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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/8314/2018

AARP/80/2023 du 14.03.2023 sur JTDP/1544/2019 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : PARTIE CIVILE;DÉPENS;SOLIDARITÉ ACTIVE
Normes : CPP.433.al1; CPC.106.al3.para
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/8314/2018 AARP/80/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 17 février 2023

 

Entre

A______, domicilié c/o B______, ______, comparant par Me C______, avocat,

appelant,

contre le jugement JTDP/1544/2019 rendu le 8 novembre 2019 par le Tribunal de police,

et

D______ SA, E______ SA et F______, parties plaignantes, toutes trois comparant par Me Claude ABERLE, avocat, route de Malagnou 32, 1208 Genève,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés,


statuant à la suite de l'arrêt du Tribunal fédéral 6B_284/2022 du 16 novembre 2023 admettant partiellement le recours de A______ contre l'arrêt de la Chambre pénale d'appel et de révision AARP/6/2022 du 12 janvier 2022.


EN FAIT :

A. a. Par jugement du 8 novembre 2019, le Tribunal de police (TP) a, notamment, reconnu A______ coupable de dommages à la propriété d'importance mineure (art. 144 al. 1 cum 172ter du code pénal [CP]), de dommages à la propriété (art. 144 al. 1 CP), de dommages à la propriété d'importance considérable (art. 144 al. 1 et al. 3 CP), de violation de domicile (art. 186 CP), de contrainte (art. 181 CP) et d'empêchement d'accomplir un acte officiel (art. 286 CP) et l'a condamné à une peine privative de liberté de 12 mois, sous déduction de 345 jours de détention avant jugement et de mesures de substitution (art. 40 CP), ainsi qu'à une peine pécuniaire de dix jours-amende à CHF 30.- l'unité et une amende de CHF 700.-, renonçant à révoquer un sursis accordé le 21 mars 2018 mais lui adressant un avertissement et prolongeant le d'épreuve d'un an.

Le TP a en outre rejeté ses conclusions en indemnisation, l'a condamné à la moitié des frais de la procédure, aux côtés de ses co-prévenus, ainsi qu'à verser aux plaignants D______ SA, E______ SA et F______ CHF 8'200.- à titre de juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure, renvoyant ceux-ci à agir par la voie civile pour le surplus.

b. Par arrêt AARP/6/2022 du 12 janvier 2022, la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR) a admis très partiellement l'appel formé par A______, en lui allouant une indemnité de CHF 6'286.15 pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits, compensée à due concurrence avec les frais de procédure mis à sa charge. Le dispositif de cet arrêt a été complété par arrêt AARP/80/2022 du 31 mars 2022 en ce que A______ a encore été condamné à verser aux intimés CHF 3'769.50 à titre de juste indemnité pour leurs dépenses obligatoires occasionnées par la procédure d'appel.

c. Par arrêt du 16 novembre 2022, le Tribunal fédéral (TF) a partiellement annulé cet arrêt et renvoyé la cause à la CPAR pour nouvelles instruction et décision.

Il convenait en effet que la CPAR développe de manière plus complète son raisonnement relatif à l'indemnité unique accordée aux intimés et le fondement de leur qualité de créanciers solidaires, la solidarité active n'étant pas prévue par le code de procédure pénale (CPP). La motivation selon laquelle les parties plaignantes se déclaraient elles-mêmes créancières solidaires, étant des entités d'une même entreprise familiale et agissant par l'intermédiaire d'un seul conseil, était trop vague et ne permettait pas d'examiner la correcte application du droit fédéral.


 

B. Les faits suivants, encore pertinents au stade du renvoi par le Tribunal fédéral, ressortent de la procédure :

a. A______, né le ______ 1991, est un jeune militant de la cause antispéciste, qui s'oppose à ce que l'on attribue à l'être humain un statut supérieur à celui des animaux.

b. Le 26 août 2018, entre 03h35 et 04h45, il a mis à sac l'abattoir de volailles, exploité par les entreprises D______ SA et E______ SA, à G______, causant ainsi un dommage établi de CHF 77'788.30.

c. D______ SA et E______ SA ont déposé plainte pénale pour ces faits le lendemain.

F______, qui exploite à leurs côtés les abattoirs sous la raison individuelle H______, s'est également constitué partie plaignante le 8 août 2019.

d. Dans le cadre de la procédure pénale, les parties plaignantes ont réclamé la réparation d'un dommage résiduel de CHF 2'369.40 avec intérêts à 5% dès le 20 septembre 2018 en faveur de D______ SA, de CHF 5'801.50 avec intérêts à 5% dès le 26 août 2018 en faveur de E______ SA et de CHF 239.90 avec intérêts à 5% dès le 5 décembre 2018 en faveur de F______.

Pour leurs frais de défense devant le TP, elles ont fait état d'une indemnité totale en CHF 6'856.15, ventilée entre elles au prorata des dommages réclamés, soit CHF 1'931.45 en faveur de D______ SA, CHF 4'729.15 en faveur de E______ SA et CHF 195.55 en faveur de F______.

En appel, elles ont demandé une indemnité supplémentaire de CHF 4'978.-, qu'elles ont réduite à CHF 3'500.-.

C. a. À son retour du Tribunal fédéral, la procédure s'est poursuivie devant la CPAR par la voie écrite.

b. Interpellé, A______ a déclaré ne pas avoir d'observations complémentaires à formuler sur le fond.

Dans le cadre de son recours au TF, il avait fait valoir que les parties plaignantes, en se partageant les honoraires au prorata d'un dommage qu'elles n'avaient pas réussi à prouver, n'avaient pas rempli à satisfaction de droit l'obligation de chiffrer et justifier leurs prétentions, de sorte que la CPAR aurait dû rejeter leur demande. Par ailleurs, la solution retenue était absurde en ce que les parties plaignantes s'étaient vues octroyer une indemnité unique supérieure à ce qu'elles réclamaient individuellement.

d. Le MP s'en est rapporté à justice.

e. Les parties plaignantes ont indiqué être représentées depuis le début par le même conseil, dont les honoraires, pris dans leur globalité, avaient été ventilés entre elles en proportion de leur dommage respectif. Elles avaient en outre chiffré et justifié leur part individuelle aux honoraires, de sorte qu'on ne pouvait leur reprocher aucun manquement à l'art. 433 al. 2 CPP. Les débouter de leurs conclusions en indemnisation reviendrait à un excès de formalisme. Par ailleurs, elles formaient entre elles une société simple et avaient mandaté leur conseil en cette qualité. La pratique des autorités genevoises, mais semble-t-il également fribourgeoises, était au demeurant d'accorder une indemnité aux lésés en qualité de créanciers solidaires (cf. AARP/255/2017 du 19 juillet 2017 ; AARP/551/2015 du 17 décembre 2015 ; AARP/287/2015 du 2 avril 2015 ; JTCO/85/2015 du 5 juin 2015 ; ACPR/423/2019 du 7 juin 2019 ; ACPR/248/2019 du 28 mars 2019 ; arrêt de la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal de Fribourg n°501 2017 32 du 1er février 2019).

EN DROIT :

1. 1.1. Un arrêt de renvoi du Tribunal fédéral lie l'autorité cantonale à laquelle la cause est renvoyée, laquelle voit sa cognition limitée par les motifs dudit arrêt, en ce sens qu'elle est liée par ce qui a déjà été définitivement tranché par le Tribunal fédéral (ATF 104 IV 276 consid. 3b et 103 IV 73 consid. 1) et par les constatations de fait qui n'ont pas été attaquées devant lui ou l'ont été sans succès (ATF 131 III 91 consid. 5.2). L'examen juridique se limite donc aux questions laissées ouvertes par l'arrêt de renvoi, ainsi qu'aux conséquences qui en découlent ou aux problèmes qui leur sont liés (ATF 135 III 334 consid. 2 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_588/2012 du 11 février 2013 consid. 3.1 et 6B_534/2011 du 5 janvier 2012 consid. 1.2).

1.2. Conformément aux considérants de l'arrêt du Tribunal fédéral du 16 novembre 2022, il convient donc uniquement, en l'espèce, d'examiner le bien-fondé de l'allocation d'une indemnité unique aux parties plaignantes en tant que créancières solidaires.

2. 2.1. Selon l'art. 433 al. 1 let. a et al. 2 1ère phrase CPP, la partie plaignante peut demander au prévenu une juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure si elle obtient gain de cause (al. 1 let. a). La partie plaignante adresse ses prétentions à l'autorité pénale; elle doit les chiffrer et les justifier (al. 2 1ère phrase).

2.2. L'art. 433 CPP n'a pas pour but de réparer un dommage, mais vise en premier lieu à rembourser les dépens de la partie plaignante (ATF 143 IV 495 consid. 2.2.4 ; ATF 145 IV 268 consid. 1.2).

2.3. Les parties plaignantes allèguent former entre elles une société simple.

2.3.1. Aux termes de l'art. 530 al. 1 CO, la société simple est un contrat par lequel deux ou plusieurs personnes conviennent d'unir leurs efforts ou leurs ressources en vue d'atteindre un but commun. La loi ne pose aucune exigence de forme pour la conclusion du contrat (art. 11 al. 1 CO). Le contrat peut donc être passé par actes concluants (P. TERCIER / M. AMSTUTZ / R. TRIGO TRINDADE (éds.), Code des obligations II, Commentaire romand, N. 3 ad art. 530 CO).

Selon l'art. 544 al. 1 CO, les choses, les créances et droits réels transférés ou acquis à la société appartiennent en commun aux associés dans les termes du contrat de société.

Ainsi, les associés doivent agir collectivement ou par un représentant commun car ils ne sont pas créanciers solidaires au sens de l'art. 150 CO (P. TERCIER / M. AMSTUTZ / R. TRIGO TRINDADE (éds.), Code des obligations II, Commentaire romand, 2ème éd., Bâle 2017, N. 3 ad. art. 544 CO). La règle n'est toutefois pas impérative, de sorte qu'une solidarité active est envisageable si le débiteur s'oblige pour le tout envers chaque associé (art. 150 al. 1 CO). La conséquence procédurale de la titularité commune des droits est la consorité active nécessaire: les associés doivent agir ensemble pour faire valoir judiciairement une créance (art. 70 CPC). Puisque la société simple n'a pas la jouissance des droits civils et ne peut ainsi être titulaire de droits ou d'obligations, les associés ne sont habilités à faire valoir, dans le procès pénal, les prétentions civiles liées à la société simple (art. 119 al.2 lit. b, art. 122 al. 1 CPP) qu'ensemble; il en va en revanche différemment lorsque les associés se portent demandeurs au pénal, chacun pouvant se constituer partie plaignante (art. 118 al. 1 et 2, art. 119 al. 2 lit. a CPP) (M. BLANC / B. FISHER, Les sociétés de personnes, Zurich 2020, N. 306 ss, p. 90 s.).

2.3.2. En l'espèce, chacune des entités s'est constituée partie plaignante individuellement. Elles ont toutefois mandaté ensemble le même avocat. S'il est constant qu'elles forment entres elles une société simple, qu'elles sont solidairement responsables des honoraires de Me ABERLE (art. 403 al. 1 CO cum art. 544 al. 3 CO) et propriétaires en main commune des créances sociales (art. 544 al. 1 CO; en l'espèce, les conclusions civiles), il n'en demeure pas moins que ce fondement ne fait naître aucune solidarité active. Par ailleurs, le débiteur – soit le prévenu – conteste cette solidarité, de sorte que l'application de l'art. 150 al. 1 CO est exclue. Cela étant, la solidarité active demeure possible par d'autres voies.

2.4. L'action civile adhésive est principalement régie par les art. 122 à 126 CPP, ainsi que par des dispositions éparses du CPP dont l'art. 433 CPP. Comparée à celle du CPC, la règlementation du CPP apparaît sommaire, ponctuelle et parfois lacunaire. Ce caractère fragmentaire commande de déterminer comment combler les lacunes du CPP et d'établir dans quelle mesure le CPC peut s'appliquer à titre supplétif. La doctrine n'est à ce propos pas unanime. DOLGE semble favorable à une application directe du CPC à titre supplétif (M. NIGGLI/M. HEER/H. WIPRÄCHTIGER (éds), Strafprozessordnung/Jugendstrafprozessordnung, Basler Kommentar StPO/JStPO, 2e éd., Bâle 2014, N. 9 ad art. 122), tandis que JEANDIN et FONTANET considèrent que l'action civile adhésive est soustraite au CPC et que seuls peuvent encore s'appliquer les principes fondamentaux de la procédure civile (Y. JEANNERET/A. KUHN/C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Code de procédure pénale suisse, Commentaire romand, N. 1a ad art. 122). Le Tribunal fédéral semble pour sa part favorable à une application directe de certains principes fondamentaux de procédure civile (arrêts du Tribunal fédéral 6B_267/2016 du 15 février 2017 c. 6.1 ; 6B_819/2013 du 27 mars 2014 c. 5.1 ; 6B_353/2012 du 26 septembre 2012 c. 2.1 ; ATF 127 IV 215 c. 2d; JdT 2003 IV 129). Selon PERRIER DEPEURSINGE, GABARSKI et MUSKENS, en l'absence d'un renvoi clair dans le CPP, les dispositions du CPC ne peuvent s'appliquer que par analogie et en présence d'une véritable lacune (C. PERRIER DEPEURSINGE/A. M. GABARSKI/
L. F. MUSKENS, Action civile adhésive au procès pénal no man's land procédural ? in SJ 2021 II p. 185 ss, p. 187 s.).

2.4.1. La question se pose de savoir si l'absence de modalités d'allocation de l'indemnité constitue une lacune du CPP, de sorte qu'une application à tout le moins par analogie des dispositions du CPC serait possible.

2.4.2. Le CPP prévoit expressément la solidarité passive (art. 418 al. 2 et 3 CPP), mais non la solidarité active. Tant le Message relatif à l'unification du droit de la procédure pénale du 21 décembre 2005 que le rapport explicatif relatif à l'avant-projet d'un code de procédure pénale suisse demeurent muets sur la question.

2.4.3. Sous l'ancien droit, la jurisprudence admettait que les consorts ayant agi en commun étaient créanciers solidaires des dépens (J. F. POUDRET / J. HALDY / D. TAPPY, Procédure civile vaudoise, 3ème éd., Lausanne 2002, n. 7.6 ad art. 92 CPC) ; cette jurisprudence devait également s'appliquer aux dépens alloués à des plaignants qui s'étaient portés parties civiles dans le cadre d'un procès pénal dans la mesure où ils avaient procédé dans celui-ci par l'intermédiaire d'un conseil commun et où le Tribunal de police leur avait alloué à ce titre un montant global (Arrêt du Tribunal cantonal vaudois du 12.08.2004 in JdT 2005 III p. 138 ss, 138).

Il était dès lors de la pratique des tribunaux romands d'appliquer par analogie les règles de procédure civile aux dépens de la partie plaignante.

A Genève, l'ancien code de procédure pénale prévoyait déjà la possibilité d'une solidarité passive en cas de pluralité de prévenus (art. 99 al. 2 CPP-GE). S'agissant toutefois des dépens de la partie civile, le code renvoyait au tarif établi par le règlement du Conseil d'Etat (art. 104 al. 1 et 2 CPP-GE). L'art. 13 du règlement fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale disposait que lorsque la demande de dommages-intérêts formée par la partie civile nécessitait une instruction séparée et postérieure au jugement pénal, les dépens – pour cette partie de la procédure – étaient fixés selon le tarif applicable en matière civile ( ). La doctrine renvoyait également à l'ancien règlement fixant le tarif des émoluments et dépens des avocats et huissiers en matière civile du 8 juin 1971, dont l'article 4 prévoyait expressément que dans le cas où plusieurs parties étaient représentées par le même avocat, une indemnité unique leur était due (D. PONCET, Le nouveau code de procédure pénale genevois annoté, Genève 1978, ad art. 104).

Par ailleurs, bien que ledit règlement eut disparu à l'occasion de la réforme de 1984, le principe restait encore valable à l'aune de la LPC ; une seule indemnité était donc allouée dans cette hypothèse, dont le montant tenait compte de la pluralité des plaideurs, pour peu que cette circonstance eut joué un rôle dans l'importance du travail accompli. La répartition de l'indemnité unique entre les différents plaideurs restait pour le surplus du domaine de leurs relations avec leur mandataire commun (B. BERTOSSA / L. GAILLARD / J. GUYET / A. D. SCHMIDT, Commentaire de la loi de procédure civile du canton de Genève du 10 avril 1987, Genève 1989 -, N. 8 ad art. 181 LPC/GE).

2.5.1. Ainsi, face à une lacune de la loi, il se justifie d'appliquer les règles du CPC par analogie s'agissant des modalités d'allocation des dépens (art. 104 ss CPC cum art. 95 al. 1 let. b CPC).

2.5.2. Selon l'art. 106 al. 3 CPC, lorsque plusieurs personnes participent au procès en tant que parties principales ou accessoires, le tribunal détermine la part de chacune aux frais du procès (lesquels comprennent les dépens). Il peut les tenir pour solidairement responsables.

Cet article ne fixant guère de critères, le tribunal dispose d'une large liberté d'appréciation. Il en va de même pour une éventuelle solidarité active ou passive. L'une et l'autre pourront être prévues si elles se justifient, sans jamais être imposées par la loi, quel que soit le type de consorité des parties (D. TAPPY, Commentaire romand: code de procédure civile, 2ème éd., Bâle 2019, N. 35 s. ad art. 106 CPC).

2.7. En l'espèce, les parties plaignantes ont obtenu la condamnation pénale de l'appelant et seul un problème de compréhension de la composition du dommage et de son indemnisation par leur assurance a empêché le TP de faire droit à leurs conclusions civiles, lesquelles ont été admises dans leur principe. Les parties plaignantes ont donc droit à une juste indemnité pour leur frais de défense. L'argument de l'appelant qui voudrait qu'elles n'en aient point le droit, faute d'avoir prouvé leur dommage, est infondé puisque l'indemnité ne vise pas la réparation d'un dommage. Au demeurant, les parties plaignantes ont bien chiffré et justifié leurs indemnités, en se répartissant selon leurs règles internes les honoraires, de sorte qu'elles n'ont pas manqué à leurs devoirs (art. 433 al. 2 CPP).

Cela étant, il est constant que les parties plaignantes ont toutes été lésées par les agissements de l'appelant lors du 25 août 2018. Liées par un même état de fait et des fondements juridiques semblables, elles se trouvaient donc en consorité simple (art. 71 CPC). Dans la mesure où elles sont toutes touchées par le même état de fait, les mêmes agissements et la même procédure, l'activité de leur conseil leur profite à toutes et aurait été justifiée pour chacune d'entre elles, individuellement.

Au vu de ce qui précède, le TP pouvait, dans son large pouvoir d'appréciation, leur allouer une indemnité unique tout en les déclarant créancières solidaires des dépens, dans la mesure où elles avaient procédé par l'intermédiaire du même avocat, conformément à la pratique précitée. Enfin, il n'est pas nécessaire de connaître la quote-part exacte supportée par chacune, puisque cela n'affecte pas la situation du débiteur de l'indemnité, d'une part, et ressort uniquement des règles internes de la société, d'autre part. Cela étant, la CPAR relèvera que l'allocation d'une indemnité unique en solidarité active profite également au prévenu, dès lors que celui-ci ne s'expose pas potentiellement à trois procédures de recouvrement distinctes et des frais de procédure démultipliés (art. 150 CO).

Au vu de ce qui précède, l'indemnité allouée en première instance sera confirmée ; par identité de motifs, il en va de même pour l'indemnité allouée en appel.

En conséquence, l'AARP/6/2022 du 12 janvier 2022 sera entièrement confirmé.

3. 3.1. Lorsque le Tribunal fédéral admet un recours et renvoie la cause à l'autorité précédente, en l'occurrence à la juridiction d'appel cantonale, pour nouvelle décision, il appartient à cette dernière de statuer sur les frais sur la base de l'art. 428 CPP (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1367/2017 du 13 avril 2018 consid. 2.1).

Aux termes de l'art. 426 al. 3 let. a CPP, le prévenu ne supporte pas les frais que la Confédération ou le canton ont occasionnés par des actes de procédure inutiles ou erronés. Tel est notamment le cas lorsque l'autorité judiciaire a violé le droit matériel ou le droit de procédure, en sorte que sa décision doive être corrigée en procédure de recours. Il en va ainsi y compris lorsque l'autorité de recours doit revoir sa décision à la suite d'un arrêt de renvoi du Tribunal fédéral (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1367/2017 du 13 avril 2018 consid. 2.1 et les références ; 6B_602/2014 du 4 décembre 2014 consid. 1.3)

3.2. Dans la mesure où le renvoi du Tribunal fédéral ne concernait qu'un défaut de motivation, sans incidence sur l'issue de l'appel, les frais de la procédure consécutive au renvoi du Tribunal fédéral seront laissés à la charge de l'État.

En revanche, il n'y a pas lieu de revoir les frais de première instance, ni ceux de la procédure d'appel antérieurs au renvoi du Tribunal fédéral.

4. Le conseil de l'appelant n'ayant déployé aucune activité par-devant la CPAR à la suite du renvoi de la cause par le TF, aucune indemnisation ne sera allouée à ce titre.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Prend acte de l'arrêt du Tribunal fédéral 6B_284/2022 du 16 novembre 2022.

Annule l'arrêt de la Chambre pénale d'appel et de révision AARP/6/2022 rendu le 12 janvier 2022 en ce qui concerne A______.

Constate que l'arrêt de la Chambre pénale d'appel et de révision AARP/6/2022 rendu le 12 janvier 2022 est entré en force en ce qui concerne I______ et J______.

Statuant à nouveau :

Condamne A______ à verser à D______ SA, E______ SA et F______ CHF 8'200.- à titre de juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure de première instance (art. 433 al. 1 CPP).

Condamne A______ à verser à D______ SA, E______ SA et F______ CHF 3'769.50, TVA comprise, à titre de juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure d'appel (art. 433 al. 1 CPP).

Laisse les frais de la présente procédure consécutive au renvoi du Tribunal fédéral à la charge de l'Etat.

Cela fait, rappelle le dispositif de son arrêt AARP/6/2022 du 12 janvier 2022 tel que confirmé par le Tribunal fédéral et désormais en force :

"Déclare A______ coupable de dommages à la propriété d'importance mineure (art. 144 al. 1 cum 172ter CP), de dommages à la propriété (art. 144 al. 1 CP), de dommages à la propriété d'importance considérable (art. 144 al. 1 et al. 3 CP), de violation de domicile (art. 186 CP), de contrainte (art. 181 CP) et d'empêchement d'accomplir un acte officiel (art. 286 CP).

Acquitte A______ de dommages à la propriété (art. 144 al. 1 CP) en lien avec les cas 1, 3, 5, 6, 8, 9 et 10.

Condamne A______ à une peine privative de liberté de 12 mois, sous déduction de 345 jours de détention avant jugement et de mesures de substitution (art. 40 CP).

Condamne A______ à une peine pécuniaire de 10 jours-amende (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 30.-.

Dit que cette peine est complémentaire à celle prononcée le 17 janvier 2019 par le Ministère public du canton du Valais, Office régional du Valais central Sion (art. 49 al. 2 CP).

Condamne A______ à une amende de CHF 700.- (art. 106 CP).

Prononce une peine privative de liberté de substitution de sept jours.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.

Renonce à révoquer le sursis octroyé le 21 mars 2018 par le Ministère public de Genève, mais adresse un avertissement à A______ et prolonge le délai d'épreuve d'un an (art. 46 al. 2 CP).

Prend acte de ce que les mesures de substitution ordonnées le 22 octobre 2019 par la Chambre pénale de recours ont déjà été levées par le Tribunal de police le 8 novembre 2019.

Alloue à A______, à titre d'indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits, la somme de CHF 6'286.15 pour la procédure de première instance, TVA comprise (art. 429 al. 1 let. a CPP).

Compense, à due concurrence, cette indemnité avec les frais mis à la charge de A______.

Rejette, pour le surplus, les conclusions en indemnisation de A______.

( )

***

Condamne A______ et I______, conjointement et solidairement, à payer à K______ SA la somme de CHF 16'935.- à titre de réparation du dommage matériel (art. 41 CO).

( )

Renvoie les partie plaignantes L______ SA, M______ SA, N______ AG, O______ Sàrl, P______ Sàrl, Q______ Sàrl, R______ Sàrl, S______ SA, D______ SA, E______ SA, F______, T______, U______, V______ SA, W______ SA, X______, Y______ Sàrl et ETAT DE FRIBOURG à agir par la voie civile (art. 126 al. 2 CPP).

Ordonne la confiscation et la destruction des objets figurant sous chiffres 1, 2, et 4 de l'inventaire n° 1______ du 21 octobre 2018 (art. 69 CP).

Ordonne la restitution à A______ des objets figurant sous chiffre 3 de l'inventaire n° 1______ du 21 octobre 2018 (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Ordonne la confiscation et la destruction des objets figurant sous chiffres 1 à 7, 10 et 13 (la clé de cadenas Z______ uniquement) de l'inventaire n° 2______ du 29 novembre 2018 (art. 69 CP).

Ordonne la restitution à A______ des objets figurant sous chiffres 8, 9, 11, 12, 13 (à l'exclusion de la clé de cadenas de marque Z______) et 14 à 22 de l'inventaire n° 2______ du 29 novembre 2018 (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Ordonne la restitution à son ayant droit, lorsqu'il se sera annoncé, du sac à dos figurant sous chiffre 23 de l'inventaire n° 2______ du 29 novembre 2018 (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Ordonne la restitution à A______ des objets figurant sous chiffres 1 à 3 de l'inventaire n° 3______ du 30 novembre 2018 (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Ordonne la confiscation et la destruction des objets figurant sous chiffre 4 de l'inventaire n° 3______ du 30 novembre 2018 (art. 69 CP).

Ordonne la restitution à A______ des objets figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n° 4______ du 7 janvier 2019 (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

( )

Ordonne la confiscation et la destruction des objets figurant sous chiffres 1 à 15 de l'inventaire n° 5______ du 7 juin 2018 (art. 69 CP).

Ordonne la confiscation et la destruction des objets figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n° 6______ du 4 décembre 2018.

Condamne A______ à payer CHF 15'278.90 ( ) de frais de procédure de première instance, frais qui s'élèvent en totalité à CHF 51'948.12, y compris un émolument de jugement de CHF 900.- (art. 426 al. 1 CPP).

Condamne A______ et I______ à payer à l'Etat de Genève l'émolument complémentaire de jugement fixé à CHF 1'200.-, à raison de CHF 600.- chacun.

( )

Arrête les frais de la procédure d'appel, comprenant un émolument de CHF 3'000.-, à CHF 5'435.-.

Met 45% de ces frais à la charge de A______, soit CHF 2'445.75 ( ).

Arrête à CHF 7'754.40, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me C______, défenseur d'office de A______, pour la procédure d'appel.

( )"

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police.

 

Le greffier :

Alexandre DA COSTA

 

La présidente :

Catherine GAVIN

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

53'148.12

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

0.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

2'360.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

0.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

3'000.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

5'435.00

Total général :

CHF

58'583.12