Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public
ATA/1172/2024 du 08.10.2024 ( TAXIS ) , REJETE
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
| POUVOIR JUDICIAIRE A/502/2024-TAXIS ATA/1172/2024 COUR DE JUSTICE Chambre administrative Arrêt du 8 octobre 2024 1ère section |
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dans la cause
A______ recourant
représenté par Me Jacques Roulet, avocat
contre
DIRECTION DE LA POLICE DU COMMERCE ET DE LUTTE
CONTRE LE TRAVAIL AU NOIR intimée
A. a. A______, né le ______ 1963, domicilié au Boulevard B______ 1______, à C______, a obtenu une autorisation d’usage accru du domaine public (ci‑après : AUADP) correspondant aux plaques d’immatriculation GE 2______, valable jusqu’au 18 octobre 2023.
b. Par un courrier du 31 mars 2023, envoyé par pli A+, le service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir, devenu la direction de la police du commerce et de lutte contre le travail au noir (ci-après : la PCTN) a informé A______ qu’une requête de renouvellement de son AUADP devait lui parvenir au plus tôt dès le 1er juin 2023 et au plus tard le 30 juin 2023. Elle n’entrerait pas en matière sur les requêtes déposées en dehors du délai. À défaut de procéder dans ces délais, son AUADP prendrait fin à sa date d’échéance, sans possibilité de renouvellement.
c. Selon le suivi des envois de la Poste, l’envoi a été distribué le 1er avril 2023 à 9h37.
B. a. Par courriel du 29 août 2023, A______ a contacté la PCTN afin de se renseigner sur l’échéance de son AUADP.
b. Le représentant de la PCTN lui a répondu, par courriel du lendemain, que la caducité de son AUADP allait être constatée en raison de l’absence de démarches de sa part dans le délai.
c. Par courrier du 14 septembre 2023, A______ a sollicité la restitution du délai du fait qu’il n’avait jamais eu connaissance dudit courrier.
d. Le 16 octobre 2023, la PCTN a indiqué qu’il envisageait de déclarer sa demande en restitution irrecevable pour inobservation du délai imparti par l’autorité et de constater la caducité de l’AUADP. Le courrier indiquant l’échéance de son AUADP lui avait bien été distribué le 1er avril 2023, soit six mois avant l’échéance de son AUADP. Un délai de 30 jours lui était imparti pour formuler des observations.
La preuve de la distribution du courrier du 31 mars 2023 était annexée au courrier.
e. Aucune observation n’a été formulée dans le délai imparti.
f. Par décision du 12 janvier 2024, la PCTN a constaté que l’AUADP était devenue caduque au 19 octobre 2023. Les plaques d’immatriculation devaient être déposées. Il lui était loisible de s’inscrire sur la liste d’attente s’il souhaitait obtenir une nouvelle AUADP.
C. a. Par acte remis à la poste le 9 février 2024, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci‑après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant à son annulation et à l’octroi d’un nouveau délai pour le dépôt d’une requête en renouvellement de son AUADP. Préalablement, il a sollicité son audition, ainsi que celle d’un voisin, D______.
Il ignorait que son AUADP avait une date d’échéance. Ce n’était que lors d’une discussion avec un collègue qu’il avait appris qu’il devait solliciter son renouvellement. Fin août 2023, il avait fait l’acquisition d’un nouveau véhicule, soit une Mercedes Benz Classe V, en vue de l’utiliser dans le cadre de son activité professionnelle. Cet achat représentait un investissement, qui devait être rentabilisé sur les années à venir dans l’exercice de sa profession.
La présomption de distribution du courrier du 31 mars 2023 ne trouvait pas application, sa situation constituant un cas de force majeure. Il n’avait pris connaissance du courrier du 31 mars 2023 qu’à réception du courrier du 16 octobre 2023. L’absence de réception du courrier s’expliquait « très certainement » par la situation qui prévalait dans son immeuble, qui était sujet à de nombreux vols et actes de vandalisme, en particulier sur les boîtes aux lettres, lesquelles étaient accessibles à tout un chacun. L’entrée de l’immeuble se faisait via un sas, dans lequel se trouvaient les boîtes aux lettres. Si la seconde porte permettant l’accès à l’immeuble était verrouillée, la première ne l’était pas. La régie de l’immeuble avait déjà été informée de l’existence de nombreux vols et vandalisme des boîtes aux lettres, ce qui avait été confirmé par courrier de la régie du 7 février 2022. La régie avait dans un premier temps indiqué qu’elle entendait installer un verrou sur la première porte. Puis, elle avait changé d’avis et entendait désormais déplacer les boîtes aux lettres à l’intérieur de l’immeuble, si bien que la situation demeurait inchangée. Les locataires de l’immeuble retrouvaient ainsi très fréquemment leur boîte aux lettres ouverte par des individus souhaitant s’approprier des colis ou « causer du grabuge ». Cela était encore arrivé récemment. Il arrivait aussi fréquemment que la Poste se trompe dans la distribution du courrier et pose les courriers directement sur les boîtes aux lettres.
Il s’étonnait que le courrier lui indiquant les dates dans lesquelles la demande de renouvellement devait être déposée ne soit communiqué que via un courrier A+ et non par pli recommandé. Il s’agissait là d’une information pourtant essentielle, qui devait parvenir à son destinataire.
Le prononcé de la caducité de son AUADP constituait une atteinte grave à sa liberté économique, qui consacrait une violation de la proportionnalité au sens étroit.
Il a produit des photographies de sa boîte aux lettres, le courrier de la régie du 7 février 2022 ainsi qu’un courriel de la régie du 30 janvier 2024 confirmant « avoir étudié plusieurs choix » et avoir « décidé de laisser cette première porte ouverte et de déplacer le bloc de boîte aux lettres à l’intérieur de l’immeuble dans le courant de cette année ».
b. Par réponse du 13 mars 2024, la PCTN a conclu au rejet du recours.
Il ne ressortait pas des pièces produites que des déprédations avaient effectivement été causées lors de la distribution du courrier du 31 mars 2023. Le courrier de la régie constatant du vandalisme datait de plus de deux ans et le recourant ne l’avait contactée qu’à la suite du prononcé de la décision. Les photographies produites, qui n’étaient pas datées, ne démontraient pas qu’un vandalisme avait eu lieu. Une des photographies montrait des boîtes aux lettres bien fermées tandis que l’autre image montrait simplement des boîtes à lait ouvertes. Aucune pièce produite ne permettait de démontrer l’existence d’un quelconque vandalisme. Il ne ressortait, enfin, pas du dossier que le recourant aurait informé la régie avoir été victime d’un tel désagrément. Aucun élément ne permettait ainsi de renverser la présomption de notification. Le recourant ne pouvait ainsi prétendre à une restitution de délai pour le renouvellement de son AUADP.
Selon la jurisprudence de la chambre administrative, la restriction de la liberté économique était tout à fait proportionnée au vu du numerus clausus des AUADP afin d’assurer l’égalité de traitement.
c. Par réplique du 15 avril 2024, le recourant a persisté dans ses conclusions. Il avait démontré que les problèmes de vandalisme étaient toujours d’actualité et que la régie cherchait à y remédier.
d. Lors de l’audience de comparution personnelle du 23 août 2024, le recourant a relevé avoir souvent constaté, en rentrant du travail, que les boîtes à lait étaient ouvertes. Il en avait parlé avec les voisins et ils avaient convenu d’en faire part à la régie. Les vols avaient commencé en 2021 et avaient augmenté petit à petit depuis. Il n’avait personnellement pas contacté la régie par écrit, mais il était passé les voir. Il n’avait pas personnellement été victime de vols de paquets car il ne faisait pas de commandes sur internet. En revanche, il lui était arrivé de ramener un paquet d’un voisin chez lui afin d’éviter qu’il ne se le fasse voler. Il lui était également arrivé à une reprise de recevoir un « dernier rappel de facture », étant précisé qu’il n’avait pas reçu les précédentes factures. Le « vandalisme » mentionné dans son recours portait surtout sur des boîtes à lait qu’il retrouvait ouvertes. Il avait aussi remarqué que certaines boîtes avaient été forcées mais n’avait pas pris de photos. Son voisin, D______, lui avait indiqué qu’il n’avait pas reçu certains courriers. Il n’avait pas connaissance d’autres courriers ou paquets qui auraient disparu et n’avait pas interpellé la Poste au sujet des erreurs d’acheminement. Il arrivait que les courriers soient placés dans les mauvaises boîtes mais le voisin les redistribuait par la suite.
e. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.
1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).
2. Le recourant a conclu à la tenue d’une audience de comparution personnelle et à l’audition d’un témoin.
2.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit ne s'étend qu'aux éléments pertinents pour l'issue du litige et n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3). Le droit d'être entendu ne comprend pas le droit à une audition orale (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_51/2018 du 17 janvier 2019 consid. 4.1).
2.2 En l’espèce, la chambre de céans a entendu le recourant en audience de comparution personnelle, si bien que cette conclusion est devenue sans objet. Quant à l’audition du voisin, elle vise à établir que certains plis distribués par la Poste ne parviennent pas à leurs destinataires. Or, le recourant a déjà allégué, tant dans ses écritures que lors de son audition devant la chambre de céans, qu’il lui était arrivé de recevoir du courrier destiné à des voisins. Il a précisé que, dans un tel cas, il redistribuait les courriers à leurs destinataires. Or, comme on le verra, cet élément n’est pas contesté. Ainsi, par appréciation anticipée des preuves, l’audition du voisin n’apparaît pas déterminante, si bien qu’il ne sera pas donné suite à la demande d’instruction du recourant.
3. Le recours a pour objet le bien-fondé du constat de caducité de l’AUADP du recourant.
3.1 L’art. 13 de la loi sur les taxis et les voitures de transport avec chauffeur du 13 octobre 2016 (LTVTC - H 1 31) règle les modalités de l’AUADP. Celles-ci sont limitées en nombre et en durée, en vue d’assurer un bon fonctionnement des services de taxis, par une utilisation optimale du domaine public, et en vue de garantir la sécurité publique (al. 1). Elles sont attribuées moyennant le respect des conditions de délivrance, selon des critères objectifs et non discriminatoires (al. 2). Les autorisations et les plaques d’immatriculation correspondantes sont strictement personnelles et intransmissibles (al. 3) et le Conseil d’État en fixe le nombre maximal en fonction des besoins évalués périodiquement, détermine les modalités d’attribution et définit la notion d’usage effectif (al. 4).
L’AUADP est délivrée sur requête pour six ans à une personne physique ou morale aux conditions énumérées sous let. a à c (art. 13 al. 5 LTVTC).
Selon l’art. 13 al. 7 LTVTC, l’AUADP est renouvelée lorsque la requête en renouvellement est déposée trois mois avant l’échéance de l’autorisation (let. a) et que les conditions de l’al. 5 sont toujours réalisées (let. b).
L’art. 21 du règlement d'exécution de la loi sur les taxis et les voitures de transport avec chauffeur du 21 juin 2017 (RTVTC - H 1 31 01) prévoit que le PCTN informe les titulaires six mois avant l'échéance de l’AUADP de la nécessité de déposer une requête en renouvellement (al. 1). La requête peut être formée au plus tôt quatre mois avant sa date d'échéance, mais doit être formée au plus tard trois mois avant sa date d'échéance (al. 2). Le PCTN n'entre pas en matière sur les requêtes en renouvellement déposées en dehors du délai (al. 3). La requête en renouvellement doit être déposée au moyen de la formule officielle correspondante, dûment complétée et accompagnée des documents mentionnés dans ladite formule (al. 4). L'art. 5 du règlement est applicable pour le surplus (al. 5).
Selon l’art. 5 RTVTC, les requêtes en autorisation doivent être déposées auprès du PCTN au moyen de la formule officielle correspondante, dûment complétée par la requérante ou le requérant, et accompagnée de toutes les pièces mentionnées dans ladite formule (al. 1). La requête ne réalisant pas les conditions de l'al. 1 est retournée à la requérante ou au requérant, sans fixation d’un délai pour la compléter (al. 2). Les requêtes en autorisation valablement déposées sont traitées dans un délai de deux mois (al. 5).
3.2 La chambre constitutionnelle a rappelé que l’AUADP octroyée aux taxis ne conférait généralement pas de droits acquis, à moins de garanties spécifiquement obtenues concernant la poursuite de l’activité de location de plaques, ce qui n’était pas le cas dans les affaires dont elle était saisie (ACST/26/2022 du 22 décembre 2022 ; ACST/27/2022 du 22 décembre 2022).
3.3 Un délai fixé par la loi ne peut être prolongé. Les cas de force majeure sont réservés (art. 16 al. 1 LPA). L’art. 16 al. 1 LPA s’applique aux délais prévus par l’art. 13 al. 7 LTVTC et 21 al. 2 RTVTC (ATA/1110/2023 du 10 octobre 2023 consid. 4.5).
Le fardeau de la preuve de la notification d’un acte et de sa date incombe en principe à l’autorité qui entend en tirer une conséquence juridique (ATF 129 I 8 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_634/2015 du 26 avril 2016 consid. 2.1). La jurisprudence établit la présomption réfragable que les indications figurant sur la liste des notifications de la Poste, telle que notamment la date de la distribution du pli, sont exactes. Cette présomption entraîne un renversement du fardeau de la preuve au détriment du destinataire : si ce dernier ne parvient pas à établir l’absence de la distribution attestée par le facteur, la remise est censée être intervenue à cette date (ATF 142 IV 201 consid. 2.3 ; ATA/852/2022 du 23 août 2022 consid. 2c).
La prestation « A+ » offre la possibilité de suivre le processus d’expédition du dépôt jusqu’à la distribution. Elle comporte également l’éventuelle réexpédition à une nouvelle adresse, ainsi que le retour des envois non distribuables. Lors de l’expédition par « Courrier A+ », l’expéditeur obtient des informations de dépôt, de tri et de distribution par voie électronique via le service en ligne « Suivi des envois ». Les envois « Courrier A + » sont directement distribués dans la boîte aux lettres ou dans la case postale du destinataire. En cas d’absence, le destinataire ne reçoit pas d’invitation à retirer un envoi dans sa boîte aux lettres (ATF 142 III 599 consid. 2.1).
L'envoi d'une décision par courrier A+ est un mode de notification des décisions admis par le Tribunal fédéral. À l'instar de ce qui prévaut pour l'avis de retrait d'un pli recommandé, il existe une présomption réfragable selon laquelle le « Courrier A+ » a été dûment déposé dans la boîte aux lettres ou dans la case postale du destinataire et que la date de distribution a été correctement enregistrée
(ATF 142 III 599 consid. 2.2; arrêt 6B_192/2021 précité consid. 2.3.1 et les réf. citées). Cette présomption entraîne un renversement du fardeau de la preuve au détriment du destinataire. Si ce dernier ne parvient pas à établir l'absence de dépôt dans sa boîte aux lettres ou sa case postale au jour attesté par le facteur, la remise est censée avoir eu lieu en ces lieu et date. Dès lors que la non-distribution d'une invitation à retirer un pli est un fait négatif, on ne peut naturellement guère en apporter la preuve formelle. La seule possibilité, toujours envisageable, d'une erreur de la Poste ne suffit pas à renverser la présomption. Il faut au contraire qu'il existe des indices concrets d'erreur (ATF 142 IV 201 consid. 2.3; arrêts du Tribunal fédéral 6B_428/2022 du 14 décembre 2022 consid. 1.2; 6B_517/2021 du 16 juin 2021 consid. 1.1.2).
3.4 Le formalisme excessif, prohibé par l’art. 29 al. 1 Cst., est réalisé lorsque la stricte application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi, complique de manière insoutenable la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l'accès aux tribunaux (ATF 135 I 6 consid. 2.1 ; 134 II 244 consid. 2.4.2).
Le strict respect des délais légaux se justifie pour des raisons d'égalité de traitement et n'est pas constitutif de formalisme excessif (ATF 142 V 152 consid. 4.2 in fine).
4. En l’espèce, l’intimée a apporté la preuve du dépôt dans la boîte aux lettres du recourant du courrier du 31 mars 2023, le 1er avril 2023 à 9h37.
Le recourant soutient toutefois n’en avoir jamais eu connaissance et invoque des problèmes de vandalisme et de vols dans son immeuble. Il se fonde en cela sur un courrier du 7 février 2022, par lequel la régie de son immeuble fait état de « nombreux vols et vandalisme dans les boîtes aux lettres ». Les enquêtes ont toutefois permis d’établir que le « vandalisme » consistait principalement en l’ouverture de boîtes à lait et que les vols concernaient surtout les colis. Aucun élément au dossier ne permet de retenir que les boîtes aux lettres, en particulier les compartiments prévus pour les lettres, aient été endommagées. Le recourant a certes allégué en audience que « certaines boîtes avaient été forcées ». Or, outre le fait que le recourant ne fait pas valoir que ces déprédations auraient eu lieu le jour de la distribution du courrier litigieux, il n’a produit aucune pièce, soit un constat de dégât matériel transmis à la régie ou une photographie du dommage, permettant de prouver son allégué. Le recourant a certes relevé qu’il arrivait que le facteur procède à des erreurs de distribution. Or, selon la jurisprudence précitée, la seule possibilité, toujours envisageable, qu’une telle erreur ait eu lieu le jour de la distribution litigieuse ne suffit pas à renverser la présomption selon laquelle le courrier A+ a été dûment déposé dans la boîte aux lettres et que la date de distribution a été correctement enregistrée. On ne trouve, au demeurant, aucune trace au dossier de problèmes récurrents de distribution dans l’immeuble du recourant. Entendu en audience, le recourant a évoqué, sans toutefois le démontrer, une seule incidence de « rappel de facture », précisant qu’il ne lui était jamais arrivé qu’un voisin lui apporte du courrier faussement distribué dans sa boîte aux lettres. Il a précisé que s’il arrivait que des courriers soient placés dans les mauvaises boîtes aux lettres, les voisins les redistribuaient aux destinataires concernés, ce qu’il avait d’ailleurs récemment fait. La Poste n’avait toutefois jamais été interpellée au sujet d’erreurs de distribution. Dans ces circonstances, il convient de retenir que les éléments avancés par le recourant ne constituent pas des indices concrets propres à renverser la présomption de distribution découlant du relevé « Track & Trace ».
Le grief d’absence de notification régulière doit partant être rejeté.
La chambre de céans retiendra ainsi qu’il est établi que le recourant a reçu le courrier du 31 mars 2023. Il s’ensuit que la PCTN l’a informé six mois avant l'échéance de l’AUADP de la nécessité de déposer une requête en renouvellement, conformément à l’art. 21 RTVTC, et qu’il ne peut prétendre avoir été dans l’ignorance des conditions posées au renouvellement de son AUADP. Pour le reste, le recourant ne soutient pas que le délai imparti par la PCTN dans son courrier du 31 mars 2023 serait contraire à l’art 13 al. 7 LTVTC, selon lequel la requête en renouvellement doit être formée trois mois avant l’échéance de l’autorisation, étant rappelé que l’AUADP du recourant arrivait à échéance le 18 octobre 2023.
C’est ainsi conformément à la loi que la PCTN a constaté que l’AUADP du recourant avait expiré.
5. Le recourant invoque ensuite une violation de la liberté économique.
5.1 Selon l'art. 27 Cst., la liberté économique est garantie (al. 1) ; elle comprend notamment le libre choix de la profession, le libre accès à une activité économique lucrative privée et son libre exercice (al. 2).
L'activité de chauffeur de taxi indépendant ou salarié est protégée par l'art. 27 Cst., même si l'exercice de cette activité implique un usage accru du domaine public (ATF 143 II 598 consid. 5; arrêt du Tribunal fédéral 2C_79/2023 du 23 février 2024 consid. 4.1.1, destiné à la publication, et les arrêts cités). De jurisprudence constante, la collectivité publique est toutefois habilitée à réglementer un tel usage accru du domaine public par les taxis (arrêt du Tribunal fédéral 2C_394/2020 du 20 novembre 2020 consid. 7.2 et les arrêts cités). Les restrictions cantonales à l'exercice de la profession de chauffeur de taxi qui portent ainsi atteinte à la liberté économique doivent reposer sur une base légale, être justifiées par un intérêt public prépondérant et respecter le principe de proportionnalité, qui exige qu'une mesure soit apte à produire les résultats escomptés (aptitude), que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins incisive (nécessité), et interdit toute limitation des droits individuels allant au-delà du but visé et exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (proportionnalité au sens étroit) (art. 36 al. 1 à 3 Cst. ; ATF 149 I 191 consid. 6 et 7.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_79/2023 précité consid. 4.1.1, destiné à la publication).
5.2 En l’occurrence, le constat de la caducité de l’AUADP du recourant constitue indubitablement une atteinte à sa liberté économique. Celle-ci repose toutefois sur une base légale, l’art. 13 al. 5 et al. 7 LTVTC. Cette disposition limite le nombre d’AUADP en vue d'assurer un bon fonctionnement des services de taxis, par une utilisation optimale du domaine public, et en vue de garantir la sécurité publique. Cet objectif relève d'un intérêt public évident justifiant une restriction de la liberté économique. Quant à la proportionnalité de la mesure attaquée, la caducité de l'AUADP apparaît apte à atteindre le but recherché, dans la mesure où il s'agit de garantir un service de taxis efficace et adapté, mais également d’assurer une égalité de traitement vu le numerus clausus. Le recourant, qui n’a pas déposé sa demande de renouvellement dans le délai, dispose de la possibilité de former une nouvelle requête sous réserve d'en remplir les conditions, et il lui est par ailleurs loisible de travailler comme chauffeur à d’autres conditions ou pour des employeurs. Dans des cas similaires, la chambre de céans a déjà jugé que la restriction à la liberté économique était admissible (ATA/736/2024 du 18 juin 2024 consid. 6 ; ATA/542/2024 du 30 avril 2024 consid. 5.4 ; ATA/1110/2023 du 10 octobre consid. 4.5).
Mal fondé, le recours sera rejeté.
6. Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 500.-, tenant compte des actes d’instruction, sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).
PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE
à la forme :
déclare recevable le recours interjeté le 9 février 2024 par A______ contre la décision de la direction de la police du commerce et de lutte contre le travail au noir du 12 janvier 2024 ;
au fond :
le rejette ;
met un émolument de CHF 500.- à la charge de A______ ;
dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;
dit que conformément aux art. 82 ss LTF, le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;
communique le présent arrêt à Me Jacques Roulet, avocat du recourant, ainsi qu'à la direction de la police du commerce et de lutte contre le travail au noir.
Siégeant : Eleanor McGREGOR, présidente, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Patrick CHENAUX, juges.
Au nom de la chambre administrative :
le greffier-juriste :
F. SCHEFFRE
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| la présidente siégeant :
E. McGREGOR |
Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.
Genève, le
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| la greffière :
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