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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/20122/2019

AARP/270/2023 du 31.07.2023 sur JTDP/1478/2022 ( PENAL ) , REJETE

Recours TF déposé le 14.09.2023, rendu le 08.04.2024, REJETE
Descripteurs : EXCÈS DE VITESSE;VITESSE MAXIMALE
Normes : LCR.90.al2
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/20122/2019 AARP/270/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 27 juillet 2023

 

Entre

A______, domicilié ______, comparant par Me Hrant HOVAGEMYAN, avocat, DEMOLE HOVAGEMYAN, rue Charles-Bonnet 2, case postale, 1211 Genève 3,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/1478/2022 rendu le 29 novembre 2022 par le Tribunal de police,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 29 novembre 2022, par lequel le Tribunal de police (TP), statuant par défaut, l'a reconnu coupable de violation grave des règles de la circulation routière (art. 90 al. 2 de la loi sur la circulation routière [LCR]) et condamné à une peine privative de liberté de dix mois, avec sursis et délai d'épreuve de trois ans, frais de la procédure de CHF 1'072.- à sa charge.

A______ entreprend ce jugement dans son ensemble, concluant à son acquittement, à son indemnisation pour ses frais de défense, frais à la charge de l'État. À titre de réquisition de preuve, il réclame "des éléments de preuve tendant à établir l'inexistence de la zone de travaux dans la direction que prenait la voiture".

b. Selon l'acte d'accusation du 11 février 2021, il est reproché à A______ ce qui suit :

Le 18 juin 2019, à 09h49, à la hauteur du n° 53 de la route 2______, à E______, il a circulé, en direction de la route 3______, au volant du véhicule immatriculé GE 1______, à la vitesse de 69 km/h, marge de sécurité de 5 km/h déduite, alors que la vitesse maximale autorisée à cet endroit était de 30 km/h.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. Le mardi 18 juin 2019 à 09h49, le véhicule en cause a été capté par un radar mobile à une vitesse de 74 km/h, soit à 69 km/h déduction faite de la marge de sécurité, sur les lieux décrits dans l'acte d'accusation. Ce jour-là, la route était sèche, le trafic fluide, la visibilité et les conditions météorologiques diurnes bonnes. La route, se trouvant en localité, comportait deux voies de circulation ainsi qu'une bande cyclable dans le sens opposé.

b. À teneur du rapport de renseignements du 17 septembre 2019, le véhicule concerné était détenu par la société B______ SÀRL. Contactée téléphoniquement le jour des faits, C______, associée-gérante de ladite société, avait expliqué que le conducteur était vraisemblablement son fils, A______, vu l'heure à laquelle les faits s'étaient déroulés. Quelques minutes plus tard, A______ avait confirmé cela à la police par téléphone. Une audition avait ainsi été convenue au 21 juin suivant, date qui a ensuite été repoussée sur demande du conseil de l'intéressé.

Selon le rapport de renseignements du 20 septembre 2019, la police a utilisé un logiciel forensique afin d'améliorer certaines images du film du radar. Un jeune homme portant des lunettes de soleil, des cheveux courts et foncés, avec le bas du visage semblant montrer une pilosité, y apparaît au volant du véhicule, seul dans l'habitacle. La comparaison entre les images tirées du film du radar et deux photographies de A______, soit une tirée de son profil Facebook sur laquelle il porte également des lunettes de soleil et une autre issue des fichiers de la police, sur laquelle son visage est visible en entier et où il porte une barbe de trois jours, permettait de reconnaître de manière relativement sûre le conducteur du véhicule comme étant A______.

c. Selon un arrêté du Département des infrastructures, des mesures d'accompagnement du chantier dit "Route 3______ 61" avaient été prises et le plan 4______ était approuvé pour une durée allant du 27 mai au 24 juin 2019 avec mise en place de signalisation (pièce B10). Ledit plan 4______ montre la route 2______ avec la pose d'un panneau de travaux et une limitation de vitesse à 30 km/h peu avant le n° 53 de cette route en direction de la route 3______ (pièce B20).

Une photographie de la route 2______, à la hauteur environ du n° 57 (soit avant le n° 53 dans le sens emprunté par le véhicule) et de l'arrêt de bus "5______" en direction de la route 3______, montre la présence d'une signalisation de travaux et d'une limitation de la vitesse à 30 km/h (pièce B27). Une seconde photographie montre la signalisation dans l'autre sens de circulation, alors qu'est visible au loin l'immeuble du n° 53 de la route 2______ (pièce B28).

La consultation du site internet de l'État de Genève permet de retrouver facilement un avis officiel faisant état de ces mêmes travaux concernant les routes 3______ et 2______ et de la limitation de vitesse qui en découlait (https://www.ge.ch/ document/info-mobilite-routes-3______-2______ ; consulté le 6 juillet 2023). Par ailleurs, il ressort de la consultation de la Feuille d'avis officiel que plusieurs arrêtés du Département des infrastructures ont été publiés au sujet de modifications de la circulation en lien avec le chantier dit "Route 3______ 61" en 2019.

d. Le rapport de renseignements du 12 août 2020 relève que lors de chaque contrôle routier, la signalisation est systématiquement vérifiée. En l'occurrence, le système de mesure ayant constaté l'infraction n'avait pas nécessité de réparation depuis le jour de son certificat de vérification du 22 janvier 2019. Le jour des faits, le contrôle effectué par un opérateur spécialisé attestait qu'un test de fonctionnement avait été correctement mené avant la prise des mesures.

La police a également établi un plan de la route 2______ sur lequel sont indiquées la position du radar et celle des panneaux de signalisation de travaux et de limitation de vitesse dans les deux sens de circulation de la route, ainsi que des photographies de ceux-ci (pièce C28).

e. Lors de sa première audition à la police, A______ a, sur conseil de son avocat, refusé de répondre aux questions en lien avec les faits reprochés. Il en a fait de même devant le Ministère public (MP) le 14 juillet 2020, indiquant néanmoins qu'à l'époque des faits, il était étudiant à D______ [USA] et rentrait de manière aléatoire à Genève, où il restait domicilié chez ses parents. Une pause universitaire avait lieu début juin.

f. A______ n'a pas comparu aux débats de première instance fixés au 1er octobre 2021, puis au 3 mai 2022 par le TP et a donc été jugé par défaut.

Sa demande de nouveau jugement, formulée le 12 novembre 2022, a été rejetée par ordonnance du TP du 16 décembre 2022.

C. a. Après avoir rejeté les réquisitions de preuve de l'appelant, la juridiction d'appel a ordonné l'instruction de la cause par la voie écrite avec l'accord des parties.

b. Selon son mémoire d'appel, A______ persiste dans ses conclusions.

Le TP avait arbitrairement tenu pour établi qu'il était au volant du véhicule au moment des faits. Les images du radar ne permettaient pas de l'affirmer en se basant uniquement sur "une certaine ressemblance" avec une photo tirée de son profil Facebook.

Il contestait que la vitesse ait été limitée à 30 km/h au lieu de l'infraction, ou du moins qu'elle ait été signalée en tant que telle. Aucun signe de travaux n'était visible sur les images prises par le radar, alors que le plan figurant en pièce B35 montrait au contraire que les travaux concernaient uniquement la fin de la route 2______, juste avant l'intersection avec la route 3______. La photographie du panneau en pièce B28 n'était pas datée et on ignorait où elle avait été prise, ce d'autant qu'elle ne correspondait pas à la deuxième photographie produite par la police sur le plan en pièce C28. Par ailleurs, la Feuille d'avis officielle du jour des faits ne faisait aucune mention d'une limitation de vitesse pour cause de travaux sur la route 2______.

Subsidiairement, il conclut au prononcé d'une peine pécuniaire, en lieu et place de la peine privative de liberté, disproportionnée, qui lui a été infligée. Le premier juge n'avait aucunement motivé son choix du genre de peine, alors qu'il se justifiait de prononcer ici une peine pécuniaire, au vu de son absence d'antécédent et en comparaison avec un cas identique ressortant d'un arrêt du 1er décembre 2020 de la Chambre administrative de la Cour de justice ATA/1218/2020. À teneur de cet arrêt, un justiciable qui avait été contrôlé par le même radar, le même jour à 11h04, à une vitesse de 66 km/h avait été condamné par une ordonnance pénale à une peine pécuniaire de 180 jours-amende.

Il se plaint également, sous l'angle d'une violation de la garantie d'un tribunal impartial, de ce que le premier juge avait rendu son jugement motivé sept mois après avoir gardé la cause à juger, au terme d'une audience qu'il avait mené seul, et sans faire état de la procédure de récusation dont il avait fait l'objet (laquelle a été rejetée par arrêt de la Chambre pénale de recours de la Cour de justice le 9 juin 2022). Il était ainsi à craindre que le magistrat ait été "fâché" au point de reporter son inimitié sur lui.

c. Le MP conclut au rejet de l'appel et la confirmation du jugement entrepris.

La culpabilité de l'appelant était établie par la photo du radar. À cela s'ajoutait que la mère de ce dernier avait expliqué à la police, qu'au vu de l'heure de l'excès de vitesse, l'auteur était vraisemblablement son fils, sans compter qu'il habitait à seulement 700 mètres du lieu de l'excès de vitesse. À cet égard, les pièces B10, B20, B27, B28 et C28 confirmaient avec certitude la présence de travaux et la limitation de vitesse à 30 km/h à cet endroit.

La peine fixée tenait adéquatement compte de la faute importante de l'appelant. L'arrêt de la Chambre administrative auquel ce dernier se référait ne lui était d'aucune aide, puisqu'il mentionnait le prononcé du plafond pour une peine pécuniaire, alors que l'excès de vitesse concerné était moins élevé que celui qu'il avait lui-même commis.

d. Le TP s'en réfère à son jugement.

D. A______, ressortissant suisse, est né le ______ 1997 à Genève. Célibataire et sans enfant, il indique suivre des études à D______ [USA] et ses parents subviennent à ses besoins.

Selon l'extrait du casier judiciaire, il n'a pas d'antécédent.

EN DROIT :

1. 1.1. La demande de nouveau jugement, formulée par l'appelant en parallèle de son appel, ayant été rejetée par ordonnance du 16 décembre 2022, l'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 371, 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

1.2. La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

Les griefs de l'appelant relative à une violation de son droit à un tribunal indépendant et impartial, dont il ne tire aucune conclusion propre, tombent à faux, au vu du rejet de sa demande de récusation par la Chambre pénale de recours par arrêt du 9 juin 2022, contre lequel il n'a pas fait recours. L'appelant n'invoque pas non plus, dans son mémoire d'appel, une violation de l'art. 366 CPP par le premier juge. Aussi, ces éléments n'ont pas à être examinés par la Cours de céans.

2. 2.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 Cst. et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large.

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. Comme règle d'appréciation des preuves, la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3 ;
138 V 74 consid. 7).

2.2. La reconnaissance juridique du droit de ne pas répondre se limite au droit de se taire. Elle n'empêche pas que, dans un jugement fondé sur la libre appréciation des preuves (art. 10 al. 2 CPP), le juge prenne en considération le comportement adopté par le prévenu dans le cadre de sa déposition. En effet, il est admissible de tirer du silence du prévenu des conclusions qui lui sont défavorables, dans la mesure où il existe d'autres preuves directes à sa charge, qui ont permis de faire la lumière sur les faits, de telle manière que son refus de répondre doit être raisonnablement interprété comme un élément à sa charge (arrêts du Tribunal fédéral 6B_289/2020 du 1er décembre 2020 consid. 7.8.1 ; 6B_825/2014 du 30 octobre 2014 consid. 3). Le droit de se taire ne saurait empêcher l'autorité pénale de prendre en compte, pour apprécier la force probante des éléments à charge, le silence de l'intéressé dans des situations qui appellent une explication de sa part (arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme, Murray c. Royaume-Uni, du 8 février 1996, Recueil CourEDH 1996-I p. 30, ch. 47).

3. 3.1.1. L'art. 27 al. 1 LCR impose aux usagers de la route de se conformer aux signes et aux marques. Ceux-ci ne sont obligatoires que s'ils sont clairs et que leur portée est aisément reconnaissable (ATF 127 IV 229 consid. 2c.aa ; 106 IV 138 consid. 3).

À teneur de l'art. 16 al. 2 de l'Ordonnance sur la signalisation routière (OSR), le signal "vitesse maximale" doit être observé jusqu'au signal correspondant indiquant la fin de la prescription, mais au plus jusqu'à la fin de la prochaine intersection.

3.1.2. L'art. 90 LCR constitue la base légale pour réprimer la violation des règles de la circulation routière (ATF 100 IV 71 consid. 1).

L'art. 90 al. 2 LCR sanctionne, au titre de délit, celui qui, par une violation grave d'une règle de la circulation, crée un sérieux danger pour la sécurité d'autrui ou en prend le risque.

Pour déterminer si une violation d'une règle de la circulation doit être qualifiée de grave au sens de l'art. 90 al. 2 LCR, il faut procéder à une appréciation aussi bien objective que subjective. D'un point de vue objectif, la violation grave d'une règle de circulation au sens de l'art. 90 al. 2 LCR suppose que l'auteur ait mis sérieusement en danger la sécurité du trafic. Il y a création d'un danger sérieux pour la sécurité d'autrui non seulement en cas de mise en danger concrète, mais déjà en cas de mise en danger abstraite accrue (ATF 143 IV 508 consid. 1.3 ; 142 IV 93 consid. 3.1 ; 131 IV 133 consid. 3.2). Subjectivement, l'art. 90 al. 2 LCR exige un comportement sans scrupules ou gravement contraire aux règles de la circulation, c'est-à-dire une faute grave et, en cas d'acte commis par négligence, à tout le moins une négligence grossière. Celle-ci doit être admise lorsque le conducteur est conscient du caractère généralement dangereux de son comportement contraire aux règles de la circulation. Plus la violation de la règle de la circulation est objectivement grave, plus on admettra l'existence d'une absence de scrupules, sauf indice particulier permettant de retenir le contraire (ATF 142 IV 93 consid. 3.1).

La vitesse doit toujours être adaptée aux circonstances, notamment aux particularités du véhicule et du chargement, ainsi qu'aux conditions de la route, de la circulation et de la visibilité. Dans le domaine des excès de vitesse, la jurisprudence a été amenée à fixer des règles précises afin d'assurer l'égalité de traitement. Ainsi, le cas est objectivement grave au sens de l'art. 90 al. 2 LCR, sans égard aux circonstances concrètes, en présence d'un dépassement de la vitesse autorisée de 25 km/h ou plus à l'intérieur des localités, de 30 km/h ou plus hors des localités et sur les semi-autoroutes dont les chaussées, dans les deux directions, ne sont pas séparées et de 35 km/h ou plus sur les autoroutes (ATF 143 IV 508 consid. 1.3).

3.2.1. En l'espèce, l'appelant conteste en premier lieu avoir été au volant du véhicule au moment du contrôle radar.

Il ressort du rapport de police du 17 septembre 2019 que le détenteur du véhicule qui a été contrôlé le 18 juin 2019 à 09h49 était une société gérée par la mère de l'appelant. Cette dernière a indiqué par téléphone à la police, le jour des faits, que son fils A______ avait conduit le véhicule ce matin-là. Par ailleurs, sans qu'il ne se justifie de remettre en doute la teneur du rapport de police, l'appelant lui-même a confirmé qu'il était au volant lors d'une conversation téléphonique avec la police, convenant ensuite d'une date pour son audition au poste trois jours plus tard. Si l'appelant n'a pas confirmé ses premières paroles lors de son audition formelle, faisant usage de son droit de se taire, il n'empêche que sa présence à Genève le jour des faits n'est ainsi pas contestable. Les images tirées du radar, traitées par logiciel forensique, montrent un jeune homme aux caractéristiques physiques identiques à celles de l'appelant sur les photographies trouvées par la police, soit la peau blanche, des cheveux foncés courts et une barbe de trois jours. Par ailleurs, et devant ces éléments incriminants, il a pris le risque d'exercer son droit au silence et n'a ensuite pas comparu, alors qu'il lui incombait d'apporter les explications qu'il souhaitait faire valoir.

Ces images, couplées aux indications de sa mère et à la conversation de l'intéressé avec la police le jour de faits, ne laissent aucune place au doute sur le fait que c'était bien l'appelant qui conduisait le véhicule au moment du contrôle radar, ce que la CPAR tient ainsi pour établi.

3.2.2. En ce qui concerne la limitation de la vitesse à 30km/h, également contestée par l'appelant, la présence d'une signalisation y afférente est établie par les documents du Département des infrastructures et par les constatations de police telles qu'elles ressortent des rapports des 17 septembre 2019 et 12 août 2020, ainsi que par le plan établi par la police. Les photographies ne comportent aucune contradiction avec les plans, montrant la signalisation sur la route 2______ dans les deux sens, seule l'image du panneau en direction de la route 3______ (en pièce B27) étant pertinente pour l'infraction en cause. L'appelant va jusqu'à contester la présence même de travaux, alors qu'il ressort clairement de l'arrêté du Département des infrastructures et du plan y relatif que des travaux avaient lieu à la date des faits, sur le bord de la route 2______ du côté de la voie allant en direction de la route 3______, soit dans le sens de circulation de l'appelant, contrairement à ce qu'il explique. On peine à comprendre les allégations de l'appelant qui discerne deux photographies sur ledit plan (en pièce B20), alors que ce plan n'en comporte aucune, mais montre uniquement l'emplacement des travaux et de la signalisation sur la route 2______. Ce plan officiel concorde avec le plan établi par la police en C28, sur lequel apparaissent également des photographies des panneaux signalant une zone de travaux ainsi que la limitation de vitesse, dans les deux sens de marche de la route, le radar ayant contrôlé l'appelant étant placé peu après la signalisation idoine. Il sera enfin relevé, en tant que de besoin, que les agents ont indiqué que la signalisation était systématiquement vérifiée préalablement à chaque contrôle de vitesse et que, le jour des faits, la signalisation était conforme et parfaitement visible, ce qu'aucun élément objectif du dossier ne permet de remettre en doute.

Partant, la présence le jour des faits d'une limitation de vitesse à 30 km/h, à l'aide d'une signalisation visible, est établie.

3.2.3. Dans ces circonstances, en circulant à 69 km/h sur le tronçon en question limité à 30 km/h, commettant ainsi un excès de vitesse de 39 km/h marge de sécurité déduite, l'appelant a gravement violé une règle de la circulation routière et engendré un danger abstrait accru.

Il n'était pas, selon le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, à même d'éviter qu'un accident de la circulation ne se produise pour le cas où une personne ou un obstacle imprévu serait survenu d'un côté ou de l'autre de la route. Or, cette éventualité était hautement probable en présence de travaux, d'une part, et d'une voie de circulation avec piste cyclable en sens inverse, d'autre part, alors qu'il circulait peu avant 10h00 un jour de semaine. La première condition objective de la création d'un danger sérieux pour la sécurité du trafic est réalisée.

Sous l'angle subjectif, l'appelant habitait à moins d'un kilomètre du lieu de l'infraction, de sorte qu'il peut être inféré qu'il connaissait la zone en question et la présence de travaux, pouvant impliquer la présence d'ouvriers notamment, ce qui aurait dû l'inciter à redoubler de prudence. Au vu de la vitesse particulièrement excessive par rapport aux conditions de la route et en l'absence d'argument de l'appelant tendant à démontrer l'existence de circonstances particulières en lien avec l'aspect subjectif, il sera retenu qu'il a, à tout le moins par une négligence grossière, à la limite du dol éventuel, fait fi des risques de danger créé pour autrui. L'élément subjectif de l'infraction est donc également réalisé.

3.2.3. Par conséquent, le verdict de culpabilité du chef de violation grave des règles de la circulation routière, au sens de l'art. 90 al. 2 LCR, sera confirmé, l'appel étant rejeté sur ce point.

4. 4.1.1. La violation grave des règles de la circulation routière est sanctionnée par une peine privative de liberté de trois ans au plus ou par une peine pécuniaire (art. 90 al. 2 LCR).

4.1.2. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 141 IV 61 consid. 6.1.1 ; 136 IV 55 consid. 5 et 134 IV 17 consid. 2.1).

Les principes de l'art. 47 CP valent aussi pour le choix entre plusieurs sanctions possibles, et non seulement pour la détermination de la durée de celle qui est prononcée. Que ce soit par son genre ou sa quotité, la peine doit être adaptée à la culpabilité de l'auteur. Le type de peine, comme la durée de celle qui est choisie, doivent être arrêtés en tenant compte de ses effets sur l'auteur, sur sa situation personnelle et sociale ainsi que sur son avenir. L'efficacité de la sanction à prononcer est autant décisive pour la détermination de celle-ci que pour en fixer la durée (arrêt du Tribunal fédéral 6B_611/2014 du 9 mars 2015 consid. 4.2). Les peines privatives de liberté ne doivent être prononcées que lorsque l'État ne peut garantir d'une autre manière la sécurité publique. Le choix de la sanction doit être opéré en tenant compte au premier chef de l'adéquation de la peine, de ses effets sur l'auteur et sur sa situation sociale ainsi que de son efficacité du point de vue de la prévention (ATF 134 IV 97 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1249/2014 du 7 septembre 2015 consid. 1.2). La faute de l'auteur n'est en revanche pas déterminante (ATF 137 II 297 consid. 2.3.4 ; ATF 134 IV 97 consid. 4.2 ; ATF 144 IV 313 consid. 1.1.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_420/2017 du 15 novembre 2017 consid. 2.1).

4.1.3. La peine pécuniaire est de trois jours-amende au moins et ne peut excéder 180 jours-amende. Le juge fixe leur nombre en fonction de la culpabilité de l'auteur (art. 34 al. 1 CP).

4.1.4. La Directive B.5 édictée par le Procureur général (barème LCR) préconise le prononcé d'une peine pécuniaire de 180 jours-amende pour les excès de vitesse de 33 à 34 km/h, lorsque la vitesse est limitée jusqu'à 30 km/h (hors et en localité). Dès 35 km/h de dépassement, le prévenu fait l'objet d'un acte d'accusation. Si de telles prescriptions n'ont qu'une valeur indicative, elles jouent néanmoins un rôle dans l'appréciation subjective de la faute.

Un autre facteur déterminant est la teneur de l'art. 90 al. 4 let. a LCR qui prescrit, dès 40 km/h de dépassement de la limite de 30 km/h, une peine privative de liberté d'au moins un an.

4.1.5. Les art. 5 CPP et 29 al. 1 Cst. garantissent notamment à toute personne le droit à ce que sa cause soit traitée dans un délai raisonnable. Ces dispositions consacrent le principe de la célérité et prohibent le retard injustifié à statuer. L'autorité viole cette garantie lorsqu'elle ne rend pas une décision qu'il lui incombe de prendre dans le délai prescrit par la loi ou dans le délai que la nature de l'affaire et les circonstances font apparaître comme raisonnable (ATF 143 IV 373 consid. 1.3.1). La violation du principe de la célérité peut avoir pour conséquence la diminution de la peine, parfois l'exemption de toute peine ou encore une ordonnance de classement en tant qu'ultima ratio dans les cas les plus extrêmes (ATF 143 IV 373 consid. 1.4.1 et 135 IV 12 consid. 3.6).

Le caractère raisonnable de la durée de la procédure s'apprécie selon les circonstances particulières de la cause, eu égard notamment à la complexité de l'affaire, à l'enjeu du litige pour l'intéressé, à son comportement ainsi qu'à celui des autorités compétentes (ATF 135 I 265 consid. 4.4 ; 130 I 312 consid. 5.1). On ne saurait reprocher à l'autorité quelques temps morts, qui sont inévitables dans une procédure (ATF 130 IV 54 consid. 3.3.3). Le fait que certains actes auraient pu être effectués plus rapidement ne suffit pas pour que soit admise une telle violation (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1066/2013 du 27 février 2014 consid. 1.1.2).

L'art. 84 al. 4 CPP prévoit que si le tribunal doit motiver son jugement par écrit, il notifie dans les 60 jours, exceptionnellement dans les 90 jours, au prévenu et au ministère public le jugement intégralement motivé. Figurant parmi les règles générales de procédure, cette disposition s'applique également à la juridiction d'appel. Les délais de 60 et 90 jours ne sont que des délais d'ordre dont la violation n'affecte pas la validité du jugement (arrêt du Tribunal fédéral 6B_763/2019 du 28 avril 2020 consid. 3.1). Il est généralement admis que le dépassement de ces délais ne constitue pas en soi une violation du principe de la célérité, mais peut en constituer un indice (arrêts du Tribunal fédéral 6B_870/2016 du 21 août 2017 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_763/2019 du 28 avril 2020 consid. 3.1).

Il appartient au justiciable d'entreprendre ce qui est en son pouvoir pour que l'autorité fasse diligence, que ce soit en l'invitant à accélérer la procédure ou en recourant, le cas échéant, pour retard injustifié (ATF 130 I 312 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1066/2013 précité). Cette règle découle du principe de la bonne foi (art. 5 al. 3 Cst.), qui doit présider aux relations entre organes de l'État et particuliers (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1066/2013 précité).

4.2. En l'espèce, la faute de l'appelant n'est pas négligeable. Il a agi au détriment de la sécurité d'autrui et sans considération pour les règles de la circulation applicables, commettant un excès de vitesse conséquent alors qu'il se trouvait en présence d'un chantier avec les risques d'accident que cela comporte. Il a agi par pure convenance personnelle, alors qu'il ne pouvait qu'avoir conscience qu'il commettait un excès de vitesse, puisque, même hors période de travaux, le tronçon en question est limité à 50 km/h. Il s'agissait d'une zone en localité, contrairement à ce qu'a retenu à décharge, à tort, le premier juge. Il persiste à nier l'existence de travaux, allant jusqu'à détourner le sens des moyens de preuve pour fonder sa thèse.

Sa prise de conscience est nulle, alors que sa collaboration sera qualifiée de mauvaise, dans la mesure où il a refusé de répondre aux questions de la police et du MP même sur des éléments notoires tel que l'identité de sa mère, puis ne s'est pas présenté devant le TP.

Il n'a pas d'antécédent judiciaire, élément neutre dans la fixation de la peine.

Seules les bonnes conditions de circulation, fluides avec une bonne visibilité, peuvent être retenues à sa décharge.

On relèvera encore qu'au vu de l'excès de vitesse de 39km/h dans une zone limitée à 30 km/h, seule la déduction de la marge de sécurité a permis à l'appelant d'échapper à la peine-plancher de l'art. 90 al. 3 et 4 LCR, la vitesse enregistrée par le radar étant à 74 km/h. À l'inverse, le cas similaire dont se prévaut l'appelant, ayant mené à une condamnation à une peine pécuniaire de 180 jours-amende, concernait un excès de vitesse de 31 km/h, soit en dessous du seuil du renvoi en accusation, fixé à 35 km/h par la Directive B.5 citée supra.

Dans ces circonstances, la quotité de la peine à fixer dépasse largement le plafond pour une peine pécuniaire et le choix d'une peine privative de liberté se justifie.

L'appelant relève, sans en tirer de conclusions, que le premier juge a pris près de sept mois pour rendre son jugement, après avoir gardé la cause à juger au terme de l'audience du 3 mai 2022. Cette durée est effectivement excessive, dépassant largement le délai d'ordre de l'art. 84 al. 4 CPP, alors que la nature, sans difficultés, de l'affaire ne le justifie aucunement. Cela étant, cette durée seule n'emporte pas automatiquement une diminution de la peine. En l'occurrence, le temps pris par le premier juge pour la rédaction de son jugement n'a eu aucune influence négative sur la situation du prévenu, qui n'a pas daigné se présenter aux débats et ne s'est plus manifesté jusqu'à la notification du jugement. La peine ne sera ainsi pas diminuée pour ce motif, qui n'est au demeurant pas plaidé.

Au vu des éléments qui précèdent, la quotité de la peine privative de liberté fixée à dix mois apparaît adéquate et sera confirmée.

L'octroi du sursis est acquis à l'appelant (art. 391 al. 2 CPP) et la fixation du délai d'épreuve à trois ans n'est pas critiquable.

Le jugement entrepris sera ainsi également confirmé sur ce point et l'appel rejeté.

5. L'appelant, qui succombe, supportera les frais de la procédure d'appel envers l'État comprenant un émolument de CHF 1'500.- (art. 428 CPP et art. 14 al. 1 let. e du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale). Vu l'issue de la procédure, il n'y a pas lieu de revoir la répartition des frais de première instance.

6. Compte tenu de ce qui précède, les conclusions en indemnisation, non chiffrées, de l'appelant seront rejetées en ce qu'elles ont trait à la procédure d'appel (art. 429 al. 1 CPP a contrario).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/1478/2022 rendu le 29 novembre 2022 par le Tribunal de police dans la procédure P/20122/2019.

Le rejette.

Condamne A______ aux frais de la procédure d'appel, en CHF 1'615.-, qui comprennent un émolument de CHF 1'500.-.

Confirme le jugement entrepris, dont le dispositif est le suivant :

"Déclare A______ coupable de violation grave des règles de la circulation routière (art. 90 al. 2 LCR).

Condamne A______ à une peine privative de liberté de 10 mois (art. 40 CP).

Met A______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit A______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Condamne A______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 1072.-, y compris un émolument de jugement de CHF 300.- (art. 426 al. 1 CPP). "

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police et au Service cantonal des véhicules.

La greffière :

Lylia BERTSCHY

 

La présidente :

Catherine GAVIN

e.r. Gaëlle VAN HOVE

 


 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.

 

 

 

 

 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

1'072.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

40.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

00.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'500.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'615.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

2'687.00