Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/959/2024 du 03.12.2024 ( AI )
En droit
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
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A/3520/2023 ATAS/959/2024 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Ordonnance d’expertise du 3 décembre 2024 Chambre 10 |
En la cause
A______ représentée par Maître Fernando Henrique FERNANDES DE OLIVEIRA, avocat
| recourante |
contre
OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE | intimé |
A. a. Madame A______ (ci-après: l’assurée), née le ______ 1981, originaire du Brésil, a travaillé en tant que manutentionnaire, employée administrative, serveuse et aide de cuisine, puis dans les domaines de la coiffure, de la manucure et de la pédicure. Elle s’est mariée au Portugal en 2011 et s’est installée avec son mari en Suisse au mois d’août 2013. Elle s’est inscrite à divers cours de français entre 2015 et février 2019, et a travaillé en qualité de nettoyeuse à temps partiel, en dernier lieu pour l’entreprise B______, du 11 novembre 2015 au 31 janvier 2018. Elle a également suivi des cours de coiffure entre janvier 2016 et août 2017, de maquillage en 2018 et d’onglerie en septembre 2018. Séparée depuis 2016, elle est aidée par l’Hospice général depuis le 1er novembre 2017.
b. À la suite de plusieurs entorses de la cheville gauche, l’assurée a été en incapacité de travail depuis le 23 août 2017 et opérée le 25 janvier 2018. La SUVA, assureur-accidents de son employeur, a pris en charge le cas. L’évolution a été défavorable, marquée par un syndrome douloureux régional complexe
(ci-après : SDRC).
c. L’assurée, en capacité de travail à 50%, s’est inscrite auprès de l’office cantonal de l’emploi (ci-après : OCE), mentionnant chercher un travail à 100%. Un
délai-cadre d’indemnisation a été ouvert en sa faveur du 17 septembre 2018 au
16 septembre 2020.
d. Le 2 novembre 2018, l’assurée a déposé une demande de prestations auprès de l’office de l’assurance-invalidité (ci-après : OAI), indiquant être en incapacité de travail à 50% depuis l’accident du 23 août 2017.
e. Le 18 janvier 2019, l’intéressée a annoncé à la SUVA, assureur-accident pour les personnes au chômage, une nouvelle torsion de la cheville gauche ayant entrainé des douleurs au niveau de cette articulation et de la colonne lombaire.
f. Par décision sur opposition du 13 mai 2019, la SUVA a mis fin aux prestations, au motif que l’assurée était apte à travailler à plein temps dès le 1er mars 2019, conformément à l’appréciation de son médecin d’arrondissement.
g. Du 6 au 31 mai 2019, l’assurée a effectué un stage d’évaluation professionnelle auprès de l’entreprise sociale privée PRO, mis en œuvre par l’OCE.
h. Le 7 juin 2019, elle a déclaré un nouveau sinistre. Elle avait chuté dans sa baignoire et s’était blessée à la jambe et au bras le 16 mai 2019.
i. Par avis du 11 juin 2019, le docteur C______, médecin auprès du service médical régional de l’OAI (ci-après : SMR), a retenu que l’assurée présentait une raideur et des douleurs persistantes de la cheville gauche, ainsi que des lombalgies, et que la poursuite de l’activité de nettoyeuse n’était plus raisonnablement exigible depuis le 22 août 2017. En revanche, la capacité de travail dans une activité sédentaire était entière. À titre de limitations fonctionnelles, il a noté que l’intéressée ne devait pas porter des charges, se déplacer en terrain accidenté, utiliser des escaliers, escabeaux et échelles, et rester en position debout prolongée.
j. Dans un rapport du 26 juin 2019, le docteur D______, rhumatologue, a notamment signalé une hyperlordose lombaire avec des douleurs média-dorsales et de la charnière lombo-sacrée.
k. Par certificats des 28 juin et 30 juillet 2019, la docteure E______, spécialiste FMH en médecine interne, a attesté d’une capacité de travail de 100% en position assise et de 50% en position debout.
l. Dans un avis du 17 septembre 2019, le Dr C______ a modifié ses précédentes conclusions, retenant que la capacité de travail dans une activité adaptée était de 50% en cas de station debout sans port de charge et de 100% dans une activité sédentaire en position assise. Le début de l’aptitude à la réadaptaient était fixé au 1er juillet 2019.
m. Par décision du 30 septembre 2019, l’OAI a octroyé à l’assurée une rente d’invalidité entière du 1er mai au 30 septembre 2019, sur la base d’un degré d’invalidité de 100%. L’intéressée avait récupéré une pleine capacité de travail le 19 mars 2019 dans une activité adaptée, puis dès le 1er juillet 2019 dans une activité adaptée et sédentaire, de sorte que le degré d’invalidité était déterminé par comparaison des revenus, avec et sans invalidité, à ces deux dates. En l’absence de toute perte de gain, le droit à la rente était supprimé au 30 septembre 2019. Cette décision est entrée en force.
B. a. Le 25 novembre 2020, l’assurée a déposé une seconde demande de prestations évoquant une dépression profonde et des angoisses suite à l’accident de la cheville de 2018.
b. Par rapport du 17 décembre 2020, le docteur F______, médecin généraliste, a mentionné un état dépressif d’intensité sévère, une fibromyalgie, des lombalgies chroniques invalidantes et des séquelles au niveau du pied gauche.
c. Le 22 décembre 2020, le docteur G______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, a diagnostiqué un épisode dépressif léger en bonne voie d’amélioration et un léger trouble de la personnalité, à traits histrioniques et anxieux. Ces atteintes n’avaient aucun impact sur la capacité de travail, entière depuis le début de sa prise en charge le 21 octobre 2020.
d. Par rapport du 5 janvier 2021, le docteur H______, spécialiste FMH en neurologie, a considéré que la patiente était apte à travailler sur le pan neurologique, mais pas sur le plan psychologique, en raison de sa détresse.
e. Le 1er juin 2021, le Dr C______ a conclu que l’assurée avait présenté un épisode dépressif responsable d’une incapacité de travail de 50% à partir du
27 avril 2020, de 100% dès le 6 octobre 2020 et de 0% à compter du
21 octobre 2020.
f. Par décision du 7 septembre 2021, l’OAI a rejeté la demande, faute de perte de gain suite à l’incapacité de travail admise du 27 avril au 20 octobre 2020.
g. L’intéressée a interjeté recours auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice contre cette décision. Dans ce cadre, elle a notamment produit :
- un rapport du 22 février 2021 de la docteure I______, spécialiste FMH en anesthésiologie et spécialiste de douleur, laquelle a indiqué suivre la patiente pour des douleurs diffuses de l'hémicorps gauche depuis
février 2021 ; une hospitalisation pour une prise en charge globale était évoquée, l’intéressée étant épuisée tant physiquement que psychiquement ;
- un rapport du 20 mai 2021 du docteur J______, médecin adjoint agrégé au service de rhumatologie des HUG, mentionnant que la patiente souffrait d’une affection somatique, soit des lombosciatalgies communes chroniques invalidantes avec de nombreux facteurs de risque de chronicité et des douleurs persistantes et invalidantes de la cheville gauche après une chirurgie pour une entorse complexe, ainsi que de troubles psychiatriques consistant en une dépression majeure et des éléments cliniques pour des attaques de panique ; ces troubles s’inscrivaient dans un contexte social particulièrement difficile et l’état de santé s’aggravait de semaine en semaine, les différentes comorbidités s’amplifiant mutuellement ; une hospitalisation à la clinique de Montana était préconisée pour rompre le cercle vicieux ;
- un rapport du 3 août 2021 relatif au séjour à la clinique de Montana du
13 juillet au 1er août 2021, en vue d’un reconditionnement, d’un soutien psychologique, de l’éloignement des facteurs de stress et d’une prise en charge de la douleur ; le diagnostic principal consistait en des douleurs chroniques accutisées dans un contexte de fibromyalgie, de SDRC et
d’anxio-dépression.
h. Dans sa réponse du 21 décembre 2021, l’OAI a conclu qu’une reprise de l’instruction s’imposait.
i. Par arrêt du 1er février 2022, la chambre des assurances sociales a annulé la décision litigieuse et renvoyé la cause à l’OAI pour instruction complémentaire (ATAS/68/2022).
j. L’OAI a reçu de nombreuses pièces médicales émanant notamment du
Dr J______ (rapports des 13 novembre 2019, 21 janvier, 2 septembre et
18 décembre 2020, 23 février, 22 juin et 8 novembre 2021, 23 mars 2022), du
Dr D______ (rapports des 20 février 2019 et 21 octobre 2020), de la Dre I______ (rapport du 27 septembre 2021), du docteur K______, médecin à la Clinique de la douleur (rapports des 17 novembre 2021 et 31 mai 2022), du docteur L______, spécialiste FMH en médecine interne (rapports des 21 mars et 31 mai 2022), du docteur M______, spécialiste FMH en médecine interne et rhumatologie (rapport du 21 novembre 2022), du docteur N______, psychiatre (rapport du 3 avril 2023), du Centre O______ de médecine et de chirurgie du pied (rapports des 3 juillet et
29 septembre 2020, 28 janvier et 19 octobre 2021, 25 avril, 21 et 23 juin, 10 novembre 2022) du département de médecine de premier recours des HUG (rapports des 18 janvier 2021 et 1er juillet 2022), un questionnaire du Centre de la douleur rempli par l’assurée le 30 juin 2022, un rapport du 27 juin 2022 suite à une infiltration L3, L4 et L5 droites.
k. L’OAI a confié une expertise bidisciplinaire à P______, réalisée le 6 avril 2023 par les docteurs Q______, spécialiste FMH en psychiatrie, et R______, spécialiste FMH en rhumatologie, lesquels ont rendu leur rapport le 23 mai 2023.
L'expert rhumatologue a diagnostiqué un status post ligamentoplastie en
janvier 2018, un status post lombalgies rachidiennes chroniques sur des discopathies, des douleurs chroniques de la cheville gauche non retrouvées au jour de l’examen, stabilisées, des discopathies rachidiennes stabilisées et une fibromyalgie. Il a considéré que, d'un point de vue de sa spécialisation, la capacité de travail était de 0% dans l’activité de nettoyeuse depuis l'accident de mars 2017 et de 100% dans une activité adaptée dès la fin de la prise en charge par la SUVA, soit à partir du 1er mars 2019, en respectant les limitations fonctionnelles qui comprenaient la nécessité de pouvoir alterner les différentes positions assis-debout, ne pas rester assise plus d’une heure et debout plus de 30 minutes, éviter la marche sur des terrains accidentés, de monter et descendre des échelles et des échafaudages, et de surcharger le rachis dans sa totalité. La performance pouvait être réduite de 10% en raison de la fatigue et des douleurs dégénératives, de sorte que la capacité de travail retenue était de 90% sur le plan somatique.
L'expert psychiatre a retenu le diagnostic de trouble anxieux et dépressif mixte (F41.2), sans incidence sur la capacité de travail, laquelle était de 100% depuis au moins le 21 octobre 2021, soit la date du début de prise en charge par le
Dr G______ qui avait alors attesté d'une capacité de travail entière. L’expert a noté que l'examen clinique ne retrouvait ni ralentissement psychomoteur, ni tristesse pathologique, ni trouble de la concentration ou de l'attention, ni trouble significatif de la mémoire. Aucune pathologie psychiatrique incapacitante n'était mise en évidence. Les plaintes rapportées concernaient les craintes de l’intéressée de se rapprocher trop des hommes, des cauchemars qui la réveilleraient la nuit et des baisses de moral en lien avec le souvenir de son mariage ou sa situation sociale actuelle. Ses plaintes constituaient une association de symptômes anxieux et dépressifs d'une sévérité mineure permettant de retenir un diagnostic de troubles anxieux et dépressifs mixtes sans impact sur la capacité à faire face à ses tâches dans la vie quotidienne, à se déplacer. L’intéressée conservait du plaisir à écouter de la musique, aimerait écrire et lire mais était gênée par les douleurs en position assise. Elle aimait lancer du pain aux canard et se rendait à l’église deux fois par semaine, et une fois par mois pour une thérapie destinée aux femmes. Elle apportait alors du coca et partageait des gâteaux avec ses coreligionnaires.
Les experts ont notamment joint des rapports apportés par l’expertisée, notamment un rapport de consultation du 15 février 2023 du
docteur S______, neurochirurgien.
l. Dans un avis du 5 juin 2023, le Dr C______ a constaté que l’expert rhumatologue avait conclu à une capacité de travail de 90% dans une activité adaptée depuis le 1er mars 2019 et que l’expert psychiatre avait retenu une capacité de travail de 100% dans toute activité depuis le 21 octobre 2021, sans se prononcer pour la période antérieure depuis le 1er mars 2019. Il convenait donc de l’interpeller à ce sujet.
m. Le 22 juin 2023, l’expert psychiatre a répondu que l’assurée avait débuté un suivi psychiatrique le 21 octobre 2020 et qu’un diagnostic d'épisode dépressif léger en voie d'amélioration était retenu, ainsi que des troubles légers de la personnalité. Son psychiatre avait décrit un comportement histrionique, prescrit un traitement de Paroxétine à 20 mg par jour et de Xanax Retard 0.5 mg par jour et estimé que la capacité de travail était totale dès le début de sa prise en charge. L’assurée avait rapporté un suivi psychiatrique antérieur qui aurait duré environ une année, auprès d’une femme, suite aux maltraitances subies par son mari, mais il ne disposait d’aucun document concernant ce suivi. Il a expliqué qu’un diagnostic d'épisode dépressif léger, soit le trouble retenu en octobre 2020, n'entrainait habituellement pas d'incapacité de travail, appréciation partagée par le psychiatre. Ainsi, selon toute vraisemblance, la capacité de travail était entière depuis le mois de mars 2019 d'un point de vue psychiatrique.
n. Dans un avis du 27 juin 2023, le Dr C______ a proposé de suivre les conclusions de l'expertise. Ainsi, en raison des lombalgies communes chroniques et des douleurs persistantes de la cheville gauche, la capacité de travail était de 0% dans l’activité de nettoyeuse depuis le 22 août 2017 et de 90% dans une activité adaptée depuis le 1er mars 2019. Les limitations fonctionnelles comprenaient la fatigue, les douleurs dégénératives, la nécessité d’alterner les positions assis et debout, de ne pas rester assise plus d’une heure et debout plus de 30 minutes, d’éviter de marcher sur des terrains accidentés, de monter et descendre les échelles, échafaudages et de surcharger le rachis dans sa totalité.
o. En date du 3 juillet 2023, l’OAI a informé l’assurée qu’il envisageait de rejeter sa demande. Compte tenu de la capacité de travail de 90% retenue dès le
1er mars 2019 dans une activité adaptée aux restrictions, il avait procédé à une comparaison des revenus avec et sans invalidité, laquelle révélait l’absence de toute perte de gain.
p. Le 7 mai 2023, l’intéressée a écrit à l’OAI que sa santé était de plus en plus fragile et qu’elle était épuisée, en raison notamment de sa situation sociale. Elle a joint un courrier qu’elle avait adressé le 5 mai 2023 à la Police, suite à un conflit survenu dans l’hôtel où elle logeait.
q. Par décision du 25 septembre 2023, l’OAI a rejeté la demande de rente et de mesures professionnelles. Il a maintenu que l’assurée, totalement incapable d’exercer son activité habituelle depuis le 22 août 2017, disposait d’une capacité de travail de 90% dans une activité adaptée depuis le 1er mars 2019. La comparaison des gains sans invalidité (CHF 51'175.-) et avec invalidité
(CHF 61'949.-) révélait l’absence de perte de gain.
C. a. Par acte du 26 octobre 2023, l’assurée, représentée par un avocat, a interjeté recours contre cette décision par-devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice. Elle a conclu, sous suite de frais et dépens, préalablement, à l’octroi d'un délai pour compléter son recours et, principalement, à l’annulation de la décision entreprise et à l’octroi d’une rente et de mesures professionnelles. En substance, la recourante a soutenu être en incapacité totale de travail en raison de ses troubles cognitifs et psychiatriques.
La recourante a produit un rapport du 22 août 2023 du Dr N______, psychiatre traitant depuis le mois de septembre 2022, lequel a noté les codes diagnostics F43.1 (état de stress post-traumatique), F32.3 (épisode dépressif sévère avec symptômes psychotiques), F45.0 (somatisation) et F60.3 (personnalité émotionnellement labile) et TNF selon DSM (troubles neurologiques fonctionnels). Malgré de courtes périodes de stabilisation du tableau clinique depuis le début du traitement, l’état de santé psychique s’était aggravé. La patiente présentait une énorme instabilité émotionnelle et une agressivité au niveau de son comportement et de ses émotions, vu le traumatisme souffert de violences domestiques, de la mort de ses jumelles à leur naissance, d’abandon de plusieurs ruptures de liens, ainsi que l’accident de 2018, Il existait un risque de décompensation psychique, d’auto-agression et de suicide. Il a fait état de troubles cognitifs et de crises de méfiance, avec une oscillation psychique dont une bipolarité symptomatique (alternance entre l’amour et la haine par exemple). L’isolement, le renferment et le cadre vécu d’une carence psycho-sociale étaient en rapport avec un processus de marginalisation sociale vu son statut actuel et consistaient en des facteurs pathogènes impactant sa maladie mentale. La patiente était impliquée dans un combat pour ses droits et avait une demande sous-jacente de réparation par rapport aux traumatismes vécus. Des hospitalisations en série pouvaient s’avérer nécessaire vu l’état de désorganisation psychique et le niveau de vie actuelle. Il a relevé des éléments cliniques objectifs, soit un trouble du sommeil, un trouble de l'humeur avec une anhédonie, un apragmatisme, une baisse de l'estime-de-soi, des éléments cliniques de paranoïa vu le niveau d'association de ses pensées en étant méfiante auprès de ses assistants et médecins, des crises histrioniques, une instabilité émotionnelle, un risque de suicide et d'auto-agressions, ainsi que des crises d'anxiété. Le traitement comprenait une psychothérapie hebdomadaire et la prise de Seroquel XR 50 mg au coucher, de Xanax 1 mg/jour, de Latea (essence de lavande) 80mg/jour, de Deroxat 20 mg à 30 mg/jour, de Dalmadorrn 30mg/coucher et de Zyprexa 5mg/matin.
b. Le conseil de la recourante a sollicité à réitérées reprises la prolongation des délais accordés pour compléter son recours, au motif que sa cliente n’était pas en mesure de se déterminer sereinement, car elle était extrêmement fragilisée sur le plan psychiatrique, étant ajouté qu’elle avait été hospitalisée dans le cadre d’une importante décompensation lors de laquelle elle avait « tenté contre sa vie ».
c. Sans nouvelles de la recourante à l’échéance de la dernière prolongation de délai sollicitée, la chambre de céans a invité l’intimé à produire son dossier et à se déterminer.
d. Par écriture du 26 mars 2024, l’intimé a conclu au rejet du recours. Le rapport du psychiatre traitant du 22 août 2023 n’était pas susceptible de remettre en question son appréciation.
Il a joint un avis du 6 mars 2024 du Dr C______, concluant que le rapport du
22 août 2023 du Dr N______ ne modifiait pas sa dernière appréciation. Il a rappelé que lors de l'expertise psychiatrique réalisée le 6 avril 2023, les troubles anxieux et l'angoisse (symptômes de la lignée anxieuse et dépressive) étaient décrits par plusieurs médecins et depuis plusieurs années, dans le cadre d'un épisode dépressif léger secondaire à l’atteinte somatique ou un trouble de l'adaptation dans les suites de sa séparation avec son ex-mari. Le psychiatre traitant avait attesté déjà d'une incapacité totale de travail dès le
30 novembre 2022, mais n’indiquait pas depuis quelle date il retenait une aggravation et en quoi consiste cette dernière par rapport à la période antérieure. La symptomatologie décrite par le psychiatre était superposable à son rapport médical du 3 avril 2023 qui avait été pris en compte dans le cadre de l'expertise. L'expert psychiatre avait alors analysé les indicateurs standards de gravité afin d'apporter ses conclusions.
e. La chambre de céans a accordé un délai à la recourante au 8 mai 2024 pour répliquer.
f. Par écriture du 22 mai 2024, la recourante a maintenu ses conclusions et sollicité l’audition du Dr N______. Elle a rappelé que ses épisodes de détresse et de crises de dépression avaient été documentés. Contrairement à l’avis de l’expert psychiatre, le Dr N______ retenait un état de dépression sévère accompagné de pensées suicidaires. Elle avait été admise aux HUG les 12 mai et 22 et 23 août 2023, puis s’y était rendue pour consultations les 4 et 10 septembre 2023, toujours pour des crises de dépression avec des idées suicidaires, ce qui témoignait de la sévérité de son état de santé. Ces occurrences répétées, qui nécessitaient des interventions médicales et des soins spécialisés, démontraient son incapacité à mener une vie professionnelle normale et stable. Elle a en outre rappelé qu’elle souffrait de fibromyalgie, maladie caractérisée par des douleurs musculo-squelettiques diffuses et une fatigue persistante, souvent associée à des symptômes dépressifs significatifs. Les douleurs chroniques et la détresse physique pouvaient aggraver les symptômes de la dépression et entrainer un état émotionnel précaire. Elle avait besoin d’un soutien financier et médical pour faire face à cette double charge. Elle avait en outre de grandes difficultés à gérer ses démarches administratives, raison pour laquelle elle remerciait la chambre de céans d’admettre sa réplique sous l’angle de la maxime d’office.
La recourante a produit plusieurs rapports des HUG, relatifs à ses admissions les
12 mai, 22 août, 4 et 10 septembre 2023 (rapports des 28 mai, 29 août, 10 et
20 septembre 2023).
g. Dans sa duplique du 18 juin 2024, l’intimé a persisté dans ses conclusions.
Il a annexé un avis du 5 juin 2024 du Dr C______, lequel a considéré que les derniers rapports transmis par la recourante concernaient des hospitalisations en lien avec un trouble de l’adaptation avec des caractéristiques émotionnelles mixtes, qui se manifestaient par un tentamen ou des alcoolisations aiguës, avec la nécessité de prise en charge psychiatrique, mais sans constituer une atteinte psychiatrique durablement incapacitante. Les conclusions précédentes étaient ainsi maintenues.
h. Invitée à se déterminer sur ces pièces, la recourante ne s’est pas manifestée.
i. Par courrier du 7 octobre 2024, la chambre de céans a informé les parties de son intention de confier une mission d’expertise rhumatologique et psychiatrique au
docteur T______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, et au docteur U______, spécialiste en rhumatologie.
j. Par pli du 15 octobre 2024, l’intimé a considéré qu’une expertise judiciaire, ne se justifiait pas. Il a précisé que si la chambre de céans persistait dans son intention d’ordonner une telle expertise, il n’avait pas de motif de récusation à l’encontre des experts annoncés, ni de questions complémentaires à leur soumettre.
k. Dans le délai prolongé au 15 novembre 2024 à la demande du conseil de la recourante, celui-ci ne s’est pas déterminé.
1.
1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ – E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du
6 octobre 2000 (LPGA – RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur
l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
1.2 Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).
Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.
2.
2.1 Par renvoi de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.
2.2 Le 1er janvier 2022, les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705) ainsi que celles du
3 novembre 2021 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961
(RAI – RS 831.201 ; RO 2021 706) sont entrées en vigueur.
En cas de changement de règles de droit, la législation applicable reste, en principe, celle en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits et le juge se fonde, en règle générale, sur l'état de fait réalisé à la date déterminante de la décision litigieuse (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ;
132 V 215 consid. 3.1.1 et les références).
En l’occurrence, la décision querellée a certes été rendue postérieurement au
1er janvier 2022. Toutefois, la demande de prestations ayant été déposée le
25 novembre 2020, un éventuel droit à une rente d’invalidité prendrait naissance antérieurement au 1er janvier 2022 (art. 28 al. 1 let. b et 29 al. 1 LAI), de sorte que les dispositions applicables seront citées dans leur teneur en vigueur jusqu’au
31 décembre 2021.
3. Le litige porte sur le bien-fondé de la décision du 25 septembre 2023 par laquelle l’intimé a nié le droit de la recourante à une rente d’invalidité.
4. Aux termes de l’art. 8 al. 1 LPGA, est réputée invalidité l’incapacité de gain totale ou partielle qui est présumée permanente ou de longue durée.
Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2).
En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.
Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28 al. 2 LAI).
4.1 Les atteintes à la santé psychique peuvent, comme les atteintes physiques, entraîner une invalidité au sens de l'art. 4 al. 1 LAI en liaison avec l'art. 8 LPGA. On ne considère pas comme des conséquences d'un état psychique maladif, donc pas comme des affections à prendre en charge par l'assurance-invalidité, les diminutions de la capacité de gain que l'assuré pourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté; la mesure de ce qui est exigible doit être déterminée aussi objectivement que possible (ATF 127 V 294 consid. 4c ; 102 V 165
consid. 3.1 ; VSI 2001 p. 223 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral I 786/04 du 19 janvier 2006 consid. 3.1).
La reconnaissance de l’existence d’une atteinte à la santé psychique suppose la présence d’un diagnostic émanent d’un expert (psychiatre) et s’appuyant selon les règles de l’art sur les critères d’un système de classification reconnu, tel le CIM ou le DSM-IV (ATF 143 V 409 consid. 4.5.2 ; 141 V 281 consid. 2.1 et 2.1.1 ; 130 V 396 consid. 5.3 et 6).
Dans l’ATF 141 V 281, le Tribunal fédéral a revu et modifié en profondeur le schéma d'évaluation de la capacité de travail, respectivement de l'incapacité de travail, en cas de syndrome douloureux somatoforme et d'affections psychosomatiques comparables. Il a notamment abandonné la présomption selon laquelle les troubles somatoformes douloureux ou leurs effets pouvaient être surmontés par un effort de volonté raisonnablement exigible (ATF 141 V 281 consid. 3.4 et 3.5) et introduit un nouveau schéma d'évaluation au moyen d'un catalogue d'indicateurs (ATF 141 V 281 consid. 4). Le Tribunal fédéral a ensuite étendu ce nouveau schéma d'évaluation aux autres affections psychiques
(ATF 143 V 418 consid. 6 et 7 et les références). Aussi, le caractère invalidant d'atteintes à la santé psychique doit être établi dans le cadre d'un examen global, en tenant compte de différents indicateurs, au sein desquels figurent notamment les limitations fonctionnelles et les ressources de la personne assurée, de même que le critère de la résistance du trouble psychique à un traitement conduit dans les règles de l'art (ATF 143 V 409 consid. 4.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2019 du 17 mars 2020 consid. 3 et les références).
Le Tribunal fédéral a en revanche maintenu, voire renforcé la portée des motifs d'exclusion définis dans l'ATF 131 V 49, aux termes desquels il y a lieu de conclure à l'absence d'une atteinte à la santé ouvrant le droit aux prestations d'assurance, si les limitations liées à l'exercice d'une activité résultent d'une exagération des symptômes ou d'une constellation semblable, et ce même si les caractéristiques d'un trouble au sens de la classification sont réalisées. Des indices d'une telle exagération apparaissent notamment en cas de discordance entre les douleurs décrites et le comportement observé, l'allégation d'intenses douleurs dont les caractéristiques demeurent vagues, l'absence de demande de soins, de grandes divergences entre les informations fournies par le patient et celles ressortant de l'anamnèse, le fait que des plaintes très démonstratives laissent insensible l'expert, ainsi que l'allégation de lourds handicaps malgré un environnement psycho-social intact (ATF 141 V 281 consid. 2.2.1 et 2.2.2 ; 132 V 65 consid. 4.2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_16/2016 du 14 juin 2016 consid. 3.2).
Selon la jurisprudence, en cas de troubles psychiques, la capacité de travail réellement exigible doit être évaluée dans le cadre d'une procédure d'établissement des faits structurée et sans résultat prédéfini, permettant d'évaluer globalement, sur une base individuelle, les capacités fonctionnelles effectives de la personne concernée, en tenant compte, d'une part, des facteurs contraignants extérieurs incapacitants et, d'autre part, des potentiels de compensation (ressources) (ATF 141 V 281 consid. 3.6 et 4). L'accent doit ainsi être mis sur les ressources qui peuvent compenser le poids de la douleur et favoriser la capacité d'exécuter une tâche ou une action (arrêt du Tribunal fédéral 9C_111/2016 du 19 juillet 2016 consid. 7 et la référence).
Il y a lieu de se fonder sur une grille d’analyse comportant divers indicateurs qui rassemblent les éléments essentiels propres aux troubles de nature psychosomatique (ATF 141 V 281 consid. 4).
- Catégorie « Degré de gravité fonctionnel » (ATF 141 V 281 consid. 4.3),
A. Complexe « Atteinte à la santé » (consid. 4.3.1)
Expression des éléments pertinents pour le diagnostic (consid. 4.3.1.1), succès du traitement et de la réadaptation ou résistance à cet égard (consid. 4.3.1.2), comorbidités (consid. 4.3.1.3).
B. Complexe « Personnalité » (diagnostic de la personnalité, ressources personnelles; consid. 4.3.2)
C. Complexe « Contexte social » (consid. 4.3.3)
- Catégorie « Cohérence » (aspects du comportement ; consid. 4.4)
Limitation uniforme du niveau d'activité dans tous les domaines comparables de la vie (consid. 4.4.1), poids des souffrances révélé par l'anamnèse établie en vue du traitement et de la réadaptation (consid. 4.4.2).
Les indicateurs appartenant à la catégorie « degré de gravité fonctionnel » forment le socle de base pour l’évaluation des troubles psychiques (ATF 141 V 281 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_618/2019 du 16 mars 2020 consid. 8.2).
4.2 La procédure d’administration des preuves qui prévaut en matière de troubles douloureux sans substrat organique et de troubles psychosomatiques analogues est notamment applicable à toutes les maladies psychiques (ATF 143 V 418) et à la fibromyalgie (ATF 132 V 65 consid. 4.1).
Bien que le diagnostic de fibromyalgie soit d'abord le fait d'un spécialiste en rhumatologie, une expertise psychiatrique est en principe nécessaire pour se prononcer sur l'incapacité de travail qu'engendre un tel trouble qui, du point de vue juridique, est similaire aux troubles somatoformes douloureux (douleurs non expliquées par un substrat organique) et doit être traité comme ceux-ci
(ATF 132 V 65 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_710/2023 du
28 juin 2024 consid. 6.1).
4.3 Les notions de SDRC (CRPS pour Complex regional pain syndrome), algodystrophie ou maladie de Suedeck appartiennent aux maladies neurologiques, orthopédiques et traumatologiques et constituent ainsi une atteinte à la santé physique, respectivement corporelle (arrêt du Tribunal fédéral 8C_234/2023 du
12 décembre 2023 consid. 3.2). Ils désignent, en médecine, un état maladif
post-traumatique, qui est causé par un traumatisme bénin, qui se transforme rapidement en des douleurs importantes et individualisées avec des sensations de cuisson, qui s’accompagnent de limitations fonctionnelles de type moteur, trophique ou sensori-moteur. Toute une extrémité ou une grande partie d’une zone du corps est touchée (arrêts du Tribunal fédéral 8C_871/2010 du 4 octobre 2011 consid. 3.2 et 8C_384/2009 du 5 janvier 2010 consid. 4.2.1 in SVR 2010 UV n° 18 p. 69).
L’étiologie et la pathogenèse de ce syndrome ne sont pas claires. C’est pourquoi, selon la jurisprudence, la pose de ce diagnostic requiert, selon les critères de Budapest, que les éléments caractéristiques suivants soient satisfaits (arrêt du Tribunal fédéral 8C_71/2024 du 30 août 2024 consid. 6.2 et les références).
Une douleur persistante disproportionnée par rapport à l’événement déclencheur. Le patient doit rapporter au moins un symptôme dans trois des quatre catégories suivantes : 1. sensorielle (hyperesthésie et/ou allodynie) ; 2. vasomotrice (asymétrie au niveau de la température et/ou changement/asymétrie au niveau de la coloration de la peau) ; 3. sudomotrice/œdème (œdème et/ou changement/asymétrie au niveau de la sudation) ; 4. motrice/trophique (diminution de la mobilité et/ou dysfonction motrice [faiblesse, tremblements, dystonie] et/ou changements trophiques [poils, ongles, peau]). Le patient doit démontrer au moment de l’examen au moins un signe clinique dans deux des quatre catégories suivantes : 1. sensorielle (hyperalgésie [piqûre] et/ou allodynie [au toucher léger et/ou à la pression et/ou à la mobilisation]) ; 2. Vasomotrice (différence de température et/ou changement/asymétrie de coloration de la peau) ; 3. sudomotrice/œdème (œdème et/ou changement/asymétrie au niveau de la sudation) ; 4. motrice/trophique (diminution de la mobilité et/ou dysfonction motrice [faiblesse, tremblement, dystonie] et/ou changements trophiques [poils, ongles, peau]).
Il n’existe aucun autre diagnostic permettant de mieux expliquer les symptômes et les signes cliniques. Ces critères sont exclusivement cliniques et ne laissent que peu de place aux examens radiologiques (radiographie, scintigraphie, IRM). L’utilisation de l’imagerie fait l’objet d’une controverse dans le milieu médical, mais garde un rôle notamment dans la recherche de diagnostics différentiels, ou lorsque les signes cliniques sont discrets ou incomplets ainsi que dans certaines formes atypiques. En pratique, si les critères 1 à 3 sont remplis et le critère 4 est respecté, on doit considérer que le patient souffre d’un SDRC ; toutefois la valeur prédictive positive n’est que de 76%. Si les critères sont partiellement remplis, il faut poursuivre le diagnostic différentiel et réévaluer le patient. Si les critères ne sont pas remplis, le patient a une probabilité quasi nulle d’avoir un SDRC (arrêt du Tribunal fédéral 8C_71/2024 précité consid. 6.2 et les références).
4.4 En ce qui concerne les facteurs psychosociaux ou socioculturels et leur rôle en matière d'invalidité, ils ne figurent pas au nombre des atteintes à la santé susceptibles d'entraîner une incapacité de gain au sens de l'art. 4 al. 1 LAI. Pour qu'une invalidité soit reconnue, il est nécessaire, dans chaque cas, qu'un substrat médical pertinent, entravant la capacité de travail (et de gain) de manière importante, soit mis en évidence par le médecin spécialisé. Plus les facteurs psychosociaux et socioculturels apparaissent au premier plan et imprègnent l'anamnèse, plus il est essentiel que le diagnostic médical précise s'il y a atteinte à la santé psychique qui équivaut à une maladie. Ainsi, il ne suffit pas que le tableau clinique soit constitué d'atteintes qui relèvent de facteurs socioculturels ; il faut au contraire que le tableau clinique comporte d'autres éléments pertinents au plan psychiatrique tels, par exemple, une dépression durable au sens médical ou un état psychique assimilable, et non une simple humeur dépressive. Une telle atteinte psychique, qui doit être distinguée des facteurs socioculturels, et qui doit de manière autonome influencer la capacité de travail, est nécessaire en définitive pour que l'on puisse parler d'invalidité. En revanche, là où l'expert ne relève pour l'essentiel que des éléments qui trouvent leur explication et leur source dans le champ socioculturel ou psychosocial, il n'y a pas d'atteinte à la santé à caractère invalidant (ATF 127 V 294 consid. 5a in fine ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_43/2023 du 29 novembre 2023 consid. 5.1 et 5.2 et les références).
5. Pour pouvoir calculer le degré d'invalidité, l'administration (ou le juge, s'il y a eu un recours) a besoin de documents que le médecin, éventuellement aussi d'autres spécialistes, doivent lui fournir (ATF 122 V 157 consid. 1b). Pour apprécier le droit aux prestations d’assurances sociales, il y a lieu de se baser sur des éléments médicaux fiables (ATF 134 V 231 consid 5.1). La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l'état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l'assuré est incapable de travailler. Dans le cas des maladies psychiques, les indicateurs sont importants pour évaluer la capacité de travail, qui - en tenant compte des facteurs incapacitants externes d’une part et du potentiel de compensation (ressources) d’autre part -, permettent d’estimer la capacité de travail réellement réalisable (arrêt du Tribunal fédéral 8C_286/2020 du
6 août 2020 consid. 4 et la référence).
Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; 133 V 450 consid. 11.1.3 ; 125 V 351 consid. 3). Il faut en outre que le médecin dispose de la formation spécialisée nécessaire et de compétences professionnelles dans le domaine d’investigation (arrêt du Tribunal fédéral 9C_555/2017 du
22 novembre 2017 consid. 3.1 et les références).
5.1 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.
Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 135 V 465 consid. 4.4 et les références ;
125 V 351 consid. 3b/bb).
Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 RAI ; 142 V 58 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR
(ATF 142 V 58 consid. 5 ; 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1).
En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (ATF 125 V 351 consid. 3a ; 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du
4 mai 2012 consid. 3.2.1).
On ajoutera qu'en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2008 du 5 mars 2009 consid. 2.2).
5.2 Le but des expertises multidisciplinaires est de recenser toutes les atteintes à la santé pertinentes et d'intégrer dans un résultat global les restrictions de la capacité de travail qui en découlent. L'évaluation globale et définitive de l'état de santé et de la capacité de travail revêt donc une grande importance lorsqu'elle se fonde sur une discussion consensuelle entre les médecins spécialistes participant à l'expertise. La question de savoir si, et dans quelle mesure, les différents taux liés aux limitations résultant de plusieurs atteintes à la santé s'additionnent, relève d’une appréciation spécifiquement médicale, dont le juge ne s'écarte pas, en principe (ATF 137 V 210 consid. 3.4.2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_162/2023 du 9 octobre 2023 consid. 2.3 et les références).
6. Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 et les références ; 126 V 353 consid. 5b et les références ; 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).
De jurisprudence constante, le juge apprécie en règle générale la légalité des décisions entreprises d'après l'état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; 132 V 215 consid. 3.1.1). Les faits survenus postérieurement, et qui ont modifié cette situation, doivent en principe faire l'objet d'une nouvelle décision administrative (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; 130 V 130 consid. 2.1). Même s'il a été rendu postérieurement à la date déterminante, un rapport médical doit cependant être pris en considération, dans la mesure où il a trait à la situation antérieure à cette date (ATF 99 V 98 consid. 4 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_259/2018 du 25 juillet 2018 consid. 4.2).
Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il ne peut ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, il doit mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a ; RAMA 1985 p. 240 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Lorsque le juge des assurances sociales constate qu'une instruction est nécessaire, il doit en principe mettre lui-même en œuvre une expertise lorsqu'il considère que l'état de fait médical doit être élucidé par une expertise ou que l'expertise administrative n'a pas de valeur probante (ATF 137 V 210
consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4).
7. En l'espèce, l'intimé a conclu, sur la base de l’avis du SMR du 27 juin 2023,
lui-même fondé sur le rapport d’expertise du 23 mai 2023, que la recourante disposait d’une capacité de travail de 90% dans une activité adaptée dès le
1er mars 2019.
L’intéressée conteste cette appréciation et fait valoir que ses atteintes à la santé somatique et psychique entrainent une incapacité totale de travail.
Il convient donc d'examiner la valeur probante du rapport d’expertise.
7.1 La chambre de céans constate d’emblée que si les experts ont indiqué avoir procédé à une évaluation consensuelle (expertise p. 34), cette partie de leur rapport ne contient en réalité que le résumé opéré par chaque expert en regard de sa spécialisation, sans discussion commune. Or, une analyse consensuelle s’imposait au vu des troubles présentés par la recourante, en particulier une fibromyalgie.
D’ailleurs, de nombreux médecins ont mis en exergue la complexité de la situation de la recourante au vu de l’interférence de ses atteintes somatiques et psychiatriques, ce qui entrainait des difficultés pour la mise en place d’un traitement adéquat. Ainsi, le Dr J______ a observé que les différentes comorbidités s’amplifiaient mutuellement (rapport du 21 mai 2021), que l’état psychiatrique était en aggravation et qu’il n’était pas possible d’envisager une prise en charge multidisciplinaire pour ses lombalgies communes chroniques malgré l’importance du handicap fonctionnel qui se péjorait (rapport du
23 mars 2022). Le Dr K______ a noté que la patiente avait développé une symptomatique dépressive due aux symptômes douloureux persistants et à une situation sociale très incertaine (rapport du 17 novembre 2021), qu’une dénervation par radiofréquence pourrait théoriquement être envisagé, mais qu’il ne pensait pas effectuer ce geste en raison de l’état d’anxiété important et de l’agressivité injustifié de la patiente (rapport du 31 mai 2022). La Dre I______ a constaté un épuisement tant physique que psychique et préconisé une prise en charge globale (rapport du 22 février 2021). Le Dr M______ a rappelé les importantes douleurs chroniques et constaté un examen clinique très évocateur d’une fibromyalgie, précisant que la situation était encore compliquée par des problèmes d’états dépressifs (rapport du 21 novembre 2022). La docteure V______ du Centre O______ a suggéré dans un premier temps une reprise chirurgicale pour libérer la gouttière externe (rapport du 25 avril 2022), puis conclu qu’il était évident qu’un traitement chirurgical ne pouvait pas être proposé vu le contexte (rapport du 10 novembre 2022).
Compte tenu des troubles somatiques et psychiques qui interagissent et s’influencent, il incombait aux experts de procéder à une évaluation globale de l'état de santé de la recourante, ce qu’ils n’ont pas fait.
7.2 Au niveau rhumatologique, le Dr R______ a retenu les diagnostics de status post ligamentoplastie en janvier 2018, de status post lombalgies rachidiennes chroniques sur des discopathies, de douleurs chroniques de la cheville gauche non retrouvées au jour de l’examen, stabilisées, de discopathies rachidiennes stabilisées et de fibromyalgie.
La chambre de céans constate cependant que plusieurs médecins ont retenu le diagnostic de SRDC (rapports des 20 février 2019 et 21 octobre 2020 du
Dr D______ ; rapport du 3 août 2021 de la clinique de Montana), ou a à tout le moins ont constaté une symptomatologie suggérant de retenir ce syndrome (rapports des 17 novembre 2021 et 31 mai 2022 du Dr K______). Or, l’expert ne s’est pas du tout déterminé sur ce trouble, de sorte qu’on ignore s’il a considéré que les critères diagnostics n’étaient pas donnés, s’ils ne l’étaient plus ou même ne l’avaient jamais été.
L’indication de l’expert concernant les douleurs chroniques de la cheville gauche, « non retrouvées au jour de l’examen » et « stabilisées », semblent peu compatibles avec les pièces du dossier. En effet, la recourante consulte régulièrement des spécialistes en chirurgie du pied au Centre O______ depuis le mois de juin 2020 en raison de ces troubles. Elle avait d’ailleurs encore été examinée le 1er novembre 2022, soit cinq mois avant l’expertise, en raison d’une augmentation des douleurs suite à la dernière infiltration pratiquée (rapport du
10 novembre 2022 de la Dre V______). À la même époque, le
Dr M______ avait lui aussi relaté des douleurs au niveau du compartiment externe de cette articulation (rapport du 21 novembre 2022). Ainsi, les deux derniers rapports avant l’examen de l’expert attestent d’une recrudescence des douleurs au niveau de la cheville gauche et de l’échec des traitements entrepris. En outre, il est rappelé qu’une indication chirurgicale a été retenue, mais écartée en raison de l’état de santé psychique de la patiente (rapports des 31 mai 2022 du
Dr K______ et 25 avril 2022 de la Dre V______).
Les discopathies rachidiennes « stabilisées » sont également surprenantes, au vu des rapports au dossier. Ainsi, le Dr D______ a mentionné une discopathie modérée L4-L5 avec une hernie discale refoulant la racine L5 (rapports des 20 février 2019 et 21 octobre 2020) et le Dr L______ a attesté que la lombosciatalgie droite n’était pas sous contrôle, que les douleurs persistaient malgré le traitement médicamenteux (rapports des 21 mars et 31 mai 2022). Des infiltrations ont d’ailleurs été pratiquées au mois de juin 2022 aux niveaux de L3, L4 et L5 (rapport du 25 juin 2022), sans amélioration durable. Le Dr S______ a diagnostiqué une discopathie dégénérative L4-L5 avec une hernie à base large engendrant une compression récessale gauche significative et une discopathie dégénérative L5-S1 avec une minime compression récessale gauche concomitante, estimant que ces troubles pouvaient se corréler avec une partie des douleurs et avaient probablement été sous-traitées jusqu’à présent (rapport du 15 février 2023).
On pourra encore observer que la Dre I______ a rapporté des douleurs de l’hémicorps gauche et du membre inférieur droit (rapport du 22 février 2021), lesquelles ont également été notées lors de son séjour à la clinique de Montana (rapport du 6 juin 2022), et que la recourante a indiqué à l’expert présenter des douleurs diffuses des deux hémicorps, des vertiges, des céphalées, des sensations de jambes endormies, des « douleurs de partout » (expertise p. 44), sans que ces symptômes ne fassent l’objet d’une discussion de la part du Dr R______.
Partant, les diagnostics posés par cet expert n’apparaissent pas convaincants.
7.3 Sur le plans psychiatrique, l’expert a retenu le diagnostic de trouble anxieux et dépressif mixte (F41.2).
La chambre de céans observe toutefois que l’anamnèse est incomplète, puisque l’expert a indiqué qu’il ne disposait d’aucun document concernant le suivi que la recourante disait avoir « auprès d’une femme » depuis septembre 2021 (expertise p. 67). Il a relevé que le rapport de la Clinique de Montana faisait état d’un rendez-vous fixé auprès d’une psychiatre le 4 août 2021, mais qu’il n’avait aucune trace de ce suivi (expertise p. 67). Il a ajouté que l’expertisée « dit avoir un suivi depuis septembre 2021. Or le suivi a été mis en place en septembre 2022 » (expertise p. 67). L’expert semble donc avoir douté de l’existence d’une prise en charge psychiatrique entre septembre 2021 et septembre 2022, malgré les déclarations de l’intéressée. À cet égard la chambre de céans relèvera que le
Dr J______ a fait état d’importantes souffrances psychiques avec un état mal compensé, ajoutant qu’il laissait le soin au psychiatre traitant de réévaluer la situation (rapport du 8 novembre 2021). Ce document a été envoyé en copie à la docteure W______, psychiatre, ce qui permet de penser que cette médecin était alors en charge du suivi annoncé par l’expertisée.
L’expert a retenu un trouble anxieux et dépressif mixte de « gravité mineure ». Il a notamment expliqué que l'examen clinique ne retrouvait ni ralentissement psychomoteur, ni tristesse pathologique, ni trouble de la concentration ou de l'attention, ni trouble significatif de la mémoire. Aucune pathologie psychiatrique incapacitante n'était mise en évidence. L’intéressée était d’humeur neutre la majeure partie de l’entretien, n’exprimait aucune détresse quand elle évoquait ses douleurs. Les plaintes rapportées concernaient les craintes de l’intéressée de se rapprocher trop des hommes, des cauchemars qui la réveilleraient la nuit et des baisses de moral en lien avec le souvenir de son mariage ou sa situation sociale actuelle. Ses plaintes constituaient une association de symptômes anxieux et dépressifs d'une sévérité mineure (expertise p. 67). Cette analyse est surprenante, puisque le Dr N______ avait signalé un risque suicidaire (rapport du
3 avril 2023), et que l’expertisée avait déclaré à l’expert qu’elle avait essayé de se suicider à trois reprises (expertise p. 59), qu’elle avait des idées noires, des pensées et des envies suicidaires (expertise p. 59, 62), qu’elle s’était scarifiée avec un couteau et qu’elle lui avait d’ailleurs montré des photos d’elle avec des traces de cet acte sur son épaule gauche (expertise p. 62). S’entretenir avec le psychiatre traitant semblait donc s’imposer dans ces circonstances.
De plus, la recourante a décrit ses troubles comme étant « horribles », exposant qu’elle avait de la peine à marcher et à aller aux toilettes en raison des douleurs. Elle a indiqué que tout était « détruit » » (expertise p 59). L’expert a constaté, durant son entretien d’une heure trente, que l’intéressée, sous traitement antidépresseur, avait les larmes aux yeux à quatre ou cinq reprises. L’exclusion de tout état de détresse, pourtant relaté par de nombreux autres médecins, n’est pas suffisamment motivée. Enfin, il est possible de s’interroger quant à la qualité de cet entretien, dès lors que l’intéressée a été somnolente durant son premier tiers, suite à la prise d’un comprimé de Tramadol après l’examen rhumatologique (expertise p. 65).
Partant, le diagnostic retenu par l’expert, qui n’a pas fait l’objet d’une étude fouillée et approfondie du dossier, ne saurait être considéré comme établi, au degré de la vraisemblance prépondérante requis.
7.4 S’agissant des limitations fonctionnelles et de la capacité de travail, l’expert rhumatologique a indiqué que l’intéressée devait pouvoir alterner les différentes positions assis-debout, ne pas rester assise plus d’une heure et debout plus de
30 minutes, éviter de marcher sur des terrains accidentés, monter et descendre des échelles et des échafaudages, et surcharger le rachis dans sa totalité. La performance pouvait être réduite de 10% en raison de la fatigue et des douleurs dégénératives. La capacité de travail était de 0% dans l’activité de nettoyeuse depuis l'accident de mars 2017 et de 100% dans une activité adaptée dès la fin de la prise en charge par la SUVA, soit à partir du 1er mars 2019, avec une réduction de la performance de 10% en raison de la fatigue et des douleurs dégénératives.
Ces conclusions auraient dû être davantage étayées, au vu de l’importance de l’état douloureux persistant invalidant retenu par d’autres spécialistes, notamment le Dr J______ (rapport du 20 mai 2021). On rappellera en outre que les douleurs de la cheville gauche sont diurnes et nocturnes, quotidiennes et omniprésentes (rapport du 21 novembre 2022 du Dr M______), et que celles du rachis peuvent s’expliquer par les discopathies dégénératives et ont probablement été sous-traitées (rapport du 15 février 2023 du S______). En outre, plusieurs médecins ont relaté des problèmes de sommeil, à l’instar des Drs N______ et M______ (rapports des 22 août 2023 et 21 novembre 2022). En l’état, la capacité de travail résiduelle retenue par le Dr R______ semble peu plausible, ce d’autant plus que ce médecin a indiqué qu’il n’y avait pas d’informations divergentes ressortant du dossier (expertise p. 55), que les plaintes étaient concordantes avec le diagnostic de fibromyalgie (expertise p. 55), que les possibilités thérapeutiques étaient toutes épuisées après de nombreux traitements (infiltrations, physiothérapie, acupuncture, mésothérapie, perfusions) (expertise p. 56), et que la recourante était motivée et limitée dans son profil d’effort (expertise p. 56).
De surcroît, l’argumentation des deux experts est peu poussée s’agissant de l’évaluation des ressources, de la cohérence et de la plausibilité. Le Dr Q______ a noté que l’intéressée était autonome pour les tâches de la vie quotidienne, pour les déplacements, qu’elle avait des contacts quotidiens avec une amie au Brésil, sa mère, son frère et une amie sénégalaise. Elle écoutait de la musique, se promenait pour jeter du pain au canard, fréquentait deux fois par semaine son église. Elle avait notamment envie de lire et d’écrire, mais était gênée par ses douleurs (expertise p. 36).
Or, la recourante vit dans un hôtel et dispose d’une seule pièce avec des toilettes (expertise p. 45), ne peut pas cuisiner et mange des conserves (expertise p. 63 et 64). Les activités ménagères sont donc fortement réduites, ce d’autant plus qu’une femme de ménage de l’hôtel intervient dans la chambre de la recourante une fois par semaine. L’intéressée a affirmé aux deux experts qu’elle ne bénéficiait d’aucun soutien de la part de son entourage pour la gestion du handicap (expertise p. 46 et 63). D’ailleurs, à l’exception d’une seule amie, tous ses quelques proches, soit une amie, sa mère, sa grand-mère et son frère, vivent au Brésil. Ses contacts sont ainsi pour l’essentiel limités à des conversations téléphoniques (expertise
p. 68). Il ressort du déroulement d’une journée type que les sorties de la recourante se résument à se rendre à ses rendez-vous médicaux, à faire de petites courses et à aller à l’église, les promenades pour aller jeter du pain aux canards étant annoncées comme « rares » (expertise p. 63).
L’expert psychiatre a considéré que la capacité relationnelle de l’intéressée et son aptitude à nouer des contacts n’étaient pas altérés (expertise p. 68). Toutefois, la recourante lui a déclaré qu’elle ne faisait pas confiance aux autres (expertise
p. 59) et les pièces du dossier attestent de relations conflictuelles, que ce soit avec ses amis, son mari, son dernier conjoint, le personnel de l’hôtel dans lequel elle réside, des patients ou soignants de la Clinque de Montana, et même son psychiatre traitant.
Enfin, les pièces produites dans le cadre de la procédure mettent à mal les conclusions du Dr Q______, puisque la recourante a été hospitalisée à quatre reprises en quatre mois aux HUG en raison de son état de santé psychique, avant le prononcé de la décision litigieuse. Elle a ainsi été prise en charge par le département de médecine de premier recours le 12 mai 2023 en raison d’une anxiété et d’une dépression (rapports du 28 mai 2023). Elle a ensuite été admise aux urgences du département de médecine aiguë dans la soirée du 22 août 2023 pour une crise d’angoisse avec une idéation suicidaire et un mutisme. Suite à un désaccord avec son psychiatre le jour même, elle était rentrée chez elle, avait bu du vin, ruminé les propos de son médecin, et présenté des gestes auto-agressifs avec des scarifications non saturables superficielles des avant-bras. Elle avait ensuite pris douze comprimés de Flurazépam monochlorhydrate (30 mg) dans le but de mourir et appelé le 144. À l’arrivée des secours, auxquels elle avait d’abord refusé d’ouvrir la porte pendant 5 minutes, elle pleurait et disait vouloir mourir, puis avait accepté d’être conduite à l’hôpital. Prise en charge plus tard dans la nuit à l’unité d’urgence psychiatrique, elle avait présenté un trouble de l’adaptation avec des caractéristiques émotionnelles mixtes. Les idées noires étaient d’allure chroniques, sans velléité imminente de passer à l’acte. La patiente se projetait dans le futur et souhaitait changer de psychiatre. À la fin de l’entretien, elle se disait suffisamment bien pour rentrer chez elle et ne présentait plus d’idées suicidaires actives, et s’était engagée à demander de l’aide le cas échéant (rapports des 29 août et 20 septembre 2023). Le 4 septembre 2023, la recourante a de nouveau consulté le département de médecine aiguë pour une agitation et un trouble du comportement sur une alcoolisation aiguë. Elle avait été amenée en ambulance sur demande de la police qui l’avait trouvée agitée avec un comportement « on-off ». Opposante au début de sa prise en charge, un traitement injectable lui avait été administré. Réévaluée le matin, à distance de l’alcoolisation, elle était calme et collaborante. Elle avait expliqué avoir bu quatre bières, ce qui n’était pas habituel, et avoir ressenti un effet puissant psychoactif. Elle avait fait état d’idées noires chroniques avec des pensées suicidaires, sans projets concrets ni passage à l’acte, et se projetait spontanément dans l’avenir. Elle ne s’estimait pas suffisamment écoutée par son psychiatre (rapport du
12 septembre 2023). Quelques jours plus tard, le 10 septembre 2023, elle a été amenée en ambulance au département de médecine aiguë, suite à une alcoolisation aiguë avec une verbalisation d’idée suicidaire. À son admission, elle était agitée et criait sans arrêt. Revue à son réveil, elle était calme et collaborante, présentait un comportement séducteur, voir histrionique avec les soignants masculins. Elle faisait état d’idées suicidaires actives non scénarisées et sans projet concret. Elle était en dépression chronique depuis le décès de ses jumelles cinq ans auparavant (rapport du 10 septembre 2023).
7.5 Eu égard à tout ce qui précède, le rapport d'expertise du 23 mai 2023 ne saurait se voir attribuer une quelconque valeur probante.
Le SMR ne pouvait donc pas se fonder sur ce document pour conclure que la recourante disposait d’une capacité de travail de 90% dès le 1er mars 2019 dans toute activité respectant les limitations fonctionnelles énoncées par les experts.
8. Partant, il est indispensable de compléter l'instruction médicale et d’ordonner une expertise bidisciplinaire afin de clarifier les différents aspects médicaux, leurs interactions et leurs conséquences sur la capacité de travail de la recourante.
Une expertise judiciaire est donc ordonnée et confiée aux Drs T______ et U______.
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant préparatoirement
I. Ordonne une expertise de la recourante. Commet à ces fins le docteur T______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, , et le docteur U______, spécialiste FMH en rhumatologie, Dit que la mission d’expertise sera la suivante :
A. Prendre connaissance du dossier de la cause.
B. Si nécessaire, prendre tous renseignements auprès des médecins ayant traité la personne expertisée, en particulier les docteurs D______, J______, K______, M______, L______ et S______, et les Dres I______ et V______, ainsi que le Dr N______ et les précédents psychiatres traitants de la personne expertisée.
C. Examiner et entendre la personne expertisée et si nécessaire, ordonner d'autres examens.
D. Charge le Dr U______ d’établir un rapport détaillé comprenant les éléments suivants :
1. Anamnèse détaillée (avec la description d’une journée-type)
2. Plaintes de la personne expertisée
3. Status et constatations objectives
4. Diagnostics (selon un système de classification reconnu)
Précisez quels critères de classification sont remplis et de quelle manière (notamment l’étiologie et la pathogenèse)
4.1. Avec répercussion sur la capacité de travail
4.1.1 Dates d'apparition
4.2 Sans répercussion sur la capacité de travail
4.2.1 Dates d'apparition
4.3 Quel est le degré de gravité de chacun des troubles diagnostiqués (faible, moyen, grave) ?
4.4 Les atteintes et les plaintes de la personne expertisée correspondent-elles à un substrat organique objectivable ?
4.5 L’état de santé de la personne expertisée s’est-il amélioré/détérioré depuis le 1er octobre 2019 ?
4.6 Dans quelle mesure les atteintes diagnostiquées limitent-elles les fonctions nécessaires à la gestion du quotidien ? (N’inclure que les déficits fonctionnels émanant des observations qui ont été déterminantes pour le diagnostic de l’atteinte à la santé, en confirmant ou en rejetant des limitations fonctionnelles alléguées par la personne expertisée).
4.7 Y a-t-il exagération des symptômes ou constellation semblable (discordance substantielle entre les douleurs décrites et le comportement observé ou l’anamnèse, allégation d'intenses douleurs dont les caractéristiques demeurent vagues, absence de demande de soins médicaux, plaintes très démonstratives laissant insensible l'expert, allégation de lourds handicaps malgré un environnement psychosocial intact) ?
4.8 Dans l’affirmative, considérez-vous que cela suffise à exclure une atteinte à la santé significative ?
4.9 Est-ce que le tableau clinique est cohérent, compte tenu du ou des diagnostic(s) retenu(s) ou y a-t-il des atypies ?
4.10 Est-ce que ce qui est connu de l’évolution correspond à ce qui est attendu pour le ou les diagnostic(s) retenu(s) ?
5. Limitations fonctionnelles
5.1 Indiquer les limitations fonctionnelles en relation avec chaque diagnostic
5.1.1 Dates d’apparition
5.2 Les plaintes sont-elles objectivées ?
6. Capacité de travail
6.1 Dater la survenance de l’incapacité de travail durable dans l’activité habituelle pour chaque diagnostic, indiquer son taux pour chaque diagnostic et détailler l’évolution de ce taux pour chaque diagnostic.
6.2 La personne expertisée est-elle capable d’exercer son activité lucrative habituelle ?
6.2.1 Si non, ou seulement partiellement, pourquoi ? Quelles sont les limitations fonctionnelles qui entrent en ligne de compte ?
6.2.2 Depuis quelle date sa capacité de travail est-elle réduite / nulle ?
6.3 La personne expertisée est-elle capable d’exercer une activité lucrative adaptée à ses limitations fonctionnelles ?
6.3.1 Si non, ou seulement partiellement, pourquoi ? Quelles sont les limitations fonctionnelles qui entrent en ligne de compte ?
6.3.2 Si oui, quel est le domaine d’activité lucrative adaptée ? A quel taux ? Depuis quelle date ?
6.3.3 Dire s'il y a une diminution de rendement et la chiffrer.
6.4 Comment la capacité de travail de la personne expertisée a-t-elle évolué depuis le 1er octobre 2019 ?
6.5 Des mesures médicales sont-elles nécessaires préalablement à la reprise d’une activité lucrative ? Si oui, lesquelles ?
6.6 Quel est votre pronostic quant à l’exigibilité de la reprise d’une activité lucrative ?
7. Traitement
7.1 Examen du traitement suivi par la personne expertisée et analyse de son adéquation.
7.2 Est-ce que la personne expertisée s’est engagée ou s’engage dans les traitements qui sont raisonnablement exigibles et possiblement efficaces dans son cas ou n’a-t-elle que peu ou pas de demande de soins ?
7.3 Propositions thérapeutiques et analyse de leurs effets sur la capacité de travail de la personne expertisée.
8. Appréciation d'avis médicaux du dossier
8.1 En cas de désaccord avec les diagnostics précédemment posés, veuillez détailler votre appréciation.
9. Quel est le pronostic ?
10. Des mesures de réadaptation professionnelle sont-elles envisageables ?
11. Faire toutes autres observations ou suggestions utiles
E. Invite l’expert à faire une appréciation consensuelle du cas avec le Dr T______ s’agissant de toutes les problématiques ayant des interférences entre elles, notamment l’appréciation de la capacité de travail résiduelle.
F. Invite l’expert à déposer, dans les meilleurs délais, un rapport en trois exemplaires auprès de la chambre de céans.
G. Charge le Dr T______ d’établir un rapport détaillé comprenant les éléments suivants :
1. Anamnèse détaillée (avec la description d’une journée-type)
2. Plaintes de la personne expertisée
3. Status et constatations objectives
4. Diagnostics (selon un système de classification reconnu)
Précisez quels critères de classification sont remplis et de quelle manière (notamment l’étiologie et la pathogenèse)
4.1 Avec répercussion sur la capacité de travail
4.1.1 Dates d'apparition
4.2 Sans répercussion sur la capacité de travail
4.2.1 Dates d'apparition
4.3 Quel est le degré de gravité de chacun des troubles diagnostiqués (faible, moyen, grave) ?
4.4 L’état de santé de la personne expertisée s’est-il amélioré/détérioré depuis le 1er octobre 2019 ?
4.5 Dans quelle mesure les atteintes diagnostiquées limitent-elles les fonctions nécessaires à la gestion du quotidien ? (N’inclure que les déficits fonctionnels émanant des observations qui ont été déterminantes pour le diagnostic de l’atteinte à la santé, en confirmant ou en rejetant des limitations fonctionnelles alléguées par la personne expertisée).
4.6 Y a-t-il exagération des symptômes ou constellation semblable (discordance substantielle entre les douleurs décrites et le comportement observé ou l’anamnèse, allégation d'intenses douleurs dont les caractéristiques demeurent vagues, absence de demande de soins médicaux, plaintes très démonstratives laissant insensible l'expert, allégation de lourds handicaps malgré un environnement psychosocial intact) ?
4.7 Dans l’affirmative, considérez-vous que cela suffise à exclure une atteinte à la santé significative ?
5. Limitations fonctionnelles
5.1. Indiquer les limitations fonctionnelles en relation avec chaque diagnostic
5.1.1 Dates d'apparition
5.2 Les plaintes sont-elles objectivées ?
6. Cohérence
6.1 Est-ce que le tableau clinique est cohérent, compte tenu du ou des diagnostic(s) retenu(s) ou y a-t-il des atypies ?
6.2 Est-ce que ce qui est connu de l'évolution correspond à ce qui est attendu pour le ou les diagnostic(s) retenu(s) ?
6.3 Est-ce qu'il y a des discordances entre les plaintes et le comportement de la personne expertisée, entre les limitations alléguées et ce qui est connu des activités et de la vie quotidienne de la personne expertisée ? En d’autre termes, les limitations du niveau d’activité sont-elles uniformes dans tous les domaines (professionnel, personnel) ?
6.4 Quels sont les niveaux d’activité sociale et d’activités de la vie quotidienne (dont les tâches ménagères) et comment ont-ils évolué depuis la survenance de l’atteinte à la santé ?
6.5 Dans l’ensemble, le comportement de la personne expertisée vous semble-t-il cohérent et pourquoi ?
7. Personnalité
7.1 Est-ce que la personne expertisée présente un trouble de la personnalité selon les critères diagnostiques des ouvrages de référence et si oui, lequel ? Quel code ?
7.2 Est-ce que la personne expertisée présente des traits de la personnalité pathologiques et, si oui, lesquels ?
7.3 Le cas échéant, quelle est l'influence de ce trouble de personnalité ou de ces traits de personnalité pathologiques sur les limitations éventuelles et sur l'évolution des troubles de la personne expertisée ?
7.4 La personne expertisée se montre-t-elle authentique ou y a-t-il des signes d'exagération des symptômes ou de simulation ?
8. Ressources
8.1 Quelles sont les ressources résiduelles de la personne expertisée sur le plan somatique ?
8.2 Quelles sont les ressources résiduelles de la personne expertisée sur les plans :
a) psychique
b) mental
c) social et familial. En particulier, la personne expertisée peut-elle compter sur le soutien de ses proches ?
9. Capacité de travail
9.1 Dater la survenance de l’incapacité de travail durable dans l’activité habituelle pour chaque diagnostic, indiquer son taux pour chaque diagnostic et détailler l’évolution de ce taux pour chaque diagnostic.
9.2 La personne expertisée est-elle capable d’exercer son activité lucrative habituelle ?
9.2.1 Si non, ou seulement partiellement, pourquoi ? Quelles sont les limitations fonctionnelles qui entrent en ligne de compte ?
9.2.2 Depuis quelle date sa capacité de travail est-elle réduite/ nulle ?
9.3 La personne expertisée est-elle capable d’exercer une activité lucrative adaptée à ses limitations fonctionnelles ?
9.3.1 Si non, ou dans une mesure restreinte, pour quels motifs ? Quelles sont les limitations fonctionnelles qui entrent en ligne de compte ?
9.3.2 Si oui, quel est le domaine d’activité lucrative adaptée ? A quel taux ? Depuis quelle date ?
9.3.3 Dire s’il y a une diminution de rendement et la chiffrer.
9.4 Comment la capacité de travail de la personne expertisée a-t-elle évolué depuis le mois d’octobre 2019 ?
9.5 Des mesures médicales sont-elles nécessaires préalablement à la reprise d’une activité lucrative ? Si oui, lesquelles ?
9.6 Quel est votre pronostic quant à l’exigibilité de la reprise d’une activité lucrative ?
10. Traitement
10.1 Examen du traitement suivi par la personne expertisée et analyse de son adéquation.
10.2 Est-ce que la personne expertisée s'est engagée ou s'engage dans les traitements qui sont raisonnablement exigibles et possiblement efficaces dans son cas ou n'a-t-elle que peu ou pas de demande de soins ?
10.3 En cas de refus ou mauvaise acceptation d’une thérapie, cette attitude doit-elle être attribuée à une incapacité de la personne expertisée à reconnaître sa maladie ?
10.4 Propositions thérapeutiques et analyse de leurs effets sur la capacité de travail de la personne expertisée.
11. Appréciation d'avis médicaux du dossier
11.1 Êtes-vous d'accord avec l'avis du Dr N______ des 3 avril et
23 août 2023 ? En particulier avec les diagnostics posés, les limitations fonctionnelles constatées et l'estimation d'une incapacité totale de travail? Si non, pourquoi ?
12. Quel est le pronostic ?
13. Des mesures de réadaptation professionnelle sont-elles envisageables ?
14. Faire toutes autres observations ou suggestions utiles.
H. Invite l’expert à faire une appréciation consensuelle du cas avec le Dr U______ s’agissant de toutes les problématiques ayant des interférences entre elles, notamment l’appréciation de la capacité de travail résiduelle.
I. Invite l’expert à déposer, dans les meilleurs délais, un rapport en trois exemplaires auprès de la chambre de céans.
II. Réserve le fond ainsi que le sort des frais jusqu’à droit jugé au fond.
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La greffière
Melina CHODYNIECKI |
| La présidente
Joanna JODRY |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties par le greffe le