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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/1175/2024

DCSO/490/2024 du 17.10.2024 ( PLAINT ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1175/2024-CS DCSO/490/24

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 17 OCTOBRE 2024

 

Plainte 17 LP (A/1175/2024-CS) formée en date du 9 avril 2024 par A______, PARIS, représenté par Me Julien FIVAZ, avocat.

 

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du 17 octobre 2024
à :

- A______, PARIS
c/o Me FIVAZ Julien
EVIDENTIA AVOCATS
Rue Jacques-Grosselin 8
1227 Carouge.

- B______ AG

c/o M. C______

Agent d'affaires breveté

______

______ [VD].

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. a. La SAS A______ (ci-après A______, PARIS) est une société par actions simplifiée à associé unique ayant son siège rue 1______ no. ______, [code postal] Paris, anciennement rue 2______ no. ______, [code postal] Paris.

Elle a une succursale inscrite au Registre du commerce de Genève sous la raison A______, PARIS, SUCCURSALE DE GENEVE (ci-après A______, GENEVE), dont l'adresse est avenue 3______ no. ______, [code postal] Genève.

Elle exploite des boutiques à Paris et Genève sous l'enseigne "D______". Elle exploitait également une boutique à E______ [VD] sous la même enseigne.

b. Suite à une déclaration de cessation de paiement, A______, PARIS a été placée en redressement judiciaire par jugement du 18 novembre 2020 du Tribunal de commerce de Paris. Ce dernier a entériné le plan de redressement de A______, PARIS par jugement du 3 août 2022, lequel prévoyait l'apurement du passif par huit acomptes annuels de juillet 2023 à juillet 2030 en fixant le pourcentage des créances à régler chaque année (1ère année : 5 %; 2ème année :
7 %; 3ème année :10 %; 4ème année : 12 %; 5ème année : 14 %; 6ème année : 17 %; 7ème année : 17 %; 8ème année : 18 %).

c. A______, PARIS a conclu le 1er février 2023 un accord avec B______ SA en vue de régler, en conformité avec le plan de redressement entériné en France, un arriéré de loyer impayé de 136'110 fr. 30 relatif à la boutique de E______, dont le bail avait été résilié dans l'intervalle. L'accord prévoyait que la garantie bancaire constituée par la locataire en faveur de la bailleresse, d'un montant de 24'000 fr., serait libérée en faveur de cette dernière et préalablement imputée sur les arriérés de loyer. Le solde de la dette, en 112'110 fr. 30, devait être réglé, conformément au plan de redressement, en huit acomptes de juillet 2023 à juillet 2030.

d. A______, PARIS allègue avoir libéré la garantie bancaire de 24'000 fr. en faveur de B______ SA en juillet 2023 pour valoir paiement du premier acompte du plan de redressement.

e. B______ SA a requis le 21 décembre 2023 la poursuite de "A______, PARIS, SUCCURSALE DE GENEVE, avenue 3______ no. ______, [code postal] Genève", pour une créance de 112'110 fr. 30, plus intérêt à 5 % l'an dès le 1er juillet 2023, à titre de montant dû selon l'art. 3 de la convention du 1er février 2023.

f. L'Office cantonal des poursuites (ci-après l'Office) a invité la poursuivante, par courrier du 9 janvier 2024, à modifier la formulation de sa réquisition de poursuite, sous peine de rejet, car elle visait une succursale, soit une entité ne disposant pas de la personnalité juridique, et n'invoquait pas expressément l'application du for spécial de l'art. 50 LP.

g. B______ SA a modifié sa réquisition en ce sens le 17 janvier 2024.

h. L'Office a notifié le 2 février 2024, à "A______, PARIS, rue 2______ no. ______, [code postal] Paris", à l'adresse de sa succursale A______, GENEVE, un commandement de payer, poursuite n° 4______.

Aucune opposition n'a été formée au commandement de payer.

i. B______ SA a requis la continuation de la poursuite le 22 février 2024.

j. L'Office a notifié le 21 mars 2024 une commination de faillite à "A______, PARIS, rue 2______ no. ______, [code postal] Paris", à l'adresse de sa succursale A______, GENEVE.

B. a. Par acte expédié le 9 avril 2024 à la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites (ci-après la Chambre de surveillance), A______, PARIS a formé une plainte contre la commination de faillite et la poursuite, concluant à la constatation de leur nullité, subsidiairement à leur annulation.

Elle invoquait l'inexigibilité du montant réclamé en poursuite, ainsi que l'absence de personnalité, de capacité d'ester en justice et de capacité à être partie à une poursuite de A______, GENEVE.

b. Dans ses déterminations du 30 avril 2024, B______ SA a conclu au rejet de la plainte au motif que la poursuite visait A______, PARIS, mais au for de sa succursale de Genève pour les dettes de cette dernière. Quant aux griefs visant la créance en poursuite, ils auraient dû être soulevés dans le cadre d'une opposition au commandement de payer ou par d'autres voies que la plainte.

c. Dans ses observations du 2 mai 2024, l'Office a conclu au rejet de la plainte pour des motifs similaires.

d. La Chambre de surveillance a avisé les parties par courrier du 6 mai 2024 que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Déposée en temps utile (art. 17 al. 2 LP) et dans les formes prévues par la loi
(art. 9 al. 1 et 2 LALP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicables par renvoi de l'art. 9 al. 4 LALP), auprès de l'autorité a priori compétente pour en connaître (art. 6 al. 1 et 3 LALP; art. 17 al. 1 LP), à l'encontre d'une mesure de l'Office pouvant être attaquée par cette voie (art. 17 al. 1 LP) et par une partie potentiellement lésée dans ses intérêts (ATF
138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3), la plainte est formellement recevable.

2. La plaignante invoque l'inexigibilité de la créance en poursuite.

2.1 L'autorité de surveillance n'est pas compétente pour statuer sur le bienfondé matériel des prétentions du créancier déduites en poursuite qui relèvent de la compétence du juge ordinaire; elle n'est notamment pas compétente pour déterminer si le poursuivi est bien le débiteur du montant qui lui est réclamé; ce dernier doit faire valoir les moyens que lui offre la procédure de poursuite, soit notamment l'opposition au commandement de payer, l'action en libération de dette, l'annulation de la poursuite ou l'action en constatation de l'inexistence de la dette. En effet, c'est une particularité du droit suisse que de permettre l'introduction d'une poursuite sans devoir prouver l'existence de la créance; le titre exécutoire n'est pas la créance elle-même, ni le titre qui l'incorpore cas échéant, mais seulement le commandement de payer passé en force (parmi d'autres : ATF 136 III 365 consid. 2.1, avec la jurisprudence citée; 115 III 18 consid. 3b; 113 III 2 consid. 2b; arrêts du Tribunal fédéral 5A_250-252/2015 du 10 septembre 2015 consid. 4.1; 5A_76/2013 du 15 mars 2013 consid. 3.1; 5A_890/2012 du 5 mars 2013 consid. 5.3).

2.2 En l'espèce, la plaignante n'a pas formé opposition au commandement de payer qui lui a été notifié de sorte que celui-ci est passé en force et l'Office était tenu de donner suite à la réquisition de continuer la poursuite par la notification d'une commination de faillite, la débitrice étant en l'occurrence sujette à ce mode de réalisation forcée (art. 39, 88, 159 LP).

L'autorité de surveillance ne peut connaître, dans le cadre d'une plainte visant la commination de faillite, de griefs visant les fondements, la quotité, l'exigibilité et/ou l'extinction de la créance en poursuite. Seul le juge civil est matériellement compétent pour statuer sur ces objets dans le cadre des actions mentionnées ci-dessus, dans la mesure où elles sont encore ouvertes.

Les griefs de la plaignante visant l'exigibilité de la créance en poursuite sont par conséquent irrecevables faute de compétence matérielle de l'autorité de céans pour en connaître.

3. La plaignante invoque également l'absence de capacité d'être poursuivie de la succursale genevoise de A______ PARIS.

3.1 A teneur de l'art. 50 al. 1 LP, le débiteur domicilié à l'étranger qui possède un établissement en Suisse peut y être poursuivi pour les dettes de celui-ci.

La succursale suisse d'une entité ayant son siège à l'étranger est un établissement au sens de l'art. 50 al. 1 LP (art. 935 al. 2 CO; Schüpbach, Commentaire Romand, Poursuite et faillite, n° 10 ad art. 50 LP).

Bien que jouissant d'une certaine autonomie, une succursale est dépourvue d'existence juridique et n'a pas la capacité d'ester en justice, ni celle d'être poursuivie. Une poursuite requise par ou contre une entité dépourvue de la capacité d'être partie, parce que ne jouissant pas de la personnalité juridique, est nulle de plein droit. Lorsque dans une poursuite une succursale se voit attribuer la qualité de créancière ou débitrice, alors qu'en réalité seule la société à laquelle elle appartient est visée, l'on admet en général qu'il y a simplement désignation inexacte d'une partie; si la partie qui fait état de la désignation vicieuse ne pouvait douter de l'identité de la personne en cause et qu'elle n'a pas été lésée dans ses intérêts, la poursuite ne sera pas annulée; on se bornera à ordonner, en cas de besoin, que les actes de poursuite déjà établis soient rectifiés ou complétés (ATF 120 III 11 consid. 1; 117 II 85 consid. 3; 115 III 16 consid. 2; 114 III 62 consid. 1a).

3.2 En l'espèce, B______ SA, suite à l'interpellation de l'Office, a bien poursuivi la société A______, PARIS, mais au for de sa succursale genevoise. La poursuite est ainsi dirigée contre une entité dotée de la personnalité juridique, susceptible d'être poursuivie, et non contre la succursale genevoise, dépourvue de personnalité juridique.

Le grief de la plaignante est par conséquent infondé et la plainte sera rejetée sur cet objet.

4. En conclusion, la plainte sera rejetée dans la mesure de sa recevabilité.

5. La procédure devant l'autorité de surveillance est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP; art. 61 al. 2 let. a OELP) et ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

Rejette dans la mesure de sa recevabilité la plainte du 9 avril 2024 de A______, PARIS contre la poursuite et la commination de faillite n° 4______.

 

Siégeant :

Monsieur Jean REYMOND, président; Madame Natalie OPPATJA et
Monsieur Mathieu HOWALD, juges assesseurs; Madame Véronique AMAUDRY-PISCETTA, greffière.

 

Le président : La greffière :

 

Jean REYMOND Véronique AMAUDRY-PISCETTA

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.