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Décisions | Tribunal pénal

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P/12914/2013

JTCO/6/2021 du 22.01.2021 ( PENAL ) , JUGE

Normes : CP.322septies CP
Par ces motifs

république et

canton de genève

pouvoir judiciaire

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL CORRECTIONNEL

Chambre 7


22 janvier 2021

 

 

MINISTÈRE PUBLIC

contre

Monsieur A______, né le ______ 1962, domicilié c/o Me ALPHA, ______, prévenu, assisté de Me ALPHA

Madame B______, née le ______ 1970, domiciliée c/o Me BETA, ______, prévenue, assistée de Me BETA

Monsieur C______, né le ______ 1956, domicilié c/o Me GAMMA, ______, prévenu, assisté de Me GAMMA (représentant principal) et Me DELTA


TABLE DES MATIERES

A. CONCLUSIONS FINALES DES PARTIES

B. QUESTIONS PREJUDICIELLES ET INCIDENTS

C. ACTE D'ACCUSATION

D. FAITS

D.A. Corruption

D.B. Faux dans les titres

E. AUDIENCE DE JUGEMENT

F. SITUATION PERSONNELLE

G. DROIT

 

1.      Compétence

2.      Art. 322septies CP

3.      Imputation des actes aux prévenus

4.      Faux dans les titres

5.      Peine

6.      Créance compensatrice

7.      Frais et indemnités

 

H. SCHEMAS

 

I. DISPOSITIF


 

A.    CONCLUSIONS FINALES DES PARTIES :

Le Ministère public conclut à un verdict de culpabilité de Monsieur A______, de Madame B______ et de Monsieur C______ de corruption d'agents publics étrangers (art. 322septies CP) et de faux dans les titres (art. 251 cum 255 CP). Il requiert le prononcé:

-        à l'encontre de Monsieur A______ d'une peine privative de liberté de 4 ans,

-        à l'encontre de Madame B______ d'une peine privative de liberté de 2 ans, assortie du sursis complet,

-        à l'encontre de Monsieur C______ d'une peine privative de liberté de 5 ans.

Il requiert le prononcé d'une créance compensatrice :

-        à l'encontre de Monsieur A______ de USD 11'000'000.-,

-        à l'encontre de Madame B______ de USD 150'000.- ,

-        à l'encontre de Monsieur C______ de CHF 50'000'000.-.

Enfin, il demande que les prévenus soient condamnés aux frais de la procédure et que les avoirs séquestrés sur le compte no 1______ de Monsieur C______ auprès de la Banque 1______ soient affectés au paiement des frais de la procédure.

 

Monsieur C______, par la voix de ses conseils, conclut à son acquittement et au rejet de la créance compensatrice réclamée. Il ne fait pas valoir de prétentions en indemnisation.

Monsieur A______, par la voix de son conseil, conclut à son acquittement et au rejet de la créance compensatrice réclamée. Il demande la condamnation de l'Etat de Genève à lui verser la somme de CHF 335'376.65 en application de l'art. 429 al. 1 let. a CPP.

Madame B______, par la voix de son conseil, conclut à son acquittement et au rejet de la créance compensatrice réclamée. Elle demande la condamnation de l'Etat de Genève à lui verser la somme de CHF 389'846.90 à titre de remboursement de ses honoraires d'avocat.


 

B. QUESTIONS PREJUDICIELLES ET INCIDENTS

A. a) Audition de Procureur ______ et des analystes financiers du Ministère public

Après l'ouverture des débats, lors du traitement des questions préjudicielles, les prévenus ont sollicité l'audition de l'ancien Procureur ______ et des analystes financiers du Ministère public, en qualité de personnes appelées à donner des renseignements, afin de déterminer le but des voyages entrepris en Israël et aux Etats-Unis et de pouvoir identifier les preuves obtenues de manière illicite.

Le juge ne peut apprécier librement que le résultat de preuves exploitables juridiquement (ATF 133 I 33 consid. 2.1 p. 36 p. s.; THOMAS HOFER, in Basler Kommentar, Strafprozessordnung, 2e éd. 2014, nos 42 et 63 ad art. 10 CPP). Il convient dès lors d'examiner si tel est le cas.

Le Tribunal procède à l'administration de nouvelles preuves ou complète les preuves administrées de manière insuffisante (art. 343 al. 1 CPP).

Il n'y a pas lieu d'administrer des preuves sur des faits non pertinents, notoires, connus de l'autorité pénale ou déjà suffisamment prouvés (art. 139 al. 2 CPP).

Aux termes de l'art. 141 al. 2 CPP, les preuves qui ont été administrées d'une manière illicite ou en violation de règles de validité par les autorités pénales ne sont pas exploitables, à moins que leur exploitation soit indispensable pour élucider des infractions graves.

Selon l'art. 178 CPP, est entendu en qualité de personne appelée à donner des renseignements, quiconque s'est constitué partie plaignante (let. a), n'a pas encore quinze ans au moment de l'audition (let. b), n'est pas en mesure de comprendre pleinement la déposition d'un témoin en raison d'une capacité de discernement restreinte (let. c), sans être soi-même prévenu, pourrait s'avérer être soit l'auteur des faits à élucider ou d'une infraction connexe, soit un participant à ces actes (let. d), doit être interrogé comme co-prévenu sur un fait punissable qui ne lui est pas imputé (let. e), a le statut de prévenu dans une autre procédure, en raison d'une infraction qui a un rapport avec les infractions à élucide (let. f), a été ou pourrait être désigné représentant de l'entreprise dans une procédure dirigée contre celle-ci, ainsi que ses collaborateurs (let. g).

Les analystes financiers du Ministère public revêtent la qualité d'experts officiels (art. 183 al. 2 CPP cum art. 25 let. h LaCP).

Ni l'ancien Procureur ______ ni les analystes financiers du Ministère public ne sont des personnes appelées à donner des renseignements, au sens de l'art. 178 CPP. Leur audition n'est prévue par aucune disposition du code de procédure pénale.

Cette requête fait partie d'une série de demandes adressées au Tribunal de céans tendant à élucider les circonstances des voyages de Procureur ______ pour ultérieurement fonder un grief d'inexploitabilité des preuves en raison de la manière, par hypothèse illicite, dont elles auraient été recueillies.

Dans son arrêt 1B_118/2020 du 27 juillet 2020, consid. 3.4., par lequel le Tribunal fédéral a rejeté les recours tendant à la récusation du Procureur ______, notre Haute Cour a rappelé qu'il appartiendrait au juge du fond de se prononcer, le cas échéant, sur la licéité et l'exploitabilité des moyens de preuves peut-être obtenus par le biais de ces échanges en violation des règles sur l'entraide et du CPP.

Or, il ne ressort pas de la procédure que des moyens de preuve auraient été obtenus illicitement. Au contraire, toutes les preuves figurant à la procédure ont été obtenues conformément aux règles sur l'entraide et du CPP.

La défense n'indique pas quelle preuve aurait été obtenue illicitement.

Au demeurant, les auditions requises ne sont pas prévues par le Code de procédure pénale.

Ainsi, les auditions requises, que ce soit en qualité de personnes appelées à donner des renseignements ou de témoins, ne sont pas nécessaires au prononcé du jugement.

La question préjudicielle est rejetée.

b) Production des notes de Procureur ______ et de toute trace de contacts informels avec les autorités israéliennes

Les prévenus sollicitent la production de tous documents et notes en mains du Ministère public relatifs aux contacts entre Procureur ______ et les autorités israéliennes.

Les dépositions des parties et les prononcés des autorités ainsi que tous les actes de procédure qui ne sont pas accomplis en la forme écrite sont consignés au procès-verbal (art. 76 al. 1 CPP).

Par acte de procédure, on entend les décisions qui ont un effet sur le déroulement de la procédure pénale et, à ce titre, exercent une influence sur la situation du justiciable (L. MOREILLON / A. PAREIN-REYMOND, Petit commentaire du Code de procédure pénale, Bâle 2016, n. 7 et 10 ad art. 393 CPP).

Le dossier doit contenir les procès-verbaux de procédure et les procès-verbaux des auditions (art. 100 al. 1 let. a CPP).

En droit administratif et notamment en matière d'entraide, la coopération judiciaire, qui relève des activités ordinaires d'une autorité pénale, n'est pas publique (décision du TPF SK 2016.30 du 23 février 2017).

Il a, par ailleurs, été jugé que l'administré ne peut exiger la consultation des documents internes à l'administration, à moins que la loi ne le prévoie. Cela concerne notamment les notes de l'autorité, les copies des courriers électroniques ou les notes relatant des conversations téléphoniques. L'accès au dossier est accordé dans la mesure nécessaire à la sauvegarde des intérêts de l'ayant droit, qui peut consulter uniquement les pièces qui le touchent directement et personnellement (arrêt du TPF RR.2018.342-347 du 22 février 2019, consid. 3.2 et 3.3).

Dans son arrêt ACPR/584/2019 du 2 août 2019, la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de Genève a rejeté le recours de Monsieur C______ contre le refus du Ministère public de l'autoriser à accéder aux documents et notes relatifs à ses contacts avec les autorités israéliennes. En substance, la Cour de justice a retenu que les échanges entre autorités de poursuites destinés à coordonner et assurer l'avancement des procédures d'entraide (actives) ne revêtent pas la qualité d'"actes de procédure", au sens de l'art. 76 al. 1 CPP, et le refus du Ministère public, de formaliser ces échanges et de les porter à la connaissance de Monsieur C______ ou des autres parties, était fondé.

Le recours au Tribunal fédéral contre cet arrêt a été déclaré irrecevable (arrêt du Tribunal fédéral 1B_444/2019 du 10 mars 2020).

Il n'y a pas lieu de s'écarter de l'arrêt ACPR/584/2019. Les éventuelles notes prises par Procureur ______, de même que les échanges informels avec les autorités israéliennes, ne sont pas des actes de procédure, au sens de l'art. 76 al. 1 CPP, et n'ont donc pas à être versés au dossier.

Enfin, la production d'éventuelles notes écrites de Procureur ______ ou de toute trace écrite d'échanges informels avec les autorités israéliennes n'est pas nécessaire au prononcé du jugement.

La question préjudicielle est rejetée.

c) Déclaration de nullité de tous les actes de procédure après le premier voyage de Procureur ______ en Israël, du 7 au 9 mars 2017

Les prévenus demandent que tous les actes de procédure effectués après le premier voyage de Procureur ______ en Israël, entre les 7 et 9 mars 2017, soient déclarés nuls et retirés de la procédure.

Cette conclusion a trait à une procédure de récusation et aux conséquences attachées à celle-ci, référence étant faite à l'art. 60 al. 1 CPP. Or, le Tribunal fédéral a, dans son arrêt 1B_118/2020 du 27 juillet 2020, rejeté les recours des prévenus tendant à la récusation du Procureur ______.

Au surplus et comme déjà mentionné, les prévenus n'indiquent pas quel moyen de preuve aurait été obtenu en violation des règles de l'entraide et du CPP et il n'apparaît pas que tel soit le cas.

La question préjudicielle est rejetée.

d) Inexploitabilité des auditions de D______ et retrait de la procédure des procès-verbaux d'audition du précité, annulation du mandat de comparution à l'audience de jugement de D______

Les prévenus soutiennent que les procès-verbaux des auditions de D______ à Genève, les 3 et 5 septembre 2018, sont inexploitables en raison des promesses préalables dont l'intéressé aurait bénéficié de la part des autorités israéliennes et suisses. Les procès-verbaux doivent, partant, être retirés de la procédure et le mandat de comparution pour l'audience de jugement doit être annulé.

Les prévenus demandent, également, que les procès-verbaux d'auditions de D______ en Israël, le 18 août 2017, soient retirés de la procédure pour les mêmes raisons.

Le législateur a renoncé à introduire dans le CPP l'institution du "témoin de la couronne", soit l'admission, comme moyen de preuve, du témoignage d'un co-auteur qui, en échange d'une promesse d'exemption de peine ou de tout autre avantage procédural, accepte de témoigner contre ses co-prévenus (cf. Message du 21 décembre 2005 relatif à l'unification du droit de la procédure pénale, FF 2006 1086). Cependant, rien ne s'oppose, dans un procès pénal se déroulant en Suisse, à ce que l'autorité de jugement prenne en considération, pour former son opinion, des dépositions émanant d'auteurs d'infractions qui, ayant reconnu leurs crimes et s'étant engagés à collaborer avec l'autorité pour établir les faits pouvant mettre en cause d'autres auteurs, ont bénéficié, de la part de l'autorité étrangère, d'un traitement favorable en raison de cette collaboration (ATF 117 Ia 401 consid. 1c p. 404; arrêt 6B_360/2008 du 12 novembre 2008 consid. 3.1). La Cour européenne des droits de l'homme considère, pour sa part, que la procédure de transaction pénale (Plea Bargain), conduisant à ce qu'il soit statué sur une accusation pénale à l'issue d'un examen judiciaire simplifié, ne contrevient pas en soi à l'art. 6 CEDH (Natsvlishvili et Togonidze c. Géorgie du 29 avril 2014, § 91). Par ailleurs, l'utilisation comme moyen de preuve de déclarations émanant d'un "témoin de la couronne", auquel l'impunité a été garantie, n'est pas davantage jugée en tant que telle contraire à cette disposition (arrêt de la CommEDH Baragiola Alvaro c. Suisse du 21 octobre 1993, JAAC 106/1994 p. 731) (Arrêt du Tribunal fédéral 6B_1269/2016 du 21 août 2017, consid. 3.4).

D______ s'est présenté, spontanément, devant le Ministère public genevois avec un classeur de pièces, lesquelles ont été versées à la procédure. L'intéressé a été entendu, en présence des parties et de leurs avocats, soit de manière contradictoire, à Genève, en qualité de personne appelée à donner des renseignements, alors qu'il semble bénéficier du statut de "cooperating witness" octroyé par les autorités israéliennes.

Comme susmentionné, rien ne s'oppose, dans un procès pénal se déroulant en Suisse, à ce que l'autorité de jugement prenne en considération des dépositions émanant de "témoins de la couronne" et l'utilisation comme moyens de preuve de ces déclarations n'a pas été jugée contraire à l'art. 6 CEDH.

Par ailleurs, l'affirmation de la défense selon laquelle l'absence de mise en prévention de D______ par les autorités suisses laisse supposer que des promesses de non poursuite auraient été faites à l'intéressé par le Ministère public genevois ne repose sur aucun élément tangible. L'accusation appartient au Ministère public, qui décide, en application des règles du CPP et en fonction de considérations stratégiques, quelle personne il entend mettre en prévention.

Dans cette mesure, le témoignage devant les autorités suisses de D______ et les pièces versées par celui-ci sont exploitables.

Autre est la question de la force probante des déclarations de D______ et des pièces versées. Il appartiendra au Tribunal, dans le cadre de l'appréciation des preuves, de tenir compte de toutes les circonstances et du contexte entourant les dépositions de D______ et le dépôt des pièces, tel que soulevé par les prévenus.

Il ne se justifie, par ailleurs, pas d'annuler le mandat de comparution de D______ pour le 13 janvier 2021. Au demeurant, les prévenus n'indiquent pas ce qui justifierait l'annulation de l'audition de l'intéressé qu'ils ont eux-mêmes sollicitée dans le cadre de leurs réquisitions de preuve.

Enfin, les procès-verbaux des auditions de D______, en Israël, ont été obtenus par le Ministère public conformément aux règles de l'entraide. Il ne se justifie dès lors pas de les retirer de la procédure.

La question préjudicielle est rejetée.

e) Classement de la procédure de faux dans les titres en raison d'un empêchement de procéder, suspension de la procédure dans l'hypothèse où le Ministère public s'engagerait à poursuivre D______ ou classement de la procédure si le Ministère public refuse.

Les prévenus soutiennent qu'il existe un empêchement de procéder (art. 329 al. 2 CPP cum art. 319 al. 1 let. d CPP) s'agissant de l'infraction de faux dans les titres dans la mesure où D______ n'a pas été poursuivi par le Ministère public genevois pour les mêmes faits. Ils invoquent l'art. 32 CP.

Selon l'art. 32 CP, si un ayant droit a porté plainte contre un des participants à l'infraction, tous les participants doivent être poursuivis.

L'art. 32 CP garantit non pas l'indivisibilité de la poursuite, mais l'indivisibilité de la plainte (arrêt du Tribunal fédéral 6B_106/2015 du 10 juillet 2015, consid. 3.2.). Le but de cette disposition est d'empêcher que le lésé puisse choisir arbitrairement de faire punir un participant à l'infraction à l'exclusion d'un autre (ATF 121 IV 150 consid. 3/a/aa p. 151 s.; 97 IV 1 consid. 2 p. 2 s.; 81 IV 273 consid. 2 p. 275). Cette norme est sans portée s'agissant des infractions poursuivies d'office.

L'art. 9 CPP consacre la maxime d'accusation. Selon cette disposition, une infraction ne peut faire l'objet d'un jugement que si le ministère public a déposé auprès du tribunal compétent un acte d'accusation dirigé contre une personne déterminée sur la base de faits précisément décrits. La mise en accusation incombe au ministère public, qui l'assume seul. Elle n'est pas sujette à recours (art. 324 al. 2 CPP).

En l'occurrence, aucune procédure pénale n'a été ouverte par le Ministère public genevois à l'encontre de D______. Le précité n'a, par voie de conséquence, pas été mis en prévention et n'a donc pas bénéficié d'un classement pour les faits sur lesquels il a témoigné.

Il n'existe donc pas d'empêchement de procéder et la présente procédure n'a pas à être classée en ce qui concerne l'accusation de faux dans les titres dirigée contre les prévenus.

La question préjudicielle est rejetée.

f) Apport à la procédure de la procédure d'entraide avec Israël CP/401/2015 et de la procédure d'entraide avec les Etats-Unis B 237'192

Les prévenus sollicitent l'apport à la présente procédure de la procédure d'entraide (passive) avec Israël, référencée sous CP/401/2015, et de l'intégralité de la procédure d'entraide (active) avec les Etats-Unis, référencée par l'Office fédéral de la justice sous
B 237'192, y compris toutes les notes et état de frais du Procureur, afin d'obtenir des informations sur les voyages de Procureur ______ dans ces deux pays.

La procédure CP/401/2015 est une procédure distincte de la présente procédure nationale. Quant à la procédure d'entraide adressée par la Suisse aux Etats-Unis, elle figure déjà à la présente procédure (classeurs B.4.1.3 ainsi que B.4.7.1 à B.4.7.16). En tant que la requête des prévenus tend à la production de documents ou de notes en mains du Ministère public et qui ne figureraient pas dans ces procédures, il est renvoyé au considérant A.b.

La question préjudicielle est rejetée.

g) Inexploitabilité de toutes les auditions de Madame E______ et retrait du dossier des procès-verbaux y relatifs

g.a) En lien avec le statut de "cooperating witness" de Madame E______

Les prévenus concluent à l'inexploitabilité des auditions de Madame E______ aux Etats-Unis, effectuées dans la présente procédure les 6 et 7 juillet 2017 et dans la procédure états-unienne (classeur B4_7_14), en raison de son statut de "cooperating witness".

Madame E______ a accepté de coopérer à l'enquête américaine dans l'espoir d'obtenir une immunité de poursuite (immunity for the Cooperating Witness's own potential criminal conduct, plainte du FBI, ch. 10). Elle a signé avec le Département de justice américain un non prosecution agreement soumis à une clause de confidentialité (PP 500'694). A ce moment, elle vivait alors aux Etats-Unis et disposait de la seule nationalité guinéenne. Les biens immobiliers et le restaurant de Madame E______ ont été confisqués par la justice américaine, à l'exception de sa résidence sur ______ (cf. Consent Order of Forfeiture filed in April 2016).

Comme déjà mentionné, rien ne s'oppose, dans un procès pénal se déroulant en Suisse, à ce que l'autorité de jugement prenne en considération, pour former son opinion, des dépositions émanant de "témoins de la couronne" (appelés aussi "repentis"), à savoir d'auteurs d'infractions qui, ayant reconnu leurs crimes et s'étant engagés à collaborer avec l'autorité pour établir les faits pouvant mettre en cause d'autres auteurs, ont bénéficié, de la part de l'autorité étrangère, d'un traitement favorable en raison de cette collaboration (ATF 117 Ia 401 consid. 1c p. 404). L'utilisation comme moyens de preuve de déclarations émanant d'un « témoin de la couronne », auquel l'impunité a été garantie, n'est pas jugée contraire à l'art. 6 CEDH (arrêt de la CommEDH Baragiola Alvaro c/ Suisse du 21 octobre 1993, JAAC 106/1994 p. 731).

Ainsi, les procès-verbaux d'audition de Madame E______ sont, en tant que tels, exploitables, étant relevé que ceux-ci ont été produits à la présente procédure conformément aux règles sur l'entraide. Autre est la question de la force probante des déclarations de la précitée qui est du ressort de l'appréciation des preuves.

La question préjudicielle est rejetée.

g.b) En lien avec l'absence des avocats de la défense lors de l'audition de Madame E______ aux Etats-Unis les 6 et 7 juillet 2017

Les prévenus soutiennent que les procès-verbaux d'audition de Madame E______ par Procureur ______ aux Etats-Unis, les 6 et 7 juillet 2017, sont inexploitables, les avocats n'ayant pas pu participer à cette audition et Madame E______ ne s'étant pas présentée à l'audience de jugement pour son audition par le Tribunal.

Cette question comporte deux aspects: la conformité de l'audition visée au droit de procédure applicable (Infra g.b.a) et l'appréciation du caractère globalement équitable de la procédure malgré la présence éventuelle du procès-verbal litigieux au dossier (Infra g.b.b.).

g.b.a) Conformité au droit de procédure applicable

La participation des parties à l'administration des preuves requises à l'étranger par voie de commission rogatoire fait l'objet d'une disposition spécifique à l'art. 148 CPP.

Le Code de procédure pénale suisse ne règle l'octroi de l'entraide judiciaire internationale et la procédure d'entraide que dans la mesure où d'autres lois fédérales ou des accords internationaux ne contiennent pas de disposition en la matière (art. 54 CPP).

En l'occurrence, la Suisse a conclu un accord avec les Etats-Unis d'Amérique, soit le Traité entre la Confédération suisse et les Etats-Unis d'Amérique sur l'entraide judiciaire en matière pénale (TEJUS; RS 0.351.933.6), dès lors seul applicable.

L'art. 12 al. 2 TEJUS subordonne le droit de prendre part à l'administration des preuves requises à l'étranger à la demande expresse de l'Etat requérant.

La question est celle de savoir si la faculté de l'Etat requérant, en l'occurrence le Ministère public genevois, de donner suite à une demande de participation à l'administration des preuves et de saisir l'Etat requis d'une telle requête est purement discrétionnaire.

Dans un arrêt ATF 118 Ib 436, rendu par le Tribunal fédéral dans le cadre d'une demande d'entraide provenant des Etats-Unis vers la Suisse, notre Haute Cour a retenu que la requête de l'Etat requérant était discrétionnaire et aucun grief ne pouvait être fondé sur le refus de l'Etat requérant de formuler une telle demande.

Selon ZIMMERMAN (ZIMMERMANN, La coopération judiciaire internationale en matière pénale, 5e édition, Berne 2019, page 524 N 485), le droit de participer à l'exécution de la demande peut être restreint. Sous l'angle de l'art. 12 par. 2 TEJUS, il est limité au cas où l'Etat requérant autorise la présence de l'inculpé ou de l'accusé, de son conseil ou des deux (Robert ZIMMERMANN, idem).

Dans un arrêt plus récent 6B_947/2015 du 29 juin 2017 consid. 5.3.2., le Tribunal fédéral a retenu, alors qu'aucun accord n'avait été conclu avec l'Etat requis, soit le Guatemala, qu'une interprétation conforme à l'art. 6 § 3 let. d CEDH n'exigerait pas non plus nécessairement que le procès-verbal de commission rogatoire soit exclu au motif que le droit de l'Etat étranger permettait la confrontation au stade de la commission rogatoire, mais que celle-ci n'a pas eu lieu.

Par ailleurs, la loi suisse (art. 148 CPP) n'octroie aucun droit aux parties d'assister à l'administration des preuves à l'étranger (SCHMID/JOSITSCH, Schweizerische Strafprozessordnung/Praxiskommenar, 3ème édition, 2018, art. 148 CPP; Commentaire romand du CPP, 2e édition, Bâle 2019, MOREILLON; Petit commentaire du CPP, 2e édition, Bâle 2016).

En l'espèce, le Ministère public a renoncé à déposer une telle demande. Cette demande étant purement discrétionnaire, aucun grief ne peut être fondé sur le refus du Ministère public de formuler cette demande.

L'audition de Madame E______ aux Etats-Unis les 6 et 7 juillet 2017 s'est donc déroulée de manière conforme au droit de procédure applicable.

Le procès-verbal n'a donc pas à être retiré du dossier.

g.b.b) Equité de la procédure dans son ensemble

Pour que la procédure reste globalement équitable, malgré la présence au dossier du procès-verbal de Madame E______, trois conditions doivent être remplies (arrêt du Tribunal fédéral 6B_947/2015 du 29 juin 2017 consid. 5.5.1).

La première condition consiste à déterminer si l'absence de Madame E______ aux débats repose sur des motifs sérieux. Le Tribunal fédéral en a déduit une obligation du Tribunal d'effectuer des démarches positives afin de convoquer les témoins. Madame E______ ayant été convoquée par la voie de l'entraide par le Tribunal de céans, son absence repose sur des motifs sérieux.

Il convient ensuite d'examiner la place des dépositions de Madame E______ parmi les autres éléments de preuves présents au dossier. En l'espèce, les déclarations de Madame E______ ne sont qu'un élément au sein d'une importante masse probatoire, de sorte qu'il ne s'agit pas d'une preuve unique. Cette condition est également respectée.

Enfin, il convient d'analyser les moyens offerts aux prévenus compensant les entraves à leurs droits de la défense. En l'espèce, le double tour de questions écrites, le fait que les prévenus ont ensuite été interrogés sur les propos tenus par Madame E______ et l'attention particulière qui sera portée à ses propos en raison de son statut de "cooperating witness" constituent des éléments compensateurs suffisants.

Au vu de ces éléments, la présence dans le dossier du procès-verbal des auditions de Madame E______ aux Etats-Unis les 6 et 7 juillet 2017 n'a pas pour effet de rendre la procédure globalement inéquitable.

Les déclarations de Madame E______ ne seront dès lors pas écartées de la procédure. Il appartiendra toutefois au Tribunal de tenir compte des éléments soulevés par la défense, soit l'absence de contradictoire, les promesses faites à l'intéressée par l'autorité étrangère, les versements d'argent effectués à celle-ci, dans le cadre de l'appréciation de ses déclarations.

h) Audition de F______. A défaut, constatation de l'inexploitabilité des procès-verbaux d'audition de F______ et retrait de ceux-ci de la procédure

Les prévenus sollicitent l'audition par le Tribunal, subsidiairement par voie de commission rogatoire, de F______. Ils soutiennent que les conditions dans lesquelles les auditions de F______, en Israël - défaut de contradictoire et heure tardive - se sont déroulées, rendent celles-ci inexploitables et requièrent leur retrait de la procédure.

F______ a été entendu les 18 et 22 août 2017 par la police israélienne (classeur B4_5_8). Les procès-verbaux en question ont été obtenus et produits à la présente procédure pénale en conformité des règles sur l'entraide en matière pénale. Monsieur C______ a été confronté par le Ministère public auxdites déclarations et a pu s'exprimer à leur propos lors de son audition du 23 mai 2019 (PP 503'104ss).

Ces procès-verbaux sont dès lors exploitables. Autre est la question de la force probante des déclarations de F______ devant la police israélienne, ce qu'il appartiendra au Tribunal d'apprécier conformément au principe de la libre appréciation des preuves.

L'audition de F______ n'apparaît dès lors pas nécessaire au prononcé du jugement au vu des éléments figurant déjà à la procédure.

La question préjudicielle est rejetée.

i) Audition de G______

Les prévenus sollicitent l'audition par le Tribunal, subsidiairement par commission rogatoire, de G______.

L'audition de l'intéressé n'apparaît pas nécessaire au prononcé du jugement eu égard aux autres éléments figurant à la procédure, notamment les contrats, les factures et les éléments de la procédure roumaine (classeur B4_8_4) versés au dossier, qu'il appartiendra au Tribunal d'apprécier librement.

La question préjudicielle est rejetée.

j) Audition de H______

Les prévenus sollicitent l'audition, par le Tribunal, subsidiairement par commission rogatoire, de H______.

L'audition de l'intéressé n'apparaît pas nécessaire au prononcé du jugement. Il appartiendra au Tribunal d'apprécier les preuves en sa possession, selon le principe de libre appréciation des preuves, outre que la structure (actionnariat) des sociétés I______ et J______ peut être établie autrement que par l'audition de cet avocat.

La question préjudicielle est rejetée.

k) Renvoi des débats vu l'absence des témoins

Vu l'absence aux débats des témoins dûment convoqués par le Tribunal, les prévenus sollicitent le renvoi des débats.

Par courrier du 28 février 2020, la direction de la procédure du Tribunal correctionnel a partiellement donné suite aux réquisitions de preuve des prévenus en indiquant que le Tribunal procéderait à l'audition de douze personnes, pour autant que celles-ci puissent être atteintes et qu'elles se déplacent à Genève pour leur audition. Les prévenus n'ont pas donné suite à l'invitation qui leur a été faite de collaborer à la localisation de ces personnes. Un mandat d'acte d'enquête a été adressé à la police genevoise dans le même sens.

Malgré les efforts déployés, il n'a pas été possible de localiser K______.

Quant aux onze autres personnes, des mandats de comparution leur ont été adressés par voie de commission rogatoire et par email, en cas d'échec de la notification par voie de commission rogatoire.

Tous les efforts raisonnables ont ainsi été déployés afin que ces personnes puissent être entendues, à Genève, par le Tribunal et il serait vain de les convoquer à nouveau. En effet, rien ne permet de penser que ces personnes donneraient suite à un nouveau mandat de comparution qui leur serait notifié. Il appartient dès lors au Tribunal de statuer sur le fond de la cause sur la base du dossier qui lui est soumis, en tenant compte, le cas échéant, dans le cadre de l'appréciation des preuves, de l'absence aux débats des personnes convoquées.

Il résulte de ce qui précède que l'incident est rejeté.

 

C. ACTE D'ACCUSATION

a) Par acte d'accusation du 8 août 2019, il est reproché à Monsieur C______, Madame B______ et Monsieur A______, d'avoir, en coactivité, promis dès 2005 et octroyé dès 2006, des avantages indus à AAO______, alors président de la République de Guinée, et Madame E______, alors sa quatrième épouse et une personne très influente de son entourage, en vue d'obtenir sans droit et au profit de CGR______ des concessions d'exploration puis d'exploitation des gisements miniers de la région de Simandou en République de Guinée, et d'avoir versé respectivement fait verser à Madame E______, en onze versements, à tout le moins USD 8.5 millions,

faits qualifiés de corruption d'agents publics étrangers, au sens de l'art. 322septies CP.

b.a) Par ce même acte d'accusation, il est reproché à Monsieur C______ et Madame B______ d'avoir, en coactivité, dès 2009, en Suisse, en Israël et ailleurs, établi ou fait établir et ce, contrairement à la réalité :

-        le 9 juin 2009, un certificat d'actions désignant D______ comme actionnaire de L______,

-        un contrat du 15 juin 2009, intitulé Sale and Purchase Agreement ainsi qu'un amendement à ce contrat d'août 2010,

-        un contrat de location du bateau le M______ du 1er au 15 juillet 2011,

-        un addendum à la location de ce yacht du 29 juin 2011,

et d'avoir fait remettre ces documents par D______ à ses banquiers, en Suisse, qui lui réclamaient des explications, la fabrication et l'utilisation de ces documents ayant eu pour objectif de cacher aux banques et aux autorités que Monsieur C______ finançait et ordonnait tous ces paiements passant par les comptes suisses de D______, au nombre desquels le versement de pots-de-vin à Madame E______;

faits qualifiés de faux dans les titres, au sens de l'art. 251 CP.

b.b) Par le même acte d'accusation, il est reproché à Monsieur C______ et Monsieur A______ d'avoir, en coactivité, dès 2011, en Suisse, en Israël et ailleurs, établi ou fait établir une facture de N______. à O______ GLOBAL LTD (ci-après O______), du 13 juin 2011, cette facture étant contraire à la réalité;

et d'avoir fait remettre ces documents par D______ à ses banquiers, en Suisse, qui lui réclamaient des explications, la fabrication et l'utilisation de ces documents ayant eu pour objectif de cacher aux banques et aux autorités que c'était en réalité Monsieur C______ qui finançait et ordonnait tous ces paiements passant par les comptes suisses de D______, au nombre desquels le versement de pots-de-vin à Madame E______;

faits qualifiés de faux dans les titres, au sens de l'art. 251 CP.

b.c) Par ce même acte d'accusation, il est reproché à Monsieur C______ d'avoir, dès 2010, en Suisse, en Israël et ailleurs, établi ou fait établir et ce, contrairement à la réalité:

-        un contrat de prêt du 11 juin 2010 entre O______ et P______,

-        un contrat de prestations de services du 1er mars 2011 entre Q______ INC. et O______,

-        une facture du 5 avril 2011de Q______,

-        un contrat du 1er mars 2011 entre T______ et O______,

-        une facture du 5 avril 2011 de T______ à O______,

-        un contrat du 1er juin 2011 entre Q______ et O______,

-        un contrat entre Q______ et O______,

-        une facture du 14 septembre 2011de Q______ à O______,

-        un contrat de conseil entre R______ et O______,

-        un contrat du 3 janvier 2011 entre S______ SARL et O______ et une facture du 15 octobre 2011 de S______ à O______,

-        un contrat du 1er janvier 2012 entre T______ et O______,

-        une offre de service de U______ et une facture du 12 décembre 2012 de U______ à O______,

et d'avoir fait remettre ces documents par D______ à ses banquiers, en Suisse, qui lui réclamaient des explications, la fabrication et l'utilisation de ces documents ayant eu pour objectif de cacher aux banques et aux autorités que c'était en réalité Monsieur C______ qui finançait et ordonnait tous ces paiements passant par les comptes suisses de D______, au nombre desquels le versement de pots-de-vin à Madame E______,

faits qualifiés de faux dans les titres au sens de l'art. 251 CP.


 

D. EN FAIT

D.A. Faits qualifiés de corruption

a)

* MADAME B______

-        Secrétaire du conseil de fondation de V______ (membre du conseil de fondation durant un an via X______)

-        Administratrice de

o    W______, via X______

o    CGR______ (Guernesey)

o    CGR______ STEEL

o    CGR______ GUINEE (BVI)

** Monsieur C______

-        Premier bénéficiaire de V______

-        Contrats de conseil avec

o    V______ (USD 250'000.- à 400'000.-/an)

o    CGR______ (Guernesey) (USD 700'0000.-/an)

*** Me GAMMA______

-        Avocat de Monsieur C______

-        Membre du conseil de fondation de V______

-        Administrateur de W______

a.a) Monsieur C______

a.a.a) CG______

Monsieur C______ était considéré, en 2013, comme l'homme le plus riche d'Israël, sa fortune étant alors estimée à plusieurs milliards de dollars américains. Il a construit sa fortune dans l'industrie du diamant. Il est présenté par ses sociétés vis-à-vis des tiers comme étant à la tête de CG______, pour C______ Group, un conglomérat de sociétés, l'activité de CG______ se concentrant dans quatre secteurs:

-        les diamants (C______ DIAMOND GROUP dont Monsieur C______ était le Président du Conseil d'administration en 2005),

-        les ressources naturelles (CG______ RESOURCES) (soit CGR______),

-        les investissements immobiliers (Y______ renommée CGR______ REAL ESTATE LTD),

-        la technologie, la finance et la gestion d'avoirs,

(cf. présentation de CG______ INVESTMENTS de mai 2005, PP 5'000'092; voir également présentation de CGR______ de juillet 2007, PP 5'002'012).

a.a.b) Fondation V______

Monsieur C______ est le premier bénéficiaire de tous les avoirs et revenus de la fondation irrévocable et discrétionnaire de droit liechtensteinois V______ (cf. statuts - annexes aux statuts de la fondation, cl. B.2.1.5).

Me GAMMA est, depuis sa constitution en 1997, un des trois membres du conseil de fondation de V______ et le représentant de l'actionnaire de CGR______ au sein du conseil de fondation, en sa qualité d'administrateur de W______. Le deuxième membre du conseil de fondation est un avocat liechtensteinois. Le troisième membre était Z______ puis, durant quelques mois, entre 2004 et 2005, X______ MANAGEMENT CORP - dont l'administratrice était Madame B______ -, avant d'être remplacée par AA______ (cl. B.2.1.13-14).

Le but de la fondation est le suivant:

"The foundation shall hold and manage the Foundation Fund for the benefit of the members of the Class of Beneficiaries as specified in the By-Laws, inter-alia, for their livelihood, health, accommodation, education and other needs as shall be from time to time and subject always to the discretion of the Foundation Council and the provisions of these Statutes" (cf. statuts au 15 juin 2009, PP 306'796).

Conformément à son but, la fondation a, notamment, distribué à Monsieur C______ les sommes suivantes à titre de frais de logement et d'entretien (housing costs and living expenses):

-        Février 2010 USD 3 millions (PP 310'208),

-        Mai 2010 USD 3 millions (PP 306'494),

-        Août 2010 USD 2 millions (PP 306'484),

-        Septembre 2010 USD 1 million (PP 306'480),

-        Octobre 2010 USD 1 million (PP 306'478),

-        Novembre 2010 USD 2 millions (PP 306'760),

-        Décembre 2010 USD 300'000.- (PP 306'758),

Total 2010 USD 12.3 millions

-        Février 2011 USD 2 millions (PP 306'753),

-        Mars 2011 USD 6 millions (PP 306'703),

-        Mai 2011 USD 2 millions (PP 306'742),

-        Juillet 2011 USD 2 million (PP 306'738-9).

-        Juillet 2011 USD 300'000.- (PP 306'737).

-        Juillet 2011 USD 2 millions (PP 306'735).

-        Septembre 2011 USD 1 million (PP 306'733).

-        Novembre 2011 USD 15 millions (PP 306'729).

Total 2011 USD 30.3 millions

-        Février 2012 USD 500'000.- (PP 306'714)

-        Avril 2012 USD 2 millions (PP 306'710)

-        Mai 2012 USD 5 millions (PP 306'699)

-        Décembre 2012 USD 1 million (PP 306'707)

Total 2012 USD 8.5 millions

a.a.b) AB______

Monsieur C______ est le seul actionnaire de AB______ REAL ESTATE (ci-après AB______), une société israélienne, qui investit dans l'immobilier dans les pays d'Europe de l'est. AB______ n'a aucun lien avec la fondation V______ si ce n'est son actionnaire, respectivement premier bénéficiaire.

En 2005, V______ a octroyé à un prêt de USD 25 millions à AB______ (PP 313'355).

En 2009, AB______ a connu des problèmes de liquidités et un défaut de paiement des créanciers aurait pu causer un sérieux dommage réputationnel à Monsieur C______, en Israël et à l'étranger (PP 306'508).

Monsieur C______ a, dès lors, personnellement demandé un soutien financier à la fondation V______ (cf. réunion du conseil de fondation du 15 septembre 2009, PP 306'508). Me GAMMA a informé Monsieur C______ que des distributions de fonds à des tiers n'entraient pas "strictement" dans le but de la fondation, mais, compte tenu du dommage réputationnel mis en avant, la fondation pouvait entrer en matière.

Une semaine après (cf. réunion du conseil de fondation du 21 septembre 2009, PP 306'506), AC______ a proposé que I______, détenue par V______, nantisse (pledge) ses biens en faveur d'une banque israélienne, ce qui permettait à celle-ci d'apporter le soutien financier dont AB______ avait besoin. Me GAMMA a rappelé le but de la fondation, tel que susmentionné. Il a insisté sur le fait que le but de la fondation n'était pas de nantir ses biens en faveur de tiers, qui ne faisaient pas partie des bénéficiaires. Toutefois, AB______ étant personnellement détenue par Monsieur C______, cela pouvait être considéré comme un soutien indirect personnel au précité et, dans la mesure où le nantissement était requis pour un durée limitée, celui-ci ne pouvait pas être considéré comme une distribution à Monsieur C______.

Madame B______ a pris le procès-verbal de ces deux réunions du Conseil de fondation (PP 306'506 et 306'508).

En 2010, 2011 et 2012, malgré les rappels de Me GAMMA en lien avec le but de la fondation, V______ a distribué les fonds suivants à Monsieur C______ afin que ceux-ci soient spécifiquement et directement injectés dans la société AB______:

-        USD 94 millions en novembre 2010 (PP 306'477),

-        USD 20 millions en mars 2011 (PP 306'747, 306'748),

-        USD 6 millions en novembre 2011 sur demande de AC______ (PP 306'751, 306'703),

-        USD 15 millions en juin 2012 sur demande de AC______ (PP 306'690, 306'692).

a.a.c) Contrat de mandat

Monsieur C______ n'exerce, officiellement, aucune fonction dirigeante ou administrative dans aucune des sociétés détenues, directement ou indirectement, par la fondation V______. Il se prévaut de dispenser des conseils aux sociétés du groupe CG______ et également d'assumer, dans certaines circonstances, le rôle "d'ambassadeur" du groupe vis-à-vis de tiers.

Entre les 1er janvier 1998 et 31 décembre 2011, Monsieur C______ était lié par un contrat de mandat avec la fondation V______, rémunéré USD 250'000.- puis USD 400'000.- par an (USD 350'000.- en 2010 et USD 400'000.- en 2011).

a.a.d) Adresses email

Monsieur C______ disposait de plusieurs adresses emails, dont notamment:

-        c______@c______g-investments.com(PP5'010'988, 5'010'816),

-        c______@ad______-suisse.com (PP 5'010'990),

-        advisor@ad______fa.com (PP 500'677).

a.a.e) W______

La fondation V______ prend toutes les décisions stratégiques du groupe et est l'unique actionnaire de la holding W______ MANAGEMENT CORP (ci-après: W______) (PP 3'951'024).

W______ est une société des Iles Vierges Britanniques créée le 4 novembre 1998 et avait pour adresse postale AD______ FINANCIAL ADVISORS SA, à Genève (PP 360'252), dont elle approuvait les comptes (cf. perquisition AD______). Me GAMMA était l'unique administrateur de W______, depuis 2001 (PP 3'951'024), avant que X______, dont l'administratrice était Madame B______, ne soit également désignée (cl. B.2.1.7). Madame B______ disposait de la signature individuelle sur les comptes de W______ dès 2002 (PP 360'252, Banque 2______).

Monsieur C______ est considéré vis-à-vis des banques comme l'ayant-droit économique de W______ (PP 360'129, 360'132, 360'241, 360'248, banque 2______.

Il s'est également personnellement porté garant, à concurrence de USD 30 millions, d'un prêt de ZAR 222'000'000.- (équivalent de CHF 150 millions) octroyé à W______ par la banque 2______ (cf. PP 360'290 et 03/1744.offer letter dans clé USB B0_10 dans classeur B0_10).

W______ détient une multitude de sociétés constituées toutes aux Iles Vierges Britanniques, à l'exception de CG______ INVESTMENTS LTD constituée aux Bahamas:

-        CG______ INVESTMENTS LTD constituée en 2003 et radiée en 2009

-        CG______ STEEL HOLDINGS LTD constituée en 2004

-        CG______ RESOURCES LTD constituée en 2003

-        CG______ ENERGY LTD constituée en 2005

-        CG______ RACING LTD constituée en en 2005

-        CGR______ TREASURY SERVICES LTD constituée en en 2005

-        CGR______ METAL AND MININGS LTD constituée en 2003

-        CGR______ (LIBERIA) LTD constituée en 2007.

-        CG______ RESOURCES (LIBERIA) LTD (PP 3'002'108)

-        CGR______ DIAMOND EXPLORATION LTD constituée en 2012

-        CGR______ PETROLEUM HOLDINGS LTD constituée en 2005

-        CGR______ GOLD BVBA SA constituée en 2002

-        AE______ constituée en 2004 et radiée en 2014.

Toutes les sociétés susmentionnées ont leur adresse postale chez AD______ FINANCIAL ADVISORS SA, à Genève. Depuis la création de AF______ ADVISORY SA en 2014, domiciliée alors à la même adresse genevoise que AD______ FINANCIAL ADVISORS SA, W______ et toutes ces sociétés ont eu leur adresse postale chez AF______ ADVISORY SA.

a.a.f) Avions et bateau

La fondation est, également, propriétaire, via trois sociétés des Iles Cayman (PP 306'587 et cf. schéma IV) de:

-        un avion acheté USD 24.5 millions et détenu par AG______,

-        un autre avion acheté USD 32.2 millions et détenu par AH______,

-        un yacht acheté USD 25.7 millions et détenu par AI______.

Monsieur C______ utilise régulièrement ces avions et bateau à des fins privées et professionnelles. Il s'est occupé personnellement du projet d'achat du yacht, F______ étant responsable des aspects légaux (cf. classeur B_2_1_20).

a.b) CG______ RESOURCES LTD (ci-après CGR______ GUERNESEY) (anciennement RESOURCES ADVISORY SERVICES LTD) est une société constituée, en 2003, à Jersey puis déplacée, en 2007, à Guernesey (PP 5'010'216). Cette société est active dans le domaine des ressources naturelles (cuivre, cobalt, pétrole, gaz, diamant, etc.) au travers de diverses filiales (cf. PP 3'951'075).

CG______ GUERNESEY est détenue par W______ (cf. PP 3'951'023 pour l'évolution de l'actionnariat). AC______, Madame B______ (dès 2003) puis AJ______ (depuis 2007) étaient administrateurs de CGR______ GUERNESEY (PP 3'951'020).

CGR______ GUERNESEY est financée par des prêts actionnaire (cf. états financiers au 31.12.2009, PP 3'951'064), principalement via CGR______ TREASURY SERVICES LTD. Le prêt octroyé par W______, en 2007, s'élevait à USD 322 millions en 2009 (cl. B.2.1.11). Dans le cadre de la présente procédure (PV, PP 500'351), Monsieur C______ a déclaré que W______ finançait CGR______ GUERNESEY à la demande.

Conformément au droit de Guernesey, les administrateurs de CGR______ GUERNESEY sont responsables de l'établissement des états financiers de la société (cf. PP 3'951'049) et approuvent les comptes (cf. PP 3'951'048). Madame B______ signait les états financiers de la société en sa qualité d'administratrice (i.e. PP 3'051'045, 3'951'048). Toute la correspondance bancaire était envoyée, en copie, à Madame B______, chez AD______ FINANCIAL ADVISORS SA, la précitée étant au demeurant signataire autorisée sur certains comptes bancaires.

Monsieur C______ était lié par un contrat de mandat à CGR______ GUERNESEY, signé par Madame B______ et AJ______. Il était rémunéré USD 700'000.- par an (PP 300'750).

a.c) CG______ RESOURCES (GUINEA) LTD (ci-après CGR______ GUINEE) est une société des Iles Vierges Britanniques, créée en 2005 (PP 5'002'080-1). Elle était détenue par CG______ STEEL (PP 350'831), elle-même détenue par CGR______ GUERNESEY. CGR______ GUINEE est liée par un contrat de service à CGR______ GUERNESEY (cf. états financiers au 31.12.2009, PP 3'951'064; PP 5'002'101).

a.d) CG______ RESOURCES (GUINEA) LTD - SARL est une société à responsabilité limitée de droit guinéen (cf. statuts: PP 5'002'084), détenue par CGR______ GUINEA jusqu'à la restructuration des sociétés en février 2009 (cf. consid. "restructuration"). Les documents sociaux de cette société étaient conservés chez AD______ GE.

Madame B______, en sa qualité d'administratrice de CGR______ GUINEE, approuvait les comptes de CGR______ GUINEE SARL (cl. B.2.1.6), alors que les auditeurs ont relevé que les documents fournis ne permettaient pas de vérifier l'adéquation des dépenses (cf. comptes au 31.12.2008, cl. B.2.1.6).

a.e)

* MADAME B______ = administratrice

** MADAME B______ = secrétaire du conseil de fondation

*** MADAME B______ = employée et directrice

AD______ FINANCIAL ADVISORS LTD (ci-après AD______ BVI) est une société des Iles Vierges Britanniques, créée le 4 novembre 1998. Entre 1998 et 2003, elle était détenue par AK______ et AL______ (cf. formulaire A, PP 350'028), tous deux employés du CG______ puis, en 2003, par AM______, beau-frère de Monsieur C______ (cf. formulaire A, PP 350'052). Entre 2004 et 2010, AD______ BVI était détenue par AN______. - dont AC______ était l'actionnaire unique - avant que AC______ ne devienne actionnaire unique, en personne, le 1er janvier 2011 de AD______ BVI (PP 350'1115). Dès sa constitution, Madame B______ était administratrice de AD______ BVI (PP 350'061).

Le jour de la constitution de AD______ BVI, la fondation V______, soit pour elle Me GAMMA, a signé un contrat de mandat avec AD______ BVI, soit pour elle Madame B______ (contrats du 04.11.1998, PP 306'905 et cl. B.2.1.14). Par ce contrat, AD______ BVI s'engageait à fournir tous les services administratifs, dont les sociétés détenues par la fondation avaient besoin. La fondation s'engageait à rembourser les frais de AD______ BVI, plus 10 % (cost plus ten basis). Le budget de AD______ était approuvé par le conseil de fondation (i.e. procès-verbaux du conseil de fondation de V______, cl. B.2.1.4).

AD______ BVI était gérée par Madame B______ depuis les locaux genevois de AD______ FINANCIAL ADVISORS SA où elle travaillait (cf. notamment PP 349'099). Dès la création de AF______, AD______ FINANCIAL ADVISORS LTD et AN______ ont été domiciliées chez AF______, qui a la même adresse genevoise que AD______ FINANCIAL ADVISORS SA.

a.f) AD______ FINANCIAL ADVISORS SA (actuellement en liquidation) (ci-après AD______ GE) est une société de droit suisse constituée en 1999 et domiciliée à Genève. Elle est détenue par AD______ BVI. AO______ (CFO de CGR______ DIAMOND HOLDINGS LTD, qui détient AP______) était administrateur jusqu'en 2014. Madame B______ a été engagée par AD______ GE dès sa constitution et travaillait dans les locaux genevois de AD______. Elle a été désignée directrice en février 2008, administratrice en mars 2009, et administratrice-présidente en mai 2014, fonction qu'elle quittera en mars 2016. Elle était également administratrice-présidente de AF______ ADVISORY SA dès sa création jusqu'à février 2017, à l'exception d'un an, en 2015, où elle a été remplacée par son mari, AQ______.

AD______ GE s'occupe du corporate back office des sociétés détenues in fine par la fondation V______ et s'occupait, jusqu'en 2007, de la comptabilité des sociétés qu'elle hébergeait (PP 5'010'216; AC______ CIRDI, audition 23.05.2017, p. 88; PV AC______, PP 502'160; PV MADAME B______, 500'541; PV MADAME B______, PP 500'072).

a.g) CG______ MANAGEMENT SERVICES LTD a été renommée AD______ FINANCIAL ADVISORS (UK) LTD le 7 mars 2011 (PV LCIA, AC______). AC______ est le CEO et l'administrateur de CG______MS, société détenue par AD______ BVI. Il gérait cette société depuis Londres. AC______ est également le CEO de CG______ CAPITAL MARCETS PCC LTD, société sise à Guernesey et détenue par la fondation AR______, et non par la fondation V______ (PP 3'950'539).

a.h) Madame B______ est une proche de la famille de Monsieur C______ pour laquelle elle travaille depuis ses 19 ans, soit dès 1989, originellement à Anvers, pour le compte de R. C______ & SONS.

Elle a rejoint CG______ en 1994 puis elle est allée travailler pour AD______ BVI et AD______ GE, dans les locaux genevois, dès 1999.

Au début de son activité, à Genève, son salaire mensuel brut s'élevait à CHF 8'000.- pour atteindre CHF 19'000.- à son départ en 2016, outre des bonus représentant un à trois mois de salaire (cf. audience de jugement).

Madame B______ était, lors de l'ouverture de la présente procédure en 2013, secrétaire du Conseil des fondations V______ et AR______ et assistait aux séances des Conseils de fondation à ce titre (classeurs issus de la perquisition AD______, not. B.2.1.4; PV MADAME B______, PP 500'072, 500'298). Elle conservait dans les bureaux de AD______, à Genève, tous les documents corporatifs en lien avec les fondations V______ et AR______ et avec toutes les sociétés détenues par les fondations.

En 2013, elle était administratrice, notamment, de:

-        AD______ FINANCIAL ADVISORS LTD

-        AD______ FINANCIAL ADVISORS SA

-        AF______ ADVISORY SA

-        AS______ ENGINEERING NV

-        CG______ STEEL HOLDINGS LTD

-        CG______ RESOURCES LTD (Guernsey)

-        CG______ CAPITAL MARCETS PCC LTD (PP 3'950'474)

-        AT______, la société propriétaire du yacht le M______.

-        X______ MANAGEMENET CORP (ci-après X______) (détenue pas AD______ BVI), administratrice de :

o   CGR______ TREASURY SERVICES LTD

o   CG______ RESOURCES (GUINEA) LTD - BVI

o   CG______ RESOURCES (LIBERIA) LTD

o   AU______

o   AV______

o   AW______ (PP 500'631)

o   ainsi qu'une dizaine d'autres sociétés.

Son rôle dans les conseils d'administration était d'assurer les intérêts des bénéficiaires des fondations et s'assurer que les décisions prises restaient dans les limites imposées par le conseil de fondation (PV MADAME B______, PP 500'298).

En sa qualité d'administratrice, Madame B______ recevait les états financiers annuels pour approbation, soit les bilans et comptes d'exploitation (PV, PP 500'547).

Tous les contrats ou documents signés par CGR______ étaient conservés en original par Madame B______ dans les locaux de AD______ GE (cf. perquisition AD______, classeurs B.2.1.1 à B.2.1.28; PV, PP 500'627, 500'630).

Dans son travail quotidien, Madame B______ était décrite comme étant totalement indépendante (WS LCIA AC______, PV 24.06.15, p. 4, no 12; PV AC______, PP 502'159 et 502'168: CIRDI AC______, p. 88).

c) AC______ a été engagé après plusieurs discussions avec Monsieur C______, par CG______ MANAGEMENT SERVICES LTD.

Il est également l'ayant-droit économique de AN______., le CEO et le CIO de CG______ CAPITAL MARCETS PCC LTD. Il était administrateur de CGR______ GUERNESEY. Il a indiqué avoir une relation étroite avec Monsieur C______ pour que les choses fonctionnent (AC______ CIRDI, audition 23.05.2017, p. 97; PV AC______, PP 502'156ss).

a.i) Me GAMMA______, Madame B______ et AC______ ont été invités au mariage de la fille de Monsieur C______, lequel a eu lieu le 17 septembre 2009 en Israël (PP 5'011'001).

a.j) AX______ a rejoint CGR______, en septembre 2003, en qualité d'auditeur interne et de comptable, employé par AY______, avant de devenir le CFO de CGR______ (PP 315'945). En septembre 2008, il a changé de statut pour devenir strategic financial specialist de CGR______ en qualité de mandataire, via sa société AZ______ (PP 5'006'192, 5'000'119, 500'139). Il a alors déménagé d'Afrique du Sud en Israël (PP 5'006'192; PV AAA______, PP 502'229).

Il a été désigné auditeur interne du groupe CG______ par la fondation V______ en juin 2009 (cl. B.2.1.4).

a.k) Monsieur A______ est un homme d'affaires français actif en Afrique. Ses partenaires en affaires sont AAB______, franco-israélien domicilié au Sud de la France, et AAE______, israélien domicilié en Afrique du Sud.

Les précités étaient actifs, en Afrique, dans l'import-export de marchandises, principalement de médicaments, au travers des sociétés AAC______, AAD______ ou ABJ______ (PP 358'471). En 2005, ils ne disposaient d'aucune connaissance en matière minière (i.e. PP 349'759, 3'002'054, AAA______, PP 502'221). Selon AAA______, Monsieur A______ n'était pas capable de lire une carte géologique (AAA______, PP 502'224).

b.a) Guinée

Durant le premier semestre de 2005, AAG______, CEO de CGR______ GUERNESEY, a rencontré AAB______ - leurs pères étant amis de longue date (PP 300'600) et AAD______ étant domiciliée dans le même immeuble que CGR______, en Afrique du Sud - et ses partenaires AAE______ et Monsieur A______.

Ils ont évoqué les possibilités d'investissement dans les ressources naturelles de Guinée, en particulier son potentiel minier, Monsieur A______ ayant eu connaissance des richesses minières de la Guinée par AAF______, un homme d'affaires malien (PV audience 13 janvier 2021) et en ayant parlé à ses associés.

En 2005, CGR______ ne disposait d'aucune implémentation en Guinée et n'avait aucune expérience préalable dans l'exploitation de gisements de fer.

A cette époque, la Guinée était classée 160ème sur 163 dans l'index de perception de la corruption établi par l'organisation Transparency International (Année 2006, Corruption Perceptions Index, Transparency International).

Le 21 juin 2005, AAG______ s'est adressé au premier Ministre AAH______ pour lui présenter CGR______ GUERNESEY (pièce 2 chargé de pièces de Madame B______ du 11 janvier 2021). Il était indiqué que CGR______ GUERNESEY s'intéressait "tout particulièrement aux gisements de minerai de fer du Mont Nimba et du Mont Simandou, aux gisements de bauxite de Dabola Tougué et aux infrastructures associées". Madame B______ a reçu cette lettre par courriel de AAG______ du 21 juin 2005, l'a mise en page avec l'en-tête de CGR______ et l'a renvoyée à AAG______ pour signature.

Le 8 juillet 2005, le Ministre des mines et de la Géologie AAI______ a répondu - en français - à AAG______ et lui a indiqué qu'il recevrait, à Conakry, une équipe de dirigeants de CGR______ la semaine du 18 juillet 2005. Madame B______ a traduit ces courriers (pièce 2 chargé de pièces de Madame B______ du 11 janvier 2021).

Dans une lettre d'intention du 14 juillet 2005 adressée à Monsieur A______, CGR______ GUERNESEY, soit pour elle AAG______, a manifesté l'intérêt particulier de la société dans l'exploitation du fer de Simandou et du Mont Nimba, ainsi que de toute autre réserve similaire en Guinée (PP 349114).

Le 15 juillet 2005, trois projets de contrats entre CGR______ GUERNESEY et la République de Guinée ont été préparés par CGR______ (pièce 2 chargé de pièces de Madame B______ du 11 janvier 2021).

Le premier contrat concernait le fer du Simandou et du Mont Nimba et était intitulé "Guinea ferrous project".

Le deuxième contrat concernait les ressources en minerai de bauxite le long des voies ferrées de la région de Dabola et de Tougue de la République de Guinée.

Le troisième contrat concernait les ressources en diamants de la République de Guinée.

Ces contrats étaient rédigés en anglais et ont été envoyés à Madame B______ afin qu'elle les fasse traduire en français.

Le 20 juillet 2005, Monsieur A______ a organisé et a participé à une rencontre entre AAG______ et le Ministre des mines et de la Géologie, AAI______ (PP 349'339; sentence arbitrale PP 3'002'111).

AAF______ connaissait AAJ______ - la première épouse de AAO______ car il travaillait pour sa fondation et distribuait des produits pharmaceutiques au travers de la Pharmacie centrale de Guinée. AAF______ et Monsieur A______ ont contacté AAJ______ et lui ont demandé s'il était possible de rencontrer le Président pour le compte d'un grand groupe minier (PV d'audition du 13 janvier 2021, page 4). Ces démarches ont échoué.

A la suite de ces visites, par courrier du 2 août 2005, AAG______ a réitéré auprès de AAI______ l'intérêt de CGR______ GUERNESEY d'investir dans l'exploitation des réserves naturelles de Guinée, en particulier le fer de Simandou. Il a sollicité son accord pour l'envoi d'ingénieurs de la société AS______ B.V., société d'ingénierie du groupe CG______ (PP 349'339). Aucune suite n'a été donnée à ce courrier ni à ses relances (PP 350'398).

Le courrier du 2 août 2005 indiquait que la gestion administrative de CGR______ GUERNESEY était à Genève: "administrative head office, Port Franc, 1211 Genève 5, Switzerland, téléphone 022 788 14 60" (PP 349'339). Il s'agit de l'adresse de AD______ BVI et du numéro de téléphone de Madame B______ au sein de AD______ GE et AD______ BVI (PP 349'099 et 349'339).

Le 29 septembre 2005, AAG______ a pris une participation dans CGR______ GUERNESEY par le biais de AAK______ (PP 350'318, 3'951'023).

Dans un échange de courriels des 10 et 11 octobre 2005 (PP 349080 - 349082) :

-        Monsieur A______ a demandé à AAG______ si le projet du fer était valide uniquement si CGR______ obtenait les zones de AAL______, ce à quoi AAG______ a répondu "YES";

-        Il a émis l'idée d'un projet commun incluant le Mali et la Guinée et AAG______ a répondu que les projets guinéens étaient beaucoup plus grands et attractifs ("The projects in Guinea are much bigger and sexier");

-        AAG______ a, ensuite, affirmé que CGR______ ne visait que les réserves de fer de Simandou et qu'en cas de réussite, le projet se suffisait à lui-même ("We are after Simandu Iron Ore deposit. It is very simple, either we can get it or not, if we can it's a stand alone business") (PP 349082).

-        AAG______ a, enfin, rappelé à Monsieur A______ que les réserves de fer de Simandou était leur cible et que les autres projets n'étaient pas aussi excitants ("Remember, this is our target all the rest is not so excited !").

En novembre 2005, AAG______ et AAA______ se sont rendus en Guinée, durant cinq jours. Ils ont rencontré Monsieur A______ et K______ (cf. infra). AAA______ a passé du temps au Centre de promotion et de Développement Miniers (ci-après: CPDM). Durant ses discussions avec le CPDM, AAA______ a compris que les zones Nord et Sud de Simandou étaient libres de tout droit minier et que AAL______ détenait des droits sur les blocs 1 à 4 de Simandou (PP 3'002'055).

Le 24 novembre 2005, AAG______ a fait parvenir un protocole d'accord de partenariat entre CGR______ GUERNESEY et l'Etat Guinéen en vue de promouvoir et développer les gisements de fer de Simandou (PP 5'010'647). Il s'agissait d'un "deuxième projet, pour discussion seulement". Le protocole faisait référence à une annexe, qui mentionnait la zone minière visée, cette annexe n'était toutefois pas jointe au protocole. Aucune suite n'a été donnée à cette proposition.

Interrogé sur le courrier accompagnant le protocole d'accord du 24 novembre 2005 (PP 500'236), le ministre AAI______ a expliqué que cette lettre était totalement irrecevable, car la concession d'exploration et d'exploitation du Simandou accordée à AAL______ avait été préparée par ses soins et signée par le Président le 30 mars 2006.

Dans une note interne non datée, le CPDM a résumé les propositions de CGR______ (PP 5'012'753). Il en ressort notamment que CGR______ "souhaite établir l'Etude de faisabilité de tout le Simandou sur financement au moyen de prêt additionnel et faire la promotion du gisement auprès de grands groupes miniers".

Monsieur A______ s'est dès lors tourné vers un homme d'affaires malien, AAF______, qui l'a introduit auprès d'un homme d'affaire guinéen, AAM______ (PP 5'010'658). Grâce à ceux-ci, Monsieur A______ a été introduit auprès du ministre AAN______, qui les a présentés à K______, journaliste, et à la demi-soeur de celui-ci, Madame E______ (PP 500'101, PP 5'010'658), quatrième épouse de AAO______ (cf. consid. o).

Après des mois de réseautage en Guinée, Monsieur A______ a compris que la seule et unique personne qui comptait dans ce pays était le Président AAO______ (PP 5'010'587). Il voyait également les blocs Nord et Sud de Simandou comme un point d'entrée en Guinée (PP 5'010'588).

b.b) Le 1er décembre 2005, Monsieur A______ et AAG______ ont pu rencontrer le Président AAO______.

La sentence LCIA retient que Madame E______ était présente (sentence LCIA, PP 3'002'055, 3'002'168).

Le rapport établi par Veracity mentionne la présence du Président, de Monsieur A______ et de K______ (PP 5'010'588).

Madame E______ a déclaré qu'au moment de cette réunion, Monsieur A______ "voulait le nord et le sud" (PP 500'697). À ce moment, elle n'avait pas encore dit au Président que CGR______ lui avait promis beaucoup d'argent si elle les aidait (PP 500'697). Elle était restée silencieuse pendant la réunion car elle avait déjà fait son travail, à savoir présenter CGR______ au Président et le persuader (PP 500'697). Pour persuader le Président, Madame E______ lui avait dit que CGR______ allait se montrer généreuse avec elle. Par la suite, elle avait montré les contrats au Président et il avait su combien lui était promis (PP 500'697). Après la réunion, Madame E______ avait suivi Monsieur A______ et K______ dans le bureau du ministre AAI______, qui leur avait indiqué qu'il fallait faire en sorte qu'ils obtiennent Simandou Nord et Sud (PP 500'698).

b.c) Le lendemain 2 décembre 2005, une équipe composée de AAP______ (ingénieur des mines et cartographe du CPDM, chef de mission), de AAQ______ (expert géologue de CGR______) d'un interprète, d'un pilote et d'un copilote, a effectué une mission de reconnaissance du site de Simandou avec l'hélicoptère présidentiel (PP 5'010'662).

Il ressort du "rapport de mission" que CGR______ s'était adressée aux autorités guinéennes pour effectuer une "expertise rapide et systématique des richesses" des Monts Simandou. Avant de quitter Conakry, le vendredi 2 décembre 2005, à 10h00, les zones ciblées ont été répertoriées, géo-référencées et intégrées au GPS par l'équipe "afin de positionnements corrects au sol pour des prises d'échantillons pendant le trajet". Ce document indique qu'en raison des permis déjà octroyés à AAL______ sur les blocs 1 à 4, les zones visées étaient le Sud et le Nord de Simandou.

Le vol a commencé par le Sud Simandou. Le premier positionnement pour observations et prises d'échantillons a été fait dans la zone du Sud Simandou, "hors du site de AAL______" (PP 5'010'663). L'hélicoptère est ensuite reparti s'est posé une première fois à l'intérieur du bloc 4 de AAL______, ou "des prises d'échantillons à partir des roches altérées" ont été effectuées. Puis "le survol de la chaîne de Simandou sur toute sa longueur et à très faible altitude a commencé, pour une observation très franche des manifestations et gîtes ferrugineux de ladite chaîne". La curiosité de l'équipe a, ensuite, conduit à un atterrissage dans le bloc 1. Un dernier arrêt a été effectué dans la zone Nord Simandou, "où la densité et la hauteur des herbes n'ont pas permis d'observer les roches en place".

Le rapport est arrivé à la conclusion que la mission était trop courte mais qu'elle avait "permis à l'équipe de toucher du doigt les réalités du terrain de Simandou et ses environs". Le parcours de près de 150 km du Sud au Nord de la chaîne de Simandou et à très faible altitude, accompagné d'observations ponctuelles, a permis d'affirmer qu'il y avait des ressources importantes à expertiser, "pour une décision finale de mise à disposition, afin de mise en valeur".

Concernant les "Secteurs cibles (le Sud et le Nord)", le rapport est arrivé à la conclusion suivante: "les quelques échantillons prélevés çà et là ne permettent pas une décision d'investissement. Il faudra absolument établir des permis de recherches et de prospections systématiques pour prouver qu'il y a réellement des gisements enfouis qui demanderaient une mise en exploitation, même de manière souterraine, pourquoi pas ?" (PP 5'010'664).

La carte intitulée "domaine objet de visite par la société CGR______ (02/12/2005)" vise les zones Nord et Sud Simandou (PP 5'010'665).

Informé de cette mission, le ministre AAI______ a convoqué CGR______, dont les représentants sont venus accompagnés de K______ et de Madame E______, lesquels ont plaidé pour qu'il accorde à CGR______ une partie du Simandou sous concession (PP 500'236). Le ministre AAI______ leur a rappelé qu'ils ne pouvaient se rendre sur la zone de AAL______, mais les a invités à solliciter un permis de recherche pour toute zone libre de tout permis (e.g. les zones Nord et Sud) (PV 09.07.15 AAI______, p. 3).

b.d) Le 6 janvier 2006, CGR______, soit AAA______, a envoyé un courrier au Ministre des mines, AAI______, lui transmettant à nouveau le protocole d'accord du 24 novembre 2005. Le courrier visait "la promotion et le développement des gisements de minerais de fer de Simandou Nord et Sud, ainsi que les infrastructures y afférentes" (PP 5'008'387). La zone visée selon ce protocole était le Nord ainsi que le Sud Simandou (PP 5'008'392).

Entre les 8 janvier et 22 février 2006, Madame B______ a échangé de nombreux courriels avec AAG______ et AX______ notamment (pièce 4 chargé de pièces de Madame B______ du 11 janvier 2021). Madame B______ a été informée de la signature d'un protocole d'accord avec le gouvernement guinéen et du besoin urgent de disposer d'une société incorporée aux BVI ("We are trying to sign an MOU with the Guinea government for an exploration of Iron ore field in Guinea"), du fait qu'ils étaient tous en Guinée (courriel du 17 janvier) en train de finaliser un protocole d'accord avec le président guinéen ("the above fax is urgent please if you can attend ASAP it will really help. AAG______, AAA______, etc are all in Guinea now and finalising an MOU with Guinea president so receipt of the above fax is critical").

Madame B______ a, d'abord, proposé la société AAR______, avant que AX______ l'instruise d'utiliser AAS______ INVESTMENTS LTD BVI COMPANY (courriel du 16 janvier 2006) puis d'en changer le nom en CGR______ GUINEE afin que le brand name de CG______ apparaisse ("it is critical that the name CGR______ appears").

Le 15 janvier 2006, Monsieur C______ a quitté Tel Aviv et a atterri à Londres le 16 janvier 2006 (PP 300'819 et 300'823).

Le 16 janvier 2006 (départ 23h45), l'avion utilisé par Monsieur C______ a quitté Londres pour se rendre à Conakry, alors que Monsieur C______ semble être resté au Four Seasons Hotel de Londres, jusqu'au 18 janvier 2006 (PP 300'825), date à laquelle il est retourné à Tel Aviv, avec cet avion (PP 300'819 et 300'825).

Le 17 janvier 2006, une réunion a eu lieu, à Conakry, avec le gouvernement de Guinée, en présence de AAG______, Monsieur A______ et AAB______ pour discuter d'un protocole d'accord avec la Guinée sur l'exploitation des blocs 1 et 2 de Simandou (PP 300'819, 300'823, 3'002'056). Plus tard, le même jour, AAG______, Monsieur A______ et AAB______ se sont rendus au Palais Présidentiel où ils ont rencontré le Président, alors que K______ et Madame E______ étaient également présents (sentence arbitrale, PP 3'002'112, PP 3'002'169).

b.e) CGR______ GUINEE

Le 30 janvier 2006, Madame B______, agissant pour le compte de AD______, a effectué les démarches nécessaires pour que la société AAS______ INVESTMENTS LTD BVI COMPANY, créée le 28 octobre 2005, dont elle était alors l'administratrice unique via X______, soit renommée CGR______ RESOURCES (GUINEA) LTD. Le 20 juillet 2006, AAA______ a été désigné administrateur aux côtés de X______, tous deux disposant d'un pouvoir de signature individuel (cl. B 2.1.1.).

Les 50'000 actions de CGR______ GUINEE étaient détenues par CGR______ STEEL HOLDINGS LTD (PP 350'831), laquelle exerçait le management de CGR______ GUINEE, alors que CGR______ GUINEE était liée par un contrat de conseil à CGR______ (GUERNESEY).

CGR______ GUINEE était financée par des prêts octroyés par CGR______ TREASURY SERVICES (i.e. les contrats y relatifs sont signés par Madame B______ pour le compte des trois sociétés parties au contrat, soit CGR______ TREASURY SERVICES, CGR______ GUERNESEY et CGR______ GUINEE; classeur B.2.1.1; prêt de USD 26 millions le 1er février 2006, augmenté par la suite et ascendant à USD 63 millions au 31.12.2009).

c.a) AAT______

Par courrier du 2 février 2006, CGR______ GUINEE, soit pour elle AAA______, a établi un accord de coopération avec AAT______ (PP 349'118), société des Iles Vierges Britanniques, dont les ayant-droit économiques et animateurs sont Monsieur A______ et AAB______ (PP 358'753). Cette société était alors utilisée par ces derniers pour d'autres projets.

Par cet accord, CGR______ GUINEE octroyait à AAT______ une participation de 15% dans le projet de Simandou, soit 17.65% de l'actionnariat de CGR______ GUINEE, outre des versements selon un échéancier convenu.

En échange, AAT______ devait continuer: "à fournir tous les efforts possibles aux fins d'obtenir un contrat d'acquisition des blocs 1 et 2."

c.b) Permis de recherches zones Nord et Sud

Le 6 février 2006, sept permis de recherches ont été octroyés à CGR______ GUINEE sur les zones Nord et Sud de Simandou, alors libres de tout permis.

Ces permis seront ultérieurement abandonnés par CGR______, lors de sa demande d'octroi de permis sur les blocs 1 et 2 (cf. courrier du 06.11.2008 de AAU______ au Ministre des mines).

c.c) AAV______

CGR______ ne souhaitant pas que Monsieur A______, AAB______ et AAE______ utilisent l'une de leurs sociétés existantes pour la prise de participation dans CGR______ GUINEE, AAG______ leur a demandé d'acquérir une nouvelle société à cette fin (courrier Me ALPHA______ du 15 août 2018, p. 4), laquelle se substituerait à AAT______.

Sur conseils de AX______, AAB______ s'est alors tourné vers Madame B______ pour acheter une société (PP 349'098).

Le 28 octobre 2005, AD______ BVI avait acheté, à MOSSECK FONSECA & CO. (BVI) LTD, la société AAV______ HOLDING LTD (ci-après AAV______), constituée le même jour aux Iles Vierges Britanniques (cl. B.2). L'administratrice de AAV______ était Madame B______, via X______.

Le 13 février 2006, Madame B______ a, dès lors, vendu AAV______ à AAD______ INTERNATIONAL TRADING (PTY) LTD (ci-après AAD______), société domiciliée en Afrique du Sud et dont les ayant-droits économiques sont Monsieur A______ (F), AAB______ (M) et AAE______ (A) (d'où AAD______). Une facture datée du 14 février 2006 a dès lors été établie par AD______ BVI (PP 5'010'675).

Le même jour, soit avant même la conclusion du contrat entre CGR______ et AAV______, Madame B______, en sa qualité d'administratrice, a attesté que AD______ BVI détenait 17.65 % de CGR______ GUINEE pour le compte de AAV______ (PP 349'327, 5'010'673) :

"et ce sous réserve de l'exécution du contrat entre CG______ RESSOURCES (GUINEA) LIMITED et le gouvernement de la République de Guinée (...)".

Les actions de AAV______ sont restées propriété de AD______ BVI durant toute l'année soit jusqu'au 15 décembre 2006 (cl. B.2, pièces MOSSACK FONSECA). Ce n'est que le 10 janvier 2007 que les actions de AAV______ seront transférées en faveur de AAW______, une fondation agissant par le biais d'une société de droit panaméen AAX______ (cl. B.2), AAY______ SA - la société de gestion de fortune sise à Genève de Monsieur A______ - étant désignée protector et premier bénéficiaire de la fondation, alors que deux administrateurs de paille (AAZ______ et ABA______) étaient désignés.

Ainsi, Monsieur A______, AAB______ et AAE______ ne sont jamais apparus en qualité d'ayant-droits économiques de AAV______.

Une fois AAV______ acquise, CG______MM, soit pour elle Madame B______, et AAV______, ont signé un Services and Cooperation Agreement, qui a été antidaté au 15 octobre 2005.

c.d) Accord du 14 février 2006

Le 14 février 2006, AAT______ a été substituée par AAV______ et un nouvel accord de coopération, identique au précédent, a été conclu avec CGR______ GUINEE (PP 349'035).

Ainsi, AAV______ s'engageait à continuer ses efforts pour arriver à un accord sur les blocs 1 et 2 et à assister CGR______ GUINEE de toutes les manières possibles pour arriver à son objectif.

En échange, il était prévu, en faveur de AAV______:

-        l'octroi d'un free carry par le biais de l'octroi d'une participation de 17.65% dans CGR______ GUINEE et

-        le versement de USD 19.5 millions conformément à l'échéancier ci-dessous:

A ce moment, AAV______ n'était qu'une coquille vide, sans compte bancaire (son premier compte bancaire sera ouvert en mai 2010) et ses réels ayant-droits économiques n'ont jamais eu ni l'intention ni la possibilité d'investir dans un projet minier.

AAA______, responsable du projet en Guinée, a déclaré, dans le cadre de la présente procédure que, dès le début, il n'était pas prévu que AAV______ et ses animateurs investissent.

Madame B______, administratrice de CGR______ GUINEE, était au courant de l'accord du 14 février 2006 dès la signature de celui-ci. Elle précisera dans la procédure (PP 500'078):

"CGR______ agit toujours par des joint-venture et ne verse pas de commission".

c.e) Accords du 20 février 2006

c.e.a) Sur la base de l'accord du 2 février 2006 entre CGR______ GUINEE et AAT______, Monsieur A______ et ses associés ont préparé trois protocoles d'accord entre, d'une part, AAV______ et, d'autre part, AAM______ / K______, AAF______ et Madame E______.

L'accord entre AAV______ et AAM______ / K______ prévoyait les paiements suivants (PP 348'965):

L'accord entre AAV______ et AAF______ prévoyait les paiements suivants (PP 500'582, l'original du contrat: cf. perquisition AAB______):

Ainsi, les protocoles d'accord entre AAV______ et AAM______ / K______ et AAF______ prévoyaient le versement total de USD 19.5 millions, soit la somme promise à AAV______, selon un échéancier de paiements identiques, dont la première échéance de paiement totalisait USD 500'000.-. La seule différence consiste dans la langue de rédaction (français - anglais).

Quant au protocole d'accord avec Madame E______ (PP 348'757), il ne prévoyait pas le versement de sommes d'argent, mais l'intéressée, en tant que "partenaire locale" de l'exploitation des gisements de Simandou, devait recevoir une participation indirecte de 5 % dans la société exploitante, soit la Compagnie minière de Simandou, sous la forme d'une participation de 33 % des 17.65 % de AAV______ dans CGR______ GUINEE (note: 33 % x 17.65 % = 5 %), dès l'obtention des concessions d'exploitation, alors que la Guinée recevrait 15% de l'actionnariat de cette société.

c.e.b) Le 15 février 2006, à 16h23, soit le lendemain de la signature de l'accord entre AAV______ et CGR______ GUINEE, l'assistante de AAB______ a envoyé à Madame B______, pour signature (PP 5'010'684 et 5'010'686), le courriel suivant:

"Pour faire suite à notre conversation veuillez trouver ci-joint le protocole d'accord.

Dans l'attente de votre réponse".

Il s'agissait du protocole d'accord entre, AAV______ et AAM______ / K______, qui prévoyait la signature de Madame B______ en sa qualité d'administratrice de X______, elle-même administratrice de AAV______.

La signature de Madame B______ figurait sur la même page que l'échelonnement de paiement.

A réception de cet email, Madame B______ s'est alors entretenue au téléphone avec AAB______ ("As per your discussion with AAB______...", PP 5'010'688) et a proposé de délivrer une procuration pour signer l'accord à sa place.

A 17h13, l'assistante de AAB______ a écrit à Madame B______ ce qui suit (PP 500'377):

"As per your discussion with AAB______ please find attached the new version of the Protocole d'Accord. Thanks to send us Power of Attorney for Mr AAE______ (...)".

Soit en traduction libre: "Conformément à la discussion que vous avez eue avec AAB______, veuillez trouver ci-joint la nouvelle version du Protocole d'accord. Merci de nous envoyer la Procuration en faveur de M. AAE______ (...)".

Le contrat a ainsi été modifié pour prévoir la signature de AAE______, et non plus celle de Madame B______ pour le compte de X______ (PP 5'010'690).

A 17h17, l'assistante de AAB______ a envoyé un nouveau courriel à Madame B______, lequel précisait (PP 500'087):

"As per your discussion with AAB______ please find attached both Protocole d'Accord. Thanks to send us Power of Attorney for Mr. AAE______ (...)".

Soit en traduction libre: "Conformément à la discussion que vous avez eue avec AAB______, veuillez trouver ci-joint les deux Protocoles d'accord. Merci de nous envoyer la Procuration en faveur de M. AAE______ (...)".

A 17h19, l'assistante de AAB______ a renvoyé à Madame B______ le même courriel que celui de 17h17, avec cette fois les pièces jointes, soit les deux protocoles d'accord suivants (PP 500'082):

-        le protocole d'accord modifié entre AAV______ et AAM______ / K______ daté du 20 février 2006 et

-        le protocole d'accord avec Madame E______ daté du 20 février 2006.

A 17h24, Madame B______ a transmis à la secrétaire de AAB______ la procuration qu'elle avait établie au nom de AAE______, lui permettant d'engager AAV______ au nom de X______ (PP 500'087).

Ce même 15 février 2006, après avoir envoyé la procuration, Madame B______, pour le compte de X______, a démissionné, avec effet immédiat, de sa qualité d'administratrice unique de AAV______ et des administrateurs de paille ont été désignés à sa place (PP B.2).

Entendue dans le cadre de la procédure, Madame B______ a déclaré ignorer qui étaient les personnes mentionnées sur les protocoles d'accord. Elle ne les avait pas signés elle-même pour éviter tout conflit d'intérêts avec son travail pour CGR______ (PP 500'142).

c.e.b) Le matin du 20 février 2006, l'avion utilisé par Monsieur C______ a atterri en Guinée en provenance de Malte et est reparti le soir même à destination de la Macédoine.

Monsieur C______ se trouvait alors en Israël. En effet, il était en Côte d'Ivoire et en Afrique du Sud, entre les 5 et 10 février 2006, puis en Israël, du 10 au 17 février 2006. Le 18 février 2006, il s'est rendu à Aman, avant de retourner en Israël, le 19 février 2006, où il est resté jusqu'au 25 février 2006, date à laquelle il est allé à Aman puis à Goa, le lendemain.

C'est AAG______ (déclaration de Monsieur A______ et courrier de AAM______) qui a notamment voyagé avec l'avion utilisé par Monsieur C______.

AAG______ a apporté avec lui USD 500'000.- et les protocoles d'accord, datés du 20 février 2006 et envoyés le 15 février 2006 à Madame B______ (cf. déclarations de Monsieur A______ à l'audience de jugement et courrier de AAM______).

Les trois protocoles d'accord entre, d'une part, AAV______ et, d'autre part, AAM______ / K______, AAF______ et Madame E______ ont ainsi été signés le 20 février 2006.

c.e.c) Le même jour, soit le 20 février 2006, un protocole d'accord a été conclu entre la Guinée et CGR______ GUINEE, soit pour elle AAA______, celui-ci ayant été autorisé à représenter la société par résolution signée par Madame B______ pour le compte de X______ le même jour (PP 5'006'806 et cl. B.2.1.1).

Par ce protocole d'accord, CGR______ GUINEE s'engageait (i) à effectuer une étude de faisabilité dans un certain délai dès l'obtention des permis de recherche couvrant des zones minières décrites dans des annexes (ces zones comprennent les blocs 1 et 2 de Simandou) (PP 5'006'811), (ii) à créer la société la Compagnie minière de Simandou, dont l'actionnariat devait être réparti à raison de 15 % pour la Guinée et de 85 % pour CGR______ GUINEE, alors que la Guinée devait faire en sorte que les permis soient attribués à CGR______.

En effet, la zone visée par ce protocole d'accord était définie dans ses annexes 1 et 2 (article 1.3.2.). L'annexe 1, intitulée "coordonnées de la zone de recherche", contient les références latitudinales et longitudinales des blocs 1 et 2, de même que des zones Nord et Sud (PP 5'006'811). La seconde annexe, intitulée "Plan de la zone de recherche", est le plan de vol du 2 décembre 2005 (PP 5'006'812).

L'article 1.3.3. du protocole d'accord prévoit que la République de Guinée s'engageait à ne pas accorder de permis d'exploitation ou de concession à une tierce partie pour la zone minière décrite en annexes 1 et 2 pendant la durée de validité dudit protocole.

L'art. 2.3. prévoit que dans les six mois suivant la fin de l'étude de faisabilité, les parties devront désigner l'exploitant indépendant le plus approprié pour le Projet des Mines de Fer Simandou, un tel exploitant devant être sélectionné par CGR______ GUINEE, après consultation de la République de Guinée.

D'après l'art. 3.2.2.7., si une quelconque zone du site de Simandou devenait libre de tous droits miniers, ladite zone serait proposée en priorité à CGR______ GUINEE en vue de son exploration et / ou de son exploitation.

Dans son second Witness Statement (PP 349695), AAB______ a expliqué qu'il avait suggéré que si les blocs de AAL______ sur Simandou devaient lui être retiré, ceux-ci soient donnés à CGR______ ("I recall suggesting to him that he try to add a promise to the effect that the Simandou blocks held by AAL______ would be given to CGR______ if they were retroceded by AAL______").

Il a également exposé que c'était en raison de cette "proposition prioritaire" que AAG______ avait refusé de signer le protocole d'accord ("He felt that the terms were inadequate").

AAB______ a ajouté qu'à cette époque, CGR______ était consciente qu'il s'agissait du bijou de la couronne guinéenne ("Indeed CGR______ was aware that this was the jewel in the Guinea crown").

c.e.d) La signature du contrat, ce 20 février 2006, entre la Guinée et CGR______ a fait l'objet d'une petite cérémonie lors de laquelle AAM______, K______ et AAF______ étaient présents (photographie annexée au courrier du 15.08.18 de Me ALPHA______), tout comme Madame E______, Monsieur A______ et AM______, beau-frère de Monsieur C______ et responsable du secteur diamant de CGR______ (AM______ LCIA, PP 500'901).

A cette occasion, AAG______ a offert une voiture miniature en or au ministre AAI______, qui l'a remise au Président (AAA______ LCIA, PP 500'903; PV 09.07.15 AAI______, p. 3; attestation Monsieur A______ 26.11.12, PP 3'000'069; sentence arbitrale, no 673).

AAF______, respectivement AAM______ / K______, ont reçu de AAG______ les sommes dues selon la phase 1 des accords conclus (USD 75'000.- et USD 425'000.-, cf. attestation des intéressés PP 348'969, attestation originale dans classeur B.2.8; copie PP 348'969, et sentence LCIA, PP 3'002'061, no 212),

AAV______ n'a pas reçu la somme de USD 500'000.- (75'000 + 425'000 = 500'000) due selon le contrat signé (cf. également PP 3'002'061, no 212 à 214 et PP 349'149/500'131/350'625) ni aucun des montants totalisant USD 19.5 millions conformément à l'échéancier prévu.

En revanche, Monsieur A______ et AAB______ ont facturé à CGR______ leurs frais déboursés dans le cadre de leur assistance pour la signature du protocole d'accord, soit USD 125'000.-, montant payé le 6 mars 2006 par CGR______ TREASURY SERVICES (cf. factures des 27 février 2006 de USD 60'000.- respectivement USD 65'000.-; PP 349'149; décompte AAC______, PP 348'770; sentence arbitrale no 404.6 PP 3'002'112).

Ainsi, les USD 19.5 millions (15 mio + 4.5 mio) prévus dans le contrat avec AAV______ équivalaient aux sommes dues à AAM______ / K______ et AAF______ (USD 19'500'000 = 2'975'000 + 900'000 + 12'025'000 + 3600'000 ), alors que Madame E______ devait percevoir une participation de 5 % dans le projet par le biais du tiers de la participation de AAV______ dans le même projet.

c.f) Appréciation des faits: blocs 1 et 2

Sur la base des faits susmentionnés, le Tribunal retient que, dès 2005, CGR______ visait les blocs 1 et 2 de Simandou. Il s'agissait de la cible, selon les termes employés et l'intention clairement exprimée par AAG______ dans ses courriels des 10 et 11 octobre 2005, de même que dans les contrats des 2 février 2006 avec AAT______ et 14 février 2006 avec AAV______, lesquels mentionnaient expressément les blocs 1 et 2.

Les zones Nord et Sud ne représentaient que peu d'intérêt pour CGR______, comme en témoigne l'abandon des permis sur ces zones le 6 novembre 2008. Il s'agissait surtout d'un point d'entrée en Guinée, à l'instar des permis de bauxite et d'uranium.

Cette intention est confortée par le courriel du 28 février 2006 de Monsieur A______ à AAG______, dans lequel il indique qu'il accélérera le processus pour les blocs 1 et 2 après avoir montré des activités de la société en Guinée. En d'autres termes, il s'agissait d'abord de montrer de quoi CGR______ était capable afin d'obtenir les blocs 1 et 2.

Le plan de vol du 2 décembre 2005, soit du sud au nord, ne pouvait que passer au-dessus des zones de AAL______. Le fait de voler à basse altitude et de s'y arrêter à deux reprises a été planifié et anticipé.

Par ailleurs, lorsque les accords du 20 février 2006 ont été conclus, les permis de recherches sur les zones Sud et Nord avaient déjà été octroyés. Par conséquent, CGR______ n'avait aucun intérêt à octroyer et à promettre des rémunérations substantielles à des partenaires locaux en lien avec ces zones.

Monsieur A______ a compris que la seule et unique personne qui comptait en Guinée était le Président AAO______.

Les premières tentatives d'accéder au Président en 2005 se sont soldées par un échec. Ce n'est que par le biais de Madame E______, que la situation s'est débloquée.

Ainsi, le but ultime de CGR______ et, partant de Monsieur A______, était d'obtenir les droits sur les blocs 1 et 2 de Simandou

d) Transfert des actions

Par courriel du 28 février 2006 adressé à AAG______, Monsieur A______ a résumé les actions à entreprendre et précisé que, concernant les blocs 1 et 2 de Simandou, ils étaient en contact permanent avec leur "partenaires locaux" (PP 349'074). Il demandait le transfert des actions de CGR______ GUINEE tel que convenu.

Le 1er mars 2006, AAA______ a demandé à Madame B______ quelle était la procédure à suivre pour transférer les actions de CGR______ GUINEE (PP 5'010'775). Cette dernière s'est enquise de savoir où en était le contrat qui devait être conclu entre CGR______ GUINEE et le gouvernement guinéen et, si celui-ci avait été conclu, de lui communiquer l'original (PP 5'010'775). AAA______ a répondu que la lettre d'intention (Memorandum of Understanding) avait été conclue et les permis de prospection délivrés (une copie scannée lui étant réservée); le transfert des actions pouvait donc avoir lieu (PP 5'010'775).

L'original du contrat entre CGR______ GUINEE et le gouvernement guinéen a été envoyé à Madame B______ et conservé par celle-ci dans les locaux de AD______ GE.

Par décision du 10 mars 2006, Madame B______, administratrice de X______, elle-même administratrice de CGR______ GUINEE, a transféré 17.65 % des actions de CGR______ GUINEE à AAV______ (PP 350'831, signature du certificat d'actions y relatif par MADAME B______, PP 5'010'778). Il est à relever que le certificat d'actions n'a pas été antidaté, contrairement à ce qui a été plaidé lors de l'audience de jugement.

Une convention d'actionnaires a été signée le 19 juillet 2007, avec effet rétroactif au 10 mars 2006, entre AAV______, CGR______ STEEL et CGR______ GUINEE, de même qu'un contrat de management, par lequel CGR______ STEEL se voyait conférer la gestion de CGR______ GUINEE (PP 3'002'062). Madame B______ a signé pour le compte de CGR______ STEEL et a donné une procuration à AAA______ pour le signer pour le compte de CGR______ GUINEE (cl. B.2.2.2.).

e) Concessions

Malgré les efforts de CGR______ et de ses partenaires, le 30 mars 2006, la Guinée a octroyé quatre concessions à AAL______ portant sur les blocs 1 à 4.

AAH______ était alors premier ministre et AAI______ ministre des mines. Le décret de concession, qui devait encore être signé par le Présidente AAO______, ne l'a jamais été (PP 5'008'204).

Le 5 avril 2006, le premier ministre AAH______ a été limogé pour "faute grave". Quant au ministre des mines AAI______ - après avoir accepté, le 12 mai 2006, de reporter la date de soumission de l'étude de faisabilité de AAL______, PP 5'008'205 -, il a été remplacé un mois plus tard, soit le 29 mai 2006.

f) Installation de CGR______ SARL

K______ a été chargé d'effectuer les démarches nécessaires à l'établissement de CGR______, en Guinée, soit notamment trouver une villa et l'aménager, constituer une société guinéenne et rencontrer les autorités locales (PP 349'054, 349'078, 349'050, 349'070, 349'066).

Il était alors employé et rémunéré par CGR______ GUINEE (PP 349'072) l'équivalent de CHF 800.- par mois (GNF 3'000'000.-, PP 349'054), dans un premier temps par débit d'un compte bancaire détenu par Monsieur A______, à Conakry (PP 349'056, 349'066). Il a, en outre, bénéficié de paiements supplémentaires de la part de Monsieur A______ et de ses associés.

En avril 2006, CGR______ a pris à bail une villa dans le quartier de La Minière, à Conakry, afin d'y établir ses bureaux.

g) Transaction 1 - sucre

g.a) Le 9 mai 2006, CGR______ a obtenu treize permis d'exploration de bauxite dans la zone nord de la Guinée, à la frontière avec le Mali, étant rappelé que la bauxite n'était pas l'objectif premier de CGR______.

Le lendemain 10 mai 2006 (PP 500'303), AAA______ a informé AAG______ que CGR______ avait obtenu les treize permis pour la bauxite et a ajouté:

"The Lady phoned Monsieur A______ today (he is back in France) asking him whether I was happy now with these permits. AAB______ also phoned me saying that we need to process the "first payment" now, hence the invoice attached (which I asked for).

You asked to other day how we can make No 1 happy; let's pay this and then focus on Bouke and Forecariah".

Soit (en traduction libre):

"The Lady a téléphoné à Monsieur A______ aujourd'hui (il est de retour en France) et lui a demandé si j'étais content maintenant avec ces permis. AAB______ m'a également téléphoné pour me dire que nous devions effectuer le premier paiement, raison de l'envoi de la facture jointe (celle que j'ai demandée).

Tu m'as demandé l'autre jour comment on pouvait rendre le No 1 heureux; payons cela et ensuite focalisons nous sur Boke et Forecariah".

A relever que AAL______ disposait d'une autorisation de reconnaissance sur la zone de Forékariah (fer) (P 5'008'201).

The Lady est Madame E______ (déclaration AAU______ CIRDI, PP 500'957, LCIA, AAC______S-3, § 115, p. 32; déclaration AAA______ LCIA, AAC______S-12, § 11 p. 4, PP 5'006'260).

Le 10 mai 2006, AAD______ a émis une facture de USD 250'000.- à l'attention de CGR______ GUINEE pour son assistance et ses conseils dans le cadre de l'octroi des permis de bauxite (PP 500'304, 503'232).

Le même jour, AAG______ a demandé à AX______ de contrôler l'adéquation de la facture et de la payer (PP 500'303). AX______ a répondu qu'il comprenait que cela concernait CGR______ GUINEE, mais demandait des précisions sur la raison de ce paiement (PP 500'303). AAG______ et AAA______ ont, tous deux, répondu qu'il s'agissait des commissions (services and success fee) de Monsieur A______ (PP 500'302).

Le lendemain, AAA______ a remercié Monsieur A______ d'avoir "sécurisé les permis" ("First of all, thank once again for all your input during the last week in securing those permits", soit en traduction libre: "Avant tout, merci encore pour votre intervention au cours de la semaine passée pour sécuriser les permis", PP 349'067) et l'a informé que AAG______ avait approuvé la facture de AAD______ (PP 349'067).

Le 15 mai 2006 (PP 500'301), AX______ a demandé au service de comptabilité de comptabiliser le paiement via un prêt de CGR______ STEEL et de mentionner comme code comptable "Guinée minerai de fer". Sur requête de AK______, AX______ a confirmé que le paiement ne concernait pas seulement les permis de bauxite, mais également le projet de fer en Guinée (PP 500'301).

Le 17 mai 2015, le compte de AAD______, auprès de la banque 3______, à Genève, a été crédité de USD 250'000.-, montant payé par CGR______ TREASURY SERVICES (PP 503'233 et 503'226). Le compte était, avant ce paiement, créditeur de USD 88'000.-.

A cet égard, il est relevé que la comptable de Monsieur A______ et AAB______ a fait remarquer aux intéressés qu'ils utilisaient les sociétés AAC______ FRANCE, AAD______ et AAV______, mais qu'une société était utilisée pour les paiements et les montants étaient reçus par une autre société. Il en résultait une confusion au niveau comptable et il leur était demandé de régulariser les comptes de ces sociétés (cf. paiements faits à AAC______, AAD______ et AAV______, PP 348'770).

Dans les jours suivants, le compte de AAD______ a été débité d'un total de USD 66'000.- en faveur de K______, montant partiellement extourné (PP 300'915, 503'226-7). A cet égard, il est relevé que Monsieur A______ a précisé à AAG______ que K______ faisait partie du projet Simandou et que le salaire versé à l'intéressé n'était qu'un complément à ce qui lui était donné "à côté", il s'agissait de la seule manière d'avancer, c'était ainsi que cela fonctionnait (cf. courriel du 20 juin 2006, PP 500'578 ss).

Le 21 mai 2006, AAV______ a facturé ses services USD 62'000.- (PP 348'770). Il est rappelé qu'à ce moment, AAV______ ne disposait pas de compte bancaire.

Le 2 juin 2006, AAA______ a informé K______ que son salaire de mai 2006 (GNF 3'000'000.-, soit environ CHF 800.-) ainsi que celui de Ben étaient disponibles sur le compte de Monsieur A______, en Guinée (PP 349'054).

Le 9 juin 2006, l'assistante de Monsieur A______ s'est renseignée auprès de ABB______ sur l'achat de sucre. Le 13 juin 2006, elle a commandé 202 tonnes de sucre brésilien, qui devaient être livrées à Conakry. La facture devait être établie au nom de Madame E______ (pièce 32 chargé de pièce de Me ALPHA______ devant le TCO).

Le 15 juin 2006, Monsieur A______ a instruit la banque de payer la facture de Madame E______ concernant un achat de sucre.

Le 16 juin 2006, AAD______ a payé le sucre commandé par Madame E______ à concurrence de USD 94'000.- (+ USD 38.- de frais), sur instructions de AAB______, par débit du compte de AAD______ (cf. PP 500'305, 503'228).

Dès août 2006, le compte de AAD______ auprès de la banque 3______ était vide et n'a plus été utilisé (classeur B.3.6a).

Le versement de USD 250'000.- à AAD______ n'apparaît pas sur la liste des paiements effectués par CGR______ à Monsieur A______, AAB______ et AAE______ au titre de leur rémunération (via ABC______ et AAV______) (PP 500'131 et 350'625; PP 349'149, les USD 250'000.- sont un paiement et non une facture).

Enfin, entendue dans le cadre de la présente procédure, Madame E______ a déclaré que le sucre commandé par Monsieur A______ avait été payé par CGR______ (PP 500'716).

Dans le cadre de la présente procédure (PV, PP 500'296, 500'480, 500'485), Monsieur C______ a déclaré ne jamais avoir vu les courriels et documents en lien avec le versement de USD 250'000.- Il ne connaissait pas The Lady et ignorait qui était le No 1 évoqué dans l'email.

Madame B______ a apporté la même réponse (PV, PP 500'297, 500'480, 500'486).

g.b) Transaction 1 / Appréciation des faits

La défense soutient que CGR______ n'avait pas connaissance de l'affectation ultérieure de la somme de USD 250'000.- versée à AAD______. Cette allégation n'est pas crédible et est démentie par les éléments suivants.

g.b.a) Il ressort du courriel du 10 mai 2006 que le premier paiement devait être effectué, soit USD 250'000.-. Cet argent servira à payer les partenaires locaux, en l'occurrence K______ et sa demi-soeur Madame E______.

Ce montant a été octroyé sans contrepartie à Madame E______. Le soi-disant partenariat conclu entre Monsieur A______ et Madame E______, avec une répartition des bénéfices, ne trouve aucune assise dans la procédure, aucun élément ne le confirme, notamment pas les documents retrouvés chez AAB______. Ce partenariat en lui-même ne fait aucun sens.

Certes, il apparaît que Monsieur A______, AAB______ et AAE______ ont acheté pour Madame E______, ultérieurement, du poulet surgelé au Brésil, mais il ne s'agissait pas d'un partenariat, la marchandise ayant été prépayée par Madame E______ et Monsieur A______, AAB______ et AAE______ ont perçu au passage un peu plus de USD 10'000.- de commission (cf. pièces 35, 36, 37 chargé de Me ALPHA______ au TCO).

Au demeurant, AAD______ ne disposait pas sur le compte des fonds nécessaires pour payer le sucre et K______, sans l'argent de CGR______.

g.b.b) Il ressort des courriels échangés que, le lendemain de la délivrance des permis de bauxite, Madame E______ a téléphoné à Monsieur A______ pour savoir si les représentants de CGR______ étaient contents. AAB______ a, immédiatement, téléphoné à CGR______ pour leur demander de payer les USD 250'000.-, ce qui a été fait. CGR______ a alors remercié Monsieur A______ pour son intervention et pour avoir "sécurisé les permis". Il sera relevé que, dans le contexte et la chronologie des faits, "sécurisé les permis" ne peut signifier éviter qu'un concurrent n'obtienne ceux-ci avant eux, mais ne peut se comprendre que par "obtenir" lesdits permis.

Il faut comprendre, par ces messages, que CGR______ savait que les permis étant délivrés, il fallait payer les personnes qui avaient rendu possible leur obtention, spécifiquement The Lady, mentionnée dans le courriel du 10 mai 2006, soit Madame E______. Il sera, au demeurant, relevé que les USD 250'000.- n'étaient pas en lien avec la rémunération de Monsieur A______, AAB______ et AAE______. En effet, ce paiement n'apparaît pas sur la liste des paiements effectués par CGR______ à Monsieur A______, AAB______ et AAE______ au titre de leur rémunération.

CGR______ savait donc qu'une partie des USD 250'000.- était destinée à Madame E______.

Madame E______ a confirmé, dans le cadre de la présente procédure, que le sucre commandé par Monsieur A______ avait été payé par CGR______. Ces déclarations sont crédibles dans la mesure où elles sont corroborées par d'autres éléments figurant au dossier.

Il sera relevé que le paiement à Madame E______ ne concernait pas seulement la bauxite (cf. courriel de AX______, PP 500'301), mais bien le projet de fer visé par CGR______ et qui a fait l'objet du contrat conclu entre AAV______ et Madame E______, le 20 février 2006. En effet, l'objectif premier de CGR______ n'était pas l'exploitation de la bauxite, mais celle du fer de Simandou. D'ailleurs, CGR______ abandonnera les permis de bauxite. Ainsi, la sollicitation des permis de bauxite et le paiement du sucre à Madame E______ n'était qu'une première étape vers l'obtention des permis d'exploitation des blocs 1 et 2.

Il résulte de ce qui précède que CGR______ savait que le paiement de USD 250'000.- à AAD______ devait servir, en partie, à la rémunération des partenaires locaux, dont Madame E______, en particulier.

AAD______ a agi comme un intermédiaire de CGR______ dans le paiement du sucre livré pour USD 94'000.-, montant versé pour sécuriser les permis de bauxite, mais également comme une première étape vers l'exploitation du fer de Simandou.

h) Mission de contacts en Guinée

Le 29 mai 2006, AAA______ s'est rendu en Guinée (PP 349'066) et une mission de prise de contact a été organisée sur huit jours avec les autorités locales en présence de AAA______, K______ et Monsieur A______ (PP 349'066 et 349'060ss). K______ avait établi au préalable la liste des colas (sur le mot colas cf. attestation MONSIEUR A______ du 26.11.12, p. 2 3ème §), soit des enveloppes d'argent à distribuer aux diverses autorités, à savoir aux gouverneurs, sous-préfets, sages (courriel de IST à Monsieur A______, PP 349'050).

En juin 2006, AAU______, qui travaillait au Ministère des affaires étrangères d'Israël, a rencontré, en Afrique du Sud, AAG______ et AAA______, lesquels recherchaient un responsable de projet pour la Guinée (AAU______ LCIA, PP 300'927). AAU______ a dès lors été désigné en qualité de country manager pour les projets guinéens et président de la société guinéenne nouvellement constituée, CG______ RESOURCE (GUINEA) LTD SARL (ci-après CGR______ GUINEA SARL).

Le 19 juin 2006, AAB______ a rencontré Monsieur C______ et AAG______ ("following AAB______'s meeting with Roy and Monsieur C______", PP 349'072).

Le 20 juin 2006, en référence à la réunion entre AAB______ et Monsieur C______ (following AAB______'s meeting), des courriels de mise au point ont été échangés entre AAG______, Monsieur A______ AAE______, AX______ et AAU______. AAG______ a clairement rappelé que Monsieur A______ et ses associés ne devaient pas agir pour le compte de CGR______. Monsieur A______ a confirmé que c'était clair.

Par ailleurs, AAG______ a attribué à CGR______ la paternité du projet de Simandou, en s'exprimant en ces termes (PP 350'505, 500'577):

"I don't think that you can go after projects that were pointed by us to you. But it is your decision."

Fin août ou début septembre 2006, AAU______ a rencontré Madame E______ à son domicile à Dubréka (AAU______ CIRDI, PP 500'908; GUINEE, PP 500'908; WS AAU______, § 37; sentence arbitrale, no 226, PP 3'002'064).

i) Bauxite

Pour rappel, le 9 mai 2006, CGR______ avait obtenu treize permis d'exploration de bauxite.

Le 21 juillet 2006, ABD______ & CO LTD SARL, soit pour elle Madame E______, et AAV______, soit pour elle AAE______, ont conclu deux lettres d'engagement en lien avec les permis de bauxite.

Il était rappelé que CGR______ GUINEE s'était rapprochée des autorités guinéennes en vue d'établir un partenariat pour le développement et l'exploitation d'une partie du gisement de fer de Simandou, CGR______ avait soumis une proposition de participation à la Guinée, à hauteur de 15 %, et à Madame E______, comme "partenaire locale", à hauteur de 5 %. Afin d'intégrer l'actionnariat de Madame E______, CGR______ GUINEE s'était engagée à transférer 17.65 % de son capital à AAV______, dont 33 % seraient attribués à Madame E______, ces éléments ayant fait l'objet de l'accord du 20 février 2006. Dans ce nouvel accord, il était entendu que la délivrance des permis de bauxite entraînerait de fait l'actionnariat de Madame E______ dans ce projet par le biais de sa participation de 33 % prévue par contrat du 20 février 2006.

Monsieur A______ a facturé à CGR______ son activité et ses frais en Guinée USD 40'000.-, montant payé, le 31 août 2006, par CGR______ TREASURY SERVICES (PP 349'149 et 348'770).

CGR______ renoncera aux permis de bauxite (PP 5'000'060). Monsieur C______ s'est opposé à ce projet, à tout le moins en 2008, car il ne croyait pas à l'exploitation de la bauxite et à la production de l'aluminium (PV, PP 500'296).

j) Lancement officiel des activités / réception CGR______ à la villa de La Minière

Le 17 septembre 2006, l'avion de Monsieur C______ a quitté Tel Aviv pour Conakry, en passant par Malte (arrêt de 30 mn) et est arrivé, à Conakry, le 18 septembre 2006, à 7h10 (PP 300'821). Il est reparti de Conakry le 19 septembre 2006, à 23h00, pour Frankfort-Genève-Nice puis Tel Aviv (arrivée le 22.09.06) (PP 300'821). Monsieur C______ se trouvait en Israël du 15 au 19 septembre 2006, date à laquelle il est sorti du pays avant d'y revenir le 22 septembre 2006 (PP 300'885).

Monsieur A______ a organisé pour AAG______, AAA______ et AAU______ un survol avec l'hélicoptère présidentiel qui a eu lieu le lundi 18 septembre 2006 (cf. courriel Monsieur A______, PP 500'581).

Le 19 septembre 2006, CGR______ a organisé une conférence de presse pour présenter ses activités en Guinée (cf. film, PP 3'001'000). AAG______, AAA______, AAU______, Monsieur A______ et K______ étaient assis à la table des conférenciers, Monsieur A______ officiant comme interprète de AAA______.

S'en est suivie une réception officielle à la villa du quartier de la Minière, à laquelle Madame E______ était présente. Elle est venue escortée des bérets rouges, soit de la garde présidentielle, et est arrivée aux côtés de son demi-frère K______, frère et soeur étant les seuls à être vêtus de blanc. Elle a salué tous les invités et a été présentée par K______ à AAG______ et à AAA______, alors que AAU______ et Monsieur A______ se tenaient à côté. Par la suite, AAG______, dont les propos étaient également traduits par Monsieur A______, a fait une présentation, alors que Madame E______ écoutait assise (cf. film, PP 3'001'000; le Tribunal arbitral en a déduit: Madame E______ was the President's wife and acted in that capacity at public functions, no 548, PP 3'002'147).

Il ressort clairement de la vidéo de la réception que Madame E______ était une invitée de marque et était encadrée par les bérets rouges, qui l'accompagnaient dans ses déplacements, de sorte que ces derniers assuraient spécifiquement sa protection et non celle du Ministre AAI______, voire de la réception en général.

Monsieur A______ a facturé à CGR______ ses frais environ EUR 15'040.- et ses prestations pour USD 100'000.- (PP 349'149 et 348'770; facture du 3 octobre 2006, payée le 10 octobre 2006 par CGR______ TS, PP 349'149-50).

k) ABD______

En 2007, Monsieur A______ a contacté ABE______, son gestionnaire de fortune alors chez AAY______ SA, une société de gestion de fortune sise à Genève, et lui a demandé d'ouvrir un compte bancaire pour Madame E______, expliquant qu'il s'agissait de la quatrième épouse du Président de Guinée et qu'il peinait à trouver une banque disposée à ouvrir un compte pour cette personne, selon ce que le gestionnaire a rapporté (PV ABE______ du 17.10.2013, PP 500'042; documentation de la société, classeur B.2).

ABE______ a déclaré que Monsieur A______ lui avait expliqué que AAV______ avait conclu un contrat avec CGR______ et que Madame E______, qui était impliquée, allait recevoir de l'argent. Il avait précisé être en relation avec Monsieur C______ concernant des mines en Guinée. Le gestionnaire avait fait remarquer à Monsieur A______ qu'il serait difficile pour Madame E______ d'ouvrir un compte bancaire en raison de sa qualité de PEP (personne exposée politiquement), mais qu'il l'accompagnerait volontiers dans ses démarches auprès d'une banque. Monsieur A______ l'avait informé qu'il viendrait avec Madame E______ et lui a envoyé la carte d'identité de l'intéressée (cf. copie certifiée conforme par notaire le 19.10.2006 du passeport de Madame E______, classeur B.2.8) en lui demandant d'acheter à celle-ci une société de domicile. ABE______ a effectué les démarches demandées et a acheté auprès de MOSSACK FONSECA, à Genève, la société ABD______ PARTNERS & CO LTD, sise aux Iles Vierges Britanniques. Il avait reçu toute la documentation sociale, sans que Monsieur A______ ne se manifeste. La société n'avait jamais eu d'activité ni ouvert de compte bancaire et avait été radiée (PV ABE______ du 17.10.2013, PP 500'042; documentation de la société, classeur B.2).

A la même période, Madame E______ a acheté une autre société dénommée ABD______ AND CO LTD SARL (ci-après ABD______), constituée le 12 avril 2007, en Guinée (déclaration modificative retrouvée chez AAB______, classeur B.2.8). Cette société n'a en commun avec la société susmentionnée ABD______ PARTNERS & CO LTD que son ayant-droit économique, Madame E______.

Une troisième société ABD______ & CO LLC a été constituée, en Floride, par ABF______, l'avocat américain de Monsieur A______ et de ses associés (PP 503'336). Elle n'a en commun avec les sociétés susmentionnées que son ayant-droit économique, Madame E______. Elle serait propriétaire de la maison de Madame E______ à ______, à Jacksonville, en Floride.

Il ne sera question dans le présent jugement que de la société ABD______, sise en Guinée.

l) Rencontres Madame E______ - AAU______

En 2007, AAU______ a rencontré Madame E______ à cinq reprises (AAU______ CIRDI, PP 500'908; Guinée, PP 500'908; Israël, PP 4'900'016). Il l'a notamment rencontrée dans sa maison de Dubréka, rencontre lors de laquelle Madame E______ a parlé du projet de Simandou comme étant "son projet" (AAU______, LCIA PP 3'002'064). Il a admis lui avoir offert une vue miniature de Jérusalem (WS, PP 501'006).

Le 20 mars 2007, CGR______ GUERNESEY a changé ses statuts. A la même période, AAG______ a quitté CG______ et a vendu sa participation dans CGR______ GUERNSEY qu'il détenait via la société AAK______ (PP 350'318, 3'951'023, 350'308); W______ est devenue seule actionnaire (PP 3'951'023 et 3'950'997). AAA______ est devenu le CEO à la place de AAG______ (AAU______ LCIA, PP 300'927).

m) Uranium

Le 5 février 2007, CGR______ GUINEE SARL a sollicité la délivrance de permis de recherche d'uranium.

Le 28 février 2007, quatre permis de recherche d'uranium ont été délivrés à CGR______ GUINEE SARL.

Le 20 juin 2007, ABD______, soit pour elle Madame E______, a conclu un protocole d'accord avec CGR______ GUINEE SARL directement, sans passer par AAV______. Il était mentionné que CGR______ GUINEE SARL s'était rapprochée des autorités guinéennes en vue d'établir un partenariat pour le développement et l'exploitation d'une partie du gisement de fer de Simandou, ABD______ l'assistant dans ses démarches visant l'obtention des permis de recherches y relatifs. Sur ce, quatre permis de recherche d'uranium avaient été délivrés. Pour rétribuer ABD______ pour les efforts fournis, CGR______ GUINEE SARL s'engageait à transférer 5 % de ses actions à ABD______. Ce contrat a été légalisé par un greffier du Tribunal de première instance de Conakry le 20 juillet 2007.

Le 20 juin 2007, Monsieur C______, qui ne se trouvait pas en Guinée, a quitté Tel Aviv pour se rendre à Kiev (PP 300'888 et 300'890).

Monsieur A______ et ses partenaires ont facturé à CGR______ leur service pour leur assistance dans l'obtention des permis d'uranium USD 163'000.- (PP 500'131, 350'625, 350'625).

n) Renonciation

Le 25 mai 2007, AAF______ a renoncé à tous ses droits d'actionnaire dans AAV______ (PP 500'584). Par attestation devant notaire du 13 septembre 2007 (dont l'original figure à la procédure, CRI AAB______, classeur B.2.8), AAF______ a renoncé à son actionnariat dans AAV______ et à la rétribution promise par contrat du 20 février 2006.

Par avenant non signé (dont l'original figure à la procédure, CRI AAB______, classeur B.2.8), AAM______ et K______ ont également renoncé à leurs droits découlant du contrat signé le 20 février 2006 et ont transféré toutes leurs prétentions à ABD______ "en formation" (cf. litige AAM______).

n) CGR______ GUERNESEY

En juillet 2007, CGR______ GUINEE a déposé des demandes de permis d'exploration pour les blocs 1 et 2, alors toujours attribués à AAL______.

En août 2007, AAU______ et K______ ont rencontré le ministre des mines, ABG______, pour réitérer l'intérêt de CGR______ d'exploiter les blocs 1 et 2 (sentence LCIA, PP 3'002'064 et 3'002'170; PV ABG______, PP 500'203). Le ministre ABG______ n'était pas favorable, dans la mesure où ceux-ci étaient attribués à AAL______ (sentence LCIA, PP 3'002'064; PV ABG______, PP 500'203).

Les 29 et 30 août 2007, une réunion stratégique a eu lieu, à Guernesey, réunissant le conseil d'administration et la direction de CGR______ GUERNESEY, dont Madame B______ - qui a pris le procès-verbal de la réunion - ainsi que AC______, en leur qualité d'administrateurs, AX______ et Monsieur C______ (PP 500'329).

Il ressort de cette réunion que:

-        Monsieur C______ connaît parfaitement tous les projets du groupe et est très impliqué dans les aspects financiers;

-        AAA______ a fait une présentation des activités du groupe en Guinée et Monsieur C______ a mis en exergue la problématique du transport du fer;

-        Le business model de CGR______ est d'acquérir des concessions après la phase d'exploration et de sortir du projet avant le début des activités d'exploitation, ceci dans des régions géographiques très risquées;

-        AC______ et ADN______ ont suggéré que CGR______ cherche à se diversifier dans des pays moins risqués;

-        AAA______ a mentionné qu'une autre faiblesse de CGR______ était le manque de personnel technique et de compétences et qu'il en découlait un manque de proposition d'affaires;

-        Quant à Monsieur C______, il a souligné les points forts de CGR______, soit :"ses contacts dans l'industrie et dans l'establishment politique".

Début septembre 2007, une nouvelle réunion a eu lieu, en Guinée, en présence de AAU______, K______ et du Président AAO______, qui a fait appeler le Ministre ABG______ (PV ABG______, PP 500'203; sentence LCIA, PP 3'002'064). Le Ministre ABG______ a, alors, expliqué que les blocs convoités étaient attribués à AAL______ (PV ABG______, PP 500'203; sentence LCIA, PP 3'002'064). Le Ministre ABG______ est parti dans la foulée. Une heure plus tard, AAU______ et K______ se sont présentés au Ministère des mines. ABG______ a répété que les blocs 1 et 2 étaient déjà attribués et que l'octroi de concessions minières n'était pas de la compétence du Ministre, mais de celle du Président (PV ABG______, PP 500'203; sentence LCIA, PP 3'002'064).

Dans un courriel du 17 septembre 2007 (PP 5'010'816), AAU______ a informé AAA______ et Monsieur C______ des dernières nouvelles obtenues le jour même du ministre des mines.

Le lendemain, AAU______ a informé Monsieur C______, AAA______ et AM______ des nouvelles reçues le jour même du ministre des mines. Afin de disposer d'un argument solide au retrait des permis octroyés à AAL______, le ministre avait suggéré à CGR______ de faire une présentation des investissements et des travaux effectués par CGR______ l'année écoulée. Enfin, AAU______ a indiqué qu'il allait rencontrer, dans les jours suivants, les personnes clés ("key people") dans le pays, soit le premier ministre, "the Lady" et, peut-être, le Président afin de faire avancer les choses (PP 5'010'816).

Le jour même, Monsieur C______ a abondé dans le sens de la présentation suggérée, tout en soulignant que le nom de AAL______ ne devait absolument pas être mentionné par écrit ("should NOT", PP 5'010'816).

En décembre 2007, une nouvelle réunion a eu lieu entre le Président AAO______, le premier ministre ABH______, le ministre des mines ABG______ et Madame E______, lors de laquelle le ministre ABG______ a, de nouveau, objecté que les blocs 1 et 2 étaient déjà attribués (PV ABG______, PP 500'203; CIRDI ABG______, PP 500'917; sentence LCIA, PP 3'002'065 et 3'002'170 ).

AAU______ a, encore, rencontré Madame E______ peu avant les fêtes de Noël (AAU______, PP 500'908).

o) Année 2008

Début 2008, AAU______ a rencontré, une nouvelle fois, Madame E______ (AAU______, LCIA, PP 500'919). Il l'a également vue à plusieurs reprises durant l'année 2008, en présence du Président AAO______ (cf. ci-après et WS AAU______, PP 500'919).

Monsieur C______ s'est rendu, quant à lui, pour la première fois, en Guinée, en 2008 et s'y rendra cinq fois durant l'année (deux fois en février, une fois en avril, en mai et en septembre).

Début février 2008, Monsieur C______ s'est rendu, personnellement, en Guinée et a rencontré le Président AAO______ pour manifester l'intérêt de CGR______ dans l'exploitation des blocs 1 et 2 (selon le compte rendu de la visite des 25 et 26 février 2008 établi par CGR______, il s'agissait de la seconde visite en Guinée de Monsieur C______, PP 500'294; sentence arbitrale, nos 560.6 PP 3'002'150; déclaration police israélienne AAU______, PP 4'900'016). AAA______, Monsieur A______ et Madame E______ étaient également présents (sentence arbitrale no 236, PP 3'002'065).

Du 25 au 26 février 2008, avant d'aller au Liberia (le 26.02.08 à 10h30), Monsieur C______ s'est, à nouveau, rendu en Guinée (passeport, PP 300'899ss). Lors de sa venue, il a rencontré le secrétaire général à la Présidence, ABI______, en compagnie de AAA______, AAU______ et Monsieur A______ (cf. photographie PP 500'294).

p.a) Contrats 27 et 28 février 2008

Dans la mesure où CGR______ allait racheter la participation de 17.65 % de AAV______ dans CGR______ GUINEE, de nouveaux contrats devaient être conclus afin d'assurer la participation de Madame E______ dans le projet.

Ainsi, le 27 février 2008, CGR______ GUINEE SARL, soit pour elle AAU______, a conclu un contrat de commission avec ABD______, soit pour elle Madame E______. CGR______ s'engageait à verser USD 4 millions à ABD______ à titre de commission pour l'obtention des blocs 1 et 2, la moitié devant être versée à ABD______ - sous imputation de USD 100'000.- déjà versés - et l'autre moitié devait être répartie entre les personnes de bonne volonté ayant facilité l'octroi desdits blocs.

Le 28 février 2008, un nouveau protocole d'accord a été conclu entre les mêmes personnes: CGR______ GUINEE SARL s'engageait à céder à ABD______ 5 % de ses actions.

p.b) Rachat des actions détenues par AAV______

Par accord du 24 mars 2008, signé le 28 mars 2008 par Madame B______ (PP 5'001'681), CGR______ STEEL s'est engagée à racheter la participation de 17.65 % de AAV______ au prix de USD 22'000'000.- selon l'échéancier suivant:

-        USD 3'000'000.- le 15 avril 2008,

-        USD 1'000'000.- le 15 juin 2008,

-        USD 9'000'000.- le 15 avril 2009,

-        USD 9'000'000.- le 15 avril 2010.

Par ailleurs, un montant de USD 8'000'000.- devait être payé en sus si CGR______ réalisait un profit supérieur à USD 1 milliard (clause 5).

Le 28 mars 2008, le Conseil d'administration de CGR______ GUINEE a voté le rachat de la participation de AAV______ et le Conseil d'administration de CGR______ GUERNESEY a appuyé la décision prise (PP 350'927, cl. B.2.12).

Le même jour, Madame B______, pour le compte de CG______ STEEL, a signé le contrat de cession des actions et a annulé, pour le compte de CGR______ GUINEE, le certificat d'actions en faveur de AAV______ (cl. B.2.1.1).

Par courrier du 8 avril 2008, AAE______, agissant pour AAV______, a demandé à AX______ l'exécution du premier versement sur le compte ABJ______ (ci-après ABJ______) auprès de la banque 4______, en Israël (PP 350'593). Ce courrier a été remis à Monsieur C______ (cf. PP 315'785, courrier retrouvé dans l'avion et dans les affaires de Monsieur C______).

Le 15 avril 2008, CGR______ TREASURY SERVICES a versé USD 3 millions à ABJ______ (PP 500'131 et 350'625).

Par courrier du 4 juin 2008, AAE______ a sollicité de AX______ le versement du second montant sur le même compte (PP 350'594). Ce courrier a été remis à Monsieur C______ (cf. PP 315'791, courrier retrouvé dans l'avion et dans les affaires de Monsieur C______).

Le 16 juin 2008, CGR______ TREASURY SERVICES a versé USD 1 million (PP 500'131 et 350'625).

q) Rencontres Monsieur C______ - AAO______

q.a) Entre les 9 et 11 avril 2008, Monsieur C______ s'est rendu en Guinée (PP 300'903ss). Il a rencontré le Président AAO______ en présence de AAU______, Madame E______ (sentence arbitrale, PP 3'002'065-6, 3'002'150, 3'002'170; CIRDI AAU______, PP 500'922; ABG______, PP 500'202) et K______ (AAU______, PP 300'938). Le but de la rencontre était de discuter de la révocation des droits de AAL______ sur les blocs 1 et 2 et de l'octroi de ceux-ci à CGR______ (sentence arbitrale, PP 3'002'066 et 3'002'150; AAU______, PP 300'938bis). Le Président AAO______ a ensuite appelé le secrétaire général à la Présidence, ABI______, et a demandé que les permis octroyés à AAL______ soient réexaminés.

Après cette rencontre, Monsieur C______ et AAU______ sont allés rencontrer le premier Ministre ABH______ pour l'informer avoir parlé avec le Président qui avait évoqué la possibilité de retirer les permis à AAL______. ABH______ n'était pas favorable à un retrait des droits de AAL______ (AAU______, PP 300'938bis et 500'946).

q.b) Monsieur C______ est revenu en Guinée, du 20 au 22 mai 2008, après être passé par le Sierra Leone et le Liberia (PP 300'894ss).

Le 20 mai 2008, ABH______, opposé au retrait des droits de AAL______, a été limogé (AAU______, PP 500'946, sentence arbitrable no 633).

Le 22 mai 2008, sur l'avis de droit de ABK______, des griefs ont été notifiés à AAL______ pour invalider le décret du 30 mars 2006 (PP 500'160 et 500'165).

q.c) Par décret présidentiel du 28 juillet 2008, AAL______ s'est vue retirer 50 % de ses concessions de Simandou, soit les blocs 1 et 2 (PP 500'175 ou 5'001'862). Les parties intéressées à les exploiter pouvaient déposer une demande de permis. Ce décret a été adressé à AD______ GE et classé dans ses dossiers (B 2.1.2).

Entendu dans le cadre de la présente procédure, ABL______, ingénieur des mines et conseiller au ministère des mines en 2008, a déclaré que ce décret avait été rendu par le Président AAO______. Ni le ministre des mines ni ses autres collègues au Ministère n'avaient évoqué ce décret auparavant. Un tel décret était "une première" pour lui (PP 500'196).

Le lendemain, soit le 29 juillet 2008, ABI______, secrétaire général de la Présidence, a été limogé. Il sera désigné ministre d'Etat chargé des activités Présidentielles avant d'être limogé le lendemain, soit le 4 août 2008, pour la deuxième fois en quatre jours.

Le 5 août 2008, CGR______ a déposé des demandes de permis de recherche sur les blocs 1 à 4 (PP 3'002'066).

Le 15 août 2008, ABK______ a été limogé.

Le 27 août 2008, le Président AAO______ a limogé le Ministre des mines ABG______, opposé au retrait des droits de AAL______ (PV ABG______, PP 500'203; sentence arbitrale, no 633), et a désigné à sa place ABM______. ABG______ a déclaré dans la présente procédure qu'il pensait que son intégrité constituait un obstacle pour certaines personnes (PV, PP 500'207).

q.d) Début septembre 2008 (AAU______ parle de septembre ou octobre 2008, PP 300'938bis; ABM______ parle du 4 ou 5 septembre 2008, PP 500'924), Monsieur C______ et AAU______ ont rencontré, une nouvelle fois, le Président AAO______. La rencontre s'est déroulée dans la maison du Président dans le village de Buramaya. Il a été question de l'exploitation des blocs de Simandou, le Président ayant ajouté qu'il était juste de retirer les permis octroyés à AAL______, mais que cette décision était plus du ressort du gouvernement que du sien. Le Président a, alors, appelé le Ministre des mines nouvellement désigné, ABM______, afin que les blocs 1 et 2 soient attribués à CGR______ (PV ABM______ GE, p. 2, PP 500'217; PV ABM______ Cour d'appel de Conakry, p. 2, PP 4'200'119; ABM______ LCIA, sentence arbitrale no 563, PP 3'002'151, 3'002'171).

ABM______ a déclaré (PV ABM______, p. 2, PP 500'217, PV ABM______ Cour d'appel de Conakry, p. 2; WS ABM______ § 6-22, sentence arbitrale no 564 PP 3'002'151 et no 628.5 PP 3'002'171) que Madame E______, l'épouse du Président, était présente à cette réunion et qu'elle mettait la pression sur le Président, tout comme K______, pour que les permis soient retirés à AAL______ et octroyés à CGR______. Même si elle ne disait rien, Madame E______ était présente car elle était démarchée par CGR______ (PV ABM______, p. 2, PP 500'217; CIRDI ABM______, PP 500'926).

Le Ministre AAI______ (WS AAI______, § 40, sentence arbitrale no 562, PP 3'002'151) a relevé le niveau d'interférence inhabituel de CGR______ et du Président sur les affaires du Ministère en regard des blocs 1 et 2 (First WS AAI______, § 40, sentence arbitrale no 562, PP 3'002'151).

Par courrier du 6 novembre 2008, AAU______, pour le compte de CGR______ GUINEE, a sollicité du Ministre des mines l'octroi des concessions retirées à AAL______ en application du protocole d'accord conclu le 20 février 2006 avec la Guinée et l'a informé du désintérêt de CGR______ sur les zones Nord et Sud de Simandou (PP 5'001'871).

Le 4 décembre 2008, conformément aux instructions donnée par le Président (cf. ci-dessus; déclaration ABM______ dans la procédure arbitrale: "le Conseil des Ministres n'aurait pas pris cette décision si le Président n'avait pas donné les instructions de le faire", sentence arbitrale no 563, PP 3'002'151), le Conseil des Ministres a ordonné au ministère des mines le retrait de la moitié des concessions de AAL______, soit des blocs 1 et 2, et leur octroi à CGR______ GUINEE.

q.e) Par arrêté 2008/4080 daté du 9 décembre 2008, signé par ABM______, CGR______ GUINEE s'est vu octroyer les permis de recherche sur les blocs 1 et 2 (PP 5'006'815verso).

Le lendemain, l'avion utilisé par Monsieur C______ s'est rendu en Guinée (PP 300'814).

Le 11 décembre 2008, AAU______ a demandé à AX______ de payer USD 100'000.- à ABN______, alors Ministre des finances (ancien ministre du budget, futur ministre des mines et actuel premier ministre de Guinée), en lui communiquant les coordonnées bancaires et en précisant:

"Has [been] approved by ______.", soit "a été approuvé par ______".

Dans le cadre de la procécure CIRDI, AX______ a précisé que "______" était Monsieur C______ (AX______ CIRDI, p. 58 no 44-45, PP 5'013'782).

Le 15 décembre 2008, CGR______ TREASURY SERVICES a payé à ABN______ USD 100'000.- pour des frais de consulting (consulting fees) sur son compte bancaire, en France, auprès de la Banque 5______ (PP 5'010'962). CGR______ a également payé à ABN______ des frais de voyage pour sa famille et lui à hauteur de USD 23'592.10 (sentence arbitrale, no 465.2, PP 3'002'131) ainsi que des frais de consulting de EUR 80'000.-, le 5 février 2009 et, enfin, des frais de voyage, entre avril 2009 et février 2010, pour USD 18'536.76 (sentence arbitrale, no 465, PP 3'002'131; WS AX______, PP 5'006'253, p. 9).

ABN______ a, par la suite, demandé à Monsieur C______ d'engager sa fille au sein de ses sociétés; Monsieur C______ s'est tourné vers AC______ et lui a demandé de faire le nécessaire (PP 5'010'965; PP 301'628). Quant à Madame B______, elle s'est occupée du visa de ABN______ lors de sa venue en Europe (WS LCIA Madame B______, PP 301'628).

Le 22 décembre 2008, le Président AAO______, gravement malade depuis plusieurs mois, est décédé. Madame E______ a quitté la Guinée et est partie en exil à Freetown, en Sierra-Leone.

Avant de partir de Guinée, Madame E______, qui craignait que les accords conclus ne soient pas respectés, a transmis une copie de ceux-ci à ABO______, qui en a informé ABN______ (conversation ABP______-ABO______, PP 350'318; rapport DLA PIPER, PP 349'790; mémo retrouvé chez AAB______, PP 350'540, p. 2; conversation Monsieur K______ du 08.05.12; ABO______ a également, à son tour, donné une copie des contrats à ABQ______, qui les a montrés à AAU______, AC______ CIRDI audition 23.05.2017 p. 104).

Par la suite Madame E______ épousera et aura deux enfants avec le sergent-chef ABR______ (PP 500'966), neveu de ABN______ (PP 4'200'068 et conversation du 02.12.2012 ABP______-ABO______, 46:29; PV Madame E______, PP 500'691).

r) Année 2009

Après la mort du Président AAO______, les militaires ont pris le pouvoir en Guinée, sous la direction du Capitaine ABS______ et, après la tentative d'assassinat manquée du précité le 3 décembre 2009 et le "massacre du stade" le 28 septembre 2009, sous la direction du Général ABT______.

ABN______ a recruté le banquier américano-guinéen ABP______, résidant alors à New-York, pour être ministre des mines et celui-ci est entré en fonction le 15 janvier 2009.

s) Restructuration et effacement des intermédiaires

s.a) Etape 0: constitution de CGR______ GUINEA (Guernesey)

 

Conformément à son business model, CGR______ a commencé à chercher des partenaires pour l'exploitation des gisements de fer de Simandou (PP 5'000'075). Monsieur C______ a rencontré divers potentiels repreneurs. Ainsi, des discussions ont été entamées avec ABU______ (projet Stone), ABV______ (projet Sunshine, en décembre 2009, Monsieur C______ s'est rendu en Chine avec AAU______, AAA______ et AX______ pour finaliser les termes de l'accord, PP 300'615), ABW______, ABX______ puis, ultérieurement, ABY______ (project Hills). En effet, CGR______ devait s'assurer le soutien d'un partenaire financier suffisamment important pour mener à bien l'ensemble des projets (PP 300'614).

Dans cette perspective, CGR______ a modifié sa structure, en deux étapes (février 2009 et mars 2010) et donné des instructions afin que les intermédiaires utilisés (AAV______, ABZ______) ne soient pas dévoilés dans le cadre des procédures de due diligence qui seraient menées par les partenaires contractuels.

AX______ a soumis un plan de proposition de la restructuration notamment à Madame B______ pour qu'elle le complète sur certains points (cf. CGR______ GUINEA: Proposed restructuring and step plan, PP 306'391; emails, PP 306'396).

s.b) Etape 1 : transfert des droits miniers

Dans une première étape, CGR______ GUERNESEY a acheté une société - constituée le 10 février 2009 - au nom identique à la société existante CG______ RESOURCES (GUINEA) LTD, mais domiciliée à Guernesey et non aux BVI. CGR______ GUERNESEY détenait CGR______ GUINEE (Guernesey), qui sera la cocontractante de ABY______ (sentence arbitrale, PP 3'002'068; classeur B.2.1.4).

Madame B______, déjà administratrice de CGR______ GUINEE (BVI), a été désignée administratrice de la nouvelle société CGR______ GUINEE (Guernesey) (PP 305'118; cl. B.2.1.3 et B.2.1.4).

Le 17 février 2009, les permis miniers ont été transférés de CGR______ GUINEE (BVI) à CGR______ GUINEE (Guernesey). De la sorte, CGR______ STEEL et CGR______ GUINEE (BVI) (lesquelles avaient interagi avec AAV______) n'étaient plus parties au projet Simandou (sentence arbitrale, PP 3'002'068).

Madame B______ s'est occupé de tous les aspects corporatifs de la restructuration (cf. i.e. courriel du 10.02.2009 à AX______, Cl. B.2.1.4). Elle a signé, à Genève, et conservé tous les documents nécessaires pour ce faire, soit:

-        La cession des actions de CGR______ SARL appartenant à CGR______ GUINEE (BVI) à CGR______ GUINEE (Guernesey) (PP 305'111 et ss, PP 305'118);

-        Le transfert du prêt de CGR______ TREASURY SERVICES envers CGR______ GUINEE (BVI) à CGR______ GUINEE (Guernesey), Madame B______ signant pour les trois sociétés (PP 305'124).

Le 23 février 2009, CGR______ GUINEE (Guernesey), soit pour elle Madame B______ et AJ______, ont octroyé un prêt de USD 50 millions à CGR______ GUINEE SARL, soit pour elle AAU______, prêt augmenté à USD 75 millions, le 25 août 2009, montants financés par CGR______ TREASURY SERVICES (contrat signé par Madame B______ pour le compte de CGR______ TREASURY SERVICES et de CGR______ GUINEE (Guernesey) (cl. B.2.1.4).

Par courriel du 21 avril 2009 (PP 5'011'053), AX______ a exigé que toute trace relative aux deux premiers versements effectués à AAV______ soit effacée des rapports. Ainsi, il a instruit son service de comptabilité (ACA______) de retirer immédiatement ("ASAP") du rapport sur les coûts en Guinée les montants de USD 3 millions et USD 1 million. Il a insisté sur le fait qu'aucune référence ne soit faite sur le rachat des 17.65 %, demandant à son interlocutrice avec fermeté (le message étant en gras) si l'instruction était claire. Par ailleurs, ce message comportait l'inscription manuscrite suivante (PP 5'011'053, voir également PP 5'011'056; à relever qu'une série de paiements a été effectuée par CGR______ TS à ABZ______ entre les 18 février 2009 et juillet 2009 totalisant plus de USD 630'000.-, PP 3'002'122; pour les paiements ultérieurs cf. transactions 2 et 3 sufra, PP 500'645 et 3'002'129):

-          "remove ABZ______'s name from Guinea Spreadsheet"

soit en traduction libre: "retirez le nom de ABZ______ du rapport sur la Guinée".

Dans un message ultérieur (PP 5'011'055), AX______ a précisé au service de comptabilité, à Guernesey (AJ______ et ACA______), qu'aucun nom de consultant ne devait être mentionné et a ajouté:

"Also under no circumstances should any details relating to payments to AAV______, past or pending or future be sent to anyone inside Guinea without speaking with me first",

soit en traduction libre: "En aucune façon, des informations concernant des paiements en faveur de AAV______, faits en cours ou à faire, ne devaient être communiquées à quiconque en Guinée sans m'en parler en premier".

Dans des messages des 26 et 27 avril 2009, AX______ a rappelé à AJ______ et ACA______ que le nom des personnes auxquelles des frais de consulting étaient payés était une question sensible (par exemple ABZ______) et qu'il convenait dès lors de lui demander son avis avant de mentionner ce genre de détails dans des rapports ("What is sensitive is the names in respect of consulting fees paid (...) I am referring to cases where CGR______ TS pay on behalf of newco consulting fees to for eg ACZ______ or others (...)".

s.c) Etape 3 : vente de CGR______ STEEL et CGR______ GUINEE (BVI) à CG______MM

Dans la mesure où ABY______ avait étendu le champ de sa procédure de due diligence (sentence arbitrale, no 685, PP 3'002'189), fin mars 2010, CGR______ STEEL et CGR______ GUINEE (BVI) ont été transférées à CG______ METALS & MINING (CG______MM), détenue par W______. De la sorte, elles ne seront pas impliquées dans la vente à ABY______(sentence arbitrale, PP 3'002'068).

Madame B______ a signé le contrat de cession du 31 mars 2010 pour le compte de la société venderesse CGR______ GUERNESEY et pour le compte de la société acquéreuse CG______MM (cl. B.2.1.10).

Madame B______, en sa qualité d'administratrice de X______, administratrice de CGR______ GUINEE (BVI), a voté (classeur B.2.1.1):

-        la dissolution de CGR______ GUINEE (BVI)

-        s'est désignée liquidatrice de CGR______ GUINEE (BVI) et

-        a constaté la liquidation de CGR______ GUINEE (BVI).

Les comptes non audités au 31 mars 2010 de CGR______ GUINEE (Guernesey) sont trompeurs (PP 4'900'147). En effet, ils font apparaître une confusion voulue entre CGR______ GUINEE (BVI), partie à la convention de base de décembre 2009, et CGR______ GUINEE (Guernesey), qui a repris les droits miniers. En effet, les comptes ne mentionnent pas qu'il s'agit des comptes de l'entité de Guernesey, qui n'était pas partie à la convention de base ni la cession intervenue.

t) ABP______

Par décision du 5 mai 2009, ABP______ a confirmé la validité du permis octroyé à CGR______ sur les blocs 1 et 2 (PP 5'000'207).

Il ressort notamment de courriels échangés, entre les 24 et 26 mai 2009, que Monsieur C______ entretenait des rapports directs étroits avec ABP______ (PP 5'010988ss; voir également le courriel du 05.11.10 PP 5'002'276), notamment en lien avec de futurs partenaires contractuels (PP 5'010'988).

Par arrêté du 10 juin 2009 signé par ABP______, les permis de recherches sur les blocs 1 et 2 ont été renouvelés (PP 5'000'207).

En août 2017, ABP______ a été condamné à 7 ans de prison aux Etats-Unis pour avoir accepté des pots-de-vin à hauteur de USD 8'500'000.- en lien avec des titres miniers octroyés à une société chinoise.

Dans le cadre de la procédure arbitrale londonienne (LCIA), ABY______ a soutenu que ABP______ avait reçu divers avantages financiers et cadeaux de la part de CGR______, dont de l'argent lui ayant permis d'acheter trois propriétés immobilières à New-York pour une somme totale de USD 5.27 millions (PP 3'002'067). Le Tribunal tiendra pour établi le versement d'importantes sommes d'argent à ABP______, sans considérer qu'il s'agissait de corruption en lien avec la Guinée (cf. sentence arbitrale, nos 643ss, PP 3'002'177).

u.a) Non-respect de l'accord du 24 mars 2008

CGR______ ne s'est pas acquittée de la troisième échéance de USD 9 millions due à AAV______, selon accord du 24 mars 2008 (rachat des 17.65%). Un litige s'en est suivi.

Par courriel du 8 avril 2009 (PP 5'011'120), AAB______ s'est adressé directement à Monsieur C______ pour l'informer que ses associés et lui-même n'entendaient pas modifier les termes de "notre accord" et qu'une facture serait adressée dans les deux ou trois jours. Il a ainsi écrit:

"Dear Monsieur C______,

Following your request to change the terms of payment of our contract i have consulted my partners and after reviewing all the aspects and all our commitments, we have decided not to change or to amend the terms, the amount and the dates of payment as per our agreement. We will send you an invoice in a day or two.

Wish you Hag Sameach.

AAB______"

Par courrier du 21 avril 2009 adressé à CG______ STEEL, AAV______ (PP 5'011'121), soit pour elle AAE______, a rappelé la troisième échéance désormais due. En réponse, par courrier du 8 mai 2009, Madame B______, pour le compte de CGR______ STEEL, a dénoncé des violations des obligations contractuelles de AAV______ (PP 5'011'123), ce qu'a contesté AAE______, pour AAV______ (PP 5'011'124). S'en sont suivis des échanges de courriers entre AAE______ et Madame B______ (PP 5'011'125, 5'011'143).

Dans les jours qui ont suivi, un nouvel échéancier de paiement a été discuté et négocié entre AAB______ et Monsieur C______ (Monsieur C______ asked me to give AAE______ a call, PP 5'011'145; he (AAB______) needs to talk to AAB______, PP 5'011'145; AAB______ will then call Monsieur C______, PP 5'011'145).

u.b) Litige AAM______

Parallèlement, AAM______ s'est plaint du non-respect de l'accord conclu le 20 février 2006.

Ce courrier a été transmis à Monsieur C______ (PP 349'012).

Début juin 2009, AAB______ et Monsieur C______ se sont rencontrés pour discuter de ce problème (PP 349'012). Monsieur C______ lui a alors montré la lettre reçue de AAM______ (PP 349'012).

Par courrier du 4 juin 2008, AAE______ a demandé à AX______ l'exécution du second versement dû, selon leur accord du 24 mars 2008. AX______ a transmis ce courrier à Monsieur C______, qui a été retrouvé dans l'avion de l'intéressé (PP 315'791).

A la suite de leur rencontre, le 7 juin 2009, AAB______ a écrit à Monsieur C______ ("Dear Monsieur C______", PP 349'012), sur l'adresse email de F______, pour lui confirmer s'être chargé de ce problème et que CGR______ n'encourrait aucune responsabilité vis-à-vis de AAM______. Le même jour, AAM______ et K______ ont signé un avenant au contrat du 20 février 2006, au terme duquel ils se désistaient de tout engagement pris avec AAV______ au profit de ABD______, AAV______ étant ainsi désormais liée à ABD______ (PP 5'011'148).

Le 8 juin 2009, AAB______ a confirmé, "comme promis à Monsieur C______" ("as promised to Monsieur C______", PP 349'011), que CGR______ était responsable des partenaires locaux, mais non de ceux hors Guinée, dont AAM______ faisait partie.

Le jour même (PP 349'011), F______ lui a répondu avoir parlé à Monsieur C______, qui se trouvait alors en voyage en hélicoptère en Roumanie, et le rencontrer à la première heure le lendemain pour finaliser la résolution du problème. AAB______ a alors répondu qu'il était inutile de le rappeler dans la mesure où Monsieur C______ aurait dû le rappeler le matin même et que, malgré diverses rencontres avec Monsieur C______, CGR______ ne s'était pas acquittée du paiement dû à AAV______.

Le 11 juin 2009, des échanges de courriers ont encore eu lieu entre AAE______ et Madame B______, agissant tant pour le compte de CGR______ GUINEE (PP 5'011'158) que pour CGR______ STEEL (PP 5'011'156).

Le 15 juin 2009, AAB______ s'est entretenu au téléphone avec Monsieur C______ et s'est engagé à ce que AAV______ assume toute responsabilité vis-à-vis de AAM______ (PP 5'011'161). Un engagement écrit a été finalisé entre F______ et AAB______ (PP 5'011'163); Monsieur C______, qui se trouvait en Afrique, en a été informé (PP 5'011'163).

Le 17 juin 2009, AAE______, pour le compte de AAV______, s'est adressé à Madame B______ et a invalidé l'accord du 28 mars 2008 (PP 5'011'170). CGR______ a dès lors recouru à ses avocats et AAV______ en a fait de même (PP 5'011'189). L'avocat suisse de AAV______ s'est adressé à Madame B______ chez AD______ FINANCIAL ADVISORS SA, à Genève (PP 5'011'179).

Le 20 juillet 2009, Monsieur C______ a rencontré le Président de Guinée, soit le Capitaine ABS______ (PP 5'011'189).

Le 25 juillet 2009, AAV______ s'est engagé à assumer la responsabilité du litige avec AAM______ et, le lendemain 26 juillet 2009, un nouvel accord a été conclu entre CGR______ et AAV______ au sujet de sa rémunération. Ainsi, les USD 9 millions dus, selon accord du 24 mars 2008, seraient payés en deux fois, soit USD 4 millions immédiatement et USD 5 millions d'ici au 31 décembre 2009. Le dernier versement de USD 9 millions devait être payé au 15 avril 2011.

Par facture du 26 juillet 2009, AAE______, agissant pour AAV______, a sollicité le versement du montant sur le compte ABJ______ auprès de la banque 4______, en Israël (PP 350'595). Le 28 juillet 2009, CGR______ TREASURY SERVICES a versé les USD 4 millions.

Par courrier du 30 novembre 2009 (PP 349'015), AAM______ s'est adressé à "AAA______, PDG de CGR______, et à Monsieur A______, directeur de AAV______" pour réclamer le solde dû selon le contrat du 20 février 2006, alors même qu'il avait renoncé à ses droits précédemment. Il a sollicité le paiement du solde de USD 15.2 millions et, à défaut, il actionnerait CGR______ en justice.

Ce courrier du 30 novembre 2009, traduit en anglais (PP 349'013) par courrier du 3 décembre 2009, a fait l'objet d'une réponse de AJ______, par lequel il a nié tout lien entre l'intéressé et CGR______ (courrier retrouvé chez AD______ GE, cl. B.2.1.11).

Le 31 décembre 2009, CGR______ a suspendu le paiement dû à AAV______, selon accord du 24 mars 2008, modifié le 16 juin 2009, vu le litige avec AAM______.

Par courriel du 31 décembre 2009, AAB______ a informé AJ______ et Monsieur C______ que ses partenaires et lui-même s'occupaient du litige avec AAM______. Il a souligné que le précité n'avait rien à voir avec le contrat conclu entre AAV______ et CGR______. Le nécessaire était fait pour que l'intéressé n'importune pas CGR______ et les opérations de CGR______, "comme promis à Monsieur C______" ("as part of our promise to Monsieur C______", PP 349'009).

Le 15 mars 2010 (PP 500'101), se référant à son courrier du 30 novembre 2009, AAM______ a réitéré auprès de AAE______ et de Monsieur A______ sa requête en paiement. Il a mentionné avoir signé le contrat avec AAV______ en raison des liens qui unissaient cette société à CGR______. Il a rappelé qu'à l'époque, Monsieur A______ s'était présenté dans ses bureaux de Bamako avec AAF______. Il les avait présentés à son tour au Ministre AAN______, qui les avait introduits auprès de Madame E______ et de K______. Ainsi, les activités de CGR______ avaient pu être mises en place grâce à son réseau, ce qui justifiait l'exécution de l'accord conclu.

Par courriel du 16 mars 2010, AX______ a demandé à Madame B______ de traduire ce courrier du 15 mars 2010 (PP 500'100).

Le 26 mars 2010, se référant aux requêtes de AAM______, AAA______ a informé AJ______, en parlant du précité, que "ce con" ("schmuck") du Mali avait envoyé un courriel à tout le monde pour réclamer de l'argent (sentence arbitrable, no 533, PP 3'002'144).

Madame B______ a admis avoir reçu de la correspondance de AAM______, qu'elle avait envoyée à CGR______.

Le 4 mai 2010, Monsieur A______ s'est entretenu au téléphone avec AAM______ pour tenter de trouver une issue au différend (PP 5'011'205).

Par engagement du 10 mai 2010 ("indemnity letter"), AAE______ et AAB______ se sont engagés vis-à-vis de CGR______ STEEL et de toutes les sociétés affiliées à assumer toute responsabilité vis-à-vis de AAM______ (PP CRI AAB______).

Le 12 mai 2010, AAM______ s'est adressé à Monsieur A______ pour refuser la proposition de paiement de USD 1 million pour solde de tout compte et a menacé de divulguer la manière dont CGR______ avait été introduite en Guinée, "comment Madame E______ et toi, vous avez manipulé et fait chanter tout le monde par vos méthodes mafieuses et criminelles" (PP 5'011'205).

Le Tribunal ignore la suite qui a été réservée aux prétentions de AAM______.

v) Arrestation de AAU______

AAU______ a été arrêté durant quelques heures par un général ayant servi sous le régime de AAO______, lequel soutenait que CGR______ devait à Madame E______ et à lui-même de l'argent en exécution des accords conclus avec la précitée. Il a rapporté l'incident à ABP______ (First WS AAU______, §105, 108; PP 300'618, § 177).

w) Rachat des 5 % de Madame E______ / USD 4'000'000.-

La participation promise à Madame E______ n'a jamais été transférée à l'intéressée.

Début août 2009, l'adjudant-chef ACB______, responsable de la sécurité pour CGR______, et le sergent-chef ABR______ - futur époux de Madame E______ - ont rencontré Madame E______ à Freetown pour lui faire signer un accord sur la reprise de sa participation (PP 500'966).

Le 2 août 2009, Madame E______ a signé une attestation (PP 5'011'031), au terme de laquelle elle indique avoir finalisé avec CGR______ le paiement d'un montant de USD 4 millions en échange de sa participation de 5 % en lien avec ses "prestations fournies pour l'obtention des titres miniers en faveur de la société CGR______ en terre guinéenne", montant payable en quatre échéances de USD 1 million chacune.

x) Transaction 2

x.a) ABZ______ est un homme d'affaire libanais actif en Guinée. Il possède la société S______ SARL (S______), active dans les télécommunications, l'électricité, les infrastructures et les équipements en Guinée (PP 500'188).

Par courriel du 17 août 2009, AX______ a informé AJ______ qu'un paiement de USD 1'300'000.- devait être effectué en faveur de ABZ______ en lien avec les "charges en Guinée" ("Guinea-pls load") (PP 5'011'056). Une heure après, le même jour, il a transmis les coordonnées bancaires à utiliser pour ce "consultant" ("consulting fees") avec la précision que le code ordinaire ne devait pas être utilisé ("... NOT the regular ones-code ...", PP 5'011'057).

Le lendemain 18 août 2009, CGR______ TREASURY SERVICES a versé USD 1'300'000.- (dont à déduire les frais) sur le compte de S______, soit la société de ABZ______, auprès de la Banque 6______ (PP 503'250-1). De ce montant, USD 1 million a été reversé à Madame E______ de la manière suivante:

-        Le 20 août 2009, ABZ______ a instruit sa banque de verser USD 998'000.- à "MATILDA" (PP 503'251), son compte ayant été débité du même montant (PP 503'250). Il a justifié ce versement par l'achat de deux engins de chantiers (facture sans en tête du 25 juillet 2009 avec mention des coordonnées bancaires, soit la Banque 8______, à Freetown, mais sans nom du bénéficiaire, PP 503'252; déclaration d'importation des engins, avec la mention du fournisseur comme étant MITILDA&CO LTD, PP 503'253, avec un délai de livraison des machines, mais qui n'atteste pas de la livraison effective des machines (cf. en ce sens également sentence arbitrale no 452.6 PP 3'002'127).

-        Le 28 août 2009, soit 11 jours après le courriel de AX______, ABD______ & CO LTD a établi une facture sur papier en-tête de la société portant sur deux engins de chantiers pour un total de USD 998'000.- à créditer sur son compte auprès, cette fois, de la Banque 8______, à Freetown (PP 503'256).

-        Le paiement n'ayant pu être effectué, ABZ______ a changé le nom du bénéficiaire et a demandé à sa banque que les USD 998'000.- soient versés à Madame E______, au lieu de "MATILDA LTD" (PP 503'255). L'ordre a été exécuté.

-        ABD______ a établi une deuxième facture, datée du 20 décembre 2009, de USD 2'000, portant sur la réparation d'un circuit de contrôle pour un engin de chantier, à créditer sur son compte auprès de Banque 8______, à Freetown (PP 503'262). L'ordre a été exécuté le 30 décembre 2009.

Le 4 novembre 2009, Madame E______ a transféré des fonds d'Afrique aux Etats-Unis pour acheter au prix de USD 489'900.- la résidence dans laquelle elle réside actuellement sur ______, en Floride (www. https://star.worldbank.org; annexe au courrier de Me ALPHA______ du 15.08.18).

AAU______ a déclaré (First WS AAU______, § 121) que CGR______ avait demandé à S______ SARL de lui fournir deux engins de chantier et ignorait que la précitée s'était tournée vers Madame E______ pour les obtenir.

Il n'existe pas d'instructions d'achat d'engins de chantier de CGR______.

Entendue dans le cadre de la présente procédure (PP 500'717), Madame E______ a déclaré n'avoir jamais rencontré ni fait d'affaires avec ABZ______. AAU______ lui avait dit qu'il allait lui verser USD 1 million immédiatement, sur les USD 4 millions convenus. Madame E______ s'était rendue à la Banque 8______, à Freetown, pour ouvrir un compte à son nom puisque sa société ABD______ n'avait pas encore été créée. Un monsieur l'avait aidée à fabriquer les deux factures à l'en-tête de ABD______ et avait regardé sur internet le nom des Caterpillar en anglais.

Quant à ABZ______, il a déclaré (CRI Suisse en Guinée PP 500'187 et procédure guinéenne PP 4'200'093) ne pas connaître Monsieur A______, AAB______, AAE______ ou la société AAV______. CGR______ lui avait proposé d'acheter des machines de chantiers, qui auraient servies à l'ouverture de routes en Guinée. Il avait reçu une facture de ABD______, dont CGR______ lui avait indiqué qu'il s'agissait du fournisseur des machines, facture reçue dans les locaux de CGR______, en Guinée. Il avait reçu USD 1 million sur le compte de S______ et avait donné l'instruction d'en transférer USD 998'000.- sur le compte indiqué sur la facture. Il y avait eu un problème de bénéficiaire. CGR______ lui avait alors transmis les coordonnées bancaires de Madame E______. Il n'avait jamais reçu livraison des machines de chantier et n'avait pas payé les taxes d'importation en Guinée de ces machines. Aucun contrat n'avait été signé concernant la vente de ces machines de chantier.

Entendu dans le cadre de la présente procédure, Monsieur C______ a déclaré ignorer l'existence de cette transaction. Il ne connaissait pas ABZ______ et, au surplus, il rappelait qu'il n'avait pas de tâches opérationnelles au sein de CGR______, dont il n'était qu'un conseiller (PV, PP 500'487, 500'550).

Quant à Madame B______, elle n'était pas non plus au courant de cette transaction, précisant au demeurant, que ce genre d'opérations n'était pas de sa responsabilité (PV, PP 500'488, 500'548).

x.b) Transaction 2 / Appréciation des faits

Les prévenus soutiennent que le montant de USD 1 million reçu par Madame E______ de ABZ______ n'a pas été payé par CGR______ et que CGR______ n'avait pas connaissance de l'affectation ultérieure de cette somme à Madame E______. Cette allégation n'est pas crédible et est démentie par les éléments suivants.

x.b.a) Il ressort des mouvements bancaires que le paiement de USD 1 million à Madame E______ par ABZ______ provient de CGR______.

x.b.b) Les cinq contrats ont été conclus les 14 et 20 février 2020 et sont intrinsèquement liés entre eux. Ainsi, CGR______ s'est engagée à céder une participation à AAV______, sous la forme de 17.65 % de l'actionnariat de la société qui serait détentrice des droits miniers, en gardant néanmoins la maîtrise des actions par le biais d'un rapport de fiducie.

Madame E______ se voyait céder une participation de 5 % dans la société exploitante, par le biais d'une participation dans AAV______.

Dans le même temps, USD 19.5 millions étaient promis par CGR______ à AAV______, alors que AAV______ promettait ces mêmes USD 19.5 millions à des intermédiaires (AAM______/ K______/AAF______) selon le même échéancier que celui prévu dans le contrat entre AAV______ et CGR______. Enfin, un accord était conclu entre CGR______ et la Guinée, le même jour, portant sur le même objectif que les trois contrats conclus entre, d'une part, AAV______ et, d'autre part, AAM______/K______, AAF______ et Madame E______, soit le fer de Simandou. Une cérémonie a suivi la signature de ce contrat en présence de AAM______/K______ et AAF______.

CGR______ était informée de la conclusion de ces accords. En effet, comme mentionné, ces contrats étaient intrinsèquement liés, la première échéance avait été payée à AAM______/K______ et AAF______, mais non à AAV______, alors que les contrats entre AAV______ et AAM______/K______ et entre AAV______ et Madame E______ avaient été transférés à Madame B______, qui avait préféré octroyer une procuration à AAE______, plutôt que de signer elle-même les contrats (sur cette question de la connaissance par Madame B______ de ces contrats, cf. supra).

D'ailleurs, pour assurer la participation de Madame E______ dans le projet, de nouveaux contrats ont été signés, les 27 et 28 février 2008, directement par CGR______ GUINEE SARL avec Madame E______, via sa société ABD______, dans la mesure où CGR______ s'apprêtait à racheter la participation de AAV______.

Les actions de CGR______ GUINEE ont été transférées à AAV______, avant d'être rachetées par CGR______, alors que les actions promises à Madame E______ n'ont jamais été transférées.

L'attestation du 2 août 2009 s'inscrit dans la logique des accords préalablement conclus.

Dans cette attestation du 2 août 2009, Madame E______ a indiqué avoir trouvé un accord avec CGR______ portant sur la reprise de sa participation, soit un versement de USD 4 millions, comme le prévoyait le contrat du 27 février 2008. Le même mois, CGR______ a fait verser à Madame E______, par l'intermédiaire ABZ______, la première tranche des USD 4 millions promis. Restait dès lors à verser à Madame E______ le solde de USD 3 millions.

Ainsi, le versement de USD 1 million par ABZ______ a consisté en l'exécution des accords des 20 février 2006, 27 février 2008 et de l'attestation du 2 août 2009.

Aucun autre motif ne peut expliquer ce versement.

A cet égard, il sera relevé que les USD 1.3 million versés par CGR______ à ABZ______ auraient été payés à titre de frais de consultant, mais des frais de consultant ne se justifient pas. En effet, ABZ______, via S______, s'occupe de logistique et de fourniture, mais en aucun cas de consulting.

Par ailleurs, AX______ a cherché à cacher le motif de ce paiement dans la comptabilité.

Le Tribunal relève, également, les factures successives avec de faux noms pour arriver au paiement voulu (MATILDA puis directement Madame E______).

Il n'existe aucune preuve de la livraison des machines de chantier. La déclaration descriptive guinéenne d'importation du 17 aout 2009 (PP 503'273) n'est pas une preuve d'importation, dès lors qu'elle n'atteste pas de l'import effectif des machines Caterpillar.

Il n'apparait pas que Madame E______, alors en exil en Sierra Leone, fournissait des machines de chantier. D'ailleurs, Madame E______ n'a jamais fourni de machines de chantier ou été active dans ce domaine. Tout au plus, l'intéressée a reçu, à une reprise, du sucre et, à une reprise, du poulet surgelé.

Les USD 2000.- ne sont que le complément des USD 998'000.- pour arriver à USD 1 million et la justification avancée (la réparation d'un circuit de contrôle pour un engin de chantier) est absurde.

Le Tribunal relève la coïncidence, pour le moins improbable, que ABZ______ se soit précisément tourné, à l'insu de CGR______, vers Madame E______ pour acheter des machines de chantier.

ABZ______ ne connaissait pas Madame E______ et n'avait pas de relations d'affaires avec elle, préalablement aux deux versements (soit celui de USD 1 million et celui de USD 2 millions, dont il sera question ci-après).

Par ailleurs, CGR______ s'est attachée à effacer ou supprimer toute référence à ABZ______ et à garder son rôle secret dans le cadre de la vente à ABY______ (cf. sentence arbitrale nos 434ss, sur le rôle de ABZ______ 452ss).

ABZ______ sera utilisé une seconde fois pour agir comme intermédiaire dans le versement d'une somme d'argent à Madame E______ (transaction 3).

Outre le versement de USD 1.3 million et de USD 2 millions (dont il sera question ci- après), de nombreux versements ont été effectués par CGR______ à ABZ______, parfois en passant par un intermédiaire, ACC______, et un compte bancaire en Belgique. Les versements sont en contradiction avec l'activité réelle de ABZ______ (fournisseur en Guinée versus conseils), sur des comptes différents de ceux mentionnés sur le contrat, les paiements en question étant urgent et "ronds"(cf. PP 500'645ss; sentence arbitrale nos 434ss, sur le rôle de ABZ______ 452ss; PP 304'1445x et y).

Enfin, les déclarations de ABZ______ et de Madame E______ sur l'origine des fonds sont crédibles, en tant qu'elles sont corroborées par les autres éléments de preuve figurant à la procédure.

Il résulte de ce qui précède que CGR______ savait que le paiement de USD 1 million à ABZ______ était destiné à Madame E______.

ABZ______ a agi comme un intermédiaire de CGR______ dans le paiement de USD 1 million à Madame E______, montant dû en exécution de l'accord conclu sur le rachat de la participation de Madame E______ dans le projet Simandou (USD 4 millions, payables en 4 tranches en échange de la participation de 5 %).

y) Octroi des concessions sur les blocs 1 et 2

y.a) Le 17 septembre 2009 a eu lieu le mariage de la fille de Monsieur C______ en Israël. Ont été invités (cf. liste des invités venant de l'étranger, PP 5'011'001):

-        ABS______ (cf. déclaration Monsieur C______),

-        ABP______,

-        Me GAMMA______,

-        AC______,

-        Madame B______,

-        AAA______.

Par ailleurs, CGR______ TREASURY SERVICES a payé le billet d'avion de ABP______ pour s'y rendre et pour se rendre ensuite à Hong-Kong (PP 5'011'003-4).

y.b) Le 17 novembre 2009, CGR______ a soumis à la Guinée une étude de faisabilité de 450 pages du gisement de fer de Zogota, qui concluait à l'exploitabilité dudit gisement (Simandou Sud, distinct de la zone Sud Simandou) (PP 5'000'072, 5'000'217).

Par arrêté du 1er décembre 2009 pris par ABP______ (PP 5'000'671, retrouvé également dans les locaux de AD______ GE, cl. B.2.1.2), une commission a été chargée d'examiner l'étude de faisabilité déposée. Des enveloppes d'argent ont été distribuées aux membres de la commission. La commission a conclu, le 6 décembre 2009, à l'attribution d'une concession à CGR______ et à l'adoption d'une convention minière (PP 5'000'072, vice-président de la commission: ABK______; ABK______ est avocat de CGR______ en 2012, PP 5'000'690, et est l'avocat de K______ dans le cadre de la procédure guinéenne).

Le 16 décembre 2009, la convention de base (convention minière) a été conclue entre CGR______ GUERNESEY, CGR______ GUINEE et la Guinée, laquelle octroyait les concessions d'exploitation sur les blocs 1 et 2 et sur la zone de Zogota. Par ailleurs, il était prévu d'évacuer le minerai par le Libéria, la viabilité économique du projet dépendant de la possibilité d'exporter le minerai de fer par ce pays plutôt que par la Guinée (PP 300'613).

Le 19 mars 2010, la convention de base a été ratifiée par décret présidentiel du Général ABT______ (PP 5'000'677) et les concessions ont été octroyées (PP 5'000'679).

Les originaux de la convention de base et le décret y relatif ont été conservés par Madame B______ dans les locaux de AD______ GE.

Le même jour, soit le 19 mars 2010, par décret 2010/024, une concession a été octroyée sur le gisement de Zogota.

y.c) Comptes de CGR______ GUERNESEY

Par résolution du 30 décembre 2009, Madame B______ a décidé de ne pas auditer les comptes de CGR______ GUERNESEY au 31 décembre 2009. Ainsi, elle a signé les résolutions, pour le compte de W______ et pour le compte de AD______ BVI, titulaire de 1 action à titre fiduciaire pour W______ (cl. B.2.1.11). Pourtant, ERNST & YOUNG avait été désigné à cet effet (PV du 18.09.09, B.2.1.11). Madame B______ et AJ______ ont approuvé les comptes (cl. B.2.1.11) sur la base d'une recommandation du comité d'audit, à laquelle AX______ a participé.

Il en a été de même s'agissant des comptes au 31 décembre 2010. Par résolution signée par Madame B______, CGR______ GUERNESEY n'a pas audité ses comptes au 31 décembre 2010 (cl. B.2.1.11).

En revanche, CGR______ GUERNESEY a établi des comptes consolidés pour la première fois pour l'exercice 2010, lesquels sont erronés s'agissant des paiements à AAV______. Ces comptes ont été signés par Madame B______, il en sera question ci-après (PP 500'136).

y.d) Vente à ABY______

Conformément à son business model, CGR______ avait besoin d'un partenaire pouvant investir et offrir l'expérience technique nécessaire au développement du projet. Elle a approché ABY______, qui s'était déjà montrée intéressée par le projet Simandou et était déjà en contact avec AAL______ (offre faite le 14.11.2008 à AAL______ et présentation faite par AAL______ le 24.11.2008: aspects stratégiques présentés - transport puis réunions ultérieures. PP 3'000'253ss), pour négocier la reprise des concessions minières et une éventuelle joint-venture.

Le 22 février 2010, les parties ont signé un "non disclosure agreement" et ABY______ a entamé sa procédure de due diligence, laquelle comprenait, entre autres, une attestation établie par F______ de non-corruption et une attestation produite personnellement par Monsieur C______ (sentence arbitrable, PP 3'002'072). Des réunions ont eu lieu entre les parties à Rio de Janeiro, dans les locaux de ABY______, pour discuter de la joint-venture envisagée, réunions auxquelles Monsieur C______, AAU______, AX______ et F______ ont pris part. CGR______ a donné la garantie à ABY______ que les concessions avaient été obtenues conformément à la loi (sentence arbitrable, PP 3'002'072).

A relever que ABY______ est cotée à la NY Stock Exchange et doit donc se conformer au FCPA (Foreign Corrupt Practices Act).

Dans un courrier du 19 mars 2010, le ministre ABP______ a salué la future joint-venture entre CGR______ et ABY______ et confirmé que CGR______ détenait valablement les concessions sur les blocs 1 et 2 et sur Zogota (PP 5'000'730).

Le 15 avril 2010, CGR______ a conclu un accord avec le Libéria visant le développement d'infrastructures de chemin de fer et portuaire en eau profonde afin d'exporter le minerai de fer (Liberian Transport Solution) (PP 300'619). Les sociétés CGR______ (LIBERIA) LTD et CG______ RESOURCES (LIBERIA) LTD, détenues par CGR______ GUERNSEY, étaient impliquées dans le projet (PP 3'002'108; contrat du 15 avril 2010 retrouvé dans les locaux de AD______ GE, cl. B 2.1.2). Entendu dans le cadre de la présente procédure, Monsieur C______ a déclaré avoir rencontré la Présidente du Libéria à trois reprises en lien avec cette solution (PV, PP 500'565).

Le 16 avril 2010, ABP______ a donné son accord à la joint-venture envisagée (PP 5'000'731).

Le 28 avril 2010, la fondation V______ a donné son accord à la transaction (PP 306'496).

Un programme de conformité anti-corruption a été signé (cf. copie chez AD______, cl. B.2.1.6).

Le 30 avril 2010, CGR______ GUERNESEY, qui détenait CGR______ GUINEE (Guernesey), et ABY______ ont conclu un contrat de joint-venture (Joint-Venture Framework Agreement) et une convention d'actionnaire. La première citée cédait 51 % de ses actions moyennant versement de USD 2.5 milliards, dont USD 500 millions à verser immédiatement.

ABY______ a versé les USD 500 millions à CGR______ GUERNESEY (comptes consolidés, PP 500'135) et, sur ce montant, USD 349'500'717 ont été reversés à W______ en "remboursement d'un prêt", selon les comptes consolidés de CGR______ GUERNESEY (PP 500'135).

L'entité nouvellement créée a été renommée ACD______ GUINEA (PP 5'000'735). AC______ en était l'administrateur.

AAA______ a été engagé par CGR______ GUERNESEY, soit pour elle Madame B______ et AJ______, payé USD 254'020.- par an (cl. B.2.1.10).

A la suite de cet accord, des bonus ont été versés aux "employee" de CGR______ (PP 500'139), soit notamment:

-        USD 450'000.- à K______

-        USD 150'000.- à Madame B______

-        USD 3'000'000.- à AC______ via une off-shore

-        USD 2'000'000.- à AAA______ via une off-shore

-        USD 2'500'000.- à AAU______

-        USD 600'000.- à F______ via une off-shore

-        USD 800'000.- à AX______ via AZ______ (PP 5'006'192 et 4'901'021)

-        USD 180'000.- à AJ______ et

-        entre USD 90'000.- et USD 200'000.- aux comptables (ACE______, ACF______, ACA______).

Il sera relevé que AX______ a reçu USD 800'000.- comme mandataire de CGR______, alors qu'en 2010, il n'a fourni, via sa société AZ______, des services que pour USD 177'058.- (PP 500'138).

AAU______ a précisé avoir reçu un bonus de USD 7 millions résultant de la vente à ABY______, en juin 2010 (déclaration police israélienne, PP 4'900'037).

Par ailleurs, le 1er juillet 2010, la fondation V______ a accepté de verser un bonus à AD______ BVI de USD 2.5 millions, soit 0.5 % des 500 millions payés par ABY______ à CGR______ (PP 306'491) (note: 0.5% x 500 mio = 2.5 mio).

Quant à Monsieur C______, en 2010, il a reçu de la fondation V______ USD 94 millions destinés à être investis dans sa société AB______ REAL ESTATE (PP 306'477), hors donations pour les dépenses courantes qui se sont élevées, de mai à décembre 2010, à USD 9.3 millions (classeur B.2.1.4.). A cela s'ajoute sa rémunération de USD 400'00.- l'an pour V______ PP classeur B.1.1.21) et de USD 700'000.- l'an pour CGR______ GUERNESEY (PP 300'750).

y.e) Paiement AAV______

Vu l'accord conclu avec ABY______, CGR______ a payé le solde des échéances dues à AAV______ totalisant USD 22 millions (cf. accord du 24 mars 2008, modifié ultérieurement), soit USD 14 millions (5 mio solde 3ème échéance + 9 mio 4ème échéance), auxquels s'est ajouté le bonus prévu de USD 8 millions en cas de profit supérieur à USD 1 milliard (clause 5), soit un montant total de USD 22 millions.

Par ailleurs, AAB______ a négocié avec Monsieur C______ un paiement supplémentaire de USD 4.5 millions, les animateurs de AAV______ reprochant à CGR______ un rachat "au rabais" de la participation de AAV______ de 17.65 % (PP 300'616).

AX______ s'est entretenu, directement, avec ABE______, le protector de AAV______, pour les formalités administratives en lien avec ce paiement (cf. courriel du 14.05.2010 de ABE______ à MOSSACK FONSECA & CO, PP 357'2229).

Le 5 mai 2010, AAV______ a ouvert son premier compte bancaire en Israël (PP 350'596).

Par facture du 10 mai 2010, AAE______, agissant pour AAV______, a sollicité le versement des USD 22 millions sur le compte de AAV______ nouvellement ouvert (P 4'500'600).

Le 17 mai 2010, AE______, une société de CGR______ détentrice in fine d'une aciérie à Bakou via ACG______, a payé les USD 22 millions et, le lendemain, ce montant a été distribué, à parts égales, entre Monsieur A______ et ses associés (3 débits de USD 7 mio, PP 4'500'593).

Ce paiement de USD 22 millions est apparu dans les comptes consolidés de CGR______ GUERNESEY comme étant un investissement et relatif à l'achat d'une aciérie à Baku (cf. note 11 des comptes, "purchase of ACG______ plant") en lien avec un contrat passé avec CGR______ STEEL (PP 500'135-6).

Le 5 août 2010, AAE______, agissant pour AAV______, a sollicité le versement des USD 3 millions sur le même compte de AAV______, en Israël (facture, PP 350'598). Par courriel du 5 août 2010, AAE______ a envoyé sa facture à AX______ pour paiement, lequel a instruit AJ______ et ses comptables de payer la facture, en précisant que AE______ paierait pour le compte de CGR______ STEEL (PP 5'011'423). Le 5 août 2010, AE______ a payé la somme due à AAV______ (PP 5'011'423 courriel, 5'011'424-5-6, 5'011'428); les instructions de paiement à la banque mentionnent que ce montant est relatif à des frais de consulting sur des opportunités d'investissement pour CGR______ en Afrique (PP 5'011'426).

Ce paiement de USD 3 millions est apparu dans les comptes consolidés de CGR______ GUERNESEY comme étant en lien avec l'achat de l'aciérie à Baku et avec le CEO de ACG______, ACH______ (cf. note 18 des comptes, ACH______ consulting expense USD 170K general funding plus USD 3m funding for AAV______ deal, PP 500'135-6).

Par facture du 13 mars 2011, AAE______, agissant pour AAV______, a sollicité le versement des USD 1.5 million sur le même compte de AAV______ (PP 350'600). Le 22 mars 2011, AE______ a payé la somme due à AAV______ (PP 5'011'475, 5'011'476, 5'011'479).

Entendue dans le cadre de la présente procédure, Madame B______ a expliqué que AE______ détenait la société ACG______, qui elle-même détenait une aciérie en Azerbaïdjan (note: ACG______ COMPANY LLC est la plus grande société de métallurgie du Caucase) (cf. WS AX______ dans le même sens, PP 5'006'255). Elle ne comprenait toutefois pas cette référence relative à l'achat d'une aciérie à Baku. Il n'avait jamais été question de vendre cette aciérie à AAV______. Il n'y avait aucun lien entre ACG______, respectivement le CEO de cette société, ACH______, et le projet de CGR______ (PP 500'129).

Au total, CGR______ a payé à Monsieur A______, AAB______ et AAE______ USD 34.5 millions:

-        USD 3'000'000.- le 15 avril 2008 par CGR______ STEEL

-        USD 1'000'000.- le 16 juin 2008 par CGR______ STEEL

-        USD 4'000'000.- le 28 juillet 2009 par CGR______ STEEL

Ø    Fin mars 2010: fin de la restructuration de CGR______

Ø    30 avril 2010: vente à ABY______

Ø    5 mai 2010, ouverture nouveau compte auprès de la banque 4______, en Israël

-        USD 22'000'000.- le 17 mai 2010 par AE______

-        USD 3'000'000.- le 5 août 2010 par AE______

-        USD 1'500'000.- le 22 mars 2011 par AE______

--------------------

USD 34'500'000.-

(cf. note manuscrite retrouvée chez M. AAB______ fait état de USD 34'663'000.-, somme totale reçue de CGR______, PP 350'625 et détail des paiements PP 500'131).

Dans le cadre de la procédure arbitrable, AAB______ a déclaré avoir reçu la plupart des USD 30 millions en échange de la participation dans CGR______ GUINEE. Dans la mesure où Madame E______ devait recevoir 33% des actions de AAV______ (donc une participation de 5 % dans le projet Simandou), il trouvait juste que Madame E______ reçoive environ USD 10 millions (WS AAB______, sentence arbitrale PP 3'002'076).

Quant à Monsieur C______, il a déclaré, dans la présente procédure, avoir été informé que AAV______ ne payait pas "sa part de l'investissement", alors qu'elle s'était engagée à investir à hauteur de 17.65 % dans le projet, et elle estimait ne rien devoir. Il devait y avoir un "malentendu" et il avait conseillé au Conseil d'administration de se défaire d'un associé qui ne voulait pas payer sa part et racheter celle-ci (cf. PV, PP 500'271). Il y avait eu de nombreuses discussions sur la valeur de la participation de AAV______. AAB______ s'était rendu en Israël en parler avec lui. A une reprise, il était même venu le voir accompagné de AAE______. Le prix de USD 22 millions avait été fixé après estimation d'une valeur potentielle de CGR______ GUINEE de USD 150 millions et un bonus de USD 8 millions avait été négocié en cas de rachat supérieur à USD 1 milliard de CGR______ GUINEE (cf. PV, PP 500'272).

Le 1er mai 2011, AAV______ a été radiée.

En 2014, AE______ a été radiée.

z) Transaction 3

z.a) Le 18 mai 2010, USD 2 millions ont été déposés, en espèces, sur le compte de Madame E______ auprès de la Banque 9______, à Conakry (PP 503'265).

ABZ______ a effectué ce versement (PP 503'263).

ABZ______ a déclaré (CRI Suisse en Guinée PP 500'187 et procédure guinéenne) que CGR______ l'avait informé vouloir arrêter ses activités au Libéria et rapatrier l'argent du Libéria en Guinée. Un directeur des opérations de CGR______ l'avait informé qu'un certain ACI______ viendrait le trouver pour verser des espèces sur le compte de CGR______ auprès de la Banque 9______, à Conakry. ABZ______ devait convaincre la banque, qui le connaissait, d'accepter les fonds. Une fois à la banque, ACI______ lui avait demandé de signer une quittance de dépôt faisant ainsi croire que ABZ______ versait les USD 2 millions. Il n'avait pas vérifié l'identité du bénéficiaire des fonds, qu'il savait désormais être Madame E______. Il avait remis la quittance à la comptabilité de CGR______.

A la suite de cette audition, par courrier du 2 août 2016, le conseil de Monsieur C______ a produit à la procédure une attestation écrite, rédigée en français et datée du 1er août 2016 (PP 301'313) dans laquelle ACF______, citoyenne russe et ancienne comptable de CGR______ SARL, à Conakry, a déclaré avoir lu la déclaration de ABZ______ et n'avoir jamais entendu parler d'un certain ACI______. CGR______ SARL n'avait jamais demandé à quiconque de verser de l'argent en espèces à des tiers.

Bien que dûment convoquée à deux reprises par le Ministère public genevois pour être entendue, ACF______ ne s'est jamais présentée (PP 502'154 et 502'215).

z.b) Transaction 3 / Appréciation des faits

La défense soutient que les 2 millions reçus de ABZ______ par Madame E______ n'ont rien à voir avec CGR______. Cette allégation n'est pas crédible et est démentie par les éléments suivants.

z.b.a) Ce versement de USD 2 millions intervient dans le prolongement du versement préalable de USD 1 million effectué par CGR______ par l'intermédiaire de ABZ______.

Il est effectué en exécution des accords des 20 février 2006, 27 février 2008 et de l'attestation du 2 août 2009.

Pour le surplus, certains des éléments mentionnés dans le versement précédent de USD 1 million (transaction 2) peuvent être repris, soit:

-        Aucun autre motif ne peut expliquer ce versement;

-        La coïncidence pour le moins improbable que ABZ______ se soit précisément tourné, à l'insu de CGR______, vers Madame E______;

-        L'absence de relations d'affaires préalables entre les intéressés;

-        L'utilisation préalable de ABZ______ dans le versement de la première échéance due à Madame E______ (transaction 2);

-        L'utilisation de ABZ______ dans d'autres versements;

-        Le soin mis par CGR______ pour effacer ou supprimer toute référence à ABZ______ et garder son rôle secret dans le cadre de la vente avec ABY______;

-        Aucune documentation contractuelle ne justifie ce versement;

-        La crédibilité des déclarations de ABZ______ et de Madame E______ sur l'origine des fonds en tant qu'elles sont corroborées par les autres éléments de preuve figurant à la procédure.

L'attestation établie par ACF______ doit être examinée avec retenue. Aucun des paiements effectués à Monsieur A______, AAB______ et AAE______ ou à Madame E______ ne l'a été par CGR______ GUINEE SARL. ACF______ n'a jamais été impliquée dans les versements effectués aux précités et des instructions claires avaient été données par AX______ sur le fait qu'aucune référence ne devait être faite des paiements effectués à des "consultants", tel que ABZ______. Par conséquent, le fait que ACF______ n'ait pas été au courant, le cas échéant, du dépôt en espèces de USD 2 millions sur le compte de Madame E______ et sur la remise éventuelle à CGR______ de la quittance de dépôt, comme avancé par ABZ______ dans sa déclaration, n'ébranle pas la crédibilité des explications de ABZ______ sur ce point, qui sont confirmées, au demeurant, par la réception des fonds sur le compte de Madame E______.

Enfin, il sera relevé que le versement de USD 2 millions, et non de USD 1 million comme prévu dans l'accord (versement de USD 4 millions en quatre échéances de USD 1 million), peut éventuellement s'expliquer par l'écoulement du temps et possiblement le non-respect d'une échéance antérieure, étant relevé que le 31 décembre 2009, CGR______ avait suspendu le paiement dû à AAV______ en raison du litige avec AAM______.

Ainsi, il doit être retenu que CGR______ a utilisé l'intermédiaire ABZ______ pour verser USD 2 millions à Madame E______.

Le solde de USD 1 million (4 - 1 - 2 = 1) ne sera pas versé eu égard à la dénonciation de l'accord du 2 août 2009 par Madame E______ et à la conclusion d'un nouvel accord portant sur le versement de USD 5.5 millions. En effet, Madame E______ aura connaissance de l'accord conclu avec ABY______ et réclamera, à l'instar de AAM______ ainsi que de Monsieur A______ et de ses associés, le versement d'un montant supplémentaire à celui initialement convenu. Il en sera question ci-après.

a) Dénonciation de l'accord

Le 8 juin 2010, Madame E______, par le biais d'un huissier de justice, ACJ______, a écrit à CGR______ pour dénoncer l'accord conclu le 2 août 2009. Elle a sollicité l'exécution des accords des 27 et 28 février 2008 (PP 349'017).

Par courrier du 20 juin 2010 (PP 348'795 et 300'617), K______ - sollicité par AAU______ - a répondu à ACJ______ et a nié tout accord conclu entre CGR______ et ABD______.

Le 23 juin 2010 (PP 349'023), ACJ______ a retiré ses propos et soutenu que Madame E______ avait détruit les "documents inventés".

AAB______ s'est rendu à Freetown négocier un montant supplémentaire avec Madame E______.

Le 8 juillet 2010, deux contrats ont été signés, le premier prévoyant le versement de USD 5.5 millions par AAV______ à ABD______ (PP 348'800) et le second un montant supplémentaire de USD 5 millions en lien avec l'opération menée par "nos partenaires au projet Simandou" (PP 500'975). Le contrat portant sur USD 5.5 millions était libellé de la manière suivante:

"Notre contrat de collaboration signé en 2005 est arrivé à son terme.

Notre rôle de conseiller et d'apporteur d'affaire pour tous nos projets en Guinée dans les domaines commerciaux, minier et médical ont été menés de manière professionnelle et avec grand succès.

Le rôle de la société ABD______ & CO LTD a contribué à la grande réussite de nos affaires mutuelles.

Suite à votre décision d'arrêt de vos activités en Guinée, nous sommes arrivés à un accord comme suit:

La société ABD______ & CO LTD recevra la somme de 5.5 millions pour sa part dans toutes les activités menées en Guinée. (...)

La société ABD______ & CO LTD, Mme Madame E______, ses partenaires et conseillers s'engagent par la présente à remettre tous les originaux & copies des documents et contrats signés avec la société AAV______ HOLDING LTD & ses partenaires concernant le projet SIMANDOU en Guinée".

Par courriel du 26 juillet 2010, Monsieur A______ a adressé à AAB______ une attestation qui devait être signée par Madame E______ concernant le versement des USD 5.5 millions (PP 349'346), texte effectivement signé par la précitée (PP 348'804).

Les deux contrats du 8 juillet 2010 ont ensuite été remplacés par deux nouveaux contrats datés du 3 août 2010 (PP 500'979 et 500'977) qui ne faisaient cette fois plus référence au projet Simandou (cf. projet avec annotations, PP 348'816; contrat original signé et texte original signé retrouvé chez AAB______, classeur B.2.8).

Madame E______ a confirmé avoir reçu 2.4 millions (PP 500'971) et un nouveau contrat a été conclu pour le solde de USD 3.1 millions (PP 500'968) (2.4 + 3.1 = 5.5).

La somme de USD 5.5 millions devait être versée en cinq fois, selon l'échéancier suivant retrouvé chez AAB______ (PP 349'148), soit :

500'000 USA 1st transactions 4, 5, 6

1'900'000 GUIN 2nd transaction 7

100'000 ? 3rd ACK______ (pas dans l'AA)

2'000'000 ABF 4th transactions 8, 9, 10, 11

1'000'000 GUIN 5th transaction 8

5.5

D'autres notes manuscrites de AAB______ (cf. PP 348'760, 348'759) précisent que les montants de USD 1.9 millions et USD 100'000.- ont été versés en espèces.

AAB______ a établi d'autres notes sur la manière dont cette somme serait versée, distinguant les paiements reçus de AX______, soit de CGR______, de ceux dus à Madame E______ (cf. notamment PP 500'596 ou 348'760-1). Ainsi AX______ (soit AX______, CFO de CGR______) devait verser:

-        500 AAV

Ø  Transactions 4, 5, 6, montants versés via les trois associés de AAV______

-        1'900 GUI

Ø  Transaction 7, montant versé en Guinée

-        100 GUI

Ø  Transaction qui ne figure pas dans l'AA, versement via ACK______

-        1'500 AAV

Ø  Transactions 9, 10, 11, montants versés via ACL______

-        1'500 ACM

Ø  Transaction 8, montant versé via N______

Ces montants correspondent à ceux qui seront versés à Madame E______ (en italique ci-dessus et décrits ci-après).

b) Transactions 4, 5 et 6

La première tranche, mentionnée "500 AAV" dans le décompte de AAB______, de USD 500'000.- a été versée de la manière suivante:

-        Le 21 juillet 2010, AAE______ a transféré USD 150'000.- (note: USD 150.- de frais, PP 503'268) depuis son compte auprès de la banque 4______ en Israël en faveur de Madame E______ sur son compte auprès de Banque 10______, à Miami (PP 503'269),

-        Le 5 août 2010, AAE______ a transféré USD 100'000.- (note: USD 150.- de frais, PP 503'268) depuis son compte auprès de la banque 4______ en Israël en faveur de Madame E______ sur son compte auprès de Banque 10______, à Miami (PP 503'270),

-        Le 22 juillet 2010, Monsieur A______ a transféré USD 100'000.- (note: USD 150.- de frais, PP 503'271) depuis son compte auprès de la banque 4______ en Israël sur son compte auprès de Banque 10______, à Miami (PP 503'272) et un chèque a été tiré en faveur de Madame E______ le 2 août 2010 (PP 503'274, 503'275),

-        Le 5 août 2010, Monsieur A______ a transféré USD 50'000.- (note: USD 150.- de frais, PP 503'271) depuis son compte auprès de la banque 4______ en Israël sur son compte auprès de Banque 10______, à Miami (PP 503'272) et un chèque a été tiré en faveur de Madame E______ le 8 août 2010 (PP 503'274, 503'276),

-        Le 21 juillet 2010, AAB______ a transféré USD 100'000.- (note: USD 150.- de frais, PP 503'277) depuis son compte auprès de la banque 4______ en Israël sur son compte auprès de Banque 10______, à Miami (PP 503'278) et un chèque a été tiré en faveur de Madame E______ le jour même (PP 503'279).

Le 30 juillet 2010, ACJ______ a écrit que "suite aux négociations menées d'accord parties et de l'acte de règlement du 08/07/2010" la dénonciation de l'attestation du 2 août 2009 était nulle (PP 5'002'010).

Madame E______ a déclaré que l'argent transféré ci-dessus par Monsieur A______, AAB______ et AAE______ était l'argent de CGR______ (PP 500'721). AAB______ était venu lui rendre visite à Miami et lui avait dit que "Monsieur C______" leur avait demandé de lui verser l'argent. AAB______ et Monsieur A______ lui avaient conseillé d'investir dans l'achat de maisons à Miami (cf. CRI AAB______ pour les projets immobiliers, B.2.8, B.2.11).

Entendus dans le cadre de la procédure, Monsieur C______ et Madame B______ ont déclaré ignorer ces mouvements de fonds et être étrangers à ces opérations (PV, PP 500'489).

c) Transaction 7

La deuxième tranche, mentionnée "1900 GUI" dans le décompte de AAB______, a été versée par la remise en espèces de USD 1.9 millions à ABR______, mari de Madame E______, le 17 septembre 2010, sur le compte de la précitée auprès de la Banque 9______, à Conakry (PP 503'264, 503'284-5).

Madame E______ a signé une attestation confirmant la réception de USD 2.4 millions, comprenant donc ces USD 1.9 millions (250K + 150K + 100K + 1.9 mio) (PP 500'971). Un nouveau contrat a été conclu pour le solde de USD 3.1 millions (USD 2.4 + 3.1 = 5.5) (PP 500'968).

Entendus dans le cadre de la procédure, Monsieur C______ et Madame B______ ont déclaré ne pas connaître ABR______ et ne rien savoir sur ce versement d'argent (PV, PP 500'490).

d) Versement ACK______

La troisième tranche de USD 100'000.-, mentionnée "100 GUI" dans le décompte de AAB______, a été transférée à Madame E______ sur son compte en Guinée par ACK______, un courtier immobilier de Floride (cf. "j'ai vu 100M que vous m'avez envoyé", PP 503'281 et 503'281 de MT à FC "j'ai bien reçu l'email de ACK______"; PP 348'759).

Entendus dans le cadre de la procédure, Monsieur C______ et Madame B______ ont déclaré ne pas connaître ACK______ (PV, PP 500'490).

e) Transactions 8, 9, 10, 11

Cinquième tranche

18.07.11 1 mio à Conakry Transaction 8a

 

Quatrième tranche

11.10.2011 500'000 ABF___ Transaction 8b

11.01.2012 250'000 ABF___ Transaction 9

11.01.2012 150'000 ABF___ Transaction 10

14.05.12 936'451 ABF___ Transaction 11

 

e.a.a) Transaction 8a et 8b N______

S'agissant des 1500 N______ mentionnés dans le décompte de AAB______, soit la cinquième tranche, ils correspondent aux USD 1.5 million qui sont parvenus par le biais de N______ à Madame E______. A cet égard, le Tribunal fait les développements qui suivent.

Le 8 octobre 2008 (PP B.2), la société N______ a été constituée aux Iles Vierges Britanniques par MOSSACK FONSECA & CO. (BVI) LTD. Deux administrateurs de paille ont été désignés, alors que l'actionnaire était une fondation de droit panaméen, ACN______, agissant par le biais d'une société de droit panaméen, AAW______. La même société de gestion de fortune que celle utilisée pour AAV______ - AAY______ SA, agissant par le biais de ABE______ -, était désignée protector, alors que Monsieur A______ était désigné premier bénéficiaire de la fondation et s'est vu attribuer une procuration générale avec signature individuelle.

Par courriel du 15 juin 2011 (PP 502'056bis), AAB______ a fait parvenir à D______ une facture datée 13 juin 2011 de N______ à O______ GLOBAL LTD (ci-après: O______) pour des services de conseil ("advisory et consulting work in Southern Africa", PP 4'300'388) au sud de l'Afrique pour 2010-2011 pour USD 1.5 million. AAB______ faisait référence à une conversation téléphonique qu'il avait eue avec AX______:

"Following my telephone conversation with AX______ find attached our invoice".

En traduction libre: "faisant suite à la conversation téléphonique avec AX______ , ci-joint notre facture".

D______ a demandé à son directeur financier, ACO______, de payer la facture (email du 16 juin 2011, PP 502'056bis).

Le lendemain 16 juin 2011, le compte personnel de D______ auprès de la banque 11______, à Kiev (PP 503'287, 4'104'069) a payé cette somme de USD 1.5 million en faveur de O______, dont D______ est l'ayant-droit économique, auprès de Banque 12______, à Zurich (PP 353'003, 503'289).

Le 20 juin 2011, ce même montant (aucun mouvement entre les deux dates, PP 353'421) a été transféré à N______ sur son compte auprès de la Banque 13______, à Nassau (ci-après Banque 13______) (PP 353'004, instructions PP 503'290, auxquelles était jointe la facture du 13 juin 2011).

A ce moment, Banque 12______ n'a posé aucune question relative à ce transfert.

e.a.b.a) S______

Il convient de faire un détour par S______, la société de ABZ______, en Guinée, l'intermédiaire utilisé pour le paiement de USD 3 millions à Madame E______ (transactions 2 et 3) et à ACC______.

Le 30 novembre 2011 (PP 502'037), AAU______ a fait parvenir au directeur financier de D______, ACO______, un nouveau contrat de conseil pour approbation avant que le consultant ne le signe. AAU______ a relancé son interlocuteur le 1er décembre 2011.

Le 1er décembre 2011, le directeur financier a demandé à AAU______ de lui transmettre les coordonnées du bénéficiaire et la facture.

Le 13 décembre 2011 (PP 502'038), AAU______ a informé ACO______ que tous les documents lui avaient été envoyés et l'a relancé le 15 décembre 2011.

Le 16 décembre 2011 (PP 502'038), ACO______ a informé AAU______ que les instructions avaient été données à la banque, mais que l'ordre n'avait pas été exécuté car le contrat joint n'était pas lisible. Le 19 décembre 2011, il lui a demandé de lui renvoyer le contrat par télécopie, ce qui a été fait le lendemain.

Le 20 décembre 2011, O______ a payé USD 625'000.- à S______. Le gestionnaire du compte de Banque 12______ a expliqué à son service compliance que le transfert était en lien avec des conseils sur des possibilités d'investissements en Afrique (PP 3'534'599).

e.b.b) Facture et contrat S______

Selon une facture du 15 octobre 2011 (PP 502'036), S______ a facturé à O______ ses services USD 625'000.- pour des conseils en lien avec des projets d'investissements en Guinée ("GUINEA"). Le montant devait être payé auprès de la Banque 8______, à Conakry.

Selon un contrat du 3 novembre 2011 (PP 502'034), soit postérieur à l'établissement de la facture, S______ a conclu avec O______ un contrat de conseil moyennement le paiement de USD 625'000.-, en lien avec de nouvelles opportunités d'investissement en Afrique, contrat de durée indéterminée qui prenait effet en janvier 2011.

e.a.c) N______ - Madame E______

Le 6 juillet 2011, Madame E______ a demandé à Monsieur A______ de lui transférer USD 1 million (PP 503'303 ou 500'988), étant précisé qu'elle avait déjà formulé sa requête le 16 juin 2011 auprès de ACK______, à charge pour lui de transmettre l'information à AAB______ (PP 349'093).

Monsieur A______ a instruit Banque 13______ de débiter le compte de N______ de USD 1 million (transaction 8a) en faveur de Madame E______ auprès de Banque 9______, à Conakry (PP 4'300'390; débit PP 503'296; crédit de USD 991'495.25, PP 503'304). Sur demande du service compliance de Banque 13______, ABE______, le gestionnaire de fortune de Monsieur A______, a expliqué que Madame E______ était la personne en Guinée à qui Monsieur A______ payait une commission (PP 4'300'390), après que Monsieur A______ l'a informé que ce paiement était en rapport avec le contrat dont il lui avait parlé quelques années auparavant (note: entre AAV______ et CGR______, cf. PP 500'048), que ABE______ n'avait pas vu (PV ABE______ du 17.10.2013, PP 500'048-9).

Entendue par le Ministère public genevois (PP 500'722), Madame E______ a déclaré que le montant de USD 1 million demandé à Monsieur A______ faisait partie de l'argent que CGR______ lui devait. De manière générale, tout l'argent reçu de AAV______, Monsieur A______, AAB______ ou AAE______ était l'argent que CGR______ lui devait.

Le 12 septembre 2011, Monsieur A______ a instruit Banque 13______ de débiter le compte de N______ de USD 500'000.- en faveur de ACL______, dont l'ayant droit économique est ABF______ (PP 4'300'377).

Par courriel du 18 septembre 2011, Madame E______ a demandé à Monsieur A______ de lui verser USD 500'000.- sur son compte aux Etats-Unis (PP 503'325). Monsieur A______ lui a répondu que l'argent se trouvait chez l'avocat et qu'il convenait de lui adresser une instruction en ce sens (PP 503'325), lui envoyant ensuite un modèle d'instruction (PP 503'326), ce qui sera fait à l'aide du cousin de ACP______ (PP 503'329, 503'328).

En janvier 2012, Madame E______ a acheté deux propriétés immobilières à Jacksonville en Floride, sur Pierce Arrow Drive et sur Fern Hammock Drive, au prix de USD 128'000.- respectivement USD 128'750.- (www. https://star.worldbank.org; annexe au courrier de Me ALPHA______ du 15.08.18).

Entre février et décembre 2013, Madame E______ a acheté du matériel pour ouvrir un marché et un restaurant pour un peu plus de USD 300'000.- (www. https://star.worldbank.org; annexe au courrier de Me ALPHA______ du 15.08.18).

e.a.d) Procédure genevoise P/12914/2013

Le 26 septembre 2014, alors que la procédure pénale genevoise était ouverte, le Ministère public genevois a ordonné à Banque 12______ de produire la documentation du compte O______.

Le service compliance de Banque 12______ s'est alors tourné vers le gestionnaire du compte O______ pour lui demander des clarifications sur les mouvements de fond (les USD 625'000.- ou les USD 1.5 millions, cf. PP 6'000'148).

Le 19 février 2015 (PP 6'000'148), le gestionnaire du compte O______ s'est, à son tour, tourné vers ACO______ pour avoir ces informations.

Le 1er mars 2015 (PP 500'263), le Ministère public genevois a précisé la mise en prévention des prévenus en lien notamment avec ce versement de USD 1.5 million.

Le 1er mars 2015, également (PP 6'000'151), ACO______ a répondu au gestionnaire du compte O______. Il lui a expliqué que N______ et S______ faisaient partie du groupe de sociétés de CGR______. D______ avait avec CGR______ des projets immobiliers et dans le métal en Ukraine ainsi que dans le pétrole et le gaz en Israël. Les deux transferts de USD 1.5 million et USD 625'000.- avaient été effectués sur instructions de CGR______ pour payer des consultants dans le cadre de possibles projets en Tanzanie, au Mozambique, au Nigeria, au Zimbabwe et dans les Iles Comores, projets qui n'avaient pas aboutis.

e.a.e) Audience du 3 mars 2016

Entendu par le Ministère public genevois le 3 mars 2016, Monsieur C______ a déclaré que D______ était un ami depuis 10 à 15 ans et qu'il faisait des affaires avec lui depuis 10 ans dans le pétrole en Ukraine, le gaz en Israël, l'agriculture en Ukraine, les mines de charbon et de fer en Ukraine. "Ils" avaient, soit CGR______, une "joint-venture pour l'Afrique" avec D______, sans société commune ni contrat, laquelle était basée sur "la confiance et l'amitié" (joint-venture non documentée et off balance sheet, PV Monsieur C______ du 22.05.2019, PP 502'799). D______ avait investi, sous forme de dépenses, USD 5 à 7 millions et CGR______ entre USD 10 et USD 15 millions. Il a précisé que tout était comptabilisé. A sa connaissance, Monsieur A______ n'avait pas d'affaires en commun avec D______.

Madame B______ a déclaré ignorer que D______ était un partenaire en Afrique. Elle ne pensait pas qu'un investissement de 5 ou 10 millions avait été fait, elle aurait été au courant si tel avait été le cas. Elle ignorait que D______ était partenaire dans les projets que Monsieur C______ lui mentionnait. Elle n'avait pas connaissance d'un accord écrit avec D______ ni que des procès-verbaux de conseils d'administration mentionnent celui-ci dans des projets communs.

Interrogé sur le paiement effectué par O______, Monsieur C______ a déclaré que son avocat, Me GAMMA, l'avait informé qu'une demande / enquête avait été faite à propos de D______ et d'une de ses sociétés au nom chinois. Il lui avait expliqué que AAV______ avait introduit CGR______ dans des pays voisins de l'Afrique du Sud, alors que CGR______ avait une joint-venture avec D______. Par conséquent, D______ avait payé AAV______. A l'époque, il avait su que AAV______ avait été payée, mais en ignorait les modalités.

Quant à Madame B______, elle ne se souvenait pas du contrat évoqué par Monsieur C______, soit l'accord avec AAV______.

e.a.f) Audience du 27 janvier 2017

Entendu par le Ministère public le 27 janvier 2017, (PP 500'491), Monsieur C______ a confirmé que la "joint-venture" entre D______ et CG______MM tenait une comptabilité. D'ailleurs, les USD 625'000.- versés à ABZ______ pour le travail qu'il avait accompli pour D______ en Tanzanie étaient comptabilisés. Il n'avait pas d'explication sur le fait que la facture du 13 juin 2011 mentionnait du travail en Guinée et non en Tanzanie.

Le Procureur a invité Monsieur C______ à produire les documents à l'appui de ses dires.

e.a.g) Production contrats

Par courrier du 2 mars 2017 (PP 302'026), Me GAMMA a fait parvenir au Ministère public (i) un courrier du 27 février 2017 de AC______ à son intention, (ii) un contrat du 4 janvier 2010 entre CG______MM et ABJ______, (iii) un amendement à celui-ci daté du 11 mai 2011 et (iv) un résumé des activités de la "joint-venture".

Ces documents ne figurent pas dans la documentation conservée par AD______ ni dans aucun de ses serveurs informatiques. En revanche, le contrat et son amendement ont été retrouvés au domicile de AAB______ lors de la perquisition du 14 mars 2017 (classeur B.2.10).

(i) Dans son courrier du 27 février 2017, AC______ a expliqué donner suite à la demande de Me GAMMA, laquelle était en lien avec l'audience de janvier 2017 et avoir examiné un certain nombre de documents, en particulier les documents susmentionnés sous (i) à (iii). Il a mis en avant la relation personnelle et de confiance qui prévalait entre D______ et Monsieur C______, laquelle avait conduit à des affaires communes, notamment un partenariat en Afrique, conduit sous la houlette exclusive de CG______MM, sur des projets dont aucun n'avait abouti.

(ii) Selon le contrat, CG______MM devait à ABJ______ un "carried interest" pour avoir apporté des opportunités d'investissements dans le sud de l'Afrique, "carried interest" que CG______MM pouvait décider d'acheter au prix de USD 500'000.- par projet au stade de la phase exploratoire des projets en question.

(iii) Selon son addendum du 11 mai 2011, CG______MM a fait valoir son droit et devait donc une somme de USD 1.5 million à ABJ______.

(iv) Selon le résumé des activités déployées dans le cadre de la joint-venture entre D______ et CG______MM (PP 302'037), la période d'activité s'étendait de juin 2011 à juillet 2013 en lien avec des projets dans neuf pays africains, dont aucun en Guinée. CG______MM avait investi USD 12'644'451.- (soit 71.5 % du total des investissements) et D______ USD 5'036'586.- (soit 28.5 % du total).

Le projet en Tanzanie avait débuté le 01.02.2012 (cf. également P 6'000155), et s'était terminé le 01.07.2013.

Le projet au Zimbabwe avait débuté le 01.09.2010 et s'était terminé le 01.11.2012 (voyage de D______ à Harare du 21 au 23.11.2011, PP 502'866ss).

Le projet en Sierra Leone avait débuté le 01.05.2011 et s'était terminé fin 2011.

Le projet en Zambie avait débuté le 01.11.2011 et s'était terminé, avant (sic!), le 01.09.2011.

Sur la base de ces documents, Me GAMMA a expliqué que CG______MM avait demandé à D______ de payer USD 1.5 million à N______ et USD 620'000.- à S______ pour le travail exécuté en Tanzanie, ce qui correspondait à sa part des investissements dans les projets en Tanzanie, au Zimbabwe, en Sierra Leone et en Zambie, soit USD 2'121'000.-.

e.a.h) AC______

Entendu dans le cadre de la présente procédure de manière contradictoire (PP 502'161), AC______ a expliqué que, pour rédiger son courrier du 27 février 2017, il ne s'était basé que sur un dossier qui lui avait été remis par l'avocat israélien de Monsieur C______. Il ne connaissait pas, avant de consulter le dossier remis, ce qu'il expliquait dans son courrier. Il n'avait pas connaissance d'un projet spécifique en Afrique dans lequel D______ aurait été impliqué; il l'avait appris par le biais du dossier qu'on lui avait remis.

e.a.i) AAA______

Entendu dans le cadre de la présente procédure de manière contradictoire (PP 502'226), AAA______ a indiqué que le contrat entre ABJ______ et CG______MM avait été discuté entre AAB______ et Monsieur C______. AAE______ le lui avait amené pour qu'il le signe, sans préciser quand.

e.a.j) AX______

Entendu dans le cadre de la procédure israélienne le 28 août 2017 (cl. B.4.5.8, PP 4'901'634 verso), AX______ a déclaré que, courant 2015, Monsieur C______ lui avait demandé de préparer un classeur sur des projets en Afrique qui n'avaient pas abouti puis d'établir un résumé comptable montrant les dépenses encourues dans le cadre d'un partenariat privé entre D______ et lui-même dans le cadre d'investissements communs. AX______ n'avait jamais vu, su ou entendu parler d'un partenariat entre D______ et Monsieur C______. Un tel partenariat ne figurait pas dans les comptes des sociétés de CGR______; seul CGR______ avait investi dans les projets en question. Il avait simplement compris que Monsieur C______ voulait encaisser de l'argent que D______ lui devait.

Une fois le résumé établi, Monsieur C______ avait demandé de modifier les chiffres mentionnés, en augmentant les dépenses; or, cela ne correspondait pas aux comptes clôturés et les changements demandés n'avaient aucune justification comptable. Par ailleurs, Monsieur C______ ne souhaitait pas que les comptes clôturés soient corrigés en conséquence.

Monsieur C______ lui avait demandé de se rendre dans ses bureaux de Herzliya, qu'il y avait rencontré D______ et ACO______, qui avait apporté une sorte de documentation sur de supposés investissements. Monsieur C______ avait également modifié les chiffres de D______.

Par la suite, Monsieur C______ lui avait demandé de préparer un contrat, ce qu'il avait refusé de faire. AAA______, le directeur général de CG______MM, avait été convoqué dans les bureau de Monsieur C______ à Herzliya pour signer ce contrat entre CG______MM et un tiers.

Monsieur C______ avait mentionné être satisfait de l'établissement du résumé/rapport entre D______ et lui-même car D______ avait un problème avec sa banque à l'étranger, sauf erreur la Banque 14______. Il s'agissait d'un paiement effectué à AAV______, d'après ce que AC______ lui avait précisé quelques temps après.

Confronté à cette déclaration devant le Ministère public genevois le 22 mai 2019 (PP 502'794), Monsieur C______ a rappelé qu'il s'agissait "entre D______ et moi d'une association légère, basée sur la confiance et scellée par une poignée de mains, qui portait sur des explorations à hauts risques et qui aurait dû être formalisée en cas de succès". Cette association était "off balance sheet", c'est-à-dire qu'elle ne figurait pas dans les comptes des sociétés; il a précisé "la comptabilité de mes relations avec D______ était à part".

Dès lors qu'il n'avait pas retrouvé la comptabilité de ce partenariat, il avait demandé à AX______ de "reconstituer la relation avec D______" pour faire suite à la demande de Me GAMMA et du Procureur genevois. Il en avait, au préalable, parlé avec AC______ et/ou AAA______, qui lui avaient recommandé de s'adresser à AX______ pour ce travail. Il a ajouté "c'était aussi parce que D______ était ma relation" et que AX______ se trouvait en Israël et parlait hébreu, ce qui facilitait la "reconstruction" de la comptabilité. En revanche, il a contesté avoir demandé à AX______ de modifier les chiffres.

e.a.k) D______

Le 3 septembre 2018, D______ s'est présenté, sur mandat de comparution, au Ministère public genevois, à Genève, et a été entendu en qualité de PADR de manière contradictoire (PP 501'966).

Il a déclaré avoir des projets en commun avec Monsieur C______ depuis 2004; il s'agissait d'un partenariat entre personnes, c'est-à-dire entre lui et le précité, sans qu'il n'y ait de joint-venture. Il avait fait des propositions de projets d'investissement en Afrique à Monsieur C______, qui les avait toutes déclinées. Il n'avait jamais eu de projets d'affaires en Guinée ni de partenaires économiques, pas plus qu'en Sierra Leone, au Mozambique ou en Zambie. Il avait eu un petit projet, sans lien avec Monsieur C______, en Tanzanie, dans une mine de cuivre et non d'or. Il a contesté avoir investi les sommes mentionnées par Monsieur C______ et a nié toute joint-venture. Il ne devait aucune somme à Monsieur C______ en lien avec des projets en Afrique.

Il ne connaissait ni Monsieur A______ ni AAE______ ni AAB______ et n'avait jamais fait d'affaires avec eux. Il avait versé de l'argent à N______ et à S______ à la demande de Monsieur C______. Il avait reçu la facture de AAB______, qu'il ne connaissait pas.

Le contrat du 3 novembre 2011 entre O______ et S______ avait été préparé par des personnes de CGR______ et transmis à ACO______, qui avait demandé à sa propre épouse, représentante de O______, de le signer. S______ n'avait jamais déployé d'activité pour lui ou ses sociétés.

D______ a expliqué (PP 502'073) que ACO______ lui avait rapporté les questions de la banque concernant les deux transferts. Il avait appelé Monsieur C______ et était allé le voir à Herzliya. Monsieur C______ lui avait proposé, pour justifier les transferts d'argent à N______ et à S______, de combiner ses projets en Afrique avec les siens propres et de faire croire à une structure, avec un partenariat de 70/30, ce qui était contraire à la réalité. Il avait mentionné son projet en Tanzanie, au Nigéria et aux Comores, alors que Monsieur C______ avait ajouté d'autres projets qui n'avaient pas abouti. Ils avaient encore trouvé d'autres projets qui n'avaient pas abouti (cf. note manuscrite sur en tête de CG______ INVESTMENTS, PP 6'000'154) et des courriels les étayant. Sur demande de Monsieur C______, il avait également trouvé des courriels permettant de montrer des contacts entre eux. Ainsi, la réponse donnée par ACO______ à la banque avait été préparée par Monsieur C______ sur la base d'une note que celui-ci avait établie, qu'il a produite (cf. PP 6'000'172).

Monsieur C______ a contesté les déclarations de D______ (PP 502'075), tout en reconnaissant que D______ l'avait appelé et lui avait mentionné la demande de la banque. Il lui avait conseillé d'appeler Me GAMMA pour savoir ce qu'il devait dire.

e.a.l) ABZ______

ABZ______ a été entendu, le 7 juillet 2015, sur commission rogatoire en Guinée.

Il a déclaré ne pas connaître D______ ni la société O______. Il lui arrivait d'autoriser des tiers, notamment des Chinois, à utiliser son compte pour faire transférer de l'argent en Guinée et ensuite le retirer en espèces, moyennant versement d'une commission. En principe, il établissait une facture afin que ces tiers puissent transférer les fonds. Le contrat du 3 novembre 2011 et la facture du 15 octobre 2011 avaient été établis pour que les fonds puissent être transférés en Guinée.

e.b) Transaction 8 / Appréciation des faits

La défense soutient que le montant de USD 1.5 million versé par D______ à N______ l'aurait été à titre de compensation, CGR______ n'ayant pas eu connaissance de l'affectation ultérieure de cette somme par N______. Ces explications sont contradictoires et ne sont pas crédibles.

e.b.a.a) Pour justifier le transfert du 20 juin 2011 auprès de la banque, O______ a produit une facture du 13 juin 2011 de N______ à O______ pour des services de conseil.

Cette facture a été émise sur instruction de AX______, alors strategic financial specialist mandaté par CGR______, alors même que AAV______ avait été radiée et que la joint-venture avec ABY______ avait déjà eu lieu.

La même année, soit le 20 décembre 2011, O______ a transféré USD 625'000.- à S______, dont l'ayant-droit économique, ABZ______, a déjà servi d'intermédiaire pour des paiements à des tiers (cf. transaction no 2 et 3) et dont l'existence a été tue par CGR______ dans le cadre de la due diligence faite par ABY______.

Pour justifier ce transfert, O______ a produit un contrat et une facture entre S______ et O______. Le transfert a été effectué sur instructions de AAU______.

Les transferts à N______ et à S______ ont été effectués par des hommes de confiance de Monsieur C______, soit AX______ - strategic financial specialist mandaté par CGR______ - et AAU______ - country manager en Guinée de CGR______ -.

Le Tribunal relève la concordance entre la demande de Madame E______ d'être payée avec les montants versés par D______ à ABJ______ puis à Madame E______.

Monsieur A______ et ses associés ont recouru aux services de ABF______, par le biais de ACL______, comme ils l'ont fait pour d'autres paiements à Madame E______.

Surtout et avant toute chose, il est souligné que le montant versé à Madame E______ entre dans la comptabilité de AAB______ en exécution de l'accord avec Madame E______ portant sur le paiement de USD 5.5 millions et, plus spécifiquement, dans la cote "AX______", donc comme faisant partie des montants versés par CGR______ (PP 500'596).

Au surplus, pour justifier ce transfert, Monsieur A______ a expliqué à son gestionnaire ABE______ qu'il s'agissait d'une commission versée à Madame E______ et que cela était en rapport avec le contrat conclu entre AAV______ et CGR______ ("le paiement est en rapport avec ce contrat", PP 500'049).

Le nombre de comptes bancaires dans différents pays, avec des sociétés de domicile appartenant à des personnes différentes, va à l'encontre de paiements légitimes. Il en est de même du motif invoqué pour légitimer le transfert, dans le contexte du cas d'espèce, soit des honoraires de consultants.

Madame E______ a accepté la confiscation par les autorités américaines de ses deux propriétés immobilières et de son restaurant car ayant été acquis grâce à l'argent de CGR______ ou de ses représentants.

Les explications de Monsieur C______, soit un mécanisme de compensation, sont en contradiction avec les motifs avancés et les documents produits pour justifier le transfert des fonds.

Ces explications ont été données quatre ans après le transfert des fonds, alors que la banque - sollicitée par le Ministère public genevois - avait demandé des explications sur ces transferts.

Monsieur C______ a parlé d'activité déployée par AAV______ pour CG______MM, alors que, d'une part, AAV______ n'a jamais déployé d'activités pour CG______MM et que, d'autre part, toutes les sommes dues à AAV______ avaient été payées et AAV______ avait dès lors été radiée.

Il en est de même pour ABJ______ ou pour Monsieur A______, AAB______ ou AAE______. Les précités n'ont jamais déployé d'activités pour CG______MM.

e.b.a.b) Le mécanisme de compensation avancé par Monsieur C______ a été artificiellement monté de toutes pièces, tel que cela résulte des éléments suivants:

Monsieur C______ a mentionné un partenariat entre lui-même et D______, puis un partenariat entre CG______MM et D______ afin d'assoir sa thèse de la compensation.

Monsieur C______ a, également, indiqué un partenariat avec AAV______, avant de rectifier en ABJ______, AAV______ ayant été radiée.

Personne n'a entendu parler d'un partenariat entre D______ et Monsieur C______, en Afrique, en particulier pas Madame B______.

Le partenariat en question ne se reflète pas dans les comptes des sociétés.

Le résumé comptable, produit par Monsieur C______, par le biais de son avocat, fait état de dépenses de D______ et de CG______MM, selon une répartition 30/70, mais il n'en résulte aucune dette de l'un envers l'autre.

Les projets semblent avoir été choisis pour arriver au montant voulu.

Certains projets sont postérieurs au paiement de USD 1.5 million, ce qui signifie que l'opération de compensation n'était pas due au moment du paiement et que la créance n'était pas entièrement exigible.

Le partenariat et la compensation sont inconnus de toutes les personnes entendues: Madame B______, AC______, D______, AX______ et ABZ______.

AAA______ n'a fait que signer un contrat (entre CG______MM et ABJ______), qui lui a été soumis, mais ne s'est pas impliqué dans l'établissement des décomptes entre D______ et CG______MM.

Enfin, il est absurde de penser que CG______MM aurait conclu un contrat avec ABJ______, alors que la collaboration avec les ayants-droit de AAV______, Monsieur A______ et ses associés, était terminée et s'est terminée de manière très tendue en raison des revendications de tiers (AAM______/Madame E______).

Il résulte de ce qui précède que D______ a effectué le versement de USD 1.5 million à N______ sur instructions et pour le compte de CGR______.

e.b.b) CGR______ savait que ce montant serait affecté à Madame E______.

En effet, le montant de USD 1.5 million fait partie de la comptabilité de AAB______ portant sur le paiement de USD 5.5 millions à Madame E______ et, plus spécifiquement, dans la cote "AX______", soit AX______, donc est inclus dans les montants à verser par CGR______.

AAB______ a eu une conversation téléphonique avec AX______ et a établi la facture de N______ à O______, sur instructions du précité (cf. email du 15.06.11).

La facture est fausse dans son contenu.

Le Tribunal relève la volonté de CGR______ de taire le rôle joué par ABZ______ et par AAV______.

A ce moment, soit lors du paiement, AAV______ n'existait plus puisqu'elle avait été radiée, raison de l'utilisation d'une autre société appartenant aux mêmes animateurs que AAV______, soit de ABJ______.

A ce moment, CGR______ avait restructuré le groupe pour que les sociétés, qui avaient eu un contact avec AAV______, disparaissent de la structure qui détenait les droits miniers. C'est la raison pour laquelle CG______MM a été utilisé, pour la première fois, avec Monsieur A______, AAB______ et AAE______, via ABJ______. Un contrat entre CG______MM et ABJ______ a donc été établi dans l'unique but de prouver une compensation inexistante.

Enfin, la thèse de la compensation ayant été écartée, il n'y a aucune autre raison d'expliquer cette transaction que par un moyen pour faire parvenir de l'argent à Madame E______.

Ainsi, tout comme CGR______ a utilisé AAV______ et ABZ______ comme intermédiaires pour effectuer des versements à Madame E______, CGR______ a utilisé D______ puis N______ pour effectuer des paiements à Madame E______.

f) Transactions 8b, 9, 10, 11

f.a) S'agissant de la quatrième tranche selon le décompte de AAB______, elle sera versée de la manière suivante et est mêlée à des frais que devait Madame E______ en lien avec des investissements immobiliers en Floride.

Monsieur A______, AAB______ et AAE______ ainsi que Madame E______ ont effectué, séparément, des transactions immobilières en Floride (PV Madame E______, cf. notes et courriels dans CRI AAB______, classeurs B.2.8 à B.2.11). Les modalités de versement des USD 2 millions résultant de la quatrième tranche (transaction 8b, 9, 10, 11) tiennent compte de ces investissements et des coûts y afférent (i.e. PP 348'759: USD 2 millions = 967'885 + 936'451 + 50'000, reste dû à Madame E______ USD 45'664.-; USD 67'885.81 de frais pour la "Muskat Transaction", PP 503'354).

ABF______ a reçu de AAB______ la somme de USD 1'904'336.83, laquelle a été virée en intégralité à Madame E______, sous déduction de frais relatifs à une transaction immobilière "Muskat"(cf. transactions nos 8 à 11) ("wires received from AAB______", soit virements reçus de AAB______, PP 503'354; PP 503'355).

Par courriel du 21 septembre 2011, Monsieur A______ a fait parvenir à Madame E______ un modèle d'instructions à remplir et à signer pour que ABF______ procède au transfert des fonds (cl. B.2.2.2).

 

 


PP 503'354 PP 503'355

Le 11 octobre 2011, USD 500'000.- (transaction 8b) ont été transférés du compte ACL______ sur le compte de Madame E______ auprès de Banque 10______, à Miami (PP 503'340-1).

Le 28 décembre 2011, Madame E______ a demandé à ABF______ de lui transférer USD 250'000.- sur son compte auprès de la Banque 9______ et USD 150'000.- sur son compte à Jacksonville, en Floride (PP 503'332; PV Madame E______, PP 500'722, elle confirme les instructions données).

Le 11 janvier 2012, les sommes de USD 250'000.- (transaction 9) et USD 150'000.- (transaction 10) ont été transférées du compte ACL______ sur le compte de Madame E______ auprès de de la Banque 9______, à Conakry (PP 503'338; compte crédité le 12 janvier 2012, de USD 247'826.71, 503'264, 503'331), respectivement sur le compte de la précitée auprès de Banque 10______, à Miami (PP 503'340-1)

Le 14 mai 2012, ACL______ a transféré le solde des 1'904'336.83, soit USD 936'451.02 (transaction 11) sur le compte de Madame E______ après de la Banque 10______ (note: montant crédité, PP 503'351).

Par courriel du 11 mai 2012, ABF______ avait confirmé à Madame E______ et à AAE______ que l'instruction avait été donnée et que l'ordre serait exécuté le lundi (soit 14 mai 2012) (PP 503'352).

A relever que AAE______ et Monsieur A______ ont encore versé USD 50'000.- à Madame E______ (cf. notes de AAB______, PP 348'759).

f.b) Transaction 4 à 11 / Appréciation des faits

Les transactions 4 à 11 ont été effectuées en exécution de l'accord conclu avec Madame E______ portant sur le versement supplémentaire de USD 5.5 millions.

La manière dont cette somme de USD 5.5 millions devait être versée est détaillée dans les notes retrouvées chez AAB______.

Ainsi, AAB______ a indiqué que:

-        le premier versement de USD 500'000.- sera effectué aux Etats-Unis (transactions 4, 5, 6), ce qui a été effectivement le cas;

-        le deuxième de USD 1.9 million devait être effectué en Guinée et en espèces (transaction 7), ce qui a été le cas;

-        le troisième de USD 100'000.- n'était pas déterminé et a en effet été effectué par ACK______ (pas retenu dans l'AA);

-        le quatrième versement de USD 2'000'000.- devait être effectué par "ABF______", ce qui a été le cas via ACL______ (transactions 8b, 9, 10, 11), la société de domicile de ABF______;

-        le cinquième versement devait être versé en Guinée, ce qui a été le cas, après avoir transité par le compte bancaire de N______ (transaction 8a).

Ces notes permettent également de rattacher ces paiements à CGR______, dans la mesure où AAB______ indique clairement les montants à verser par "AX______", soit AX______, qui s'est occupé de tous les paiements effectués à Monsieur A______, AAE______, AAB______ et à Madame E______. Ces notes sont crédibles et corroborées par les montants effectivement versés à Madame E______ (par le versement effectué par CGR______ via N______, qui n'a servi que d'intermédiaire dans ce paiement (cf. transaction 8).

Par conséquent, il sera retenu que les sommes, décrites sous transactions 4 à 11 et versées à Madame E______, proviennent de CGR______. Monsieur A______, AAE______, AAB______, respectivement leurs sociétés, ou ABZ______ n'ont servi que d'intermédiaires dans le versement de ces sommes.

Il sera relevé au surplus ce qui suit.

L'enregistrement du 8 mai 2012 (cf. sufra) confirme que cette somme de USD 5.5 millions a été versée car "Monsieur C______ l'avait promis" et donc qu'elle provient bien de CGR______.

La teneur des discussions enregistrées entre Madame E______ et Monsieur A______ (cf. sufra) assoit cette appréciation, selon laquelle les sommes versées à la précitée proviennent de CGR______, contrairement aux USD 20'000.- que Monsieur A______ portait sur lui et qui provenaient "de sa poche".

Il en est de même des déclarations de Madame E______, qui a indiqué que toutes les sommes reçues provenaient de CGR______. Cette déclaration est crédible dans la mesure où elle est corroborée par les éléments au dossier, spécifiquement les documents bancaires.

g) ACQ______ - processus de révision des titres miniers

g.a) La Guinée a connu ses premières élections présidentielles libres. Le 27 juin 2010 a eu lieu le premier tour des élections présidentielles et, le 7 novembre 2010, le second tour. Le 3 décembre 2010, les résultats ont été confirmés et ACQ______ a été élu Président de la Guinée (note: il avait été condamné à 5 ans de prison sous le régime de AAO______ après avoir perdu les élections présidentielles de 1998).

Le Président ACQ______ a décidé de revoir les titres miniers alors octroyés, notamment eu égard à l'accord conclu entre CGR______ et ABY______ portant sur la vente de 51 % des actions pour USD 2.5 milliards, alors que CGR______ n'aurait versé que USD 160 millions pour l'acquisition des concessions, par le biais d'investissements dans les forages ou les infrastructures du pays.

Le 4 avril 2011, alors que le Président avait décidé que le fer de Simandou devait être exporté via la Guinée (et non le Libéria), le Ministère des mines a ordonné l'arrêt immédiat des travaux de CGR______ en cours (PP 5'000'840).

En août 2011, la Société Guinéenne du Patrimoine Minier (SOGUIPAMI) a été créée. Elle était destinée à gérer les participations de l'Etat dans les sociétés minières.

Le 9 septembre 2011, un nouveau code minier a été établi.

Dans le cadre de la revue des titres miniers, le gouvernement guinéen a sollicité de CGR______ le versement d'un montant supplémentaire en lien avec les concessions acquises. Des négociations ont suivi, lesquelles ont échoué. Dans le cadre de ces négociations, Monsieur A______ est intervenu et s'est présenté comme étant le représentant du "Boss", soit de Monsieur C______, tel que cela ressort d'un courriel du 1er mars 2012, alors que "AC" se réfère au Président ACQ______ (cf. PP 4'707'154 et également la conversation enregistrée de Monsieur A______ du 11 avril 2013).

Le 26 mars 2012, le Président ACQ______ a créé la Commission nationale des mines composée d'un Comité technique et d'un Comité stratégique (PP 5'000'893).

Le 29 mars 2012, il a fixé les modalités de la mise en oeuvre par la commission d'un programme de revue des titres et conventions en vigueur (PP 5'000'903).

Le gouvernement de Guinée a mandaté le cabinet d'avocats DLA PIPER afin d'enquêter sur les circonstances de l'acquisition par CGR______ GUINEE des droits sur les blocs 1 et 2 et l'approbation du transfert de ces droits à ABY______ (PP 349'790). Selon les conclusions du rapport, les droits et l'approbation du transfert de ces droits avaient été acquis par le biais d'actes de corruption (PP 349'790).

Une procédure administrative a été ouverte.

g.b) Le 8 mai 2012, Monsieur A______ s'est rendu en Floride pour rencontrer Madame E______. Il n'a pas rencontré l'intéressée, mais son mari, ABR______, et son frère, ACP______, et a pu brièvement lui parler au téléphone à la fin de la rencontre, alors que Madame E______ se trouvait en Floride. Cette rencontre a été enregistrée par le FBI (PP 3'002'113¸ enregistrement PP B.4.7.13 audio files; retranscription, PP 500'497). Il ressort de cette rencontre que :

-        Madame E______ a reçu les USD 5.5 millions promis (PP 500'500) parce que "c'est Monsieur C______ qui avait dit" (PP 500'500-1), Monsieur A______ ajoutant "quand Monsieur C______ dit quelque chose, il le fait" (PP 500'501);

-        Madame E______ souhaitait une proposition financière écrite de CGR______ sur le versement d'une somme supplémentaire, ce à quoi Monsieur A______ s'est opposé au motif que Monsieur C______ n'allait jamais s'engager par écrit à verser un montant à Madame E______, alors que précisément il était confronté à l'existence de documents écrits compromettants, mais que le versement de USD 5 millions était acquis, somme qui serait augmentée une fois les problèmes en lien avec les concessions minières résolus (PP 500'497-8, "Monsieur C______ ne marquera jamais: je m'engage ta ta ta ta, Monsieur C______ pas Monsieur C______ ou CGR______; c'est tout ce qu'il est en train de combattre en ce moment (...) Il va pas refaire encore un papier!");

-        il ne servait à rien que Monsieur A______ s'engage personnellement par écrit à verser ces montants dans la mesure où les fonds ne provenaient pas de lui;

-        Monsieur C______ s'enquerrait de l'état de ses démarches auprès de Madame E______ ("J'ai reçu un message de Monsieur C______ (...) qui me dit: Monsieur A______, je sais que tu es allé voir Madame E______, qu'est ce qui se passe?" PP 500'499);

-        Monsieur A______ voulait, de son côté, faire signer une attestation à Madame E______ dans laquelle elle niait avoir reçu des pots de vin ou avoir conclu des contrats au contenu illégal concernant les activités de CGR______.

L'attestation en question a été préparée par une collaboratrice de Me Jean VEIL, avocat parisien de Monsieur C______ (cf. résumé des conclusions de l'enquête interne pour le conseil de fondation de V______, PP 300'547).

Par la suite, Madame E______ a effectivement signé l'attestation en question, mais en deux fois, soit le 27 avril 2012 prétendument à Dubreka et le 5 mai 2012 aux Etats-Unis (PP 348'788 et 348'790). Ces attestations allaient dans le sens de ce que Monsieur A______ préconisait, lors de la réunion du 8 mai 2012. En effet, Madame E______ a déclaré résider à Dubreka et n'avoir jamais transmis de contrats qu'elle aurait conclus et avoir vu de faux contrats conclus en son nom. Par ailleurs, elle a soutenu que ACJ______ n'avait pas agi en son nom, mais était l'auteur d'une tentative d'extorsion basée sur de faux documents, ce qu'elle avait dénoncé lorsqu'elle l'avait appris pour "nettoyer son nom et sa réputation" (PP 5'001'683).

Entendu dans le cadre de la présente procédure, Monsieur C______ a contesté avoir tenu les propos que Monsieur A______ lui prêtait. Monsieur A______ avait utilisé son nom pour gagner en crédibilité auprès de son interlocutrice (PV PP 500'473). Il a ajouté "on n'a jamais payé Madame E______. Par nous, j'entends moi ou CGR______". Si Madame E______ avait été payée, c'était en relation avec d'autres affaires qui ne concernaient pas CGR______ (PV, PP 50'475).

Le 30 octobre 2012, le Comité technique a informé ACD______ que celle-ci n'avait pas coopéré dans le cadre de la procédure et que les droits miniers avaient été obtenus illégalement.

Monsieur A______ a signé une attestation écrite du 26 novembre 2012 (PP 3'000'067). Il a déclaré avoir rencontré, à deux ou trois reprises, le Président AAO______, dans le cadre des projets miniers de CGR______ et lui avoir offert une montre d'une valeur de moins de USD 5'000.- conformément aux usages locaux. Il a précisé avoir rencontré la première épouse du Président, AAJ______, ainsi que K______, qui l'avait présenté à sa demi-soeur Madame E______. Monsieur A______ avait rencontré Madame E______ à plusieurs reprises dans sa maison de Dubreka, laquelle lui avait indiqué posséder un site diamantifère dans la région de Forécariah, site qui, après analyse du sol par CGR______, ne s'était pas révélé intéressant, raison pour laquelle l'offre de Madame E______ avait été déclinée. Les relations entre CGR______ et Madame E______ s'étaient limitées à cette opportunité d'affaires et Monsieur A______ n'avait jamais demandé à la précitée d'intervenir en faveur de CGR______ auprès de quiconque, y compris auprès du Président, dont elle n'avait jamais été l'épouse. Monsieur A______ a ajouté que Madame E______ n'avait jamais été présente lors des rencontres entre CGR______, Monsieur A______ et le Président. Monsieur A______ n'avait jamais effectué de versements à quiconque en ou hors de Guinée pour le compte de CGR______ ni souscrit d'engagement de paiement pour son compte.

Le 2 décembre 2013 (PP 500'280), Madame E______ a signé une nouvelle attestation, laquelle a été produite devant le Comité technique, alors qu'elle n'a pas été entendue par ledit comité. Elle a expliqué avoir rencontré le Président AAO______, en 2000, et être devenue sa quatrième épouse. Elle a ajouté que AAN______, alors Ministre de la jeunesse et des sports, l'avait appelée pour lui présenter un investisseur, soit CGR______. Le lendemain, AAN______ était venue chez elle à Dubreka avec des tiers, dont Monsieur A______, qui l'avait informée que CGR______ voulait exploiter des mines de fer et l'avait priée de les mettre en contact avec son époux, AAO______. Si CGR______ obtenait des titres miniers, Monsieur A______ et AAN______ lui avaient promis que USD 12 millions seraient versés à différentes personnes, dont elle-même. Madame E______ avait signé divers contrats avec CGR______ qui lui avaient été soumis par Monsieur A______. Lorsqu'elle avait demandé la raison pour laquelle le nom de AAV______ apparaissait sur ces contrats, Monsieur A______ lui avait répondu que AAV______ agissait pour le compte de CGR______. Elle avait ensuite personnellement introduit Monsieur A______ auprès de AAO______ en indiquant que Monsieur A______ représentait les intérêts de CGR______, qui voulait exploiter des mines en Guinée.

Il ressort d'une conversation du 2 décembre 2012 entre ABP______ et ABO______ que Monsieur A______ est allé rencontrer le précité à Miami pour essayer de trouver une issue au litige opposant CGR______ à la Guinée (conversation mediapart, PP 350'301; sentence arbitrale PP 3'002'118).

Le 30 décembre 2012, le Comité technique a adressé à CGR______ une lettre d'allégation des griefs reprochés.

Par recommandation du 21 mars 2014 (PP 3'000'005), dans le cadre de la révision des titres miniers et de la convention minière détenus par la société ACD______, le Comité technique a estimé qu'il existait un faisceau d'indices précis et concordants établissant avec une certitude suffisante l'existence de pratiques de corruption ayant entaché l'octroi des titres et de la convention minière détenue par ACD______, lesquelles affectaient la validité de ceux-ci. En conséquence, le Comité technique a recommandé au Comité stratégique de proposer aux autorités décisionnelles de retirer les titres détenus par ACD______ et de résilier la convention sur les gisements des blocs 1 et 2 de Simandou et de Zogota.

Par décrets des 17, 18 et 24 avril 2014, le Président ACQ______ a retiré les concessions accordées les 9 décembre 2008 et 19 mars 2010 à CGR______ (PP 5'001'369 et 5'001'373) et résilié la convention minière (convention de base) du 16 décembre 2009 (PP 5'001'377).

CGR______ a soutenu que par la révision des titres miniers, ACQ______, nouvellement élu, visait en réalité le paiement d'importantes sommes d'argent qui lui étaient nécessaires pour rembourser des personnes qui l'avaient aidé dans le cadre de son accession à la Présidence.

h) Procédure états-uniennes

h.a) En janvier 2013, alors que la procédure sur la révision des titres miniers était en cours en Guinée, une procédure a été ouverte, aux Etats-Unis, pour blanchiment d'argent et corruption en lien avec le versement de pots-de-vin à des membres de l'ancien gouvernement de Guinée dans le cadre de l'attribution de concessions minières, en particulier à Simandou. Madame E______ a accepté de coopérer à l'enquête dans l'espoir d'obtenir une immunité de poursuite ("immunity for the Cooperating Witness's ownpotential criminal conduct", plainte du FBI, ch. 10). A ce moment, Madame E______ vivait aux Etats-Unis, à Jacksonville, en Floride, avait la seule nationalité guinéenne, était au bénéfice d'un passeport diplomatique et d'un simple visa valable jusqu'au 27 août 2013 (cf. réunion du 25.03.13 Madame E - Monsieur A). Elle était en train de mettre sur pied un commerce de boissons et de restauration rapide à l'aide de l'argent reçu de "ABF______" ("qui a financé tout ça? L'argent que ABF______ m'avait envoyé").

Au mois de mars et avril 2013, Monsieur A______ est allé rencontrer Madame E______ en Floride dans le but de la convaincre de détruire des documents originaux, y compris les contrats signés avec AAV______ ou CGR______ et de mentir aux investigateurs américains, voire de quitter le pays pour éviter de répondre à leurs questions, moyennant le versement de sommes d'argent et la signature d'une attestation préparée par CGR______ ou ses avocats (cf. ci-après courriel du 5 avril 2013 de ACR______ à Monsieur C______, PP 500'676-7).

Ces entretiens étaient enregistrés. Il en ressort ce qui suit :

-        Les 15 et 16 mars 2013, Monsieur A______ a demandé de rencontrer Madame E______, celle-ci s'enquérant au préalable de ce que Monsieur A______ allait lui donner comme argent (Madame E: "qu'est-ce que tu m'offres d'abord? Avant de te voir. Qu'est-ce que tu as pour moi?"; Monsieur A: "ça représente quand même pas mal d'argent qui peut arriver comme ça"; Madame E: "combien vous avez à me donner?").

-        Le 20 mars 2013, les intéressés se sont reparlés au téléphone pour fixer les modalités du rendez-vous. A la question de Madame E______ qui demandait si "Monsieur C______" avait demandé à Monsieur A______ de la rencontrer et s'il était d'accord que Monsieur A______ lui remette "cette somme", le précité a répondu "bien sûr".

-        Le 25 mars 2013, ils se sont rencontrés à l'aéroport et Monsieur A______ a précisé que, comme convenu, USD 2 millions seraient versés à Madame E______. Sur le premier million, USD 300'000.- seraient remis immédiatement et le solde ultérieurement, alors que le deuxième million serait bloqué chez un avocat, qui ne sera pas "ABF______" (Madame E: "la dernière fois, c'était ABF______"; Monsieur A: "ABF______ a fait que des conneries"). En échange, "les papiers" devaient être détruits ("il faut qu'on détruise ces papiers"; "ces fameux papiers ils sont ici aux Etats-Unis? Parce que quand on va se voir la prochaine fois, il faut que l'on détruise ça"). Par la suite, Monsieur A______ a donné des conseils sur l'attitude que devait adopter Madame E______ si elle était interrogée et lui a recommandé de dire qu'elle n'avait rien à voir avec tout ça, ajoutant "comme on avait fait sur l'attestation". Monsieur A______ a ajouté: "heureusement Monsieur C______ a eu l'intelligence d'insister pour que ce soit fait de façon très très régulière pour qu'on puisse pas ensuite l'attaquer. .... Même ABN______ était dedans ... y'a 20 signatures, 30 signatures sur le contrat de CGR______".

Par courriel du 5 avril 2013 (PP 500'676-7), ACR______ a envoyé à Monsieur C______, sur son adresse advisor@ad______fa.com, l'attestation, que devait signer Madame E______, avec la mention "STRICTEMENT CONFIDENTIEL", dont la teneur est la suivante :

ATTESTATION

 

Je m'appelle Madame E______. Je suis de nationalité guinéenne, j'ai vécu la plus grande partie de ma vie en Guinée et j'habite aujourd'hui aux Etats-Unis.

 

Des représentants de la société CGR______ sont venus me voir et m'ont indiqué que la République de Guinée leur reprochait des faits dans lesquels j'aurais été impliquée. Ils m'ont exposé quels étaient ces faits et m'ont demandé si j 'étais d'accord pour dire ce que j'en pensais, j'ai été d 'accord parce que ce qu'ils m'ont rapporté est faux et je souhaite aujourd'hui attester ce qui suit.

 

Ma situation familiale

 

Je suis la demi-soeur de K______, et non sa soeur. Nous n'avons jamais été très proches mais plutôt des rivaux.

 

Je n'ai jamais été mariée avec le Président AAO______ aujourd'hui décédé. Il paraît qu'on dit que j'ai été sa quatrième épouse, c'est faux.

 

Mes relations avec la société CGR______ il paraît qu'on dit que j'aurais signé des contrats avec CGR______ et que CGR______ devait me payer des commissions en contrepartie de mes services en leur faveur.

 

C'est faux, le n'ai jamais signé aucun contrat avec CGR______ ni directement, ni par l'intermédiaire de qui que ce soit.

 

Il paraît qu'on dit que j'aurais intercédé auprès de dirigeants officiels de Guinée en faveur de CGR______ pour que CGR______ obtienne des droits miniers en Guinée.

C'est faux, le ne suis jamais intervenue auprès de dirigeants guinéens en faveur de CGR______. Je n'ai jamais donné d'instructions ni demandé à quiconque de prendre des décisions en faveur de CGR______. Je ne me suis jamais intéressée aux affaires minières du pays.

 

Il paraît qu'on dit que CGR______ m'aurait versé de l'argent. C'est faux, le n'ai jamais touché d'argent de la part de CGR______ ni directement, ni indirectement. On parle d'un chèque de 7 ou 10 millions USD qu'ils m'auraient remis.

 

Ça ne s'est jamais passé. On dit qu'ils m'auraient remis de l'argent en liquide, des sommes de 2,5 millions USD et 150.000 USD. C'est faux, ils ne m'ont jamais versé ces sommes ni d 'ailleurs aucune somme, ni à moi ni directement, ni à quelqu'un d'autre pour mon compte.

 

Ils ne m'ont pas non plus promis de me verser quoi que ce soit, ni à moi, ni à qui que ce soit pour mon compte.

 

Enfin, je voudrais dire que c'est ridicule de dire que j'aurais déménagé aux Etats-Unis parce que j'aurais eu peur que CGR______ porte atteinte à ma personne. Cette idée ne m'est pas passée par la tête.

 

Je suis très choquée par les faits que m'a exposés CGR______. On utilise mon nom, je n'ai rien à voir avec cette société ni avec les faits qu'on leur reproche.

 

Fait à ,

Le avril 2013

Le jour même, Monsieur C______ a répondu :

"Hi ACR______, you have send me the below which have nothing to do with me? I guess it is the suggestion of J Veil off on have it as part of CGR______ response to the so called CT, which I think make sense. Anyway I cant help or advice on it and leave this entirely to our lawyers. I met that only once in my life for 5 min as she was present in the room, but we haven't spoken etc, so I have noob in or knowledge of her. Best Monsieur C______ "

En traduction libre: "Salut ACR______, tu m'as envoyé le message ci-dessous, lequel n'a rien à voir avec moi ? Je suppose qu'il s'agit de la suggestion de J VEIL de l'avoir dans le cadre de la réponse de CGR______ au soi-disant CT, ce qui a du sens à mon avis. En tout état, je ne peux pas aider ou donner de conseil à ce sujet et je m'en remets intégralement à nos avocats à cet égard. Je l'ai rencontrée une seule fois dans ma vie durant 5 minutes, alors qu'elle était présente dans la pièce, mais nous n'avons pas discuté ensemble, etc, partant je n'ai rien à voir avec elle ni aucune connaissance d'elle. Salutations Monsieur C______".

Il est relevé que "CT" doit être compris comme étant le Comité technique et que Me Jean VEIL est l'avocat parisien de Monsieur C______ et de CGR______.

Monsieur C______ a expliqué (audience 04.05.17, PP 500'640) que cette attestation avait été rédigée en réponse aux accusations graves formulées par le Comité technique et basées sur les affirmations mensongères de Madame E______, qu'il qualifiait de "criminelle". Une réunion avait eu lieu chez Me Jean VEIL, à Paris, pour préparer la réponse de CGR______ en sa présence ainsi qu'en présence de ACR______. Monsieur C______ imaginait que le projet d'attestation qui lui avait été envoyé devait être signé par Madame E______, mais cela regardait les avocats et non pas lui; l'attestation démentait une des accusations mensongères de la précitée devant le Comité technique.

Deux autres réunions se sont déroulées entre Monsieur A______ et Madame E______, dont il ressort ce qui suit:

-        Le 11 avril 2013, Madame E______ et Monsieur A______ se sont rencontrés une nouvelle fois à l'aéroport. Madame E______ a informé Monsieur A______ avoir été interrogée par le FBI. Monsieur A______ a répondu qu'il fallait urgemment détruire les documents, comme il le lui avait demandé depuis longtemps, et contester avoir joué un rôle dans l'attribution des droits miniers de Simandou.

-        Monsieur A______ a également abordé le statut marital de Madame E______, question "très importante" à ses yeux car si Madame E______ était officiellement mariée à AAO______, elle entrait dans "une catégorie qui est très, on va dire, dangereuse, exposée parce que en tant que mari et d'épouse (...) tu rentres dans le cadre familial", elle assumait un "risque supplémentaire", alors qu'en tant qu'amie de la famille, le Président connaissant bien le père de Madame E______, c'était différent et il lui recommandait de le dire ainsi. Il ajoutait que les avocats à Paris et en Angleterre se penchaient sur cette question. Madame E______ a indiqué qu'il était possible d'épouser quatre femmes en Guinée sans qu'il n'y ait besoin que ce soit officialisé et qu'elle ne pouvait pas mentir sur son statut d'épouse du Président.

-        Madame E______ a informé Monsieur A______ avoir remis les contrats conclus avec AAV______ et avec CGR______ à ABO______ (note: fils d'un Premier Ministre du Gabon et homme d'affaires influent en Afrique du Sud et en Guinée condamné le 31 mai 2017 à deux ans de prison aux États-Unis pour corruption d'agents publics au Niger, en Guinée et au Tchad) et qu'elle avait gardé les originaux dans un lieu sécurisé en Floride. Monsieur A______ a alors compris que les documents avaient été transmis par ABO______ à ABN______ et ACQ______; il a ajouté, s'adressant à Madame E______, que si "ça saute, toi tu es dans une grosse grosse galère (...) aux Etats-Unis pour toi c'est fini. Ils vont comprendre ce que tu as et ils te mettent dehors. Ils vont te poursuivre en justice en plus. C'est grave."

-        Monsieur A______ a présenté à Madame E______ l'attestation susmentionnée envoyée le 5 avril 2013. Il lui a dit que celle-ci avait été préparée par des avocats et lui l'a lue.

-        Monsieur A______ a insisté lourdement pour que les documents soient détruits urgemment ("il y a vraiment urgence"), ce qu'il devait constater de visu, selon ce qui lui avait été demandé ("ce qu'on m'a demandé", "on m'a demandé", "Monsieur C______ m'a dit écoute (...) mais je veux que tu ailles voir, je veux que tu détruises ces documents", "le big boss").

-        Monsieur A______ a confirmé l'accord, soit de verser USD 1 million à Madame E______, dont USD 200'000.- immédiatement en Sierra Leone, et USD 5 millions quand le dossier serait terminé, soit "si le groupe n'est pas mis dehors", "quand le vieux dégage", soit ACQ______. Madame E______ a alors précisé qu'il s'était agi de USD 300'000.-, mais Monsieur A______ a répondu avoir réussi à obtenir USD 200'000.-. Il a ajouté qu'en fonction de la manière dont l'affaire se terminerait, il y aurait encore plus et a précisé "Et ça c'est directement la communication qui m'a été donnée directement par le numéro 1, je ne veux même pas donner son nom", précisant ensuite qu'il s'agissait de "Monsieur C______", "tout ce que je te dis, c'est directement de Monsieur C______", "personne d'autre".

Monsieur A______ a incité Madame E______ à quitter les Etats-Unis pour la Sierra Leone.

Madame E______ a signé l'attestation que Monsieur A______ lui a présentée en supprimant toutefois la phrase sur son statut marital en remplissant "Fait à Jacksonville, le 11 avril 2013", attestation retrouvée chez AAB______ (PP 348'792). Madame E______ est ensuite partie en taxi et Monsieur A______ a appelé AAB______ (PP 4'700'479) pour l'informer que Madame E______ avait signé l'attestation.

Ce même 11 avril 2013, Madame E______ et Monsieur A______ se sont revus à l'aéroport. Il ressort de cette rencontre ce qui suit:

-        Madame E______ a demandé à Monsieur A______ ce qu'elle toucherait, immédiatement et aux Etats-Unis, en échange des mensonges qu'elle devait faire au FBI. Monsieur A______ lui a répondu qu'elle n'avait pas d'autre choix que de mentir, elle devait nier avoir touché une quelconque somme d'argent et que les seules affaires qu'elle avait faites au pays "c'est d'acheter du riz, d'acheter du sucre et des culs de poulets", mais qu'elle ne s'était pas occupée "des affaires du pays", "des histoires de mines". S'agissant de l'argent versé, Monsieur A______ a indiqué que :

"il y en a qu'un qui décide, tu dois comprendre que, toutes les personnes sont au milieu, il n'y a personne qui décide, il n'y en a qu'un, c'est celui qui est en haut, et c'est le seul (...) il n'y a personne qui peut te dire à 100% si ce n'est pas lui là-haut" (...) "AAB______ c'est pas lui qui va te garantir (...) personne ne peut te garantir si ce n'est pas l'autre là-haut".

-        En référence aux documents à détruire, Monsieur A______ a mentionné "27 et 28 février".

-        Ils ont prévu de se revoir le samedi pour s'occuper de la destruction des documents originaux, et non seulement des photocopies.

Le 14 avril 2013, Madame E______ et Monsieur A______ se sont revus à l'aéroport.

Madame E______ a demandé combien d'argent Monsieur A______ avait à lui donner, et le précité lui a indiqué la somme de USD 20'000.- qu'il portait sur lui, lesquels provenaient de "Monsieur A______" contrairement aux autres sommes à verser, alors que Madame E______ a prétendu avoir les documents originaux avec elle.

Alors que Madame E______ a expliqué avoir créé son affaire de restauration via une société, Monsieur A______ a vérifié qu'elle ne l'avait pas fait par le biais de ABD______ ("c'est pas ABD______?").

En référence à AAO______, Madame E______ l'a appelé "mon mari" ("quelque chose que mon mari m'a donné").

Après avoir dit à Madame E______ "S'il y a un gros bordel aujourd'hui c'est par ce que ABO______ est passé par ici" et s'être levé pour contrôler l'horaire de son vol, Monsieur A______ s'est fait arrêter par le FBI. Il était porteur de USD 20'000.- dans des enveloppes de la Banque 10______.

Dans le cadre de la présente procédure (PV, PP 500'295), Monsieur C______ a toujours contesté avoir eu des contacts avec Monsieur A______ préalablement aux rencontres du précité avec Madame E______. Monsieur A______ l'affirmait à Madame E______ pour être crédible.

h.b) Monsieur A______

Le 15 avril 2013, le FBI a déposé plainte contre Monsieur A______ devant la Cour fédérale du District Sud de New York (PP 3'000'190) pour subordination de témoin, de victime ou d'informateur, obstruction au déroulement d'une enquête pénale et destruction, altération et falsification de relevés dans le cadre d'une enquête fédérale.

Le 10 mars 2014, Monsieur A______ a plaidé coupable ("guilty plea") pour obstruction au déroulement d'une enquête pénale et a été condamné à 2 ans de prison ainsi qu'à une amende de USD 75'000.-. Il a admis avoir offert de l'argent à Madame E______ pour l'inciter à quitter les Etats-Unis afin d'éviter à avoir à répondre aux questions du FBI.

Il a été condamné le 29 juillet 2014 et est sorti de prison le 9 janvier 2015.

Le 29 juin 2015, Monsieur A______ a signé une attestation écrite produite dans le cadre de la procédure arbitrale LCIA, dans laquelle il affirme ne pas avoir agi sur instructions de Monsieur C______ (PP 500'328).

h.c) Versement par chèques par ABH______ à Madame E______

Alors que la procédure aux Etats-Unis était pendante, ABH______ a signé six chèques en faveur de Madame E______ pour un total de USD 50'000.- (PP 501'013ss).

h.d) Madame E______

Par acte du 21 novembre 2014 (Verified Complaint for forfeiture in rem, www. https://star.worldbank.org), modifié par acte du 18 mars 2015 (Amended Verified Complaint for forfeiture in rem), les Etats-Unis ont sollicité la confiscation des trois biens immobiliers et du restaurant acquis par Madame E______ en Floride à l'aide du produit de la corruption. Il était établi que Madame E______ avait reçu des millions de dollars de CGR______ et de ses représentants en lien avec un schéma de corruption visant à influencer son époux, AAO______, pour l'octroi des titres miniers à CGR______, CGR______ ayant continué à exécuter ses promesses de paiement envers Madame E______ après le décès de son mari.

En janvier 2016, un accord a été conclu entre les Etats-Unis et Madame E______. Madame E______ reconnaissait avoir acquis ces biens à l'aide du produit de la corruption, deux des biens immobiliers et le restaurant étaient confisqués par les Etats-Unis, alors qu'elle conservait la résidence sise ______, dans laquelle elle vivait (Stipulated settlement between United States and Madame E______, accord entériné par Consent Order for Judgment of Forfeiture du 4 avril 2016, www. https://star.worldbank.org).

h.e) Audition Madame E______

Le 23 février 2017, Madame E______ a été entendue par les autorités américaines (PP 500'755ss). Elle a déclaré ne pas avoir d'activité professionnelle au jour de son audition et s'occuper de ses enfants. Elle a indiqué avoir épousé le Président AAO______ en 2000. Il s'agissait d'un mariage coutumier, "le père avait donné la fille à l'homme", conformément à la tradition.

Elle a expliqué que AAN______ avait travaillé avec son père à la Banque centrale de Guinée. Par le biais de sa soeur, AAN______ avait demandé à Madame E______ de rencontrer les gens de CGR______, en particulier Monsieur A______.

En 2005 ou 2006, elle avait rencontré Monsieur C______ qui lui avait promis 5 % contre l'obtention d'une partie de Simandou, ce que le Président savait. Elle a indiqué que le précité lui avait remis USD 200'000.- en espèces par le biais de son frère K______, avant de déclarer que Monsieur C______ n'était pas présent, mais avait donné l'ordre de donner l'argent (p. 58). Il lui avait également donné un collier en diamants.

AAV______ avait été mise en place car Monsieur C______ ne voulait pas payer directement Madame E______. Monsieur A______ était un intermédiaire entre CGR______ et elle-même.

Elle n'avait pas reçu la part promise, mais des paiements en échange de cette part.

S'agissant des rencontres qui avaient eu lieu en 2013 avec Monsieur A______, Madame E______ a expliqué que Monsieur C______ avait demandé que toute la documentation, soit tous les contrats conclus, soit détruite ou brûlée, les originaux et les photocopies. Elle savait que c'était Monsieur C______ qui l'avait demandé car, lorsque Monsieur A______ venait la voir, tout comme AAU______ ou AAB______, c'était que Monsieur C______ le leur avait demandé. Monsieur A______ lui avait proposé de l'argent en échange de la destruction des documents. Il lui avait également demandé de signer une attestation, mais celle-ci contenait des mensonges.

Tous les contrats signés étaient authentiques.

Quant à ABH______, dont elle pensait qu'il travaillait pour le gouvernement guinéen, il lui avait proposé de prendre en charge les frais liés à sa venue aux Etats-Unis. Elle ne savait pas si le précité avait des contacts avec ACU______ et elle ne devait rien faire en échange de l'argent reçu.

i) Procédure guinéenne

Peu après l'ouverture de la procédure états-unienne, les autorités guinéennes ont ouvert une procédure à l'encontre de K______ et de ACB______, lesquels ont été arrêtés et incarcérés les 16 respectivement 19 avril 2013.

La justice guinéenne a décidé la mise en liberté des intéressés au 6 août 2013. Ils n'ont toutefois été relaxés que le 29 novembre 2013. K______ a quitté le territoire.

Diverses personnes ont été entendues par les autorités guinéennes.

Par jugement rendu le 30 mars 2020, le Tribunal de première instance de Kaloum, à Conakry, a acquitté six intervenants-clés dans le cadre de l'affaire de corruption des gisements miniers de Simandou et Zogota (cf. jugement annexé au courrier du 6 avril 2020 de Me GAMMA______). Le jugement mentionne que la partie civile s'est désistée de son action pour cause d'arrangement intervenu entre elle et les prévenus, et le ministère public principal a abandonné les poursuites engagées contre les prévenus, ce qui prouvait que ledit ministère public ne disposait d'aucun élément de preuve pouvant amener celui-ci à entrer en condamnation contre les prévenus, raison pour laquelle le Tribunal a déclaré les prévenus Madame E______, K______, ABP______, AAM______, ACB______ et AAF______ non coupables des faits qui leur étaient reprochés.

j) Procédure israélienne

Les autorités judiciaires israélienne ont ouvert une procédure pénale à l'encontre de Monsieur C______.

Dans ce cadre, ils ont sollicité l'entraide des autorités suisses, procédure référencée sous CP/401/2015.

Les autorités suisses ont également sollicité l'aide des autorités israéliennes dans le cadre de la présente procédure (cf. classeurs B.4.5.4 à 6).

Diverses personnes ont été entendues par les autorités israéliennes.

k) Procédure LCIA

Le 17 avril 2014, le Président ACQ______ a retiré la concession accordée à CGR______.

Le 28 avril 2014, ABY______ a introduit une requête arbitrable à l'encontre de CGR______ par devant le Tribunal arbitral de la London Court of International Arbitration (LCIA) en paiement de USD 1.25 milliards. En substance, elle reprochait à CGR______ d'avoir conclu le contrat de joint-venture et la convention d'actionnaire sur la base de fausses garanties, CGR______ ayant notamment caché avoir obtenu la concession minière par le biais d'actes de corruption ayant mené à la révocation de ladite concession. Ainsi, CGR______ avait notamment corrompu Madame E______ et ABP______ en leur versant des millions de dollars ainsi que le Président AAO______ en lui offrant des cadeaux (une montre et une voiture miniature en or et incrustée de diamants).

Madame B______, Monsieur A______ et Monsieur C______ n'étaient pas parties à cette procédure et n'ont pas été entendus par le Tribunal arbitral.

Dans le cadre de cette procédure, les parties ont produits divers témoignages écrits (Witness Statement).

Par sentence arbitrale du 4 avril 2019 (280 pages, PP 3'002'000), CGR______ a été condamnée à verser à ABY______ la somme de USD 1.247 milliards. Le Tribunal a retenu que CGR______ avait sciemment (nos 677ss) donné (10) de fausses garanties ou des garanties trompeuses dans le cadre de la procédure de due diligence (nos 676):

-        en ne révélant pas l'existence de consultants ou d'agents (incluant AAV______, Monsieur A______, ABZ______ et ACS______) et en ne transmettant pas les contrats qui la liaient à ceux-ci,

-        en ne transmettant pas les documents et informations en lien avec le transfert des actions du 17 février 2009 entre CGR______ GUINEE BVI et CGR______ GUERNESEY,

-        en ne révélant pas l'existence des litiges avec AAM______ et ABS______,

-        en ne révélant pas les liens existants avec K______ et Madame E______ et en affirmant faussement que K______ et Madame E______ n'avaient pas de lien de parenté (cf. déclaration AAU______),

-        en donnant une description trompeuse sur son rôle dans le retrait des titres miniers de AAL______,

-        en ne communiquant pas l'existence de ses relations professionnelles et financières avec Madame E______ et ABD______,

-        en affirmant ne pas avoir corrompu Madame E______.

Le Tribunal a estimé que CGR______ avait sciemment (nos 677ss, 694, 695) caché le rôle que AAV______ et Madame E______ avaient joué dans l'octroi des titres miniers et les montants importants reçus ou attendus à titre de compensation.

Dans leur décision, les juges ont notamment retenu ce qui suit:

-        Madame E______ était la quatrième épouse de feu le Président AAO______ et la demi-soeur de K______, employé de CGR______ (no 544), alors que AAU______ avait faussement affirmé que Madame E______ et K______ n'avaient aucun lien de parenté (nos 550ss). Elle devait être considérée comme un agent du gouvernement ("Government Officiel"), tel que défini par le questionnaire sur la due diligence (cf. no 545, 548, 549).

-        L'influence de CGR______ sur le Président, alors souffrant, était considérable (no 562) et a eu un impact dans la décision de retrait des droits miniers de AAL______ et l'attribution de ceux-ci à CGR______ (no 568). CGR______ et Madame E______ avaient rencontré le Président à plusieurs occasions pour appuyer la position de CGR______ en lien avec les blocs 1 et 2 (no 567).

-        Madame E______ avait une relation professionnelle/financière avec le groupe CG______ et a reçu de l'argent payé à AAV______ conformément au contrat de rachat de ses actions à titre de compensation de sa participation dans CGR______ GUINEA BVI (nos 570ss, 576).

-        CGR______ avait corrompu Madame E______ (nos 583ss) (et avait ce faisant violé ses obligations contractuelles vis-à-vis de ABY______, no 773):

o  Madame E______ était un agent du gouvernement, selon l'art. (v) de la définition du questionnaire de due diligence, soit une personne qui détient une position officielle, cérémoniale, désignée autrement ou héritée, dans un gouvernement ou une de ses organisations (no 584, 590),

o  CGR______ a, via AAV______, offert des actions à Madame E______ (591ss), subsidiairement savait ou avait des raisons de croire que AAV______ a offert des actions à la précitée, étant précisé que CGR______ a intentionnellement vendu AAV______ et signé un contrat avec AAV______ afin de mettre en place un intermédiaire à même d'effectuer des paiements à Madame E______ et a ainsi indirectement offert des actions de CGR______ GUINEA à Madame E______ (cf. nos 603 et 604 pour le rôle de Madame B______) (no 604),

o  CGR______ savait que la proposition de participation contenue dans le protocole d'accord du 20 février 2006 visait à s'assurer l'assistance de Madame E______ pour influencer AAO______ (nos 635, 637) et ce qu'a fait Madame E______ de fin décembre 2005 à septembre 2008 (no 626ss, 634).

o  Les paiements effectués à Madame E______ après le décès du Président AAO______, alors que l'intéressée se trouvait aux Etats-Unis, rentraient également dans la définition de la corruption dans la mesure où ceux-ci étaient effectués dans le but d'obtenir le silence de Madame E______ sur les accords corruptifs passés (nos 786, 787 et 789), mais il n'avait pas été démontré que CGR______ avait connaissance de ces paiements (no 792).

-        Même si le Président ACQ______ avait été corrompu pour retirer les droits miniers à ACD______, ce qui n'avait pas été prouvé, cela ne signifiait pas que CGR______ avait acquis les droits miniers en 2008 de manière légale, sans corruption (no 642 et 1002).

-        ABP______ a reçu d'importantes sommes d'argent de CGR______, mais non à des fins de corruption (nos 643ss).

-        CGR______ n'a pas corrompu AAO______ en lui remettant à deux occasions en 2006, une fois par AAG______ et l'autre par AAA______, des voitures miniatures en or incrustées de diamant (no 673, 674).

Par arrêt du 29 novembre 2019 statuant sur appel de CGR______, la High Court a considéré l'appel infondé.

l) CIRDI

Compte tenu de la requête arbitrale introduite (PP 300'625), le 8 septembre 2014, CGR______ GUERNESEY, CGR______ GUINEE et CGR______ GUINEE SARL ont introduit une requête contre la République de Guinée par devant le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI, affaire no. ARB/14/22; (https://icsid.worldbank.org/fr/Pages/cases/casedetail.aspx?CaseNo=ARB/14/22).

Le 1er août 2014, la République de Guinée a introduit à son tour une requête.

Le 13 mars 2015, ABY______ a vendu ses parts dans ACD______ GUERNESEY (51 %) à CGR______ pour USD 1.- dans la mesure où elle ne souhaitait pas être partie à la procédure CIRDI.

CGR______ ayant soutenu que les contrats produits par la Guinée étaient des faux, le CIRDI a désigné des experts aux fins d'examen de l'authenticité des documents suivants (ci-après: les onze documents signés par Madame E______) (clé USB en PP 303'708) :

-        Protocole d'accord entre AAV______ et Madame E______ du 20 février 2006 (R-24);

-        Lettre d'engagement n° 1 de AAV______ envers Madame E______ légalisée le 21 juillet 2006 (R-25);

-        Lettre d'engagement n° 2 de AAV______ envers Madame E______ légalisée le 21 juillet 2006 (R-26);

-        Protocole CGR______ GUINEA SARL (AAA______) / ABD______ du 20 juin 2007 (R-27);

-        Contrat de commission CGR______ GUINEA SARL (AAU______) / ABD______ du 27 février 2008 (R-28);

-        Protocole d'accord CGR______ GUINEA SARL (AAU______) / ABD______ 28 février 2008 (R-29);

-        Attestation de cession d'actions de Madame E______ à CGR______ du 2 août 2009 (R-269);

-        Engagement de paiement de AAV______ envers Madame E______ du 8 juillet 2010 (R-30);

-        Contrat AAV______ / ABD______ du 3 août 2010 (R-31);

-        Contrat AAV______ / ABD______ - Madame E______ portant sur USD 3.1 millions non daté (R-32);

-        Contrat AAV______ / ABD______ portant sur USD 5.5 millions du 3 août 2010 (R-346).

A relever que les experts disposaient des originaux des documents susmentionnés, à l'exception des documents nos 8 et 11, qui étaient des copies.

Les parties ont eu la possibilité de commenter le rapport préliminaire puis un rapport définitif, qui confirmait les conclusions de ce dernier, a été rendu.

Selon le rapport définitif du 12 février 2018 (PP 303'509ss), il n'existe aucun indice de substitution de page, d'altération de texte, d'ajout de texte ou autres irrégularités qui indiqueraient que les documents litigieux auraient été falsifiés. Ainsi, notamment, AAA______ a signé le contrat avec ABD______ du 20 juin 2007 et AAU______ a signé les contrats des 27 et 28 février 2008. En outre, les signatures de Madame E______ sur les contrats sont issues de la même personne. Les experts ont été entendus les 26 et 27 mars 2018 et ont confirmé les termes de leur rapport (PP 5'018'057ss).

Le 30 avril 2019, la procédure CIRDI a été suspendue d'entente entre les parties.

m) Enquêtes privées

m.a) La fondation V______ a ordonné un audit auprès d'experts privés, soit Pepper Hamilton LLP- Kasowitz Benson Torres & Friedman LLP Freeh Group International Solutions, LLC. CGR______ en a fait de même en mandatant les experts privés CROWE HORWATH.

Selon le rapport de Louis Joseph FREEH et Joseph Isadore LIEBERMAN rendu le 29 juillet 2015 (PP 300'545), les experts n'ont pas trouvé de preuves crédibles directes qui démontreraient que Monsieur C______, ou l'un des employés, cadres ou dirigeants de CGR______, ou ses entités apparentées, ont violé les lois des Etats-Unis, en particulier le FCPA et la loi sur l'entrave à la Justice, dans le cadre de l'obtention de permis d'exploitations minières et de la conduite des opérations commerciales en Guinée. Il n'existe, par ailleurs, pas de preuves crédibles directes qui démontreraient que quiconque au sein de CGR______ a ordonné des paiements à des fins de trafic d'influence de fonctionnaires gouvernementaux guinéens dans le cadre des activités minières de CGR______. De même, il n'existe aucune preuve crédible qui prouverait que quiconque chez CGR______ a participé avec Monsieur A______ à une entrave d'une enquête américaine.

Selon le rapport CROWE HORWATH rendu le 20 mars 2016 (PP 301'000), experts auxquels il était demandé si les coûts qui leur étaient soumis étaient proportionnés et en lien avec le projet de Simandou, il n'existait aucun élément qui leur permettait de penser, sous tous les aspects matériels, que les coûts engendrés par le projet n'étaient pas légitimes au 31 décembre 2012. Les auteurs du rapport se sont notamment basés sur les documents transmis par la fondation et sur des affidavits écrits de MM. AAE______, AAB______, Monsieur A______, AAU______, AJ______, AAA______ et AX______.

m.b) Appréciation des faits

Le ministère public ou les tribunaux ont recours à un ou plusieurs experts lorsqu'ils ne disposent pas des connaissances et des capacités nécessaires pour constater ou juger un état de fait (art. 182 CPP).

En l'occurrence, les experts mandatés ne se sont pas prononcés sur des points techniques que le Tribunal ne pourrait résoudre seul. Ils se sont prononcés sur les pièces qu'une partie leur a soumise et en ont tiré leurs propres conclusions. Or, il appartient au Tribunal de déterminer les faits sur lesquels il va se baser pour en tirer les conclusions qui s'imposent. Par ailleurs, il sera relevé que les experts mandatés n'ont pas eu connaissance de l'intégralité des pièces soumises au Tribunal (i.e. courriels, déclarations) et n'ont pas examiné le bien-fondé des transactions financières qui leur étaient soumises (e.g. la réalité économique des factures ou contrats justifiant les transactions). En effet, il ne suffit pas qu'un versement ait une cause pour exclure toute corruption, encore faut-il que cette cause soit réelle.

Il en résulte que le Tribunal fait sa propre appréciation des faits de la cause en s'écartant, le cas échéant, des conclusions des experts privés.

n) Présente procédure pénale suisse

n.a) Le 27 août 2013, le Ministère public genevois a ouvert la présente procédure.

Le 24 février 2017, la Guinée a déposé plainte pénale et s'est constituée partie plaignante à la présente procédure. Le 26 juin 2019, après qu'un accord a été conclu avec CGR______ (PP 304'793), la Guinée a retiré sa constitution de partie plaignante à la présente procédure.

Diverses personnes ont été entendues à Genève ou sur commissions rogatoires.

n.b) Madame E______ a été entendue, sur commission rogatoire, en Floride, les 6 et 7 juillet 2017 (PP 500'687ss). En substance, elle a confirmé ses déclarations faites, le 23 février 2017, par-devant les autorités américaines (PP 500'755ss).

En résumé, elle a déclaré avoir rencontré le Président AAO______ par le biais de sa soeur, qui travaillait pour lui, alors que son père le connaissait. Sur instructions de son père, en 2000, elle avait épousé le Président et arrêté ses études. Il s'agissait d'un mariage coutumier, son père l'avait donnée à son mari (PP 500'729).

Avec AAO______, elle jouait le rôle de conseillère et il était connu qu'elle bénéficiait de la confiance du Président. En 2005, sa soeur lui avait demandé de répondre à l'appel téléphonique de AAN______, qui l'avait informée vouloir la rencontrer. Le précité était venu la rencontrer à son domicile de Dubréka accompagné du demi-frère de Madame E______, K______ et de Monsieur A______, qui s'était présenté comme étant le représentant de CGR______. AAN______ l'avait présentée à Monsieur A______ comme étant la dernière femme du Président et lui avait dit que CGR______ souhaitait de l'aide et était prête à lui payer USD 12 millions à elle-même et aux personnes de bonne volonté. Monsieur A______ avait confirmé ces dires et précisé qu'il se chargerait des contrats. Ils voulaient qu'elle persuade le Président de leur donner Simandou. Elle devait "ouvrir la porte".

Elle avait informé le Président qu'"ils" voulaient le voir; le Président avait été d'accord. Monsieur A______ avait donc rencontré le Président AAO______, qui avait fait appeler le ministre des mines AAI______ et lui avait demandé de faciliter les démarches de CGR______. Elle a précisé que le Président avait accepté de favoriser CGR______ car CGR______ lui avait promis son aide.

CGR______ avait obtenu les permis sur les zones Nord et Sud de Simandou. CGR______ avait ensuite organisé une réunion, dans la cour du Palais présidentiel, entre le Président, Monsieur C______, Monsieur A______, AAB______, K______, AAA______ et AM______. A cette occasion, soit en 2006, Monsieur C______ lui avait promis les 5 % et K______ lui avait donné USD 200'000.- en espèces, Monsieur A______ lui ayant au préalable dit que Monsieur C______ lui avait amené de l'argent.

Elle avait ensuite été invitée par AAU______ à la réception organisée par CGR______, le précité souhaitant que la population la voit avec CGR______ afin de gagner en crédibilité en Guinée.

En février 2007, elle avait aidé CGR______ à obtenir les permis d'uranium en appelant le ministre des mines et en l'invitant à recevoir son demi-frère. CGR______ lui avait promis 5 %, tout comme pour les permis de bauxite. Un protocole d'accord daté du 20 juin 2007 avait été signé en ce sens en présence de Monsieur C______, qui était en train de manger une petite salade sans huile.

Début 2008, elle avait rencontré AAU______ et ACB______, qui lui avaient demandé son aide et de signer de nouveaux contrats. A cette occasion, AAU______ avait appelé Monsieur C______ sur son téléphone et l'avait mis sur haut-parleur. Monsieur C______ avait demandé à AAU______ de donner à Madame E______ tout ce qu'elle voulait. Ensuite, ACB______ était allé chercher les contrats signés par AAU______ et les lui remis pour signature.

En avril 2008, AAU______ et K______ étaient allés rencontrer le Président. Madame E______ était présente. Le Président avait fait appeler ABI______, qui avait peur de retirer les concessions à AAL______.

Quelques temps après, AAU______ avait appelé Madame E______ pour se plaindre que les blocs n'avaient toujours pas été attribués à CGR______. Une nouvelle rencontre avait eu lieu avec le Président en présence du nouveau ministre des mines, ABM______, qui ne pouvait pas refuser ce que le Président lui demandait de faire, soit attribuer les blocs 1 et 2 à CGR______.

A un moment donné, CGR______ avait arrêté de lui payer ce qu'elle lui devait. Elle en avait parlé au Chef d'état-major, qui s'était tourné vers ABP______. Celui-ci puis le Président ABT______ avait convoqué AAU______ et lui avait demandé de lui payer ce que CGR______ lui devait. AAU______ et AAB______ étaient allés la rencontrer et lui avaient proposé une sorte de contrat à l'amiable, qu'elle avait signé. Ce contrat mettait fin au litige en prévoyant le paiement de millions.

S'agissant du contrat du 20 février 2006, Monsieur A______ le lui avait présenté déjà signé par AAE______. AAV______ était "au milieu" entre Madame E______ et CGR______ car Monsieur C______ ne voulait pas qu'on voie que CGR______ faisait affaire avec Madame E______. Deux lettres d'engagement avaient également été signées concernant la bauxite et l'uranium car CGR______ lui avait promis 5 % sur toutes nouvelles affaires.

Le 2 août 2009, ACB______ était venu la trouver à Freetown et l'avait convaincue de signer l'attestation du 2 août 2009, qui prévoyait le versement de USD 4 millions. ABR______, dont la signature se trouvait également sur le document, était présent.

Par la suite, en 2010 probablement, AAB______ était venue la voir trois fois à Freetown. La première fois, il était muni d'un document prévoyant le versement de USD 5 millions en sa faveur. Comme elle n'avait pas été d'accord, la somme avait été augmentée à USD 5.5 millions. Elle avait compris que Monsieur C______ était derrière tout cela.

S'agissant de l'achat de sucre (transaction 1), Monsieur A______ lui avait acheté du sucre par le biais de AAD______ pour ses affaires personnelles. C'était toutefois CGR______ qui avait payé le sucre.

S'agissant du versement effectué par ABZ______ (transaction 2), elle n'avait jamais rencontré le précité ni fait d'affaires avec celui-ci. Elle savait néanmoins que ABZ______ achetait du matériel à AAU______. Ce paiement était en lien avec les USD 4 millions qui devaient être versés par CGR______. Elle avait fabriqué les factures de ABD______ à hauteur de USD 998'000.- et USD 2'000.- pour justifier le transfert des fonds. Elle n'avait jamais vendu de Caterpillar. Elle avait acheté une maison à Jacksonville avec cet argent. Par ailleurs, elle avait également reçu USD 998'000.- en espèces à Freetown provenant de CGR______.

S'agissant du versement de USD 2 millions (transaction 3), cet argent provenait de CGR______ et faisait partie des USD 4 millions promis. AAU______ l'avait appelée et lui avait demandé où elle souhaitait que cet argent soit versé. Elle avait communiqué ses coordonnées bancaires à la banque Maroco-Guinéenne.

Elle ignorait qui avait versé les USD 1.9 million (transaction 7) car AAU______ ne voulait pas qu'elle le sache, avant de reconnaitre qu'il s'agissant de son mari, ABR______.

S'agissant de l'argent versé par AAB______ (transactions 4, 5 et 6), AAB______ était venu la voir à Miami et lui avait dit que Monsieur C______ leur avait demandé de lui verser l'argent. Le précité et Monsieur A______ lui avaient conseillé d'investir dans l'immobilier. Il était exact que l'argent reçu de Monsieur A______, AAB______ et AAE______ provenait de CGR______.

L'argent versé par N______ (transaction 8a) et les USD 500'000.- versés par ACL______ (transaction 8b) faisaient partie de l'argent que lui devait CGR______ et qu'elle réclamait à Monsieur A______. Il en était de même des montants ayant transité par ABF______ (transactions 9 à 11).

En tout, elle avait reçu USD 10 millions, montant qu'elle méritait dans la mesure où elle avait "fait sa part", soit elle avait "bousculé" son mari, le Président AAO______ pour que CGR______ puisse obtenir les permis.

Elle a ajouté que Monsieur A______ et CGR______ lui avait conseillé de créer une société. Monsieur A______ lui avait précisé que c'était important qu'il y ait une société. Une société ABD______ & CO LTD avait donc été créée pour elle à Genève pour faire "passer l'argent à travers".

Elle n'avait jamais fait d'affaires avec Monsieur A______ dans le domaine des produits pharmaceutiques. En revanche, le précité l'avait aidée à trouver du sucre et du poulet, sans facturer ses services.

Tout le monde savait en Guinée que CGR______ achetait toutes les personnes dont ils avaient besoin.

Il était exact qu'elle avait reçu USD 50'000.- du gouvernement de Guinée en remboursement des frais nécessaires à sa fuite à Freetown. Rien ne lui avait été demandé en échange.

Enfin, Madame E______ a refusé de s'exprimer sur ses rencontres avec Monsieur A______ aux Etats-Unis ou sur la personne qui payait ses honoraires d'avocat se prévalant de la clause de confidentialité figurant dans le "non prosecution agreement".

n.c) Prévenus

n.c.a) Madame B______ a toujours contesté avoir été au courant d'un quelconque acte de corruption dans le cadre de l'octroi des concessions minières en Guinée. Si elle avait signé des documents qui pouvaient être lien avec d'éventuels actes de corruption, elle ignorait totalement que ces documents pouvaient avoir un tel but. Elle ne s'était jamais rendue en Guinée, n'avait jamais rencontré les animateurs de AAV______ - si ce n'était à une reprise, dans le cadre d'une visite de courtoisie, deux d'entre eux à Genève - ni Madame E______ ou AAO______.

n.c.b) Monsieur C______ a toujours contesté toute corruption dans l'attribution des concessions minières en Guinée. En tout état, il n'en était pas au courant. En réalité, il s'agissait d'un complot visant au retrait des concessions légalement attribuées à CGR______.

n.c.c) Monsieur A______ ne s'est jamais exprimé dans le cadre de la présente procédure car il a toujours refusé de le faire, de crainte que ses déclarations puissent être exploitées contre lui par les autorités américaines.

o) Statut marital de Madame E______ / appréciation des faits

Il convient d'examiner la question du statut marital de Madame E______ dans la mesure où celui-ci est contesté par les prévenus.

Les prévenus contestent que Madame E______ ait été l'épouse de AAO______. Ils en veulent pour preuve qu'aucun membre de la famille de feu AAO______ et de la famille de Madame E______ ne reconnaît l'intéressée comme épouse du Président. A l'appui de leurs dires, ils produisent diverses attestations, toutes postérieures à l'ouverture de la procédure administrative du Comité technique, voire à l'ouverture de la présente procédure pénale, du conseil de la famille de Madame E______ (PP 349'362), du neveu de feu AAO______ (PP 349'064), du jeune frère de AAO______ et doyen de la famille de AAO______ (PP 349'065), du doyen de la famille de Madame E______ (PP 349'066), du père de Madame E______ (PP 349'067), des frères de AAO______ (PP 349'068).

En dépit de cela, le Tribunal retient que Madame E______ était bien la quatrième épouse de feu le Président AAO______, à l'instar de ce qu'a considéré la Tribunal arbitral de la London Court of International Arbitration (LCIA) (no 544 de la sentence arbitrable, PP 3'002'146).

En effet, tout d'abord, il appert que Madame E______ a toujours été considérée comme l'épouse du Président AAO______ par CGR______ et par les ayant-droits de AAV______ (cf. courriel du 10 mai 2006, dans lequel Madame E______ est désignée comme The Lady, PP 500'303; courriel du 7 juin 2009 de AAB______ à Monsieur C______, dans lequel le premier cité mentionne "(...) Madame E______, wife of late president of Guinea", PP 500'594; courriel du 18 septembre 2007 de AAU______ à Monsieur C______ sur ses rencontres avec les personnes clés dont The Lady et le Président, PP 5'010'816).

Dans leurs rapports à l'extérieur, les ayant-droits de AAV______ désignaient également Madame E______ comme étant l'épouse du Président AAO______. Ainsi, en 2007 déjà, Monsieur A______ a demandé à son gestionnaire de fortune d'ouvrir un compte pour l'intéressée mentionnant sa qualité d'épouse, ce qui faisait d'elle une PEP (Personne Exposée Politiquement) selon le gestionnaire (cf. PV ABE______, PP 500'047).

Par ailleurs, elle est apparue dans la cérémonie du 19 septembre 2006, comme assumant un rôle officiel, escortée par la garde présidentielle. Elle était également présente lors de plusieurs réunions avec le Président.

Les ministres AAI______ (PV, PP 500'237, 500'753 et CIRDI PP 500'914), ADO______ (PV CIRDI, PP 500'914) et ACV______ (PV 10.07.15, p. 3, PP 500'247) ont également indiqué que Madame E______ était l'épouse de AAO.

Madame E______ elle-même a toujours déclaré avoir épousé le Président AAO______ en 2000, mais qu'il s'agissait d'un mariage coutumier (PV CRI CH aux USA des 06/07.07.2017, PP 500'690 et 500'729; PV USA du 23.02.2017, PP 500'755; PV CRI Guinée aux USA, PP 700'478; enregistrements rencontres et écoutes USA), précisant que pour tout le monde elle était la femme du Président (PP 500'690).

Par ailleurs, Madame E______ était au bénéfice d'un passeport diplomatique confirmant ce statut (PP 5'012'571) peu importe que celui-ci ait été délivré en mars 2007 seulement.

Ce statut marital est confirmé par la teneur de la conversation téléphonique du 11 avril 2013 enregistrée entre Monsieur A______ et Madame E______, le précité insistant pour que Madame E______ nie avoir été l'épouse du Président. Lors de cette conversation, Madame E______ a indiqué qu'il était possible d'épouser quatre femmes en Guinée sans qu'il n'y ait besoin que ce soit officialisé et qu'elle ne pouvait pas mentir sur son statut d'épouse du Président.

Ce n'est qu'après l'ouverture de la procédure par le Comité technique que CGR______ et les ayant-droits de AAV______ ont nié la qualité d'épouse du Président de Madame E______ (cf. déclarations des employés de CGR______, i.e. déclaration de AAA______, PP 500'905). Ce revirement ne peut être compris que comme une stratégie de défense visant à éliminer les liens maritaux gênants existants entre feu Président AAO______ et Madame E______, comme l'a exprimé Monsieur A______ à l'intéressée le 11 avril 2013, précisant que CGR______ (les avocats à Paris et en Angleterre) se penchait sur cette question. D'ailleurs, les avocats de CGR______ ont rédigé une attestation que Monsieur A______ devait faire signer à Madame E______, ce qu'elle a fait en supprimant la mention sur son absence de statut marital, attestation dont le projet avait été envoyée à Monsieur C______ (PP 500'676-7). Dans ces circonstances, les attestations écrites des familles de AAO______ et de Madame E______ produites par la défense de Monsieur C______ ne convainquent pas sur l'absence de liens maritaux entre Madame E______ et feu le Président AAO______ ce d'autant plus qu'on ignore les circonstances dans lesquelles ces attestations ont été établies.

Il sera retenu que Madame E______ était la quatrième épouse du Président AAO______, peu importe qu'il ne s'agisse que d'un mariage coutumier. En tout état, il est établi qu'elle était considérée comme étant la quatrième épouse du Président AAO______.

p) Authenticité des documents / appréciation des faits

p.a) A titre préalable, il sera remarqué que les prévenus n'avancent pas, à juste titre, que le contrat du 14 février 2006 conclu entre AAV______ et CGR______ GUINEE et que les quatre contrats conclus le 20 février 2006 seraient des faux.

En effet, s'agissant du contrat du 14 février 2006, les actions ont bien été transférées à AAV______, alors que les contrats des 20 février 2006 conclus entre AAV______ et AAM______ / K______, respectivement entre AAV______ et Madame E______ ont été envoyés à Madame B______ pour signature et que le contrat du 20 février 2006 a été envoyé à la précitée après signature. Enfin, il sera relevé la similitude et l'imbrication des paiements prévus dans les contrats conclus entre, d'une part, AAV______ et CGR______ GUINEE et, d'autre part, AAV______ et AAM______ / K______, respectivement AAV______ et AAF______ (les USD 19'500'000 (15'000'000 + 4'500'000) prévus dans le contrat avec AAV______ équivalent aux sommes dues à AAF______, AAM______ et K______ (USD 19'500'000 = 2'975'000 + 900'000 + 12'025'000 + 3600'000). Ces éléments démontrent que le contenu des contrats correspond à la réalité et attestent de l'authenticité de ceux-ci. Par ailleurs, les experts mandatés dans le cadre de la procédure CIRDI ont conclu à l'authenticité de ces documents.

Dans le cadre de la présente procédure, les prévenus contestent l'authenticité des contrats conclus entre CGR______ et Madame E______ ou ABD______, soit en particulier les documents suivants:

-        Lettres d'engagement du 21 juillet 2006;

-        Protocole CGR______ GUINEA SARL / ABD______ du 20 juin 2007 (R-27);

-        Contrat de commission CGR______ GUINEA SARL (AAA______) / ABD______ du 27 février 2008 (R-28);

-        Protocole d'accord CGR______ GUINEA SARL (AAU______) / ABD______ 28 février 2008 (R-29);

-        Attestation de cession d'actions de Madame E______ à CGR______ du 2 août 2009 (R-269).

S'agissant des lettres d'engagement du 21 juillet 2006, leur teneur rappelle la participation de Madame E______ à hauteur de 5 %, ce qui correspond à la participation prévue dans le contrat entre AAV______ et Madame E______ du 20 février 2006, contrat qui avait été envoyé à Madame B______, et qui mentionne expressément le contrat conclu le 20 février 2006 entre CGR______ et la Guinée. Par ailleurs, les experts mandatés dans le cadre de la procédure CIRDI ont conclu à l'authenticité de ces documents. Enfin, Monsieur A______ a déclaré lors de l'audience de jugement avoir signé ces lettres d'engagement (PV du 14 janvier 2021, page 5). Partant, ces lettres du 21 juillet 2006 doivent être considérées comme authentiques.

Le protocole signé le 20 juin 2007 concerne l'uranium, alors que les permis d'uranium ont été sollicités le 5 février 2007 et octroyés le 28 février 2007 est rédigé sur le même modèle que les lettres d'engagement du 21 juillet 2006 qui concernaient la bauxite et le protocole d'accord du 20 février 2006 qui visait le fer. Ces accords prévoyaient la même participation de Madame E______ dans le projet, soit 5 %. Il a été signé par AAA______, alors CEO de CGR______ depuis trois mois. Par ailleurs, les experts mandatés dans le cadre de la procédure CIRDI ont conclu à l'authenticité de ce document Partant, ce protocole du 20 juin doit être considéré comme authentique.

Les 27 et 28 février 2008, CGR______ GUINEE SARL, soit pour elle AAU______, a conclu deux contrats avec ABD______, le premier prévoyant le versement d'un montant de USD 4 millions et le second une participation de 5 %. La conclusion de ces contrats était rendue nécessaire dès lors que CGR______ allait racheter la participation de AAV______, raison pour laquelle CGR______, et non plus AAV______, devait signer le contrat. Ces éléments vont dans le sens de l'authenticité de ces contrats, authenticité définitivement établie par la teneur de l'enregistrement de la rencontre entre Monsieur A______ et Madame E______ du 11 avril 2013, duquel il ressort que Monsieur A______ veut que les contrats originaux, notamment ceux des "27 et 28 février" soient détruits. Par ailleurs, le fait que l'attestation du 2 août 2009 reprenne le montant de USD 4 millions corrobore l'authenticité de ces contrats. Il en est de même de l'exécution à hauteur de USD 3 millions sur les USD 4 millions convenus entre les parties avant la renégociation du montant en été 2010. Au surplus, les experts mandatés dans le cadre de la procédure CIRDI ont conclu à l'authenticité de ces contrats. Partant, les contrats des 27 et 28 février 2008 doivent être considérés comme authentiques.

S'agissant de l'attestation de cession d'actions de Madame E______ du 2 août 2009, pour les mêmes motifs, cette attestation est authentique. Par ailleurs, les experts mandatés dans le cadre de la procédure CIRDI ont conclu à l'authenticité de ce document. Partant, l'attestation du 2 août 2009 doit être considérée comme authentique.

Enfin, s'agissant de tous les documents en lien avec la négociation d'un nouveau montant à verser à Madame E______ à la suite de la dénonciation de l'accord du 2 août 2009 portant sur le rachat de sa participation pour USD 4 millions, soit les documents suivants:

-        engagement de paiement de AAV______ envers Madame E______ du 8 juillet 2010

-        contrat AAV______ / ABD______ du 3 août 2010

-        contrat AAV______ / ABD______ - Madame E______ portant sur USD 3.1 millions

-        contrat AAV______ / ABD______ portant sur USD 5.5 millions du 3 août 2010,

les originaux ont été retrouvés chez AAB______ lors de la perquisition de son domicile. Au surplus, il sera relevé la concordance entre les montants négociés (USD 5.5 millions) et les montants effectivement versés à Madame E______. Par ailleurs, les montants négociés ressortent également des notes retrouvées chez AAB______. Ces éléments tendent à prouver l'authenticité de ces documents. En outre, les experts mandatés dans le cadre de la procédure CIRDI ont conclu à l'authenticité de ces documents, qui doivent, partant, être considérés comme authentiques.

Enfin, il ressort des écoutes du FBI que Monsieur A______ s'est rendu en Floride pour détruire les orignaux des documents litigieux et non seulement les contrats des 27 et 28 février 2007 ou de simples copies qui circulaient. Les explications de Monsieur A______ à ce sujet ne sont nullement crédibles et démenties par les éléments du dossier.

q) Rôle d'intermédiaire et d'écran de AAV______

Sur la base des éléments du dossier, le Tribunal retient que AAV______ a servi d'intermédiaire et d'écran entre CGR______ et Madame E______.

q.a) D'abord, d'un point de vue objectif, il est établi que les USD 8.5 millions versés à Madame E______ proviennent de CGR______.

AAV______ a servi d'interface avec AAM______ / K______, AAF______ et Madame E______.

Les contrats conclus le 20 février 2006 entre AAV______ et AAM______ / K______ ainsi qu'AAF______ sont le miroir du contrat conclu le 14 février 2006 entre CGR______ et AAV______.

Les "Milestones" sont exactement les mêmes dans les deux étages contractuels, de même que la somme globale de USD 19.5 millions.

Le contrat du 14 février 2006 prévoyait que AAV______ devait déployer ses efforts pour obtenir un accord sur les blocs 1 et 2 et assister CGR______ pour l'acquisition de ces blocs. AAV______ devait également assister CGR______ de toute manière possible pour le projet de fer de Simandou.

Les sommes dues à AAM______ / K______ et AAF______, selon la première échéance contractuelle, ont été apportées directement par AAG______, à Conakry, le 20 février 2006. Ces paiements ont donc directement été effectués par CGR______, sans passer par AAV______.

Alors que AAV______ aurait dû recevoir de CGR______ la somme de USD 500'000.- en exécution de la première échéance contractuelle, la société n'a rien reçu.

D'ailleurs, AAV______ n'avait pas de compte bancaire lors de la conclusion des contrats des 14 et 20 février 2006. AAV______ n'a ouvert un compte bancaire que quatre années plus tard.

Le contrat du 28 février 2008 conclu directement entre CGR______ et ABD______, soit Madame E______, reprend les termes et conditions du contrat du 20 février 2006, soit une participation de 5 % dans les blocs 1 et 2.

q.b) Il ressort des éléments suivants que CGR______ connaissait le rôle joué par AAV______.

AAT______ a été remplacée par AAV______, une société de domicile n'ayant pas servi au préalable. Ce remplacement a été demandé par AAG______. Par cette substitution, CGR______ a cherché à obtenir une société vierge de toute activité, mais en à profiter pour garder la maîtrise des opérations.

Plusieurs démarches visant à cacher les ayant-droits économiques de AAV______ ont été effectuées.

Les 8825 actions de AAV______ (soit 17.65 %) sont restées propriété de AD______ BVI, à titre fiduciaire, durant un an, soit jusqu'au 10 janvier 2007, avant d'être transférées à une structure opaque, laquelle mentionnait faussement que le protector, un gestionnaire de fortune, était l'ayant-droit économique.

Ainsi, Monsieur A______ et ses associés ne sont jamais apparus comme les ayant-droits économiques de AAV______ et ce, contrairement à la réalité.

AAV______ n'a ouvert un compte bancaire qu'en 2010, soit quatre ans après le début de ses activités, alors qu'elle était censée recevoir, selon un échéancier convenu, la somme de USD 19'500'000.-.

Le contrat entre AAV______ et AAM______ / K______ a été envoyé, le 15 février 2006, pour signature à Madame B______ qui l'a fait modifier moyennant l'octroi d'une procuration.

CGR______ connaissait les cinq contrats conclus les 14 et 20 février 2006, comme en témoigne notamment la venue de AAG______ à Conakry avec la somme de CHF 500'000.- destinée à AAM______ / K______ et à AAF______ et les protocoles d'accord du 20 février 2006.

CGR______ connaissait les contrats signés avec ABD______, les 27 et 28 février 2008, dans la mesure où ils ont été signés par AAU______.

Les versements effectués à Madame E______ ont été effectués par CGR______.

Lors de la restructuration du groupe avant le vente à ABY______, les intermédiaires, dont AAV______, ont été effacés.

Dans la procédure de due diligence menée par ABY______ avant la joint-venture, CGR______ a donné de fausses garanties quant à l'absence de corruption pour obtenir les droits miniers. CGR______ a également cherché à cacher les liens entre Madame E______ et K______.

AX______ a donné des instructions pour que toutes les références aux intermédiaires soient effacées des rapports et de la comptabilité.

Le paiement de USD 22 millions est apparu de manière mensongère dans les comptes consolidés de CG______ GUERNESEY. Il en va de même du paiement de USD 3 millions.

Le rachat des actions de AAV______ a été effectué de manière croisée. Avant la fusion, CGR______ TREASURY SERVICES payait sur le compte de ABJ______ et, après la fusion, AE______ payait sur le compte de AAV______. Ainsi, CGR______ n'a jamais payé directement la rémunération due à AAV______.

AAV______ a été radiée après avoir été payée. AE______ a été radiée également.

CGR______ et Monsieur A______ ont tenté de détruire les contrats originaux et ont voulu cacher le rôle et le statut marital de Madame E______ par la signature d'une attestation.

Les intervenants ont tous compris que CGR______ était derrière AAV______:

-        AAM______;

-        Madame E______ (attestation du 2 décembre 2013, conversations Monsieur A______, audition procédure USA, audition procédure suisse);

-        ABZ______.

AAV______ fait partie des intermédiaires qui ont fait parvenir des sommes d'argent à Madame E______, au même titre que AAD______, N______, O______ / D______, de même que ABZ______ et ACL______.

S'agissant de l'apport de AAV______, les thèses de Monsieur C______ et de Monsieur A______ sont contradictoires.

D'une part, Monsieur A______ indique qu'il était un apporteur d'affaires et que son rôle consistait en la mise à disposition de son temps, de son réseau et de son savoir-faire relationnel en Afrique. Or, Monsieur A______ et ses associés ont été largement rémunérés et défrayés, séparément, par CGR______ pour cette activité.

D'autre part, Monsieur C______ a soutenu que AAV______ devait participer aux coûts du projet de fer de Simandou à hauteur de sa participation. Or, à l'évidence AAV______ n'avait pas la capacité financière de le faire.

Enfin, le contrat du 14 février 2006 ne parle pas d'un apporteur d'affaires.

Cette absence alléguée de consensus sur le rôle et l'apport de AAV______ démontre qu'en réalité, cette dernière devait servir d'écran à CGR______ dans l'acquisition des blocs 1 et 2.

Il résulte de ce qui précède que AAV______ a servi d'intermédiaire et d'écran entre CGR______ et Madame E______.

D.B. Faits qualifiés de faux dans les titres

a) D______

D______, citoyen israélien domicilié en Ukraine, ancien pilote militaire dans l'armée israélienne, était considéré par Monsieur C______ comme un ami et partenaire en affaires jusqu'à l'audition de D______ devant le Ministère public genevois (cf. notamment PV Monsieur C______, PP 500'340, 500'533-4).

b) Acquisition des terrains en Roumanie

A titre préalable, il convient de relever que les fonds versés à Madame E______ (transaction 8a) ne proviennent pas du compte personnel Rotweiler de D______, comme retenu dans l'acte d'accusation, mais du compte personnel de D______ auprès de la 11, à Kiev (PP 353'421) (D______/Banque 11______, O______, N______/Banque 13______, Madame E______ + ACL______).

b.a) AB______

ACW______, employé de AB______, s'est occupé de l'acquisition de terrains, en Roumanie, sur la commune de Snagov, par le biais de la société roumaine SC ACX______ INVEST SRL (ci-après: ACX______) (PP 502'588; PP 502'595ss, liste des terrains cf. PP 304'229), dont l'administrateur, ACY______, était alors payé EUR 1'000.- par mois jusqu'au transfert des actions de ACX______ (PP 502'588; cf. témoignage de ACY______, administrateur et actionnaire de ACX______, PP 502'610).

L'acquisition des terres roumaines ne pouvait pas se faire par un étranger, la loi roumaine l'interdisant (cf. PP 502'612 = 4'801'635).

Ainsi, sous le couvert de faux prêts octroyés par ACZ______ à ACX______ (PP 502'612 et PP 502'589, 502'591 et 502'715ss), les terrains roumains ont été achetés par ACW______ pour le compte de AB______ (cf. demande de financement de EUR 570'000.- de ACW______ à F______, PP 502'588; PP 502'612).

Monsieur C______ a confirmé que ACW______, qui travaillait pour AB______, avait amené cette "affaire" (PV Monsieur C______, PP 501'028; cf. également le courriel du 28.07.2010 de Me Robert ROSU, qui mentionne que ACW______ s'occupe de ACX______).

D______ n'est jamais apparu dans cette acquisition, que ce soit dans le cadre des discussions, des négociations ou du financement.

b.b) Intermédiaire / écran

V______ détient W______, qui détient ADA______., qui détient 50 % de ADB______, qui détient J______ INC. (PP 501'385), qui détient elle-même I______ (cf. schéma du 13 juin 2005).

I______ a mis en place une société écran, L______ (ci-après: L______), afin d'acquérir les terrains roumains.

Or, ______, fils unique de ADC______ et neveu de Monsieur C______, lequel dirige effectivement I______, ne voulait pas investir dans ces terres roumaines (cf. PP 502'615).

Madame B______ s'est occupée de toutes les démarches administratives et corporatives pour ce faire (i.e. PP 502'588-9502'636, 502'640ss, 502'696).

Elle s'est tournée vers MOSSACK FONSECA & CO, à Genève, et a acheté la société L______ (PV Madame B______, PP 502'579), une société des Iles Vierges Britanniques, constituée le 21 avril 2009 (PP 501'140).

Par résolution du 5 juin 2009, L______, représentée par un avocat roumain, a décidé d'acquérir pour le prix de RON 200, soit l'équivalent de CHF 71.-, la société ACX______ (PP 502'635), reprenant de facto également les dettes de la société (cf. prêts ACZ______).

Par courriel du 9 juin 2009, Madame B______ a demandé à MOSSACK FONSECA & CO, à Genève, de lui transmettre l'acte de constitution et les statuts de la société L______, d'émettre le certificat d'actions de L______ et de lui faire parvenir ces documents à son bureau genevois (PP 502'659, 501'125). Par ailleurs, elle a demandé, par le biais de son assistante, de lui faire parvenir une procuration afin de permettre le transfert des actifs le jour même (PP 501'141).

Un certificat d'actions alors été émis selon lequel D______ détenait les 50'000 actions de L______ (PP 502'660). Ce certificat d'actions était néanmoins daté du 21 avril 2009, alors que son émission avait été demandée le 9 juin 2009.

Par contrat du 10 juin 2009, L______ a acquis ACX______ pour RON 200.- (PP 502'670). L'actionnaire et administrateur roumain d'ACX______ a indiqué ne pas avoir reçu d'argent de la vente puisque les actifs de la société ne lui appartenaient pas (PP 502'612).

Selon une attestation manuscrite du 12 juin 2009, signée par D______ et F______, D______ a reçu EUR 9 millions de CG______ (PP 6'000'005ss). Monsieur C______ conteste la véracité de ce document. Entendu dans le cadre de la procédure israélienne par la police israélienne et confronté à D______, F______ a reconnu avoir signé ladite attestation en présence de Monsieur C______ (PP 4'901'596).

Cinq jours après, soit par contrat du 15 juin 2009 soumis au droit des Iles Vierges Britanniques, D______ a vendu ses 50'000 actions dans L______, acquises pour RON 200.-, à I______, au prix de EUR 9 millions, un montant additionnel de EUR 4 millions étant dû si D______ obtenait les droits à bâtir sur les terrains dans un délai de 12 mois (PP 501'059).

Le 15 juin 2009, J______ INC a transféré USD 12'496'550.- soit l'équivalent de EUR 9 millions, à D______, sur son compte personnel Rotweiler auprès de Banque 15______, à Zurich (PP 501'122). Le 18 juin 2009, D______ a transféré USD 7 millions sur le compte de sa société O______ GLOBAL LTD auprès de Banque 12______, à Zurich, USD 3 millions sur son compte personnel auprès de Banque 11______, à Kiev, et 2.47 millions sur le compte de sa société ADE______, auprès de Banque 15______, à Zurich (PP 3'551'673).

Invité par la banque à justifier l'origine des USD 12'496'550.-, par télécopie du 17 juin 2009 de son avocat israélien, D______ a fait parvenir le contrat du 15 juin 2009 (PP 501'058).

Le 16 juin 2009, les administrateurs de paille de L______ ont pris la décision de supprimer le certificat d'actions en faveur de D______ et d'émettre un nouveau certificat d'actions en faveur de I______ (PP 501'124).

Le 15 août 2009, X______ est devenue administratrice de L______ (PP 502'634).

Par amendement daté d'août 2010, D______ et I______ ont convenu de prolonger le délai de 12 mois au 30 août 2011, I______ s'engageant à avancer une somme de EUR 2.5 millions à titre de "success fee" (cf. art. 1), ladite somme devant être retournée si les droits n'étaient pas acquis entretemps (PP 6'000'019).

Madame B______ s'est occupée, au niveau administratif, de l'exécution du paiement en transmettant à I______ les coordonnées pour le paiement des fonds (PP 501'120).

Le 31 août 2010, I______ a transféré à D______, sur son compte auprès de Banque 15______, à Zurich, la somme de USD 3'187'500 (PP 6'000'022), soit l'équivalent de EUR 2.5 millions.

Les droits à bâtir sur les terrains n'ont jamais été obtenus.

Par la suite, D______ a, contractuellement, repris la dette qu'ACX______ avait envers ACZ______ (PP 502'719ss, 502'724, 502'589). D______ a donné le pouvoir à ACW______ de signer le contrat y relatif (PP 502'725). Madame B______ a été impliquée dans le processus d'examen des modalités de reprise de la dette et dans la mise en place desdites modalités (PP 502'589, 502'728).

b.c) Procédure israélienne

D______ et Monsieur C______ ont été entendus dans le cadre d'une procédure pénale israélienne.

Une confrontation a eu lieu entre les intéressés le 17 août 2017.

Invités à transmettre le procès-verbal de cette audition par le Ministère public (cf. CRI du Mp du 16 novembre 2018) puis par la direction de la procédure du Tribunal correctionnel (cf. CRI du 28 février 2020), les autorités israéliennes n'ont pas donné suite à ces requêtes.

AX______ et F______ ont été entendus, à plusieurs reprises, par les autorités israéliennes (PP 4'901'639). Les procès-verbaux de leurs auditions ont été transmis, par la voie de l'entraide, aux autorités suisses (cf. cl. B.4.5.1 à 8).

b.d) Procédure genevoise

Entendu par le Ministère public genevois, D______ a déclaré que l'acquisition s'était faite au moyen des EUR 9 millions prêtés par CG______ (attestation manuscrite du 12.06.09, PP 6'000'0005; PV D______, PP 501'971). Il n'avait jamais possédé, directement ou par l'intermédiaire d'une société, de terrains en Roumaine. Afin de justifier le transfert des EUR 9 millions, Monsieur C______ lui avait demandé de signer le contrat du 15 juin 2009 puis l'amendement, ce qu'il avait fait dans le bureau du précité de Herzliya. Il n'avait jamais été actionnaire de L______ et ignorait avoir été désigné en cette qualité sur le certificat d'actions. Par la suite, Monsieur C______ lui avait demandé de procéder à divers transferts d'avoirs à des tiers, en déduction des EUR 9 millions reçus.

Quant à Monsieur C______, il a déclaré que les terrains avaient été acquis pour EUR 3 à 4 millions, soit USD 5 millions. D______ avait agi en son nom, mais CG______ était associé avec ce dernier dans ce projet à hauteur de 50/50, alors que selon Me GAMMA cette association était de 70/30 (PV, PP 501'029).

b.d.a) Contrat de prêt du 11 juin 2010 entre O______ et P______

Par contrat du 1er juin 2010 (PP 501'679) soumis au droit chypriote, O______ s'est engagé à prêter USD 1 million à P______, le montant devant être remboursé, sans intérêt d'ici au 31 décembre 2012. Le contrat a été élaboré par F______, avocat interne de CG______ (PP 4'901'484, 4'901'611) et le comptable de D______ (PP 6'000'027ss).

Le 15 juin 2010, le montant de USD 1 million a été versé à P______ en exécution du contrat de prêt (PP 6'000'026). Il a été débité du compte de O______ auprès de Banque 12______, à Zurich.

Sur demande de la banque qui exigeait des clarifications sur l'arrière-plan économique du transfert, le contrat a été transmis à celle-ci avec la précision "prêt pour des projets personnels en Israël" (PP 3'534'003, 3'534'025).

Le 15 juin 2010, le comptable de D______ a transmis le swift du paiement à F______ et à ACR______, employés de CG______ (PP 6'000'025).

Entendue dans le cadre de la présente procédure, Madame B______ a indiqué ne jamais avoir vu ce contrat (PP 501'555). Monsieur C______ en a fait de même, en précisant que la police israélienne lui avait peut-être soumis ce document (PP 501'555).

Entendu par le Ministère public (PP 502'062), D______ a indiqué avoir transféré ladite somme sur demande de Monsieur C______. La somme payée venait en déduction des EUR 9 millions dus à Monsieur C______. Sauf erreur de sa part, il s'agissait du premier versement en déduction de ce montant.

b.d.b) G______ : Q______ et T______

USD 750'000.- le 15.04.2011

USD 250'000.- le 15.04.2011

USD 250'000.- le 01.06.2011

USD 290'000.- le 16.09.2011

USD 250'000.- le 25.01.2012

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USD 1'790'000.-

Entre les 15 avril 2011 et 25 janvier 2012, D______ a transféré, par l'intermédiaire de sa société O______, la somme de USD 1'790'000.- en cinq versements à deux sociétés, Q______ INC et T______, dont l'ayant-droit économique est G______ (PV Monsieur C______, PP 501'047).

A relever que G______ et Monsieur C______ se connaissent et ont été condamnés, le 17 décembre 2020, par les autorités judiciaires roumaines, de concert, par contumace et en dernière instance, à 5 ans de prison.

Entendu par le Ministère public (PP 502'059), D______ a déclaré que Monsieur C______ lui avait demandé de verser ces montants, qui ne correspondaient à aucune prestation réelle, lesquels venaient en déduction du montant dû de EUR 9 millions.

Quant à Monsieur C______, il a contesté avoir donné des instructions de paiement à D______. G______ avait travaillé pour les sociétés détenues par les fondations V______ et AR______ (PP 502'060).

1. Contrat du 1er mars 2011 entre Q______ et O______ / USD 750'000.-

Par contrat du 1er mars 2011 (PP 6'000'031) soumis au droit anglais, Q______ INC s'est engagée à fournir divers services à O______ dans le centre est de l'Europe, en 2011, moyennant versement de USD 750'000.- à verser d'ici au 31 (sic!) avril 2011 sur un compte bancaire chypriote.

Le 5 avril 2011 (PP 6'000'034), Q______ INC a facturé à O______ ses services pour USD 750'000.-.

Selon instructions du 14 avril 2011 (PP 501'851 ou 3'533'838), l'avocat israélien de D______ a sollicité le paiement de USD 750'000.- du compte O______ auprès de Banque 12______, à Zurich, sur le compte de Q______ INC auprès d'une banque chypriote, conformément au contrat du 1er mars 2011, qui était joint à l'ordre (PP 3'533'840, 501'845) et à la facture du 5 avril 2011.

Il ne ressort pas de la procédure que la facture a été transmise à la banque.

Ledit montant a été transféré le 15 avril 2011 (PP 6'000'035).

2. Contrat du 1er mars 2011 entre T______ et O______ / USD 250'000.-

Par contrat du 1er mars 2011 (PP 6'000'036) soumis au droit anglais, T______ s'est engagée à fournir divers services à O______ dans le centre est de l'Europe, en 2011, moyennant le versement de USD 250'000.- d'ici au 30 avril 2011 sur un compte bancaire israélien.

Le 5 avril 2011 (PP 6'000'039), Q______ INC a facturé à O______ ses services pour USD 250'000.-.

Le 14 avril 2011 (PP 3'533'836), l'avocat israélien de D______ a instruit la banque de procéder au paiement, conformément au contrat du 1er mars 2011, qui était joint à l'ordre (PP 3'533'843) et à la facture du 5 avril 2011.

Il ne ressort pas de la procédure que la facture a été transmise à la banque.

Ledit montant a été transféré le 15 avril 2011 du compte O______ auprès de Banque 12______, à Zurich (PP 6'000'040).

D______ a déclaré (PP 502'060) que Monsieur C______ lui avait demandé de payer USD 1 million à G______. L'entourage du précité avait ensuite appelé son directeur financier et lui avait transmis les coordonnées pour procéder aux deux versements.

3. Contrat du 1er juin 2011 entre Q______ et O______ / USD 250'000.-

Par contrat du 1er juin 2011 (PP 6'000'044) soumis au droit anglais, Q______ INC s'est engagée à fournir divers services à O______ dans le centre est de l'Europe, en 2011, moyennant le versement de USD 250'000.- d'ici au 20 juin 2011 sur un compte bancaire chypriote.

Par instruction du 21 juin 2011, l'avocat israélien de D______ a requis la banque de payer ce montant conformément au contrat du 1er juin 2011 et à la facture y relative du 20 juin 2011 (PP 501'699).

Il ne ressort pas de la procédure que le contrat et la facture ont effectivement été joints à l'ordre (cf. PP 3'533'869, 3'534'005).

Ledit montant a été transféré le 1er juin 2011 du compte O______ auprès de Banque 12______, à Zurich (PP 6'000'047).

4. Contrat entre Q______ - O______ du 1er septembre 2011

Par contrat du 1er septembre 2011 (PP 501'703) soumis au droit anglais, Q______ INC s'est engagée à fournir divers services à O______ dans le centre est de l'Europe, en 2011, moyennant le versement de USD 290'000.- d'ici au 14 septembre 2011 sur un compte bancaire chypriote.

Le 14 septembre 2011 (PP 6'000'069), Q______ INC a facturé à O______ ses services pour USD 290'000.-.

Par instruction du 15 septembre 2011, l'avocat israélien de D______ a requis la banque de payer ce montant conformément au contrat de septembre 2011 et à la facture y relative du 14 septembre 2011 (PP 3'533'884). Le contrat était joint à l'ordre (PP 3'533'886).

Il ne ressort pas de la procédure que la facture a été transmise à la banque.

Ledit montant a été transféré le 16 septembre 2011 du compte O______ auprès de banque 12______, à Zurich (PP 6'000'071).

5. Contrat T______ - O______ du 1er janvier 2012

Par contrat du 1er janvier 2012 (PP 501'717) soumis au droit anglais, T______ s'est engagée à fournir divers services à O______ dans le centre est de l'Europe, en 2012, moyennant le versement de USD 250'000.- d'ici au 31 janvier 2012 sur un compte bancaire israélien.

Par instruction du 24 janvier 2012, l'avocat israélien de D______ a requis la banque de payer USD 250'000.- conformément au contrat du 1er janvier 2012 (PP 3'533'913-4).

Par la suite, le contrat du 1er janvier 2012 a été transmis à la banque afin de justifier l'arrière-plan économique de la transaction (PP 3'533'985, 3'534'008).

Ledit montant a été transféré le 25 janvier 2012 du compte O______ auprès de banque 12______, à Zurich (PP 6'000113).

b.d.c) Facture N______ / transaction 8a

Le 13 juin 2011 (PP 6'000'042), N______ a facturé à O______ USD 1.5 million pour ses services de conseil dans le sud de l'Afrique pour les années 2010 et 2011.

Cette facture a été envoyée par AAB______ à D______ le 16 juin 2011, conformément à la teneur de l'entretien téléphonique qu'il avait eu avec AX______ (PP 6'000'041). D______ a demandé à son comptable de payer le montant (PP 6'000'041).

Par instruction du 20 juin 2011, l'avocat israélien de D______ a requis la banque de payer ce montant conformément à la facture du 13 juin 2011 (PP 501'695).

Il ne ressort pas de la procédure que la facture a effectivement été jointe à l'ordre (cf. PP 3'533'867, 3'534'005).

Ledit montant a été transféré le 20 juin 2011 du compte O______ auprès de Banque 12______, à Zurich (PP 6'000'043).

Entendu par le Ministère public (PP 501'985), D______ a indiqué avoir transféré ladite somme sur demande de Monsieur C______. Il n'avait jamais investi avec Monsieur C______ en Afrique. La facture émise ne correspondait à aucune prestation réelle. La somme payée venait en déduction des EUR 9 millions dus à Monsieur C______.

b.d.d) Contrat de location de bateau

La fondation V______, dont Monsieur C______ est le premier bénéficiaire, détient un yacht, le M______, par le biais de AT______, dont l'administratrice est Madame B______.

AT______, a conclu un contrat de location avec D______ portant sur la location de ce bateau du 1er au 15 juillet 2011 pour le prix de USD 500'000.-

Le 30 juin 2011, Madame B______, en sa qualité d'administratrice, a signé le contrat (PP 6'000'049). Elle a déclaré que les contrats étaient préparés par le bureau de Londres puis lui étaient envoyés pour signature (PP 500'545).

Selon un addendum du 29 juin 2011 (PP 6'000'056-7), la période de location a été étendue moyennant supplément de USD 142'000.-. Le propriétaire du bateau, soit Madame B______ pour le compte de AT______, n'a pas signé l'addendum.

Ces deux montants ont été payés, les 7 et 12 juillet 2011, au broker, ADF______ LTD, sur un compte bancaire à Londres, depuis un compte bancaire en Suisse de D______ (PP 6'000'055 et 6'000'058).

A relever que D______, par le biais de O______, avait déjà loué le M______ l'année précédente (PP 3'533'785-7 et 3'534'003).

Entendu par le Ministère public (PP 501'977), D______ a contesté avoir loué le M______, soit le yacht de Monsieur C______, alors qu'il était possible qu'il ait été invité sur ce bateau entre les 7 et 12 juillet 2011. Il avait signé le contrat et l'addendum de location à la demande de Monsieur C______, dans le bureau du précité à Herzliya. Le montant de la location avait été déduit des EUR 9 millions dus à Monsieur C______.

b.d.d) Contrat R______ et O______

Par contrat du 1er janvier 2011 (PP 6'000'075) soumis au droit anglais, O______ a engagé les services d'un consultant R______ moyennant versement de USD 700'000.- par an, plus des frais sur un compte bancaire israélien.

Par instruction du 7 octobre 2011, l'avocat israélien de D______ a requis la banque de payer USD 716'000.- conformément au contrat du 1er janvier 2011 (PP 3'533'889). Le contrat était joint à l'instruction (PP 3'533'891).

Ledit montant a été transféré le 7 octobre 2011 du compte O______ auprès de Banque 12______, à Zurich (PP 6'000'078).

Dans le cadre de la présente procédure, Monsieur C______ a indiqué ignorer qui était R______ (PP 501'048, 502'064).

D______ a déclaré (PP 502'064) que Monsieur C______ lui avait demandé de verser ce montant, qui ne correspondait à aucune prestation réelle, et venait en déduction des EUR 9 millions.

b.d.e) Contrat S______ et O______

Par contrat du 3 novembre 2011 (PP 6'000'079) soumis au droit anglais, S______ s'est engagée à fournir divers services à O______, moyennant le versement de USD 625'000.- par an.

Selon la facture (antérieure au contrat) du 15 octobre 2011 (PP 501'715), S______ a facturé à O______ ses services pour USD 625'000.- en lien avec des projets d'investissements en Guinée. L'argent devait être versé sur un compte en Guinée.

Ce montage a été mis en place entre AAU______ et le comptable de D______ (courriels, PP 6'000'084, 6'000'090, 6'000.092-3, 6'000'100).

Par instruction du 14 décembre 2011, l'avocat israélien de D______ a requis la banque de payer USD 625'000.- conformément à un contrat du 3 novembre 2011 et à la facture y relative (PP 3'533'908). Seule la facture était jointe à l'instruction (PP 3'533'910).

Invité à clarifier l'arrière-plan économique de la transaction, le comptable de D______ a, à son tour, transmis à la banque le contrat du 3 novembre (PP 3'534'007).

Par courriel du 20 décembre 2011, ce même comptable a informé AAU______ que la banque avait demandé quelle était la raison du paiement. Des réponses lui avaient été apportées (PP 6'000'092, 6'000'100ss).

Ledit montant a été transféré le 20 décembre 2011 du compte O______ auprès de Banque 12______, à Zurich (PP 6'000'083) sur requête de AAU______ au comptable de D______ (cf. e-courriels, PP 6'000'084, 6'000'090, 6'000'092-3, 6'000'100).

Entendu par le Ministère public (PP 501'979ss), D______ a déclaré que son épouse avait signé le contrat du 3 novembre 2011. S______ n'avait jamais déployé d'activité pour eux. La facture émise ne correspondait à aucune prestation réelle déployée par S______ en faveur de O______. Monsieur C______ lui avait demandé de verser cette somme. Le montant versé avait été déduit des EUR 9 millions.

Quant à Monsieur C______, il a soutenu être totalement étranger à ce transfert d'argent (PP 501'983). Il avait connu l'existence de ABZ______ en 2014.

b.d.e) Contrat U______

L'ayant-droit économique de U______ est ADG______.

Selon une offre non datée (PP 6'000'145), U______ s'est engagée à fournir des services de conseil et d'information de sécurité en Ukraine pour un montant de USD 250'000.-.

Le 12 décembre 2012 (PP 6'000'138), U______ a facturé à O______ ses services pour USD 250'000.-, montant à verser sur son compte auprès de la succursale genevoise d'une banque suisse.

Selon instruction du 17 décembre 2012 (PP 501'735 ou 3'533'940), l'avocat israélien de D______ a sollicité le transfert de ladite somme du compte O______ auprès de Banque 12______, à Zurich, conformément à une facture du 12 décembre 2012.

Il ne ressort pas de la procédure que le contrat ou la facture ont effectivement été joints à l'instruction (cf. PP 3'533'940).

Le 17 décembre 2012, la somme de USD 250'000.- a été transférée sur le compte de U______ auprès de la Banque 16______ et le lendemain sur le compte personnel de son ayant-droit économique, ADG______.

Invité à clarifier l'arrière-plan économique de la transaction, le client a indiqué qu'il s'agissait d'un service de conseil en sécurité informatique (PP 3'534'012).

Dans le cadre de la présente procédure, Monsieur C______ a indiqué ignorer qui était U______, alors qu'il a précisé savoir qui était son ayant-droit économique, soit ADG______, ancien ministre israélien, sans le connaître (PP 501'048 cf. PV police israélienne de Monsieur C______, PP 502'687). Lors de sa confrontation avec la police israélienne, Monsieur C______ avait affirmé qu'il était possible qu'il ait demandé de payer ADH______, associé de U______, afin qu'il fasse des investigations sur ACU______ (PP 502'071; cf. PV police israélienne de Monsieur C______, PP 502'687).

D______ a déclaré (PP 502'070) que Monsieur C______ lui avait demandé de verser ce montant, qui ne correspondait à aucune prestation réelle, lequel venait en déduction des EUR 9 millions.

 

E. AUDIENCE DE JUGEMENT

a) Lors de l'audience de jugement, les trois prévenus ont été entendus.

a.a) Madame B______ a, en substance, confirmé ses précédentes déclarations.

Elle avait vendu AAV______ à AAB______ et ses associés en lien avec un partenariat potentiel avec CGR______. Elle ignorait toutefois tout du projet dont il était question.

Elle n'avait pas lu les accords du 20 février 2006 entre, d'une part, AAV______ et, d'autre part, AAM______ / K______ et Madame E______. Elle ne savait pas qui étaient les intéressés. AAB______ lui avait été recommandé par CGR______, à qui elle faisait entièrement confiance.

En ce qui concernait le rachat des 17,65 %, elle avait suivi le conseil de la direction de CGR______. Les courriers qu'elle avait signés relatifs au versement des USD 22 millions lui avaient été envoyés par F______. Elle ne se souvenait plus de la raison pour laquelle elle avait signé les comptes consolidés de CGR______ GUERNESEY mentionnant faussement que les USD 22 millions versés à AAV______ étaient relatif à l'achat d'une aciérie à Baku.

S'agissant de la restructuration, le transfert des droits miniers dans la nouvelle société avait été effectué à la demande des acheteurs potentiels. Elle n'avait jamais eu de contacts avec ABY______ et ne pouvait pas dire si l'existence de AAV______ avait été révélée à ABY______.

Elle n'avait eu connaissance de la transaction de sucre que par le biais de la présente procédure. Elle ne connaissait pas ABZ______ et ne s'était plus occupée de CGR______ GUINEE après la vente de ses actions à ABY______. Elle ne s'occupait ni des aspects financiers du groupe ni de la comptabilité.

Enfin, en ce qui concernait la vente des terrains en Roumanie, elle avait agi sur instructions de F______. Elle n'avait pas demandé d'explications au sujet de cette vente.

a.b) Monsieur C______ a, en substance, confirmé ses précédentes déclarations.

Il a soutenu avoir rencontré, pour la première fois, AAB______, au début de l'année 2008. Il ne connaissait pas l'intéressé ni ses associés auparavant, pas plus que leur domaine d'activité.

Il n'avait pas été consulté sur l'octroi d'une participation dans CGR______ GUINEE à AAV______. Il ignorait si AAV______ avait concrètement investi dans le projet guinéen, si AAV______ avait la surface financière suffisante pour le faire et quelle était la contreprestation de AAV______ à l'octroi de la participation. Il était assez commun, dans les affaires minières, que des participations soient octroyées aux apporteurs d'affaires.

Il a reconnu avoir participé à la négociation du montant du rachat de la participation de AAV______, lequel se justifiait en raison du fait que "AAV______ avait amené CGR______ en Guinée".

Il ignorait tout des versements d'argent en faveur de Madame E______.

Il a confirmé l'existence d'un partenariat "informel" entre D______ et CG______MM. D______ avait effectué des investissements en Afrique. Si un projet se concrétisait, alors un partenariat aurait été conclu avec l'intéressé. Il avait demandé que les comptes en lien avec ce partenariat soient établis sur demande du Ministère public. Il n'avait, lui-même, pas reçu les rapports produits à la procédure.

S'agissant du courriel du 5 avril 2013 que ACR______ lui avait adressé, en lien avec une attestation à faire signer à Madame E______, cet envoi faisait suite à une réunion chez Me Jean VEIL. Cet avocat était chargé de répondre aux allégations du Comité technique guinéen. Il ne savait pas qui devait aller faire signer cette attestation à Madame E______ et il n'avait pas demandé à Monsieur A______ de le faire.

S'agissant de l'achat des terrains roumains, I______. les avait achetés car AB______ n'en avait alors pas les moyens financiers. A sa connaissance, aucun droit à bâtir n'avait été obtenu sur ces terrains. Il n'avait pas demandé à D______ de transférer des sommes d'argent à des tiers.

a.c) Monsieur A______ s'est exprimé, pour la première fois durant la procédure, lors de l'audience de jugement.

Il a déclaré qu'il n'avait jamais été question que ses associés et lui-même investissent dans le projet guinéen. Il était un apporteur d'affaires pour CGR______. Il avait effectué du travail relationnel et investi beaucoup de temps dans le projet.

Les USD 500'000.- versés à AAM______/ K______ et AAF______ avaient été apportés par AAG______, en même temps que les protocoles d'accord avec les partenaires locaux. Cette somme provenait de ses associés, AAE______ et AAB______. Il avait lui-même, pour partie, rédigé les trois protocoles d'accord entre AAV______ et les partenaires locaux.

Il avait acheté du sucre à Madame E______ en raison d'un partenariat avec celle-ci. Il était prévu de partager les bénéfices de la vente de ce sucre. Toutefois, il n'avait rien perçu.

L'attestation du 2 août 2009 signée par Madame E______ n'était pas en lien avec le contrat du 20 février 2006. Lorsque AAV______ avait obtenu un accord sur sa rémunération, Monsieur A______ et ses associés devaient honorer leurs engagements envers les partenaires locaux, soit AAM______ / K______ et AAF______. ABD______ était cessionnaire des droits des partenaires locaux, ce qui expliquait l'accord sur le versement de USD 4 millions en sa faveur. Monsieur A______ ignorait si Madame E______ avait perçu une partie de ces USD 4 millions et était étranger aux versements de USD 1 et 2 millions effectués par ABZ______ à Madame E______.

Monsieur A______ n'avait pas connaissance que Madame E______ demandait plus d'argent. Il s'était opposé à ce que AAB______ aille, en juillet 2010, à la rencontre de l'intéressée, à Freetown. Il ignorait la teneur de leurs discussions et n'avait pas eu connaissance du contrat du 8 juillet 2010.

Antérieurement à ce voyage à Freetown, AAB______ lui avait demandé ainsi qu'à AAE______ d'effectuer des avances à Madame E______ à hauteur de USD 500'000.-, ce qui correspondait à environ 10 % de la somme finale qui devait être versée à l'intéressée en sa qualité de cessionnaire des droits des partenaires locaux. Au final, une somme totale de USD 3'404'336.- avait été payée à Madame E______ en cette qualité. À la question de savoir pourquoi l'argent avait servi à l'achat d'un bien immobilier, en Floride, à Madame E______, Monsieur A______ a répondu que l'intéressée faisait ce qu'elle voulait de son argent.

S'agissant de l'argent qui avait transité par le compte de N______, Monsieur A______ a indiqué qu'il ne connaissait pas D______. AAB______ lui avait demandé d'établir une facture de USD 1.5 million de N______ à O______ et lui avait expliqué qu'il s'agissait d'un mécanisme de compensation entre ABJ______ et CG______MM en lien avec des projets dans le sud de l'Afrique.

Il s'était rendu à la rencontre de Madame E______ en Floride pour essayer de trouver une issue au litige concernant l'attribution des concessions minières à CGR______ GUINEE. Il avait évoqué le nom de Monsieur C______, qu'il avait appelé "Monsieur C______", le "numéro 1", "big boss" ou "celui qui est en haut", avec Madame E______, pour gagner en crédibilité.

b) Aucun des onze témoins convoqués par le Tribunal ne s'est présenté.

c) Les parties ont plaidé et pris les conclusions figurant en tête du présent jugement.

 

F. SITUATION PERSONNELLE

a.a) Madame B______ est née le ______ 1970, en Belgique, pays dont elle a la nationalité. En 2005, elle a épousé AQ______ avec qui elle a eu deux enfants, nés en 2003 et 2004. En 2018, elle s'est installée avec sa famille en Italie. Elle est propriétaire d'un parc pour enfants, activité dont elle retire des revenus de EUR 1'000.- par mois environ. Elle est propriétaire d'une maison en France, à Thoiry, laquelle est louée.

Elle n'a pas d'antécédent judiciaire.

a.b) Monsieur C______ est né le ______ 1956, en Israël. Il est double national franco-israélien. Il est marié et père de quatre enfants majeurs.

En 2004, il a pris à bail un appartement à Genève et a été mis au bénéfice d'un forfait fiscal avec son épouse, à Genève, initialement taxé sur la base d'une dépense annuelle de CHF 380'000.-, montant augmenté plusieurs fois (en 2013, CHF 1'000'000.-). En 2016, il a renoncé au forfait fiscal.

Il vit avec sa famille en Israël.

Monsieur C______ a été condamné, le ______ 2020, en dernière instance et par contumace, par un Tribunal roumain à une peine privative de liberté de 5 ans.

a.c) Monsieur A______ est né le ______ 1962, en France, pays dont il a la nationalité. Il est marié et père de quatre enfants majeurs issus de deux unions différentes.

Il indique travailler dans le négoce de bateaux, activité dont il a retiré EUR 250'000.- en 2019 et 2020.

En 2013, il s'est défait de tous ses biens, ne gardant que l'usufruit de la maison dans laquelle il habite et celle héritée de son père, dont il perçoit un revenu locatif de EUR 1'500.- par mois.

Monsieur A______ a été condamné, le 29 juillet 2014, aux Etats-Unis à une peine de 2 ans fermes et à une amende de USD 75'000.- pour obstruction au déroulement d'une enquête pénale.

 

 

G. DROIT

1. Compétence

1.1. Compétence / Corruption

1.1.1.1. Aux termes de l'art. 3 CP, le Code pénal suisse est applicable à quiconque commet un crime ou un délit en Suisse. Cette disposition consacre le principe de territorialité. Il s'agit du principe de base applicable en droit pénal international, selon lequel la compétence pour connaître d'une infraction ressortit à l'Etat sur le territoire duquel cette dernière a été commise (ATF 144 IV 265 consid. 2.3.1 p. 270; ATF 121 IV 145 consid. 2b/bb p. 148 s.; ATF 108 IV 145 consid. 3 p. 146).

Selon l'art. 8 al. 1 CP (ancien art. 7 CP), un crime ou un délit est réputé commis tant au lieu où l'auteur a agi ou aurait dû agir qu'au lieu où le résultat s'est produit. Cette norme constitue un complément indispensable à l'art. 3 CP puisqu'elle définit selon quels critères une infraction est réputée commise en Suisse. Pour qu'une infraction puisse être considérée comme réalisée en Suisse, il suffit que l'un de ses éléments constitutifs ait été exécuté, même partiellement en Suisse (ATF 144 IV 265 consid. 2.3.1. p. 275; ATF 141 IV 205 consid. 5.2; POZO, no 202 et doctrine citée; Petit commentaire no 2 ad art. 8 CP).

Le comportement punissable de l'art. 322septies CP consiste à offrir, à promettre ou à octroyer l'avantage pour obtenir ainsi de l'agent public qu'il viole les devoirs de sa charge ou fasse un usage déterminé de son pouvoir d'appréciation. L'infraction est consommée dès que le corrupteur, même par l'entremise d'un tiers, offre de fournir un avantage indu, le promet ou le remet (CORBOZ, no 19 ad art. 322ter CP par renvoi du no 9 ad art. 322septies CP). Elle l'est même si l'agent public refuse d'emblée (ATF 126 IV 145 consid. 2a, 100 IV 58, 93 IV 53).

Ainsi, l'acte, au sens de l'art. 8 CP est localisable en Suisse, lorsque le corrupteur offre, promet ou octroie un avantage indu en Suisse à un agent public étranger, y compris au cas où une partie seulement du comportement typique est réalisé en Suisse (DYENS, Territorialité et ubiquité en droit pénal international suisse, no 1245, p. 375; VILLARD, La compétence territoriale du juge pénal suisse (art. 3 et 8 CP): réflexions autour d'évolutions récentes in RPS 135/2017 p. 145).

1.1.1.2. L'offre, la promesse ou l'octroi d'un avantage représentant trois facettes possibles du comportement punissable. Dès qu'au moins une partie de l'une d'entre elles est réalisée en Suisse, le droit de ce pays s'applique, sans que l'auteur soit forcément présent en Suisse. Cette interprétation large de la notion de lieu d'exécution respecte les exigences de la Convention OCDE 1997 (Bertrand PERRIN, La répression de la corruption d'agents publics étrangers en droit pénal suisse, Bâle 2008, p. 114 et 115).

En effet. le principe de territorialité doit être interprété largement, et en conformité avec la Convention pénale du Conseil de l'Europe (CPCEC) et avec la Convention de l'OCDE.

L'art. 17 ch. 1 let. a CPCEC prévoit que les Etats parties sont tenus d'établir leur compétence lorsque "l'infraction est commise en tout ou en partie sur son territoire". Le commentaire officiel de la Convention de l'OCDE précise que "la compétence territoriale devrait être interprétée largement, de façon à ce qu'un large rattachement matériel à l'acte de corruption ne soit pas exigé" (Commentaires relatifs à la Convention de l'OCDE sur la lutte contre la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales, § 25, www.oecd.org).

L'art. 4 de la Convention de l'OCDE est formulé en des termes parfaitement analogues à ceux de l'art. 17 ch. 1 CPCEC. Il commande, lui aussi, aux Etats parties d'établir leur compétence, lorsque l'infraction "est commise en tout en partie sur son territoire". La convention entend limiter les exigences concernant les critères de rattachement territoriaux (no 25 du commentaire officiel de la Convention; cf également no 790 du rapport explicatif - STE 173 - Convention pénale sur la corruption).

1.1.1.3. Pour statuer sur la compétence, il convient de passer par le concept d'unité d'actions, initialement développé par le Tribunal fédéral en matière de prescription (VILLARD, p. 148; DYENS, nos 524ss et 1188ss par renvoi du no 1244). Il y a unité naturelle d'actions lorsque les différents actes dont il retourne, en eux-mêmes distincts, participent de la même intention et forment objectivement un seul et même évènement en raison de l'étroit rapport géographique et/ou temporel qui les unit (ATF 133 IV 256; ATF 131 IV 83, 93, JT 2007 IV 83, 92; VILLARD, p. 148, 149; DYENS, no 524ss; BK, no 4 ad art. 8 CP; PERRIN, p. 463ss). L'unité naturelle d'actions est cependant exclue si un laps de temps assez long s'est écoulé entre les différents actes, quand bien même ceux-ci seraient liés entre eux (ATF 132 IV 49 consid. 3.1.1.3, ATF 131 IV 83 consid. 2.4.5., JT 2007 IV 83; Petit commentaire, no 7 ad art. 98 CP). Le Tribunal fédéral interprète restrictivement cette notion pour éviter de réintroduire sous une autre forme la figure du délit successif ou celle de l'unité sous l'angle de la prescription. Elle ne sera donc admise qu'à la double condition que les faits punissables procèdent d'une décision unique et se traduisent, dans le temps et l'espace, par des actes suffisamment rapprochés pour former un tout (arrêt du TF 6B_310/2014, 6B_311/2014, SJ 2016 I 414; Petit commentaire, no 7 ad art. 98 CP).

Le second critère de l'unité naturelle d'action est plus problématique du point de vue de la corruption transnationale (PERRIN, no 12.3.3, p. 467). La doctrine plaide pour un assouplissement de la jurisprudence qui permettrait de mettre davantage l'accent sur la notion d'ensemble que sur celui de temps. Dans le cadre d'un même projet ou d'un même contrat, l'aspect temporel devrait être fortement relativisé. Les actes de corruption qui sont perpétrés dans ce contexte forment un ensemble et devraient être considérés comme un seul acte. L'exécution d'un projet sur plusieurs années ne devrait pas empêcher que des actes de corruption commis au début, mais résultant d'une même volonté et s'inscrivant dans une pratique systématique, puisse échapper à la justice en raison d'une découverte tardive des soupçons de corruption (PERRIN, no 12.3.3., p. 467).

1.1.1.4. Un acte punissable commis par des coauteurs est réputé exécuté partout où l'un des coauteurs a réalisé un seul des éléments de l'état de fait (arrêt du Tribunal fédéral 6B_115/2014 du 5 août 2014 consid. 2.2.1.; 6B_49/2010 du 19 août 2010 consid. 3; ATF 99 IV 121 consid. 1b; TRECHSEL ET AL., Schweizerisches Strafgesetzbuch, Praxiskommentar, n° 7 ad art. 8; HARARI/ LINIGER GROS, in Commentaire romand, CP I, 2009, n° 49 ad art. 8; POPP/PATRIZIA LEVANTE, in Commentaire bâlois, CP I, 2ème éd. 2007, n° 13 ad art. 8 et les références citées).

1.1.2. En l'occurrence, dès l'été 2005, CGR______ a manifesté son intérêt pour les ressources de fer de Simandou. Madame B______ a alors été sollicitée pour traduire des contrats en lien avec ce projet. Début janvier 2006, les démarches effectuées se sont concrétisées. Madame B______ a été informée de la signature d'un protocole d'accord avec le Président guinéen et elle a créé, depuis les locaux genevois où elle travaillait, la structure future détentrice des droits miniers. Pour ce faire, elle a ainsi acheté une société AAS______ INV. LTD, qu'elle a vendue à CGR______ STEEL, dont elle était l'administratrice puis l'a renommée CGR______ (GUINEA) LTD afin que cette société comporte le brand name CGR______. Madame B______ a, ensuite, établi et conclu, à Genève, les contrats de management et de conseil de cette société avec les autres sociétés du groupe (CGR______ STEEL et CGR______ GUERNESEY), elle-même étant administratrice de ces trois sociétés.

Le 13 février 2006, Madame B______ a vendu, depuis ses bureaux genevois, une société de domicile AAV______ à Monsieur A______, AAB______ et AAE______, société qui servira d'intermédiaire et d'écran entre CGR______ et la bénéficiaire des fonds corrupteurs. Le 13 février 2006, toujours, soit avant la conclusion du contrat entre CGR______ et AAV______ du 14 février 2006, Madame B______ a attesté que AD______ BVI détenait pour le compte de AAV______ les actions qui lui seraient cédées, sous réserve de l'exécution du contrat qui sera signé le 20 février 2006 entre la Guinée et CGR______ GUINEE, dont Madame B______ était administratrice. Elle délivrera, d'ailleurs, depuis Genève, la procuration à AAA______ pour signer ce contrat.

Dans le cadre de la mise en place du schéma corruptif, l'intermédiaire AAB______ a fait parvenir à Madame B______, qui se trouvait dans ses bureaux genevois et alors qu'elle était encore administratrice de AAV______, via X______, le contrat que AAV______ devait signer avec les "partenaires locaux". Ce contrat devait être signé le même jour que le contrat entre la Guinée et CGR______ GUINEE, soit le 20 février 2006. Après discussion téléphonique avec AAB______, Madame B______ a reçu un second contrat, soit celui qui devait être signé entre AAV______ et Madame E______, la quatrième femme du Président AAO______. Le contrat entre AAV______ et Madame E______ consistait en un pacte corruptif, soit la promesse d'octroi d'avantages indus, sous la forme d'une participation dans le projet en cas de succès de l'opération.

Alors qu'il était prévu que Madame B______ signe, à Genève, les protocoles d'accord du 20 février 2006, elle a refusé de signer, directement, le pacte corruptif en sa qualité d'administratrice de AAV______, via X______. En revanche, elle a délivré, à Genève, une procuration à AAE______ pour ce faire. Madame B______ a ainsi cédé son pouvoir de signature afin de permettre la conclusion du pacte corruptif, soit la promesse d'avantages indus.

Malgré la vente de AAV______, Madame B______ a gardé, à Genève, durant près d'un an, la maîtrise des actions de cette société. En effet, AD______ BVI, dont Madame B______ était administratrice et qui était gérée depuis Genève par l'intéressée, est restée propriétaire des actions de AAV______ pour le compte de Monsieur A______, AAE______ et AAB______.

Ce n'est qu'en décembre 2006 - janvier 2007 que Madame B______ a transféré, à Genève, la propriété des actions de AAV______ de AD______ BVI à une structure particulièrement opaque gérée également depuis Genève. La détention par AD______ BVI puis par une fondation panaméenne des actions de AAV______ empêchait l'identification des véritables ayant-droits économiques de cette société écran, soit Monsieur A______, AAE______ et AAB______.

Par ailleurs, Madame B______ a également gardé la maîtrise, depuis ses bureaux genevois, des actions de CGR______ GUINEE, dont elle était l'administratrice depuis Genève, et dont une partie des actions avait été cédée à AAV______, par contrat du 14 février 2006, en contrepartie de ses activités corruptrices. Finalement, les actions de CGR______ GUINEE seront transférées par Madame B______ à AAV______, depuis ses bureaux genevois.

Elle a, ensuite, signé l'accord du 24 mars 2008 de rachat des actions que AAV______ détenait dans CGR______ GUINEE à titre de rémunération pour son activité corruptrice avant de signer le contrat de cession des actions et d'annuler le certificat d'actions, à Genève.

Au surplus, en 2009 et 2010, Madame B______ s'est occupée, à Genève, de tous les aspects administratifs et corporatifs de la restructuration de CGR______, destinée à cacher l'existence de toutes les sociétés qui étaient intervenues dans le schéma corruptif. Elle a signé, à Genève, tous les documents nécessaires au transfert des droits miniers et des sociétés impliquées dans la corruption à d'autres sociétés du groupe.

Par ses agissements, en particulier en délivrant, à Genève, la procuration pour signer, à sa place, le contrat du 20 février 2006 entre AAV______ et Madame E______, Madame B______ a participé à la mise en place du schéma corruptif, en permettant la conclusion du pacte corruptif avec la femme du Président guinéen, soit la promesse d'avantages indus qui se concrétisera par le versement de sommes d'argent.

Par la suite, Madame B______ a accompli, à Genève, de nombreux actes, permettant l'accomplissement de la corruption et qui, dès lors, aggravent l'atteinte portée au bien juridique lésé et contribuent à assurer l'obtention de l'avantage escompté (cf. en ce sens ATF 99 IV 212 consid. 1b traduit in JdT 1974 IV 98, 102).

Pour rappel, le 27 février 2008, un accord sur le rachat de la participation de Madame E______ a été trouvé. Par décret présidentiel du 28 juillet 2008, les concessions de AAL______ sur les blocs convoités 1 et 2 ont été retirées et des permis d'exploration seront octroyés à CGR______ sur ces mêmes blocs le 9 décembre 2008.

L'accord du 27 février 2008 portant sur la reprise de la participation de Madame E______ moyennant versement de USD 4 millions sera confirmé le 2 août 2009 puis un nouvel accord prévoyant le versement à l'intéressée de USD 5.5 millions supplémentaires sera trouvé le 8 juillet 2010.

Dans le cadre de l'exécution de ces accords, seize versements d'argent ont été effectués en faveur de Madame E______ (outre le sucre acheté pour son compte):

-        Août 2009 USD 998'000.- transaction 2

-        Décembre 2009 USD 2'000.- transaction 2

-        Mai 2010 USD 2'000'000.- transaction 3

-        Juillet 2010 USD 150'000.- transaction 4

-        Août 2010 USD 100'000.- transaction 4

-        Juillet 2010 USD 100'000.- transaction 5

-        Août 2010 USD 50'000.- transaction 5

-        Juillet 2010 USD 100'000.- transaction 6

-        Septembre 2010 USD 1'900'000.- transaction 7

-        (ACK______) USD 100'000.- pas dans l'AA

-        Juillet 2011 USD 1'000'000.- transaction 8a

-        Septembre 2011 USD 500'000.- transaction 8a

-        Octobre 2011 USD 500'000.- transaction 8b

-        Janvier 2012 USD 250'000.- transaction 9

-        Janvier 2012 USD 150'000.- transaction 10

-        Mai 2012 USD 936'451.- transaction 11

Partant, la corruption mise en place par le biais d'une promesse concrétisée par seize versements d'argent (dont quinze sont retenus dans l'acte d'accusation), répartis sur 2 ans et demi, doit être appréhendée comme un tout, soit comme une unité naturelle d'actions dans la mesure où la promesse et les versements procèdent tous d'une volonté unique, corrompre le Président guinéen par le versement de sommes d'argent à sa quatrième épouse.

Au demeurant, ne pas rattacher les paiements, qui résultent d'une promesse d'avantages indus, à cette promesse tendrait à l'impunité des criminels en matière de corruption transnationale. En effet, les prévenus ont multiplié les comptes bancaires utilisés dans divers pays (Guinée, Suisse, France, Ukraine, Etats-Unis, Israël, Bahamas), ce qui ne saurait leur permettrait de se soustraire aux autorités pénales. Ainsi, aucun des paiements n'est identique au précédent et plusieurs pays différents sont utilisés pour un seul paiement, ce qui fonderait autant de fors différents rendant impossible toute poursuite pénale.

Il convient de rappeler la nécessité de prévenir les conflits de compétence négatifs en admettant la compétence des autorités suisses même en l'absence de lien étroit avec la Suisse (cf. à cet égard ATF 141 IV 336 consid. 1.1; DYENS, no 1251 et réf. cit.).

Cette interprétation permet à la Suisse, dans le respect de ses engagements internationaux, d'apporter sa contribution dans un effort global de lutte contre l'impunité en matière de corruption transnationale. Comme retenu, dès lors qu'un rattachement territorial avec la Suisse existe, la "facette" de l'élément constitutif de la promesse ayant été réalisée en Suisse, les autorités pénales suisses doivent poursuivre et juger le corrupteur et ce, a fortiori lorsque l'Etat dont dépend l'agent public concerné demeure dans l'incapacité de mener à bien la poursuite ou, pire encore, lorsqu'il ne souhaite pas la mener (en ce sens, cf. DYENS, no 1250, p. 378).

En l'occurrence, si un certain nombre de comportements typiques de l'infraction de corruption d'agents public étrangers se sont déroulés en Guinée, la Guinée n'a pas poursuivi les prévenus. Elle a ouvert une procédure à l'encontre notamment de Madame E______, laquelle s'est soldée par un abandon des poursuites en raison d'un arrangement trouvé entre la Guinée et les personnes poursuivies.

Il en est de même des autres pays, notamment par lesquels les fonds corrupteurs sont passés.

Mais, il y a plus. En effet, certains paiements du cas d'espèce fondent également la compétence de la Suisse.

1.1.3.1. Lorsque l'octroi de l'avantage indu intervient par le débit d'une somme d'argent depuis un compte bancaire ouvert en Suisse, la doctrine estime que la compétence territoriale suisse est donnée (Daniel JOSITSCH, Das Schweizerische Korruptionsstrafrecht, Art. 332ter bis Art. 322octies StGB, Zurich/Bâle/Genève 2004, p. 450; PERRIN, p. 115 s.; VILLARD, p. 145, cf. également p. 169; CASSANI, Grenzüberschreitende Korruption in Korruption in Staat und Wirtschsaft) et la jurisprudence du Tribunal pénal fédéral (arrêt du TPF SK.2014.24 du 1er octobre 2014 consid. 2.2.1. et BB.2010.112 du 28 juillet 2011, consid. 2.2).

1.1.3.2. S'agissant du transit par un compte bancaire en Suisse d'avantages indus dans le cadre de l'infraction de corruption d'agents publics étrangers réalisée à l'étranger, les tribunaux ne se sont jamais exprimés sur cette question (cf. arrêt du TPF BB.2016.386, les fonds reçus en Suisse et postérieurement transférés sur d'autres comptes étaient déjà dans la sphère de disposition du corrompu, ce qui n'est pas le cas en l'espèce s'agissant de O______ (transaction 8).

Selon PERRIN, si une partie de l'offre, de la promesse ou de l'octroi d'un avantage est réalisée en Suisse, le droit suisse s'applique, sans que l'auteur soit forcément physiquement présent en Suisse. Ainsi, si l'auteur téléphone en Suisse pour donner un ordre de transfert de fonds, il agit en Suisse. Si l'auteur s'adresse à un établissement bancaire situé dans notre pays, le droit suisse peut s'appliquer. La consommation de l'acte requiert l'utilisation du territoire suisse (PERRIN, p. 114ss).

DYERS (nos 577ss) et POPP/LEVANTE (BK, no 6 ad art. 8 CP) n'abordent pas cette question spécifique en matière de corruption, mais se penchent sur les délits de transit (Transitdelikte) à savoir les infractions dont l'acte et le résultat se produisent à l'étranger, mais pour lesquelles la chaîne de causes et d'effets passe par le territoire suisse. Le simple transit ne permet pas de localiser le comportement typique sur le sol suisse pas plus que le résultat typique sauf si le comportement consistant à faire transiter des produits ou des marchandises par la Suisse est érigé en comportement typique à part entière (i.e. art. 19 al. 1 let. b LStup). En l'occurrence, la corruption n'est pas un délit de transit de sorte que ces considérations ne s'appliquent pas.

VILLARS, traitant de la problématique de l'ebanking (p. 168) rappelle que la justification du facteur de rattachement que constitue le débit d'un compte bancaire suisse, en particulier en matière de blanchiment d'argent ou de corruption, se fonde sur l'intervention physique de l'intermédiaire financier en Suisse. En transférant sur ordre de son client l'avantage indu provenant de l'argent du crime, l'intermédiaire financier est un instrument humain, au sens de la figure juridique de l'action médiate, et créé un rattachement territorial au lieu de situation de l'instrument humain, qui réalise les éléments constitutifs objectifs de l'infraction.

1.1.4. Transaction 1 / sucre

Le 10 mai 2006, AAD______ a facturé USD 250'000.- à CGR______. Ce montant a été payé par CGR______ TREASURY SERVICES, par débit de son compte bancaire, à Genève. Un mois et demi après, soit le 15 juin 2006, Monsieur A______, pour le compte de AAD______, a instruit une autre banque, à Genève, de débiter le compte de AAD______ de USD 94'008.60 en faveur du compte de la société ABB______ auprès de sa banque, à Paris, avec la mention "règlement facture PF 61651 Madame E______" pour l'achat de sucre.

Par conséquent, l'avantage indu reproché est intervenu par débit d'un compte en Suisse et la compétence des autorités suisses est donnée.

1.1.5. Transaction 8 / O______

S'agissant de la huitième transaction, tout d'abord et contrairement à ce que retient l'acte d'accusation, le montant de USD 1'500'000.- débité le 20 juin 2011 du compte O______ GLOBAL LTD auprès de Banque 12______, Zurich, (PP 353'003) ne provient pas des USD 12'496'550.- crédités le 15 juin 2009, soit deux ans auparavant (PP 501'122), mais des USD 1'500'000.- crédités le 16 juin 2011 en provenance du compte privé de D______, auprès de la Banque 11______, à Kiev. Aucun mouvement de fonds n'a eu lieu sur le compte O______ GOBAL LTD entre le crédit le 16 juin 2011 et le débit le 20 juin 2011 de USD 1'500'000.- (PP 353'421).

Ainsi, le montant de USD 1'500'000.- a été crédité sur le compte suisse de O______. Le 20 juin 2011, la banque zurichoise a reçu l'instruction, depuis l'étranger, de virer ce même montant sur le compte de N______ auprès d'une banque à Nassau, montant qui sera, in fine et en totalité, distribué à Madame E______.

Il convient de retenir que l'intervention de l'intermédiaire financier zurichois dans le versement de l'avantage indu à la supposée corrompue, lequel a agi sur instructions d'un signataire autorisé du compte, a créé un rattachement territorial, qui permet l'application du droit suisse. La compétence des autorités suisses est ainsi donnée.

1.1.6. Au vu de ce qui précède, les autorités suisses sont compétentes pour statuer sur les faits qualifiés de corruption qui lui sont soumis.

Cette compétence est donnée pour les trois prévenus, coauteurs, selon l'acte d'accusation.

1.2. Compétence / Faux dans les titres

1.2.1. Se rend coupable de faux dans les titres celui qui, dans le dessein de porter atteinte aux intérêts pécuniaires ou aux droits d'autrui, ou de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite, aura, pour tromper autrui, fait usage d'un titre faux (cf. art. 251 ch. 1 CP).

Les dispositions des art. 251 à 254 sont aussi applicables aux titres étrangers (art. 255 CP).

1.2.2. En l'occurrence, le certificat d'actions de L______ a été émis, sur instructions de Madame B______, dans les locaux genevois de MOSSACK & FONSECA & CO. Dans cette mesure le titre a été créé en Suisse et la compétence des autorités suisses est donnée.

S'agissant :

-        du contrat du 15 juin 2009,

-        du contrat du 11 juin 2010,

-        des contrats des 1er mars 2011 et du contrat du 1er septembre 2011,

il n'existe pas de critère de rattachement avec la Suisse pour l'établissement de ces documents.

En revanche, en tant que l'art. 251 ch. 1 3ème par. CP, soit l'usage d'un titre faux, est visé, la compétence des autorités suisses est données. En effet, ces contrats ont été envoyés à la banque zurichoise pour justifier l'arrière-plan économique des transferts y relatifs. Ainsi, l'usage d'un titre faux a eu lieu en Suisse. La compétence des autorités suisses est donnée.

S'agissant du contrat de location de bateau, dans la mesure où Madame B______ l'a signé à Genève, en sa qualité d'administratrice de la société propriétaire du bateau, la compétence des autorités suisses est donnée.

S'agissant:

-        de l'amendement d'août 2010,

-        des deux factures du 5 avril 2011,

-        du contrat du 1er juin 2011

-        de la facture du 14 septembre 2011,

-        de la facture du 13 juin 2011,

-        de l'offre de service de U______ et de la facture du 12 décembre 2012,

il n'y a pas de critère de rattachement avec la Suisse pour l'établissement de ces documents. Par ailleurs, il ne ressort pas de la procédure que ces documents ont été utilisés en Suisse. Toutefois, ces documents ont été établis pour justifier l'arrière-plan économique des transactions y relatives. Ainsi, ils ont été créés dans le but d'en faire usage auprès de la banque suisse de O______ pour justifier les transferts. Il en a été fait mention dans toutes les instructions de transfert. Dans cette mesure, les titres ont été établis dans le but d'en faire usage auprès de la banque suisse. Le dessein d'emploi en Suisse fonde la compétence des autorités suisses (cf. en ce sens ATF 141 IV 336, critiqué par la doctrine: VILLARD, La compétence territoriale du juge pénal suisse (art. 3 et 8 CP): réflexions autour d'évolutions récentes, in RPS 135/2017 p. 145, 164 et LUDWICZAK, Compétence territoriale et vignette autoroutière: un dérapage incontrôlé, in Forum poenale 2016, p. 298 ss, 299).

Enfin, s'agissant de l'addendum du 29 juin 2011 au contrat de location de bateau, il n'a pas été établi en Suisse, il n'a pas été signé par Madame B______ et il n'a pas servi à justifier l'arrière-plan économique du transfert y relatif. Par conséquent, les autorités suisses ne sont pas compétentes s'agissant de ce dernier document.

2. Art. 322septies CP

2.1. Selon l'art. 322septies 1er par. CP, celui qui aura offert, promis ou octroyé un avantage indu à une personne agissant pour un État étranger ou une organisation internationale en tant que membre d'une autorité judiciaire ou autre, en tant que fonctionnaire, en tant qu'expert, traducteur ou interprète commis par une autorité, ou en tant qu'arbitre ou militaire, en faveur de cette personne ou d'un tiers, pour l'exécution ou l'omission d'un acte en relation avec son activité officielle et qui soit contraire à ses devoirs ou dépende de son pouvoir d'appréciation, sera puni d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

Est un coauteur celui qui collabore, intentionnellement et de manière déterminante, avec d'autres personnes à la décision de commettre une infraction, à son organisation ou à son exécution, au point d'apparaître comme l'un des participants principaux; il faut que, d'après les circonstances du cas concret, la contribution du coauteur apparaisse essentielle à l'exécution de l'infraction. La seule volonté quant à l'acte ne suffit pas; il n'est toutefois pas nécessaire que le coauteur ait effectivement participé à l'exécution de l'acte ou qu'il ait pu l'influencer. La coactivité suppose une décision commune, qui ne doit cependant pas obligatoirement être expresse, mais peut aussi résulter d'actes concluants, le dol éventuel quant au résultat étant suffisant. Il n'est pas nécessaire que le coauteur participe à la conception du projet; il peut y adhérer ultérieurement. Il n'est pas non plus nécessaire que l'acte soit prémédité; le coauteur peut s'y associer en cours d'exécution. Ce qui est déterminant c'est que le coauteur se soit associé à la décision dont est issue l'infraction ou à la réalisation de cette dernière, dans des conditions ou dans une mesure qui le font apparaître comme un participant non pas secondaire, mais principal (ATF 130 IV 58 consid. 9.2.1 p. 66; 125 IV 134 consid. 3a p. 136).

Ce concept de coactivité montre qu'une personne peut être considérée comme auteur d'une infraction, même si elle n'en est pas l'auteur direct, c'est-à-dire si elle n'a pas accompli elle-même tous les actes décrits dans la disposition pénale; cela résulte naturellement du fait qu'une infraction, comme toute entreprise humaine, n'est pas nécessairement réalisée par une personne isolée, mais peut procéder d'une action commune avec une répartition des tâches (ATF 120 IV 17 consid. 2d p. 23 s.).

2.2.1. Toute personne qui accomplit une tâche dévolue à l'Etat, quel que soit son statut, revêt la qualité d'agent public (FF 1999 5045, 5073).

La notion d'agent public étranger englobe, d'une part, les agents au sens formel (agents publics institutionnels) et, d'autre part, les agents au sens matériel (agents publics fonctionnels) (BSK StGB, PIETH, Art322septies CP, N 11; CR-CP II, op. cit., art. 322septies CP, N 17).

S'agissant des agents publics au sens formel, la définition de l'agent public étranger figurant à l'art. 322septies CP correspond à celle donnée par l'art. 1 al. 4 let. a de la Convention sur la lutte contre la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales (RS 0.311.21). Il s'agit des personnes qui détiennent un mandat législatif, administratif ou judiciaire, qu'elles aient été nommées ou élues (FF 2004 6549 pp. 6562 - 6566; BSK StGB, PIETH, Art. 322septies CP, N 12).

2.2.2. En tant que Président de Guinée, feu AAO______ revêtait la qualité d'agent public et disposait d'un pouvoir décisionnel découlant de la loi ou de fait.

Feu le Président AAO______ revêtait dès lors bien la qualité d'agent public.

2.3.1.1. Le comportement punissable consiste à offrir, à promettre ou à octroyer l'avantage pour obtenir ainsi de l'agent public qu'il viole les devoirs de sa charge ou fasse un usage déterminé de son pouvoir d'appréciation (Bernard CORBOZ, Les infractions en droit suisse, Volume II, 2010, art. 322ter CP N 19).

Il est sans importance que l'avantage (ou sa promesse) provienne directement de l'auteur, ce dernier peut faire agir un intermédiaire (FF 1999, 5077; cf. OCDE, Working group on bribery in international business transactions, typologies on the role of intermediaries in international business transaction, Final report, 9 octobre 2009, www.ocde.org).

L'avantage consiste en toute amélioration objectivement mesurable - juridique, économique ou personnelle - de la situation du bénéficiaire (FF 1999 5045, 5075). Il est indu lorsque l'agent public qui devrait en bénéficier n'a pas le droit de l'accepter (FF 1999 5045, 5076).

L'avantage peut être destiné à favoriser l'agent public lui-même, mais aussi une tierce personne (FF 1999 5045, 5077; Bertrand PERRIN, op. cit., page 161). Il est totalement indifférent que l'avantage profite à l'agent public lui-même ou à un tiers (un proche, un ami, une maîtresse) (Bernard CORBOZ, op. cit., art. 322ter CP N 12), pour autant toutefois 1) que la relation soit dûment établie entre cet avantage et la violation des devoirs attachés à la fonction (FF 1999 5045, 5077) et 2) que l'agent public, à un moment, ait eu connaissance de l'avantage octroyé au tiers (Rapport explicatif - STE 173 - Convention pénale sur la corruption, N 36 ad article 2, https://rm.coe.int/16800cce87 / Bertrand PERRIN, op. cit., page 163. ).

2.3.2.1. CGR______ a octroyé un avantage à Madame E______ consistant en l'achat de sucre et en la promesse d'un avantage sous la forme d'une participation de 5 % dans le projet guinéen, promesse qui s'est concrétisée par le versement de sommes d'argent, soit au total USD 8.5 millions.

Ces avantages étaient destinés à influencer AAO______ dans le cadre du processus d'attribution des droits miniers de Simandou.

Pour ce faire, CGR______ a fait intervenir un intermédiaire en la personne de AAV______.

L'avantage était destiné à favoriser non pas AAO______ lui-même, mais sa quatrième épouse Madame E______.

2.3.2.2. S'agissant des avantages octroyés, il convient de faire la distinction entre i) le paiement du sucre livré à Madame E______ et ii) les versements en lien avec l'octroi des USD 4 millions et de USD 5.5 millions en échange de la participation de 5 %.

i) le paiement du sucre livré à Madame E______

Le rôle de Madame E______ consistait à permettre à CGR______ d'accéder au Président AAO______ afin que CGR______ l'influence dans la délivrance des permis miniers par le versement de sommes d'argent à sa quatrième épouse.

En juin 2006, CGR______ a, tout d'abord, acheté du sucre à Madame E______. Cet octroi a été comptabilisé dans les livres de CGR______ sous le code comptable "Guinea Iron Ore" (Guinée minerai de fer) (PP 500'301) et concernait les permis de bauxite, mais également et surtout le fer en Guinée (PP 500'301).

Ce paiement pour l'achat de sucre survient peu après la conclusion de l'accord du 20 février 2006 entre AAV______ et Madame E______, octroyant une participation de 5 % à l'intéressée dans le projet guinéen. Il fait suite au téléphone explicite de Madame E______ à Monsieur A______, qui démontre le rôle de la précitée dans le processus d'attribution des permis miniers en Guinée, téléphone relayé à CGR______ pour que CGR______ procède au premier paiement ("first payment"). Ce sera le premier de nombreux autres paiements.

Ainsi, l'avantage octroyé est en lien direct avec la volonté de CGR______ d'influencer le processus étatique d'attribution des permis et est la contre-prestation attendue de l'avantage octroyé.

Si ce paiement de sucre n'est pas expressément prévu dans l'accord du 20 février 2006, il procède de la même volonté d'induire Madame E______ à exercer son influence sur le Président AAO______ afin que le précité favorise l'attribution des droits miniers à CGR______ sur les blocs convoités.

ii) les versements en lien avec l'octroi de USD 4 millions, auxquels se sont ajoutés USD 5.5 millions supplémentaires en échange de la participation de 5 %

La promesse de versements à Madame E______, correspondant à la contrevaleur de la participation de 5 %, a pour but d'influencer le Président AAO______ dans le processus d'attribution étatique des droits miniers.

En l'occurrence, il existe un lien suffisant entre l'avantage promis, et qui sera octroyé, et l'acte administratif visé.

En effet, il est établi qu'une première approche avait été tentée par CGR______ et Monsieur A______, par le biais de AAJ______, première épouse du Président, pour accéder au pouvoir, soit au Président AAO______ lui-même. CGR______ et Monsieur A______ ont pu rencontrer le Ministre des mines, voire le Président lui-même, qui les a renvoyés vers le Ministre des mines, mais cette démarche s'est révélée finalement infructueuse.

C'est la raison pour laquelle Monsieur A______ a réactivé ses contacts et a pu rencontrer Madame E______. Ce n'est qu'à partir de ce moment que les démarches de CGR______ et de Monsieur A______ ont été débloquées. Une rencontre a eu lieu avec le Président AAO______ le 1er décembre 2005, le survol avec l'hélicoptère présidentiel a eu lieu le lendemain 2 décembre 2005 et les contrats ont été conclus avec la Guinée et avec Madame E______, le 20 février 2006.

Il ressort du courriel de AX______ à Madame B______ du 17 janvier 2006 que CGR______ était alors en train de négocier avec le Président AAO______ en vue d'un accord avec la Guinée.

Dans l'accord qui sera conclu avec la Guinée le 20 février 2006, il était déjà question d'un droit de préemption de CGR______ en cas de rétrocession de la moitié des permis miniers de AAL______.

Il sera relevé que Madame E______ ne jouait aucun autre rôle pour CGR______. Pourtant, plusieurs rencontres ont été organisées entre Madame E______ et les dirigeants de CGR______. Plusieurs rencontres ont également eu lieu avec AAO______, en présence de Madame E______.

Au final, Madame E______ a perçu de CGR______ du sucre pour près de USD 100'000.- et USD 8'500'000.-. Or, rien ne justifiait que CGR______ ne verse de tels avantages à Madame E______, si ce n'est en raison de l'influence que pouvait exercer son époux, le Président de Guinée, sur le processus étatique d'attribution des droits miniers.

Le Président AAO______ savait ainsi que sa quatrième épouse serait largement récompensée en cas d'influence du processus étatique d'attribution des droits miniers, peu importe s'il ne connaissait pas exactement les sommes qui seraient finalement versées.

Il convient d'ajouter qu'on ne voit pas quel était l'intérêt pour la Guinée d'octroyer des concessions, sur une des plus grandes réserves de fer non exploitée du monde, à un groupe, soit CGR______, qui n'avait aucune expérience préalable en matière d'extraction de fer, qui n'était pas connu en Guinée (raison des présentations qu'il fallait faire du groupe) et, surtout, qui n'avait pas les capacités d'exploiter seul les concessions.

CGR______ n'avait pour autre but que de revendre les concessions minières une fois obtenues en faisant un profit immédiat.

En l'occurrence, CGR______ a investi environ USD 160 millions pour obtenir les concessions minières qu'elle a évaluées à USD 5 milliards.

Cette opération ne profitait pas à la Guinée qui ne pourrait tirer profit de l'exploitation des mines qu'à un stade ultérieur, soit précisément lors de l'exploitation du projet et dans une moindre mesure.

Dans cette situation, le Président AAO______ n'avait aucun intérêt à retirer les droits à AAL______ pour que CGR______ puisse les revendiquer et ce, juste avant sa mort, si ce n'est pour en retirer un intérêt personnel ou pour favoriser un tiers. En l'occurrence, il s'agissait de favoriser un tiers en la personne de sa quatrième épouse, qui n'était pas reconnue par la famille de AAO______, comme cela ressort des attestations produites et de son exil à la mort du Président.

Cela est d'autant plus vrai que le Président était malade et allait mourir quelques mois après le retrait des concessions à AAL______ et quelques jours avant l'octroi des permis d'exploration à CGR______.

Les déclarations de Madame E______ à cet égard sont corroborées par les éléments du dossier et sont, dans cette mesure, crédibles. Elle a indiqué que le Président AAO______ avait accepté de favoriser CGR______ car CGR______ avait promis son aide à Madame E______.

2.3.2.3. Le fait que l'argent ait été versé après la mort du Président AAO______ n'est pas pertinent. La promesse d'octroyer de l'argent a été faite avant sa mort, sous la forme d'une participation dans le projet, qui correspondait à un tiers de la participation octroyée par CGR______ à AAV______. Ce n'est qu'une fois le projet concrétisé que les participations seront rachetées et les intermédiaires payés (cf. contrat du 20.02.2006 entre AAV______ et Madame E______ qui prévoit que la participation serait octroyée dès l'obtention des titres miniers nécessaire à l'exploitation de la zone minière de Simandou, PP 348'757).

Ainsi, le fait que le Président meurt au cours du processus d'attribution des titres miniers n'y change rien. La promesse a été faite et l'influence exercée du vivant du Président.

Le fait que Madame E______ ait fui la Guinée n'y change rien non plus. Au contraire, cela montre encore plus qu'il était important pour le Président AAO______ de trouver un moyen d'assurer la subsistance de sa quatrième épouse après son décès. D'ailleurs, il sera relevé que Madame E______ a fui, tout en s'assurant que les pactes corruptifs soient remis à un tiers pour ne pas que CGR______ "oublie" la promesse faite.

2.3.2.4. En octroyant une participation dans le projet Simandou, correspondant à un tiers de celle octroyée à l'intermédiaire, CGR______ a promis un avantage indu au Président AAO______ devant bénéficier à sa quatrième épouse. Cette promesse s'est concrétisée par des paiements de plusieurs millions de dollars américains. Cette promesse avait pour but d'influencer le processus étatique d'attribution des droits miniers et a été acceptée par le Président AAO______, qui ne serait pas intervenu sans les méthodes employées par CGR______.

Ainsi, par décret présidentiel du 28 juillet 2008, AAL______ s'est vue retirer les blocs 1 et 2 et par arrêté pris quelques jours avant la mort du Président AAO______, CGR______ s'est vue octroyer les permis de recherche sur ces mêmes blocs, alors que CGR______ devait nécessairement s'associer à un tiers pour exploiter les mines.

2.3.2.5. CGR______ a concédé, par le biais de son intermédiaire AAV______ et par la cession d'un tiers de sa propre participation, 5 % du projet à Madame E______, participation qui sera rachetée une fois le projet mené à terme.

Les versements effectués étaient indus, Madame E______ n'ayant fourni aucune contreprestation en échange de l'argent versé, si ce n'est celle liée à son rôle occulte dans l'attribution des concessions minières.

CGR______ n'avait aucune relation commerciale avec Madame E______. Or, l'argent versé à Madame E______ provient de CGR______.

2.4.1. Le comportement attendu de l'agent public peut consister aussi bien en une action qu'en une omission. Il doit être en relation avec son activité officielle (CR-CP II, op. cit., art. 322septies N 33). Les actes concernés peuvent entrer dans le cahier des tâches de l'agent public, mais ils peuvent aussi excéder sa sphère de compétence, par exemple lorsque l'agent public accomplit un acte qui ne lui incombe pas normalement. La disposition pénale est en effet suffisamment large pour embrasser également "les situations dans lesquelles des avantages sont octroyés en vue de favoriser des actes que le fonctionnaire peut accomplir simplement grâce à sa présence au sein de l'administration, même s'il ne s'agit pas d'actes administratifs explicitement prévus par la loi ou lorsqu'il accomplit un acte qui ne lui incombe pas normalement" (FF 1999 5045, 5078 - 5079 / Bertrand PERRIN, op. cit., page 182).

L'agent public viole ses devoirs chaque fois qu'il enfreint une norme de droit qui décrit quels sont les comportements qu'il doit adopter (Bertrand PERRIN, op. cit., page 184). Pour savoir quelles sont exactement les charges et devoirs qui incombent à l'agent public, il convient de consulter le droit étranger de l'Etat au service duquel il travaille. Seul celui-ci détermine ses obligations concrètes. La question de savoir s'il les a enfreintes ou non ne peut donc pas être résolue indépendamment du droit étranger (Daniel JOSITSCH, op. cit., page 402.).

L'offre, la promesse ou l'octroi d'un avantage pour une action ou une omission dépendant d'un pouvoir d'appréciation est considéré, de manière générale, comme de la corruption (Daniel JOSITSCH, op. cit., page 365.). Il suffit que le corrupteur agisse afin que l'agent public exerce son pouvoir d'appréciation dans un sens déterminé (CR-CP II, op. cit., art. 322septies N 34). L'existence d'un pouvoir d'appréciation doit se déterminer sur la base des règles juridiques étrangères pertinentes (CR-CP II, op. cit., art. 322septies N 35). Il faut interpréter la norme étrangère pour conclure à l'existence ou non d'un pouvoir d'appréciation (Bertrand PERRIN, op. cit., page 189).

D'après l'article 28 du Code minier en vigueur en Guinée au moment des faits (Code Minier, Loi L/95/036/CTRN du 30 juin 1995), le permis de recherche est accordé par Arrêté du Ministre chargé des Mines sur recommandation du CPDM (Centre de promotion et de Développement Miniers jouant le rôle d'interface unique entre l'Administration et les investisseurs) au demandeur ayant présenté une demande conforme aux exigences du présent Code et de ses textes d'application et possédant les capacités techniques et financières suffisantes, ainsi que des engagements de travaux et de dépenses qu'il accepte de souscrire. En cas de demandes concurrentes, la priorité sera donnée à celui des demandeurs qui offre les meilleures conditions et garanties à l'Etat. Lorsque les conditions et garanties sont similaires, la priorité est donnée au premier demandeur.

2.4.2. Peu importe que les droits ont ou non été octroyés à CGR______, le cas échéant, conformément à la loi guinéenne. Le Président AAO______ a usé de sa position pour décider de retirer les concessions à AAL______, par décret présidentiel et pour que les permis soient octroyés à CGR______.

Ainsi, avant sa mort, le Président AAO______ a entamé le processus étatique d'attribution des droits miniers. Il a retiré les droits octroyés à AAL______, contre l'avis de ses ministres, afin que ceux-ci puissent être attribués à CGR______, qui les convoitait, l'objectif premier et unique de CGR______ (avant que Zogota ne se révèle intéressant) étant les blocs 1 et 2 exploités par AAL______ ("we are after Simandu iron ore deposit... AAL______'s areas", PP 349'082; contrats du 14 février 2006).

Monsieur C______ ne s'est pas trompé en insistant sur le fait qu'il ne fallait pas mentionner le nom de AAL______ dans aucun des documents écrits (PP 5'010'816). Ainsi, le retrait des droits ne devait pas apparaître comme étant lié à leur octroi.

Comme déjà mentionné, ces décisions ont été prises par ou sur influence du Président AAO______, en violation des devoirs de sa charge dans la mesure où cela ne bénéficiait pas à la Guinée. Le joyau de la couronne, comme appelé par AAB______, a été retiré à AAL______ et cédé sans contrepartie pour l'Etat guinéen à CGR______. Le Président AAO______ a, dès lors, agi en violation des devoirs de sa charge.

Certes, les décisions prises ou instruites par le Président ont été une étape dans le processus d'attribution des concessions. Toutefois, il n'est pas exclu, sans qu'il n'y ait besoin de trancher cette question, que cette première étape se soit inscrite dans un processus plus large de corruption de CGR______ pour arriver à son objectif.

Comme l'a mentionné Monsieur A______ à Madame E______ "heureusement Monsieur C______ a eu l'intelligence d'insister pour que ce soit fait de façon très très régulière pour qu'on ne puisse pas ensuite l'attaquer... Même ABN______ était dedans... y'a 20 signatures, 30 signatures sur le contrat de CGR______", alors qu'un montant de USD 100'000.- a été octroyé à ABN______, alors ministre des finances et futur ministre des mines, deux jours après l'octroi des permis de recherches sur les blocs 1 et 2, montant payé par AX______, qui précisait "approuvé par Monsieur C______", "Monsieur C______" devant être compris comme étant Monsieur C______ selon le précité.

2.5.1. Entre l'avantage indu et le comportement de l'agent public doit exister un rapport d'équivalence (relation de connexité) (CR-CP II, op. cit., art. 322septies N 36). Le Tribunal fédéral (en application de l'ancien art. 288 CP) définit ce rapport comme un lien suffisant entre l'avantage et un ou plusieurs actes futurs de l'agent public, déterminables de manière générique (ATF 126 IV 141 consid. 2.a, JdT 2001 IV 10 / CR-CP II, op. cit., art. 322ter N 56). Ce lien pourra s'analyser au regard de critères auxiliaires objectifs tels que le montant de l'avantage, la proximité dans le temps, la fréquence des contacts entre le donateur et le donataire et, plus particulièrement, la relation entre la situation professionnelle de l'auteur et la fonction exercée par l'agent public (FF 1999 5045, 5081).

2.5.2. La promesse de rémunération, sous la forme de l'octroi d'une participation, promesse concrétisée par des paiements ultérieurs, est à l'évidence en lien avec le comportement du Président AAO______ d'influer sur le processus étatique d'attribution des titres miniers. En réalité, le fait que CGR______ offre du sucre et paie des millions de dollars américains à Madame E______ démontre, si besoin en est, que son mari, le Président AAO______, a effectivement usé de son influence de son vivant. A défaut, aucune somme n'aurait assurément été versée.

2.6. L'infraction est intentionnelle. Le dol éventuel suffit (art. 12 al. 2 2ème ph. CP), notamment en ce qui concerne l'influence espérée de l'avantage indu (Bernard CORBOZ, op. cit., art. 322septies CP N 13).

Cet élément constitutif sera traité dans le considérant suivant.

3. Imputation des actes aux prévenus

Il convient à présent d'examiner le rôle des prévenus dans le cadre de ce processus corruptif, soit examiner si les faits commis peuvent leur être imputés tant sur le plan objectif que subjectif.

3.1. Madame B______

3.1.1.1. Rôle au sein de CGR______

S'agissant, tout d'abord, du rôle de Madame B______, au sein de la structure du groupe, elle a travaillé pour la famille Monsieur C______ depuis ses 19 ans, soit depuis 1989. Elle est administratrice de AD______ BVI, depuis sa création en 1998. AD______ BVI est liée par un contrat de mandat avec la fondation V______, qui prend en charge tous les frais de AD______ BVI. Madame B______ est également secrétaire du conseil de la fondation V______. Elle est non seulement administratrice de AD______ BVI, mais également de toutes les sociétés du groupe CGR______, en particulier de CGR______ GUERNESEY, CGR______ GUINEE (BVI), CGR______ GUINEE (GUERNESEY) ou CGR______ STEEL.

Madame B______ est responsable de toute la structure corporative et administrative du groupe CGR______ et elle occupe une position privilégiée dans toutes les sociétés du groupe détenues par la fondation V______, de même qu'au sein de V______ elle-même, ayant acquis une expérience précieuse au fil des années.

L'importance de son rôle se déduit également de sa rémunération, qui n'est pas celle d'une simple exécutante, vu son évolution notable au fil des années.

En cette qualité, Madame B______ va mettre en place la structure nécessaire au processus corruptif et à l'effacement des preuves de la corruption.

3.1.1.2. Mise en place de l'intermédiaire AAV______

Madame B______ va mettre en place l'intermédiaire et l'écran entre CGR______ et Madame E______.

Alors qu'elle était au courant du projet guinéen, notamment pour avoir traduit certains des accords et pour avoir mis en place CGR______ GUINEE, dont elle était l'administratrice, le 13 février 2006, Madame B______ a vendu une offshore, soit AAV______, à Monsieur A______ et ses associés, Le même jour, mais avant la conclusion du contrat entre CGR______ et AAV______ du lendemain, Madame B______ a attesté détenir, pour le compte de AAV______, les actions de CGR______ GUINEE.

Dans ce contexte, le 15 février 2006, la secrétaire de AAB______ lui a envoyé pour signature, en sa qualité d'administratrice de AAV______, via X______, le protocole d'accord avec les partenaires locaux.

Madame B______ a discuté plusieurs fois, au téléphone, avec AAB______ et les deux protocoles d'accord du 20 février 2006, soit entre AAV______ et AAM______/K______, respectivement entre AAV______ et Madame E______, lui ont été envoyés.

Elle a délégué son pouvoir de signature, en délivrant une procuration à AAE______, via AAB______, pour signer ces protocoles d'accord avant de démissionner immédiatement. Des administrateurs de paille ont alors été désignés.

De même, Madame B______ a délivré une procuration à AAA______ pour signer le contrat entre CGR______ GUINEE et le gouvernement guinéen, le même jour que la conclusion du contrat entre AAV______ et Madame E______.

Par ces agissements, Madame B______ a permis la mise en place du schéma corruptif.

3.1.1.3. Mainmise sur les actions de AAV______ et dissimulation des ayant-droits

Malgré la vente de AAV______ à AAD______ et sa démission immédiate en sa qualité d'administratrice, via X______, Madame B______ a gardé la mainmise sur les actions de AAV______.

En effet, Madame B______ a attesté détenir, en sa qualité d'administratrice de AD______ BVI, les actions de AAV______, à titre fiduciaire et ce, jusqu'à décembre 2006.

A cette date, Madame B______ a effectué les démarches nécessaires pour transférer lesdites actions. Ces actions ne seront pas transférées à Monsieur A______ et à ses associés, à qui elle avait vendu la société, mais à une structure particulièrement opaque, gérée également depuis Genève, à qui elle a adressé tous les documents corporatifs de AAV______.

Ce faisant, d'une part, Madame B______ a gardé la mainmise sur les actions de l'intermédiaire, en garantie de la bonne exécution des accords à conclure, et, d'autre part, a permis de cacher les véritables ayant-droits économiques de AAV______.

3.1.1.4. Transfert des actions de CGR______ GUINEE

Une fois le contrat entre CGR______ GUINEE et le gouvernement guinéen conclu, Madame B______ s'est occupée du transfert des actions promises à AAV______. Elle a signé le contrat de cession des actions de CGR______ GUINEE en faveur de AAV______.

Par la suite, Madame B______ a signé l'accord du 24 mars 2008 de rachat des actions que AAV______ détenait dans CGR______ GUINEE. Elle a signé le contrat de cession de ces actions puis elle a annulé le certificat d'actions en faveur de AAV______.

Ce faisant, elle a permis la rémunération de l'intermédiaire et écran entre CGR______ et Madame E______.

3.1.1.5. Effacement de l'intermédiaire

Madame B______ a effectué toutes les démarches administratives et corporatives nécessaires à l'effacement de l'intermédiaire AAV______.

Elle était responsable du plan de restructuration au niveau administratif et corporatif. Elle a signé quasiment tous les documents permettant la restructuration, en deux étapes, de CGR______, en 2009 et 2010, en sa qualité d'administratrice de toutes les sociétés impliquées dans la restructuration, soit :

-        CGR______ GUERNESEY,

-        CGR______ STEEL,

-        CGR______ GUINEA (BVI),

-        CGR______ GUINEA (Guernesey).

Ainsi, dans un premier temps, elle a acheté une société au nom identique à celle qui détenait les droits miniers, mais domiciliée à Guernesey et non plus aux BVI. Elle a ainsi permis le transfert des permis miniers d'une société à l'autre.

Elle a signé le transfert de CGR______ GUINEE SARL d'une société à l'autre. Elle a signé les contrats de transfert de prêt et signé les contrats de prêts. Elle a voté la dissolution de CGR______ GUINEE BVI, ancienne détentrice des droits miniers et, dont une participation avait été cédée à AAV______. Elle s'est désignée liquidatrice de cette société puis a constaté la liquidation.

Dans un second temps, elle a signé le contrat de cession de CGR______ STEEL et CGR______ GUINEE BVI à CG______MM, pour le compte de l'acheteur et du vendeur, alors que ces deux sociétés avaient des liens avec AAV______.

Quant à AX______, il s'est occupé de faire effacer toute mention compromettante dans la comptabilité.

Au niveau comptable également, Madame B______ a permis de cacher le rôle de AAV______.

Madame B______ a, en effet, signé les résolutions pour ne pas auditer les comptes 2009 et 2010 de CGR______ GUERNESEY. En revanche, elle a signé les comptes consolidés de CGR______ GUERNESEY, alors qu'ils mentionnaient faussement que les versements de USD 22 millions et de USD 3 millions à AAV______ étaient en lien avec la vente d'une aciérie à Baku.

Dans la foulée, alors que les paiements à AAV______ avaient jusque-là été effectués par CGR______ TREASURY SERVICES, après la vente à ABY______ les paiements ont été effectués par AE______, une société étrangère aux activités de CGR______, détentrice d'une société exploitant une aciérie en Azerbaïdjan. A cette fin, AAV______ a ouvert un nouveau compte en Israël. Après le dernier paiement, la société AAV______ a été radiée et AE______ le sera en 2014.

En agissant de la sorte, Madame B______ a permis de supprimer tout lien avec l'intermédiaire dans les promesses faites à des fins corruptives et les versements corruptifs effectués ou à effectuer.

Enfin, Madame B______ a obtenu une prime de résultat lorsque l'opération a été menée à terme, preuve en est encore de son implication dans le bon déroulement du projet. De même, AD______ BVI, dont Madame B______ était administratrice, a reçu 0.5 % des USD 500 millions payés par ABY______ à CGR______.

3.1.1.6. Madame B______ a, ainsi, objectivement, activement participé à la mise en place et à l'effacement de l'intermédiaire et écran AAV______. Elle a mis en place le schéma corruptif sous ses aspects corporatifs et administratifs.

3.1.2. Eu égard à son rôle au sein des sociétés CGR______, Madame B______ occupait une position privilégiée et connaissait le business modèle de CGR______, tel que rappelé lors de la réunion stratégique de Guernesey.

Sous l'angle subjectif, Madame B______ était informée, en 2005 déjà, du projet guinéen, qui visait à acquérir des concessions sur une des plus grandes réserves inexploitées de fer du monde dans une région géographique très risquée. Début 2006, elle avait été informée de la signature d'un protocole d'accord avec le Président guinéen.

La veille de la signature de l'accord avec AAV______, elle a attesté détenir pour le compte de AAV______ les actions de CGR______ GUINEE qui seront cédées le lendemain. Madame B______ a, toutefois, conditionné l'exécution de l'accord avec AAV______, soit le transfert des actions, à l'exécution du contrat entre CGR______ GUINEE et le gouvernement de la République de Guinée, ce qui démontre sa compréhension et son implication dans l'opération en cours.

Madame B______ savait, comme elle l'a indiqué dans la procédure, que l'octroi d'une participation permettrait le versement ultérieur d'une commission en cas de réussite de l'opération.

Le 14 février 2006, le contrat entre AAV______ et CGR______ a été signé. Celui-ci mentionnait, effectivement, la participation de 17.65 %, évoquée par Madame B______ la veille, et prévoyait le paiement des USD 19.5 millions, selon un échéancier très spécifique.

Or, ces paiements et cet échéancier n'étaient que le pendant de la rémunération promise à AAM______/K______ et à AAF______, lesquels ont permis à CGR______ d'accéder au Président AAO______ par le biais de sa quatrième épouse.

Précisément, le contrat entre AAV______ et AAM______/K______ a été envoyé, le 15 février 2006, à Madame B______ pour signature dans la mesure où elle était, alors, encore administratrice de AAV______, via X______. Elle a, toutefois, refusé de le signer, préférant, dans un premier temps, déléguer son pouvoir de signature, avant de démissionner de ses fonctions dès la procuration délivrée.

Par la suite, Madame B______ a caché le nom des personnes physiques derrière AAV______ par le biais d'un rapport de fiducie.

Enfin, avant de transférer les actions de CGR______ GUINEE à AAV______, dont elle était restée propriétaire à titre fiduciaire via AD______, Madame B______ s'est assurée de la bonne exécution de l'accord conclu entre CGR______ et la Guinée.

Elle a manifesté, par-là, qu'elle était parfaitement consciente de la situation, tout en gardant la maîtrise de l'opération. Elle a fait en sorte de ne pas apparaître personnellement ou de ne pas être liée d'une quelconque manière au pacte corruptif et de cacher le nom des personnes physiques derrière la société écran utilisée par CGR______.

Par ailleurs, il sied de relever que le contrat entre AAV______ et Madame E______, qui avait été envoyé à Madame B______, prévoyait non pas le versement de sommes d'argent, mais l'octroi d'une participation dans le projet. Or, l'octroi d'une participation démontre qu'une contrepartie est demandée au cocontractant, en l'occurrence influencer le Président AAO______, pour que celui-ci influe à son tour dans le cadre du processus d'attribution des droits miniers.

Par ailleurs, Madame B______ a été impliquée dans le règlement du litige avec AAM______, qui réclamait l'exécution de l'accord conclu le 20 février 2006, lequel avait été précisément soumis à Madame B______ pour signature (cf. échange de courriers de juin 2009, recours à des avocats, Madame B______ est le contact de l'avocat genevois de AAV______, traduction du courrier du 15 mars 2010). Elle ne s'en est pas étonnée ni inquiétée, malgré les termes utilisés par l'intéressé, ce qui démontre encore son implication dans le schéma corruptif et sa parfaite connaissance de celui-ci.

Madame B______ a, également, démontré, par ses actions ultérieures, sa participation au schéma corruptif.

Elle a encore activement oeuvré à la restructuration du groupe tendant à l'effacement de l'intermédiaire et écran AAV______.

Elle a été, dans ce cadre, en contact étroit avec AX______, lequel s'est occupé de tous les paiements à l'intermédiaire AAV______ et à la bénéficiaire des fonds corruptifs Madame E______ (cf. "Proposed restructuring and step plan" établi par AX______, PP 306'391).

Alors qu'elle avait personnellement signé les résolutions pour ne pas auditer les comptes 2009 et 2010 de CGR______ GUERNESEY, Madame B______ a signé les comptes consolidés mensongers de CGR______ GUERNESEY, dont le caractère falsifié n'a pas pu lui échapper.

En effet, Madame B______ a une connaissance approfondie de la structure du groupe et de ses sociétés. Elle a néanmoins signé des comptes qui mentionnaient faussement:

-        La nature du montant payé à AAV______, qui figurait comme un investissement, ce qui est erroné et ce qu'elle ne pouvait que savoir;

-        Le motif du paiement à AAV______: la vente d'une aciérie à Baku, ce qui est erroné et ce qu'elle ne pouvait que savoir;

-        Un paiement supplémentaire de USD 3 millions: dans la rubrique AE______, après une référence à un montant versé au CEO de ACG______, détenue par AE______, ACH______, ce qui est erroné et ce qu'elle ne pouvait que savoir.

Par ses agissements, Madame B______ a manifesté sa volonté de cacher le rôle joué par AAV______ dans le schéma corruptif mis en place.

Si l'intervention de AAV______ était licite, s'il s'était agi de paiements à des intermédiaires indépendants du pouvoir, il n'y avait aucune raison de falsifier les comptes.

Enfin, Madame B______ ne pouvait que connaître le rôle occulte de AX______, qui s'est occupé de tous les paiements en lien avec la corruption, ainsi que de l'effacement de toutes les traces de la corruption. Madame B______ est administratrice de CGR______, laquelle est liée par un contrat de mandat à AZ______, la société de AX______. En cette qualité, elle ne pouvait que savoir que le statut de AX______ avait été modifié en 2010. Or, elle a menti à cet égard, en soutenant faussement que celui-ci était subordonné à AJ______, ce qu'elle ne pouvait que savoir vu ses liens avec l'intéressé et son rôle au sein de CGR______.

D'ailleurs, AX______ a reçu, après la vente à ABY______, un bonus substantiel de USD 800'000.-, représentant 4.5 fois les services facturés, alors qu'il n'était qu'un mandataire de CGR______, ce que Madame B______ savait dès lors qu'elle avait approuvé les bonus octroyés en sa qualité d'administratrice de CGR______ GUERNESEY.

Le fait que Madame B______ n'ait peut-être pas eu connaissance des montants exacts versés à Madame E______ ressortit à son rôle. En effet, la précitée n'était pas en charge de l'exécution des paiements.

En participant à l'effacement de l'intermédiaire et en cachant les sommes qui avaient été versées à celui-ci, soit USD 34.5 millions, Madame B______ ne pouvait que savoir que le travail demandé, qui consistait à obtenir l'influence du Président guinéen dans le processus d'attribution des titres miniers, était en cours d'exécution. En effet, à défaut, la participation octroyée n'aurait pas été valorisée et la rémunération n'aurait pas été versée à l'intermédiaire.

3.1.3.1. Madame B______ a collaboré, intentionnellement et de manière déterminante, avec d'autres personnes, à la décision de corrompre le Président AAO______ par la promesse et l'octroi d'avantages indus à sa quatrième épouse.

Ces faits sont constitutifs de corruption d'agents publics étrangers et Madame B______ sera reconnue coupable de ce chef d'infraction.

3.1.3.2. Transaction 1 / Sucre

En revanche, s'agissant du sucre acheté à Madame E______, il n'est pas en lien direct avec l'accord du 20 février 2006 et les accords ultérieurs, raison pour laquelle il doit être traité à part.

CGR______ ne pouvait que se douter qu'une partie, à tout le moins, des USD 250'000.- étaient destinés à récompenser Madame E______, voire d'autres partenaires locaux, ainsi que cela a été le cas dans les faits.

La participation de Madame B______ à ce versement n'est pas établie objectivement. Subjectivement, il ne ressort pas non plus du dossier qu'elle aurait été spécifiquement informée du versement à AAD______ des USD 250'000.- en question, pas plus qu'il n'est établi qu'elle savait ou avait envisagé qu'une partie dudit montant bénéficierait finalement à Madame E______ et aux autres partenaires locaux.

Le versement de USD 250'000.- de CGR______ à AAD______ n'est pas compris dans la rémunération de AAV______.

Cette situation n'est pas comparable aux paiements en espèces effectués à Madame E______ en échange de la participation convenue dans l'accord du 20 février 2006 envoyé à Madame B______.

Il résulte de ce qui précède que Madame B______ sera acquittée de corruption d'agents publics étrangers s'agissant des faits mentionnés sous chiffre B.b.I.1.1. de l'acte d'accusation.

3.2. Monsieur C______

3.2.1. Dirigeant effectif

Monsieur C______ est, officiellement, premier bénéficiaire de la fondation V______, qui détient, par le biais de la holding W______, toutes les sociétés du groupe CG______ actives dans les ressources naturelles.

La fondation V______ prend toutes les décisions stratégiques du groupe, alors que le Président du conseil de fondation, l'avocat de Monsieur C______ dans la présente procédure, est également le représentant de la holding W______ en tant qu'administrateur unique.

Quand à AD______ BVI, elle est liée par un contrat de mandat à la fondation V______, qui approuve son budget et prend en charge l'intégralités de ses frais.

Entre 2004 et 2010, AD______ BVI était détenue par AC______, par le biais d'une offshore AN______. AC______ était également CEO et CIO de CG______MM, détenue par la fondation AR______, dont Monsieur C______ est également le premier bénéficiaire. AC______ a déclaré avoir été engagé par la fondation V______ après plusieurs discussions avec Monsieur C______ et avoir une relation étroite avec Monsieur C______ pour que les choses fonctionnent (PP 502'158).

Madame B______ était administratrice de AD______ BVI et de toutes les sociétés du groupe CGR______, tout en étant la secrétaire du conseil de fondation. Elle travaillait pour la famille Monsieur C______ depuis ses 19 ans et a travaillé pour AD______ BVI dès sa création.

AC______ et Madame B______ étaient administrateurs de CGR______, sise à Guernesey, laquelle détenait CGR______ GUINEE, future détentrice des droits miniers.

Monsieur C______ bénéficie de distributions de fonds de la fondation pour ses besoins personnels, mais également professionnels (distribution de fonds à AB______ REAL ESTATE, dont l'actionnaire unique est Monsieur C______). Il est rémunéré entre USD 250'000.- et 400'000.- par an par la fondation V______ et également USD 700'000.- par an par CGR______ pour ses activités de conseil.

Après la transaction avec ABY______ en 2010, sur les USD 500 millions payés par ABY______, entre 2010 et 2012, USD 350 millions seront reversés à W______ et USD 150 millions seront distribués par la fondation V______ pour soutenir la société AB______ REAL ESTATE, détenue directement par Monsieur C______. Ainsi, il a bénéficié directement des fonds versés par ABY______.

Quant à AD______ BVI, elle a reçu 0.5 % du montant de USD 500 millions payés par ABY______. AC______ a reçu USD 3 millions et Madame B______ USD 150'000.-.

Dans le cadre de ses activités de "conseil", comme il les qualifie, Monsieur C______ voyage à bord d'un des deux avions détenus in fine par la fondation V______.

Les sociétés actives dans les ressources naturelles en Afrique portent toutes le nom de Monsieur C______ sous le brand name de CGR______, soit C______ GROUP RESOURCES, ce qui revêtait une importance primordiale à teneur du courriel du 17 janvier 2006 de AAG______ à Madame B______.

Par ailleurs, il ressort de ses déclarations dans le cadre de la présente procédure que Monsieur C______ se confond, parfois, avec le groupe avant de rectifier (i.e. "on n'a jamais payé Madame E______; par nous j'entends moi ou CGR______", PP 500'475).

Monsieur C______ se décrit, également, comme l'ambassadeur du groupe, qui porte son nom et indique se présenter sous ce nom, laissant ainsi entendre à ses interlocuteurs qu'il en est à la tête. Il rencontre les chefs d'Etat, les ministres ou autres dirigeants. Il est présent lors de toutes les négociations importantes du groupe et lors de toutes les réunions stratégiques. Il ressort notamment du procès-verbal de la réunion stratégique du conseil d'administration et du management de CGR______ d'août 2007, à Guernesey, que Monsieur C______ est très impliqué dans la stratégie du groupe, qu'il commente, incluant les aspects financiers, les projets, le business modèle du groupe ou l'engagement d'un nouveau cadre, dont il propose la désignation (en l'occurrence un nouveau chef des ressources humaines en charge notamment de la politique de rémunération).

Vis-à-vis de l'extérieur, Monsieur C______ est présenté comme le propriétaire du groupe CGR______, référence étant ici faite au rapport d'activités de CGR______ en Guinée, rédigé par AAU______.

Il est par ailleurs également informé et impliqué dans les litiges qui concerne CGR______ (i.e. AAM______, Madame E______, la procédure administrative guinéenne, CIRDI, LCIA).

Monsieur C______ est, également, considéré, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de CGR______, comme le chef de CGR______. Ainsi, il est fait référence à Monsieur C______ comme étant le "big boss" ou le "No 1" (i.e. conversation Monsieur A______ du 11 avril 2013; PP 4'707'154; courriel du 10 mai 2006 de AAA______).

Sa position au sein de CGR______ ressort également des propos tenus par Monsieur A______ à Madame E______ en Floride (i.e. conversation du 11 avril 2013, "il y en a qu'un qui décide, tu dois comprendre que toutes les personnes sont au milieu, il n'y a personne qui décide, il n'y en a qu'un, c'est celui qui est en haut, et c'est le seul (...)").

Par ailleurs, Monsieur C______ s'est entouré de personnes loyales et fidèles dans les structures mises en place, dont notamment :

-        Son avocat genevois, Me GAMMA, associé senior de la fondation, dont Monsieur C______ est le premier bénéficiaire et le conseiller. Me GAMMA est également l'administrateur unique de W______, la holding qui détient toutes les sociétés du groupe CGR______;

-        AC______ comme déjà mentionné;

-        Madame B______ comme déjà mentionné;

-        AX______, CFO de CGR______ avant de devenir mandataire de CGR______ Guernesey, en qualité de conseiller financier stratégique, sis en Israël;

-        F______, avocat interne, sis en Israël, avant de devenir avocat externe.

La structure mise en place, que ce soit au niveau financier, au niveau corporatif ou au niveau humain, permet à Monsieur C______ d'exercer son pouvoir décisionnel au sein du groupe qui porte son nom.

Ce pouvoir est mis en exergue dans le cadre du projet guinéen, qui nous occupe.

En effet, Monsieur C______ a été impliqué dans toutes les étapes importantes du processus d'attribution des titres miniers:

-        Il a été informé du projet guinéen, au printemps 2006, tel que cela ressort du courriel du 10 mai 2006;

-        Il a été mis en contact avec AAB______, en juin 2006 déjà, rencontre qui ne s'explique qu'en lien avec le projet guinéen;

-        Il était présent lors de la réunion du conseil stratégique de CGR______ Guernesey lors duquel :

o   il a donné des conseils stratégiques liés à la viabilité du projet guinéen (soit la problématique du transport),

o   le business model de CGR______ a été discuté, Monsieur C______ mettant en exergue les points forts de CGR______, soit notamment ses contacts dans l'establishment politique;

-        Il a donné des instructions claires par rapport à l'attitude à adopter, notamment vis-à-vis de AAL______;

-        Il a été informé des rencontres avec les "key people", dont The Lady;

-        Il a rencontré à cinq reprises, en 2008, le Président AAO______, notamment en présence de Madame E______;

-        Il a rencontré à trois reprises la Présidente du Libéria, alors que la "Liberian Transport Solution", soit l'évacuation du minerai par le Libéria était une des conditions à la viabilité économique du projet guinéen;

-        Il a rencontré les Présidents et les ministres successifs;

-        Il entretient des liens étroits avec ABP______;

-        Il est partie prenante aux négociations avec de futurs partenaires, dont ABY______;

-        Il s'implique dans la résolution du litige avec le Comité technique de Guinée.

Les déclarations de AX______ et de AAU______ confirment ces éléments.

AX______ a déclaré que Monsieur C______ était le décideur dans la société CGR______ et qu'il approuvait chacun des versements importants (PP 4'901'628). Quant à AAU______, il a indiqué que Monsieur C______ était son vrai "boss" et qu'il se présentait comme conseiller pour "des combines pour les impôts" (PP 4'900'065).

Il résulte de ce qui précède que Monsieur C______ n'est, officiellement, ni un organe ou un membre d'organe, ni un associé ou un collaborateur au sein de la fondation V______ et des sociétés détenues par cette fondation. Il ressort toutefois de sa position au sein de cette structure et de ses activités qu'il a un pouvoir décisionnel au sein du groupe CGR______ et qu'il y occupe donc une position de dirigent effectif.

3.2.2. Rémunération des intermédiaires

Il ressort de la procédure que Monsieur C______ a été en charge de la rémunération de Monsieur A______ et de ses associés, qui agissaient sous le couvert de AAV______.

Ainsi, en juin 2006 déjà, Monsieur C______ a eu des discussions avec AAB______, à qui les principes de l'intervention de Monsieur A______ et de ses associés ont été rappelés. A cette occasion, il a été manifesté la volonté de CGR______ de dissocier strictement AAV______ de CGR______. En d'autres termes, AAV______ ne devait, en aucun cas, apparaître comme agissant pour le compte de CGR______.

Il ressort du courriel du 10 mai 2006 également, que Monsieur C______, désigné comme le No 1, avait manifesté auprès du CEO AAG______ et du futur CEO AAA______ son objectif, soit le fer de Simandou.

Monsieur C______ a, ensuite, été en charge de la négociation de l'accord du 24 mars 2008 portant sur le rachat de la participation de 17.65 % moyennant versement de USD 22 plus 8 millions, tel que cela ressort des éléments suivants:

Dans son courriel du 8 avril 2009, AAB______ a parlé, en s'adressant à Monsieur C______, de "leur" accord ("our agreement").

Les factures de AAV______ ont été retrouvées lors de la perquisition de l'avion utilisé par Monsieur C______.

L'accord du 24 mars 2008 portant sur le paiement de AAV______ n'étant pas respecté, AAB______ s'est adressé directement à Monsieur C______ pour s'en plaindre et l'informer que ses associés et lui refusaient toute modification concernant le montant et les dates de paiement de leur rémunération. AAB______ s'est, ensuite, adressé à AX______ pour solliciter le versement de la troisième échéance et à Madame B______, administratrice de CGR______ STEEL.

Monsieur C______ a, alors, convenu directement avec AAB______ d'un nouvel échéancier de paiement.

Informé des prétentions financières de AAM______, qui se plaignait du non-respect de l'accord conclu le 20 février 2006, Monsieur C______ a discuté directement de ce problème avec AAB______, à plusieurs reprises, durant le mois de juin 2009. Le paiement du solde de la rémunération due à AAV______ sera conditionné à la résolution de ce litige, ce qui démontre l'interdépendance de la rémunération due à AAV______ avec les promesses faites aux partenaires locaux, par accords du 20 février 2006, soit à AAM______/K______, AAF______ et Madame E______.

Monsieur C______ a négocié, directement, avec AAB______ le paiement d'un montant supplémentaire de USD 4.5 millions à verser à AAB______ et à ses associés, en sus des USD 30 millions perçus. Ce faisant, il a reconnu le succès de l'intervention de AAB______ et de ses associés dans l'attribution des titres miniers.

Comme il a été retenu, AAV______ a joué le rôle d'intermédiaire ou d'écran entre CGR______ et les partenaires locaux, dont Madame E______. Aucune contreprestation à la participation octroyée à AAV______ n'était prévue, si ce n'est de jouer le rôle d'intermédiaire et d'écran entre CGR______ et la bénéficiaire des fonds corrupteurs. En effet, non seulement Monsieur A______ et ses associés n'avaient aucune expérience préalable en matière minière, mais ils étaient rémunérés, séparément, par CGR______, pour le travail déployé sur le terrain et pour les frais encourus. Ainsi, la participation octroyée par Monsieur C______ à Monsieur A______ et à ses associés était le pendant de l'influence demandée au Président guinéen.

A cela s'ajoute que Monsieur C______ est intervenu, directement, dans un des paiements corruptifs en sollicitant les services d'un ami et partenaire en affaires, D______.

Par ailleurs, l'implication directe de Monsieur C______ dans les versements corruptifs ressort des conversations enregistrées par le FBI, en Floride. Monsieur C______ a été directement mis en cause dans le versement des USD 5.5 millions à Madame E______. Monsieur A______ a précisé l'implication de Monsieur C______ dans le processus corruptif, en mettant en avant "l'intelligence" de Monsieur C______ dans la mise en place du processus corruptif visant l'attribution des concessions minières.

A cet égard, la thèse de la défense du "name dropping" ne résiste pas à l'examen.

En effet, eu égard à la chronologie des évènements et à l'implication de Monsieur C______, la mention de son nom dans les discussions entre Madame E______ et Monsieur A______ n'est à l'évidence pas une coïncidence. Par ailleurs, si Monsieur C______ était étranger au processus corrupteur, la mention de son nom était inutile. Cela est d'autant plus vrai que si les USD 3.4 millions reçus par Madame E______, comme le soutient Monsieur A______, avaient été versés par Monsieur A______ et ses associés, il aurait été inutile de recourir au nom de Monsieur C______. De même, si Madame E______ avait reçu les USD 3 millions de ABZ______, la mention de Monsieur C______ n'était pas nécessaire. Enfin, Monsieur A______ fait clairement la différence entre l'argent versé par ses associés et lui-même et celui versé par Monsieur C______. De même qu'il précise que les USD 20'000.- qu'il détenait sur lui lors de son arrestation provenaient de "sa poche".

Par son comportement ultérieur, Monsieur C______ a, également, démontré son implication dans le processus corruptif mis en place.

Monsieur C______ s'est impliqué personnellement dans la réponse à donner au Comité technique guinéen en rencontrant son avocat parisien Me Jean VEIL, en présence de ACR______ (PP 500'640). Durant cette rencontre, il a été question de la rédaction d'une attestation que devait signer Madame E______. Cette attestation a été envoyée à Monsieur C______ par ACR______. Tout en prétendant ne pas être concerné, il a donné son accord à cette manière d'agir ("I think it make sense"). Le 11 avril 2013, Monsieur A______ s'est, ainsi, rendu à Miami, muni de cette attestation à faire signer à Madame E______. Cette attestation avait pour but de présenter Madame E______ comme une intermédiaire indépendante du pouvoir. Ces éléments démontrent que Monsieur C______ a activement collaboré pour tenter de cacher le rôle joué par Madame E______ dans le processus étatique d'attribution des titres miniers, auquel il a activement participé.

Par ailleurs, Monsieur A______ est allé à la rencontre de Madame E______ pour détruire les contrats originaux moyennant le versement d'une somme d'argent supplémentaire promise par Monsieur C______, soit Monsieur C______.

Enfin, il sera relevé que AX______ a été impliqué dans presque tous les paiements à Monsieur A______ et à ses associés, via AAV______ ou ABJ______, et à Madame E______. Il a été également en charge de l'effacement des preuves (i.e. restructuration, codes comptables à utiliser, références à supprimer). Or, ce n'est pas un hasard si AX______ est passé du statut d'employé de CGR______ à celui de mandataire de CGR______, de même que ce n'est pas un hasard si AX______ a été désigné auditeur interne de la fondation V______ par la suite. Monsieur C______ ne pouvait l'ignorer, s'il ne l'a pas approuvé, au vu de sa position de dirigeant effectif, ce d'autant plus que AX______ a déménagé en 2010, en Israël, où réside Monsieur C______.

3.2.3. Sous l'angle subjectif, en rencontrant AAB______ en 2006 déjà, Monsieur C______ a accepté, pleinement et sans réserve, l'intervention de tiers destinée à influencer le processus étatique d'attribution des droits miniers.

En août 2007, il a participé au comité stratégique de CGR______, à Guernesey, lors duquel le projet guinéen a été évoqué de même que le business modèle de CGR______, qui consistait à obtenir des concessions dans des régions géographiques très risquées et à les revendre à des sociétés ayant la capacité de les exploiter. A cette occasion, Monsieur C______ a mis en avant les points forts de CGR______, soit notamment l'establishment politique. A ce moment, Monsieur C______ ne pouvait qu'avoir conscience des risques liés à la stratégie de son groupe, ce qui a été rappelé en août 2007. A cette date, il avait déjà rencontré AAB______, en juin 2006, soit l'intermédiaire qui a conclu le pacte corruptif avec The Lady, soit la femme du Président AAO______, comme déjà mentionné par AAA______ dans son courriel du 10 mai 2006 à AAG______.

Le courriel du 18 septembre 2007 que AAU______ lui a adressé quelques jours après cette réunion stratégique démontre que, non seulement, Monsieur C______ avait connaissance des démarches entreprises auprès des "key people" en Guinée, dont The Lady, soit la femme du Président, voire auprès du Président lui-même, mais qu'il a donné des instructions précises sur la manière d'agir en demandant qu'aucune référence ne soit faite à AAL______, qui détenait les permis sur les blocs convoités. Or, la corruption mise en place permettra d'obtenir du Président guinéen le retrait des concessions entretemps octroyées à AAL______ par un ministre limogé dans l'intervalle.

Par ailleurs, comme déjà mentionné, Monsieur C______ avait la mainmise sur la rémunération des intermédiaires, Monsieur A______ et ses associés. Dans cette mesure, il avait la maitrise sur le processus corruptif. Il était également informé des litiges qui pouvaient affecter la rémunération prévue. A cet égard, il n'est pas anodin que, dans le cadre du litige découlant des revendications formulées par AAM______, qui réclamait l'exécution de l'accord du 20 février 2006, AAB______ se soit adressé à Monsieur C______ (cf. courriel du 7 juin 2009, PP 349'012) pour l'informer que AAM______ avait trouvé un accord avec ABD______, "société qui appartient à Madame E______, épouse de feu le Président de Guinée".

Monsieur C______ est encore intervenu, personnellement, dans le versement de USD 1.5 million à Madame E______, en recourant aux services d'un partenaire en affaires d'alors, lequel était par ailleurs son ami, soit D______. Il a tenté de cacher le réel motif de ce versement en faisant parvenir des documents, à l'appui de ses explications pour justifier le transfert de fonds, lesquelles sont contredites par les éléments du dossier.

Enfin, il a participé à la tentative de cacher l'intervention et le rôle joué par Madame E______.

3.2.4. CGR______ a obtenu des concessions minières dans un des pays les plus corrompus du monde, ce qu'elle appelle une zone géographique très risquée, en investissant quelque USD 160 millions et, ce sans avoir la capacité de les exploiter, mais dans l'objectif de les revendre comme son business model le prévoyait. Le profit immédiat de plusieurs milliards qui a été retiré est mirobolant. Sur ce montant, pas un centime n'a bénéficié à l'Etat guinéen, ce d'autant plus qu'aucune participation de l'Etat guinéen n'a alors été prévue, contrairement à ce qui avait été convenu dans l'accord du 20 février 2006. Monsieur C______ a profité directement de cette transaction à hauteur de plusieurs millions de dollars, notamment par le biais de distributions de fonds destinés à être injectés directement dans la société AB______, dont il est seul actionnaire. Ce seul fait est un indice fort de corruption.

V______ a distribué les fonds suivants à Monsieur C______, mais pour que ceux-ci soient

Il ressort de ce qui a été exposé que, non seulement, les concessions minières ont été obtenues par le biais de la corruption du Président AAO______, mais que Monsieur C______ a collaboré, intentionnellement et de manière déterminante, avec d'autres personnes, au processus corruptif ayant rendu possible le retrait des concessions à AAL______ et l'octroi des permis à CGR______ GUINEE.

Le fait que Monsieur C______ n'ait pas été tenu au courant de tous les détails du plan mis en place n'y change rien. En effet, cela ne ressortait pas de son rôle dans le processus de corruption mis en place. Comme il le dit lui-même (PP 500'296), Monsieur C______ ne s'occupe pas de l'opérationnel, des détails techniques, lui il est "en haut".

3.2.5. Ces faits sont constitutifs de corruption d'agents publics étrangers et Monsieur C______ sera reconnu coupable de ce chef d'infraction.

3.2.5. Transaction 1 / sucre

En revanche, s'agissant du sucre acheté à Madame E______, il n'est pas en lien direct avec l'accord du 20 février 2006 et les accords ultérieurs, raison pour laquelle il doit être traité à part pour les raisons qui suivent.

CGR______ ne pouvait que se douter qu'une partie, à tout le moins, des USD 250'000.- étaient destinés à récompenser Madame E______ voire d'autres partenaires locaux, ainsi que cela a été le cas dans les faits.

En revanche, la participation de Monsieur C______ à ce versement n'est pas établie objectivement. Subjectivement, il ne ressort pas non plus du dossier qu'il aurait été, spécifiquement, informé du versement à AAD______ des USD 250'000.- en question, pas plus qu'il n'est établi qu'il savait ou avait envisagé qu'une partie dudit montant bénéficierait finalement à Madame E______ et autres partenaires locaux.

Cette situation n'est pas comparable à celle qui prélavera en 2008 et 2009, lorsque Monsieur C______ lui-même réglera la question du rachat de la participation de AAV______. Ce rachat des actions détenues par AAV______ dans CGR______ GUINEE est lié au succès de l'opération, soit à l'influence effectivement exercée sur le Président sur le processus d'attribution des droits miniers.

Il résulte de ce qui précède que Monsieur C______ sera acquitté de corruption d'agents publics étrangers s'agissant des faits mentionnés sous chiffre B.a.I.1.1 de l'acte d'accusation.

3.3. Monsieur A______

3.3.1. Accès au Président

S'agissant de Monsieur A______, en 2005, il n'avait aucune expérience en matière minière et aucune connaissance de la Guinée. En revanche, il tire sa force dans ses réseaux et ses capacités relationnelles. Il a été chargé d'identifier et d'approcher les "key people", comme AAU______ les qualifie, pour pouvoir influencer le processus étatique décisionnel.

Ainsi, après avoir recouru à la première dame, il a été mis en contact avec la quatrième épouse du Président AAO______, par le biais de son demi-frère, rencontre qui permettra d'accéder au Président et d'obtenir son influence sur le processus d'attribution des titres miniers en échange de promesse d'avantages à sa quatrième épouse.

3.3.2. Mise en place de la société écran et conclusion des accords

Monsieur A______ a permis la mise en place et la conclusion des accords des 14 et 20 février 2006, lesquels étaient intrinsèquement liés.

Ses associés et lui-même ont servi d'intermédiaire et d'écran entre CGR______ et la quatrième épouse du Président de Guinée.

Monsieur A______ a été le contact privilégié de Madame E______ dans le cadre de la conclusion et de la négociation de l'accord entre AAV______ et Madame E______, la précitée, en tant que "partenaire locale", se voyant promettre un tiers de la participation de AAV______ dans le projet guinéen.

Ainsi, Monsieur A______ a permis à CGR______ d'accéder au pouvoir, par le biais de la quatrième épouse du Président. Il a concrètement conclu avec celle-ci une promesse d'avantages indus si l'influence demandée était apportée.

L'enregistrement par le FBI des conversations, en Floride, entre Monsieur A______ et Madame E______ sont confondantes sur le rôle joué par Monsieur A______ dans le processus.

3.3.3. Contacts

Par la suite, Monsieur A______ a gardé des contacts étroits avec Madame E______.

Ainsi, par courriel du 28 février 2006, Monsieur A______ a confirmé qu'il était en contact permanent avec ses partenaires locaux, dont faisait partie Madame E______, concernant les blocs 1 et 2.

Par ailleurs, Monsieur A______ a été pleinement impliqué dans le paiement du sucre à Madame E______, qui consistait en la première étape de récompense vers l'obtention des permis d'exploitation des blocs 1 et 2.

En 2007, Monsieur A______ s'est employé à trouver des moyens de faire parvenir les sommes dues à Madame E______ en demandant à son gestionnaire de fortune d'acheter une société pour le compte de l'intéressée. Il s'est également renseigné sur les possibilités d'ouvrir un compte bancaire pour Madame E______ en fournissant une copie du passeport de la précitée pour ce faire.

Par la suite, s'il s'est éloigné quelque peu de la Guinée, Monsieur A______ est resté en contact étroit avec son associé AAB______, chargé de négocier leur rémunération.

3.3.4. Paiements

En 2010, Monsieur A______ a également contribué, par le biais de son associé AAB______, à trouver un accord avec Madame E______ sur le versement d'une somme supplémentaire à titre de rémunération.

Ainsi, il s'est pleinement associé aux démarches de AAB______, durant l'été 2010, en lui envoyant le texte que devait signer Madame E______.

Ensuite, Monsieur A______ a mis à disposition ses comptes bancaires pour procéder au paiement de la somme supplémentaire de USD 5.5 millions convenue. Il a servi d'intermédiaire et d'écran à CGR______ dans le versement des sommes payées en exécution de l'accord du 20 février 2006, qu'il avait lui-même contribué à mettre en place.

3.3.5. Effacement

Enfin, le comportement de Monsieur A______ ultérieurement à la commission de l'infraction de corruption est confondant.

Il s'est rendu à de nombreuses reprises à la rencontre de Madame E______, en Floride, pour tenter de faire disparaitre les documents originaux compromettant et faire mentir Madame E______ sur son rôle et son implication dans l'attribution des titres miniers.

3.3.6. Contacts Monsieur C______

Le fait que Monsieur A______ n'a pas, ou peu, eu de contacts avec Monsieur C______ ressortit à son rôle. En effet, il est établi par la procédure que c'est son associé AAB______, qui était en contact avec Monsieur C______. Monsieur A______, quant à lui, était en contact principalement avec AAG______, AAA______ et AAU______.

3.3.7. Sous l'angle subjectif, Monsieur A______ connaissait parfaitement l'illicéité de son comportement.

Il a mis en place une société écran entre CGR______ et Madame E______, soit AAV______, qui est devenue la cocontractante directe des partenaires locaux, dont la quatrième épouse du Président.

Il a participé à la rédaction de ces contrats, qui prévoyaient des versements mirobolants à ses contacts.

Madame E______, femme quasi illettrée selon les dires de Monsieur A______ et sans aucune activité professionnelle, se voyait offrir une participation, par le biais de la société écran, dans un des plus gros projets miniers du monde, le joyau dans la couronne de la Guinée, comme l'a appelé son associé AAB______. Des sommes lui étaient promises en cas d'influence par son époux sur le processus d'attribution étatique des droits miniers. En revanche, aucune récompense n'était due si l'objectif n'était pas atteint.

Monsieur A______ et ses associés ont mis un soin particulier à cacher la provenance des fonds destinés à Madame E______, en recourant à divers comptes bancaires dans divers pays, à diverses personnes physiques ou morales, en procédant à des versements en espèces, à des virements bancaires ou à des remises de chèques, preuve en est si besoin qu'ils savaient que le versement de ces sommes étaient parfaitement illicites.

Monsieur A______ a tenté de détruire les traces de la corruption et fausser les enquêtes en cours.

Enfin, il ressort des enregistrements du FBI que Monsieur A______ était parfaitement conscient de l'illicéité de ses agissements et de la gravité des faits commis.

3.3.8. La procédure a permis d'établir que Monsieur A______ a collaboré, intentionnellement et de manière déterminante, avec d'autres personnes, à la décision de corrompre le Président AAO______ par la promesse et l'octroi d'avantages indus à sa quatrième épouse.

Monsieur A______ a permis d'identifier le moyen d'accéder au pouvoir en Guinée et la mise en place du schéma corruptif. Monsieur A______ et ses associés ont servi d'intermédiaire et d'écran à CGR______ pour influencer le processus d'attribution des titres miniers et dans le versement des sommes dues en exécution de l'accord corruptif.

CGR______ a été d'accord de lui offrir, ainsi qu'à ses partenaires, une participation dans un des plus gros projets miniers du monde en échange de ses agissements.

CGR______ a été d'accord de rémunérer Monsieur A______ et ses associés USD 34.5 millions en échange des services rendus.

3.3.9. Ces faits sont constitutifs de corruption d'agents publics étrangers et Monsieur A______ sera reconnu coupable de ce chef d'infraction.

4. Faux dans les titres

4.1.1. Selon l'art. 251 ch. 1 CP, se rend coupable de faux dans les titres celui qui, dans le dessein de porter atteinte aux intérêts pécuniaires ou aux droits d'autrui, ou de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite, aura créé un titre faux, falsifié un titre, abusé de la signature ou de la marque à la main réelles d'autrui pour fabriquer un titre supposé, ou constaté ou fait constater faussement, dans un titre, un fait ayant une portée juridique, ou aura, pour tromper autrui, fait usage d'un tel titre. Sont des titres tous les écrits destinés et propres à prouver un fait ayant une portée juridique et tous les signes destinés à prouver un tel fait (art. 110 al. 4 CP).

4.1.2. L'art. 251 ch. 1 CP vise non seulement un titre faux ou la falsification d'un titre (faux matériel), mais aussi un titre mensonger (faux intellectuel). Il y a faux matériel lorsque l'auteur réel du document ne correspond pas à l'auteur apparent, alors que le faux intellectuel vise un titre qui émane de son auteur apparent, mais dont le contenu ne correspond pas à la réalité (ATF 142 IV 119 consid. 2.1 p. 121; 138 IV 130 consid. 2.1 p. 134). Un simple mensonge écrit ne constitue pas un faux intellectuel. Le document doit revêtir une crédibilité accrue et son destinataire pouvoir s'y fier raisonnablement. Tel est le cas lorsque certaines assurances objectives garantissent aux tiers la véracité de la déclaration (ATF 144 IV 13 consid. 2.2.2 p. 14 s.; arrêts 6B_383/2019 du 8 novembre 2019 consid. 8.3.1 non publié in ATF 145 IV 470; 6B_467/2019 du 19 juillet 2019 consid. 3.3.1). Il peut s'agir, par exemple, d'un devoir de vérification qui incombe à l'auteur du document ou de l'existence de dispositions légales, comme les art. 958a ss CO (art. 958 ss aCO) relatifs au bilan, qui définissent le contenu du document en question (ATF 141 IV 369 consid. 7.1 p. 376; 132 IV 12 consid. 8.1, p. 15; 126 IV 65 consid. 2a, p. 68; arrêt 6B_382/2011 du 26 septembre 2011 consid. 2.1). En revanche, le simple fait que l'expérience montre que certains écrits jouissent d'une crédibilité particulière ne suffit pas, même si dans la pratique des affaires il est admis que l'on se fie à de tels documents (arrêt 6B_383/2019 du 8 novembre 2019 consid. 8.3.1 non publié in ATF 145 IV 470; ATF 142 IV 119 consid. 2.1 p. 121 et les références citées). Le caractère de titre d'un écrit est relatif. Par certains aspects, il peut avoir ce caractère, par d'autres non. La destination et l'aptitude à prouver un fait précis d'un document peuvent résulter directement de la loi, des usages commerciaux ou du sens et de la nature dudit document (arrêt 6B_383/2019 du 8 novembre 2019 consid. 8.3.1 non publié in ATF 145 IV 470; ATF 142 IV 119 consid. 2.2 p. 122 et les références citées).

4.1.3. Conformément à une jurisprudence bien établie, un contrat de vente conclu en la forme écrite simple, dont le contenu est faux, ne peut en principe pas faire l'objet d'un faux intellectuel dans les titres, faute de valeur probante accrue, dans la mesure où il n'existe pas de garanties spéciales selon lesquelles les déclarations concordantes des parties correspondent à leur volonté réelle (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1406/2019 du 19 mai 2020 destiné à la publication consid. 1.2.2. et réf. citée: ATF 120 IV 25 consid. 3f p. 29; arrêts 6B_502/2009 du 7 septembre 2009 consid. 2.4; 6P.15/2007 du 19 avril 2007; DUPUIS ET AL., Petit commentaire, Code pénal, 2e éd. 2017, n° 40 ad art. 251 CP). Dans un arrêt récent, le Tribunal fédéral a retenu qu'un contrat de vente d'un snack-bar, qui constatait un faux prix de vente, destiné à être produit dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial afin de tromper l'épouse, ne constituait pas un faux intellectuel faute de valeur probante accrue (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1406/2019 du 19 mai 2020 destiné à la publication).

Une facture munie d'une quittance n'est pas dotée en soi, de par la loi, d'une garantie objective suffisante pour faire l'objet d'un faux intellectuel dans les titres (ATF 121 IV 131 consid. 2). Cependant, selon la jurisprudence, l'auteur peut se rendre coupable de faux intellectuel dans les titres lorsqu'une facture au contenu inexact est également destinée à servir au destinataire avant tout comme pièce comptable, si bien que sa comptabilité s'en trouve faussée (ATF 138 IV 130). Cet arrêt met en exergue une complicité entre l'auteur de la fausse facture et son destinataire qui va l'intégrer dans sa comptabilité (consid. 2.4.3 et 3.1).

4.1.4. À teneur de l'art. 6 LBA, l'intermédiaire financier a, dans certaines circonstances particulières, une obligation de clarification qui va au-delà de l'identification de l'ayant droit économique. Ainsi, il doit clarifier l'arrière-plan économique et le but de la transaction lorsque celle-ci paraît inhabituelle, que des indices laissent supposer que les valeurs patrimoniales proviennent d'un crime ou que la transaction ou la relation d'affaires comportent un risque accru.

Le Tribunal fédéral a déjà jugé que les renseignements et les documents que le cocontractant fournit à l'intermédiaire financier lors de la procédure de clarification de l'arrière-plan économique prévue par l'art. 6 LBA n'étaient pas des titres (arrêt 6S.293/2005 du 24 février 2006 consid. 8.3, in SJ 2006 I 309; arrêt 6B_1051/2018 du 19 décembre 2018 consid. 2.3.2.; Commentaire bâlois, CPP, 2019, nos 130 et 144 ad art. 251 CP; LOMBARDINI, Banques et blanchiment d'argent, 3ème édition, 2016, p. 61 no 245).

4.1.5. Les dispositions des art. 251 à 254 sont aussi applicables aux titres étrangers (art. 255 CP).

La question de savoir si un écrit de provenance étrangère représente un titre s'examine au regard du droit suisse, selon la définition donnée par l'art. 110 al. 4 CP (Commentaire bâlois, CP, Marcus BOOG, no 1 ad art. 255 CP; Commentaire romand du CP, Hervé DUTOIT, no 6 ad art. 255 CP; Petit commentaire du Code pénal, no 2 ad art. 255 CP; Alexandre DYENS, Territorialité et ubiquité en droit pénal international suisse, no 1010, page 310).

4.1.6. Dans un arrêt du 1er décembre 1977 (ATF 103 IV 239, JdT 1979 IV 46), le Tribunal fédéral a jugé que la déclaration figurant sur un certificat d'actions selon laquelle les actions au porteur étaient totalement libérées était un titre doté d'une force probante accrue.

En pratique, les certificat d'actions sont émis sous la forme de papiers-valeurs (CR-CO II, 2e édition, 2017, François BOHNET, Art. 965 CO N 20). Une action au porteur est un papier-valeur (JdT 1963 II 47), lesquels sont définis aux art. 965 ss CO. La spécificité du papier-valeur découle de l'impossibilité de faire valoir (d'exercer) le droit ou de le transférer indépendamment du titre (CR-CO II, 2e édition, 2017, François BOHNET, Art. 965 CO N 6) : ceci est prévu par l'art. 966 CO, qui vient confirmer que la présentation du titre est nécessaire à la légitimation du prétendant, si bien que le débiteur ne peut être tenu de payer que si le titre lui est présenté (CR-CO II, 2e édition, François BOHNET, Art. 966 CO N 3). Les titres au porteur et à ordre sont qualifiés de papiers-valeurs de foi publique en raison de leur aptitude à circuler (CR-CO II, 2e édition, 2017, François BOHNET, Art. 965 CO N 12).

Le principe de la confiance (art. 2 CC) est essentiel pour l'interprétation des titres circulant dans le commerce, qui impliquent souvent des contacts rapides et impersonnels entre cocontractants. La personne qui se voit remettre le titre doit pouvoir se fier au sens objectif que la déclaration peut avoir pour elle, eu égard à l'ensemble des circonstances (CR-CO II, 2e édition, 2017, François BOHNET, Art. 965 CO N 17).

4.1.7. Sur le plan subjectif, le faux dans les titres est une infraction intentionnelle. L'intention doit porter sur tous les éléments constitutifs de l'infraction, le dol éventuel étant suffisant (arrêt 6B_522/2011 du 8 décembre 2011 consid. 1.3.). L'art. 251 CP exige de surcroît un dessein spécial, qui peut se présenter sous deux formes alternatives, soit le dessein de porter atteinte aux intérêts pécuniaires ou aux droits d'autrui, soit le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite. Il y a dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite lorsque l'auteur veut dissimuler un délit (ATF 120 IV 364 consid. d; ATF 118 IV 260) ou en faciliter la commission (ATF 101 IV 205 consid. 6).

4.2.1. En l'espèce,

-        le contrat du 15 juin 2009 entre L______ et I______ et son addendum,

-        le contrat de prêt du 1er juin 2010 entre O______ et P______,

-        les cinq contrats entre O______ et Q______, respectivement T______,

-        le contrat de location du yacht et son addendum,

-        le contrat de conseil entre O______ et R______,

-        le contrat entre O______ et S______ SARL,

-        et l'offre de service de U______ en faveur de O______,

constateraient faussement des prestations qui n'auraient en réalité jamais été effectuées.

On se trouve donc dans l'hypothèse de documents qui émanent de leur auteur apparent, mais qui sont mensongers dans leur contenu. Il convient d'examiner si ces contrats sont dotés d'une garantie de véracité particulière et si, partant, ils peuvent constituer des faux intellectuels.

Le but de ces contrats était de justifier auprès de la banque zurichoise de O______ l'arrière-plan économique des transactions effectuées. Ces contrats ont d'ailleurs permis de justifier auprès de la banque zurichoise le transfert des fonds.

On ne voit pas quelles assurances objectives - découlant de la loi ou encore des usages commerciaux - auraient garanti aux tiers, en l'occurrence à la banque zurichoise, la véracité du contenu des contrats en question. Les contrats ont été rédigés en la simple forme écrite sur un papier neutre, lequel ne mentionne que le nom des cocontractants. Les sociétés O______ et L______ sont des sociétés de domicile incorporées aux BVI sans activité commerciale et les contrats en question concernent des prestations très vagues pour O______ (services ou prêt) ou la vente de la société de domicile L______ pour EUR 9 millions, alors que le contrat d'achat d'ACX______ pour l'équivalent de CHF 71.- ou l'acte initial d'achat des terrains par ACX______, n'ont pas été remis à la banque, ni sollicité par celle-ci.

Par ailleurs, O______ et L______, son représentant ou son ayant droit économique, ne revêtent aucune position particulière par rapport à la banque qui conférerait aux contrats produits une valeur particulière.

Le seul fait que les contrats aient pu être rédigés afin d'être utilisés pour justifier l'arrière-plan économique des transactions qu'elles couvraient ne permet pas de conclure que ces contrats constituent des faux intellectuels dans les titres.

En effet, le Tribunal fédéral a déjà jugé que les renseignements et les documents que le cocontractant fournit à l'intermédiaire financier lors de la procédure de clarification de l'arrière-plan économique prévue par l'art. 6 LBA n'étaient pas des titres.

A défaut de valeur probante accrue, les contrats litigieux ne peuvent être considérés comme des faux intellectuels dans les titres, au sens de l'art. 251 CP.

4.2.2. Le même raisonnement doit s'appliquer aux factures visées par l'acte d'accusation. Une facture n'est pas dotée en soi, de par la loi, d'une garantie objective suffisante pour faire l'objet d'un faux intellectuel dans les titres. Le fait de la transmettre à la banque pour justifier l'arrière-plan économique de la transaction économique censé la justifier ne lui confère pas plus de garantie et, a contrario, le banquier ne saurait se contenter d'un tel document pour satisfaire ses obligations de diligence.

Partant, ces factures ne constituent pas des faux intellectuels dans les titres.

4.2.3. S'agissant du certificat d'actions, il ressort de la procédure que Madame B______ a bien acheté une offshore, en l'occurrence L______.

Le 9 juin 2009, elle a demandé à MOSSACK FONSECA d'émettre le certificat d'actions au nom de D______, mais avec effet rétroactif au 21 avril 2009.

Le lendemain 10 juin 2009, D______ a acheté L______, qui détenait via ACX______ des terrains roumains valant des millions, pour l'équivalent de CHF 71.-.

Cinq jours après, D______ a vendu L______ pour EUR 9 millions à I______., qui détient un immeuble à Manhattan. Il a encaissé au passage une commission de EUR 2.5 millions.

La vente des terrains roumains à D______ était fictive et devait permettre à D______ de disposer de fonds mis à sa disposition par Monsieur C______, les déclarations de D______ à la procédure étant effectivement confirmées par les éléments figurant au dossier.

4.2.3.1. Pour transférer la propriété d'un papier-valeur ou le grever de quelque autre droit réel, il faut dans tous les cas le transfert de possession du titre (art. 967 al. 1 CO).

Le transfert de la possession s'analyse comme un acte de disposition; l'acte générateur d'obligation est le contrat de cession CR-CO II, 2e édition, 2017, François BOHNET, Art. 967 CO N 2).

Pour apprécier la forme et les clauses d'un contrat, il y a lieu de rechercher la réelle et commune intention des parties, sans s'arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention (art. 18 al. 1 CO).

On est en présence d'une simulation, si les deux parties sont d'accord que les déclarations réciproques doivent produire un effet juridique qui ne correspond pas à leur volonté, parce qu'elles veulent soit feindre un rapport contractuel, soit cacher avec le contrat simulé un autre contrat réellement voulu (ATF 123 IV 61, consid. 5c/cc; CR-CO I, 2e édition, Bénédict WINIGER, art. 18 CO N 71).

La volonté commune des parties porte sur le fait, d'une part, de créer une apparence et, d'autre part, de ne pas y attacher la conséquence juridique déclarée. Faute d'une volonté contractuelle commune, l'acte simulé n'a pas d'effet juridique (CR-CO I, 2e édition, Bénédict WINIGER, art. 18 CO N 74).

L'inefficacité du contrat a, d'abord, des conséquences sur les rapports internes entre les parties elles-mêmes. Elles ne pourront pas faire valoir le contrat entre elles. Au contraire, elles pourront invoquer son invalidité. Sur le plan externe, l'acte simulé est aussi sans effet envers les tiers, puisqu'il ne remplit pas les conditions d'un contrat. Son inefficacité leur est entièrement opposable et, inversement, les tiers peuvent faire valoir l'inefficacité contre les parties (CR-CO I, 2e édition, Bénédict WINIGER, art. 18 CO N 82).

4.2.3.2. En l'occurrence, dans la mesure où le transfert des actions reposait sur un acte simulé, il est inefficace en droit suisse.

Par conséquent, les actions de L______ n'ont jamais été transférées à D______. Le certificat d'actions est, dès lors, mensonger dans son contenu.

Le certificat d'actions est un titre, étant précisé que la question de savoir si un écrit de provenance étrangère représente un titre s'examine au regard du droit suisse.

4.2.3.3. Madame B______ ne pouvait que le savoir, eu égard :

-        au bref temps écoulé entre l'achat et la vente de L______,

-        au fait qu'elle n'a jamais eu de contact direct avec D______, mais a agi sur instructions d'employés du groupe CG______,

-        à la nature insolite de la transaction. Il est relevé que Madame B______ a une connaissance approfondie de la structure des sociétés détenues directement ou indirectement par Monsieur C______. La vente de terrains roumains, par l'intermédiaire de D______, à I______. Cette vente est totalement insolite dans la structure des sociétés du groupe, ce qui n'a pas pu lui échapper.

4.2.3.4. Quant à Monsieur C______, il est à l'origine du transfert d'argent à D______, soit de USD 12 millions (l'équivalent de EUR 9 millions) de I______. à D______, somme dont Monsieur C______ pourrait alors disposer librement.

Monsieur C______ connaissait donc la cause simulée du transfert d'argent et, dans cette mesure, a accepté l'éventualité que des faux dans les titres soient établis aux fins du montage de l'opération.

4.2.4. Il résulte de ce qui précède que Madame B______ et Monsieur C______ seront reconnus coupables de faux dans les titres s'agissant du certificat d'actions et seront acquittés pour le surplus.

Quant à Monsieur A______, il sera acquitté de faux dans les titres.

5. Peine

5.1. Le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur (art. 47 CP). Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents, la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 141 IV 61 consid. 6 p. 66 s. et les références citées). Le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation et le Tribunal fédéral n'intervient que lorsque l'autorité cantonale a fixé une peine en dehors du cadre légal, si elle s'est fondée sur des critères étrangers à l'art. 47 CP, si des éléments d'appréciation importants n'ont pas été pris en compte ou, enfin, si la peine prononcée est exagérément sévère ou clémente au point de constituer un abus du pouvoir d'appréciation (ATF 144 IV 313 consid. 1.2 p. 319). L'exercice de ce contrôle suppose que le juge exprime, dans sa décision, les éléments essentiels relatifs à l'acte ou à l'auteur qu'il prend en compte, de manière à ce que l'on puisse constater que tous les aspects pertinents ont été pris en considération et comment ils ont été appréciés, que ce soit dans un sens aggravant ou atténuant (art. 50 CP). Il peut passer sous silence les éléments qui, sans abus du pouvoir d'appréciation, lui apparaissent non pertinents ou d'une importance mineure. La motivation doit cependant justifier la peine prononcée, en permettant de suivre le raisonnement adopté même si le juge n'est pas tenu d'exprimer en chiffres ou en pourcentages l'importance qu'il accorde à chacun des éléments qu'il cite (ATF 144 IV 313 consid. 1.2 p. 319). Plus la peine est élevée, plus la motivation doit être complète (ATF 144 IV 313 consid. 1.2 p. 319).

5.2. Les prévenus ont corrompu feu le Président de Guinée AAO______ par la promesse puis le versement d'importantes sommes d'argent à sa quatrième épouse, soit USD 8.5 millions, afin qu'il influence le processus étatique d'attribution des droits miniers. Ils ont obtenu ainsi le retrait des concessions d'exploitation, alors attribuées à AAL______ sur les blocs 1 et 2 de Simandou, et se sont assurés l'octroi de permis d'exploration à CGR______ sur ces blocs avant la mort du Président.

De tels actes faussent le processus de décision au sein de l'administration, desservent l'intérêt public et affaiblissent l'Etat (cf. à cet égard arrêt 6B_908/2009 du 3 novembre 2010 consid. 2.3.2).

Les prévenus ont remis en cause la confiance de la collectivité dans l'impartialité et l'objectivité du processus décisionnel étatique. La méthode utilisée a, en effet, permis de fausser le jeu de la concurrence, avec des conséquences dommageables pour l'économie de la Guinée. Elle sape également les fondements démocratiques en compromettant l'impartialité des autorités et la libre formation de la volonté. Elle menace l'existence même de l'Etat de droit.

Les actes se sont déroulés de 2006, avec la promesse d'octroi d'avantages indus, à 2012 date des derniers versements d'argent.

Les prévenus ont usé de stratagèmes, de montages divers et complexes permettant de cacher et d'effacer leurs agissements criminels.

Ils ont, en effet, recouru à de multiples sociétés de domicile et à des circuits financiers internationaux divers, variés et opaques. Ils ont ouvert divers comptes bancaires dans plusieurs pays, au nom de sociétés de domicile ou de personnes physiques différentes. Ils ont fait verser les sommes d'argent en espèces, par virements bancaires ou par chèques. Ils ont recouru à divers intermédiaires. Il a fallu mettre en place une coopération judiciaire internationale longue et ardue afin d'identifier les circuits financiers utilisés.

Les prévenus se sont également attachés à effacer toute trace de leurs agissements en radiant les sociétés utilisées, en restructurant les sociétés du groupe, en falsifiant les comptes consolidés, en faisant signer des attestations au contenu mensonger à la bénéficiaire des fonds, et en cherchant à détruire des preuves.

Ils ont agi en qualité de coauteurs. Leur rôle respectif dans la commission du crime était bien défini.

5.2.1. Monsieur C______

La faute de Monsieur C______ est importante.

L'intéressé supervisait l'opération de corruption en donnant son accord aux décisions de principe et en fournissant des instructions. Il était le contact privilégié de l'associé de Monsieur A______, AAB______, lequel agissait comme un écran et un intermédiaire entre CGR______ et la bénéficiaire des fonds corruptifs. Monsieur C______ avait le contrôle sur la rémunération de cet écran et intermédiaire et partant sur l'opération corruptrice. Il est intervenu dans un paiement corrupteur, dont il a tenté de cacher le réel motif, en inventant une opération de compensation et a essayé de faire taire la bénéficiaire des fonds, en lui faisant signer une attestation établie par son conseil parisien.

Il a été prêt à recourir à l'utilisation d'un faux dans les titres pour justifier une vente fictive de terrains, laquelle lui a permis de transférer d'importantes sommes d'argent. Il a ainsi porté atteinte à la confiance qui, dans les relations juridiques, est placée dans un titre comme moyen de preuve.

Ses mobiles sont éminemment égoïstes. Il a agi pour retirer d'importantes sommes d'argent de ses crimes.

La collaboration à la procédure du prévenu est mauvaise. Le prévenu a, toujours, nié toute implication dans les actes corruptifs. Il a donné des explications fantaisistes sur le rôle de AAV______ et inventé des justifications sur ses agissements en avançant une opération de compensation inexistante.

Le prévenu n'a manifesté aucune prise de conscience. Il continue à nier toute corruption et tout rôle dans des actes corruptifs. Il s'est posé en victime d'un complot mondial orchestré par ACU______ et s'est présenté comme un bienfaiteur de l'Afrique.

S'agissant de ses antécédents judiciaires, le prévenu a été condamné, le ______ 2020, en dernière instance et par contumace, par un Tribunal roumain à une peine privative de liberté de 5 ans. Cette condamnation est toutefois postérieure aux faits qui nous occupe et il ne peut exister de concours réel rétrospectif en cas de jugement prononcé à l'étranger (cf. ATF 142 V 551 consid. 4.1, ATF 142 IV 329 consid. 1.4.1.).

Aucune circonstance atténuante n'est réalisée.

Aux termes de l'art. 48 let. e CP, le juge atténue la peine si l'intérêt à punir a sensiblement diminué en raison du temps écoulé depuis l'infraction et que l'auteur s'est bien comporté dans l'intervalle. Cette disposition ne fixe pas de délai. Selon la jurisprudence, l'atténuation de la peine en raison du temps écoulé depuis l'infraction procède de la même idée que la prescription. L'effet guérisseur du temps écoulé, qui rend moindre la nécessité de punir, doit aussi pouvoir être pris en considération lorsque la prescription n'est pas encore acquise, si l'infraction est ancienne et si le délinquant s'est bien comporté dans l'intervalle. Cela suppose qu'un temps relativement long se soit écoulé depuis l'infraction.

Cette condition est en tout cas réalisée lorsque les deux tiers du délai de prescription de l'action pénale sont écoulés (ATF 140 IV 145 consid. 3.1 p. 148).

En l'occurrence, la prescription court dès la date du dernier agissement coupable, qui correspond à la date du dernier versement le 14 mai 2012. La prescription de 15 ans (cf. art. 97 al. let. b aCP, art. 2 al. 2 et art. 389 CP cum art. 322septies CP) sera acquise en mai 2027, de sorte que les deux tiers du délai de prescription de l'action pénale ne sont pas encore écoulés.

Dans cette mesure, la circonstance atténuante du temps écoulé n'est pas applicable.

Il y a lieu de tenir compte, en tant que facteur de fixation de la peine, d'une publication préjugeant de la culpabilité d'une personne soupçonnée dans les comptes-rendus de la presse, selon la gravité de l'atteinte aux droits (ATF 128 IV 97 consid. 3b/aa p. 104). Le Tribunal fédéral l'a admis dans un cas où une conférence de presse avait été donnée par le Procureur de la Confédération, conduisant à un grave préjugé de la culpabilité de l'accusé, entraînant un quasi-effet de sanction pénale. Le Tribunal fédéral avait dans cet arrêt estimé que cet important préjugé avait lourdement influencé les organes de poursuite pénale alors qu'il s'était avéré plus tard que les soupçons publiés étaient largement infondés (arrêt 9X.1/1998 du 29 octobre 1999 consid. 25b cité dans l'arrêt 6B_206/2015 du 8 octobre 2015 consid. 2.3.1.).

Il appartient au prévenu de démontrer en quoi la médiatisation dénoncée a conduit à ce qu'il soit préjugé et lui a causé un préjudice important (cf. ATF 128 IV 97 consid. 3b/bb p. 106 et les références citées; arrêt 6B_339/2011 du 5 septembre 2011 consid. 9.2.1.).

Le Tribunal relève que, certes la procédure a été médiatisée. Toutefois, il n'y a pas lieu de tenir compte de cet élément dans le cadre de la fixation de la peine. Les éventuelles conséquences médiatiques sur les prévenus résultent davantage de leurs agissements ou sont étrangères à la présente procédure pénale. Au demeurant, les prévenus n'avancent pas, a fortiori ne démontrent pas, que cette médiatisation leur aurait concrètement porté préjudice.

Il y a concours d'infractions, au sens de l'art. 49 al. 1 CP, motif d'aggravation de la peine.

L'infraction de corruption d'agents publics étrangers, tout comme celle de faux dans les titres, est passible d'une peine privative de liberté de 5 ans au plus ou d'une peine pécuniaire. En raison du concours, le plafond est, ainsi, porté à 7 ans et 6 mois.

C'est au prévenu Monsieur C______ que profite en premier le crime. Il est le dirigent effectif de CGR______ et les activités corruptrices n'auraient pas eu lieu sans son accord. Une fois les droits miniers obtenus, il les a revendus et a dégagé un gain faramineux.

Les éléments qui précèdent conduisent au prononcé d'une peine privative de liberté de 5 ans.

5.2.2. Monsieur A______

La faute de Monsieur A______ est importante.

L'intéressé était l'homme du terrain chargé de trouver le moyen d'accéder à AAO______ afin d'influencer le processus étatique d'attribution des titres miniers. Il a ensuite été le contact privilégié de la bénéficiaire des fonds, Madame E______, tout au long des années. Il a permis la signature du pacte corruptif et le paiement de sommes d'argent. Il a encore cherché à détruire les preuves de la corruption en allant à la rencontre de Madame E______.

Ses mobiles sont éminemment égoïstes. Il a agi pour retirer d'importantes sommes d'argent de son crime.

La collaboration à la procédure du prévenu est mauvaise. Durant toute la durée de celle-ci, le prévenu s'est enfermé dans le silence, en refusant de donner toute explication sur les actes qui lui sont reprochés. Ses explications écrites par le biais de son conseil ne pallient pas son absence de collaboration. Son attitude a rendu plus difficile l'instruction et l'a ralentie. Pour le surplus, ses explications lors de l'audience de jugement ont été dans une large mesure fantaisistes. Le fait de suivre, le cas échéant, les conseils d'un avocat étranger de ne pas s'exprimer en raison des conséquences éventuelles de ses déclarations sur des procédures étrangères ne justifie pas son comportement. En effet, on ne voit pas en quoi collaborer à une enquête pénale pourrait s'avérer dommageable pour le prévenu, étant rappelé que celui-ci conteste tout comportement illicite. En tout état, le prévenu pouvait se distancer des conseils de son avocat, ce qu'il a d'ailleurs fait lors de l'audience de jugement.

Le prévenu n'a manifesté aucune prise de conscience. Le prévenu a refusé toute explication sur quelque sujet que ce soit durant l'instruction et ses déclarations lors de l'audience de jugement dénotent une absence de prise de conscience. Il est rappelé à cet égard que le droit de ne pas s'auto-incriminer n'exclut pas la possibilité de considérer comme un facteur aggravant de la peine le comportement du prévenu qui rend plus difficile l'enquête pénale par des dénégations opiniâtres, dont on peut déduire une absence de remords et de prise de conscience de sa faute (ATF 129 IV 6 consid. 6.1 p. 20; 118 IV 21 consid. 2b p. 25; 117 IV 112 consid. 1 p. 114 et plus récemment arrêts 6B_866/2010 du 19 juillet 2011 consid. 1.4 et 6B_660/2013 du 19 novembre 2013 consid. 2.2).

S'agissant de ses antécédents judiciaires, le prévenu a été condamné, le 29 juillet 2014, aux Etats-Unis à 2 ans de prison et à une amende de USD 75'000.- pour obstruction au déroulement d'une enquête pénale. Cette condamnation est, toutefois, postérieure aux faits qui nous occupe et il ne peut exister de concours réel rétrospectif en cas de jugement prononcé à l'étranger.

Aucune circonstance atténuante est réalisée. Il est renvoyé, à cet égard, aux développements faits au considérant 5.2.1.

L'infraction de corruption d'agents publics étrangers est passible d'une peine privative de liberté de 5 ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

Le prévenu a retiré, avec ses deux autres associés, USD 34.5 millions de son activité d'écran et d'intermédiaire dans la commission du crime. Il se trouvait sur le terrain et en contacts réguliers avec la bénéficiaire des fonds corrupteurs.

Sa faute est néanmoins moindre par rapport à celle de Monsieur C______, ce qui justifie une peine légèrement inférieure à celle prononcée à l'encontre du précité.

Les éléments qui précèdent conduisent au prononcé d'une peine privative de liberté de 3 ans et 6 mois.

5.2.3. Madame B______

La faute de Madame B______ est importante.

L'intéressée était à la tête de la tour de contrôle depuis Genève de l'opération corruptrice. Elle a mis en place le schéma corrupteur sous l'angle corporatif et administratif puis l'a effacé. Elle a vendu une société de domicile non utilisée au préalable qui servira de société écran à CGR______ pour soudoyer le Président par l'intermédiaire de sa femme. Elle a gardé la mainmise sur les actions de cette société écran. Elle s'est chargée de la bonne exécution des contrats mis en place. Elle a signé tous les documents dans le cadre de la restructuration permettant de cacher le rôle joué par la société écran mise en place et a caché la réalité des transferts de fonds effectués à cette société écran en signant des comptes falsifiés.

Elle a participé à la création d'un faux dans les titres pour justifier une vente fictive de terrains. Elle a ainsi porté atteinte à la confiance, qui dans les relations juridiques, est placée dans un titre comme moyen de preuve.

Ses mobiles sont égoïstes. La prévenue a néanmoins agi dans le cadre de son travail pour CGR______ pour lequel elle était rémunérée, et donc en premier lieu pour favoriser les intérêts de CGR______ et ainsi enrichir Monsieur C______, auquel elle vouait une loyauté sans faille. Elle a néanmoins également retiré des profits de la réussite de l'opération par le biais d'un bonus.

La collaboration à la procédure de la prévenue est mauvaise. L'intéressée a, certes, donné des explications dans le cadre de la procédure. Elle a, toutefois, occulté les éléments compromettants, notamment les liens de AD______ BVI avec la fondation V______.

La prévenue n'a manifesté aucune prise de conscience. Elle continue à contester tout rôle dans les actes corruptifs, malgré son omniprésence à tous les niveaux dans la mise en place et dans l'effacement du schéma corrupteur. Elle a toujours nié toute implication dans les actes corruptifs et se cache derrière un rôle de pure exécutante, qui ne comprenait pas ce qu'elle faisait, alors que la réalité est tout autre. Elle a également contesté avoir établi un faux dans les titres, lequel était destiné à être utilisé dans le cadre d'une opération de vente simulée, à laquelle elle a activement prêté son concours.

Elle n'a pas d'antécédents judiciaires, ce qui a, en l'occurrence, un effet neutre sur la fixation de la peine et n'a pas à être prise en considération dans un sens atténuant (ATF 141 IV 61 consid. 6.3.2 p. 70; 136 IV 1 consid. 2.6 p. 2 ss).

Aucune circonstance atténuante est réalisée. Il est renvoyé, à cet égard, aux développements faits au considérant 5.2.1.

Il a concours d'infractions, au sens de l'art. 49 al. 1 CP, motif d'aggravation de la peine.

L'infraction de corruption d'agents publics étrangers, tout comme celle de faux dans les titres, est passible d'une peine privative de liberté de 5 ans au plus ou d'une peine pécuniaire. En raison du concours, le plafond est, ainsi, porté à 7 ans et 6 mois.

L'activité de la prévenue était plus éloignée du terrain que celle de ses co-prévenus, mais non moins nécessaire à la commission du crime. La prévenue a agi en qualité de fidèle employée. Elle a perçu un bonus de USD 150'000.- après la vente à ABY______ en remerciements pour l'activité déployée. Sa faute est néanmoins moindre par rapport à celles de ses co-prévenus, ce qui justifie une peine inférieure à celle prononcée à l'encontre des précités.

Les éléments qui précèdent conduisent au prononcé d'une peine privative de liberté de 2 ans.

Selon l'art. 42 al. 1 CP, le juge suspend en général l'exécution d'une peine pécuniaire ou d'une peine privative de liberté de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne parait pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits.

La peine de 2 ans prononcée sera assortie du sursis complet, avec un délai d'épreuve de trois ans, suffisant pour pallier le risque de récidive.

6. Créance compensatrice

6.1.1. Lorsque l'avantage illicite doit être confisqué, mais que les valeurs patrimoniales en résultant ne sont plus disponibles - parce qu'elles ont été consommées, dissimulées ou aliénées -, le juge ordonne le remplacement par une créance compensatrice de l'Etat d'un montant équivalent (art. 71 al. 1 CP).

Le but de cette mesure est d'éviter que celui qui a disposé des objets ou valeurs à confisquer soit privilégié par rapport à celui qui les a conservés; elle ne joue qu'un rôle de substitution de la confiscation en nature et ne doit donc, par rapport à celle-ci, engendrer ni avantage ni inconvénient. En raison de son caractère subsidiaire, la créance compensatrice ne peut être ordonnée que si, dans l'hypothèse où les valeurs patrimoniales auraient été disponibles, la confiscation eût été prononcée: elle est alors soumise aux mêmes conditions que cette mesure. Néanmoins, un lien de connexité entre les valeurs saisies et l'infraction commise n'est pas requis (ATF 140 IV 57 consid. 4.1.2. et références citées).

La créance compensatrice peut être recouvrée sur n'importe quel actif de son débiteur, même s'il est d'origine licite et cet actif peut être saisi temporairement (LOMBARDINI, Banques et blanchiment d'argent, 3ème éd., p. 139, N 535).

6.1.2. Les biens obtenus d'une transaction juridique, conclue au moyen de la corruption, peuvent également être soumis à la confiscation, sans nécessairement être une conséquence directe et immédiate de la corruption. Les avoirs obtenus par une transaction légale basée sur la corruption doivent avoir un lien de causalité naturel et adéquat avec l'infraction. La légalité objective de la transaction légale obtenue par le biais de la corruption n'est pas pertinente dans cette décision. La confiscation couvre également les produits du crime, dont l'acquisition va au-delà de la formulation effective de l'infraction. Rien ne s'oppose en principe à la confiscation des biens acquis de manière purement indirecte (arrêt du Tribunal fédéral du 19 août 2015 consid. 2.2. et réf. cit.: ATF 137 IV 79 consid. 3.2.; Marc PIETH, Korruptionsgeldwäsche, in: Wirtschaft und Strafrecht, Festschrift für Niklaus Schmid [...], 2001, S. 449; Bernard BERTOSSA, Confiscation et corruption [...], SJ 131/2009, S. 378).

Si le succès consiste à influencer une décision discrétionnaire, la seule option est une estimation basée sur l'ensemble des circonstances, en vertu de l'art. 70 al. 5 CP (arrêt du Tribunal fédéral du 19 août 2015 consid. 2.2. et réf. cit.: Florian BAUMANN, in: BK, Strafrecht, vol. I, 3e éd. 2013, n. 42 et n. 73 sur l'art. 70/71 CPS).

6.2.1. En l'occurrence, CGR______ n'avait pas les capacités d'exploiter seul les concessions obtenues et devait s'adjoindre les services d'un grand groupe minier en mesure de le faire.

CGR______ a acquis les concessions minières en déboursant USD 160 millions et a revendu un peu plus de la moitié (51 % de l'actionnariat) pour USD 2.5 milliards. Le bénéfice direct de la transaction rendue possible grâce à la corruption est dès lors de plusieurs milliards de dollars américains. Sur cette somme, USD 500 millions ont été payés immédiatement par ABY______ à CGR______, qui en a reversé USD 349'500'717.- à sa holding W______, détenue par la fondation V______.

Sur cette somme, des distributions de USD 94 millions en 2010, USD 41 millions en 2011 et USD 15 millions en 2012, ont été directement effectuées par la fondation V______ à la société AB______ REAL ESTATE, dont Monsieur C______ est seul actionnaire. Il est précisé que ces distributions sont distinctes de celles effectuées, à hauteur de quelques millions par année au total, pour les dépenses courantes de Monsieur C______. Par conséquent, Monsieur C______ s'est enrichi directement grâce à une transaction légale obtenue grâce à la corruption à hauteur de, à tout le moins, USD 150 millions.

Monsieur C______ estime sa fortune entre USD 50 et 80 millions. C'est sans compter les biens détenus par les fondations V______ et AR______, dont il peut disposer sur simple requête auprès du conseil de fondation pour ses besoins personnels, professionnels ou philanthropiques. Selon plusieurs spécialistes dans l'économie, en 2013, Monsieur C______ était l'homme le plus riche d'Israël avec une fortune estimée à USD 9 milliards. A l'heure actuelle, sa fortune est estimée à des centaines de millions de dollars, voire à un milliard (USD 800 millions au 03.07.2020, https://www.challenges.fr/classements/fortune/Monsieur C______-Monsieur C_______2746; USD 1 milliard au 03.04.2019, https://www.forbes.com/profile/Monsieur C______-Monsieur C______/).

Compte tenu de ce qui précède, une créance compensatrice de CHF 50 millions sera prononcée à son encontre.

6.2.2. Monsieur A______

6.2.2.1. Sa rémunération pour son activité corruptrice a été de USD 34.5 millions, à répartir à parts égales entre ses associés. Il s'est dès lors personnellement enrichi par la commission de l'infraction à hauteur de USD 11.5 millions.

Dans la mesure où cette somme n'est plus directement disponible, une créance compensatrice sera prononcée, en adéquation avec la situation patrimoniale du prévenu.

6.2.2.2. Revenus

Le prévenu perçoit, à l'heure actuelle, des revenus de EUR 143'000.- par an (EUR 250'000.-/2 + EUR 1'500 x 12).

6.2.2.3. Maisons en France

Il a cédé la nue-propriété de la maison dans laquelle il habite (achetée EUR 665'000.-, PP 4'405'744, 4'405'740), de même que celle de la maison héritée de son père (évaluée à EUR 750'000.-), dont il tire des revenus, à ses enfants en 2018, soit alors que la présente procédure pénale était en cours et sur le point d'être renvoyée en jugement.

6.2.2.4. ADI______

Le prévenu a acquis, en 2011, avec ses deux associés AAB______ et AAE______, deux sociétés ADJ______ et ADK______ (cf. CRI USA, 4'700'476 et 4'700'417; PP 348'891). Ces sociétés, gérées par ADL______, sont chacune propriétaires d'un immeuble situé l'un à côté de l'autre. Ces sociétés exploitent ensemble le ADI______ (cf. https://www.ADI______hotel.com).

Cet hôtel a été mis en vente, en 2017, pour la somme de USD 14'900'000.- (https://www._________), mais n'a finalement pas été vendu. L'hôtel est actif encore à ce jour (cf. i.e. www.booking.com et prêt COVID obtenu en mai 2020).

6.2.2.5. Propriétés immobilières en Floride

Le prévenu détient la société ADM______ (cf. CRI USA, PP 4'700'474-5), créée le 25 octobre 2011, sise en Floride et gérée par AAB______. Cette société a acquis et détient les biens immobiliers suivants:

-        Une maison de vacances située ______, Aventura (Floride), d'une valeur de USD 252'410.- ;

-        Un condominium (______, Miami), d'une valeur de USD 54'840.-.

-        Un condominium (______, Hollywood), d'une valeur de USD 86'110.-.

-        Un condominium (______, Hollywood), d'une valeur de USD 135'210.-.

-        Un condominium (______, Hollywood), d'une valeur de USD 130'380.-.

Ces valeurs sont toutefois des valeurs minimales et conservatrices, telles qu'évaluées par les autorités fiscales. Leur valeur de marché est plus élevée (cf. courrier de Me Michelle P. SMITH, avocate de Monsieur A______, PP 4'700'417).

Le prévenu a déclaré avoir vendu ces biens pour subvenir à ses besoins et payer ses frais de procédure aux Etats-Unis (cf. PV audience de jugement).

Si cette déclaration apparaît vraisemblable sur le principe, le prévenu n'apporte aucun document démontrant que tous les biens ont été vendus et que l'intégralité du produit de la vente ne serait plus disponible.

6.2.2.6. Bateaux de pêche au gros

Le prévenu est également propriétaire d'à tout le moins un bateau amarré à Juan les Pins, au Sud de la France, acheté en 2011 et dénommé WABI (note: "what a beautiful idee"), qui bat pavillon belge, propriété d'une société SAS WABI, filiale de SARL AAC______ France, dont Monsieur A______ est associé et ayant-droit économique (PP 4'406'121, 4'405'616ss, 4'405'677).

Il apparaît, également, être propriétaire avec ses associés d'un autre bateau aux Etats-Unis dénommé WASN'T US (cf. CRI USA).

6.2.2.6. Il ressort de la procédure que le prévenu a cédé la propriété de ses biens à ses enfants ou à des tiers pour se soustraire au prononcé d'une confiscation ou d'une créance compensatrice par les autorités pénales.

Compte tenu de ce qui précède et afin donc de tenir compte de manière adéquate de sa situation personnelle et patrimoniale, une créance compensatrice de CHF 5 millions sera prononcée à son encontre.

Les actions des sociétés, qui détiennent le ADI______, seront séquestrées en garantie de l'exécution de la créance compensatrice.

6.2.3. Madame B______

La prévenue a reçu un bonus de USD 150'000.- à la suite de la transaction avec ABY______, soit la transaction juridique conclue au moyen des actes de corruption, auxquels elle a participé. Ce montant correspond à son enrichissement.

La prévenue dispose de modestes revenus. Sa fortune mobilière s'élève entre EUR 70'000.- et 80'000.-. Elle habite en Italie et est restée propriétaire d'une maison, dont elle tire des revenus locatifs, d'une valeur de EUR 1'100'000.-, grevée d'une hypothèque de EUR 400'000.-.

Compte tenu de ces éléments et afin de tenir compte de l'impact de la créance compensatrice sur son avenir et sa situation personnelle, une créance compensatrice de CHF 50'000.- sera prononcée à son encontre.

7. Frais et indemnités

7.1.1. Selon l'art. 426 al. 1 CPP, le prévenu supporte les frais de procédure s'il est condamné. La répartition des frais de procédure repose sur le principe, selon lequel celui qui a causé les frais doit les supporter. Ainsi, le prévenu doit supporter les frais en cas de condamnation (art. 426 al. 1 CPP), car il a occasionné, par son comportement, l'ouverture et la mise en oeuvre de l'enquête pénale (ATF 138 IV 248 consid. 4.4.1. p. 254; arrêt 6B_136/2016 du 23 janvier 2017 consid. 4.1.1.).

Si sa condamnation n'est que partielle, les frais ne doivent être mis à sa charge que de manière proportionnelle, en considération des frais liés à l'instruction des infractions pour lesquelles un verdict de culpabilité a été prononcé. Il s'agit de réduire les frais, sous peine de porter atteinte à la présomption d'innocence, si le point sur lequel le prévenu a été acquitté a donné lieu à des frais supplémentaires et si le prévenu n'a pas, de manière illicite et fautive, provoqué l'ouverture de la procédure ou rendu plus difficile la conduite de celle-ci (cf. art. 426 al. 2 CPP). Il convient de répartir les frais en fonction des différents états de fait retenus, non selon les infractions visées. Comme il est difficile de déterminer avec exactitude les frais qui relèvent de chaque fait imputable ou non au condamné, une certaine marge d'appréciation doit être laissée au juge du fond (arrêt 6B_688/2014 du 22 décembre 2017 consid. 29.2. et références citées).

Selon l'art. 10 al. 1 let. e du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale (RTFMP; E 4.10.03), le Tribunal correctionnel peut prélever, outre les émoluments généraux, un émolument compris entre CHF 400.- et CHF 10'000.-.

A teneur de l'art. 15 RTFMP, en cas de circonstances exceptionnelles liées notamment au volume et à la durée de la procédure, à l'ampleur des débats ou à la situation financière des parties ou des autres participants à la procédure, l'autorité pénale ou, si elle est compétente, la direction de la procédure, peut déroger au plafond des émoluments prévus aux articles 4 à 13, et augmenter ceux-ci dans une juste mesure.

7.1.2. L'autorité pénale peut ordonner que les personnes astreintes au paiement des frais répondent solidairement de ceux qu'elles ont occasionnés ensemble (art. 418 al. 2 CPP).

Cette disposition vise essentiellement les cas de participation dans lesquels des motifs d'équité commandent que les intéressés soient tenus solidairement responsables, en application analogique de CO 50 (CR-CPP, 2e édition, Jean CREVOISIER / Laurent CREVOISIER, art. 418 CPP N 2).

7.1.3. L'autorité pénale peut réduire ou refuser l'indemnité ou la réparation du tort moral si le prévenu a provoqué illicitement et fautivement l'ouverture de la procédure ou a rendu plus difficile la conduite de celle-ci (art. 430 al. 1 let. a CPP):

7.2. En l'espèce, les prévenus sont partiellement acquittés de faux dans les titres s'agissant de Madame B______ et de Monsieur C______, respectivement acquitté de cette infraction s'agissant de Monsieur A______. Les prévenus Madame B______ et de Monsieur C______ sont également acquittés de corruption en lien avec le paiement du sucre à Madame E______. Toutefois, ces acquittements ne justifient pas une diminution des frais de la procédure qui seront mis à leur charge pour les raisons qui suivent.

En effet, les investigations effectuées sur le paiement du sucre à Madame E______ ne concernent qu'une petite partie de la procédure et étaient nécessaires pour comprendre et établir les faits de corruption retenus à l'encontre des prévenus. Ce paiement a été retenu à l'encontre de Monsieur A______.

S'agissant des actes d'enquête effectués en lien avec les faux dans les titres dont les prévenus ont été acquittés, ils étaient également nécessaires pour établir les faits en lien avec la corruption retenue à l'encontre des prévenus, en particulier en lien avec le versement de USD 1.5 million à Madame E______, par le biais de D______, O______ et N______.

En tout état, par son comportement Monsieur C______ a provoqué l'ouverture de la procédure pénale dirigée contre lui. En effet, il ressort de la procédure que l'opération d'achat et de vente des terrains roumains par D______, par le biais de L______, était simulée.

Par conséquent, les prévenus seront condamnés solidairement à payer l'intégralité des frais de la procédure.

7.3. L'intégralité des frais étant mis à la charge des prévenus, ceux-ci seront intégralement déboutés de leurs prétentions en indemnisation.

7.4. Le patrimoine d'un prévenu peut être séquestré dans la mesure qui paraît nécessaire pour couvrir les frais de procédure et les indemnités à verser (art. 268 al. 1 let. a CPP).

Les autorités pénales peuvent compenser les créances portant sur des frais de procédure avec les indemnités accordées à la partie débitrice dans la même procédure pénale et avec des valeurs séquestrées (art. 442 al. 4 CPP).

Les avoirs séquestrés de Monsieur C______ d'un peu plus de CHF 100'000.- déposés sur le compte de la Banque 1______ seront affectés au paiement des frais de la procédure.


 

H. SCHEMAS

 

SCHEMA I

 

 


SCHEMA II

 

 


SCHEMA III


SCHEMA IV

 

 

 


 

PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL

statuant contradictoirement :

Acquitte Monsieur C______ de corruption d'agents publics étrangers s'agissant des faits mentionnés sous ch. B.a.I.1.1 de l'acte d'accusation (paiement de USD 94'038.-) (art. 322septies CP) et de faux dans les titres s'agissant des faits mentionnés sous ch. B.a.II. à l'exception du certificat d'actions mentionné sous chiffre B.a.II.2 (art. 251 CP).

Déclare Monsieur C______ coupable de corruption d'agents publics étrangers
(art. 322septies CP) et de faux dans les titres s'agissant du certificat d'actions mentionné sous chiffre a.II.2 (art. 251 cum art. 255 CP).

Condamne Monsieur C______ à une peine privative de liberté de 5 ans (art. 40 CP).

Prononce à l'encontre de Monsieur C______ en faveur de l'Etat de Genève une créance compensatrice de CHF 50'000'000.-, celle-ci s'éteignant automatiquement dans la mesure du paiement par Monsieur C______ (art. 71 al. 1 CP).

 

Acquitte Monsieur A______ de faux dans les titres (art. 251 CP).

Déclare Monsieur A______ coupable de corruption d'agents publics étrangers (art. 322septies CP).

Condamne Monsieur A______ à une peine privative de liberté de 3 ans et 6 mois
(art. 40 CP).

Prononce à l'encontre de Monsieur A______ en faveur de l'Etat de Genève une créance compensatrice de CHF 5'000'000.-, celle-ci s'éteignant automatiquement dans la mesure du paiement par Monsieur A______ (art. 71 al. 1 CP).

Ordonne le séquestre des actions des sociétés ADJ______ et ADK______ en vue de l'exécution de la créance compensatrice (art. 71 al. 3 CP).

Rejette les conclusions en indemnisation de Monsieur A______ (art. 429 CPP).

 


 

Acquitte Madame B______ de corruption d'agents publics étrangers s'agissant des faits mentionnés sous ch. B.b.I.1.1 de l'acte d'accusation (paiement de USD 94'038.-) (art. 322septies CP) et de faux dans les titres s'agissant des faits mentionnés sous ch. B.b.II. à l'exception du certificat d'actions mentionné sous ch. B.b.II.2 (art. 251 CP).

Déclare Madame B______ coupable de corruption d'agents publics étrangers (art. 322septies CP) et de faux dans les titres s'agissant du certificat d'actions mentionné sous chiffre B.b.II.2 (art. 251 cum art. 255 CP).

Condamne Madame B______ à une peine privative de liberté de 2 ans
(art. 40 CP).

Met Madame B______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit Madame B______ que si elle devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Prononce à l'encontre de Madame B______ en faveur de l'Etat de Genève une créance compensatrice de CHF 50'000.-, celle-ci s'éteignant automatiquement dans la mesure du paiement par Madame B______ (art. 71 al. 1 CP).

Rejette les conclusions en indemnisation de Madame B______ (art. 429 CPP).

 

Condamne Monsieur C______, Monsieur A______ et Madame B______, solidairement, aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 204'189.15, y compris un émolument de jugement de CHF 30'000.- (art. 418 al. 2 et 426 al. 1 et 2 CPP).

Ordonne le maintien du séquestre des avoirs déposés sur le compte no 1______ au nom de Monsieur C______ auprès de Banque 1______ et compense à due concurrence la créance de l'Etat portant sur les frais de la procédure avec ces valeurs patrimoniales (art. 268 al. 1 let. a et 442 al. 4 CPP).

Ordonne la communication de la partie du dispositif du présent jugement qui la concerne à Banque 1______.

Ordonne la communication du présent jugement aux autorités suivantes : Casier judiciaire suisse, Office fédéral de la police, Office cantonal de la population et des migrations, Service des contraventions (art. 81 al. 4 let. f CPP).

Le Greffier

Alain BANDOLLIER

La Présidente

Alexandra BANNA

Voies de recours

Les parties peuvent annoncer un appel contre le présent jugement, oralement pour mention au procès-verbal, ou par écrit au Tribunal pénal, rue des Chaudronniers 9, case postale 3715, CH-1211 Genève 3, dans le délai de 10 jours à compter de la communication du dispositif écrit du jugement (art. 398, 399 al. 1 et 384 let. a CPP).

Selon l'art. 399 al. 3 et 4 CPP, la partie qui annonce un appel adresse une déclaration écrite respectant les conditions légales à la Chambre pénale d'appel et de révision, Place du Bourg-de-Four 1, case postale 3108, CH-1211 Genève 3, dans les 20 jours à compter de la notification du jugement motivé.

Si le défenseur d'office ou le conseil juridique gratuit conteste également son indemnisation, il peut interjeter recours, écrit et motivé, dans le délai de 10 jours dès la notification du jugement motivé, à la Chambre pénale d'appel et de révision contre la décision fixant son indemnité (art. 396 al. 1 CPP).

L'appel ou le recours doit être remis au plus tard le dernier jour du délai à la juridiction compétente, à la Poste suisse, à une représentation consulaire ou diplomatique suisse ou, s'agissant de personnes détenues, à la direction de l'établissement carcéral (art. 91 al. 2 CPP).

Etat de frais

Frais du Ministère public

CHF

173'191.15

Convocations devant le Tribunal

CHF

735.00

Frais postaux (convocation)

CHF

213.00

Emolument de jugement

CHF

30'000.00

Etat de frais

CHF

50.00

Total

CHF

204'189.15

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Frais d'interprète du prévenu

CHF

2'020.00 à la charge de l'Etat