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Décisions | Chambre pénale de recours

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PM/179/2024

ACPR/251/2024 du 17.04.2024 sur JTPM/172/2024 ( TPM ) , REJETE

Descripteurs : LIBÉRATION CONDITIONNELLE;REJET DE LA DEMANDE
Normes : CP.86.al1

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

PM/179/2024 ACPR/251/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 17 avril 2024

 

Entre

A______, actuellement détenu à l'Établissement fermé de B______, ______, représenté par Me C______, avocat,

recourant,

 

contre le jugement rendu par le Tribunal d'application des peines et des mesures le 14 mars 2024,

 

et

LE TRIBUNAL D'APPLICATION DES PEINES ET DES MESURES, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève – case postale 3715, 1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 2 avril 2024, A______ recourt contre le jugement du 14 mars 2024, notifié le 19 suivant, par lequel le Tribunal d'application des peines et des mesures (ci-après : TAPEM) a refusé sa demande de libération conditionnelle.

Il conclut à sa libération conditionnelle et à ce que les frais de la procédure et ceux de son conseil soient laissés à la charge de l'État.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Le 24 novembre 2022, le Tribunal correctionnel a condamné A______ notamment à une peine privative de liberté de 36 mois, sous déduction de 258 jours de détention avant jugement pour brigandage (art. 140 ch. 1 CP), brigandage en bande (art. 140 ch. 1 et 3 CP), tentative de vol en bande (art. 22 al. 1 cum art. 139 ch. 1 et 3 CP), et entrée illégale en Suisse (art. 115 al. 1 let. a LEI). Il a ordonné son expulsion de Suisse pour une durée de 5 ans (art. 66a al. 1 let. c CP).

Il lui était en particulier reproché d'avoir, le 27 juin 2021, vers 11h45, à Genève, de concert avec quatre comparses, dérobé une montre de marque D______ d'une valeur de CHF 18'000.- environ, en usant de violence tant à l'égard de son détenteur que de l'épouse de celui-ci, ainsi que, le 12 mars 2022, de concert avec trois autres comparses, vers 15h00, tenté de dérober des biens à diverses personnes sans y parvenir, puis, vers 16h00, détourné l'attention d’un homme, pendant que l’un de ses comparses lui saisissait le bras pour lui arracher sa montre de marque E______ d'une valeur de CHF 7'000.- environ et lui avoir asséné un coup par derrière au niveau du dos afin que son comparse puisse conserver le bien, provoquant ainsi la chute de la victime.

Le séjour illégal concernait la période du 27 juin 2021 au 12 mars 2022.

b. Il ressort de ce même jugement que A______ est né le ______ 1995 à F______, en Algérie. Il avait exposé être marié religieusement, sans enfant. Sa mère était décédée en 2005 et son père vivait en Algérie. Il avait un frère et deux demi-sœurs. Il était allé à l'école jusqu'en 6ème année puis avait suivi une formation de cuisinier. Il avait travaillé sur les marchés et dans les déménagements en France. Avant son interpellation, il travaillait comme livreur chez G______ et percevait un salaire d'EUR 250.- à EUR 350.- par semaine. Il vivait à H______ [France] dans une colocation pour un loyer mensuel d'EUR 200.-.

À teneur de l'extrait de son casier judiciaire suisse, il n'avait pas d'antécédent. Il ressortait en revanche de l'extrait de casier judiciaire français deux condamnations, à savoir le 13 juin 2020, par le président du Tribunal judiciaire de I______ [France], à une peine de 3 mois d'emprisonnement avec sursis pour vol avec violence n'ayant pas entraîné une incapacité totale de travail et, le 8 août 2020, par le Tribunal correctionnel de I______, à une peine d'un an et 3 mois d'emprisonnement pour vol aggravé par deux circonstances (récidive).

c. A______ a été incarcéré à la prison de J______ du 13 mars 2022 au 13 avril 2023, date de son transfert à l'Établissement fermé de B______ (ci-après: B______).

d. Les deux tiers de la peine qu’il exécute sont intervenus le 12 mars 2024, tandis que la fin de la peine est fixée au 14 mars 2025.

e. Selon l'extrait du casier judiciaire suisse dans son état au 7 février 2024, A______ a encore été condamné par jugement du 4 novembre 2021 de la Jugendanwaltschaft K______ [BS] pour vol simple sous une autre identité à une peine privative de liberté de 20 jours assortie du sursis.

L'extrait de son casier judiciaire britannique à la date du 22 juin 2023 fait état d'une condamnation en 2014 pour vol et tentative de vol sous son alias L______. Le mot "detention" y apparait.

f. Le Service de probation et d'insertion (ci-après: SPI) a établi une évaluation criminologique le 27 juin 2023, de laquelle il ressort que lors de son séjour à J______, A______ avait fait l'objet de six sanctions notamment pour "trouble de l'établissement" et une fois pour "violence physique exercée sur un détenu", son attitude globale étant pour le surplus positive. Depuis son transfert à B______, il travaillait à l'atelier "Évaluation", à satisfaction. Il reconnaissait les infractions commises mais minimisait son implication. Il ne faisait pas spontanément part de regrets ni de sentiments d'empathie pour les victimes. Le risque de récidive générale était élevé et un risque de récidive de comportements violents modéré. Ses projets de vie étaient flous, tels que le fait de fonder une famille avec sa compagne et d'adopter un mode de vie "pro social". Sa situation administrative était compliquée, dans la mesure où il refusait de retourner en Algérie.

g. Selon le plan d'exécution de la sanction (ci-après: PES) validé le 10 août 2023, prévoyant le maintien en milieu fermé, ainsi qu'une éventuelle libération conditionnelle, toute progression dans l'exécution de la sanction pourrait faire l'objet d'un avis de la commission d'évaluation de la dangerosité (CED). Les objectifs de A______ étaient de clarifier sa situation administrative afin de développer un projet d'avenir réalisable, de maintenir les contacts avec ses proches, de se tenir éloigné des fréquentations criminelles et de mener une réflexion sur son parcours de vie, notamment sur les causes de ses agissements.

h. Par courriel du 7 novembre 2023, l'Office cantonal de la population et des migrations (OCPM) a confirmé qu'une décision de non-report de l’expulsion judiciaire serait notifiée avant la fin de la peine. Une demande de soutien en vue d’identification de l’intéressé avait été effectuée auprès du secrétariat d'État aux migrations (SEM) le 15 décembre 2022 sur la base de documents marocains produits par ce dernier. Il n'avait pas été reconnu par les autorités de ce pays. Comme il avait indiqué à son intervenant socio-judiciaire au cours de son incarcération avoir pour véritable identité L______, né le ______ 1995, ressortissant d'Algérie, une nouvelle demande de soutien en vue de son identification était en cours auprès des autorités algériennes. Son renvoi pourrait être organisé dès lors qu'il aurait été identifié. Une éventuelle libération conditionnelle devait être subordonnée à son renvoi effectif de Suisse.

Par courriel du 13 février 2024, l'OCPM a ajouté que A______ serait prochainement entendu en vertu du règlement Dublin en lien avec son passage en Irlande.

i. Dans sa demande de libération conditionnelle du 4 novembre 2023, A______ a indiqué être marié, sans enfant mais vouloir fonder une famille. Il voulait se rendre en Irlande, où il avait vécu et où son épouse exerçait la profession de chimiste. Il avait obtenu un diplôme et travaillé dans le domaine de la cuisine lorsqu'il se trouvait en Angleterre. Il chercherait un emploi dans ce secteur d'activité. Un membre de sa famille était susceptible de le loger et de lui venir en aide à M______ [Irlande]. Il s'engageait à ne plus contrevenir à la loi en cas de libération anticipée.

j. Dans son préavis du 6 décembre 2023, B______ a indiqué que A______ avait fait l'objet d'une sanction disciplinaire le 23 novembre 2023 pour consommation de stupéfiants. Son travail au sein des divers ateliers avait donné satisfaction, A______ étant une personne polie, ponctuelle et volontaire. Il s'acquittait des frais de justice à hauteur de CHF 20.- par mois. La majorité des conditions posées par le PES étant atteintes, elle se positionnait en faveur d'une libération conditionnelle.

A______ disposait de CHF 307.93 sur son compte libre, CHF 833.75 sur son comptes réservé et CHF 625.25 sur son compte bloqué.

En détention, il n'avait reçu aucune visite, si ce n'était de son conseil.

k. Postérieurement à ce préavis, A______ a été sanctionné d’une amende de CHF 100.- pour récidive de possession de produits stupéfiants, ainsi que de cinq jours de cellule forte à la suite de la découverte dans sa cellule d'un routeur portable et de deux cartes SIM.

l. Dans son préavis du 15 février 2024, le Service de l'application des peines et mesures (ci-après: SAPEM) relève que le comportement adopté par A______ ne pouvait être qualifié d'exemplaire, comme en témoignaient les trois sanctions prises à son encontre par B______. Les services de police prévoyaient de l'auditionner le 15 février 2024 dans le cadre d'une dénonciation de l'établissement pour infraction à la LStup. Il avait fait l'objet de six sanctions lorsqu'il se trouvait à la prison de J______, dont cinq pour troubles à l'ordre de l'établissement et la dernière pour violence physique exercée à l'encontre d'un codétenu. Cela étant, selon le préavis favorable de B______, l’intéressé, hormis trois décisions disciplinaires, ne posait pas de problème particulier et avait une attitude polie, respectueuse et adéquate, tant au cellulaire qu’en atelier. Partant, sans pouvoir être qualifié de bon, son comportement ne faisait pas obstacle, à lui seul, à une libération conditionnelle.

Nonobstant l’évaluation criminologique du SPI, A______ était parvenu à mener une vie globalement "pro sociale" entre 2013 et 2019, période à laquelle il disait avoir obtenu l'asile en Irlande et effectuait des allers-retours avec l'Angleterre. Son projet de retour en Irlande se rapportait ainsi à une période de son parcours vécue positivement. L’ouverture prochaine d'une procédure dite Dublin en vue d'un éventuel retour dans ce pays conférait à ce projet une possibilité de concrétisation. A______, en fournissant une identité qu'il affirmait être la véritable et en produisant des documents établis en Irlande, faisait montre d'une certaine collaboration avec les autorités administratives dans le cadre de son expulsion. Il exécutait pour la première fois une peine privative de liberté en Suisse.

Si le pronostic ne pouvait être qualifié de favorable quant au risque de réitération de comportements contraire à la loi, il n’était pas clairement défavorable, de sorte qu'il convenait de lui accorder une chance de faire ses preuves dans le cadre d'une libération conditionnelle dont il n'avait encore jamais bénéficié. À cela s'ajoutait l'effet dissuasif de l'existence d'un solde de peine relativement important, l'exécution de la peine privative de liberté jusqu'à son terme n'apportant aucune plus-value. Il préavisait favorablement la libération conditionnelle de A______, subordonnée à son renvoi de Suisse, assortie d'un délai d'épreuve égal au solde de peine.

m. Par requête du 21 février 2024, le Ministère public a fait sien le préavis du SAPEM.

n. Lors de l’audience devant le TAPEM, A______ a déclaré que son séjour à B______ se passait bien. Il travaillait à l'atelier cuisine, apprenait le français et participait à des groupes. Il avait des contacts réguliers avec sa femme et ses amis vivant en Angleterre et en Irlande, ainsi qu’avec son père.

En prison, il avait été sanctionné pour avoir parlé à la fenêtre, s’être bagarré et en lien avec les stupéfiants, faits qu’il reconnaissait. En revanche, le routeur trouvé dans les toilettes de sa cellule ne lui appartenait pas.

Il reconnaissait avoir commis des délits mais avait appris la leçon. Il avait 29 ans et une femme qui l'attendait. Il souhaitait changer sa vie, sans quoi il perdrait tout, à savoir sa femme et son père. À son arrivé en Grande-Bretagne en 2014, il était encore un enfant, n'avait personne et ne parlait pas la langue. Il avait donc sombré dans la délinquance. Après 24 mois de prison, il avait payé sa dette. Il présentait ses excuses aux victimes et à la Suisse. Il souhaitait retourner en Irlande et exercer le métier de cuisinier, avec l’aide d’amis. Il ne commettrait plus d'infractions, car il l'avait juré sur le Coran, à son père et à sa femme.

Son épouse travaillait au Cambodge mais le rejoindrait en Irlande à sa libération. Elle bénéficiait des autorisations nécessaires pour y séjourner grâce à son travail, dans l'informatique et en tant que chimiste. Il vivrait chez un ami en attendant d'avoir un salaire et de trouver son propre logement. Son épouse le soutiendrait d'un point de vue financier.

Il ignorait quel était son statut administratif en Irlande et en Algérie. Il avait fourni ses papiers irlandais au SAPEM. Il avait bénéficié d'un permis de travail puis d'une carte d'assurance (health card) en Irlande, qu’il ne retrouvait toutefois plus, de sorte qu'il aurait l'autorisation d'y vivre. Il envisageait son avenir en Irlande et non en Algérie, où il avait eu beaucoup de soucis. Il avait quitté ce pays il y avait très longtemps et n'avait plus de contact avec les personnes qu'il y connaissait.

Il ne fumait pas et "lorsqu'il sortira[it], il arrêtera[it] ".

C. Le TAPEM a refusé la libération conditionnelle de A______, considérant un comportement en détention qui ne pouvait être qualifié de bon au vu des neuf sanctions dont le précité avait été l’objet. Ses antécédents étaient mauvais et il ne partageait pas l’opinion du SAPEM selon laquelle l’intéressé aurait vécu une vie "pro sociale", en Grande-Bretagne. A______ ne faisait valoir aucun projet d’avenir concret. Rien n’indiquait qu’il disposerait des autorisations administratives nécessaires pour séjourner et travailler en Irlande. Il ne documentait pas ses opportunités d’emploi sur place et son épouse n’y vivait en l’état pas. Il n’envisageait pas un retour en Algérie. Les objectifs fixés par le PES n’étaient pas atteints s’agissant de clarifier sa situation administrative, de maintenir des contacts avec ses proches, de s'éloigner des fréquentations criminelles et de mener une réflexion sur son parcours de vie. Il présentait encore un risque de récidive et rien ne permettait de s’écarter des considérations du SPI l’évaluant à élevé voire modéré s’agissant de comportements violents, dans la mesure où aucun élément factuel n’avait changé depuis cette évaluation.

D. a. À l’appui de son recours, A______ fait valoir qu’il avait produit de nombreux documents attestant de liens avec l’Irlande, en particulier les coordonnées de la personne pouvant l’accueillir et l’aider à trouver du travail. Son épouse, en déplacement professionnel en Asie, l’y rejoindrait dès sa mise en liberté. Les préavis de la prison et du SAPEM, que le Ministère public avait fait siens, étaient favorables. Il ne s’était jamais opposé à son expulsion du territoire suisse vers l’Irlande de préférence, "mais si par impossible" vers l’Algérie. Afin d’éviter une récidive, il devait être soutenu dans ses démarches ayant pour objectif de "trouver une liberté avec un projet qu’il avait souhaité et dans le pays choisi et de droit", selon la réglementation en vigueur. L’ensemble des préavis était en connexion avec l’expulsion obligatoire qui pourrait être réalisée selon une haute vraisemblance. Il avait toujours accepté l’octroi d’une libération conditionnelle subordonnée à son renvoi de Suisse et d’un délai d’épreuve.

b. Le TAPEM maintient les termes de son jugement.

c. Le Ministère public s’en rapporte à justice.

d. A______ indique le 11 avril 2024, dans le délai de réplique, ne pas avoir d'observations à formuler.

EN DROIT :

1.             1.1. La décision rendue en matière de libération conditionnelle (art. 86 CP) constitue une "autre décision ultérieure" indépendante au sens de l'art. 363 al. 3 CPP (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1136/2015 du 18 juillet 2016 consid. 4.3 et 6B_158/2013 du 25 avril 2013 consid. 2.1; Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 30 ad art. 363).

1.2. Le recours au sens de l'art. 393 CPP est la voie de droit ouverte contre les prononcés rendus par le TAPEM en matière de libération conditionnelle (art. 42 al. 1 let. b LaCP cum ATF 141 IV 187 consid. 1.1 et les références citées).

1.3. La procédure devant la Chambre de céans est régie par le CPP, applicable au titre de droit cantonal supplétif (art. 42 al. 2 LaCP).

1.4. En l'espèce, le recours est recevable, pour avoir été déposé selon les forme et délai prescrits (art. 385 al. 1, 390 al. 1 et 396 al. 1 CPP), par le condamné, qui a un intérêt juridiquement protégé à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             Le recourant estime remplir les conditions d'une libération conditionnelle.

2.1. Aux termes de l'art. 86 al. 1 CP, l'autorité compétente libère conditionnellement le détenu qui a subi les deux tiers de sa peine, mais au moins trois mois de détention, si son comportement durant l'exécution de la peine ne s'y oppose pas et s'il n'y a pas lieu de craindre qu'il ne commette de nouveaux crimes ou de nouveaux délits. La libération conditionnelle constitue la dernière étape de l'exécution de la sanction pénale. Elle est la règle et son refus l'exception, dans la mesure où il n'est plus exigé qu'il soit à prévoir que le condamné se conduira bien en liberté (cf. art. 38 ch. 1 al. 1 aCP), mais seulement qu'il ne soit pas à craindre qu'il commette de nouveaux crimes ou délits. Autrement dit, il n'est plus nécessaire pour l'octroi de la libération conditionnelle qu'un pronostic favorable puisse être posé. Il suffit que le pronostic ne soit pas défavorable (ATF 133 IV 201 consid. 2.2). Le pronostic à émettre doit être posé sur la base d'une appréciation globale, prenant en considération les antécédents de l'intéressé, sa personnalité, son comportement en général et dans le cadre des délits qui sont à l'origine de sa condamnation, le degré de son éventuel amendement, ainsi que les conditions dans lesquelles il est à prévoir qu'il vivra (ATF 133 IV 201 consid. 2.3 et les références citées).

2.2. Un risque de récidive étant inhérent à toute libération, qu'elle soit conditionnelle ou définitive, pour déterminer si l'on peut courir ce risque, il faut, non seulement, prendre en considération le degré de probabilité qu'une nouvelle infraction soit commise, mais également l'importance du bien qui serait alors menacé (ATF
125 IV 113 consid. 2a). Ainsi, le risque de récidive que l'on peut admettre est moindre si l'auteur s'en est pris à la vie ou à l'intégrité corporelle de ses victimes que s'il a commis, par exemple, des infractions contre le patrimoine (ATF 133 IV 201 consid. 2.3). Il y a également lieu de rechercher si la libération conditionnelle, éventuellement assortie de règles de conduite et d'un patronage, ne favoriserait pas mieux la resocialisation de l'auteur que l'exécution complète de la peine (ATF
124 IV 193 consid. 4d/aa/bb).

2.3. En l'espèce, la condition objective d'une libération conditionnelle est réalisée. Les préavis du SAPEM, du Ministère public et de la prison sont favorables, les deux premiers subordonnant toutefois une telle libération au renvoi du recourant, qui fait l’objet d’une expulsion judiciaire d’une durée de 5 ans. Devant la Chambre de céans, le Ministère public s’en est rapporté à justice.

Il ne peut être dit que le comportement du recourant en détention a donné satisfaction, vu les neuf sanctions qui ont émaillé son parcours à la prison de J______ puis à B______. Le fait qu’il se comporte dans ce second établissement correctement à l’atelier dans lequel il travaille ne saurait occulter qu’il a ainsi été sanctionné notamment pour un comportement violent, à l’instar de diverses condamnations dont il a fait l’objet, dont celle lui valant son incarcération actuelle. S’y ajoutent des détention et consommations de stupéfiants encore récentes.

Le SPI a, dans son évaluation criminologique, retenu un risque de récidive générale élevé et de comportements violents modéré. Le recourant a fait l'objet de plusieurs condamnations pour des infractions graves, dont avec usage de la violence, à savoir à I______ [France], en juin 2020, pour vol avec violence et, en août 2020, pour vol aggravé par deux circonstances. S’y ajoute sa condamnation dans le canton de Bâle en novembre 2021, pour vol simple. Il n’a certes pas encore bénéficié d'une libération conditionnelle en Suisse, mais le sursis lui a été accordé dans le cadre de ses condamnations de juin 2020 (I______) et novembre 2021 (Bâle), ne l'a pas dissuadé de commettre une nouvelle infraction à I______, ce qui lui a valu une peine privative de liberté d’un an et 3 mois en août 2020, puis, à Genève, en juin 2021 et mars 2022, la peine privative de liberté de 36 mois infligée le 24 novembre 2022 par le Tribunal correctionnel pour brigandage et tentative de vol en bande notamment qu'il purge actuellement.

Comme retenu à juste titre par le TAPEM, son passage en Grande-Bretagne et en Irlande entre 2013 et 2019 ne s’est pas déroulé sans heurt, puisqu’il a été condamné dans le premier de ces pays en 2014 pour vol et tentative de vol, et a reconnu qu’il y avait sombré dans la délinquance. Ceci ne correspond pas à un comportement "pro social".

Ses projets sont des plus vagues et non suffisamment étayés. Si le recourant affirme qu'un ami vivant en Irlande pourrait l’héberger et l’aider à trouver du travail, cette situation ne semble pas différente de celle qui devait prévaloir alors que celui-ci a décidé de venir en Suisse, après un passage à I______, où il a donc été condamné deux fois en 2020 pour des infractions visant le patrimoine d’autrui. Il n'a pas prétendu qu'il aurait alors eu un revenu régulier. Le projet du recourant de vivre en Irlande et d'y travailler n'est pas suffisamment plausible au vu de son absence d'autorisation de séjour et de sa méconnaissance même quant à la possibilité d’en obtenir une. Il sera relevé à cet égard que ne figurent à la procédure que des documents de l'automne 2017 en lien avec sa demande d'asile. Quant à la femme, avec laquelle il dit être marié religieusement, elle vit actuellement au Cambodge pour des raisons professionnelles et il ne démontre pas qu’elle entendrait effectivement déplacer son centre de vie en Irlande pour le cas où lui-même serait amené à y retourner. Il sera relevé s’agissant de cette relation que le recourant est détenu depuis plus de deux ans et qu’il ne remet pas en cause le fait qu’il n’a reçu en détention que des visites de son conseil.

Il ressort de ces éléments qu’il ne propose aucun projet de vie suffisant à renverser le pronostic qui doit être qualifié de clairement défavorable.

Pour le surplus, il n’appartient pas à la Chambre de céans de décider dans quel pays le recourant devrait à terme être renvoyé, étant rappelé qu’il fait l’objet d’une expulsion judiciaire.

Les conditions d'une mise en liberté conditionnelle ne sont ainsi pas réalisées.

Justifié, le jugement querellé sera donc confirmé.

3.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 900.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03), étant précisé que même lorsque qu'il obtient l'assistance judiciaire, le recourant débouté peut être condamné à prendre à sa charge les frais de la procédure dans la mesure de ses moyens (arrêt du Tribunal fédéral 6B_380/2013 du 16 janvier 2014, consid. 5).

4.             Le recourant a agi par un avocat nommé d'office par le TAPEM. Ce dernier n'a pas présenté d'état de frais. La présente décision mettant un terme à la procédure, il importe de statuer d'office sur son indemnisation, qui sera fixée ex aequo bono.

4.1. Conformément à l'art. 29 al. 3 Cst., toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit à l'assistance judiciaire gratuite, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès; elle a droit, en outre, à l'assistance judiciaire gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la sauvegarde de ses droits le requiert (arrêt du Tribunal fédéral 1B_74/2013 du 9 avril 2013 consid. 2.1 avec référence aux ATF 128 I 225 consid. 2.5.2 p. 232 s. = JdT 2006 IV 47; 120 Ia 43 consid. 2a p. 44).

4.2. L'art. 135 al. 1 CPP prévoit que le défenseur d'office est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. À Genève, ce tarif est édicté à l'art. 16 RAJ et s'élève à CHF 200.- de l’heure pour un chef d'étude (al. 1 let. c).

Seules les activités nécessaires sont retenues; elles sont appréciées en fonction, notamment, de la nature, l'importance et les difficultés de la cause, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu (art. 16 al. 2 RAJ).

Les autorités cantonales jouissent d'une importante marge d'appréciation lorsqu'elles fixent, dans la procédure, la rémunération du défenseur d'office (ATF 141 I 124 consid. 3.2; arrêt du Tribunal fédéral 6B_856/2014 du 10 juillet 2015 consid. 2.3).

4.3. Au vu de l'absence de complexité particulière du dossier, de son volume très limité et du fait que l'avocat du recourant en avait une bonne connaissance pour l'avoir plaidé devant le TAPEM, une durée de 1h30 pour son analyse et la rédaction du recours, tenant sur trois pages, apparaît adéquate.

En conclusion, la rémunération globale de Me C______ sera arrêtée à CHF 324.30, correspondant à 1h30 d'activité au tarif de CHF 200.-/heure (CHF 300.-), plus la TVA à 8.1% (CHF 24.30).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Met à la charge de A______ les frais de la procédure de recours arrêtés à CHF 900.-.

Alloue à Me C______, à la charge de l'État une indemnité de CHF 324.30, TVA à 8.1% incluse.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, au Tribunal d'application des peines et des mesures et au Ministère public.

Le communique pour information au Service de l'application des peines et mesures.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Valérie LAUBER, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

PM/179/2024

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

815.00

Total

CHF

900.00