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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/854/2021

JTAPI/167/2022 du 23.02.2022 ( LCI ) , ADMIS

Descripteurs : PERMIS DE CONSTRUIRE;SERVITUDE;SERVITUDE DE NON-BÂTIR;DROIT DE VOISINAGE;VOISIN;AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET DROIT PUBLIC DES CONSTRUCTIONS
Normes : RCI.46C; RCI.10A.al4; Cst.29.al2; LCI.46.al1; RCI.12; LPA.67.al2
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/854/2021 LCI

JTAPI/167/2022

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 23 février 2022

 

dans la cause

 

Madame A______ et Monsieur B______, représentés par Me Cédric LENOIR, avocat, avec élection de domicile

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE

Madame C______ et Monsieur D______, représentés par Me Lydia ALBERINI-ORCEL, avocate, avec élection de domicile

 


EN FAIT

1.             Monsieur D______ est propriétaire de la parcelle no 1______de la commune de E______, sise à l’adresse 16A, avenue F______, en 5ème zone.

2.             Madame A______ et Monsieur B______ sont copropriétaires de la parcelle n2______, sise à l’adresse 16, avenue F______. Cette parcelle est contigüe à la parcelle n1______.

3.             Les 8 et 22 novembre 2010, une servitude de distance et vue droite a été constituée en faveur de la parcelle no 2______ et de l’État de Genève sur la parcelle no 3______, cette dernière ayant depuis été divisée en deux nouvelles parcelles, cadastrées sous nos 4______ et 1______.

Cette servitude prévoyait l’interdiction de toutes constructions dans les limites de la zone grevée, étant entendu qu’en cas de constructions à élever dans l’avenir sur la parcelle grevée, les limites de la zone grevée seraient considérées comme limites de parcelles pour le calcul des distances et vues droites exigées par la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05).

4.             Le 14 juin 2019, le département du territoire (ci-après : DT ou le département) a délivré à M.D______ une autorisation de construire en procédure accélérée (ci-après : APA), enregistrée sous APA 5______/1, pour la construction d’une villa, d’un abri de jardin et de divers aménagements extérieurs, sur la parcelle no 1______.

Il ressort du plan d’aménagement paysager (ci-après : PAP), versé au dossier d’autorisation, que les requérants avaient prévu la plantation d’une haie en limite de propriété avec la parcelle no 2______, ainsi que le maintien des arbres nos 5 à 8 sur leur parcelle.

Cette autorisation a été publiée dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du même jour.

Non contestée, elle est entrée en force à l’issue du délai de recours.

5.             À la suite d’une inspection du chantier le 18 août 2020, l’office cantonal de l’eau (ci-après : OCEau) a constaté que l’altitude du branchement sur le collecteur privé sous l’avenue F______ ne permettait pas un écoulement gravitaire des eaux usées depuis le bâtiment faisant l’objet de l’APA 5______/1, jusqu’au collecteur privé. La seule option technique réalisable était d’installer une fosse de captage et de relever les eaux usées de la maison par un système de pompage.

6.             Le 16 décembre 2020, l’architecte de Mme C______ et M. D______ a déposé une demande d’APA complémentaire auprès du département, enregistrée sous APA 5______/3, portant sur l’installation d’un portail, des aménagements extérieurs sur la parcelle no 1______, un nouveau tracé pour les canalisations, ainsi que l’installation d’une fosse avec pompe de relevage et un enrochement de soutènement.

7.             Les instances de préavis suivantes se sont prononcées :

-          le 22 décembre 2020, le service des monuments et des sites (ci-après : SMS) a délivré un préavis favorable avec conditions. Il convenait de prendre contact avec le service d’archéologie avant l’ouverture du chantier, puisque le périmètre concerné se trouvait en site archéologique présumé ;

-          le 11 janvier 2021, l’office cantonal de l'agriculture et de la nature (ci-après : OCAN) a émis un préavis favorable sous conditions. Il était nécessaire de prendre toutes les précautions utiles lors des travaux pour valablement protéger et conserver les arbres à proximité du chantier. En outre, aucun dépôt de matériaux et aucune circulation ne seraient tolérés à leur pied ;

-          toujours le 11 janvier 2021, la direction des autorisations de construire, devenue l’office des autorisations de construire (ci-après : OAC) s’est prononcée favorablement sans observations ;

-          le 29 janvier 2021, l’OCEau a émis un préavis favorable, intitulé « avis consultatif ».

8.             Par décision du 4 février 2021, publiée dans la FAO le même jour, le département a délivré l’autorisation de construire complémentaire sollicitée.

Cette autorisation précisait que les droits des tiers étaient réservés (ch. 1) et que les réserves de la présente autorisation primaient les plans visés ne varietur (ch. 4). Enfin, les conditions figurant dans les préavis de l’OCAN et du SMS faisaient partie intégrante de la présente autorisation (ch. 6)

9.             Par acte du 5 mars 2021, Mme A______ et M. B______ ont interjeté recours, sous la plume de leur avocat, contre l’autorisation de construire complémentaire précitée auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant principalement à son annulation, sous suite de frais et dépens.

Voisins directs, leur parcelle étant contigüe à celle des intimés, ils avaient qualité pour recourir. Le projet avait des implications concrètes sur la constructibilité de leur terrain.

Au fond, le projet ne respectait pas l’art. 46C du règlement d’application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 (RCI - L 5 05.01). En effet, l’existence de la servitude de distance et de vue droite constituée à charge de la parcelle no 3______, divisée depuis en deux parcelles nos 4______ et 1______, en faveur de la parcelle no 2______ et de l’État de Genève, impliquait que les limites de propriété n’étaient pas celles ressortant du cadastre mais celles figurant sur le plan d’assiette de la servitude. Il en découlait que la limite parcellaire était ainsi repoussée de 1,50 m à l’intérieur de la parcelle n1______. Or, la distance aux limites pour l’aménagement du talus avait été calculée depuis la limite cadastrale et non en tenant compte de la servitude de restriction de bâtir. La servitude en leur faveur était fondée sur l’art. 12 RCI, dont elle reprenait d’ailleurs le texte légal, de sorte qu’il était clair que celle-ci avait été inscrite pour garantir le respect du droit public des constructions. Partant, le tribunal était compétent pour juger du respect ou non de la servitude de restriction de bâtir en lien avec l’art. 46C RCI.

10.         Dans leurs observations du 10 mai 2021, les intimés ont conclu au rejet du recours, et à la condamnation des recourants aux dépens.

Les griefs des recourants n’étaient pas recevables car les aménagements visés par l’autorisation de construire complémentaire n’étaient pas visibles depuis leur habitation ou même depuis leur parcelle, en raison de la haie qu’ils allaient planter sur leur terrain en limite de propriété, conformément au PAP.

La règle prescrite par le libellé de la servitude était sujette à interprétation. En effet, il n’était pas garanti que cette servitude s’applique tant pour les constructions ordinaires que pour les constructions de peu d’importance (ci-après : CDPI). En interprétant la disposition au regard de son but, il était clair qu’une servitude de distance et vue droite avait pour objectif de prémunir son bénéficiaire d’un bâtiment entravant sa vue sur la zone considérée, mais ne s’appliquait pas aux CDPI.

Or, en l’état, l’aménagement du talus visait à dissimuler les canalisations sur la portion du tracé où elles dépassaient le niveau du terrain naturel, et l’enrochement de soutènement visait à masquer la fosse avec pompe de relevage.

La fosse était située à 3,80 m de la limite cadastrale de la propriété, soit hors de l’assiette de la servitude. Le sommet de l’enrochement entourant la fosse était situé à une altitude de 408,59 m, soit 52 cm au-dessus du terrain naturel de la parcelle des recourants. Il était prévu que l’enrochement de soutènement descende en pente douce depuis le sommet de la fosse jusqu’au niveau du terrain situé au sud-est de la parcelle des recourants.

Le talus serait haut d’environ 28 cm à 2,50 m de la limite cadastrale de la propriété. À l’endroit où se terminait l’assiette de la servitude, c’est-à-dire à 1,50 m de la limite parcellaire, il serait haut d’une dizaine de centimètres au maximum.

Si la règle prescrite par la servitude de distance et vue droite ne s’appliquait qu’aux constructions ordinaires et non aux CDPI, tant le talus que l’enrochement de soutènement projetés respectaient les conditions posées par l’art. 46C RCI, dès lors que la distance minimale de 1 m se calculait depuis la limite cadastrale de la propriété.

Il paraissait « aberrant que les recourants [aient contesté] l’aménagement d’un talus et la création d’un enrochement », alors qu’ils n’avaient pas recouru contre la construction d’un local de rangement à moins de 2,50 m de la limite de propriété. L’enrochement visait à cacher la fosse avec pompe de relevage mais n’était pas indispensable d’un point de vue technique. Dès lors, ils pouvaient y renoncer, mais cet élément serait peu esthétique depuis la parcelle des recourants.

Le nouveau tracé des canalisations n’avait pas encore été mis en œuvre. Ils avaient seulement posé des fixations dans le mur de leur abri de jardin. Ils attendaient l’issue du recours pour effectuer l’ensemble des aménagements extérieurs en une seule fois. Enfin, s’agissant du talus, il était également possible d’y renoncer et d’opter pour la création d’un mur qui ferait double peau avec le local de jardin, si les recourants préféraient voir depuis leur parcelle un abri de jardin massif au lieu d’un talus d’une vingtaine de centimètres de haut au maximum.

11.         Dans ses observations du 10 mai 2021, auxquelles était joint son dossier, le département a principalement conclu au rejet du recours. Subsidiairement, il convenait d’admettre le recours et d’ajouter en conséquence une condition à l’autorisation de construire, en précisant explicitement que l’art. 46C RCI devait être respecté.

Il reconnaissait que pour mesurer les distances prescrites par l’art. 46C RCI, le calcul ne devait pas se faire depuis la limite parcellaire, telle qu’elle ressortait des plans, mais bien depuis la limite de la servitude, comme les recourants le soutenaient.

Cette situation n’avait toutefois aucune conséquence car la construction projetée en rouge sur la coupe no 2, se trouvait suffisamment en retrait sur la parcelle litigieuse pour respecter l’art. 46C RCI en prenant en compte la limite fixée par la servitude (soit 1,5 m à l’intérieur de la parcelle).

Toute construction devait, quoi qu’il en soit, en tout temps impérativement respecter le droit des constructions et par conséquent également l’art. 46C RCI. Il n’était donc pas nécessaire que les autorisations énumèrent l’ensemble du droit applicable. Il était toutefois toujours possible pour le tribunal de rappeler cette obligation, en la mentionnant comme réserve supplémentaire dans l’autorisation querellée. En outre, le tribunal pouvait solliciter une nouvelle coupe attestant du respect de cette disposition, bien que cela ne soit pas nécessaire.

12.         Dans leur réplique du 3 juin 2021, les recourants ont persisté dans leurs précédentes conclusions.

Le département se trompait en soutenant que l’enrochement litigieux aurait été autorisé dans le cadre de l’APA 5______/1 initiale. En effet, tel n’était pas le cas, comme le plan de canalisation joint à la demande d’APA 5______/1 le démontrait. La légalité de cet enrochement et du talus pouvait et devait être revue dans le cadre du recours.

Sur le fond, le département admettait que le respect de l’art. 46C RCI devait effectivement être examiné depuis la limite de la servitude et non depuis la limite de la parcelle. Pour autant, le département n’avait pas correctement réalisé cet examen. Au contraire, il était clair qu’une portion du terrain, soit l’aménagement de l’enrochement de soutènement ainsi que du regard de la pompe de relevage, se trouvait dans la zone non constructible en raison de la servitude. Il n’appartenait pas au tribunal de compléter une autorisation de construire délivrée en violation du droit. Ils avaient déjà attiré, en vain, l’attention du département sur cette problématique le 7 septembre 2020.

Ils contestaient la théorie des intimés selon laquelle des difficultés techniques liées aux canalisations avaient rendu nécessaires les modifications apportées au projet. Au contraire, la commune de E______ avait proposé au requérant de se raccorder en gravitaire au réseau voisin, notamment par la parcelle no 6______, appartenant à la commune. Ce dernier s’y était opposé et refusait toute négociation avec ses voisins, probablement afin de ne pas avoir à les indemniser pour la constitution d’une servitude de conduite. Les requérants avaient mis le département devant le fait accompli en commençant à construire les canalisations selon un tracé totalement différent de l’autorisation accordée.

Enfin, le fait de ne pas voir le futur talus, la pompe et le mur de soutènement depuis leur parcelle n’exonérait pas les intimés de l’obligation de respecter l’art. 46C RCI. Les canalisations, déjà réalisées, avaient été recouvertes de béton à l’endroit où le PAP prévoyait pourtant la plantation d’une haie et d’arbres. Ils ne comprenaient dès lors pas comment ce PAP pouvait être mis en œuvre, et la situation était d’ailleurs contraire aux règles de l’art. 129 de la loi d'application du code civil suisse et d'autres lois fédérales en matière civile du 11 octobre 2012 (LaCC - E 1 05), qui prévoyait que les plantations ne pouvaient pas se trouver à moins de 50 cm de la limite de propriété.

13.         Dans leurs duplique du 29 juin 2021, les intimés ont persisté dans leurs précédentes conclusions et explications.

Les recourants n’avaient pas qualité pour recourir, car les aménagements étaient hors de l’assiette de la servitude. Une haie allait par ailleurs leur cacher la vue sur les aménagements concernés. Ils ne retireraient donc aucun avantage pratique de l’annulation de la décision contestée.

Les aménagements étaient conformes aux dispositions légales, hors de l’assiette de la servitude, et seule une dizaine de centimètres de terre prévue pour dissimuler les canalisations restait litigieuse.

Contrairement aux allégations des recourants, il n’existait aucune autre solution technique pour le raccordement des eaux usées de leur parcelle. Ils s’étaient appuyés sur les plans du bureau d’ingénieurs, qui signalaient des canalisations au droit de la parcelle no 4______, lesquelles n’existaient en réalité pas. Ils avaient été contraints de modifier le tracé de leurs canalisations et de trouver des adaptations techniques.

La hauteur de la fosse respectait l’angle de 30o avec l’horizontale dans lequel les aménagements extérieurs devaient s’inscrire, même en calculant la limite depuis l’assiette de la servitude et non depuis la limite cadastrale. Il était parfaitement possible qu’ils renoncent à l’enrochement de soutènement, qui n’avait qu’un but esthétique, visant à masquer la conduite de la canalisation.

Ils n’avaient pas commencé les travaux. La distance entre le local de rangement et la limite de propriété était de 1,65 m, et suffisante pour implanter la haie prévue par le plan d’aménagement, tout en respectant la distance d’implantation à 50 cm de la limite de propriété. Afin de préserver leur terrain et sa végétation, ils attendaient l’issue de la procédure de recours avant d’effectuer l’entier des travaux d’aménagement.

14.         Dans sa duplique du 29 juin 2021, le département a persisté dans ses précédentes explications et conclusions.

Seule une portion de l’enrochement de soutènement projeté était litigieuse. Le bénéficiaire de l’autorisation avait donc le choix soit de modifier la pente du terrain et l’enrochement projeté afin de respecter l’art. 46C RCI, soit de déposer une nouvelle requête en autorisation de construire complémentaire, si des constructions ou des parties de constructions ne pouvaient pas respecter l’art. 46C RCI. En effet, de prime abord, d’éventuels murs de soutènement en retrait ou un agrandissement du bâtiment de jardin englobant toute ou partie des canalisations semblait autorisables.

À teneur des plans produits, dont ni la hauteur du terrain ni les cotes n’étaient contestées par les recourants, le regard de la pompe de relevage respectait l’art. 46C RCI.

Enfin, la demande des recourants visant le strict respect de l’art. 46C RCI n’était pas en leur faveur, dès lors que des CDPI très visibles risquaient de se substituer au projet. Il s’interrogeait donc, dans leur intérêt, sur la question de savoir si un accord ne pouvait intervenir entre les parties sur les travaux litigieux, les recourants acceptant que la servitude permette la réalisation d’un léger rehaussement du terrain naturel, afin d’éviter les possibles conséquences d’une nouvelle requête en autorisation de construire complémentaire en vue de la construction de murets et de CDPI, plus massifs et visibles.

Les photographies produites n’étaient pas interprétables en l’état, contrairement aux dires des recourants, en l’absence de plan précisant les lieux et les directions des prises de vue. Ces photos ne faisaient qu’attester de l’existence de travaux en cours.

15.         Le 9 juillet 2021, les recourants ont présenté des observations spontanées, invoquant leur droit inconditionnel à la réplique.

Ils prenaient acte du fait que le département reconnaissait que la construction autorisée ne respectait pas les prescriptions de l’art. 46C RCI en ce qui concernait l’enrochement de soutènement et le talus adjacent. Le litige ne concernait pas l’esthétique des constructions mais poursuivait le but d’assurer le respect de la servitude et la bonne application du droit. La conclusion du département tendant à ajouter une condition à l’autorisation délivrée était irrecevable.

Les plans produits n’étaient pas conformes aux prescriptions de l’art. 46C RCI. Les requérants eux-mêmes l’admettaient au regard du croquis joint à leur duplique.

Enfin, ils prenaient note des solutions alternatives suggérées par le département, lesquelles étaient sujettes à autorisation car impliquant des aménagements différents de ceux autorisés par l’autorisation querellée. Enfin, comme le projet enfreignait les prescriptions de l’art. 46C RCI de l’aveu même du département, il convenait pour ce motif d’annuler l’autorisation.

16.         Par courrier spontané du 15 juillet 2021, les recourants ont informé le tribunal que les cotes du plan no ______, produit par le requérant dans le cadre de l’autorisation querellée ne correspondaient pas aux plans de géomètre déposés dans le cadre de l’APA 5______/1 initiale. Ce dernier faisait figurer la distance de 1,50 m entre le local de rangement et la limite de propriété, tandis que selon le plan produit dans l’autorisation querellée cette distance était de 1,65 m. Cette erreur aurait pu être évitée si les plans déposés à l’appui de la seconde APA avaient été certifiés par un géomètre, comme l’art. 10A al. 4 RCI l’exigeait.

17.         Dans ses observations du 10 août 2021, le département a persisté dans ses précédentes explications et conclusions.

L’ouverture du chantier ne pouvait être critiquée en tant que telle. Les photos produites ne permettaient pas d’identifier une violation du droit public et ce n’était « qu’au terme du chantier que les travaux réalisés devront respecter le contenu d’une autorisation de construire en force ». Le grief de non-conformité des travaux soulevé par les recourants était à ce stade prématuré.

Les divergences entre l’autorisation initiale et l’autorisation complémentaire étaient logiques car c’était la vocation de cette dernière que d’autoriser un projet modifié. Il était donc possible que la cabane de jardin soit projetée plus en retrait sur la parcelle. Il pouvait toutefois être reproché au requérant de n’avoir pas mentionné cette divergence dans les couleurs habituelles (rouge et jaune). Quoi qu’il en soit, le plan produit dans la requête complémentaire indiquait que le nouveau tracé n’empiétait pas sur la servitude. L’argument des recourants à cet égard devait donc être écarté, étant infirmé par le plan produit à l’appui de la demande d’autorisation complémentaire.

18.         Le 6 septembre 2021, les recourants ont persisté dans leurs explications et commentaires.

Ils s’étonnaient de la mansuétude du département sur quatre points, soit le fait que l’autorisation complémentaire avait été délivrée à l’issue d’une inspection du chantier qui avait pourtant relevé des irrégularités, que celle-ci avait déjà été en majeure partie mise en œuvre avant sa délivrance, que le projet était contraire à l’art. 46C RCI et que le requérant avait modifié l’emplacement et les dimensions de la cabane de jardin, sans l’indiquer ni dans la demande d’autorisation ni dans les plans afférents.

Le plan de géomètre déposé indiquait des altitudes différentes des plans antérieurement produits. En outre, les dimensions de la cabane étaient identiques alors qu’ils affirmaient qu’elle avait été réduite et déplacée. La conformité d’une autorisation devait être examinée selon les pièces produites à l’appui de la demande et non selon des pièces nouvelles produites en cours d’instruction. Il n’appartenait pas au tribunal de compléter un dossier lacunaire ou erroné.

19.         Le 15 septembre 2021, les intimés, persistant dans leurs conclusions et observations, ont relevé que la cabane de jardin n’avait pas été déplacée mais uniquement réduite côté ouest, afin d’éviter un empiétement sur l’assiette de la servitude. En outre, le plan du géomètre produit en cours d’instruction confirmait qu’aucune partie de cette cabane ne se situait dans l’assiette de la servitude et qu’il était possible de placer les canalisations le long du mur du local de rangement tout en respectant l’assiette de la servitude. Tout grief en lien avec la cabane de jardin devait en outre être déclaré irrecevable car ce point ne faisait pas l’objet de la procédure querellée.

S’agissant des niveaux de terrain, comme il s’agissait d’un terrain subissant des mouvements de terre et non d’une surface goudronnée, des différences de quelques centimètres étaient usuelles et tolérées.

Enfin, le calcul qu’ils avaient présenté était correct et avait uniquement été précisé dans les dernières écritures selon les informations fournies par le géomètre. La hauteur de la fosse prévue respectait donc en tous points l’angle de 30o avec l’horizontale, tout en se situant hors de l’assiette de la servitude.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par le département en application de la LCI (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 LCI).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ces points de vue au sens des art. 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             La recevabilité du recours suppose encore que ses auteurs disposent de la qualité pour recourir.

4.             Selon l'art. 60 let. b LPA, ont qualité pour recourir toutes les personnes qui sont directement touchées par une décision et ont un intérêt digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée.

5.             L'intérêt digne de protection représente tout intérêt pratique ou juridique à demander la modification ou l'annulation de la décision attaquée. Il consiste donc dans l'utilité pratique que l'admission du recours apporterait au recourant, en lui évitant de subir un préjudice de nature économique, idéale, matérielle ou autre que la décision attaquée lui occasionnerait. Il implique que le recourant doit se trouver dans une relation spéciale, étroite et digne d'être prise en considération avec l'objet de la contestation et qu'il soit touché de manière directe, concrète et dans une mesure et avec une intensité plus grandes que la généralité des administrés de manière à empêcher l'action populaire. Cet intérêt digne de protection ne doit pas nécessairement être de nature juridique, un intérêt de fait étant suffisant (ATF 144 I 43 consid. 2.1 ; 143 II 506 consid. 5.1; arrêts du Tribunal fédéral 1C_206/2019 du 6 août 2019 consid. 3.1 ; 1C_96/2017 du 21 septembre 2017 consid. 2.1).

6.             En matière de droit des constructions, le voisin direct de la construction ou de l'installation litigieuse a en principe la qualité pour recourir (ATF 139 II 499 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_382/2017 du 16 mai 2018 consid. 1.2.1). Est considéré comme voisin immédiat celui dont le terrain jouxte celui du constructeur, se situe en face de lui, séparé par exemple par une route ou un chemin, ou se trouve à une distance relativement faible de l'immeuble sur lequel il y aura la construction ou l'installation litigieuse (Piermarco ZEN-RUFFINEN, La qualité pour recourir des tiers dans la gestion de l'espace in Les tiers dans la procédure administrative, Genève, 2004, p. 176 et les références citées). Ces conditions peuvent aussi être réalisées en l'absence de voisinage direct, quand une distance relativement faible sépare l'immeuble des recourants de l'installation litigieuse (ATF 121 II 171 174 ; ATA/713/2011 du 22 novembre 2011).

7.             La proximité avec l'objet du litige ne suffit pas à elle seule à conférer, par exemple, au voisin, respectivement au locataire d'un immeuble, la qualité pour recourir contre l'octroi d'une autorisation de construire. Celui-ci doit en outre retirer un avantage pratique de l'annulation ou de la modification de la décision contestée qui permette d'admettre qu'il est touché dans un intérêt personnel se distinguant nettement de l'intérêt général des autres habitants de la collectivité concernée, de manière à exclure l'action populaire ; il doit ainsi invoquer des dispositions du droit public des constructions susceptibles d'avoir une incidence sur sa situation de fait ou de droit (ATF 137 II 30 consid. 2.2.3 et 2.3 ; 133 II 249 consid. 1.3.1, 468 consid. 1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_61/2011 du 4 mai 2011 consid. 1).

8.             Il incombe au recourant d'alléguer les faits propres à fonder sa qualité pour agir lorsqu'ils ne ressortent pas à l'évidence de la décision attaquée ou du dossier en cause (ATF 133 II 249 consid. 1.1 ; 120 Ia 227 consid. 1 ; 115 Ib 505 consid. 2), de prouver qu'il est atteint par la décision et de rendre vraisemblable que l'annulation ou la modification de la décision peut influencer sa situation de fait ou de droit (ATF 123 II 115 consid. 2a).

9.             En l’espèce, les recourants, voisins directs de la parcelle sur laquelle la construction projetée doit être érigée, font valoir la violation de dispositions légales du droit de la construction, et en particulier de l’art. 46C RCI. Ils ont ainsi un intérêt digne de protection à l’annulation de l’autorisation querellée.

Dès lors, la qualité pour recourir doit leur être reconnue.

10.         Les recourants sollicitent préalablement leur comparution personnelle, l’audition des certains préaviseurs, ainsi qu’un transport sur place.

11.         Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) comprend notamment le droit, pour l'intéressé, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes et de participer à l'administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 142 II 218 consid. 2.3 et les références citées). Il n'empêche toutefois pas le juge de renoncer à procéder à des mesures d'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, il a la certitude que ces dernières ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 et les références citées).

Ces principes s'appliquent notamment à la tenue d'une inspection locale, en l'absence d'une disposition cantonale qui imposerait une telle mesure d'instruction (cf. ATF 120 Ib 224 consid. 2b ; 112 Ia 198 consid. 2b ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_243/2013 du 27 septembre 2013 consid. 3.2.1 ; 1C 61/2011 du 4 mai 2011 consid. 3.1 ; 1C_327/2009 du 5 novembre 2009 consid. 3.1 ; ATA/720/2012 du 30 octobre 2012), ce qui n'est pas le cas à Genève.

En principe, l'audition d'un membre d'une instance spécialisée ne se justifie pas lorsque cette instance a émis un préavis versé à la procédure (ATA/126/2021 du 2 février 2021 consid. 2b ; ATA/934/2019 du 21 mai 2019 consid. 2, confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 1C_355/2019 du 29 janvier 2020 consid. 3.1 et 3.2).

12.         En l'occurrence, les parties ont pu s’exprimer à plusieurs reprises par écrit durant l’instruction de la procédure et le dossier contient dès lors les éléments utiles et nécessaires permettant au tribunal de trancher le litige.

Il ne sera ainsi pas donné suite aux mesures d’instructions sollicitées par les recourants.

13.         L’objet du litige est principalement défini par l’objet du recours (ou objet de la contestation), les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu’il invoque. L’objet du litige correspond objectivement à l’objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_581/2010 du 28 mars 2011 consid. 1.5 ; ATA/1218/2017 du 22 août 2017 consid. 3b et l'arrêt cité ; ATA/590/2017 du 23 mai 2017 consid. 2b ; ATA/1050/2016 du 13 décembre 2016 consid. 3b ; ATA/1076/2015 du 6 octobre 2015 consid. 3b). La contestation ne peut excéder l’objet de la décision attaquée, c’est-à-dire les prétentions ou les rapports juridiques sur lesquels l’autorité inférieure s’est prononcée ou aurait dû se prononcer (ATA/1218/2017 du 22 août 2017 consid. 3b ; ATA/421/2017 du 11 avril 2017 consid. 5 et les arrêts cités ; ATA/1145/2015 du 27 octobre 2015 consid. 4b).

14.         La demande accélérée doit être adressée au département sur formule officielle, en 5 exemplaires. Dans le but d'accélérer l'instruction d'une demande impliquant le recueil de nombreux préavis, le département peut solliciter autant d'exemplaires supplémentaires qu'il est nécessaire (art. 10B RCI).

Il y a notamment lieu de joindre, dans la mesure où ils sont nécessaires, les plans et documents suivants : un extrait du plan cadastral conforme aux alinéas 2 et 4 de l'art. 7 de l'ordonnance sur la mensuration officielle du 18 novembre 1992 (OMO - RS 211.432.2) obtenu soit sur le guichet cartographique de la mensuration officielle, soit auprès d'un ingénieur-géomètre officiel. Sur ce plan, la construction concernée par les travaux projetés est teintée en rouge, de telle sorte qu'il soit facile de l'identifier. En cas de construction nouvelle, celle-ci doit être cotée par rapport aux limites de propriété. Doivent encore être précisés les autres bâtiments encore non cadastrés ou qui ne nécessitent pas de cadastration (let. b), un plan des canalisations d’évacuation des eaux usées et pluviales existantes et à construire, jusqu’aux points de déversement aux collecteurs en indiquant les diamètres et niveaux(let. f) ; les plans, coupes et façades nécessaires à la compréhension du projet ; sur ces plans, les parties à démolir sont en jaune et les parties à construire ou à transformer sont en rouge; (let. h) ; un relevé des niveaux du terrain naturel existant établi par un ingénieur-géomètre officiel (let. i) (art. 10B al. 2 RCI).

15.         Lorsque les distances aux limites de propriétés et les distances en constructions ne sont assurées que par un accord entre propriétaires voisins, sans modification des limites de leurs parcelles, cet accord doit faire l'objet d'une servitude inscrite au registre foncier (art. 46 al. 1 LCI). L'autorisation de construire est subordonnée à la remise d'un extrait du registre foncier attestant que cette inscription a été opérée (art. 46 al. 2 LCI). Le règlement d'application fixe les termes dans lesquels la servitude doit être établie (art. 46 al. 3 LCI).

16.         Selon l’art. 12 RCI, les servitudes de distances et vues droites doivent être énoncées, en principe, dans la forme suivante : « Il est constitué sur la parcelle n° ..... (fonds servant) au profit de la parcelle n° ..... (fonds dominant) et au profit de l’Etat de Genève une servitude de distance et vue droite. Cette servitude, qui s’exerce sur la zone figurée par ..... au plan ci-annexé, comporte l’interdiction de toute construction dans les limites de cette zone, étant entendu qu’en cas de construction à édifier dans l’avenir sur la parcelle n° ..... (fonds servant) la limite de la zone grevée doit être considérée comme limite de parcelle pour le calcul des distances et vues droites exigées par la loi sur les constructions. Cette servitude ne peut être modifiée ou radiée sans l’accord du département ». La jurisprudence a admis que cette formulation implique que les servitudes sont de droit public (ATA/928/2021 du 7 septembre 2021).

17.         Selon l’art. 46C RCI, en limite de propriété, le niveau du terrain naturel doit être maintenu sur une largeur de 1 m (al. 1). Au-delà de 1 m, les aménagements extérieurs doivent s'inscrire à l'intérieur d'une ligne oblique formant un angle de 30° avec l'horizontale (al. 2).

18.         En l’espèce, il ressort du dossier qu’il existe une servitude modifiant les limites parcellaires entre la parcelle des recourants et celle des intimés. Dans sa réponse du 10 mai 2021, le département a ainsi admis que le calcul du respect de l’art. 46C RCI devait se faire depuis la limite de la servitude et non depuis la limite parcellaire, comme cela ressortait des plans. Il a également relevé que selon lui, l’enrochement de soutènement ne faisait pas l’objet de l’autorisation complémentaire querellée. Le projet était dans ces conditions conformes à l’art. 46C RCI. Pour le surplus, il a indiqué que le tribunal pouvait modifier l’autorisation, en y ajoutant une réserve s’agissant du respect de l’art. 46C RCI.

En revanche, dans sa duplique du 29 juin 2021, le département a indiqué qu’effectivement, une portion de l’enrochement projeté était litigieuse. Le bénéficiaire de l’autorisation avait donc le choix de modifier la pente du terrain et l’enrochement projeté afin de respecter l’art. 46C RCI, ou alors déposer une nouvelle requête en autorisation de construire, comme une partie de la construction ne pouvait pas respecter la disposition précitée. De prime abord, d’éventuels murs de soutènement en retrait ou un agrandissement du bâtiment de jardin englobant toute ou partie des canalisations semblait autorisable. Il a pour le surplus invité les parties à réfléchir à un accord, la demande des recourants visant au strict respect de l’art. 46C RCI ne semblant pas être en leur faveur, dès lors que des CDPI très visibles pourraient se substituer au projet actuel.

Les intimés indiquent eux aussi pouvoir renoncer audit soutènement, et laisser ainsi visible le regard de la pompe de relevage au milieu de leur jardin, sous la fenêtre de leur cuisine. Ils n’ont toutefois pas formellement requis de modifier le projet autorisé par l’APA 5______/3, de sorte que ce dernier reste celui figurant sur les plans, qui a été présenté au tribunal. Le département lui-même a souligné que la servitude n’était pas respectée, et proposé au bénéficiaire de l’autorisation plusieurs modifications, qui consistent soit en la demande subséquente de modification de la pente de l’enrochement, soit en la modification complète du projet, plusieurs options « sembleraient admissibles ».

Si ces modifications n'apparaissent a priori pas importantes, elles se rapportent à des éléments totalement nouveaux impliquant la modification des plans, visés ne varietur, sur lesquels reposent l'autorisation querellée. En outre, il n'est pas à exclure que l'une de ces modifications - soit la suppression pure et simple de l’enrochement de soutènement ou encore la création d’un bardage double peau avec la cabane de jardin - nécessitent l’obtention de nouveaux préavis.

19.         Dans ces conditions, le tribunal constate que l’autorisation délivrée ne tient pas compte de la limite parcellaire telle qu’elle est fixée par la servitude pour mesurer exactement l’emplacement du talus et l’angle de 30° imposé par les dispositions légales. La lecture de l’acte de constitution de servitudes de distance et vue droite, qui prescrit que cette servitude comporte l’interdiction de « toutes constructions dans les limites de la zone grevée », et qu’en cas de constructions à élever dans l’avenir sur la parcelle grevée, « les limites de la zone grevée seront considérées comme limites de parcelle pour le calcul des distances et vues droites », ne permet pas de retenir l’argument des intimés, selon lequel cette servitude ne s’appliquerait pas aux CDPI. Force est ainsi de constater que le projet autorisé ne respecte pas l’art. 46C RCI, ce qui n'est pas admissible. Après avoir constaté qu'un projet, tel qu'autorisé, ne respecte pas la législation, le tribunal ne saurait solliciter lui-même des requérants la production d'un projet modifié, et se substituer à l'autorité de décision en statuant sur la base d'un nouvel état de fait. Devant fonder son examen sur le projet soumis au DT et autorisé par celui-ci, il n'a dès lors pas d'autre choix que d'annuler l'autorisation querellée. Si le département et les intimés ont suggéré plusieurs options et possibilités de modifications du projet, aucune décision n’a été prise à cet égard. Aucun plan, visé par le département par exemple et permettant au tribunal d’examiner un projet modifié n’a d’ailleurs été soumis par les intimés. Dans ces conditions, il n’appartient pas en l’état au tribunal de contrôler plusieurs hypothétiques variantes.

Au vu de ce qui précède, le tribunal admettra le recours sans qu’il soit nécessaire de procéder à l’examen des autres griefs invoqués par les recourants.

20.         Le tribunal soulignera à toutes fins utiles qu’une telle situation aurait pu être évitée si, après réception des diverses observations transmises dans le cadre de l’instruction du recours, le DT avait fait usage de la faculté que lui réserve l'art. 67 al. 2 LPA. Cette disposition, qui répond à l'intérêt lié à l'économie de la procédure (arrêt du Tribunal fédéral 2C_653/2012 du 28 août 2012 consid. 4.2.3 ; ATF 127 V 228 consid. 2b/bb et les références citées), prévoit en effet que l'autorité de première instance peut, en cours de procédure de recours, reconsidérer ou retirer sa décision ; en pareil cas, elle notifie sans délai sa nouvelle décision aux parties et en donne connaissance à l'autorité de recours, celle-ci continuant alors à traiter le recours dans la mesure où la nouvelle décision ne l'a pas rendu sans objet (art. 67 al. 3 LPA ; Stéphane GRODECKI/Romain JORDAN, Code annoté de procédure administrative genevoise, 2017, n. 861 p. 229 et n. 866 p. 230).

21.         La juridiction administrative qui rend la décision statue sur les frais de procédure et émoluments (art. 87 al. 1 LPA et 1 s. du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03).

Elle peut en outre, sur requête, allouer à la partie ayant entièrement ou partiellement gain de cause une indemnité pour les frais indispensables causés par le recours (art. 87 al. 2 LPA ; cf. aussi art. 6 RFPA).

22.         Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1’000.- sera mis à la charge de Mme C______ et M. D______ et l’avance de frais de CHF 900.- versée par les recourants leur sera restituée.

23.         Les recourants se verront allouer une indemnité de procédure de CHF 1'500.-, valant participation aux honoraires de leur conseil, à la charge conjointe et solidaire des intimés, pour la moitié, et de l'État de Genève, soit pour lui l'autorité intimée, pour l’autre moitié (art. 87 al. 2 à 4 LPA et 6 RFPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 5 mars 2021 par Madame A______ et Monsieur B______ contre l’autorisation de construire APA 5______/3 délivrée par le département du territoire le 4 février 2021 ;

2.             l'admet ;

3.             annule l’autorisation de construire précitée ;

4.             ordonne la restitution aux recourants de l’avance de frais de CHF 900.- ;

5.             met à la charge de Madame C______ et Monsieur D______, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 1’000.- ;

6.             condamne Madame C______, Monsieur D______ et l'État de Genève, soit pour lui l'autorité intimée, pris conjointement et solidairement, à verser aux recourants une indemnité de procédure de CHF 1'500.-, selon la clé de répartition figurant dans les considérants du jugement ;

7.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Caroline DEL GAUDIO-SIEGRIST, présidente, Saskia RICHARDET VOLPI et Julien PACOT, juges assesseurs.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Caroline DEL GAUDIO-SIEGRIST

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

Le greffier