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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/25227/2022

AARP/335/2024 du 24.09.2024 sur JTDP/1668/2023 ( PENAL ) , ADMIS

Descripteurs : INSOUMISSION À UNE DÉCISION DE L'AUTORITÉ;FRAIS JUDICIAIRES
Normes : CP.292; CPP.398.al4; CPP.428; CPP.429
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/25227/2022 AARP/335/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 24 septembre 2024

 

Entre

A______, domicilié ______, comparant par Me B______, avocate,

appelant,

 

 

contre le jugement JTDP/1668/2023 rendu le 20 décembre 2023 par le Tribunal de police,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement JTDP/1668/2023 du 20 décembre 2023, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a reconnu coupable d'insoumission à une décision de l'autorité (art. 292 du Code pénal [dans sa teneur au 1er juin 2022] [aCP]) et l'a condamné à une amende de CHF 300.-, une peine privative de liberté de substitution étant fixée à trois jours au cas où l'amende n'était pas payée, et les frais mis à sa charge à hauteur de CHF 510.-, plus émolument complémentaire de jugement de CHF 600.-, ses conclusions en indemnisation étant rejetées.

A______ entreprend intégralement ce jugement, concluant à son acquittement, les frais de la procédure préliminaire et de première instance, ainsi que ceux d'appel devant être laissés à la charge de l'État. Il demande qu'une indemnité pour ses frais d'avocat d'un montant de CHF 7'894.10 TTC lui soit octroyée pour l'entier de la procédure (soit 18h15 à CHF 400.-/h, hors débours et TVA) (art. 429 al. 1 let. a du Code de procédure pénale [CPP]).

b. Selon l'ordonnance pénale du 28 mars 2023, il est reproché ce qui suit à A______ :

À Genève, les 14 et 21 novembre 2022, il a omis de respecter l'ordonnance sur mesures superprovisionnelles du Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (TPAE) du 23 décembre 2021, laquelle lui faisait notamment "interdiction de s'approcher de son fils dans un périmètre de 200 mètres de son lieu de placement, de son école ou tout autre lieux qu'il fréquente (…)", celle-ci ayant été prononcée sous la menace de la peine prévue à l'art. 292 CP, en se rendant au sein de l'école d'espagnol de son fils et en interagissant avec le chauffeur en charge du transport de l'enfant, alors que ce dernier était présent dans le véhicule.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. Le 24 novembre 2022, le Service de protection des mineurs (SPMi) portait à la connaissance du Procureur général des faits qu'il dénonçait comme valant insoumission à une décision de justice de la part de A______, père du mineur C______, né le ______ 2011, qu'il avait dû placer en urgence, et pour lequel il avait fallu organiser les relations personnelles avec ses parents.

a.a. Le 11 [recte : 10] novembre 2021, le Tribunal de première instance (TPI) avait notamment décidé, sur mesures superprovisionnelles, de retirer la garde du mineur à ses parents, de le placer en foyer, de réserver provisoirement aux parents un droit de visite devant s'exercer à raison d'une rencontre par semaine pour chacun d'eux, en présence d'un tiers intervenant professionnel, et d'instaurer une curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles.

a.b. Sur mesures superprovisionnelles du 23 décembre 2021, le TPAE avait fait interdiction à A______ de s'approcher de son fils dans un périmètre de moins de 200 mètres de son lieu de placement, de son école ou tout autre lieu qu'il fréquentait, hors visites prévues dans le cadre de [consultations familiales] D______, cette interdiction étant assortie de la menace de la peine prévue par l'art. 292 CP.

a.c. Selon le SPMi, le placement du mineur avait été ordonné au vu du risque de rupture du lien mère-fils et du manque de collaboration du père pour préserver ce lien. Cet éloignement avait été bénéfique pour l'enfant, étant relevé que la collaboration avec la mère était bonne, au contraire de celle avec A______, qui était inexistante, outre que le précité combattait ce placement "sans remise en question possible".

a.d. Le 15 novembre 2022, le SPMi avait été informé par la directrice de l'école d'espagnol fréquentée par C______ que son père était venu le voir et se serait entretenu avec lui le 14 novembre 2022.

Le SPMi avait donc, à l'appui d'un courrier du 18 novembre 2022 adressé à ME______, conseil de A______, rappelé au précité l'interdiction qui lui avait été faite d'approcher son fils, alors que si celle-ci devait être enfreinte à nouveau, une dénonciation serait alors émise.

a.e. Le 22 novembre 2022, le SPMi a appris, par une éducatrice du [foyer] F______ où C______ était placé, que son père était venu la veille à son contact, au moment où il était pris en charge par un chauffeur de l'entreprise G______ pour se rendre à son cours d'espagnol. Ce dernier avait rapporté que A______ s'était manifesté de manière agressive, ayant adopté une attitude "intimidante, différente de la précédente fois". Il avait estimé que si A______ "tombait sur une personne qui ne parle pas sa langue, il pourrait devenir violent". Le mineur avait rapporté à son éducatrice qu'il ne se sentait pas bien d'avoir vu son père et de l'avoir entendu menacer le chauffeur.

b. Entendu par la police le 20 février 2023, A______ a fait part de ce qu'il contestait le placement de son enfant mis en œuvre en novembre 2021, outre qu'ultérieurement, il lui avait été fait interdiction de tout contact avec C______ depuis août 2022. La reprise du lien père-fils aurait ensuite dû être organisée par le SPMi dans les meilleurs délais, mais les choses avaient traîné. Après plus de quatre mois sans avoir vu son fils, il n'en pouvait "légitimement plus". Il avait alors décidé de se rendre à son école. Il avait demandé l'accord de l'enseignante avant de s'approcher de son fils, de lui dire qu'il l'aimait et de le prendre dans ses bras pour lui faire un bisou. Son fils lui avait glissé qu'il était très malheureux de ne plus le voir. Le 21 novembre 2022, il avait aperçu de loin le véhicule amenant C______ à son école, lequel était stationné. Il avait constaté que son fils y était enfermé avec le chauffeur jusqu'à ce que les cours débutent. Il avait donc attendu que C______ en sorte, puis s'était dirigé vers son fils afin de le prendre dans ses bras et de lui faire un bisou. Il contestait s'être montré agressif ou intimidant envers le chauffeur.

Dans ce contexte, il estimait ne pas devoir faire l'objet d'une condamnation, relevant que son fils souffrait de la situation.

Il a produit divers documents en lien avec la procédure de placement de C______, illustrant les difficultés au bon rétablissement d'un droit de visite durant l'automne 2022, ainsi que divers articles concernant des dysfonctionnements au SPMi.

c. À l'audience du Ministère public du 7 juin 2023, A______ a maintenu ses explications. Son fils avait été placé abusivement depuis 19 mois et il en pleurait "tous les soirs". Il avait été privé de contact avec lui durant neuf mois et n'avait pu le revoir régulièrement que depuis mars 2023. Il n'avait jamais cherché à enlever son fils et, en réalité, on lui reprochait d'être allé le voir. Il demandait à être exempté de peine

d.a. Devant le TP, A______ a admis être allé embrasser son fils à deux reprises aux dates retenues dans l'ordonnance pénale, alors qu'il avait connaissance de la décision du TPAE lui interdisant de s'approcher de son enfant. Il considérait néanmoins ne pas avoir violé une norme pénale ou contrevenu à un interdit dans la mesure où le "système mis en place par le SPMi génèr[ait] des décisions arbitraires et que des enfants [étaient] arrachés sans droit à leurs parents". La décision du TPAE n'en était que la concrétisation dès lors qu'il considérait que cette autorité n'était que la "chambre d'enregistrement des volontés du SPMi". À l'avenir, il entendait respecter les interdictions du TPAE.

d.b. A______ a versé au dossier de nombreux documents illustrant le "système" qu'il évoquait, et notamment un extrait du courrier du 23 décembre 2021 que le SPMi avait adressé au TPAE, sollicitant de ce dernier le prononcé de mesures superprovisionnelles, sous la menace de la peine prévue à l'art. 292 CP, lesquelles avaient été autorisées le jour-même par la Présidente du TPAE, l'ordonnance étant rendue au bas dudit courrier sous la forme d'un tampon "Pour les motifs exposés ci-dessus, que le TPAE fait siens", avec sa signature.

Le TP, voire l'appelant, vu la mention manuscrite sur la pièce, a apporté à la procédure l'intégralité de ce prononcé du 23 décembre 2021, immédiatement exécutoire et non sujet à recours, notifié aux parents de C______ le jour-même, par pli recommandé, et communiqué au SPMi pour son information.

Il résulte encore de ces documents qu'une procédure civile (en mesures protectrices de l'union conjugale) oppose les parents de C______ depuis 2019 à tout le moins, le TPI ayant ordonné la mise en œuvre d'une expertise familiale le 19 août 2020, de sorte à déterminer l'aptitude des parents à exercer l'autorité parentale, la garde ou à se voir fixer un droit de visite sur leur fils, et cela dans l'intérêt de l'enfant.

C. a. La juridiction d'appel a ordonné l'instruction de la cause par la voie écrite, conformément à l'art. 406 al. 1 let. c CPP.

b.a. Selon son mémoire d'appel, A______ persiste dans ses conclusions et produit copie d'une ordonnance rendue le 13 avril 2022 par le TPAE.

Dans la mesure où l'injonction qui lui avait été faite émanait d'un juge civil, le juge pénal était autorisé, à son opinion, à en contrôler librement la légalité, d'autant plus que la décision prise – une décision sur mesures superprovisionnelles – n'était pas susceptible de recours. Aucun contrôle de sa légalité n'était donc possible jusqu'à décision sur mesures provisionnelles ou au fond validant celles-ci, le cas échéant. Or, le TPAE, dans son ordonnance sur mesures provisionnelles du 13 avril 2022, n'avait pas reconduit l'interdiction faite à l'appelant de s'approcher de son fils sous la menace de la sanction pénale de l'art. 292 CP. Dans la mesure où cette ordonnance, rendue après audition des parties, venait se substituer aux mesures précédentes, lesquelles n'étaient plus d'actualité ni exécutoires, aucune infraction pénale ne pouvait avoir été commise par A______ sur la base d'une décision qui n'existait plus. Aussi, sa condamnation qui se fondait sur une telle décision violait la loi et ce dernier devait être acquitté.

b.b. A______, conscient que la peine menace se limitait à une contravention, sollicite néanmoins la prise en charge de ses frais d'avocat, faisant valoir que s'il avait assuré seul les premières étapes de sa défense pénale, les questions juridiques soulevées n'étaient pas à la portée d'un "justiciable lambda" et nécessitaient l'appui d'un conseil professionnel, en particulier s'agissant du "mécanisme et [de] l'enchaînement procédural des décisions prises sur mesures superprovisionnelles et leur validité limitée dans le temps". L'assistance d'un avocat s'était donc avérée nécessaire pour assurer le "minimum indispensable à sa défense".

c. Invité à se déterminer, le MP s'est référé à ses conclusions sur appel, sollicitant le rejet de celui-ci et la confirmation du jugement attaqué.

d. Le TP n'a pas formulé d'observations, se référant intégralement au jugement rendu.

e. Par courrier du 12 septembre 2024, auquel elles n'ont pas réagi, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger sous dizaine.


 

EN DROIT :

1. 1.1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 CPP).

La Chambre n'examine que les points attaqués du jugement de première instance (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP), sans être liée par les motifs invoqués par les parties ni par leurs conclusions, à moins qu'elle ne statue sur une action civile (art. 391 al. 1 CPP).

1.2. Conformément à l'art. 129 al. 4 LOJ, lorsque des contraventions font seules l'objet du prononcé attaqué et que l'appel ne vise pas une déclaration de culpabilité pour un crime ou un délit, la direction de la procédure de la juridiction d'appel est compétente pour statuer.

1.3. En matière contraventionnelle, l'appel ne peut être formé que pour le grief selon lequel le jugement est juridiquement erroné ou l'état de fait a été établi de manière manifestement inexacte ou en violation du droit. Aucune nouvelle allégation ou preuve ne peut être produite (art. 398 al. 4 CPP).

Le pouvoir d'examen de l'autorité d'appel est ainsi limité dans l'appréciation des faits à ce qui a été établi de manière arbitraire (arrêt du Tribunal fédéral 6B_362/2012 du 29 octobre 2012 consid. 5.2). En outre, aucune allégation ou preuve nouvelle ne peut être produite devant l'instance d'appel (art. 398 al. 4, 2e phrase CPP). Il s'agit là d'une exception au principe du plein pouvoir de cognition de l'autorité de deuxième instance qui conduit à qualifier d'appel "restreint" cette voie de droit (arrêt du Tribunal fédéral 1B_768/2012 du 15 janvier 2013 consid. 2.1).

Le libre pouvoir de cognition dont elle dispose en droit confère à l'autorité cantonale la possibilité, si cela s'avère nécessaire pour juger du bien-fondé ou non de l'application d'une disposition légale, d'apprécier des faits que le premier juge a omis d'examiner, lorsque ceux-ci se révèlent être pertinents (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1247/2013 du 13 mars 2014 consid. 1.3).

2.1. Selon l'art. 292 aCP, celui qui ne se sera pas conformé à une décision à lui signifiée, sous la menace de la peine prévue au présent article, par une autorité ou un fonctionnaire compétents sera puni d'une amende.

L'art. 292 CP vise à assurer le respect des injonctions des autorités (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1B_253/2019 du 11 novembre 2019 consid. 5.1 ; 1B_250/2008 du 13 mai 2009 consid. 6).

La définition de la décision au sens de l'art. 292 CP est la même que celle qui a été développée en droit administratif. Il doit donc s'agir d'une décision concrète de l'autorité, prise dans un cas particulier et à l'égard d'une personne déterminée et qui a pour objet de régler une situation juridique de manière contraignante (ATF
147 IV 145 consid. 2.1 ; 131 IV 32 consid. 3). La décision doit par ailleurs avoir été prise par une autorité ou un fonctionnaire compétent, cette compétence s'entendant en raison du lieu, de la matière et de l'attribution (ATF 147 IV 145 consid. 2.1 ; 122 IV 340 consid. 2).

Dans son arrêt publié au recueil officiel 147 IV 145, le Tribunal fédéral rappelle que le pouvoir du juge pénal d'examiner à titre préjudiciel la validité des décisions administratives qui sont à la base d'infractions pénales se détermine selon trois hypothèses. En l'absence de voie de recours contre la décision administrative, le juge pénal peut revoir librement la décision quant à sa légalité, l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation notamment. Lorsqu'un tribunal administratif s'est déjà prononcé, le juge pénal ne peut, en revanche, en aucun cas revoir la légalité de la décision administrative. Enfin, si un tel recours eût été possible mais que l'accusé ne l'ait pas interjeté ou que l'autorité saisie n'ait pas encore rendu sa décision, l'examen de la légalité par le juge pénal est limité à la violation manifeste de la loi et à l'abus manifeste du pouvoir d'appréciation (cf. ATF 129 IV 246 consid. 2.1 et 2.2 ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 6B_1006/2008 du 5 mars 2009 consid. 3.3.5.2 et les références citées). Lorsque la décision émane d'une juridiction civile, la question de savoir si et dans quelle mesure le juge pénal peut revoir sa légalité a été laissée ouverte par le Tribunal fédéral (cf. ATF 121 IV 29 consid. 2a p. 31 s.). En tous les cas, en supposant que le juge pénal ne soit pas lié par la décision de la juridiction civile, son pouvoir d'examen serait limité à l'arbitraire (cf. arrêts du Tribunal fédéral 6B_449/2015 du 2 mai 2016 consid. 3 ; 6B_547/2012 du 26 mars 2013 consid. 2.1).

L'insoumission doit être intentionnelle. L'intention suppose la connaissance de l'injonction, de sa validité et des conséquences pénales de l'insoumission. Le dol éventuel suffit (ATF 147 IV 145 consid. 2.1 ; 119 IV 238 consid. 2a).

3. 3.1. En principe, aucune nouvelle preuve ne peut être produite devant la Cour de céans, lorsqu'elle statue en matière contraventionnelle.

Cela étant, l'ordonnance sur mesures provisionnelles prononcée par le TPAE l'a été en date du 13 avril 2022, soit avant même que l'ordonnance pénale ayant frappé l'appelant ne soit rendue, a fortiori avant que le TP ne siège. Certes, l'appelant n'a pas formellement requis devant le premier juge l'apport de ladite ordonnance, mais celle-ci aurait pu être portée au dossier avant que la cause ne soit tranchée, d'autant que la décision sur mesures superprovisionnelles y avait été versée. Le dire, relativise ainsi la nouveauté du document.

Par ailleurs, refuser en appel l'apport au dossier d'une pièce existante, qui aurait pu être considérée avant le premier prononcé pénal vu sa pertinence, serait constitutif de formalisme excessif, s'agissant d'une preuve à décharge.

Il s'ensuit qu'il n'y a pas de motif fondé à écarter cette pièce du dossier.

3.2. Le TPAE, autorité compétente en matière de protection des mineurs, était légitimé à prendre, dans l'urgence, une décision concrète, dans un cas particulier, à l'égard d'une personne déterminée et qui avait pour objet de régler une situation juridique de manière contraignante, soit le fait d'interdire à l'appelant de s'approcher de son fils dans un périmètre de moins de 200 mètres de son lieu de placement, le temps pour celle-ci de mettre en place les conditions cadre visant à évaluer les compétences parentales à la suite du retrait de garde de C______ et restaurer un droit de visite protégé (cf. art. 314 al. 1 du Code civil [CC] cum art. 445 al. 2 CC, art. 315a al. 3 ch. 2 CC).

Sa décision avait été dûment notifiée à l'appelant, qui savait donc qu'il ne devait s'approcher de son fils jusqu'à nouvel ordre, sous peine de commettre un acte d'insoumission puisque ce prononcé comportait la mention de la menace de la peine prévue par l'art. 292 CP.

Il n'y avait donc aucun motif pour le juge pénal à revoir la validité d'une telle décision, outre que son pouvoir d'examen est limité au seul arbitraire dans une telle constellation.

Toutefois, force est de constater que le TPAE a rendu, après audition des parties, une nouvelle ordonnance sur mesures provisionnelles, celle-ci se substituant au prononcé précédent, lequel n'avait plus cours. Or, dans sa décision du 13 avril 2022, s'agissant de l'exercice de son droit de visite sur C______ par l'appelant tel que précisé sous chiffres 2 et 3 de son dispositif, l'autorité n'a plus assorti ses modalités de la menace de la peine prévue par l'art. 292 CP.

Il s'ensuit qu'en s'approchant de C______ les 14 et 21 novembre 2022, ce que l'appelant ne conteste pas, celui-ci a, tout au plus, trahi les modalités du droit de visite mis en place, mais ne s'est pas exposé à la peine prévue pour insoumission suite à ses incartades, ce qui doit conduire à son acquittement.

4. L'appel étant admis, il ne sera pas perçu de frais (art. 428 CPP a contrario).

Les frais afférents à la procédure préliminaire et de première instance seront laissés à la charge de l'État (art. 428 al. 3 CPP).

5. 5.1. À teneur de l'art. 429 al. 1 let. a CPP, si le prévenu est acquitté totalement ou en partie ou s’il bénéficie d’une ordonnance de classement, il a droit à une indemnité fixée conformément au tarif des avocats, pour les dépenses occasionnées par l’exercice raisonnable de ses droits de procédure.

L'allocation d'une indemnité pour frais de défense selon l'art. 429 al. 1 let. a CPP n'est pas limitée aux cas de défense obligatoire visés par l'art. 130 CPP. Elle peut être accordée dans les cas où le recours à un avocat apparaît tout simplement raisonnable. Il faut garder à l'esprit que le droit pénal matériel et le droit de procédure sont complexes et représentent, pour des personnes qui ne sont pas habituées à procéder, une source de difficultés. Celui qui se défend seul est susceptible d'être moins bien loti. Cela ne dépend pas forcément de la gravité de l'infraction en cause. On ne peut pas partir du principe qu'en matière de contravention, le prévenu doit supporter en général seul ses frais de défense. Autrement dit, dans le cadre de l'examen du caractère raisonnable du recours à un avocat, il doit être tenu compte, outre de la gravité de l'infraction et de la complexité de l'affaire en fait ou en droit, de la durée de la procédure et de son impact sur la vie personnelle et professionnelle du prévenu (ATF 138 IV 197 consid. 2.3.5 p. 203 ; ATF 143 IV 339 consid. 4.1 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1105/2014 du 11 février 2016 consid. 2.1 et 2.2). Dans les cas juridiquement simples, l'activité de l'avocat peut se limiter au minimum, à savoir tout au plus à une simple consultation (arrêt du Tribunal fédéral 6B_2/2021 du 25 juin 2021 consid. 1.1.2).

Les frais de défense doivent être pleinement indemnisés. Il appartient néanmoins au juge de vérifier concrètement que les frais engagés pour la défense du prévenu s'inscrivent dans le cadre de l'exercice raisonnable de ses droits de procédure. L'indemnité visée par l'art. 429 al. 1 let. a CPP doit correspondre au tarif usuel du barreau applicable dans le canton où la procédure se déroule (FF 2006 1057 p. 1313 ; ATF 142 IV 163 consid. 3.1.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1459/2021 du 24 novembre 2022 consid. 4.1). La Cour applique un tarif horaire maximal de CHF 450.- pour les chefs d'étude (AARP/96/2024 du 14 mars 2024 consid. 5.1.1).

5.2. En l'occurrence, même si l'on est proche d'un cas dit "bagatelle" (cf. ACPR/143/2024 du 23 février 2024 dans une cause opposant précisément l'appelant au MP), les particularités de la présente affaire peuvent encore justifier le recours à un avocat procédant d'un exercice raisonnable de ses droits par l'appelant, notamment en ce qui a trait au mécanisme des mesures provisionnelles.

À l'aune du "minimum" mesuré par le Tribunal fédéral et revendiqué par l'appelant comme étant "indispensable à sa défense", il y lieu de retenir que 10h de travail d'avocat auraient été amplement suffisantes et proportionnées aux difficultés de la cause, soit : pour la procédure préliminaire et de première instance, 1h de conférence client, 3h pour les réquisitions de preuve et la préparation aux débats, 2h pour ceux-ci et, pour la procédure d'appel, 1h pour la prise de connaissance du jugement et une conférence client, enfin 3h pour le mémoire d'appel.

En conclusion, la rémunération sera arrêtée à CHF 4'314.40 correspondant à six heures d'activité au tarif de CHF 400.-/heure et l'équivalent de la TVA au taux de 7.70%, respectivement quatre heures d'activité au même tarif et l'équivalent de la TVA au taux de 8.1%.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
L
E PRÉSIDENT :


Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/1668/2023 rendu le 20 décembre 2023 par le Tribunal de police dans la procédure P/25227/2022.

L'admet.

Annule ce jugement.

Et statuant à nouveau :

Acquitte A______ d'insoumission à une décision de l'autorité (art. 292 CP).

Laisse les frais de la procédure préliminaire et de première instance ainsi que ceux afférents à la procédure d'appel à la charge de l'État (art. 428 CPP).

Alloue à A______, en couverture de ses dépenses nécessaires, une indemnité de CHF 4'314.40, TVA incluse, couvrant la procédure préliminaire et de première instance ainsi que la procédure d'appel (art. 429 al. 1 let. a et 436 CPP).

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police ainsi qu'au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (9e chambre).

 

La greffière :

Melina CHODYNIECKI

 

Le président :

Vincent FOURNIER

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.