Décisions | Tribunal administratif de première instance
JTAPI/95/2025 du 29.01.2025 ( MC ) , REJETE
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
POUVOIR JUDICIAIRE
JUGEMENT DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PREMIÈRE INSTANCE du 29 janvier 2025
|
dans la cause
Monsieur A______, représenté par Me Samy TABET, avocat
contre
OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS
1. Monsieur A______, né le ______ 1991, est ressortissant du Togo.
2. Entre 2001 et 2015, M. A______ a été au bénéfice d'un permis C.
Par décision du 22 mai 2018, le département de la sécurité et de l’économie a révoqué l'autorisation d'établissement de l'intéressé et prononcé son renvoi de Suisse en l'enjoignant de quitter le territoire helvétique dès qu'il aurait donné satisfaction à la justice pénale. Il avait fait l'objet de dix condamnations pénales en l'espace de huit ans - dont l'avant-dernière à 4 ans de privation de liberté pour brigandage commis à réitérées reprises et délit à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121) - totalisant une peine cumulée de plus de 10 ans de privation de liberté. Il ne pouvait pas se prévaloir d'une intégration socio-professionnelle réussie en Suisse, n'ayant jamais acquis de formation, ni intégré de manière stable et durable le marché de l'emploi et ayant été assisté par l'aide sociale. Cette décision a été confirmée tant par le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) que par la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), le Tribunal fédéral ayant, quant à lui, déclaré le recours irrecevable.
Il ressort par ailleurs de l'extrait de son casier judiciaire que l'intéressé, outre pour brigandage (au sens de l'art. 140 ch. 1 et 2 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 - CP - RS 311.0), a également été condamné pour les crimes d'abus de confiance et de vol, au sens des art. 138 ch. 1 et 139 ch. 1 CP.
3. Demeuré en Suisse en dépit de la décision révoquant son permis C et prononçant son renvoi de Suisse, M. A______ a été, à nouveau, interpellé le 11 octobre 2022 par les forces de l'ordre genevoises. Il a été prévenu d'injure, d'agression, de lésions corporelles simples et graves ainsi que de séjour illégal, et maintenu en arrestation provisoire.
4. Par jugement du 27 septembre 2023, le Tribunal correctionnel a reconnu M. A______ coupable de lésions corporelles simples (art. 123 ch. 1 et ch. 2 al. 5 CP), de voies de fait (art. 126 ch. 1 et 2 let. c CP), d'injure ainsi que d'infraction à l'art. 115 let. a et b de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20). Il l'a condamné à une peine privative de liberté de 2 ans (sous déduction de 352 jours de détention avant jugement) et a ordonné qu'il soit soumis à un traitement psychothérapeutique ambulatoire, au sens de l'art. 63 CP - le rapport d'expertise psychiatrique établi par le B______ le 28 mars 2023 ayant diagnostiqué M. A______ comme souffrant d'un trouble léger de la personnalité avec traits dyssociaux prédominants et relevé que l'intéressé présentait un risque faible à moyen de récidive d'infractions violentes générales mais un risque moyen à élevé de commettre des infractions contre l'intégrité corporelle de sa compagne. Simultanément, le Tribunal correctionnel a ordonné l'expulsion de Suisse de M. A______ pour une durée de 5 ans, mesure que l'autorité administrative compétente a décidé de ne pas reporter.
5. Durant sa détention pénale, le 5 janvier 2024, M. A______ a été entendu par la Cellule entretien aux départs de la police, laquelle a rappelé à l'intéressé que les autorités suisses étaient chargées de l'exécution de la mesure d'expulsion prononcée à son encontre et qu'à cette fin, un vol à destination de son pays d'origine serait réservé pour sa sortie de prison. Lors de cet entretien, l'intéressé a notamment indiqué qu'il « compte, dans un premier temps essayer de réussir [sa] vie en France et par la suite s'[il peut] le faire, [s]'établir avec sa compagne qui vit actuellement à Genève ». S'agissant de son retour dans son pays d'origine, il a déclaré: « […] je n'arrive pas mentalement à concevoir ce voyage. […] je préfère même mourir que de retourner là-bas ». Pour ce qui était de ses moyens de subsistance, il a indiqué n'avoir « que [son] dépôt ». Tout en indiquant savoir n'être au bénéfice d'aucun titre de séjour, ni en Suisse, ni en France, il a ajouté vouloir « obtenir un délai de 24 heures à [sa] sortie pour pouvoir [s]'organiser et se rendre en France ».
Lors de cet entretien, M. A______ a par ailleurs allégué avoir un fils de deux ans, C______. Sa prétendue paternité n'était pas attestée par la base de données cantonale.
6. Par ordonnance du 29 février 2024, le Tribunal d'application des peines et des mesures a refusé la libération conditionnelle à M. A______. À cet égard, il a notamment retenu que: « […] par rapport à son projet de retourner en France, le cité n'a aucune garantie de pouvoir séjourner légalement dans ce pays, dès lors qu'il ne bénéficie d'aucune autorisation de séjour. Sans compter que les promesses d'embauche produites ne semblent pas crédibles : l'une émane prétendument d'une société parisienne mais est établie sur une page vierge sans logo ni mention du numéro du registre du commerce et des sociétés (RSC), sans désignation de la personne signant au nom de l'« employeur » et orthographiant mal le nom du cité qui est raturé, et la seconde, émanant prétendument du salon de coiffure D______, établie à la main, sur une page vierge sans logo, sans date ni mention de l'entrée en vigueur du contrat et du salaire convenu. De plus, de manière inexpliquée, le cité fournit non pas une seule mais deux attestations d'hébergement, ce qui rend peu crédible la véracité desdites attestations. En l'état, rien n'indique que le cité saurait mettre davantage à profit une nouvelle libération conditionnelle, les fruits du suivi psychothérapeutique étant trop récents, et le risque qu'il commette de nouvelles infractions apparaît très élevé, étant précisé qu'à teneur des dernières condamnations figurant à son casier judiciaire, ce risque porte sur des infractions graves, telles que des brigandages ».
7. Le 2 avril 2024, l'office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM) a adressé à l'intéressé - lequel était démuni de document de voyage en cours de validité - un courrier afin de lui indiquer que, faute de démontrer pouvoir se rendre légalement en France, son refoulement serait exécuté à destination de son pays d'origine, de l'encourager à effectuer des démarches auprès de sa représentation diplomatique en vue de la délivrance d'un laissez-passer en sa faveur et de l'informer de ce qu'il était susceptible de faire l'objet d'une détention administrative à l'issue de sa détention pénale.
8. M. A______ ayant indiqué, lors de son audition par la Cellule entretien aux départs, être également originaire de Côte d'Ivoire, il a été présenté, le 4 juin 2024, à une délégation ivoirienne dans le cadre d'auditions centralisées, délégation qui ne l'a pas identifié comme étant un ressortissant de cet État.
9. À sa sortie de prison, le 14 octobre 2024, M. A______ a été remis entre les mains des services de police en vue de son refoulement.
10. Le 14 octobre 2024, à 14h10, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de quatre mois, en application de l’art. 76 al. 1 let. b ch. 1 - renvoyant à l’art. 75 al. 1 let. h LEI -, 3 et 4 LEI.
Au commissaire de police, M. A______ a déclaré qu'il s'opposait à son renvoi au Togo et souhaitait être placé à Frambois.
Selon le procès-verbal, la détention administrative de M. A______ pour des motifs de droit des étrangers avait débuté le même jour à 14h10.
L’ordre de mise en détention indiquait par ailleurs que M. A______ devait être présenté, en vue de la délivrance d'un laissez-passer en sa faveur, aux prochaines auditions centralisées qui seraient menées par une délégation du Togo. Selon les dernières informations transmises à cet égard par le secrétariat d'État aux migrations (ci‑après : SEM), ces auditions devraient avoir lieu fin novembre ou début décembre 2024.
11. Le commissaire de police a soumis cet ordre de mise en détention au tribunal le même jour.
12. Entendu le 17 octobre 2024 par le tribunal, M. A______ a déclaré qu’il s’opposait à son renvoi au Togo. En effet, il n’y était pas né, n’y avait jamais vécu et n'y avait aucune famille. Il n’avait entrepris aucune démarche auprès de l'ambassade du Togo à Genève. Sa mère, qui était décédée, était ivoirienne. Son père, d'origine togolaise, était suisse, mais leurs relations étaient très chaotiques.
Il avait été présenté à une délégation de la Côte d'Ivoire qui ne l’avait pas reconnu comme étant l'un de leurs ressortissants. Il avait de la famille en France, il y avait un logement et du travail et il aurait souhaité régulariser sa situation dans ce pays. Durant son incarcération, il avait essayé d'entreprendre des démarches avec la France, mais sa présence physique était nécessaire et il n’avait rien pu concrétiser.
Il avait un fils, qui s'appelait C______, né le ______ 2022. Il n’avait pas eu la possibilité de le reconnaître, car il lui fallait des documents provenant de son pays d'origine. Son fils habitait à Genève avec sa mère, Madame D______, originaire de Madagascar, au bénéfice d'un permis C. Ils étaient toujours en couple et leurs relations étaient très bonnes. Sa compagne et son fils étaient régulièrement venus lui rendre visite en prison. Il leur versait également ce qu’il pouvait, soit environ CHF 200.- par mois, pour les aider. Sa compagne serait d'accord de vivre en France avec lui et leur enfant. Une grande partie de sa famille habitait en Suisse, à savoir son père, son frère, sa sœur, ses tantes, oncles, cousins et neveux. Ils habitaient entre Genève, ______ (VD), ______ (VD), etc. Il avait aussi des oncles et des tantes qui habitaient en France en région parisienne, également à ______, (FR) à ______ (FR)et à ______ (FR). Sur question de son conseil, il a indiqué qu’il n’avait pas reçu le courrier d'avertissement de l'OCPM l'informant qu’il risquait de voir son permis C être révoqué.
Le conseil de l’intéressé a remis au tribunal une attestation de suivi psychothérapeutique délivrée par les Hôpitaux universitaires de Genève le 10 octobre 2024.
La représentante du commissaire de police a confirmé qu'il était prévu de présenter M. A______ à une délégation togolaise en vue de la délivrance de son laissez-passer. En effet, s'il était volontaire à son renvoi dans ce pays, il suffirait alors d'organiser, par l'intermédiaire du SEM, un rendez-vous avec son ambassade pour la délivrance du laissez-passer nécessaire qui pourrait avoir lieu très rapidement. Selon les informations du SEM, une délégation togolaise ne devrait pas venir en Suisse avant la fin novembre, voire le début du mois de décembre 2024.
M. A______ a indiqué qu’aujourd’hui, il ne s'opposait pas à faire des démarches auprès de l'ambassade du Togo pour un renvoi dans ce pays dans la mesure où la durée de sa détention s'en trouverait abrégée et si le laissez-passer lui était bien délivré.
La représentante du commissaire de police a relevé que M. A______ n'avait pas donné suite à leur correspondance du 2 avril 2024 qui mentionnait qu'il lui appartenait de faire des démarches auprès de son ambassade. Concernant sa présentation à la délégation ivoirienne, dès lors que M. A______ avait mentionné la possibilité qu'il soit ressortissant de cet État et compte tenu de la rareté de la présence de ces délégations en Suisse, il avait été jugé opportun de présenter M. A______ à cette délégation qui se trouvait à ______ (BE) pendant la période de détention de l'intéressé. Cette démarche avait été entreprise précisément dans le but de faire avancer les démarches.
M. A______ a indiqué s’être mal exprimé et qu'il ne souhaitait pas repartir au Togo.
Sur question de la représentante du commissaire de police, il a indiqué qu’il avait été condamné par le Tribunal correctionnel pour des voies de fait qui concernaient notamment, mais pas seulement, la mère de son enfant. Il a précisé qu’il avait une adresse à Genève, que ce soit chez un membre de sa famille ou auprès de sa compagne, peu importait.
La représentante du commissaire de police a remis au tribunal une copie des documents d'identité togolais de M. A______, lesquels étaient périmés. Elle a conclu à la confirmation de l'ordre de mise en détention administrative prononcé à l'encontre de M. A______ pour une durée de quatre mois.
Le conseil de l’intéressé a conclu, à titre principal, à l'annulation de l'ordre de mise en détention administrative prononcé à l'encontre de M. A______ et au prononcé d'une mesure d'assignation à résidence jusqu'à l'exécution du renvoi de M. A______ dans son pays d'origine, subsidiairement à la réduction de la durée de la détention administrative à trois mois.
13. Par jugement du 18 octobre 2024 (JTAPI/1023/2024), le tribunal a confirmé l’ordre de mise en détention administrative prise par le commissaire de police le 14 octobre 2024 pour une durée de quatre mois, soit jusqu’au 13 février 2025 inclus.
Non contesté, ce jugement est entré en force.
14. Par requête du 17 janvier 2025, reçue le 20 janvier 2025 au tribunal, M. A______ a déposé une demande de mise en liberté.
Totalement contre l’idée de partir au Togo, il avait son fils et sa famille en Suisse.
15. Lors de l'audience du 28 janvier 2025, devant le tribunal, M. A______ a déclaré qu'il avait déposé sa demande de mise en liberté du fait qu'il était en possession d'une attestation d'hébergement et que depuis le début de sa détention, absolument rien n'avait évolué dans son dossier. Il n'avait entrepris personnellement aucune démarche en vue de son renvoi au Togo. A ce jour, il s'opposait toujours à son renvoi au Togo. N'ayant pas de passeport valable, il n'avait pas pu reconnaitre officiellement son fils, mais ce dernier portait son nom de famille : il habitait avec sa mère à la route ______ [GE]. Il était né le ______ 2022. Il confirmait que lors de son audition du 17 octobre 2024 déjà, il avait indiqué qu'il s'opposait à son renvoi au Togo. Il souhaitait obtenir une autorisation de travail en France : il pourrait travailler à Paris dans le bâtiment, mais il ne se souvenait pas actuellement du nom de l'entreprise qui pourrait l'engager. L'objectif était de s'installer à ______ (France). Il avait une personne qui s'occupait des démarches avec les autorités françaises mais il n'avait pas d'information. Son fils et sa mère resteront à Genève. A la question de la Présidente, il indiquait qu'il n'était pas togolais ; il était né en Côte d'Ivoire, avait effectivement eu des passeports togolais qui avaient été établis par son père qui était lui-même togolais. Il n'avait jamais été au Togo et était arrivé en Suisse à huit ans.
Son conseil a déposé un bordereau de pièces le concernant.
La représentante de l'OCPM a produit un courriel du SEM indiquant qu'une audition centralisée avec les autorités togolaises aurait lieu entre le 23 et le 28 février 2025. Elle a précisé que les délégations étaient invitées par les autorités suisses et que c'étaient ces dernières qui décidaient des dates de leur venue en Suisse en vue des auditions centralisées. L'annexe au courriel qu'elle avait produit était un document diplomatique qui n'amenait rien à la procédure : ce qui était important c'était la date de la venue des autorités du Togo. Elle a conclu au rejet de la demande de mise en liberté formée par M. A______ le 17 janvier 2025.
L'intéressé, par l'intermédiaire de son conseil, a conclu à sa mise en liberté immédiate, subsidiairement à ce qu'une assignation à un périmètre soit prononcée, qui se limiterait au canton de Genève.
1. Le Tribunal administratif de première instance (ci-après le tribunal) est compétent pour examiner les demandes de levée de détention faites par l'étranger (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. g de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).
2. Selon l'art. 80 al. 5 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), l’étranger en détention peut déposer une demande de levée de détention un mois après que la légalité de cette dernière a été examinée. L’autorité judiciaire se prononce dans un délai de huit jours ouvrables, au terme d’une procédure orale.
Cela étant, l'art. 7 al. 4 let. g LaLEtr prévoit que la personne détenue peut déposer en tout temps une demande de levée de détention.
Sur ce point, il a été jugé que le droit cantonal peut déroger au droit fédéral, dans la mesure où il étend les droits de la personne détenue (DCCR du 27 mars 2008 en la cause MC/023/2008 et du 24 avril 2008 en la cause MC/026/2008).
Le tribunal statue alors dans les huit jours ouvrables qui suivent sa saisine sur la demande de levée de détention (art. 9 al. 4 LaLEtr).
3. En l'espèce, la demande de levée de la détention administrative formée par M. A______ le 17 janvier 2025 est recevable et la décision du tribunal intervient dans le respect du délai légal susmentionné.
4. Selon l'art. 80 al. 6 let. a LEI, la détention administrative d'une personne étrangère devant quitter le territoire suisse doit être levée si l'exécution du renvoi ou de l'expulsion s'avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles. Dans ce cas, la détention dans l'attente de l'expulsion ne peut en effet plus être justifiée par une procédure d'éloignement en cours; elle est, de plus, contraire à l'art. 5 par. 1 let. f CEDH (cf. ATF 130 II 56 consid. 4.1.1; arrêt 2C_216/2023 du 22 juin 2023 consid. 6.1 et les arrêts cités). Il s'agit d'évaluer la possibilité d'exécuter la décision de renvoi en fonction des circonstances de chaque cas d'espèce. Le facteur décisif est de savoir si l'exécution de la mesure d'éloignement semble possible dans un délai prévisible, respectivement raisonnable avec une probabilité suffisante (arrêts 2C_468/2022 du 7 juillet 2022 consid. 4.1; 2C_233/2022 du 12 avril 2022 consid. 4.3.1; 2C_984/2020 du 7 janvier 2021 consid. 4.1; 2C_955/2020 du 10 décembre 2020 consid. 5.1; 2C_634/2020 du 3 septembre 2020 consid. 6.1). Sous l'angle de l'art. 80 al. 6 let. a LEI, la détention ne doit être levée que si la possibilité de procéder à l'expulsion est inexistante ou hautement improbable et purement théorique, mais pas s'il y a une chance sérieuse, bien que mince, d'y procéder (cf. ATF 130 II 56 consid. 4.1; arrêt 2C_468/2022 du 7 juillet 2022 consid. 4.1 et les arrêts cités).
5. Selon l'art. 80 al. 7 LEI, la détention est levée dans les cas suivants:
a. le motif de la détention n’existe plus ou l’exécution du renvoi ou de l’expulsion s’avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles;
b. la demande de levée de la détention est admise;
c. la personne détenue doit subir une peine ou une mesure privative de liberté.
6. Selon l'art. 76 al. 4 LEI, les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi ou de l'expulsion doivent être entreprises sans tarder (« principe de célérité ou de diligence »). Les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi ou de l'expulsion doivent être entreprises sans tarder (art. 76 al. 4 LEI).
Le principe de célérité est considéré comme violé lorsque, pendant plus de deux mois, aucune mesure en vue du renvoi ou de l'expulsion n'a été effectuée par les autorités compétentes de droit des étrangers (cantonales ou fédérales), sauf si le retard est imputable en premier lieu au comportement des autorités étrangères ou de l'étranger concerné (ATF 139 I 206 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_387/2023 du 7 août 2023 consid. 7.1, les deux avec les arrêts cités). Les autorités ne peuvent toutefois se prévaloir du manque de collaboration de l'étranger que pour autant qu'elles-mêmes ne soient pas restées inactives (ATF 139 I 206 consid. 2.3). En d'autres termes, le manque de collaboration de l'étranger ne justifie pas l'inactivité des autorités, qui doivent mener la procédure de renvoi avec sérieux et insistance (ATF 139 I 206 consid. 2.3). À cet égard, les autorités ne sont pas tenues de procéder schématiquement à certains actes mais doivent prendre des dispositions ciblées conçues pour faire avancer l'exécution du renvoi (ATF 139 I 206 consid. 2.1). Elles doivent en particulier tenter d'établir l'identité de l'étranger et d'obtenir rapidement les documents nécessaires à son renvoi, même sans la collaboration de l'intéressé (ATF 139 I 206 consid. 2.3 et la référence citée). Elles doivent aussi relancer les autorités étrangères et non pas se contenter d'attendre passivement que celles-ci se manifestent (arrêt du Tribunal fédéral 2C_428/2023 du 11 octobre 2023 consid. 5.2 et les références citées).
Un constat de violation du principe de célérité conduit en principe à la libération du détenu (ATF 139 I 206 consid. 2.4).
7. Selon l'art. 79 al. 1 LEI, la détention en vue du renvoi ne peut excéder six mois au total. Cette durée maximale peut néanmoins, avec l'accord de l'autorité judiciaire cantonale, être prolongée de douze mois au plus, lorsque la personne concernée ne coopère pas avec l'autorité compétente (art. 79 al. 2 let. a LEI) ou lorsque l'obtention des documents nécessaires au départ auprès d'un État qui ne fait pas partie des États Schengen prend du retard (art. 79 al. 2 let. b LEI).
8. En l’espèce, M. A______ fait valoir que son dossier n’avait pas avancé depuis sa mise en détention le 14 octobre 2024 et qu’il pourrait loger chez son père, Monsieur E______.
Il ressort du dossier que les autorités ont entrepris toutes les démarches nécessaires depuis la mise en détention de M. A______ puisqu’elles avaient indiqué lors de l’audience du 17 octobre 2024 que M. A______ devait être présenté à une délégation togolaise et que, lors de l’audience du 28 janvier 2025, il a été confirmé que celle-ci était prévue pour le 25 février 2025. Si, certes, la représentante du commissaire de police avait tout d’abord indiqué que cette audition pourrait avoir lieu en fin d’année 2024, il n’en demeure pas moins que la date de la venue des délégations étrangères ne dépend pas exclusivement des autorités suisses mais également du bon vouloir desdites autorités étrangères de se rendre en Suisse en vue d’auditionner les personnes potentiellement ressortissantes de leur pays.
Il s’avère par contre que M. A______ est toujours opposé à son renvoi au Togo – pays dont il conteste parfois être originaire mais dont il a toutefois eu le passeport – et n’a de son côté entrepris aucune démarche en vue de faciliter son renvoi, et n’apparait toujours pas enclin à le faire. Depuis la révocation de son permis C en mai 2018 et donc le prononcé de son renvoi, il sait qu’il doit quitter la Suisse mais ne s’est jamais soumis cette obligation, persistant à demeurer en Suisse et continuant à y commettre des infractions.
Concernant son fils, force est de constater que M. A______ n’a entrepris aucune démarche en vue de le reconnaitre et n’a pas le projet de vivre avec lui puisqu’il a expliqué en audience souhaiter se rendre à ______ (FR) pour travailler en le laissant, avec sa mère, demeurer à Genève.
Enfin, au sujet de ses projets de se rendre en France, aucun élément du dossier ne permet de retenir qu’il serait autorisé à s’y rendre, ce que M. A______ ne conteste du reste pas, ni qu’il serait sur le point de se voir délivrer une autorisation de travail – délivrance apparaissant comme hautement compromise en l’absence de documents d’identité valables.
9. Au vu de ce qui précède, il n’y a aucune impossibilité de procéder au renvoi de Suisse de M. A______ et les autorités ont agi avec diligence et célérité. M. A______ a quant à lui entre ses mains les moyens de faire accélérer les choses, notamment en donnant son accord pour être renvoyé au Togo.
Il sera souligné que, face à son refus de repartir au Togo et sa volonté de se rendre en France pour y travailler alors qu’il n’y est actuellement pas autorisé, le risque qu’il se soustraie à son renvoi apparait concret et aucune autre mesure que la détention administrative n’est envisageable afin de garantir sa présence au moment où son renvoi pourra être concrétisé. Une assignation à résidence chez son père n’apparait ainsi pas adéquate.
10. Dès lors, la demande de mise en liberté sera rejetée. En tant que de besoin, la détention administrative sera confirmée jusqu'au 13 février 2025 inclus.
11. Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à M. A______, à son avocat et à l’OCPM. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au secrétariat d'État aux migrations.
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE PREMIÈRE INSTANCE
1. déclare recevable la demande de mise en liberté formée le 17 janvier 2025 par Monsieur A______ ;
2. la rejette et confirme en tant que de besoin la détention jusqu'au 13 février 2025 inclus ;
3. dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 10 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.
Au nom du Tribunal :
La présidente
Sophie CORNIOLEY BERGER
Copie conforme de ce jugement est communiquée à Monsieur A______, à son avocat, à l’office cantonal de la population et des migrations et au secrétariat d'État aux migrations.
Genève, le |
| La greffière |