-même. Elle avait connu une période dépressive, développé une anxiété sociale, de sorte que ses relations avec ses amis étaient compliquées. Sa première relation sexuelle avec son copain avait été difficile. Elle avait eu des problèmes de vaginisme, puis d'hypersexualisation, en ce sens qu'elle avait multiplié les relations sexuelles en réaction aux faits. Quand bien même elle avait pu éprouver des regrets, elle n'avait pas pour autant déposé plainte contre ses partenaires car elle avait été consentante, contrairement à ce qu'il s'était passé avec le prévenu. Elle avait bénéficié d'un suivi psychologique avec deux psychiatres, la Dre H______, puis le Dr I______ jusqu'en décembre 2024. Elle était depuis lors suivie par une psychiatre et recevait une médication à base de SERESTA, XANAX et de Mélatonine. Afin de trouver une place d'apprentissage, elle avait intégré le programme J______ à la K______, ce qui allait lui permettre d'effectuer un stage de longue durée auprès d'un restaurant. Il lui était cependant même difficile de se rendre à des rendez-vous. Elle s'était retrouvée à la L______ à cause de sa consommation d'alcool. Devant la Cour, elle a précisé avoir de la difficulté à trouver un projet et à s'y tenir. Elle avait de la peine à se développer en tant que femme (son rapport aux hommes et sa sexualité étaient compliqués) et avoir confiance en elle. Il lui était difficile de se confier, dès lors qu'elle ressentait de la douleur, se dégoûtait et se trouvait sale. Ce procès était la seule manière d'obtenir justice et la constatation que ce qu'il s'était passé n'était pas de sa faute.

Elle n'avait pas souhaité immédiatement déposer plainte car cela avait été "compliqué" pour elle. Elle avait craint que le prévenu soit condamné à une peine de prison trop faible, de deux ou trois ans. Après le dépôt de sa plainte, elle l'avait vu à deux reprises avec sa copine. Elle avait eu peur pour cette dernière qu'il recommence. Cela lui avait fait mal de le voir "vivre sa vie normale" avec des projets à l'extérieur, alors qu'elle n'allait pas bien du tout. Elle attendait de cette procédure que le prévenu écope d'une peine de prison "assez longue". Même s'il n'avait agi que contre elle, il avait "l'esprit pervers". Il avait par ailleurs détruit sa famille.

Elle a réclamé le remboursement de CHF 368.40, avec intérêts à 5% dès le
1er janvier 2022, CHF 655.85, avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2023, et CHF 587.20, avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2024, soit sa participation aux frais médicaux pour les années 2021, 2022 et 2023, factures à l'appui. Par ailleurs, elle a conclu à ce que la somme de CHF 15'000.-, avec intérêts à 5% dès le 6 juin 2021, lui soit allouée à titre de réparation du tort moral.

d.a. L'examen médical réalisé par le CURML sur C______, d'un poids de 43 kg pour une taille de 156 cm, le 6 juin 2021 à 03h30, a mis en évidence, au niveau du vagin, une dermabrasion de la face interne de la petite lèvre de 0.4 x 0.3 cm et une dermabrasion de la fosse vestibulaire postérieure, et au niveau de l'hymen, une incision ecchymotique de 0.3 cm associée à une dermabrasion de la face interne de la petite lèvre de 0.4 x 0.5 cm. Les prélèvements bactériologiques étaient positifs à la chlamydia et à la gonorrhée. Lui ont été prescrits, une contraception d'urgence (ELLAONE), des antibiotiques (ROSEPHINE et ZITHROMAX) ainsi qu'un traitement de l'infection par le VIH (TRUVADA et TIVICAY).

Par ailleurs, elle présentait un taux d'alcoolémie à 3h35 de 34.1 mmol/l [ndlr : correspondant à 1.6 g/l (https://www.wikimedecine.fr/Convertisseur_d%27unit%
C3%A9s_biom%C3%A9dicales)]. Elle a expliqué aux soignants avoir commencé à consommer de l'alcool environ trois mois auparavant, à raison d'une à deux fois par semaine, le plus souvent le week-end avec des amis. Moins de deux mois avant les faits, soit le 18 avril 2021, un taux d'alcoolémie de 57.5 mmol/l avait été dépisté dans son sang.

d.b. Le service d'accueil et d'urgences pédiatriques des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) a posé le diagnostic d'"abus sexuel" dans son récapitulatif de consultation établi le 6 juin 2021.

d.c. Le Dr I______, psychiatre et psychothérapeute, a attesté, le
12 janvier 2024, suivre C______ depuis septembre 2022. À la suite des faits survenus le 5 juin 2021, elle avait présenté des troubles psychiques invalidants avec une incapacité à reprendre une formation et à trouver une stabilité psychique suffisante malgré l'aide prodiguée. Elle avait régulièrement des troubles du sommeil, des peurs en situations sociales et des difficultés à poursuivre une activité, même choisie. Elle avait tendance à oublier ses limites, voire même à se mettre en danger. Elle essayait malgré tout d'intégrer le traumatisme. Le pronostic restait réservé et il était possible que des difficultés psychiques puissent émerger à l'âge adulte.

e. E______ a déclaré à la police et aux premiers juges que le 5 juin 2021, elle avait invité des amis qu'elle connaissait depuis environ huit ans. Sa fille C______ était présente, tout comme sa fille adoptive, G______, âgée de 16 ans. Hormis G______, tout le monde avait bu du vin en mangeant, en particulier A______, lequel avait tendance à boire trop d'alcool durant les fêtes. C______ en avait également consommé, soit deux ou trois verres de vin rouge, alors qu'elle n'en avait pas l'habitude. Elle avait elle-même donné un peu d'alcool "léger" à sa fille. Les deux jeunes hommes avaient également servi de l'alcool qu'ils avaient amené à C______. Elle n'avait pas vu ce qu'ils avaient consommé car elle discutait. Elle n'avait pas non plus constaté que le prévenu avait eu des regards insistants envers sa fille, ni un comportement différent qu'à l'accoutumée. Pendant le repas, elle avait en revanche remarqué que le prévenu avait incité C______ à consommer de l'alcool mais elle n'avait fait aucun commentaire à ce propos. Elle a ensuite précisé aux premiers juges, qu'il n'avait "pas arrêté de lui servir de l'alcool". Alors qu'ils avaient fini de manger, C______, qu'elle avait sentie vacillante, était partie dans sa chambre en titubant pour aller se coucher. A______ avait probablement remarqué qu'elle avait trop bu. Quelques minutes plus tard, alors qu'elle était occupée à discuter, le prévenu lui avait indiqué que C______ avait vomi sur son lit et lui avait demandé s'il pouvait aider à changer les draps. Elle avait accepté car elle le connaissait depuis longtemps ; il était serviable et gentil. Aux alentours de minuit, après le départ de F______ et de son compagnon, tandis que les deux jeunes hommes attendaient leur bus au salon, elle s'était rendue dans la salle de bain pour se laver les mains. C______ l'avait rejointe, en pleurs, et lui avait confié que le prévenu l'avait "violée". "Bouleversée", elle avait questionné ce dernier, lequel avait "fait semblant" de ne rien savoir, sans contester le terme de "viol" qu'elle avait employé, ni indiqué qu'elle était consentante. Enervée, elle lui avait demandé de partir. Elle n'avait pas entendu de bruits, ni sa fille crier durant la soirée.

Elle avait ensuite accompagné C______ aux HUG, où cette dernière avait été examinée par un gynécologue et un médecin-légiste, lesquels lui avaient confirmé qu'il y avait eu pénétration vaginale. Le soir même, elle avait demandé par SMS au prévenu de faire un test de dépistage du VIH, ce qu'il avait fait en lui envoyant le résultat négatif la semaine suivante. Durant cet échange, le précité, "conscient de ce qu'il avait fait", avait avoué avoir abusé de C______, ne comprenant pas comment cela s'était produit ni pourquoi il avait agi de la sorte. Il n'avait pas utilisé le terme de "viol", ni même indiqué qu'il avait "forcé" sa fille, mais ses excuses démontraient qu'il était conscient qu'elle n'était pas consentante et qu'elle n'avait pas 14 ans. Deux semaines plus tard, elle avait parlé des faits au père de A______, auquel le jeune homme s'était également confié. À une reprise, elle avait demandé au prévenu pourquoi, avec le temps, il n'avait pas envoyé une lettre d'excuses à sa fille. Il s'en était expliqué par le fait qu'il ne voulait pas lui faire revivre les événements.

Jusqu'à la fin de l'année 2021, C______ avait refusé de parler des faits et de déposer plainte. Elle se sentait "sale" et disait que la justice ne servait à rien car "les méchants n'étaient jamais punis". Fin 2021, C______ avait commis une infraction et commencé à suivre un traitement thérapeutique sur décision du Tribunal des mineurs. Ainsi, en février 2022, elles s'étaient rendues chez la Dre H______, psychiatre, et lui avait confié son agression. Le 10 juillet 2022, en raison d'une "crise" de sa fille, elle avait dû faire intervenir une ambulance et la police. C______ avait été conduite au service psychiatrique des HUG, où elle avait également révélé avoir été agressée. Le 14 juillet 2022, elles avaient été convoquées par le SPMi, qui suivait C______ depuis environ deux ans et l'avait poussée à dénoncer les faits.

C______ avait "des problèmes" depuis trois ans, soit depuis la fin de l'école primaire. Après de multiples absences scolaires, elle avait intégré le centre psychopédagogique pour les adolescents en difficulté de l'association M______ durant sa dernière année de cycle d'orientation. D'après elle, C______ ressentait un mal-être dû à la situation avec son père alcoolique, ainsi qu'au départ de son frère aîné, il y a dix ans, pour la Colombie. Elle avait également "du mal avec son corps". C______ consommait trop d'alcool avec ses amis et fumait trois à quatre joints par semaine. E______ a déclaré à l'audience de jugement qu'après les faits, sa fille avait changé. Elle avait fait plusieurs séjours en pédiatrie et se trouvait actuellement à la L______ pour observation en raison de sa consommation d'alcool.

f. Le conseil de C______ a produit un échange de messages entre E______ et A______, ainsi qu'une traduction libre. On relèvera en particulier que :

- entre les 6 et 16 juin 2021 : E______ a demandé à A______ de prendre rendez-vous pour passer un test de dépistage du VIH, expliquant que sa fille devait prendre des médicaments contre les maladies sexuellement transmissibles dans l'intervalle. Il lui a transmis la photographie du résultat négatif de son test, effectué le 16 juin 2021 ;

- le 30 décembre 2021 :

E______ a écrit : "J'imagine que tu vis ceci comme si rien ne s'était passé. Sache que ma fille le vit mal, comme en dépression. C______ n'a pas voulu te dénoncer parce qu'elle dit que les gens comme toi s'en sortent toujours mieux que celles [qui se retrouvent/sont] abusées. Sache qu'elle peut te dénoncer à tout moment. Et moi je suis sûre que N______ savait ce qui se passait. Vous [passez pour/faites comme si, vous étiez] des bonnes personnes, aimables, mais vous êtes comme des serpents" ;

A______ a répondu : "Eh bah, non, E______, vraiment moi j'ai beaucoup souffert, et je regrette cette erreur. [N______] ne savait rien de ce qui se passait, et pardonne-moi d'avoir fait semblant d'être quelque chose que pour toi nous ne sommes pas. Mais nous sommes des bonnes personnes vraiment, mais avec des erreurs [= mais nous faisons des erreurs], et j'ai beaucoup appris de cela, même si je ne le montre pas. Je suis désolé et je regrette beaucoup jusqu'aujourd'hui, mais je sais que je ne répare pas avec des lamentations et des excuses". Ce à quoi E______ a rétorqué : "Ce n'est pas une erreur quelconque. Cela peut détruire une personne, [elle] pourrait même se tuer [/se suicider]" ;

A______ a ensuite répondu : "Je sais. C'est la pire erreur que quelqu'un peut faire. Que ce soit moi, ou n'importe quelle autre personne. Mais comme je te disais, E______ je ne sais pas quoi faire pour réparer ceci. S'il y avait quelque chose que je pouvais faire, je le ferai". E______ lui a alors demandé : "Et pourquoi tu n'as jamais envoyé une lettre d'excuses à C______ ?" ;

A______ lui a expliqué : "Parce que j'avais l'intention de le faire, mais je croyais que si je le faisais, le problème empirerait [/le problème grandirait]. Et je ne voulais pas ça... Et c'est pour cela, mais je le fais sans problème" et E______ lui a répondu : "Pourquoi empirer ? Rien de plus beau que quand quelqu'un sait s'excuser" ;

- le 31 décembre 2021 : A______ a écrit : "Bah parce qu'en écrivant cette lettre la seule chose que j'allais faire c'est de lui rappeler ce mauvais moment. Et c'est ce que je ne voulais pas du tout. Mais si je suis encore à temps de lui écrire, je le fais sans problème".

g.a. Entendu dès le 22 novembre 2022, A______ a déclaré avoir entretenu un rapport sexuel consenti par pénétration vaginale, le 5 juin 2021, avec C______, alors âgée de 13 ans, ce qu'il savait. Il pensait que la majorité sexuelle était fixée à 14 ans en Suisse, alors qu'elle l'était à 15 ans en Colombie. Il n'y avait toutefois pas pensé le soir des faits, en raison de son état d'alcoolisation moyen, qu'il situait entre six et sept, sur une échelle de un à dix.

Avant que G______ et C______ ne les rejoignent, il avait bu quatre à cinq verres de vin. Pendant le repas, il avait consommé du vin rouge, des shots de vodka, qu'il avait servis, ainsi que des bières aromatisées. C______ avait pris des shots, avec l'autorisation de sa mère, sans pouvoir dire en quelle quantité, et une cannette de bière. Leur hôtesse leur avait encore proposé du whisky, qu'ils avaient tous absorbé. Durant la soirée, il avait senti un "jeu de séduction" de la part de C______ - ce qu'il a par la suite nié, expliquant n'avoir eu aucune interaction directe avec elle -, elle l'avait regardé d'une manière "intéressée", avec un "regard intentionné", ceci pour la première fois depuis qu'ils se connaissaient. Il n'avait pour sa part pas tenté de la séduire car elle ne lui plaisait pas physiquement. C______ était une amie de la famille, qu'il connaissait depuis 2013 et qu'il voyait environ une fois par année. Il la considérait comme une "fille", "normale", soit ni jolie, ni moche. Vers 23h00, E______ s'était sentie mal, tout comme ses filles, probablement à cause de l'alcool. C______ leur avait dit que ce n'était pas la première fois qu'elle en buvait. Il ne pouvait pas préciser la quantité d'alcool qu'elle avait consommée. Il a d'abord indiqué à la police que C______, qui s'exprimait correctement en début de soirée, avait commencé à rigoler tout le temps, avant de se lever et tituber en direction de sa chambre, puis a expliqué au MP qu'elle semblait "normale", tout en confirmant par la suite qu'elle titubait. Entre 23h30 et 00h00, alors que sa tante et son compagnon étaient partis et qu'il était dans la cuisine avec son cousin, G______ était venue leur dire que C______ avait vomi dans un lit. Il avait proposé à la mère de la précitée, qui était ivre et en béquilles, de changer les draps. Après s'être exécuté, il avait éteint la lumière pour quitter la chambre. Au même moment C______ était revenue de sa douche, sans qu'il pût indiquer si elle titubait alors, et avait commencé un "jeu de séduction", en lui faisant un regard "coquin", soit "avec intention et avec un sourire", de sorte qu'il l'avait suivie. Alors qu'il se trouvait à deux mètres de la porte de la chambre, qui était restée ouverte, et à un mètre du lit, elle avait tenté de le "provoquer", en s'approchant de lui, face à face, vers son pénis et en touchant sa jambe, toujours avec son regard, qu'il avait pu voir grâce à la lumière du couloir. Elle s'était ensuite retournée et s'était collée à lui. Il avait senti son dos contre son torse. Il a indiqué au MP qu'elle s'était également frottée contre son pénis, avant de préciser aux premiers juges qu'elle ne le lui avait pas touché. C______ n'avait pas parlé mais avait "insinué", en le regardant de manière séduisante dans les yeux, "de la toucher ou d'avoir un rapport".

Sous l'effet de l'alcool, il avait "accepté en continuant son jeu pour avoir un rapport sexuel", jeu qu'elle n'aurait pas pu faire si elle avait été complètement ivre. Il avait cédé à une pulsion sexuelle sans aucun préliminaire. Elle avait alors descendu son pantalon ainsi que sa culotte et s'était couchée à plat ventre sur le lit. Il avait baissé son boxer et son pantalon, sans retirer ce dernier. Elle s'était mise à quatre pattes lorsqu'il s'était approché d'elle, ce qui l'avait excité et provoqué une érection. Il l'avait ensuite pénétrée vaginalement, sans faire attention à son visage, en la regardant "vite fait", durant environ 20 secondes, alors qu'il se trouvait sur les genoux. Elle s'était ensuite retournée sur le dos sur son initiative à lui car la position n'était pas confortable. Il avait relevé ses jambes pour les poser sur son épaule, vu qu'elle portait encore son pantalon. Il l'avait à nouveau pénétrée vaginalement durant 20 secondes, avant qu'elle ne lui demande d'arrêter à trois reprises, ce qu'il avait immédiatement fait. Il ne se souvenait pas si elle avait fait des gestes pour le repousser. Il a par la suite indiqué au MP qu'elle s'était couchée sur le dos, avant qu'il ne la pénètre dans cette même position, de sorte qu'ils n'en avaient pas changé, avant de revenir à sa première version. Il avait regardé pendant une seconde ou deux son visage, qui était "normal", sans pouvoir préciser si elle était contente ou non, ni si elle avait les yeux fermés ou ouverts. Il a ensuite indiqué aux premiers juges qu'il n'avait pas pu voir ses yeux car la lumière était éteinte. Pendant l'acte, C______ n'avait pas bougé et n'avait rien dit. Elle n'était pas immobile non plus et ne s'était pas laissée faire, en ce sens qu'elle avait suivi le mouvement. Environ 20 secondes s'étaient écoulées entre le moment où il avait aperçu C______ qui sortait de la salle de bains et celui où ils s'étaient retrouvés sur le lit. Au total, le rapport avait duré environ une minute. Il n'avait pas mis de préservatif car il n'en avait pas sur lui. Il n'avait pas prévu ce jour-là d'avoir une relation sexuelle et elle ne lui avait rien demandé à ce sujet. Il n'avait pas éjaculé. Devant la police, il a encore indiqué que, selon lui, elle n'était pas vierge, avant de dire au MP qu'il ne s'était jamais posé la question, dès lors qu'il n'avait aucune intention à son égard. Il ne se rappelait pas si elle avait fait des bruits et ne pouvait dire si elle avait montré des signes de plaisir durant l'acte, ni si elle était lubrifiée naturellement. Il a déclaré dans un second temps que la pénétration avait été facile, dès lors qu'elle était "mouillée". Il a précisé aux juges d'appel avoir fait cette déduction, dès lors qu'il n'avait pas eu "besoin de forcer pour la pénétrer". Il ne pouvait toutefois pas se déterminer sur les lésions constatées, qui étaient vraisemblablement "dues à la pénétration". Dans le cadre de ses autres relations sexuelles, il y avait de manière générale des préliminaires. Selon lui, C______ ne se souvenait pas de ce qu'il s'était réellement passé. Elle avait déposé plainte en raison du fait que si, sur le moment, elle était consentante, elle s'était sentie mal par la suite, notamment parce que les faits s'étaient déroulés chez sa mère. Cela expliquait probablement les troubles psychologiques relevés par ses thérapeutes.

Elle avait ensuite remis son pantalon et sa culotte, tout comme lui, et s'était tournée pour dormir. Il avait alors regagné le salon, où se trouvait son cousin et E______, qui l'avait remercié d'avoir changé les draps. Il avait encore bu une bière et refusé la proposition de la précitée de rester dormir chez elle. Au moment où elle était partie se coucher, soit 30 minutes après qu'il avait quitté la chambre de C______, il avait entendu celle-ci discuter en pleurs avec sa mère, laquelle l'avait alors appelé et lui avait demandé ce qu'il s'était passé, sans utiliser le terme de "viol". Il avait répondu "rien", craignant la réaction de E______, précisant par la suite que les pleurs de C______ l'avaient surpris et également rendu nerveux, paniqué et choqué, d'où sa réponse. Il avait demandé à G______, laquelle se trouvait dans la chambre d'à côté durant l'acte, de confirmer ses dires, ce qu'elle avait fait. La mère de C______ lui avait ensuite demandé de partir.

Il s'était rendu à une soirée avec son cousin, précisant aux débats d'appel avoir décidé d'y aller pour ne pas avoir à se retrouver seul et penser à ce qu'il s'était passé, ayant été choqué par la réaction de la jeune fille. Vers 03h30, E______ l'avait appelé pour lui demander des explications car elle se trouvait avec C______ à l'hôpital. Il avait une nouvelle fois répondu qu'il ne s'était rien passé. Le lendemain, vers midi, il avait reçu un nouvel appel de la précitée, qui l'avait informé de ce que C______ avait dû passer des examens médicaux. Le lundi 7 juin 2021, elle l'avait rappelé pour lui demander pour quelles raisons il avait violé sa fille. Il avait répondu qu'il ignorait pourquoi il avait eu une relation sexuelle avec celle-ci, ayant agi "sur le moment" et bu de l'alcool, tout en contestant l'avoir violée, puisqu'elle était consentante. Sur le moment, il n'avait pas pensé que C______ était "hyper alcoolisée", soit qu'elle tombait et ne pouvait pas bouger, ni marcher, et avait imaginé qu'elle avait eu envie d'avoir une relation sexuelle avec lui. Il a encore précisé en appel qu'une heure s'était écoulée entre le moment où C______ avait quitté la cuisine et celui où le rapport sexuel était intervenu. Durant ce laps de temps, elle avait vomi et été capable de prendre une douche. Compte tenu de leur écart d'âge, de l'état d'alcoolisation de C______ et du fait qu'elle avait vomi, il aurait dû s'assurer qu'elle était consentante, ce à quoi il n'avait toutefois pas pensé. Il ne s'était pas non plus questionné sur sa capacité à entretenir un rapport sexuel, ce qu'il aurait sans doute dû faire. E______ lui avait signifié qu'elle souhaitait porter plainte mais que C______ ne voulait pas parler des faits. Par la suite, E______ lui avait demandé de passer un test de dépistage, ce qu'il avait accepté, et il lui avait transmis les résultats négatifs par SMS.

Après le 15 décembre 2021, E______ lui avait écrit en lui disant qu'il était la pire personne au monde et qu'il ne devait pas être en liberté. Elle lui avait aussi reproché de ne rien avoir fait pour remédier à la situation. Il lui avait alors présenté des excuses pour ce qu'il s'était passé, réalisant par la suite que, sur le moment, C______ n'en avait pas envie. Il n'avait pas compris que E______ lui reprochait d'avoir forcé sa fille à entretenir une relation sexuelle. Il lui avait également proposé de rédiger une lettre d'excuses, ce qu'il n'avait toutefois initialement pas fait car il aurait ainsi accepté l'accusation de viol. Par ailleurs, il ne souhaitait pas rappeler de "mauvais moment" à C______, laquelle avait peut-être "mal vécu" les faits. Il a expliqué au TCO avoir finalement rédigé un courrier d'excuses, sur conseil de son avocat, ce qui ne constituait pas pour autant l'aveu d'un viol. Il s'était confié à son père, lequel lui avait reproché ses actes et proposé d'offrir un cadeau à C______ et sa mère pour s'excuser. Il avait refusé car, ce faisant, il aurait admis les faits pour lesquels il était accusé.

Avec le recul, il pensait avoir mal interprété la situation. Il regrettait son "erreur", soit d'avoir eu un rapport sexuel avec C______, car ce n'était "pas bien" et qu'en réalité, cette dernière "ne le voulait pas". Il était prêt à coopérer et à "en payer le prix". À l'audience de jugement, il a présenté des excuses pour ce qu'il s'était passé ; il assumait ses responsabilités et les faits qu'il avait commis. Depuis son incarcération, il avait beaucoup réfléchi ; cet évènement aurait pu être évité s'il avait été "plus intelligent". En appel, il s'est excusé "du fond du cœur".

Il a acquiescé aux conclusions civiles de la partie plaignante, sous réserve du montant du tort moral, qui devait être fixé à CHF 5'000.-.

S'agissant de l'infraction à la LEI, il a indiqué au MP, le 7 juillet 2023, qu'il n'avait pas d'autorisation de séjour et allait déposer prochainement une demande de régularisation. Il n'avait pas effectué les démarches plus tôt car il fallait avoir vécu en Suisse un certain temps au préalable.

g.b. Aux débats de première instance du 8 janvier 2025, A______ a produit une lettre d'excuses, datée de la veille, à l'attention de C______ et E______, par laquelle il reconnaissait "être l'auteur" des faits survenus le 5 juin 2021, qui avaient "causé, sans doute, des conséquences sur le développement psychologique de C______". Il tenait à demander "des excuses pour son comportement" et se déclarait "convaincu qu'il n'exist[ait] aucun moyen de réparer les dommages produits", mais qu'il se trouvait "devant les autorités suisses pour assumer les conséquences de son comportement".

h. A l'issue de la lecture du dispositif, le 9 janvier 2025, A______ a été placé en détention.

Par arrêt du 4 février 2025, la Chambre pénale de recours (CPR) a rejeté le recours de A______ contre la décision de mise en détention, tout en réservant à la fin de la procédure l'indemnité de son défenseur d'office (ACPR/102/2025 consid. 7.2).

C. a. Aux débats d'appel, A______ persiste dans ses conclusions, tout en sollicitant le prononcé d'une peine pécuniaire ferme de 180 jours-amende, subsidiairement, le prononcé d'une peine privative de liberté assortie du sursis partiel, la partie ferme de la peine pouvant être fixée à six mois. En tout état, il devait être renoncé à la mesure d'interdiction prononcée, tout comme à son expulsion de Suisse. Les frais de la procédure devaient être laissés à la charge de l'État. Il était prêt à indemniser la partie plaignante à hauteur de CHF 5'000.- pour son tort moral.

Par la voix de son conseil, il relève qu'après un repas festif, au cours duquel de l'alcool avait été servi notamment à des mineures, il avait simplement proposé son aide, sans rien planifier. Même s'il avait peut-être commis une erreur d'interprétation, il avait traduit les "insinuations" et "gestes ambigus" de la jeune fille comme une attirance mutuelle. Il convenait de relativiser les déclarations des parties. Compte tenu de la petite taille de l'appartement, de l'heure tardive et du fait que la porte de la chambre avait été laissée ouverte pendant l'acte, qui s'était déroulé à huis clos, il était impossible que personne n'ait rien entendu, si, comme la plaignante le soutenait, elle avait crié. En outre, celle-ci et sa mère avaient choisi de porter plainte plusieurs mois après les faits, seulement parce qu'elles n'étaient pas parvenues à conclure un accord financier. De son côté, s'il n'avait pas immédiatement reconnu les faits par peur et compte tenu de la particularité de l'acte, il avait toutefois admis dès le lendemain l'acte sexuel avec la mineure, et s'en était excusé. Durant l'instruction, il avait seulement adapté et complété ses réponses en fonction des questions posées, sans varier dans ses déclarations. Eût-il fallu admettre que l'intimée était incapable de résistance, ce qui n'était pas établi compte tenu de ses antécédents avec l'alcool et de son bon état avant et après l'acte, il ne pouvait, dans tous les cas, pas en avoir eu conscience.

Sous l'angle de la LEI, dans la mesure où l'Office cantonal de la population et des migrations (OCPM) tolérait en pratique les longs séjours d'étrangers sur le territoire suisse, il convenait de l'acquitter. Il n'avait pas attendu la présente procédure pour déposer sa demande de régularisation mais plutôt de remplir le critère de la durée de séjour de dix ans.

Son noyau familial se trouvait en Suisse même s'il avait, certes, encore des contacts avec certains membres de sa famille en Colombie. Il ne représentait aucun danger pour l'ordre public suisse, dans la mesure où il s'agissait d'un acte unique et qu'il n'avait aucun antécédent, si bien qu'il devait être renoncé à son expulsion.

b. Le MP conclut au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement.

Les excuses et regrets de l'appelant étaient vides de sens, dès lors qu'il s'entêtait à mettre la faute sur la plaignante. Il continuait à contester l'incapacité de résistance de cette dernière, bien que son état d'ivresse ne faisait aucun doute. Il avait en outre admis l'avoir vue boire, lui ayant même servi de l'alcool, et tituber. En réalité, lorsqu'il l'avait regardée partir dans sa chambre, il y avait vu une occasion d'assouvir une "pulsion sexuelle" déclenchée au cours de la soirée. L'intimée avait toujours tenu des propos détaillés, constants et mesurés. Elle n'avait tiré aucun bénéfice secondaire du dépôt de plainte, au contraire, puisqu'elle avait expliqué que cela avait détruit sa famille. La date du dépôt de la plainte pénale s'expliquait par la décompensation psychique dont elle avait souffert et non par l'échec des prétendues négociations. Quant au prévenu, il n'avait cessé de varier et de se contredire, de sorte que ses déclarations n'étaient pas crédibles. En réalité, il n'avait pas agi sans se rendre compte de l'état d'incapacité de C______, mais y avait contribué et en avait profité. Ainsi, le fait qu'elle ait pris une douche et fait du bruit ou encore lui ait demandé d'arrêter n'était pas de nature à remettre en cause son incapacité. De même, il n'était pas relevant de savoir si la plaignante avait réellement aguiché l'appelant puisqu'elle n'était, dans tous les cas, pas en mesure de se déterminer librement (arrêts du Tribunal fédéral 6B_586/2019 du
3 juillet 2019 consid. 1.4.2 ; 6B_1362/2019 du 11 mars 2020 consid. 3.1).

Enfin, il ne pouvait légitimement se prévaloir d'une quelconque tolérance de l'autorité compétente à son égard et il devait être reconnu coupable de séjour illégal en Suisse.

Sa faute était très grave. Il s'en était pris, par pulsion et égoïsme, à une adolescente, amie de la famille. Ses actes avaient eu de lourdes répercussions sur l'état psychique de cette dernière, bien qu'initialement fragile. Il avait agi avec lâcheté contre une proie vulnérable. Sa collaboration était mauvaise et il persistait à nier les faits. Sa responsabilité était pleine et entière et il ne pouvait se prévaloir d'aucune circonstance atténuante. Seule une peine ferme de quatre ans [ndlr : 30 mois pour l'infraction à l'art. 191 CP + 15 mois pour celle à l'art. 187 CP (peine hypothétique de 18 mois) + 3 mois pour le séjour illégal (peine hypothétique de 6 mois)] était apte à sanctionner les faits.

Il convenait enfin de confirmer la mesure d'interdiction, tout comme l'expulsion du territoire suisse, dès lors que l'intérêt public l'emportait. En effet, le prévenu n'avait pas de liens particulièrement intenses avec la Suisse, où il n'avait pas jugé utile de régulariser sa situation. Par ailleurs, un retour en Colombie, pays dans lequel il entretenait encore des contacts, en particulier avec sa mère, ne le placerait pas dans une situation grave.

Enfin, un accueil favorable devait être réservé aux conclusions civiles de la plaignante.

c. C______ conclut au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement.

L'appelant n'avait pris aucun recul sur la situation. Quand bien même elle aurait été à l'initiative du rapport sexuel, il était relevant de constater qu'il ne s'était même pas posé la question de savoir si elle était en capacité d'entretenir un tel rapport, ce qui démontrait qu'il n'avait eu aucun égard vis-à-vis d'elle ; il ne l'avait pas regardée durant l'acte, ne s'était pas inquiété de savoir si elle allait bien ni même si elle était encore vierge alors qu'elle n'avait que 13 ans et qu'il n'avait pas mis de protection. Même si elle rencontrait déjà des difficultés avant les faits, cela ne justifiait aucunement d'abuser d'une jeune fille.

D. A______, né le ______ 1998, est de nationalité colombienne. Il est célibataire et sans enfant. Il est arrivé en Suisse une première fois en 2013, avant de repartir l'année suivante en Colombie et de revenir s'installer en Suisse en 2015. Il n'a pas achevé l'école obligatoire dans son pays natal mais est titulaire d'un CFC d'employé de commerce et d'une maturité professionnelle, obtenus en septembre 2023 sur le territoire helvétique. Entre 2021 et son incarcération, il a travaillé pour la société O______ en qualité d'auxiliaire technicien en ______ pour un salaire mensuel brut de CHF 5'800.-. Il faisait par ailleurs partie d'un club de football.

Il s'oppose à son expulsion du territoire suisse où se trouve "sa vie" et où réside l'essentiel de sa famille, soit son père, sa belle-mère, ses trois demi-frères et sœurs, sa tante, son oncle et ses cousins. Sa mère, avec laquelle il est en contact téléphonique hebdomadaire, vit en Colombie avec une autre de ses demi-sœurs, tout comme sa famille maternelle, ainsi que deux de ses tantes paternelles, avec lesquelles il a peu de contacts. À sa sortie de prison, il souhaite reprendre une activité professionnelle en Suisse [ndlr : il a indiqué en appel que son ancien employeur serait prêt à le réengager à sa sortie de prison] et obtenir un permis de séjour dont la demande est en cours depuis le 16 mai 2024. En détention, il suit, depuis le mois d'avril 2025, des cours d'anglais afin de pouvoir débuter une formation en informatique. Il est suivi, depuis le
23 janvier 2025, par le Service de la réinsertion et du suivi pénal pour l'accompagner dans ses démarches administratives.

A______ n'a pas d'antécédent judiciaire.

E. Me B______, défenseur d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, 18h00 d'activité de chef d'étude hors débats d'appel, lesquels ont duré 3h00, dont 4h00 pour la rédaction du recours contre la décision de mise en détention pour des motifs de sûreté et 1h00 pour l'examen de la réponse du MP et la rédaction de déterminations.

Il a été indemnisé pour plus de 30 heures d'activité en première instance.

 

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre n'examine que les points attaqués du jugement de première instance (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404
al. 2 CPP), sans être liée par les motifs invoqués par les parties ni par leurs conclusions, à moins qu'elle ne statue sur une action civile (art. 391 al. 1 CPP).

2. 2.1.1. Le principe in dubio pro reo découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.) et 10 al. 3 CPP. Il concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 144 IV 345
consid. 2.2.3.1 ; 127 I 28 consid. 2a).

Ce principe signifie, au stade du jugement, que le fardeau de la preuve incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. La présomption d'innocence est violée lorsque le juge rend un verdict de culpabilité au seul motif que le prévenu n'a pas prouvé son innocence ou encore lorsqu'une condamnation intervient au seul motif que sa culpabilité est plus vraisemblable que son innocence. En revanche, l'absence de doute à l'issue de l'appréciation des preuves exclut la violation de la présomption d'innocence en tant que règle sur le fardeau de la preuve. Le juge ne doit pas non plus se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3 ; 127 I 38 consid. 2a).

2.1.2. Le juge du fait dispose d'un large pouvoir dans l'appréciation des preuves
(ATF 120 Ia 31 consid. 4b). Confronté à des versions contradictoires, il forge sa conviction sur la base d'un ensemble d'éléments ou d'indices convergents. Les preuves doivent être examinées dans leur ensemble et l'état de fait déduit du rapprochement de divers éléments ou indices. Un ou plusieurs arguments corroboratifs peuvent demeurer fragiles si la solution retenue peut être justifiée de façon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature à emporter la conviction (ATF 129 I 8 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_324/2017 du 8 mars 2018 consid. 1.1).

L'appréciation des preuves implique donc une appréciation d'ensemble. Le juge doit forger sa conviction sur la base de tous les éléments et indices du dossier. Le fait que l'un ou l'autre de ceux-ci ou même chacun d'eux pris isolément soit insuffisant ne doit ainsi pas conduire systématiquement à un acquittement. La libre appréciation des preuves implique que l'état de fait retenu pour construire la solution doit être déduit des divers éléments et indices, qui doivent être examinés et évalués dans leur ensemble (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1169/2017 du 15 juin 2018 consid. 1.1 ; 6B_608/2017 du 12 avril 2018 consid. 3.1).

2.1.3. Les cas de "déclarations contre déclarations", dans lesquelles les déclarations de la victime en tant que principal élément à charge et les déclarations contradictoires de la personne accusée s'opposent, ne doivent pas nécessairement, sur la base du principe in dubio pro reo, conduire à un acquittement. L'appréciation définitive des déclarations des participants incombe au tribunal du fond (ATF 137 IV 122
consid. 3.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1306/2017 du 17 mai 2018 consid. 2.1.1).

Les déclarations de la victime constituent un élément de preuve. Le juge doit, dans l'évaluation globale de l'ensemble des éléments probatoires rassemblés au dossier, les apprécier librement (arrêts du Tribunal fédéral 6B_942/2017 du 5 mars 2018
consid. 2.1.2 ; 6B_614/2012 du 15 février 2013 consid. 3.2.5), sous réserve des cas particuliers où une expertise de la crédibilité des déclarations de la victime s'impose (ATF 129 IV 179 consid. 2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1306/2017 du 17 mai 2018 consid. 2.1.1).

Les déclarations successives d'un même témoin ne doivent pas nécessairement être écartées du seul fait qu'elles sont contradictoires ; il appartient au juge de retenir, sans arbitraire, la version qui lui paraît la plus convaincante et de motiver les raisons de son choix (arrêts du Tribunal fédéral 6B_28/2013 du 13 juin 2013 consid. 1.2 ; 6B_429/2008 du 7 novembre 2008 consid. 4.2.3). Dans le cadre du principe de libre appréciation des preuves, rien ne s'oppose non plus à ne retenir qu'une partie des déclarations d'un témoin globalement crédible (ATF 120 Ia 31 consid. 3).

Le juge doit en particulier se forger une conviction aussi bien sur les premières déclarations du prévenu, respectivement d'un témoin, que sur les nouvelles, valant rétractation, et apprécier les circonstances dans lesquelles l'intéressé a modifié ses déclarations initiales (arrêts du Tribunal fédéral 6B_157/2011 du 20 septembre 2011 consid. 1.2 ; 6B_626/2008 du 11 novembre 2008 consid. 2.1).

2.1.4. L'aveu est une preuve ordinaire qui n'a pas de valeur particulière. Il permet la condamnation de l'auteur lorsque le juge est convaincu qu'il est intervenu sans contrainte et paraît vraisemblable. Face à des aveux, suivis de rétractation, le juge doit se forger une conviction aussi bien sur les premières déclarations du prévenu que sur les nouvelles, valant rétractation, et apprécier les circonstances dans lesquelles celui-ci a modifié ses déclarations initiales (arrêts du Tribunal fédéral 6B_65/2016 du
26 avril 2016 consid. 2.2.1 ; 6B_157/2011 du 20 septembre 2011 consid. 1.2 ; 6B_626/2008 du 11 novembre 2008 consid. 2.1).

2.2.1. Selon l'art. 2 CP, le droit applicable à la culpabilité et aux sanctions est celui en vigueur au moment des faits reprochés à l'auteur, sauf si le nouveau droit lui est plus favorable (ATF 149 IV 361 consid. 1.2.1 ; 134 IV 82 consid. 6.1).

2.2.2. Dans sa version en vigueur depuis le 1er juillet 2024, l'art. 191 CP prévoit que quiconque profite du fait qu'une personne est incapable de discernement ou de résistance pour lui faire commettre ou subir l'acte sexuel, un acte analogue ou un autre acte d'ordre sexuel, se rend coupable d'actes d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance. Dans sa teneur jusqu'au 30 juin 2024, cette même infraction était commise par quiconque, sachant qu'une personne est incapable de discernement ou de résistance, en profite pour commettre sur elle l'acte sexuel.

Selon le rapport relatif au projet de la Commission des affaires juridiques du Conseil des États, le terme "sachant" avait pour but de garantir que l'auteur s'était bien rendu compte de la situation de la victime, notamment lorsque l'état d'incapacité de celle-ci n'était pas facilement reconnaissable, ce qui découlait des règles générales du droit pénal (FF 2022 687, p. 42). Il s'ensuit que les éléments constitutifs de l'infraction de l'art. 191 CP avant et après le 1er juillet 2024 sont en principe similaires, mais que le droit en vigueur depuis cette date pourrait, à tout le moins en théorie, ouvrir la porte à une reconnaissance plus large du dol éventuel. Partant, il convient d'appliquer le droit en vigueur jusqu'au 30 juin 2024 aux faits qui, comme dans le cas d'espèce, se sont produits avant cette date (AARP/83/2025 du 25 février 2025 consid. 2.5.1 ; AARP/278/2024 du 6 août 2024 consid. 3.1.2 ; AARP/390/2024 du 4 novembre 2024 consid. 3.1.1).

2.3.1. Est incapable de résistance la personne qui n'est pas apte à s'opposer à des contacts sexuels non désirés. Cette disposition protège les personnes qui ne sont pas en mesure de former, exprimer ou exercer efficacement une volonté de s'opposer à des atteintes sexuelles. L'incapacité de résistance peut être durable ou momentanée, chronique ou due aux circonstances. Elle peut être la conséquence d'un état mental gravement anormal, d'une sévère intoxication due à l'alcool ou à la drogue, ou encore d'entraves matérielles. Il faut cependant que la victime soit totalement incapable de se défendre. Si l'inaptitude n'est que partielle – par exemple en raison d'un état d'ivresse – la victime n'est pas incapable de résistance (ATF 148 IV 329 consid. 3.2 ; 133 IV 49 consid. 7.2 ; 119 IV 230 consid. 3a ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_69/2018 du
11 juin 2018 consid. 4.1 ; 6B_1142/2017 du 23 mars 2018 consid. 2.1 ; 6B_996/2017 du 7 mars 2018 consid. 1.1).

L'exigence jurisprudentielle d'une incapacité de résistance ou de discernement "totale" ne recouvre pas exclusivement des états de perte de conscience complète mais délimite les situations visées par l'art. 191 CP de celles dans lesquelles, par exemple en raison de l'alcoolisation de la victime, celle-ci est simplement désinhibée. Une incapacité de résistance peut être retenue lorsqu'une personne, sous l'effet de l'alcool et de la fatigue ne peut pas ou que faiblement s'opposer aux actes entrepris (Herabsetzung der Hemmschwelle ; ATF 148 IV 329 consid. 3.2 ; 133 IV 49 consid. 7.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_238/2019 du 16 avril 2019 consid. 2.1).

La jurisprudence a ainsi admis une incapacité de résistance lorsqu'une personne est endormie (arrêts du tribunal fédéral 6B_1204/2017 du 17 mai 2018 consid. 2.1 ; 6B_685/2010 du 4 avril 2011 consid. 2.3) et dans le cas de personnes sous l'effet combiné de l'alcool et de la consommation de stupéfiants ou de la fatigue (arrêts du Tribunal fédéral 6B_238/2019 du 16 avril 2019 ; 6B_578/2018 du 20 mars 2019 ; 6B_996/2017 du 7 mars 2018). Dans le cas d'une perte de capacité en raison de l'alcoolisation de la victime, il n'est pas déterminant de connaître la quantité exacte d'alcool ingérée, l'indice de masse corporelle ainsi que le taux d'alcool (arrêt du Tribunal fédéral 6B_238/2019 du 16 avril 2019 consid. 2.2). Une telle incapacité peut être établie sur la base d'autres critères, notamment par les déclarations de la victime, des témoignages ou par des photographies (arrêt du Tribunal fédéral 6B_60/2015 du 25 janvier 2016 consid. 1.1.2 et 1.1.3).

2.3.2. L'art. 191 CP exige que l'auteur ait profité de l'incapacité de discernement ou de résistance de la victime, autrement dit qu'il ait exploité l'état ou la situation dans laquelle elle se trouvait. Cela ne signifie pas que tous les actes d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance sont punissables. L'infraction n'est ainsi pas réalisée si c'est la victime qui a pris l'initiative des actes sexuels ou si elle y a librement consenti (arrêt du Tribunal fédéral 6B_578/2018 du
20 mars 2019 consid. 2.1).

Plus précisément, l'incapacité de discernement de l'art. 191 CP exclut tout consentement valable à l'acte d'ordre sexuel et toute responsabilité à cet égard. Il s'ensuit que si la personne a consenti aux actes lorsqu'elle était en mesure de le faire, par exemple avant d'être incapable de discernement, l'infraction ne s'applique pas. En revanche, une fois qu'elle est en état d'incapacité, elle n'est plus en mesure de se déterminer librement. Partant, son comportement importe peu, soit qu'elle ait pris des initiatives, soit qu'elle ne se soit simplement pas opposée aux actes. Il suffit alors que l'auteur se soit aperçu de l'incapacité et l'ait exploitée (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1362/2019 du 11 mars 2020 consid. 3.1). De même, le fait qu'une victime, malgré son état (endormie et sous l'effet d'une forte alcoolisation), parvienne à réagir en demandant à l'auteur d'arrêter ne permet pas encore de retenir qu'elle était capable d'exprimer efficacement son opposition (arrêt du Tribunal fédéral 6B_586/2019 du
3 juillet 2019 consid. 1.4.2).

2.3.3. Sur le plan subjectif, l'art. 191 CP définit une infraction intentionnelle. La formule "sachant que" signifie que l'auteur a connaissance de l'incapacité de discernement ou de résistance de la victime. Il appartient par conséquent au juge d'examiner avec soin si l'auteur avait vraiment conscience de l'état d'incapacité de la victime. Le dol éventuel suffit. Agit donc intentionnellement celui qui s'accommode de l'éventualité que la victime ne puisse pas être, en raison de son état physique ou psychique, en situation de s'opposer à une sollicitation d'ordre sexuel, mais lui fait subir malgré tout un acte d'ordre sexuel (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1175/2015 du 19 avril 2016 consid. 3.2 ; 6B_60/2015 du 25 janvier 2016 consid. 1.2.1). Il n'y a pas d'infraction si l'auteur est convaincu, à tort, que la personne est capable de discernement ou de résistance au moment de l'acte (arrêts du Tribunal fédéral 6B_996/2017 du 7 mars 2018 consid. 1.1 ; 6B_60/2015 du 25 janvier 2016 consid. 1.2.1).

2.3.4. Selon l'art. 13 CP, quiconque agit sous l'influence d'une appréciation erronée des faits est jugé d'après cette appréciation si elle lui est favorable (al. 1). Quiconque pouvait éviter l'erreur en usant des précautions voulues est punissable pour négligence si la loi réprime son acte comme infraction par négligence (al. 2).

Agit sous l'emprise d'une erreur sur les faits celui qui n'a pas connaissance ou qui se base sur une appréciation erronée d'un élément constitutif d'une infraction pénale
(ATF 129 IV 238 consid. 3.1). L'intention délictuelle fait défaut (arrêt du Tribunal fédéral 6B_465/2015 du 8 février 2016 consid. 4.1).

2.4.1. À teneur de l'art. 115 al. 1 let. b LEI, est puni d'une peine privative de liberté d'un an au plus ou d'une peine pécuniaire quiconque séjourne illégalement en Suisse, notamment après l'expiration de la durée du séjour non soumis à autorisation ou du séjour autorisé.

2.4.2. La tolérance constante de l'autorité – administrative ou pénale – à l'égard d'un comportement illicite déterminé peut, dans certains cas, constituer une raison suffisante de se croire en droit d'agir (art. 21 CP ; ATF 91 IV 201 consid. 4). Ainsi, il existe des raisons suffisantes excluant la nécessité de réflexions supplémentaires lorsque la police a toléré des comportements semblables depuis longtemps. Il en va de même en présence d'une pratique constante et non contestée. En revanche, le simple fait que l'autorité n'intervienne pas ne suffit pas pour admettre l'existence d'une erreur de droit (ATF 128 IV 201 consid. 2).

2.5. En l'espèce, l'appelant ne conteste pas, à juste titre, sa culpabilité, dûment établie par les éléments du dossier, en relation avec l'infraction d'actes d'ordre sexuel avec des enfants (art. 187 CP).

2.6.1. Il est partant également établi qu'il a commis un acte sexuel sur la plaignante au sens de l'art. 191 aCP, ayant lui-même déclaré avoir introduit son pénis dans le vagin de celle-ci, dans la nuit du 5 au 6 juin 2021, alors qu'elle se trouvait dans son lit.

Autre est la question de savoir si l'intimée était incapable de résistance, voire de discernement, au moment des faits, et si le prévenu s'en est rendu compte et s'il a profité de cet état pour commettre les actes reprochés.

2.6.2. Il sied tout d'abord de relever que la quantité retenue par le CURML dans son rapport d'analyse, soit 34.1 mmol/l correspondant à 1.6 g/l, représente objectivement un taux d'alcoolémie élevé, ce d'autant plus si l'on tient compte du très jeune âge de la victime (13 ans), de sa faible corpulence (43 kg pour 156 cm), des vomissements intervenus peu avant les faits ou encore du temps écoulé entre ceux-ci (aux alentours de minuit) et la prise de sang (3h35). Au contraire de ce qu'allègue l'appelant, les quelques antécédents de la plaignante avec l'alcool, dont cette dernière ne s'est d'ailleurs pas cachée et qui ressortent également de son dossier médical, ne sont pas de nature à remettre en cause ce constat, en l'absence de dépendance et, partant, d'accoutumance à l'alcool, constatées médicalement.

Dans tous les cas, l'on ne saurait se fonder sur le seul taux d'alcoolisation d'une personne pour déterminer sa capacité – ou son incapacité – de discernement. Il faut bien davantage se référer également à différents critères, tels que la quantité d'alcool ingérée, les témoignages recueillis ou encore les déclarations de parties (voir supra consid. 2.3.1). Or, en l'occurrence, outre le témoignage de E______, dont il ressort que sa fille avait bu de l'alcool, puis rejoint sa chambre en titubant, ce qui est corroboré par l'appelant lui-même, l'incapacité de résistance de l'intimée est également établie par ses propos constants à ce sujet. Elle a en effet déclaré à maintes reprises au cours de la procédure, en particulier aux soignants qui l'ont auscultée immédiatement après les faits, qu'elle s'était sentie "comme dans un rêve". Elle avait un souvenir vague et flou de l'acte, durant lequel elle "planait" et se trouvait "dans les vapes", état qu'elle attribuait avant tout à sa consommation d'alcool, mais également à son état de fatigue, ce qui apparaît d'autant plus plausible que les faits se sont déroulés dans son lit, autour de minuit et après une soirée festive.

C'est le lieu de souligner que, telles que l'ont retenu les premiers juges, les explications fournies par l'intimée sont crédibles. Elle a expliqué de manière convaincante les raisons pour lesquelles, poussée par les services sociaux et sa mère, à laquelle elle s'était immédiatement confiée, elle s'était résolue à porter plainte plusieurs mois après les faits, ce qui correspond à un phénomène courant chez les victimes d'infractions sexuelles, lesquelles aspirent le plus souvent au refoulement ou au déni de l'évènement traumatique vécu, et ne saurait remettre en cause la crédibilité générale de leurs déclarations (ATF 147 IV 409 consid. 5.4.1 = JdT 2022 IV 192). La thèse de l'échec de négociations financières avancée par l'appelant ne trouve par ailleurs aucune assise dans le dossier, ce d'autant moins qu'il a expliqué avoir d'emblée refusé d'offrir un cadeau à la victime et sa mère, tel que cela lui avait été suggéré par son propre père. L'intimée a en outre fait part des quelques éléments dont elle se souvenait, malgré son état, sans exagération et avec modération, à savoir que le prévenu avait agi à une seule reprise, sans contrainte physique, admettant même s'être laissé faire. Elle a reconnu avoir fait une erreur en pensant initialement qu'il l'avait droguée et ne pas se souvenir si elle avait crié fort, ce qui explique en partie pourquoi personne n'a entendu quoi que ce soit d’anormal dans l'appartement, ni si elle lui avait demandé d'arrêter, n'excluant pas qu'il ait pu se plier à sa demande. Elle a fourni des détails évocateurs, tels que la respiration de son agresseur, sa chaleur ou encore la sensation de son ventre sur son corps et de sa langue. Or, il est établi que les expériences traumatiques sont traitées par le cerveau différemment des évènements quotidiens. Elles peuvent ainsi entraîner des pertes de mémoire et justifier de potentielles incohérences, qui résultent notamment de tentatives de refoulement, ou, au contraire, une grande richesse de détails dans la relation des faits (ATF 147 IV 409 consid. 5.4.2 = JdT 2022 IV 192). Elle a décrit ses sentiments pendant et après les faits, soit avant tout du dégoût et de la déception quant à sa propre incapacité à réagir et à s'opposer, sentiments très fréquents chez les victimes d'infractions sexuelles (ATF 147 IV 409 consid. 5.4.1 =
JdT 2022 IV 192). Elle n'avait en outre aucune raison d'accuser faussement le jeune homme, ce d'autant plus que, selon elle, ses révélations avaient détruit sa famille. Elle a également parfaitement su faire la distinction entre de simples regrets éprouvés après un acte sexuel, déplaisant à posteriori, et l'absence de consentement. Enfin, le traumatisme qu'elle a vécu est attesté par son psychiatre, même si son état de santé actuel ne peut pas exclusivement être mis en lien avec les abus relatés, vu sa fragilité initiale.

Il est ainsi établi, au-delà de tout doute raisonnable que l'intimée était incapable de résistance au sens de l'art. 191 aCP en raison de son intoxication très conséquente à l'alcool, cumulée à son état de fatigue. Elle n'était alors pas en mesure de décider si elle souhaitait, de son plein gré, entretenir un acte sexuel, ni de réaliser que les actes de l'appelant étaient de nature à porter atteinte à son intégrité sexuelle. Elle n'était pas davantage en mesure de résister aux gestes de l’appelant. Le fait que l'intimée soit parvenue à prendre une douche avant l'acte sexuel imposé, reproduisant alors un geste du quotidien, ou encore à s'opposer aux actes de l'appelant, vu la douleur ressentie suite à la pénétration vaginale, que ce soit en faisant du bruit, en lui demandant d'arrêter ou en se débattant, n'est pas de nature à remettre en cause ces incapacités (voir supra ch. 2.3.2).

2.6.3. Reste à déterminer si l'appelant avait conscience de l'état d'incapacité de discernement, respectivement de résistance, de la plaignante.

Les dénégations du précité à ce sujet n'emportent pas conviction.

Il a varié dans ses explications concernant l'état de la victime, ce qui entache sa crédibilité. L'appelant a d'abord indiqué que celui-ci s'était péjoré durant la soirée, au point qu'elle avait ri sans raison, puis quitté la table en titubant, avant de prétendre qu'elle était "normale". Il a du reste finalement admis qu'elle avait regagné sa chambre à coucher en titubant.

L'état d'incapacité de l'intimée devait lui apparaître d'autant plus manifeste qu'il l'avait vue boire de l'alcool, notamment de la vodka et du whisky, qu'il a admis lui avoir servi des boissons alcoolisées, en sus du fait qu'il avait constaté qu'elle avait vomi dans son lit, ce qui dénote un état d’alcoolisation pathologique, propre à amoindrir les capacités de discernement et de résistance de la jeune fille.

La Cour est ainsi convaincue que le prévenu s'est rendu compte de l'état d'incapacité de l'intimée et ce, à tout le moins, dès que cette dernière est partie dans sa chambre.

2.6.4. L'appelant allègue que la jeune fille a eu un comportement actif et a directement sollicité l'acte sexuel, démontrant ainsi de manière active son consentement.

Les explications de l'appelant peinent à convaincre.

Il paraît en effet incongru, au vu du contexte, que celle-ci ait sollicité l'acte sexuel, compte tenu de son très jeune âge, de son manque d'expérience, étant rappelé qu'elle était vierge, ainsi que de son état d'alcoolisation et de fatigue, alors qu’elle se trouvait au domicile familial et que sa mère, ainsi que sa sœur adoptive étaient présentes, en sus d'autres convives, outre le fait que la porte de sa chambre était ouverte. Le prétendu intérêt témoigné à l’appelant, intervenu déjà au cours du repas, au travers de regards, n'est étayé par aucun témoignage. À suivre l'appelant, elle aurait, alors même qu'elle était encore vierge, provoqué l'acte sexuel avec un homme qu'elle ne voyait qu'à de très rares occasions, ce en 20 secondes seulement, sans même parler et sans aucune forme de préliminaire, ce qui ne fait aucun sens, le prévenu ayant d'ailleurs reconnu que cela était insolite.

Les explications de l'appelant sont, pour leur part et d'une manière générale, sujettes à caution, tant celui-ci a varié dans ses déclarations. Il a commencé par nier devant la mère de l'intimée tout rapprochement, avant de reconnaître la pénétration vaginale, confronté aux maladies sexuellement transmissibles contractées par la plaignante. Il a fluctué sur l'état physique de cette dernière (voir supra ch. 2.6.3). Il a encore évolué dans ses explications relatives à leurs échanges durant la soirée, indiquant d'abord qu'elle l'avait séduit, puis révélant qu'ils n'avaient eu aucune interaction. S'agissant de l'acte lui-même, il s'est contredit sur des points essentiels, à savoir les gestes de la jeune fille à son égard et la/les position(s) adoptées durant le rapport, pourtant bref.

Par ailleurs, plusieurs éléments interpellent, au premier rang desquels figurent les excuses maintes fois présentées par l'appelant, que ce soit par SMS immédiatement après les faits - même s'il convient de relativiser ces messages, compte tenu de son statut administratif -, durant la procédure ou encore dans une lettre. Ces excuses s'expliquent difficilement si l'on s'en tient à sa version des faits, à savoir que l'adolescente était pleinement consentante, voire instigatrice de l'acte sexuel.

Il a en outre fourni des explications contradictoires sur l'attitude et les réactions de la jeune fille au cours du rapport, indiquant, d'une part, qu'elle n'avait pas bougé et n'avait rien dit, alors que c'est précisément ce qui aurait dû l'alerter sur son état de conscience, et, d'autre part, qu'elle n'était pas immobile mais, surtout, il ne semble à aucun moment s'être soucié de sa personne, ne sachant dire si elle avait apprécié l'acte, malgré sa singularité.

Enfin, ses déclarations, en ce qu'il avait introduit son pénis aisément dans le vagin de l'intimée, qui n'avait manifesté aucune réaction, mais qui lui avait néanmoins demandé de cesser au bout d'une minute seulement, sont non seulement contradictoires entre elles, mais également contredites pas les lésions constatées par les médecins.

Quoi qu'il en soit, au vu de son intoxication massive à l'alcool et de sa fatigue, l'intimée n'était pas en mesure de consentir aux actes commis par l'appelant, ce que ce dernier ne pouvait ignorer, au vu de l'état de la jeune fille. Il a d'ailleurs reconnu qu'il aurait dû se questionner sur l'état de conscience de celle-ci, compte tenu de son alcoolisation et de son jeune âge, puisque, toujours selon lui, cet état était dépendant du consentement. Ainsi, le comportement de la plaignante durant la soirée et au moment de l'acte importe peu, étant rappelé que la jurisprudence (voir supra ch. 2.3.2) a confirmé que l'incapacité de discernement au sens de l'art. 191 CP exclut tout consentement valable à l'acte d'ordre sexuel et toute responsabilité à son égard. Dès lors que la plaignante était incapable de résistance, l'infraction serait consommée quand bien même celle-ci aurait pris, à un certain moment, des initiatives ou ne se serait pas opposée aux actes subis.

2.6.5. Au vu de ce qui précède, l'appelant sera reconnu coupable d'actes sexuels sur une personne incapable de résistance, son appel étant rejeté.

2.7. L'appelant séjourne en Suisse sans autorisation depuis qu'il y est arrivé en 2015.

Il ne conteste pas avoir été pleinement conscient de cette situation, mais objecte qu'il devait bénéficier de la tolérance générale des autorités.

Si la tolérance de l'État n'est pas mise en doute s'agissant de la poursuite du séjour illégal, elle concerne exclusivement des demandeurs. Or, l'appelant a déposé une demande de régularisation le 16 mai 2024 seulement, soit bien après son interpellation, de sorte qu'il ne saurait se prévaloir d'une quelconque erreur de droit.

Sa condamnation pour infraction à l'art. 115 al. 1 let. b LEI sera ainsi confirmée, la période pénale pour le séjour illégal s'étendant dès le 9 janvier 2018, vu le classement des faits préalablement reprochés, et son appel rejeté sur ce point.

3. 3.1. L'infraction à l'art. 191 aCP est passible d'une peine privative de liberté de dix ans au plus ou d'une peine pécuniaire, alors que celles à l'art. 187 ch. 1 CP et 115 al. 1
let. b LEI d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire, respectivement d'une peine privative de liberté d'un an au plus ou d'une peine pécuniaire.

3.2.1. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 141 IV 61
consid. 6.1.1 ; 136 IV 55 consid. 5 ; 134 IV 17 consid. 2.1).

Selon la conception de la nouvelle partie générale du code pénal, la peine pécuniaire constitue la sanction principale dans le domaine de la petite et moyenne criminalité, les peines privatives de liberté ne devant être prononcées que lorsque l'État ne peut garantir d'une autre manière la sécurité publique. Lorsque tant une peine pécuniaire qu'une peine privative de liberté entrent en considération et que toutes deux apparaissent sanctionner de manière équivalente la faute commise, il y a en règle générale lieu, conformément au principe de la proportionnalité, d'accorder la priorité à la première, qui porte atteinte au patrimoine de l'intéressé et constitue donc une sanction plus clémente qu'une peine privative de liberté, qui l'atteint dans sa liberté personnelle. Le choix de la sanction doit être opéré en tenant compte au premier chef de l'adéquation de la peine, de ses effets sur l'auteur et sur sa situation sociale ainsi que de son efficacité du point de vue de la prévention (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.1). En effet, le principe en vertu duquel la peine doit être fixée d'après la culpabilité de l'auteur, en prenant en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir, vaut aussi pour le choix entre plusieurs sanctions possibles, et non seulement pour la détermination de la durée de celle qui est prononcée. Que ce soit par son genre ou sa quotité, la peine doit être adaptée à la culpabilité de l'auteur. L'efficacité de la sanction à prononcer est autant décisive pour la détermination de celle-ci que pour en fixer la durée (arrêt du Tribunal fédéral 6B_611/2014 du 9 mars 2015 consid. 4.2).

3.2.2. À teneur de l'art. 34 al. 1 CP, sauf disposition contraire, la peine pécuniaire est de trois jours-amende au moins mais ne peut excéder 180 jours-amende. Le juge fixe la quotité en fonction de la culpabilité de l'auteur.

Selon l'art. 34 al. 2 2ème phr. CP, le juge fixe le montant du jour-amende selon la situation personnelle et économique de l'auteur au moment du jugement, notamment en tenant compte de son revenu et de sa fortune, de son mode de vie, de ses obligations d'assistance, en particulier familiales, et du minimum vital. Le jour amende est en principe de CHF 30.- au moins. Exceptionnellement, le juge peut le réduire à CHF 10.- si la situation économique de l'auteur l'exige.

3.2.3. Lorsque les peines envisagées concrètement sont de même genre, l'art. 49
al. 1 CP impose au juge, dans un premier temps, de fixer la peine pour l'infraction abstraitement - d'après le cadre légal fixé pour chaque infraction à sanctionner - la plus grave, en tenant compte de tous les éléments pertinents, parmi lesquels les circonstances aggravantes ou atténuantes. Dans un second temps, il augmentera cette peine pour sanctionner chacune des autres infractions, en tenant là aussi compte de toutes les circonstances y relatives (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.2).

L'exigence, pour appliquer l'art. 49 al. 1 CP, que les peines soient de même genre, implique que le juge examine, pour chaque infraction commise, la nature de la peine à prononcer pour chacune d'elle. Le prononcé d'une peine d'ensemble en application du principe de l'aggravation contenu à l'art. 49 CP n'est ensuite possible que si le juge choisit, dans le cas concret, le même genre de peine pour sanctionner chaque infraction commise. Que les dispositions pénales applicables prévoient abstraitement des peines de même genre ne suffit pas. Si les sanctions envisagées concrètement ne sont pas du même genre, elles doivent être prononcées cumulativement. La peine privative de liberté et la peine pécuniaire ne sont pas des sanctions du même genre
(ATF 144 IV 313 consid. 1.1.1).

Une peine d'ensemble en application du principe de l'aggravation suppose que le tribunal ait fixé (au moins de manière théorique) les peines (hypothétiques) de tous les délits (ATF 144 IV 217 consid. 3.5.3).

3.3.1. En l'espèce, la faute du prévenu en lien avec les infractions aux art. 187 et
191 CP est très lourde.

Avec lâcheté, il a profité de l'état d'alcoolisation et de fatigue d'une enfant de 13 ans, encore vierge, pour lui faire subir l'acte sexuel complet. Il savait qu'elle n'était pas consentante et était incapable de lui opposer une quelconque résistance. Il a agi durant son adolescence, soit une période importante pour son développement personnel et sexuel. Il a également profité de la confiance que lui témoignait la mère de l'intimée, amie de la famille, pour opérer au sein même de leur foyer. Il a été mû par la seule envie d'assouvir un désir charnel, sans aucun égard pour l'intégrité et la liberté sexuelles de la victime ainsi que pour sa santé physique et mentale. Les troubles psychiques invalidants relevés par les professionnels attestent en effet des conséquences sur l'intimée, laquelle a en outre contracté deux maladies sexuellement transmissibles.

Sa situation personnelle était plutôt favorable. Bien que bénéficiant d'un statut précaire en Suisse, il y a achevé ses études, avant de trouver un emploi. Ces circonstances rendent d'autant plus incompréhensible son passage à l'acte.

La collaboration de l'appelant est moyenne, en ce qu'il admet l'acte sexuel avec une enfant mais continue de nier l'état d'incapacité de celle-ci, malgré les preuves objectives, et de contester son intention. Si certaines de ses paroles (excuses) et certains de ses actes (acquiescement à l'action civile dans une certaine mesure) reflètent une prise de conscience de sa faute et l'expression de regrets, d'autres, en revanche, témoignent du contraire.

Sa responsabilité est pleine et entière et aucun motif justificatif n'entre en considération. Il n'y a pas lieu en particulier de tenir compte d'une quelconque réduction de la responsabilité de l'appelant, au demeurant non plaidée, liée à son état d'alcoolisation, qu'il a décrit comme "moyen".

Il n'a pas d'antécédent, ce qui est un facteur neutre dans le cadre de la fixation de la peine.

Les éléments susexposés, en particulier la faute de l'appelant, excluent le prononcé d'une peine pécuniaire. Une peine privative de liberté s'impose par conséquent.

L'infraction d'actes d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de résistance (art. 191 aCP), abstraitement la plus grave, doit être sanctionnée d'une peine privative de liberté de 30 mois. Cette peine doit être aggravée de 12 mois (peine hypothétique de 18 mois) pour l'acte d'ordre sexuel avec des enfants (art. 187 CP).

La détention subie avant jugement sera déduite de la peine (art. 51 CP).

Vu le quantum de la peine, il n'y a pas lieu de revenir sur le refus de sursis, même partiel.

3.3.2. En outre, depuis le 9 janvier 2018, l'appelant a séjourné illégalement en Suisse.

Il a agi par pure convenance personnelle, en faisant fi des contraintes et exigences liées à son statut d'étranger en Suisse.

Sa collaboration a été relativement bonne. Il a partiellement admis les faits mais persiste toutefois à les minimiser.

Sa situation personnelle ne justifie pas ses actes.

Il n'a aucun antécédent, comme déjà indiqué.

Considérant l'ensemble de ces éléments, sa faute peut être qualifiée de légère.

Ni la gravité de l'infraction ni les éléments relatifs à la personne de l'appelant n'imposent une peine privative de liberté, de sorte qu'une peine pécuniaire sera prononcée. Elle sera fixée à 60 jours-amende.

Compte tenu de la situation économique actuelle de l'appelant, le montant du jour-amende sera arrêté à CHF 30.-.

Cette peine sera assortie du sursis, dont l'appelant remplit les conditions, et le délai d'épreuve fixé à trois ans (art. 42 CP).

3.3.3. L'appel sera, partant, partiellement admis et le jugement réformé en ce sens.

4. 4.1. S'il a été prononcé contre l'auteur une peine, notamment pour infractions aux art. 187 et 191 CP, le juge lui interdit à vie l'exercice de toute activité professionnelle et de toute activité non professionnelle organisée impliquant des contacts réguliers avec des mineurs (art. 67 al. 3 let. b et c CP).

L'art. 67 al. 4bis CP permet au juge de renoncer exceptionnellement à une telle sanction dans les cas de très peu de gravité (1), si une telle mesure ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres infractions passibles de cette même mesure (2), s'il n'a pas commis l'une des infractions listées à l'art. 67 al. 4bis let. a CP, notamment l'infraction à l'art. 191 CP (3) et qu'il ne souffre pas d'un trouble pédophile (4). Lorsque ces quatre conditions sont remplies, le juge pénal doit renoncer à l'interdiction (ATF 149 IV 161 consid. 2.5.7 et arrêt du Tribunal fédéral 6B_852/2022 du 26 avril 2023 consid. 2.3).

4.2. L'appelant conteste l'interdiction à vie prononcée par les premiers juges, sans développer aucune argumentation à l'appui. Les faits commis au préjudice de la jeune intimée, constitutifs d'actes d'ordre sexuel sur une personne incapable de résistance (art. 191 CP), ne sont certainement pas de peu de gravité, bien au contraire. La première et la troisième des quatre conditions permettant au juge de renoncer exceptionnellement au prononcé de la mesure ne sont donc pas réalisées.

5. 5.1.1. Conformément à l'art. 66a al. 1 CP, le juge expulse un étranger du territoire suisse pour une durée de cinq à quinze ans s'il est reconnu coupable de l'une des infractions énumérées aux let. a à o. L'art. 66a CP prévoit l'expulsion "obligatoire" de l'étranger condamné pour l'une des infractions listées à l'al. 1, quelle que soit la quotité de la peine prononcée à son encontre. L'expulsion est donc en principe indépendante de la gravité des faits retenus (arrêt du Tribunal fédéral 6B_506/2017 du
14 février 2018 consid. 1.1 = SJ 2018 I 397).

5.1.2. Selon l'art. 66a al. 2 CP, il peut néanmoins être renoncé à l'expulsion, exceptionnellement, lorsque celle-ci mettrait l'étranger dans une situation personnelle grave et que les intérêts publics à l'expulsion ne l'emportent pas sur son intérêt à demeurer en Suisse.

Les conditions énoncées à l'art. 66a al. 2 CP sont cumulatives. Alors même que
l'art. 66a al. 2 CP est formulé comme une norme potestative (Kannvorschrift), le juge doit renoncer à l'expulsion lorsque les conditions de cette disposition sont réunies, conformément au principe de proportionnalité (arrêt du Tribunal fédéral 6B_724/2018 du 30 octobre 2018 consid. 2.3.1). La loi ne définit pas ce qu'il faut entendre par une "situation personnelle grave" (première condition) ni n'indique les critères à prendre en compte dans la pesée des intérêts (seconde condition).

Compte tenu du lien étroit entre l'expulsion pénale et les mesures du droit des étrangers, il est justifié de s'inspirer, de manière générale, des critères prévus par
l'art. 31 al. 1 de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative (OASA) et de la jurisprudence y relative, dans le cadre de l'application de l'art. 66a al. 2 CP. En règle générale, il convient d'admettre l'existence d'un cas de rigueur au sens de l'art. 66a al. 2 CP lorsque l'expulsion constituerait, pour l'intéressé, une ingérence d'une certaine importance dans son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'art. 13 Cst. et par le droit international, en particulier l'art. 8 CEDH (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1329/2018 du 14 février 2019
consid. 2.3.1).

5.1.3. Pour pouvoir invoquer l'art. 8 CEDH, l'étranger doit pouvoir justifier d'une relation étroite et effective avec une personne de sa famille. Outre le droit au respect de la vie familiale, l'art. 8 par. 1 CEDH garantit le droit au respect de la vie privée. Selon la jurisprudence (arrêt du Tribunal fédéral 6B_706/2018 du 7 août 2018
consid. 2.1), pour se prévaloir du respect au droit de sa vie privée, l'étranger doit établir l'existence de liens sociaux et professionnels spécialement intenses avec la Suisse, notablement supérieurs à ceux qui résultent d'une intégration ordinaire. Le Tribunal fédéral n'adopte pas une approche schématique qui consisterait à présumer, à partir d'une certaine durée de séjour en Suisse, que l'étranger y est enraciné et dispose de ce fait d'un droit de présence dans notre pays. Il procède bien plutôt à une pesée des intérêts en présence, en considérant la durée du séjour en Suisse comme un élément parmi d'autres.

5.2.1. En l'espèce, les infractions d'actes d'ordre sexuel avec des enfants et commis sur une personne incapable de résistance par l'appelant entraînent son expulsion obligatoire au sens de l'art. 66a al. 1 let. h CP.

Aussi, une éventuelle renonciation ne peut intervenir qu'exceptionnellement, au cas où l'expulsion mettrait le prévenu dans une situation personnelle grave et où son intérêt à rester en Suisse serait supérieur à celui de la collectivité à le renvoyer dans son pays d'origine. L'hypothèse principalement visée est celle d'un étranger né en Suisse ou y ayant grandi.

La durée de vie de l'appelant sur le territoire helvétique n'est, certes, pas négligeable, celui-ci y étant arrivé en 2015, soit il y a dix ans. Il a été scolarisé, puis a trouvé un emploi en Suisse, où vivent encore son père, sa belle-mère ainsi que certains de ses frères, sœurs, oncles, tantes et cousins. Néanmoins, il n'y bénéficie d'aucun statut. Par ailleurs, ses chances de réinsertion en Colombie, pays dans lequel il a vécu durant 17 ans, tant personnelle (des membres de sa famille proche et éloignée y vivent) que professionnelle (il jouit d'une formation d'employé de commerce, de quelques expériences professionnelles, n'a que 27 ans, est en bonne santé et parle espagnol) sont bonnes.

Force est de constater que rien ne s'oppose à son expulsion, qui ne le placerait pas dans une situation personnelle particulièrement grave au sens de la jurisprudence. L'on ne perçoit pas en quoi son expulsion aurait pour conséquence de l'isoler, dès lors qu'il admet avoir des contacts fréquents avec sa mère, ainsi que, plus rarement, avec d'autres membres de sa famille en Colombie. En tout état de cause, il a été condamné notamment à une peine privative de liberté de trois ans et demi pour actes d'ordre sexuel sur une enfant incapable de résistance, de sorte que son intérêt à rester sur le territoire helvétique ne prime pas l'intérêt public à l'expulser. Enfin, la mesure d'expulsion n'a été ordonnée que pour cinq ans, soit le minimum légal.

L'expulsion prononcée par le TCO sera donc confirmée et l'appel rejeté sur ce point.

5.2.2. Il n'y a pas de raison non plus de renoncer à l'inscription dans le registre SIS, le principe de proportionnalité étant respecté : l'appelant n'indique pas avoir séjourné de façon soutenue dans un pays de l'UE dans lequel il pourrait prétendre avoir des attaches.

6. 6.1.1. En qualité de partie plaignante, le lésé peut faire valoir des conclusions civiles déduites de l'infraction par adhésion à la procédure pénale (art. 122 al. 1 CPP). En vertu de l'art. 126 al. 1 let. a CPP, le tribunal statue sur les prétentions civiles présentées lorsqu'il rend un verdict de culpabilité à l'encontre du prévenu. Selon l'art. 126 al. 2 let. b CPP, il renvoie la partie plaignante à agir par la voie civile lorsqu'elle n'a pas chiffré ses conclusions de manière suffisamment précise ou ne les a pas suffisamment motivées.

6.1.2. Selon l'art. 41 de la loi fédérale, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations), celui qui cause, d'une manière illicite, un dommage à autrui, soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence, est tenu de le réparer.

La preuve du dommage incombe au demandeur (art. 42 al. 1 CO).

6.1.3. Aux termes de l'art. 47 CO, le juge peut, en tenant compte de circonstances particulières, allouer à la victime de lésions corporelles une indemnité équitable à titre de réparation morale. Les circonstances particulières évoquées dans la norme consistent dans l'importance de l'atteinte à la personnalité du lésé, l'art. 47 CO étant un cas d'application de l'art. 49 CO. Les lésions corporelles, qui englobent tant les atteintes physiques que psychiques, doivent donc en principe impliquer une importante douleur physique ou morale ou avoir causé une atteinte durable à la santé. Parmi les circonstances qui peuvent, selon les cas, justifier l'application de l'art. 47 CO, figurent avant tout le genre et la gravité de la lésion, l'intensité et la durée des répercussions sur la personnalité de la personne concernée, le degré de la faute de l'auteur ainsi que l'éventuelle faute concomitante du lésé (ATF 141 III 97 consid. 11.2). À titre d'exemple, une longue période de souffrance et d'incapacité de travail, de même que les préjudices psychiques importants sont des éléments déterminants
(arrêt 4A_373/2007 du 8 janvier 2008 consid. 3.2, non publié in ATF 134 III 97 ;
132 II 117 consid. 2.2.2 p. 119 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1066/2014 du 27 février 2014 consid. 6.1.2).

En raison de sa nature, l'indemnité pour tort moral, qui est destinée à réparer un dommage qui ne peut que difficilement être réduit à une simple somme d'argent, échappe à toute fixation selon des critères mathématiques, de sorte que son évaluation en chiffres ne saurait excéder certaines limites. L'indemnité allouée doit toutefois être équitable (ATF 130 III 699 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1066/2014 du 27 février 2014 consid. 6.1.2).

Toute comparaison avec d'autres affaires doit intervenir avec prudence, dès lors que le tort moral touche aux sentiments d'une personne déterminée dans une situation donnée et que chacun réagit différemment face au malheur qui le frappe. Une comparaison avec d'autres cas similaires peut cependant, suivant les circonstances, constituer un élément d'orientation utile (ATF 138 III 337 consid. 6.3.3).

Le guide relatif à la fixation du montant de la réparation morale selon la loi sur l'aide aux victimes (LAVI) établi le 3 octobre 2019 par l'Office fédéral de la justice (OFJ ; disponible sur : https://www.newsd.admin.ch/newsd/message/attachments/76987.pdf) propose une indemnité comprise entre CHF 8'000.- et CHF 20'000.- pour une atteinte très grave (p. 12 ; par exemple viol, contrainte sexuelle grave, actes d'ordre sexuel graves commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance, acte sexuel grave ou répété avec un enfant).

En cas de contrainte sexuelle ou de viol sur un mineur de moins de 16 ans, les indemnités suivantes ressortent notamment de la jurisprudence : CHF 10'000.- pour des attouchements à quelques reprises sur le sexe, les seins et une fois sur le pubis par un grand-père par alliance d'une enfant de dix ans (ATF 118 II 410 consid. 2b) ;
CHF 10'000.- s'agissant d'actes sans pénétrations commis à six ou sept reprises par un oncle de confiance entre les dix et 12 ans de sa nièce, ayant engendré un stress post-traumatique et affecté son développement (cf. AARP/151/2023 du 4 mai 2023 consid. 7.2) ; CHF 15'000.- pour le viol d'un enfant d'environ 11 ans, incluant une fellation et une sodomie, par son professeur de guitare, lequel a entraîné des troubles alimentaires et un suivi psychologique (cf. arrêt du Tribunal fédéral 6B_970/2013 du 24 juin 2014 consid. A et 10.2).

6.2.1. L'appelant a acquiescé aux conclusions civiles de la partie plaignante relatives à la réparation de son dommage matériel. Sa condamnation à lui payer les sommes de CHF 368.40, CHF 655.85 et CHF 587.20 à ce titre sera dès lors confirmée.

6.2.2. En l'espèce, l'appelant a également acquiescé au tort moral de la victime mais seulement à hauteur de CHF 5'000.-.

Celle-ci, âgée de 13 ans, a subi, alors qu'elle se trouvait en incapacité de résistance, un acte sexuel complet de l'appelant, qui a profité de son statut d'ami de la famille pour s'introduire dans sa chambre sous prétexte de lui venir en aide.

Après les faits, elle a présenté des lésions au niveau du vagin et de l'hymen et a contracté deux maladies sexuellement transmissibles. Un traitement contre l'infection par le VIH lui a en outre été prescrit.

Par ailleurs, les souffrances résultant de l'infraction sont attestées par le Dr I______, lequel a relevé, chez la patiente, des troubles psychiques invalidants avec une incapacité à reprendre une formation et à trouver une stabilité psychique suffisante. Elle présentait également des troubles du sommeil, des peurs en milieu social et des difficultés à poursuivre une activité, étant précisé qu'il n'était pas exclu que des difficultés psychiques émergent à l'âge adulte. L'intimée et sa mère ont par ailleurs expliqué, sans le cacher, que même si, avant les faits, celle-là bénéficiait déjà d'un suivi thérapeutique et rencontrait des difficultés, notamment avec l'alcool, le comportement du prévenu l'avait rendue dépressive et anxieuse et cela avait eu des conséquences néfastes sur sa vie sentimentale et sexuelle.

Il appert ainsi que l'indemnité de CHF 15'000.- allouée à l'intimée par les premiers juges est en adéquation avec le tort moral subi. Elle doit être confirmée.

Elle portera intérêts à 5% l'an dès le 6 juin 2021 (ATF 131 III 12 consid. 9.1 et 9.5 ; 122 III 53 consid. 4a et 4b).

7. Les motifs ayant conduit les premiers juges à prononcer, par ordonnance séparée du
janvier 2025, la mise en détention pour des motifs de sûreté de l'appelant, sont toujours d'actualité, ce que celui-ci ne conteste au demeurant pas, de sorte que la mesure sera reconduite mutatis mutandis (ATF 139 IV 277 consid. 2.2 à 2.3).

8. La restitution à l'appelant de son IPhone ordonnée dans le jugement entrepris sera confirmée.

9. L'appelant, qui n'obtient que partiellement gain de cause sur la peine, mais succombe sur ses autres conclusions, supportera les deux tiers des frais de la procédure d'appel envers l'État (art. 428 CPP), comprenant un émolument de décision de CHF 3'000.-.

Le verdict de culpabilité étant confirmé, il n'y a pas lieu de modifier la répartition des frais de la procédure préliminaire et de première instance.

10. 10.1.1. Selon l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. S'agissant d'une affaire soumise à la juridiction cantonale genevoise, l'art. 16 du règlement sur l'assistance juridique (RAJ) s'applique.

Cette dernière disposition prescrit que l'indemnité, en matière pénale, est calculée selon le tarif horaire de CHF 200.- pour un chef d'étude (let. c). En cas d'assujettissement – l'assujettissement du patron de l'avocat au statut de collaborateur n'entrant pas en considération (arrêts du Tribunal fédéral 6B_486/2013 du
16 juillet 2013 consid. 4 et 6B_638/2012 du 10 décembre 2012 consid. 3.7) – l'équivalent de la TVA est versé en sus.

Conformément à l'art. 16 al. 2 RAJ, seules les heures nécessaires sont retenues. Elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu.

10.1.2. L'activité consacrée aux conférences, audiences et autres actes de la procédure est majorée de 20% jusqu'à 30 heures de travail, décomptées depuis l'ouverture de la procédure, et de 10% lorsque l'état de frais porte sur plus de 30 heures, pour couvrir les démarches diverses, telles la rédaction de courriers ou notes, les entretiens téléphoniques et la lecture de communications, pièces et décisions (arrêt du Tribunal fédéral 6B_838/2015 du 25 juillet 2016 consid. 3.5.2 ; voir aussi les décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2016.34 du 21 octobre 2016 consid. 4.1 et 4.2 et BB.2015.85 du 12 avril 2016 consid. 3.5.2 et 3.5.3). Des exceptions demeurent possibles, charge à l'avocat de justifier l'ampleur d'opérations dont la couverture ne serait pas assurée par le forfait.

10.1.3. Le temps de déplacement de l'avocat est considéré comme nécessaire pour la défense d'office au sens de l'art. 135 CPP (décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2015.33 du 28 juillet 2015 consid. 4.3 et les références). La rémunération forfaitaire de la vacation aller/retour au et du Palais de justice ou au et du bâtiment du Ministère public est arrêtée à CHF 100.- pour les chefs d'étude, dite rémunération étant allouée d'office par la juridiction d'appel pour les débats devant elle.

10.2. En l'occurrence, il convient de retrancher de l'état de frais de Me B______, défenseur d'office de A______, l'activité consacrée à l'examen de la réponse du MP et la rédaction de déterminations, activités comprises dans la majoration forfaitaire. La durée de l'audience d'appel sera en revanche ajoutée ainsi qu'un déplacement au Palais de justice.

En conclusion, la rémunération sera arrêtée à CHF 4'864.50 correspondant à 20h00 d'activité au tarif de CHF 200.-/heure (CHF 4'000.-), plus la majoration forfaitaire de 10% (CHF 400.-), vu l'activité développée en première instance, la vacation au Palais de justice pour l'audience d'appel (CHF 100.-) et l'équivalent de la TVA au taux de 8.1% en CHF 364.50.

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTCO/4/2025 rendu le 9 janvier 2025 par le Tribunal correctionnel dans la procédure P/25085/2022.

L'admet partiellement.

Annule ce jugement.

Et statuant à nouveau :

Déclare A______ coupable d'actes d'ordre sexuel avec des enfants (art. 187 ch. 1 CP), d'actes d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance (art. 191 aCP) et de séjour illégal en Suisse (art. 115 al. 1 let. b LEI).

Classe la procédure s'agissant de l'entrée illégale (art. 115 al. 1 let. a LEI) et du séjour illégal antérieurs au 9 janvier 2018 (art. 115 al. 1 let. b LEI).

Condamne A______ à une peine privative de liberté de trois ans et six mois, sous déduction de la détention avant jugement subie depuis le 9 janvier 2025 (art. 40 et 51 CP).

Condamne A______ à une peine pécuniaire de 60 jours-amende.

Fixe le montant du jour-amende à CHF 30.-.

Met A______ au bénéfice du sursis pour cette peine pécuniaire et fixe le délai d'épreuve à trois ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit A______ que s'il devait commettre une nouvelle infraction durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Ordonne l'expulsion de Suisse de A______ pour une durée de cinq ans (art. 66a al. 1 let. h CP).

Dit que l'exécution de la peine prime celle de l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).

Ordonne le signalement de l'expulsion dans le système d'information Schengen (SIS ;
art. 20 de l'ordonnance N-SIS; RS 362.0).

Interdit à vie à A______ l'exercice de toute activité professionnelle et de toute activité non professionnelle organisée impliquant des contacts réguliers avec des mineurs (art. 67 al. 3 let. b et c CP).

Constate que A______ acquiesce aux conclusions civiles relatives à la réparation du dommage matériel (art. 124 al. 3 CPP).

Condamne A______ à payer à C______ CHF 368.40, avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2022, à titre de réparation du dommage matériel pour l'année 2021 (art. 41 CO).

Condamne A______ à payer à C______ CHF 655.85, avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2023, à titre réparation du dommage matériel pour l'année 2022 (art. 41 CO).

Condamne A______ à payer à C______ CHF 587.20, avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2024, à titre de remboursement du dommage matériel pour l'année 2023 (art. 41 CO).

Condamne A______ à payer à C______ CHF 15'000.-, avec intérêts à 5% dès le 6 juin 2021, à titre de réparation du tort moral (art. 49 CO).

Ordonne le maintien de A______ en détention pour des motifs de sûreté.

Ordonne la restitution à A______ de l'IPhone 13 Pro Max figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n° 37937020221122 (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Condamne A______ aux frais de la procédure préliminaire et de première instance, qui s'élèvent à CHF 2'903.-, y compris un émolument de jugement de CHF 1'500.- (art. 426 al. 1 CPP).

Prend acte de ce que le Tribunal correctionnel a fixé à CHF 8'696.80 l'indemnité de procédure due à Me B______, défenseur d'office de A______, pour la procédure préliminaire et de première instance (art. 135 CPP).

Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 3'355.-, comprenant un émolument de jugement de CHF 3'000.-.

Met les deux tiers de ces frais, soit CHF 2'236.65, à la charge de A______ et en laisse le solde à la charge de l'État.

Arrête à CHF 4'864.50, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me B______ pour la procédure d'appel.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Secrétariat d'État aux migration, à l'Office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal correctionnel et au Service de la réinsertion et du suivi pénal.

 

La greffière :

Sonia LARDI DEBIEUX

 

La présidente :

Delphine GONSETH

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal correctionnel :

CHF

2'903.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

0.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

180.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

100.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

3'000.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

3'355.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

6'258.00