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Décisions | Chambre pénale de recours

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PS/58/2022

ACPR/727/2022 du 18.10.2022 ( PSPECI ) , REJETE

Recours TF déposé le 18.11.2022, rendu le 13.02.2023, REJETE, 6B_1392/2022, 6B_1395/2022
Descripteurs : DROIT D'OBTENIR UNE DÉCISION;EXPULSION(DROIT DES ÉTRANGERS);RENVOI(DROIT DES ÉTRANGERS);REPORT(DÉPLACEMENT);ASSISTANCE JUDICIAIRE
Normes : CP.66.letd

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

PS/58/2022 ACPR/727/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mardi 18 octobre 2022

 

Entre

 

A______ (alias B______), actuellement détenu à l'établissement fermé de C______, comparant par Me D______, avocat, ______ Genève,

recourant,

pour déni de justice

 

et

 

L'OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS, Service asile et départ, Secteur mesures, route de Chancy 88, case postale 2652, 1211 Genève 2,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.

 


EN FAIT :

A. a. Par acte déposé le 17 août 2022, B______ (alias A______) recourt pour déni de justice de l'Office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM).

Le recourant conclut à ce qu'il soit constaté que l'OCPM n'avait pas rendu de décision de non-report de son expulsion "relative à la décision d'expulsion pénale du 10 octobre 2017", ce qui était constitutif d'un déni de justice, et à ce qu'il lui soit enjoint de rendre une telle décision. Il conclut également à l'assistance judiciaire.

b. Par ordonnance du 19 août 2022 (OCPR/47/2022), la Direction de la procédure de la Chambre de céans a admis la requête de mesures provisionnelles de B______ et enjoint à l'OCPM de suspendre le renvoi de Suisse de l'intéressé fondé sur le jugement du 10 octobre 2017 jusqu'à droit jugé sur le recours.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Par jugement du 10 octobre 2017 (JTCO/125/2017), définitif et exécutoire, le Tribunal correctionnel a ordonné l'expulsion judiciaire de B______ (alias A______) pour une durée de 5 ans (art. 66a al. 1 let. o CP).

b. Par courrier du 16 mars 2018 notifié par pli recommandé le lendemain à B______ à la prison de E______, l'OCPM lui a imparti, à l'issue de sa libération, un délai au 10 avril 2018 pour quitter la Suisse en s'annonçant au poste-frontière au moyen de la carte d'annonce préremplie jointe au pli, à défaut de quoi il s'exposait à une détention administrative en vue de son expulsion ainsi qu'à une poursuite pour rupture de ban.

c.a. Contrôlé le 5 juin 2018 par la police à l'arrêt de tram "Gravière", B______ a admis connaître l'expulsion judiciaire dont il faisait l'objet, mais n'avait pas quitté le territoire Suisse à cause d'un problème de santé à sa main gauche. 

c.b. Par jugement du 12 mars 2019 (JTDP/318/2019), le Tribunal de police a ainsi déclaré le précité coupable de rupture de ban (art. 291 al. 1 CP) pour avoir, entre le 11 avril 2018, lendemain du terme du délai de départ et le 5 juin 2018, date de son arrestation, séjourné sur le territoire suisse malgré la décision d'expulsion prononcée le 10 octobre 2017, et l'a condamné à une courte peine privative de liberté de 120 jours, sous déduction de 2 jours de détention avant jugement. Ce jugement a été confirmé par arrêt de la Chambre pénale d'appel et de révision du 15 novembre 2019 (AARP/402/2019).

d.a. B______ fait l'objet d'une seconde mesure d'expulsion, définitive et exécutoire, pour une durée de 20 ans, prononcée par le Tribunal correctionnel le 15 septembre 2021 (JTCO/98/2021).

d.b. Par acte du 4 août 2022, il a recouru contre la décision de non-report de ladite expulsion rendue par l'OCPM du 2 précédent. Cette procédure fait l'objet de la PS/1______/2022.

d.c. Par ordonnance du 5 août 2022 rendue dans ladite procédure, la Direction de la procédure de la Chambre de céans a accordé l'effet suspensif au recours.

e. Le 17 août 2022 au matin, l'OCPM a organisé le renvoi du précité en avion vers le Nigéria.

f.a. Par courrier de la veille, B______ (alias A______) s'était plaint auprès de la Chambre de céans, avec copie à l'OCPM, que nonobstant l'ordonnance sur effet suspensif rendue le 5 août 2022, l'OCPM s'apprêtait à exécuter son renvoi de Suisse.

f.b. Par courriel du même jour, l'OCPM avait indiqué que le renvoi critiqué était fondé sur l'expulsion judiciaire prononcée par le Tribunal correctionnel le 10 octobre 2017, dont l'exécution – non contestée – avait été ordonnée le 16 mars 2018. L'effet suspensif prononcé le 5 août 2022 ne visant pas cette expulsion, celle-ci pouvait être mise en oeuvre.

g. Le renvoi de l'intéressé en avion vers le Nigéria prévu n'a pas eu lieu, celui-ci ayant tenté de se suicider à l'aéroport en avalant une lame de rasoir.

h. Par arrêt rendu ce jour, la Chambre de céans a rejeté le recours interjeté par B______ (alias A______) le 4 août 2022, dans la PS/1______/2022. (ACPR/726/2022).

C. a. À l'appui de son recours, B______ (alias A______), qui se revendique ressortissant soudanais né le ______ 1989, se plaint de ce que le courrier de l'OCPM du 16 mars 2018 ne vaut pas décision de non-report d'expulsion fondée sur le jugement du Tribunal correctionnel du 10 novembre (recte : octobre) 2017, étant précisé qu'il avait effectivement quitté le territoire suisse le 10 avril 2018.

Il reprend sinon les mêmes griefs exposés à l'appui de son recours du 4 août 2022, à savoir, en substance, que son renvoi vers le Nigéria était inexécutable, illicite et inexigible, dès lors que sa véritable identité et nationalité n'était pas établie.

b. Bien que dûment interpellé, l'OCPM n'a pas réagi ni formulé d'observations.

c. Le Ministère public s'en est rapporté à justice.

d. Le recourant a renoncé à répliquer.

EN DROIT :

1.             1.1. Le recours a été interjeté selon la forme prescrite (art. 393 al. 1 et 396 al. 1 CPP), par le condamné, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), pour déni de justice de l'OCPM (art. 42 al. 1 let. a LaCP cum art. 5 al. 2 let. c et 40 al. 1 LaCP). Il n'est soumis à aucun délai (art. 396 al. 2 CPP).

1.2. La procédure devant la Chambre de céans est régie par le CPP, applicable au titre de droit cantonal supplétif (art. 42 al. 2 LaCP).

2.             Dans son arrêt rendu ce jour dans la PS/1______/2022, la Chambre de céans a répondu aux griefs du recourant en lien avec l'exécution de son expulsion vers le Nigéria, fondée sur le jugement du Tribunal correctionnel du 15 septembre 2021, de sorte qu'il y sera renvoyé en tant que de besoin.

3.             3.1. À teneur de l'art. 5 al. 1 CPP, les autorités pénales engagent les procédures pénales sans délai et les mènent à terme sans retard injustifié. Cette disposition concrétise le principe de célérité, et prohibe le retard injustifié à statuer, posé par l'art. 29 al. 1 Cst., qui garantit notamment à toute personne, dans une procédure judiciaire ou administrative, le droit à ce que sa cause soit traitée dans un délai raisonnable. Un déni de justice ou un retard injustifié est établi lorsqu'une autorité s'abstient tacitement ou refuse expressément de rendre une décision dans un délai convenable (Message concernant la révision totale de l'organisation judiciaire fédérale, FF 2001 4132). Une autorité commet un déni de justice formel et viole l'art. 29 al. 1 Cst. lorsqu'elle n'entre pas en matière dans une cause qui lui est soumise dans les formes et délais prescrits, alors qu'elle devrait s'en saisir (ATF 142 II 154 consid. 4.2 p. 157; 135 I 6 consid. 2.1 p. 9; 134 I 229 consid. 2.3 p. 232).

3.2. En l'espèce, on relèvera tout d'abord que contrairement à ce qu'il allègue ici, le recourant n'a pas quitté la Suisse dans le délai à lui imparti par l'OCPM, au 10 avril 2018, pour ce faire, ce qu'il a du reste lui-même admis par-devant la police dans la procédure ayant donné lieu au jugement du Tribunal de police du 12 mars 2019 (JTDP/318/2019).

Le recourant se plaint de ce que l'OCPM n'a pas rendu une décision de non-report d'expulsion fondée sur le jugement du 10 octobre 2017, avant d'organiser son renvoi prévu le 17 août 2022 – lequel a finalement avorté.

Il est constant que l'art. 66d CP, qui prévoit le report de l'expulsion obligatoire selon l'art. 66a CP à certaines conditions, est entré en vigueur le 1er octobre 2016.

À Genève, l'OCPM est chargée de statuer sur le report de l'exécution de l'expulsion (art. 5 al. 2 let. c LaCP).

L'OCPM semble soutenir que son courrier du 16 mars 2018 vaut décision de non-report d'expulsion.

Or, celui-ci constitue une injonction faite au recourant de quitter la Suisse dans un certain délai. Il ne statue pas sur les motifs qui pourraient faire obstacle au renvoi, énumérés à l'art. 66d CP.

Cela étant, on ne saurait voir un déni de justice là où l'autorité a estimé, même à tort, avoir rendu une décision valable de non-report d'expulsion.

Dans une telle hypothèse, c'est le renvoi fondé sur le jugement du 10 octobre 2017 qui aurait dû être attaqué – une exception à l'irrecevabilité d'un recours contre un ordre d'exécution, soit un acte matériel, étant admise lorsque celui-ci met en cause des droits constitutionnels inaliénables ou imprescriptibles (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2e éd., Bâle 2019, n. 35-36 ad art. 439 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_533/2018 du 6 juin 2018 consid. 1.1 et les références citées), ce qui est le cas ici.

4. Le recours pour déni de justice ne peut ainsi qu'être rejeté.

5. Le recourant sollicite l'assistance judiciaire pour le recours.

5.1. Conformément à l'art. 29 al. 3 Cst., toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit à l'assistance judiciaire gratuite, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès; elle a droit en outre à l'assistance judiciaire gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la sauvegarde de ses droits le requiert (arrêt du Tribunal fédéral 1B_74/2013 du 9 avril 2013 consid. 2.1 avec référence aux ATF 128 I 225 consid. 2.5.2 p. 232 s. = JdT 2006 IV 47; 120 Ia 43 consid. 2a p. 44).

5.2. En l'espèce, il peut être supposé que le recourant est indigent, compte tenu de sa situation personnelle. En outre, on peut admettre que la cause présentait une certaine complexité pour un profane.

Dans ces circonstances, la désignation d'un défenseur d'office devant l'instance de recours apparaît nécessaire. Le recourant en sera ainsi pourvu en la personne de l'avocat par lequel il procède déjà (art. 133 al. 2 CPP).

Le recourant n'a toutefois pas chiffré ni, a fortiori, détaillé l'activité de son conseil pour la procédure par-devant la Chambre de céans.

Compte tenu du recours, qui reprend majoritairement les mêmes développements que ceux figurant dans le recours interjeté le 4 août 2022 dans la PS/1______/2022, une indemnité ex aequo et bono de CHF 250.-, TVA à 7.7% comprise, sera allouée à Me D______ et mise à la charge de l'État.

6. Le recourant, bien qu'au bénéfice de l'assistance juridique, succombe. Il supportera dès lors les frais de la procédure de recours (art. 428 al. 1 CPP; arrêts du Tribunal fédéral 1B_203/2011 du 18 mai 2011 consid. 4 et 1B_372/2014 du 8 avril 2015 consid. 4.6 [arrêts qui rappellent que l'autorité de deuxième instance est tenue de dresser un état de frais pour la procédure de recours, sans égard à l'obtention de l'assistance judiciaire]), qui seront fixés en totalité à CHF 300.-, émolument de décision compris (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Met A______ (alias B______) au bénéfice de la défense d'office pour la procédure de recours et désigne Me D______ à ce titre.

Alloue à Me D______, à la charge de l'État, une indemnité de CHF 250.- TTC.

Condamne B______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 300.-.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, à l'OCPM et au Ministère public.

Le communique pour information à la police (Brigade migration et retour).

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Monsieur Xavier VALDES, greffier.

 

Le greffier :

Xavier VALDES

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

PS/58/2022

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

20.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

205.00

-

CHF

Total (Pour calculer : cliquer avec bouton de droite sur le montant total puis sur « mettre à jour les champs » ou cliquer sur le montant total et sur la touche F9)

CHF

300.00