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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3816/2019

ATAS/370/2021 du 26.04.2021 ( CHOMAG ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3816/2019 ATAS/370/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 26 avril 2021

10ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié ______, à CONCHES, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Thierry STICHER

 

 

recourant

 

contre

CAISSE CANTONALE GENEVOISE DE CHÔMAGE, sise rue de Montbrillant 40, GENÈVE

 

 

intimée

 


EN FAIT

1.        La société anonyme B______ (ci-après : la société), a été inscrite au registre du commerce (ci-après : RC) en 2011. Elle avait son siège à la rue C______ à Genève. Ses buts étaient le commerce et le service après-vente de produits de haute joaillerie, horlogerie de luxe, accessoires tels que tapis de valeur, meubles antiques, oeuvres d'art et l'administration des entreprises y relatives, la vente, la gestion et l'acquisition de biens immobiliers en Suisse et à l'étranger. Monsieur D______ en a été l'administrateur président avec signature individuelle, notamment pour la période courant dès le 5 mars 2013.

2.        Selon le RC, Monsieur A______ (ci-après : l'assuré ou le recourant), né en 1983, a été l'administrateur unique avec signature individuelle de la société anonyme E______ du 3 janvier 2014 au 8 avril 2019, ainsi que de la société anonyme F______, sise rue C______ à Genève, dès le 7 juin 2017.

3.        Le 12 décembre 2018, l'assuré a déposé une demande d'indemnités de chômage dès le 7 décembre précédent auprès de la caisse de chômage Unia (ci-après : Unia). Il a indiqué avoir été employé par la société du 1er novembre 2017 au 30 novembre 2018 et a répondu par la négative à la question de savoir s'il pensait introduire une procédure prud'homale à l'encontre de la société. Il a précisé ne pas avoir de participation financière ni être organe supérieur de décision d'une autre entreprise.

Dans l'attestation de l'employeur jointe à la demande, la société a indiqué que le dernier salaire de CHF 12'500.- avait été versé à l'assuré le 30 novembre 2018.

4.        Les pouvoirs de M. D______ au sein de la société ont été radiés le 14 janvier 2019.

5.        La société a été dissoute par décision du juge du Tribunal de première instance du 11 février 2019.

6.        En date du 25 mars 2019, l'assuré a déposé une demande d'indemnité en cas d'insolvabilité auprès de la caisse cantonale genevoise de chômage (ci-après : la caisse ou l'intimée), eu égard à la faillite de la société. Il a indiqué qu'il avait perçu son dernier salaire le 15 juin 2018.

L'assuré a produit les pièces suivantes :

a.       contrat de travail avec la société signé le 1er novembre 2017, stipulant un salaire mensuel de CHF 12'500.- ;

b.      bulletins de salaire des mois de mars à mai 2018 et d'août à novembre 2018 établis par la société ; 

c.       deuxième bulletin de salaire relatif au mois de mai 2018, identique à l'autre version mais comprenant en sus en pied de page l'indication « Je confirme par la suite avoir reçu le salaire en espèces le 30 mai 2018 », dans la même police que le corps du texte, suivie de la signature de l'assuré ;

d.      bulletin de salaire du mois de juin 2018, indiquant un salaire brut de CHF 12'500.-, sur lequel figurait la mention « d'acompte de CHF 5'000.- en espèces », à côté de laquelle l'assuré a apposé la mention manuscrite « 23.06.2018 reçu » suivie de sa signature ;

e.       courriel de l'assuré à la société du 18 octobre 2018 en anglais, se plaignant du défaut de paiement de ses salaires durant presque quatre mois à l'exception d'une avance de CHF 5'000.- en juin 2018, et réclamant leur versement ;

f.       courriel de M. D______ du 25 octobre 2018 en anglais, indiquant qu'il ferait en sorte que l'intégralité des salaires soit versée à l'assuré et l'invitant à faire preuve de patience ;

g.      courrier de la société du 1er novembre 2018 résiliant le contrat de travail de l'assuré pour le 30 novembre 2018 en raison de difficultés financières.

7.        Un collaborateur de la caisse a apposé les notes manuscrites « Vu avec l'assuré pas de justificatifs sur les versements de salaires » sur le formulaire de demande et « Pas d'autres démarches juridiques selon l'assuré » sur les courriels produits par l'assuré.

8.        Le 28 mars 2019, l'assuré a produit une créance de CHF 69'563.- dans la faillite de la société auprès de l'office cantonal des faillites (ci-après : l'OF), correspondant à un salaire de CHF 7'063.- en juin 2018 et aux salaires mensuels de CHF 12'500.- de juillet à novembre 2018.

9.        Par courriel du 29 mars 2019 à l'assuré, le gestionnaire de la caisse s'est référé à leur entretien téléphonique de la veille et l'a invité à produire les justificatifs bancaires de versement des salaires.

10.    À la même date, l'assuré a transmis à la caisse une déclaration de salaire adressée par la société à la caisse de compensation FER-CIAM (ci-après : la FER-CIAM) le 29 janvier 2018, mentionnant pour seul salarié l'assuré du 1er novembre au 31 décembre 2017, pour un revenu total de CHF 25'000.- ainsi qu'un courrier du 29 mars 2019 de la FER-CIAM selon lequel la déclaration de salaire de 2018 de la société n'avait pas encore été traitée.

11.    Par décision du 10 avril 2019, la caisse a refusé l'octroi d'une indemnité en cas d'insolvabilité à l'assuré.

Après avoir rappelé les dispositions légales régissant cette indemnité, la caisse a souligné que la période durant laquelle elle aurait pu être octroyée se limitait aux quatre derniers mois des rapports de travail, soit en l'espèce du 1er août au 30 novembre 2018. L'assuré n'avait pas satisfait à son obligation de diminuer le dommage, dans la mesure où il avait uniquement envoyé un courriel le 18 octobre 2018 à la société pour réclamer son dû, mais n'avait entrepris aucune démarche concrète telle qu'une action en justice, des poursuites ou une mise en demeure formelle. De plus, l'attestation de l'employeur établie le 30 novembre 2018 à l'attention d'Unia mentionnait que le salaire avait été versé jusqu'à cette date. Force était ainsi de constater que l'assuré n'avait pas de créance envers son ex-employeur, puisqu'il avait perçu l'entier de ses salaires. La vraisemblance de sa créance était une question qui pouvait en l'état rester ouverte, dans la mesure où son salaire, important au demeurant, avait été versé de main à main.

12.    Par courrier du 10 mai 2019, l'assuré s'est opposé à la décision de la caisse. Il a répété qu'il n'avait pas reçu son salaire depuis le 16 juin 2018. Il a allégué qu'il avait adressé un courrier à la société le 3 septembre 2018, auquel elle avait répondu en indiquant que le problème serait rapidement résolu. Il avait alors décidé d'attendre et de ne pas intenter une procédure, par peur de perdre son emploi, et parce qu'il anticipait un délai de trois à cinq mois en cas de procédure. M. D______ résidait à Dubaï et voyageait en permanence, de sorte qu'il était difficile de le contacter. L'assuré demandait constamment à être payé, par entretiens téléphoniques, SMS et courriels. Il avait imparti un dernier délai à l'administrateur en novembre 2018. Ce dernier avait précisé pour quelles raisons il avait indiqué à Unia que l'intégralité des salaires avait été versée. Lorsque l'assuré avait expliqué sa situation à la caisse, celle-ci l'avait informé que M. D______ avait démissionné de la société et qu'une procédure de faillite était pendante. Il avait alors adressé une requête de faillite au Tribunal.

Il a joint les pièces suivantes à son opposition :

a. extrait de son compte individuel AVS de la FER-CIAM, mentionnant uniquement un revenu de CHF 137'500.- réalisé auprès de la société de janvier à novembre 2018 ;

b. copie d'un courrier du 3 septembre 2018 à la société, en français, portant la mention « Recommandé », la mettant en demeure de verser dans les trente jours les salaires qu'il n'avait pas reçus depuis le 16 juin 2018, soit CHF 29'472.55 ;

c. courrier de la société, sous la plume de M. D______, à l'assuré du 7 octobre 2018, en anglais, signalant des difficultés avec le compte courant de la société. Cette situation serait résolue dès que possible, mais M. D______ ne disposait pas de ressources permettant de payer le salaire de l'assuré en espèces. Il lui demandait instamment de ne pas intenter de procédure, qui entraînerait des problèmes bancaires plus importants encore. Il promettait que le salaire serait versé complètement « une fois le compte [once account] » ;

d. courriel du 16 novembre 2018 de M. D______ à l'assuré, en anglais, lui demandant s'il avait bien reçu tous les documents nécessaires pour l'assurance-chômage, lui conseillant de chercher un autre emploi car la situation se détériorait, et précisant que le compte de la société devrait être opérationnel dans les deux semaines, de sorte qu'il serait en mesure de lui virer le solde des salaires de CHF 63'945.- ;

e. courriel du 16 novembre 2018 de l'assuré à M. D______, en anglais, confirmant la réception des documents à l'attention d'Unia mais contestant la mention qui y était contenue, selon laquelle les salaires avaient été versés jusqu'au 30 novembre 2018. L'assuré a souligné la difficulté de sa situation, qui le forçait désormais à s'annoncer à l'assurance-chômage, et a annoncé qu'à défaut de paiement, il saisirait la juridiction des prud'hommes ;

f. courriel de M. D______ à l'assuré du 22 novembre 2018, en anglais, promettant que le paiement interviendrait avant que ce dernier ne s'adresse à l'assurance-chômage ;

g. requête en faillite sans poursuite préalable de l'assuré du 25 février 2019 auprès du Président du Tribunal de première instance de Genève à l'encontre de la société, invoquant un défaut de paiement de ses salaires de juin 2018 à fin novembre 2018. Le dernier montant reçu était un acompte de CHF 5'000.- perçu en juin 2018. L'assuré y a notamment soutenu que la société avait des problèmes chroniques de liquidités.

13.    La procédure de faillite a été suspendue faute d'actif par jugement du Tribunal de première instance du 11 juillet 2019.

14.    Par décision du 13 septembre 2019, la caisse a écarté l'opposition de l'assuré. Elle a rappelé les exigences imposées aux assurés pour recouvrer leur salaire en cas de demande d'indemnité en cas d'insolvabilité.

À titre liminaire, elle a relevé que la vraisemblance de la créance de l'assuré n'avait toujours pas été apportée. En effet, la preuve d'un travail et de la perception d'un salaire pour les mois où l'assuré reconnaissait avoir été payé n'avait pas été fournie. Ce dernier n'avait en effet pas produit de relevés bancaires, alors que la caisse les avait requis. Elle s'étonnait que l'assuré n'ait pas informé Unia de ce qu'il n'avait pas perçu son salaire pour la période du 16 juin au 30 novembre 2018, alors que l'employeur avait attesté le contraire. L'assuré avait de plus expressément déclaré qu'il n'avait entrepris aucune démarche afin de récupérer les créances invoquées, hormis un simple courriel du 18 octobre 2018 adressé à M. D______, démarche insuffisante au vu des exigences en la matière. Ses déclarations de la première heure faisaient foi. La seule démarche formelle entreprise avant le prononcé de la faillite était la mise en demeure du 3 septembre 2018, document produit après avoir reçu la décision niant le droit à l'indemnité en cas d'insolvabilité. Au vu de la situation, le simple courriel du 16 novembre 2018, lui aussi produit après avoir reçu la décision de refus, ne saurait être considéré comme une démarche suffisante. Ainsi, la caisse considérait que l'assuré n'avait pas entrepris tout ce qui pouvait raisonnablement être exigé de lui pour diminuer le dommage. Il ne pouvait dès lors pas prétendre à une indemnité en cas d'insolvabilité, et c'était à juste titre que cette prestation lui avait été refusée.

15.    Par écriture du 8 octobre 2019, l'assuré a interjeté recours contre la décision de la caisse auprès de la chambre de céans. Il a conclu à son annulation et à l'allocation de l'indemnité en cas d'insolvabilité pour les quatre derniers mois des rapports de travail, soit CHF 50'000.- bruts.

Il a allégué que la société avait réglé son salaire en espèces jusqu'au 15 juin 2018, contre signature. Depuis le 16 juin 2018, il n'avait plus rien perçu en dépit des assurances de la société des 7 et 25 octobre et du 22 novembre 2018. Il l'avait interpellée à plusieurs reprises pour lui réclamer les salaires échus, en lui adressant une mise en demeure du 3 septembre 2018 et deux courriels datés du 18 octobre et du 16 novembre 2018, ces démarches étant restées vaines et la société n'ayant jamais tenu ses promesses. Il a soutenu que l'attestation de la société du 30 novembre 2018 à la caisse de chômage était mensongère, comme le montrait son extrait de compte bancaire, lequel ne révélait aucun versement de salaire de la mi-juin au 30 novembre 2018. Il estimait ainsi avoir rendu plausible sa créance à l'encontre de la société et avoir droit à l'indemnité en cas d'insolvabilité. Il ne voyait pas quelles mesures supplémentaires visant à sauvegarder ses droits auraient pu être engagées, dès lors que la société n'avait plus d'administrateur dès le 17 janvier 2019. M. D______ était en outre pour la plupart du temps indisponible.

Il a notamment produit un extrait de compte pour la période du 6 juin au 31décembre 2018, dont ne ressort aucun versement de la société. Un versement en espèces de CHF 1'000.- le 5 juillet 2018 et un dépôt de CHF 2'000.- le 15 octobre 2018 ont notamment été opérés sur ce compte.

16.    Dans sa réponse du 12 novembre 2019, l'intimée a conclu au rejet du recours. Elle a répété qu'au vu des doutes sur la réalité de la créance invoquée par le recourant, elle avait sollicité des relevés bancaires attestant la perception d'un salaire, qui n'avaient jamais été produits. Elle a repris les arguments déjà développés, avant de relever par surabondance que la position dominante ou non du recourant au sein de la société restait une condition à étudier, et était réservée.

17.    Par réplique du 11 décembre 2019, le recourant a précisé qu'il avait fourni des explications à l'intimée et qu'il avait produit une copie de ses relevés bancaires à l'appui de son recours auprès de la chambre de céans. Il n'avait pas mentionné que son salaire avait été versé en totalité dans sa demande d'indemnités de chômage. Il a soutenu que l'intimée, dont il avait sollicité des conseils, lui avait dit après la démission de M. D______ d'attendre la faillite de la société.

18.    Par duplique du 13 janvier 2020, l'intimée a relevé que les décomptes bancaires qu'elle avait requis étaient ceux qui prouvaient la perception du salaire allégué. Ceux-ci n'avaient jamais été fournis.

19.    La chambre de céans a entendu les parties le 8 juin 2020, le recourant étant désormais assisté de son avocat.

Le recourant a indiqué que son lieu de travail était au siège de la société, mais qu'il se déplaçait beaucoup, tant en Suisse qu'à l'étranger. Il a affirmé que la société était seule à utiliser ces locaux, avant de préciser qu'en réalité, ces locaux étaient composés de plusieurs bureaux, dont certains étaient sous-loués à d'autres sociétés. Seul le recourant et M. D______ utilisaient ce bureau, et il avait été le seul employé de cette société à sa connaissance durant les rapports de travail. Les fiches de salaire étaient établies par M. D______, et le salaire lui avait toujours été payé de la main à la main. Il signait un reçu sur les fiches de salaire correspondantes. Il a expliqué l'existence de deux bulletins de salaire pour le mois de mai 2018 en exposant que celui où figurait la mention de la réception du salaire était son propre exemplaire, alors que l'autre avait dû être préparé par M. D______ lorsqu'il avait constitué son dossier pour Unia. S'agissant de l'annotation sur les pièces fournies à l'intimée le 29 mars 2019, selon laquelle il n'avait pas entrepris d'autres démarches, et du fait qu'il n'avait évoqué la mise en demeure qu'au stade de son opposition, il s'en est expliqué en affirmant qu'il avait mal préparé son dossier. Il n'avait en réalité pas adressé son courrier du 3 septembre 2018 par pli recommandé, contrairement à la mention qui y figurait, mais l'avait amené à la société et remis à M. D______ qui y était alors présent. Il a affirmé ne pas avoir fabriqué ces documents après coup.

Interpellé sur le fait que les récépissés qu'il a produits lors de l'audience pour les paiements effectués de mars à mai 2018 au moyen du salaire versé représentaient environ CHF 6'000.- par mois, il a exposé qu'ils ne couvraient pas l'intégralité de ses paiements mais qu'il n'avait pas retrouvé tous les justificatifs, et qu'il gardait le solde pour vivre sans le déposer à la banque. Il a enfin précisé qu'il avait reçu la réponse de M. D______ du 7 octobre 2018 en main propre.

Le conseil du recourant a demandé l'audition de M. D______ et de Monsieur G______, le second ayant présenté le premier au recourant. Ces témoins pourraient confirmer la réalité des rapports de travail et le versement du salaire en espèces.

Le recourant a notamment produit les pièces suivantes :

a.       bulletins de salaire de novembre 2017 à mai 2018 indiquant respectivement « Je confirme par la suite avoir reçu le salaire en espèces le [29 novembre 2017, 21 décembre 2017, 30 janvier 2018, 28 février 2018, 29 mars 2018, 30 avril 2018, 30 mai 2018] » signés par le recourant ;

b.      récépissés de paiements à la Poste, dont plusieurs au nom de Madame H______;

c.       captures d'écran de messages WhatsApp en russe avec M. D______, que le recourant s'est engagé à traduire.

20.    Dans son écriture du 23 juin 2020, le recourant, par son conseil, a insisté sur la nécessité d'entendre MM. D______ et G______. Il a précisé qu'il n'avait pas retrouvé l'original de son contrat de travail, qu'il avait peut-être remis à Unia. Il produisait en outre l'original du courrier de M. D______ du 1er novembre 2018 et une copie du passeport allemand de ce dernier, qui permettraient de constater que sa signature variait, ainsi que l'original de la réponse de M. D______ du 7 octobre 2018 et la traduction des échanges de messages WhatsApp.

On y lit notamment deux messages adressés par le recourant à M. D______ le 6 août 2018 à la teneur suivante : « Je pars demain et j'aimerais vraiment résoudre ma question - je ne pose plus de questions sur le téléphone - mais pour l'argent j'ai vraiment besoin que vous me payiez ce que vous devez, merci » ; « Je comprends, je veux juste savoir où nous en sommes et quand vous pensez que l'argent viendra », un message du recourant du 7 août 2018 indiquant « Essayez de me payer Je veux envoyer mes enfants se détendre pendant une semaine », un message du recourant du 10 août 2018 « Je suis en feu, j'ai un besoin urgent d'être payé », un message du 11 octobre 2018 du recourant indiquant « L'essentiel pour moi est d'obtenir mon argent demain et de payer pour l'école » ; et deux messages du recourant du 26 novembre 2018 indiquant : « Bonjour, payez-moi aujourd'hui - je dois effectuer mes paiements » et « Vous m'avez mis dans une situation inconfortable ».

21.    Dans ses déterminations du 6 juillet 2020, l'intimée a persisté dans ses conclusions, notant que les pièces produites par le recourant ne démontraient toujours pas la réalité du montant du salaire allégué.

22.    Le 31 août 2020, la chambre de céans a entendu M. G______.

Ce témoin a exposé qu'il avait rencontré le recourant en 2001, alors qu'ils étaient scolarisés dans le même établissement. Le témoin ne s'était jamais rendu dans les locaux de la société. Le recourant lui avait parlé de son travail : il devait fixer des rendez-vous pour livrer des bijoux et des montres. Il décrivait son travail comme difficile, « parce que c'était le grand bordel ». Son directeur n'était jamais là et il avait des difficultés pour payer régulièrement les charges, les salaires, ainsi que les fournisseurs. Le témoin avait à plusieurs reprises rencontré M. D______, qu'il connaissait depuis 15 ans, et à qui il avait confié une montre pour une révision, qu'il n'avait toujours pas récupérée dix-huit mois plus tard. Il a précisé qu'il avait présenté M. D______ au recourant. Il ignorait le montant de la rémunération de ce dernier, qui lui avait toutefois confié qu'il n'avait pas perçu la totalité de ses salaires et lui avait demandé de l'aider à recouvrer ces montants en intervenant auprès de M. D______. Il avait vu l'administrateur remettre une enveloppe contenant de l'argent au recourant, vers la fin de l'automne 2018 ou au début de l'hiver 2019.

À l'issue de l'audience, la chambre de céans a indiqué qu'elle tenterait de convoquer M. D______.

23.    Le 21 octobre 2020, le recourant a indiqué qu'il avait consulté le dossier de faillite de la société, qui n'avait toutefois produit aucun document. Il a produit les pièces suivantes :

a.       procès-verbal d'interrogatoire de Monsieur I______, ancien administrateur de la société, par l'OF en date du 1er juillet 2019, selon lequel il avait démissionné en 2016 par manque de temps et parce que ses honoraires ne lui avaient pas été versés ;

 

b.      courrier du 14 novembre 2019 de l'OF à Unia, aux termes duquel il n'avait pas obtenu la comptabilité pour les années 2017 et 2018 et ne disposait pas d'éléments pouvant indiquer si le recourant avait ou non travaillé pour la société.

24.    Le 9 novembre 2020, l'intimée a persisté dans ses conclusions.

25.    Le 18 novembre 2020, la chambre de céans a transmis copie de cette écriture au recourant.

26.    À la même date, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 25 juin 1982 (LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d'espèce est ainsi établie.

2.        La modification du 21 juin 2019 de la LPGA est entrée en vigueur le 1er janvier 2021. Toutefois, dans la mesure où le présent recours était pendant devant la chambre de céans à cette date, il reste soumis à l'ancien droit, conformément à l'art. 83 LPGA.

3.        Le recours, interjeté dans les forme et délai prévus par la loi, est recevable (art. 56ss LPGA).

4.        Le litige porte sur le droit du recourant à une indemnité en cas d'insolvabilité.

5.        Aux termes de l'art. 51 al. 1 LACI, les travailleurs assujettis au paiement des cotisations, qui sont au service d'un employeur insolvable sujet à une procédure d'exécution forcée en Suisse ou employant des travailleurs en Suisse, ont droit à une indemnité pour insolvabilité (ci-après : indemnité) lorsqu'une une procédure de faillite est engagée contre leur employeur et qu'ils ont, à ce moment-là, des créances de salaire envers lui (let. a), ou que la procédure de faillite n'est pas engagée pour la seule raison qu'aucun créancier n'est prêt, à cause de l'endettement notoire de l'employeur, à faire l'avance des frais (let. b), ou qu'ils ont présenté une demande de saisie pour créance de salaire envers leur employeur.

L'art. 52 al. 1 LACI prévoit que l'indemnité couvre les créances de salaire portant sur les quatre derniers mois au plus d'un même rapport de travail, jusqu'à concurrence, pour chaque mois, du montant maximal visé à l'art. 3 al. 2. Les allocations dues aux travailleurs font partie intégrante du salaire.

Conformément à l'art. 53 LACI, lorsque l'employeur a été déclaré en faillite, le travailleur doit présenter sa demande d'indemnisation à la caisse publique compétente à raison du lieu de l'office des poursuites ou des faillites, dans un délai de soixante jours à compter de la date de la publication de la faillite dans la Feuille officielle suisse du commerce (al. 1). En cas de saisie de l'employeur, le travailleur doit présenter sa demande d'indemnisation dans un délai de soixante jours à compter de la date de l'exécution de la saisie (al. 2). À l'expiration de ces délais, le droit à l'indemnité s'éteint (al. 3).

6.        L'art. 55 al. 1 LACI dispose que dans la procédure de faillite ou de saisie, le travailleur est tenu de prendre toutes les mesures propres à sauvegarder son droit envers l'employeur, jusqu'à ce que la caisse l'informe de la subrogation dans ladite procédure. Une fois que la caisse est devenue partie à la procédure, le travailleur est tenu de l'assister utilement dans la défense de ses droits (al. 1).

Cette disposition traite l'obligation de l'assuré de diminuer le dommage de l'assurance. Le comportement de l'assuré durant les rapports de travail, après leur résiliation, avant et après l'apparition du motif de versement de l'indemnité en cas d'insolvabilité, peut influencer directement l'étendue de l'indemnisation. Les assurés doivent se comporter comme si l'indemnité en cas d'insolvabilité n'existait pas (Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l'assurance-chômage, 2014, nn. 1 et 8 ad art. 55 LACI).

La violation de l'obligation de diminuer le dommage implique que l'on puisse reprocher à l'assuré d'avoir commis une faute intentionnelle ou une négligence grave (arrêt du Tribunal fédéral 8C_898/2011 du 6 juin 2012 consid. 2.2).

Cette obligation exige du travailleur qui n'a pas reçu son salaire, en raison de difficultés économiques rencontrées par l'employeur, qu'il entreprenne à l'encontre de ce dernier toute démarche utile en vue de récupérer sa créance, sous peine de perdre son droit à l'indemnité en cas d'insolvabilité. Il s'agit d'éviter que l'assuré ne reste inactif en attendant le prononcé de la faillite de son ex-employeur (arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 27/06 du 25 janvier 2007 consid. 3.2.1). En vertu de cette obligation, les travailleurs doivent également tout entreprendre dans la procédure de faillite afin de sauvegarder leurs prétentions à l'encontre de l'employeur (ATF 127 V 183 consid. 3c). Selon la jurisprudence constante, l'assuré doit poursuivre de manière conséquente et continue les démarches introduites, ce qui exclut une longue période sans réaction (arrêt du Tribunal fédéral 8C_66/2013 du 18 novembre 2013 consid. 4.2). 

L'obligation de diminuer le dommage qui incombe à l'assuré avant la résiliation des rapports de travail n'est pas soumise aux mêmes exigences que l'obligation qui lui incombe après la résiliation des rapports de travail. L'étendue des démarches qui peuvent être exigées du travailleur pour récupérer tout ou partie de son salaire avant la fin des rapports de travail dépend de l'ensemble des circonstances du cas concret. On n'exige pas nécessairement de l'assuré qu'il introduise sans délai une poursuite contre son employeur ou qu'il ouvre action contre ce dernier. Il faut en tout cas que le salarié montre de manière non équivoque et reconnaissable pour l'employeur le caractère sérieux de sa prétention de salaire. Une absence de liquidités de l'employeur de longue durée peut justifier une demande de sûretés par le travailleur, si ce dernier peut craindre légitimement que son salaire ne lui soit pas versé conformément au contrat, cela à la différence d'un retard exceptionnel et de peu d'importance qui ne saurait compromettre la confiance du travailleur dans le respect par l'employeur de ses obligations. Lorsqu'il apparaît, selon les circonstances, que l'employeur ne pourra ou ne voudra pas s'acquitter, sans un retard excessif, de ses obligations, il est normal que le salarié soit mis en mesure d'exiger des sûretés et de résilier son contrat avec effet immédiat si ces dernières ne lui sont pas fournies. Du point de vue de l'assurance-chômage, il importe d'éviter que le personnel d'un employeur insolvable renonce à réclamer les arriérés de salaire pendant de nombreux mois, en tablant sur la couverture de ses arriérés par l'assurance-chômage si l'employeur tombe en faillite (arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 364/01 du 12 avril 2002 consid. 1b).

Selon la jurisprudence, une assurée qui attend plus de neuf mois avant de faire valoir ses prétentions de salaire à l'encontre de son employeur, dont elle connaît les difficultés financières, viole l'obligation de réduire le dommage, ce qui entraîne la perte du droit à l'indemnité en cas d'insolvabilité (arrêt du Tribunal fédéral 8C_801/2011 du 11 juin 2012 consid. 6.2). Un assuré qui reste inactif durant près de trois mois après la fin de ses rapports de travail, reportant les conséquences de l'insolvabilité éventuelle de son ancien employeur sur l'assurance-chômage et faisant passer sciemment les intérêts d'un tiers avant ceux de l'assurance sociale, contrevient manifestement à son obligation de réduire le dommage (arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 91/01 du 4 septembre 2001 consid. 2b). Un assuré qui sait que son employeur n'est pas en mesure de le rémunérer et qui s'en accommode sans prendre de mesures contraignantes, se contentant de réclamations orales ou écrites qui n'offrent aucune garantie, viole son obligation de diminuer le dommage (arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 367/01 du 12 avril 2002 consid. 2b et 2c). Notre Haute Cour a confirmé qu'un assuré qui n'a entrepris aucune démarche entre la résiliation du contrat de travail et l'ouverture de la faillite viole son obligation de diminuer le dommage (arrêt du Tribunal fédéral 8C_630/2011 du 3 octobre 2011 consid. 4.1). Un assuré qui reste inactif pendant près de six mois avant de mettre en demeure son employeur de lui verser les arriérés de salaires commet une violation de l'obligation de réduire le dommage. Des réclamations orales ne suffisent pas à satisfaire à cette obligation (arrêt du Tribunal fédéral 8C_956/2012 du 19 août 2013 consid. 6).

7.        Selon l'art. 74 de l'ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 31 août 1983 (OACI - RS 837.02), la caisse n'est autorisée à verser une indemnité en cas d'insolvabilité que lorsque le travailleur rend plausible sa créance de salaire envers l'employeur.

Cette disposition consacre une atténuation du degré de la preuve en ce qui concerne le point de savoir si et dans quelle mesure il existe une créance de salaire contre l'employeur insolvable. L'assuré ne doit pas forcément l'établir au degré de la vraisemblance prépondérante. Il suffit qu'il existe des indices qu'une telle créance existe et que l'administration et le juge puissent être convaincus que les faits allégués se sont vraisemblablement produits, quand bien même on ne peut pas exclure qu'ils soient démentis lors d'un examen successif. En revanche, les autres conditions du droit à la prestation, comme en particulier l'existence d'un rapport de travail portant sur une activité en Suisse ou la survenance d'un cas d'insolvabilité, doivent être établies au degré de la vraisemblance prépondérante (arrêt du Tribunal fédéral 8C_424/2019 du 3 juin 2020 consid. 6.3). Sur ce point, le Tribunal fédéral a souligné, sans analyser de façon exhaustive cette question, qu'il était douteux que les seules indications d'un assuré suffisent à rendre plausible une prétention salariale (ATF 144 V 427 consid. 4.2).

8.        Les explications d'un assuré sur le déroulement d'un fait allégué sont au bénéfice d'une présomption de vraisemblance (arrêts du Tribunal fédéral des assurances U 96/05 du 20 mai 2006 consid. 3.1 et U 267/01 du 4 juin 2002 consid. 2a). Toutefois, selon le principe de la « déclaration de la première heure » développé par la jurisprudence et applicable de manière générale en assurances sociales, en présence de deux versions différentes et contradictoires d'un fait, la préférence doit être accordée à celle que l'assuré a donnée alors qu'il en ignorait peut-être les conséquences juridiques, les explications nouvelles pouvant être consciemment ou non le résultat de réflexions ultérieures (ATF 121 V 45 consid. 2a ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_663/2009 du 1er février 2010, consid. 3.2).

9.        En l'espèce, s'agissant en premier lieu de la plausibilité de la créance salariale du recourant, il faut relever ce qui suit.

Le recourant a certes produit le contrat de travail stipulant une rémunération mensuelle de CHF 12'500.-. Il paraît toutefois difficile d'en vérifier la réalité, dès lors que le recourant ne dispose d'aucun document bancaire qui attesterait son versement, affirmant qu'il était payé en espèces. On s'étonne de ce que les parties au contrat soient convenues d'un tel mode de paiement, notamment eu égard à l'éloignement géographique de M. D______, au vu duquel un virement bancaire aurait été plus commode. De plus, quand bien même il faudrait considérer comme avéré que le salaire était versé en espèces, il est surprenant que le recourant n'en ait pas déposé une partie au moins sur son compte bancaire. À ces éléments s'ajoutent les interrogations que suscite l'existence de deux versions des bulletins de salaire versés à la procédure, les premières indiquant simplement le montant des salaires brut et net et le décompte des cotisations sociales, les autres mentionnant le versement en espèces. Sur ce point, les explications du recourant n'emportent pas la conviction. Celui-ci a affirmé que les bulletins de salaire comprenant la mention du paiement en espèces étaient les documents en sa possession, alors que ceux qui en étaient exempts étaient détenus par M. D______. Or, dans la mesure où l'employeur est la partie qui a intérêt à démontrer que le salaire a bien été versé en cas de litige, il ne fait guère de sens que ce soit le recourant, en sa qualité d'employé, qui ait pris le soin d'établir d'autres bulletins de salaire comprenant une telle précision. En outre, cette mention semble faire partie intégrante du document original, puisqu'elle s'aligne parfaitement dans le corps du texte, dont elle reprend la police et la taille, si bien qu'il paraît douteux qu'elle ait été ajoutée après réception du paiement par le recourant, ce qui impliquerait soit de modifier après coup ces bulletins de salaire en demandant à M. D______ de les signer une nouvelle fois, soit de manipuler les documents originaux en les scannant pour y ajouter cette précision. De plus, le compte individuel du recourant auprès de la FER-CIAM ne mentionne aucun revenu en 2017, alors que le recourant a fait état d'un début d'emploi au sein de la société en novembre de cette année.

Cela étant, quand bien même il faudrait considérer comme avéré que le recourant a bien réalisé une rémunération mensuelle de CHF 12'500.-, on ne pourrait en toute hypothèse pas non plus exclure au degré de la vraisemblance prépondérante qu'elle n'a pas été versée. Il est vrai qu'il s'agit là d'un fait négatif dont la preuve est difficile à amener (arrêt du Tribunal fédéral 6B_867/2009 du 3 décembre 2009 consid. 2.5). Cela étant, l'exigence d'établir des faits négatifs, c'est-à-dire de fournir une preuve négative, n'est pas par principe inadmissible (ATF 139 II 451 consid. 2.4). En l'espèce, les modalités de paiement et les habitudes bancaires du recourant, qui rendent impossible la preuve au degré de la vraisemblance prépondérante du versement du salaire, font par définition également obstacle à la démonstration de l'absence de paiement. Or, l'allégation du défaut de paiement n'est pas corroborée par des indices concrets en l'espèce. De plus, les différents renseignements donnés par le recourant à ce sujet ne sont pas exempts de contradictions. Il a en effet mentionné un dernier versement de salaire le 15 juin 2018 dans sa demande à l'intimée, alors que le bulletin de salaire mentionne la remise d'un acompte le 23 juin 2018. De plus, l'attestation de l'employeur indique que tous les salaires ont été payés, et le recourant n'a pas contesté l'exactitude de cette attestation auprès d'Unia. Il a du reste bien précisé qu'il n'entendait pas ouvrir une action en justice à l'encontre de son ancien employeur, ce qui ne manque pas d'étonner s'il avait encore des créances ouvertes à son encontre à cette date, et qui contraste avec le contenu de son courriel à la société du 16 novembre 2018. Le témoignage de M. G______ ne suffit pas à dissiper les doutes sur ce point, dès lors qu'il n'a pas articulé de chiffre précis quant aux salaires restés en souffrance, et qu'en toute hypothèse, son témoignage sur ce point consiste uniquement à rapporter les déclarations du recourant par ouï-dire et ne résulte pas d'une connaissance directe de cet élément, comme ce serait par exemple le cas s'il avait assisté à une conversation entre le recourant et M. D______ à ce sujet. On peut ici renvoyer à l'art. 169 du code de procédure civile du 19 décembre 2008 (CPC - RS 272), applicable par analogie, qui prévoit en substance que le témoignage porte sur des faits dont une personne a eu une perception directe. Enfin, ce témoin a indiqué qu'une somme aurait été remise au recourant par M. D______ en automne 2018 ou au début 2019, dont on peut présumer qu'elle visait à désintéresser le recourant, si bien que la créance de ce dernier ne peut être établie au degré de la vraisemblance prépondérante, à tout le moins dans sa quotité.

La question liée à la plausibilité de la créance peut toutefois rester ouverte en l'espèce, dès lors que la décision de l'intimée doit en toute hypothèse être confirmée pour les motifs suivants.

Force est en effet de constater que le recourant ne s'est pas conformé à son obligation de réduire le dommage.

À l'appui de sa demande d'indemnité déposée en mars 2019, le recourant n'a produit que le courriel du 18 octobre 2018, et l'intimée s'est assurée qu'aucune autre démarche n'avait été entreprise, comme le révèle son annotation manuscrite sur ce document. Ce simple courriel, ne contenant aucune mise en demeure formelle, n'est pas suffisant au regard de la jurisprudence pour considérer que le recourant a tout entrepris pour sauvegarder ses intérêts.

Dans le cadre de son opposition, ce dernier a certes produit un autre courrier daté du 3 septembre 2018, intimant à la société de régler ses salaires. Conformément aux principes développés par la jurisprudence en lien avec les versions successives données par un assuré, ce courrier doit toutefois être apprécié avec une certaine prudence. De plus, lorsque le recourant a été interpellé par la chambre de céans sur les modalités d'envoi de ce pli, il est revenu sur cet élément, affirmant qu'il l'avait en réalité remis en main propre à M. D______. Ce revirement suscite également des doutes sur l'authenticité de ce courrier. Si le recourant savait qu'il pourrait remettre ce document directement à l'administrateur, on ne comprend pas pourquoi il n'a pas mentionné la distribution en main propre sur ce courrier et ne s'est pas fait délivrer un accusé de réception. Il est en outre curieux que ce courrier soit en français, alors que le recourant et M. D______ communiquaient usuellement en russe, ce que confirment les messages WhatsApp échangés avec ce dernier, voire en anglais.

Au vu des circonstances, il n'est du reste pas inutile de souligner que le recourant a donné des informations qui ne sont manifestement pas conformes à la vérité dans sa demande d'indemnités de chômage auprès d'Unia, puisqu'il a indiqué ne pas être organe d'une autre entreprise, alors même qu'il était officiellement l'administrateur de deux autres sociétés à la date de cette demande. L'une d'elles a d'ailleurs son siège à la même adresse que la société, bien que le recourant ait dans un premier temps déclaré à la chambre de céans que ces locaux étaient exclusivement utilisés par son ancien employeur - avant de relativiser ce propos.

Cela étant, même à supposer que le courrier du 3 septembre 2018 ait effectivement été adressé à l'administrateur de la société, il ne constitue pas non plus une démarche suffisante pour retenir que le recourant a entrepris tout ce qui était exigible pour obtenir le versement de son salaire et diminuer le dommage au vu de l'ensemble des circonstances, et notamment de la durée pendant laquelle les salaires n'auraient pas été versés. Les messages WhatsApp ne le permettent pas non plus. Le recourant n'a en effet adressé que trois messages en août dont on peut déduire qu'il réclamait un paiement à l'administrateur, puis un message en octobre et deux en novembre 2018. Ces messages ne sont en outre guère explicites, dès lors qu'ils ne chiffrent pas les montants dus, et qu'il n'est même pas certain que le dernier daté du 26 novembre 2018 porte sur les salaires prétendument en souffrance. Compte tenu des circonstances, et notamment des difficultés chroniques de trésorerie de la société dont le recourant a fait état dans sa requête de faillite, il ne pouvait se contenter de ces démarches sans leur donner des suites concrètes, alors même que l'administrateur ne lui avait donné aucune garantie concrète quant au versement de son salaire.

Enfin, après la résiliation des rapports de travail, le recourant est resté inactif pendant près de trois mois. Il n'a en particulier produit sa créance dans la faillite de la société qu'après avoir sollicité une indemnité en cas d'insolvabilité auprès de l'intimée. Ce manque de réaction, eu égard à la jurisprudence citée, suffit en soi à nier le droit à l'indemnité litigieuse.

Au vu de ces éléments, il faut admettre que le recourant n'a pas entrepris toutes les démarches raisonnablement exigibles, tant durant les rapports de travail qu'après leur résiliation, en se contentant d'une unique mise en demeure non suivie d'effets, puis en ne procédant à aucune démarche durant plusieurs mois après la perte de son emploi. Il a ainsi violé son obligation de réduire le dommage, ce qui entraîne la déchéance de son droit à une indemnité en cas d'insolvabilité.

Il n'est ainsi pas nécessaire d'examiner si les autres conditions du droit à l'indemnité en cas d'insolvabilité sont remplies.

Eu égard à ce qui précède, la décision de l'intimée sera confirmée.

La chambre de céans précisera encore qu'au vu de l'issue du litige, l'audition de M. D______ s'avère inutile, par appréciation anticipée des preuves (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1).

10.    Le recours est rejeté.

Le recourant succombant, il n'a pas droit à des dépens.

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA dans sa teneur en force jusqu'au 31 décembre 2020).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu'elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Mario-Dominique TORELLO

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu'au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le