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Décisions | Chambre pénale de recours

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PM/459/2025

ACPR/462/2025 du 19.06.2025 sur JTPM/324/2025 ( TPM ) , REJETE

Descripteurs : LIBÉRATION CONDITIONNELLE
Normes : CP.86

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

PM/459/2025 ACPR/462/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du jeudi 19 juin 2025

 

Entre

A______, actuellement détenu à la prison de Champ-Dollon, chemin de
Champ-Dollon 22, 1241 Puplinge, agissant en personne,

recourant,

contre l'ordonnance rendue le 2 juin 2025 par le Tribunal d'application des peines et des mesures,

et

LE TRIBUNAL D'APPLICATION DES PEINES ET DES MESURES, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève - case posale 3715, 1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. Par lettres expédiées les 6 et 9 juin 2025, A______ recourt contre l'ordonnance du 2 juin 2025, notifiée le 5 suivant, par laquelle le Tribunal d'application des peines et des mesures (ci-après, TAPEM) a refusé sa libération conditionnelle.

Le recourant déclare vouloir faire "appel" de cette décision.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______, ressortissant algérien né le ______ 1979, exécute actuellement les peines privatives de liberté suivantes :

- 3 jours, en conversion d'une amende de CHF 300.-, pour vol simple (infraction d'importance mineure), prononcée le 5 août 2024 par la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice,

- 7 mois, sous déduction de 47 jours de détention avant jugement, pour vol simple et rupture de ban, prononcée le 12 février 2025 par le Tribunal de police.

b. A______ a été placé en détention le 28 décembre 2024 à Champ-Dollon, établissement dans lequel il séjourne encore actuellement.

c. Les deux tiers des peines sont intervenus le 19 mai 2025, la fin des peines étant fixée au 30 juillet 2025.

d. Selon l'extrait du casier judiciaire suisse (dans sa teneur au 23 avril 2025), A______ a été condamné à vingt-trois autres reprises, depuis octobre 2012, pour infractions à la loi fédérale sur les stupéfiants, infraction à la loi fédérale sur les étrangers, dommages à la propriété, violation de domicile, rupture de ban, vol simple, tentative de vol simple et vol simple d'importance mineure.

En outre, l'extrait mentionne trois enquêtes pénales en cours pour infraction à la loi fédérale sur les étrangers, vol, violation de domicile et rupture de ban, procédures désormais jugées.

A______ a, le 29 septembre 2014, bénéficié d'une libération conditionnelle, qui lui a ensuite été refusée à quatre reprises, entre 2016 et 2024, en raison d'un risque de récidive élevé.

e. A______ fait l'objet d'une mesure d'expulsion pour une durée de dix ans, prononcée le 17 février 2020.

f. Selon le courriel de l'Office cantonal de la population et des migrations
(ci-après, OCPM) du 21 mars 2025, A______ avait, à deux reprises en 2018, refusé d'embarquer à bord de l'avion (vols ordinaires avec escorte policière) destiné à le ramener en Algérie. Plus tard, au cours de sa détention administrative, A______ s'était entretenu avec la représentation diplomatique de son pays d'origine, laquelle avait finalement refusé de lui délivrer un nouveau laissez-passer. Dès lors, A______ avait été mis en liberté par l'OCPM le 15 mars 2019. Cinq jours seulement après sa libération, et alors qu'il savait devoir quitter la Suisse, il avait, à nouveau, été arrêté. À sa sortie de prison, le 21 février 2020, il s'était vu notifier une décision de non-report d'expulsion. Le Secrétariat d'État aux migrations (SEM) poursuivait ses discussions avec les autorités algériennes et œuvrait pour tenter de débloquer la situation en vue de l'émission d'un laissez-passer. Il ne tenait qu'à A______ de changer cette situation par des démarches auprès de la représentation diplomatique de son pays d'origine, en vue de la délivrance d'un document de voyage.

g. A______ n'a pas rempli le formulaire de demande de libération conditionnelle.

h. La direction de la prison de Champ-Dollon a émis un préavis défavorable, le 2 avril 2025. Bien que le comportement de A______ en détention fût globalement correct, il avait refusé d'intégrer l'aile Est de la prison et ne s'était ainsi pas vu attribuer à un atelier. Il ne semblait pas avoir mené de réflexion sur son parcours de vie et n'élaborait aucun projet de réinsertion socio-professionnelle, ni ne se montrait collaborant avec les autorités administratives. Au vu de la durée prévisible du séjour en détention, aucun plan d'exécution de la sanction n'avait été réalisé.

Durant son incarcération, A______ n'avait reçu aucune visite.

i. Le Service de la réinsertion et du suivi pénal (ci-après, SRSP) a préavisé défavorablement, le 5 mai 2025, la libération conditionnelle de A______. Depuis le précédent examen de libération conditionnelle, la situation du précité demeurait sensiblement la même, puisqu'il n'avait fourni aucun effort pour la modifier, de sorte qu'à sa sortie de détention, il se retrouverait dans les mêmes conditions que celles ayant mené à ses dernières condamnations, c'est-à-dire en situation illégale en Suisse, sans travail et sans logement. A______ comptait de très nombreux antécédents, et la libération conditionnelle qui lui avait été accordée par le passé n'avait pas été profitable. Le pronostic pénal apparaissait défavorable, au regard du risque de récidive.

j. Par requête du 9 mai 2025, le Ministère public a fait sien le préavis du SRSP.

k. Entendu par le TAPEM le 2 juin 2025, A______ a exposé avoir à nouveau été placé en détention dix jours seulement après sa sortie de l'établissement de la Brenaz. Durant ces dix jours, il avait préparé son départ en Espagne. Il a, à ce titre, remis au Tribunal un document contenant une adresse en Espagne qui serait celle d'un membre de sa famille maternelle. Il estimait avoir eu un bon comportement en détention et respecté les gardiens. Boulanger de formation, il avait également un diplôme de cuisinier. À l'extérieur, il avait un seul ami, son ex-copine et sa famille. Sa mère vivait chez sa sœur, en Allemagne. Il voyait un psychiatre, qu'il appelait tous les dix jours.

Lors de son arrivée en Suisse, il était "tombé dans l’histoire du haschich pour pouvoir vivre". Ses nombreuses condamnations pour vol étaient anciennes. Pour lui, la Suisse, c’était "fini", il voulait partir en Espagne, où il pourrait travailler chez un membre de sa famille, qui avait une boulangerie. Il n'avait pas mis en œuvre ce projet plus tôt car il n'avait pas compris qu'il faisait l'objet d'une expulsion. Il ne voulait pas retourner dans son pays, où il n'avait plus personne. Il souhaitait obtenir sa libération conditionnelle.

C. Dans l'ordonnance querellée, le TAPEM a retenu que le pronostic était défavorable, au vu des très nombreux antécédents de A______, dont les peines privatives de liberté ne l'avaient pas dissuadé de récidiver, y compris après l'octroi de la libération conditionnelle. Ses déclarations lors de l'audience démontraient une absence de prise de conscience quant à son parcours délictuel. Sa situation personnelle demeurait inchangée et l'intéressé ne fournissait aucun effort pour la modifier, nonobstant la mesure d'expulsion prononcée contre lui. Aucun projet concret et étayé n'était présenté, de sorte qu'il se retrouverait à sa sortie dans la même situation personnelle que celle ayant mené à ses dernières condamnations. Il n'avait aucune garantie de pouvoir séjourner légalement en Espagne, où il disait vouloir se rendre à sa sortie. Aucun projet viable n'était présenté, sauf à se mettre en situation illégale dans un autre pays. Enfin, il ne collaborait pas avec les autorités compétentes en vue de son renvoi dans son pays d'origine, indiquant expressément ne pas vouloir y retourner. En l'état, rien n'indiquait qu'il saurait mettre à profit une nouvelle libération conditionnelle, et le risque qu'il commît de nouvelles infractions apparaissait très élevé, étant précisé qu'à teneur des dernières condamnations figurant à son casier judiciaire, ce risque ne se limitait pas à des infractions à la LEI.

D. a. Dans ses deux lettres, A______ expose ne pas être d'accord avec le refus de libération conditionnelle, rendu "sans avocat". Il demande à bénéficier d'une audience, avec un avocat privé.

b. Par lettres expédiées les 10 et 17 juin 2025 au TAPEM, qui les a transmises à la Chambre de céans, A______ a maintenu sa volonté de faire recours.

c. À réception du recours, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

 

EN DROIT :

1.             1.1. Le recours – sous la forme de trois lettres expédiées avant le 16 juin 2025, échéance du délai de recours – est recevable pour avoir été formé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 42 al. 3 LaCP cum 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une décision judiciaire ultérieure indépendante au sens de l'art. 363 al. 3 CPP (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1463/2017 du 29 mai 2018 consid. 3 et 6B_158/2013 du 25 avril 2013 consid. 2.1) rendue par le TAPEM (art. 41 al. 1 LaCP), ordonnance sujette à contestation auprès de la Chambre de céans (art. 42 al. 1 let. b LaCP cum ATF 141 IV 187 consid. 1.1; art. 393 al. 1 let. b CPP), et émaner du condamné, qui a un intérêt juridiquement protégé à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée
(art. 382 al. 1 CPP).

1.2. La lettre expédiée le 17 juin 2025, après l'échéance du délai de recours, est irrecevable.

1.3. La motivation du recours est particulièrement succincte, mais l'on peut admettre que le recours se situe encore à la limite de ce qui peut être toléré en matière de motivation d'un justiciable agissant en personne, étant précisé que le défaut de motivation d'un recours n'entraîne quoi qu'il en soit pas son irrecevabilité, puisque, à teneur de l'art. 385 al. 2 CPP, si le mémoire (de recours) ne satisfait pas aux exigences prévues à l'alinéa 1 de cette disposition, l'autorité de recours renvoie ledit recours à son auteur pour qu'il le complète à bref délai.

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             Le recourant demande la tenue d'une audience.

Toutefois, le recours fait l'objet d'une procédure écrite (art. 397 al. 1 CPP), les débats n'ayant qu'une nature potestative (art. 390 al. 5 CPP). Par ailleurs, l'art. 29 al. 2 Cst. féd. ne confère pas le droit d'être entendu oralement (ATF 134 I 140 consid. 5.3 p. 148 et les références citées).

Partant, il ne sera pas donné suite à cette requête.

4.             Le recourant conteste le refus de libération conditionnelle.

4.1. Aux termes de l'art. 86 al. 1 CP, l'autorité compétente libère conditionnellement le détenu qui a subi les deux tiers de sa peine, mais au moins trois mois de détention, si son comportement durant l'exécution de la peine ne s'y oppose pas et s'il n'y a pas lieu de craindre qu'il commette de nouveaux crimes ou de nouveaux délits.

La libération conditionnelle constitue la dernière étape de l'exécution de la sanction pénale. Elle est la règle et son refus l'exception, dans la mesure où il n'est plus exigé qu'il soit à prévoir que le condamné se conduira bien en liberté (cf. art. 38 ch. 1 al. 1 aCP), mais seulement qu'il ne soit pas à craindre qu'il commette de nouveaux crimes ou délits. Autrement dit, il n'est pas nécessaire pour l'octroi de la libération conditionnelle qu'un pronostic favorable puisse être posé. Il suffit que le pronostic ne soit pas défavorable (ATF 133 IV 201 consid. 2.2; arrêt du Tribunal fédéral 7B_678/2023 du 27 octobre 2023 consid. 2.2.2).

Le pronostic à émettre doit être posé sur la base d'une appréciation globale, prenant en considération les antécédents de l'intéressé, sa personnalité, son comportement en général et dans le cadre des délits qui sont à l'origine de sa condamnation, le degré de son éventuel amendement ainsi que les conditions dans lesquelles il est à prévoir qu'il vivra (ATF 133 IV 201 consid. 2.2 et 2.3; arrêt du Tribunal fédéral 7B_678/2023 du 27 octobre 2023 précité consid. 2.2.2).

4.2. En l'espèce, la condition objective de la libération conditionnelle du recourant est réalisée depuis le 19 mai 2025.

Cela étant, tous les préavis sont négatifs. Le recourant a été condamné plus d'une vingtaine de fois en Suisse, depuis 2012, notamment pour des délits à la loi sur les stupéfiants et des cambriolages, ainsi que, en dernier lieu, des vols simples. Ce parcours judiciaire, couplé à l'absence de projet concret et réaliste à sa sortie de prison – un départ pour l'Espagne, pays dans lequel il ne dispose pas de permis de séjour, ne saurait être considéré comme un projet de vie suffisant – est de nature à faire redouter une récidive.

C'est ainsi à bon droit que l'autorité précédente a retenu un pronostic défavorable, en raison du risque élevé de récidive, notamment de vols.

5. Le recours doit ainsi être rejeté.

6. Le recourant demande la nomination d'un avocat d'office pour la procédure de recours.

6.1. À teneur des art. 29 al. 3 Cst et 132 al. 1 let. b CPP, toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit à l'assistance judiciaire gratuite, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès; elle a droit en outre à l'assistance judiciaire gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la sauvegarde de ses droits le requiert (arrêt du Tribunal fédéral 1B_74/2013 du 9 avril 2013 consid. 2.1).

Un procès est dépourvu de chances de succès lorsque les perspectives de le gagner sont notablement plus faibles que les risques de le perdre. L'élément déterminant réside dans le fait que l'indigent ne doit pas se lancer, parce qu'il plaide aux frais de la collectivité, dans des démarches vaines qu'une personne raisonnable n'entreprendrait pas si, disposant de moyens suffisants, elle devait les financer de ses propres deniers (ATF 138 III 217 consid. 2.2.4 ; 129 I 129 consid. 2.2).

6.2. En l'espèce, les griefs du recourant étaient dénués de chances de succès, compte tenu de sa situation personnelle et administrative, ainsi que de l'impossibilité de réinsertion en Suisse. Il a, de plus, été en mesure de s'exprimer personnellement sur ses intentions lors de sa sortie de prison. Partant, l'assistance d'un avocat rémunéré par l'État, pour la procédure de recours, ne se justifie pas.

7. Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 600.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP; E 4 10.03).

La procédure relative à l'assistance judiciaire est gratuite (art. 20 RAJ).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Rejette la demande d'assistance juridique.

Met à la charge de A______ les frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 600.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, au Tribunal d'application des peines et des mesures, et au Ministère public.

Le communique, pour information, au Service de la réinsertion et du suivi pénal.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Valérie LAUBER, juges; Madame Arbenita VESELI, greffière.

 

La greffière :

Arbenita VESELI

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

PM/459/2025

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

515.00

Total

CHF

600.00