Skip to main content

Décisions | Tribunal administratif de première instance

1 resultats
A/1927/2025

JTAPI/752/2025 du 09.07.2025 ( OCPM ) , IRRECEVABLE

Descripteurs : EXÉCUTION(PROCÉDURE);DÉCISION;RENVOI(DROIT DES ÉTRANGERS)
Normes : LPA.59.letb
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1927/2025

JTAPI/752/2025

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 9 juillet 2025

 

dans la cause

A______ SÀRL, représentée par Me Christophe GAL, avocat, avec élection de domicile

 

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Madame B______, née le ______ 1971, est ressortissante du Kosovo.

2.             A______ Sàrl est une société inscrite au registre du commerce de Genève, ayant pour but l'exploitation d'une blanchisserie et teinturerie, soit notamment le lavage, le traitement, le commerce, la location, le leasing de tout textile naturel ou artificiel, le nettoyage chimique et autre, ainsi que toutes prestations relatives à ces objets.

3.             Le 18 octobre 2018, Mme B______ a déposé auprès de l'office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM) une demande de régularisation de ses conditions de séjour, indiquant vivre à C______ depuis quatorze ans et travailler pour A______ Sàrl.

À l'appui de sa demande, elle a notamment fourni un formulaire M signé par A______ Sàrl.

4.             Le 13 mars 2019, l’OCPM a délivré à Mme B______ une autorisation de travail révocable en tout temps, lui permettant d’être occupée par A______ Sàrl. Cette autorisation était accordée jusqu’à droit connu sur sa demande d’autorisation de séjour.

5.             Par décision du 27 janvier 2023, l'OCPM a refusé d'accéder à la requête du 18 octobre 2018 et, par conséquent, de soumettre son dossier au secrétariat d'État aux migrations avec un préavis positif et a prononcé son renvoi de Suisse.

6.             Cette décision a été confirmée par le Tribunal administratif de première instance (ci‑après : le tribunal), le 25 janvier 2024 (JTAPI/62/2024) et, en dernière instance, par la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative), le 4 février 2025 (ATA/140/2025).

7.             Par lettre du 24 avril 2025, l’OCPM a imparti à Mme B______ un délai au 24 juillet suivant pour quitter la Suisse, compte tenu de ce que la décision du 27 janvier 2023 était désormais exécutoire.

8.             Par courrier du même jour, l'OCPM a informé A______ Sàrl qu'à partir du 24 juillet 2025, Mme B______ n'était plus autorisée à travailler pour elle. Cette entreprise était invitée à retourner le formulaire R (déclaration de fin des rapports de service) dûment complété et signé.

9.             Par acte du 26 mai 2025, A______ Sàrl, sous la plume de son conseil, a formé recours auprès du tribunal, concluant, préalablement, à l’octroi de l’effet suspensif, principalement, à l’annulation de la décision du 24 mai 2025 la concernant et à ce que l’OCPM délivre à Mme B______ une autorisation de séjour avec activité lucrative, le tout sous suite de dépens.

10.         Dans ses observations du 17 juin 2025, l'OCPM a conclu à l’irrecevabilité du recours, voire à son rejet.

Le courrier adressé à A______ Sàrl, tout comme le délai de départ assorti à Mme B______, constituait une sommation dépourvue d’effets juridiques nouveaux et ne faisait que régler les modalités d’un renvoi entré en force. Il devait être considéré comme une mesure d’exécution de la décision de renvoi, définitive et exécutoire prononcé à l’encontre de la prénommée.

L’OCPM s’est par ailleurs opposé à l’octroi de l’effet suspensif et à l’octroi de mesures provisionnelles, dès lors que Mme B______ devrait quitter la Suisse dans le délai imparti et qu’elle était autorisée à travailler jusqu’à ce moment.

Enfin, la demande d’autorisation de séjour devait être rejetée, dès lors qu’elle dépassait le cadre de la procédure. Si A______ Sàrl souhaitait embaucher Mme B______, elle devait déposer une demande complète, qui serait instruite par le service de la main-d’œuvre étrangère.

11.         La recourante s'est déterminée sur la restitution de l'effet suspensif le 30 juin 2025.

La décision querellée ne pouvait être qualifiée de décision négative. En effet, Mme B______ s'était vu accorder une autorisation de séjour avec une activité lucrative en date du 13 mars 2019, laquelle, bien que provisoire, conférait un droit au séjour régulier avec activité lucrative à Mme B______. Il convenait dès lors de pondérer les intérêts en cause. L'intérêt privé de la recourante, ainsi que celui de Mme B______, prévalait sur l'intérêt public de l'OCPM.

En effet, elle avait assuré la formation de Mme B______ au sein de son entreprise pendant plus de six ans. Par ailleurs, la révocation de l'autorisation de séjour avec activité lucrative du 24 avril 2025 plaçait la recourante dans une situation particulièrement délicate, dès lors qu'elle faisait face à d'importantes difficultés de recrutement de personnel qualifié pour les activités de blanchisserie en atelier. En outre, Mme B______ s'était constamment distinguée par une conduite irréprochable au sein de son entreprise, faisant preuve d'un professionnalisme constant ainsi que d'une remarquable capacité d'adaptation aux exigences de son poste. Il ne pouvait ainsi être retenu que l'intérêt public primait sur les intérêts privés tant de la recourante, qui comptait sur la collaboration de son employée après l'avoir formé pendant plusieurs années, que de Mme B______ qui avait tissé un réseau social local à Genève.

 

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             En vertu de l'art. 57 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), sont susceptibles d'un recours les décisions finales (let. a), les décisions par lesquelles l'autorité admet ou décline sa compétence (let. b), ainsi que les décisions incidentes, si elles peuvent causer un préjudice irréparable ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (let. c).

Selon l'art. 59 let. b LPA, le recours n'est pas recevable contre les mesures d'exécution des décisions.

3.             Si un acte ne fait que reprendre, sans les modifier, des obligations figurant déjà dans une décision antérieure, il n'y a pas d'objet possible à un recours et l'acte en cause doit être qualifié de mesure d'exécution, non sujette à recours (ATF 129 I 410 consid. 1.1). Le recours dirigé contre une décision d'exécution ne permet pas de remettre en cause la décision au fond, définitive et exécutoire, sur laquelle elle repose (ATF 119 Ib 492 consid. 3c/cc et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_603/2012 du 19 septembre 2013 consid. 4.1). On ne saurait faire exception à ce principe que si la décision tranchant le fond du litige a été prise en violation d'un droit fondamental inaliénable et imprescriptible du recourant ou lorsqu'elle est nulle de plein droit (arrêt du Tribunal fédéral 1C_46/2014 du 18 février 2014 consid. 2.3).

4.             Le Tribunal fédéral a jugé que lorsqu’une décision attaquée n'a pas les caractéristiques d'un prononcé sur le fond, mais seulement d'une décision d'exécution, les griefs reposant sur un droit de séjourner en Suisse ou mettant en cause le refus d'octroyer une autorisation de séjour en vue du mariage sont irrecevables (arrêt 2D_6/2024 du 26 mars 2024 consid. 6).

Il a également été jugé que la fixation du délai de départ n'est pas une décision, mais une modalité d'exécution de la décision par laquelle il est mis fin au séjour ou constaté que celui-ci est arrivé à son terme (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-3488/2009 du 9 juin 2009).

5.             En l’espèce, le 13 mars 2019, l’OCPM a délivré à Mme B______ une autorisation de travail révocable en tout temps, lui permettant d’être occupée par A______ Sàrl. Cette autorisation était accordée jusqu’à droit connu sur la demande d’autorisation de séjour de la prénommée. L’entrée en force de la décision de renvoi de l’OCPM du 27 janvier 2023, résultant du fait que l’arrêt de la chambre administrative du 4 février 2025 n’a pas été contesté, a eu pour effet que ladite autorisation de travail est devenue caduque.

Dans la lettre que l’OCPM a adressée le 24 avril 2025 à A______ Sàrl, cette autorité a informé cette société que Mme B______ ne serait plus autorisée à travailler pour elle à compter du 24 juillet 2025. Cette date correspond également à l’échéance du délai de départ fixé à l’intéressée. Le fait que A______ Sàrl ne soit plus autorisée à employer Mme B______ à partir du 24 juillet 2025 découle de l’obligation faite à cette dernière de quitter la Suisse au plus tard à cette date. Le courrier susmentionné ne constitue pas une décision susceptible de recours, mais une simple mesure d’exécution de la décision de renvoi entrée en force.

Il résulte de ce qui précède que le recours interjeté à l’encontre du courrier du 24 avril 2025 doit être déclaré irrecevable. Il s’ensuit également que le tribunal n’a pas se prononcer sur la question de l’effet suspensif et/ou des mesures provisionnelles.

6.             Enfin, en ce qui concerne la demande d’autorisation de séjour avec activité lucrative sollicitée par A______ Sàrl, cette question est exorbitante à l’objet du litige. Cette société est invitée, si elle le souhaite, à déposer une demande auprès de l’OCPM qui requerra une décision préalable de la part de l’office cantonal de l’inspection et des relations du travail (art. 6 du règlement d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 9 mars 2009 - RaLEtr - F 2 10.01).

7.             En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante, qui succombe, est condamnée au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 250.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Le solde de l’avance de frais de CHF 250.- lui sera restitué. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

8.             En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision sera communiquée au secrétariat d'État aux migrations.


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare irrecevable le recours interjeté le 26 mai 2025 par A______ Sàrl contre le courrier de l'office cantonal de la population et des migrations du 24 avril 2025 ;

2.             met à la charge de la recourante un émolument de CHF 250.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

3.             ordonne la restitution à la recourante du solde de l’avance de frais de CHF 250.- ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Kristina DE LUCIA

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière