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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3975/2023

ATA/1379/2023 du 21.12.2023 sur JTAPI/1339/2023 ( MC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3975/2023-MC ATA/1379/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 21 décembre 2023

en section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Pascal STEINER, avocat

contre

COMMISSAIRE DE POLICE intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 30 novembre 2023 (JTAPI/1339/2023)


EN FAIT

A. a. A______ (alias B______) est né le ______ 1987.

b. Le 14 décembre 2022, les autorités tunisiennes l’ont identifié, sur la base de ses empreintes digitales, comme étant l'un de leurs ressortissants.

c. Selon l'extrait de son casier judiciaire, entre le 5 mars 2020 et le 19 octobre 2022, A______ a été condamné neuf fois, principalement pour entrée illégale (violation de l'interdiction d'entrée en Suisse dont il faisait l'objet) et séjour illégal, à une reprise pour vol d'importance mineure et deux fois pour contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121).

d. Il s'est vu notifier par l'office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM), le 25 mars 2021, une décision immédiatement exécutoire de renvoi de Suisse, à laquelle il ne s’est pas conformé.

e. Il a fait l'objet de deux interdictions d'entrée en Suisse prononcées par le secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM), la première, du 14 mai 2020, valable jusqu’au 6 mai 2022, et la seconde, le 20 octobre 2022, valable jusqu'au 25 août 2025.

f. Sa demande d'asile, déposée le 27 janvier 2023, a fait l'objet d'une décision de rejet, entrée en force le 26 avril 2023. Aux termes de cette décision, A______ était tenu de quitter la Suisse dès la fin de sa détention pénale.

g. À sa sortie de prison, le 14 juillet 2023, A______ s'est vu remettre une convocation l'enjoignant de se présenter chaque mercredi, à 15h00, auprès de l’OCPM, au Vieil Hôtel de police, au 25, boulevard Carl-Vogt. Il ne s'y est jamais présenté et a été signalé disparu le 14 août 2023.

B. a. Le 27 novembre 2023, A______ a été arrêté par la police et prévenu, notamment, d'infractions à la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et d'empêchement d'accomplir un acte officiel. Entendu par les enquêteurs, il a notamment déclaré n'avoir ni lieu de résidence fixe en Suisse, ni lien particulier avec ce pays, ni source légale de revenu. Il n’avait entrepris aucune démarche en vue de son retour dans son pays d'origine et n'avait aucune intention de rentrer en Tunisie.

b. Par ordonnance pénale du Ministère public (ci-après : MP) du 28 novembre 2023, A______ a été reconnu coupable d'infractions à l'art 115 al. 1 let. b LEI et d'empêchement d'accomplir un acte officiel (art. 286 al. 1 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 - CP - RS 311.0) et remis entre les mains des services de police.

c. Le même jour, à 18h00, le commissaire de police a prononcé un ordre de mise en détention de l’intéressé, pour une durée de trois mois, soit jusqu’au 28 février 2024 inclus.

d. Lors de son audition devant le Tribunal administratif de première instance (ci‑après : TAPI), A______ a déclaré que lorsqu'il était sorti de prison, il n'avait pas compris qu'il était astreint à l'obligation de se présenter à l'OCPM. Il s'était alors rendu en France où il était resté quatre mois avant de revenir en Suisse mi-novembre 2023, dans l'idée d'obtenir des soins dentaires. Lors de sa dernière interpellation, les agents l'avaient frappé au genou, au cou et à côté de l'œil droit, ce qui lui avait occasionné une plaie à ce dernier endroit. S’il était libéré, il ne reviendrait plus en Suisse, où il avait vécu successivement dans différents foyers, le dernier étant celui de C______. Il ne souhaitait pas retourner dans son pays, l'Algérie, car il n'y avait plus aucune famille. Il venait de la région frontalière avec la Tunisie. En Suisse, il recevait de l'aide de la mosquée et y avait des amis qui le traitaient mieux que « la » famille.

Le TAPI a noté que A______ paraissait émotionnellement affecté en rappelant à nouveau qu'il avait été frappé lors de son arrestation.

A______ a indiqué qu'il ne savait pas lire le français et que si la lettre de l’OCPM du 14 juillet 2023 lui impartissant de se présenter en leurs services lui avait bien été remise lors de sa sortie de prison, il n'avait pas eu de traducteur à disposition et personne ne lui avait précisé de quoi il s'agissait. S'il en avait compris le contenu, il se serait évidemment rendu chaque semaine au rendez-vous. En cas de libération, il s'engageait à respecter une telle obligation et ne tenterait pas de disparaître et de se soustraire à son renvoi. Il a précisé être d'accord de se présenter une fois par semaine à la police, mais pas de rentrer en Tunisie. Il a indiqué qu'il serait tout de même prêt à prendre un avion pour la Tunisie s'il était libéré, mais s'y refusait s'il restait en détention.

La représentante du commissaire de police a indiqué qu’il fallait compter un délai de trois semaines pour l'obtention d'un laissez-passer pour la Tunisie. Il n'était délivré que sur la base de la réservation d'un vol et généralement dans les tous derniers jours qui le précédaient. Il y avait bon espoir que le laissez-passer soit délivré d'ici au 19 décembre 2023, date du vol prévu. Elle a relevé que lors de son audition le 28 novembre 2023, A______ avait indiqué s’être blessé au visage en tombant, seul, alcoolisé, et avait refusé la visite d'un médecin. Le dossier comportait différents documents attestant que les communications avaient eu lieu avec lui en français, langue qu'il comprenait.

e. Par jugement du 30 novembre 2023, le TAPI a confirmé l’ordre de mise en détention administrative pris par le commissaire de police le 28 novembre 2023.

L’intéressé avait fait l'objet de décisions de renvoi de Suisse et d'interdiction d'entrée en Suisse prononcées il y a plus de deux ans, qu'il n'avait pas respectées. À tout le moins, s'il fallait retenir, selon ses déclarations à l'audience, qu'il se serait absenté en France durant quatre mois lors de sa sortie de prison en juillet 2023, force serait alors de constater qu'il serait revenu en Suisse malgré l'interdiction d'entrée à laquelle il était soumis jusqu'au 25 août 2025, montrant par là qu'il faisait fi des mesures qui pesaient sur lui et se déplaçait à sa guise d'un pays à l'autre.

Nonobstant les très grandes difficultés que le conseil de A______ avait exposé avoir eues pour un échange compréhensible en français avec son mandant en vue de la préparation de l'audience (jusqu'à l'intervention de l'interprète), le dossier en possession du TAPI contenait des documents relatifs à des auditions du précité en français. Il en découlait qu'il était en mesure de répondre de manière précise aux questions qui lui étaient posées dans cette langue, à l’instar de son audition du 25 janvier 2023 auprès de l'OCPM, ainsi que de son audition du 28 novembre 2023 auprès de la police. Il paraissait dès lors fort peu probable que A______ n'ait pas été en mesure de comprendre qu'il était dans l'obligation de se présenter une fois par semaine auprès de l'OCPM.

Celui-ci n'avait aucune intention de rester à disposition des autorités suisses et cherchait à se soustraire à son renvoi, quitte à utiliser une forme de chantage indiquant qu'il serait prêt à se soumettre à ses obligations s'il était remis en liberté, mais pas s'il était maintenu en détention.

S'agissant du doute qu'il existerait sur sa nationalité, A______ faisait preuve d'une certaine mauvaise fois en soutenant être Algérien et non pas Tunisien, puisqu'il n'avait cure, depuis 2021, d'apporter le moindre indice confirmant ses déclarations à ce sujet. Il n'existait aucune raison valable de remettre en question les indications figurant au dossier. C’était sur la base de ses empreintes digitales et donc par un moyen a priori tout à fait fiable, que cette reconnaissance avait eu lieu. Ainsi, contrairement à ce qu'il soutenait, la question de sa nationalité paraissait résolue avec un degré de vraisemblance amplement suffisant et il était donc tout à fait possible de procéder à sa détention administrative.

S'il était vrai que les autorités suisses avaient connu des difficultés à faire entendre leurs besoins auprès des autorités tunisiennes dans le cadre du renvoi de ressortissants de ce pays, cela n'avait pas été considéré par la jurisprudence de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) comme un obstacle à la détention administrative. Il n'y avait donc pas lieu de remettre en question la proportionnalité de la détention administrative de A______, rien n'indiquant, à ce stade, l'impossibilité qu’un laissez-passer lui soit délivré par les autorités tunisiennes.

C. a. Par acte du 14 décembre 2023, A______ a interjeté recours devant la chambre administrative contre ce jugement dont il a requis l’annulation. Il a conclu à sa mise en liberté immédiate, subsidiairement à ce que sa mise en liberté soit assortie de toute mesure permettant le contrôle de sa présence.

Contrairement à ce qu’avait retenu le TAPI, aucune pièce du dossier ne permettait d’attester de son niveau de français. Il n’avait pas été en mesure de comprendre qu’il devait se présenter à l’OCPM une fois par semaine. Un interprète avait d’ailleurs été nécessaire devant le TAPI. Aucun indice concret ne permettait de conclure qu’il entendrait se soustraire au départ.

Il n’avait pas les moyens, en l’absence de tout document d’identité, au vu de sa situation personnelle et financière, de prouver qu’il n’était pas tunisien. Il avait déclaré accepter son renvoi en cas de libération. Il n’y avait pas lieu de faire fi de cette affirmation.

La représentante du commissaire n’avait pas été en mesure de prouver la prévisibilité du renvoi vers la Tunisie. Il ne lui appartenait pas d’attendre, en détention, que les autorités tunisiennes daignent collaborer.

Le principe de proportionnalité avait été violé, une assignation à résidence ou toute autre mesure moins incisive que la détention administrative devait être prononcée.

b. Le commissaire de police a conclu au rejet du recours. Le vol avec accompagnement policier était confirmé pour le 9 janvier 2024. Il produisait le billet d’avion au nom du recourant. Le laissez-passer n’était émis par les autorités tunisiennes que quelques jours avant le départ. Il produisait, à titre d’exemple, copie de deux laissez-passer délivrés par les autorités tunisiennes fin 2023.

c. A______ n’ayant pas souhaité répliquer dans le délai qui lui avait été imparti, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

Selon l’art. 10 al. 2 1ère phr. de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 (LaLEtr - F 2 10), la chambre administrative doit statuer dans les dix jours qui suivent sa saisine. Ayant reçu le recours le 15 décembre 2023 et statuant ce jour, elle respecte ce délai.

2.             Le recourant conteste que les conditions légales de sa détention soient remplies.

2.1 La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l'art. 5 CEDH (ATF135 II 105 consid. 2.2.1) et de l'art. 31 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu'elle repose sur une base légale. Le respect de la légalité implique ainsi que la mise en détention administrative ne soit prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (arrêts du Tribunal fédéral 2C_256/2013 du 10 avril 2013 consid. 4.1 ; 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.1).

L'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 cum l’art. 75 al. 1 let. c LEI prévoit que lorsqu'une décision de renvoi a été notifiée, l'autorité compétente peut, afin d'en assurer l'exécution, mettre en détention la personne concernée si elle a franchi la frontière malgré une interdiction d’entrée en Suisse et ne peut pas être renvoyée immédiatement, alors que les ch. 3 et 4 de l’art. 76 al. 1 let. b LEI prévoient l’hypothèse où des éléments concrets font craindre qu'elle entende se soustraire au renvoi, en particulier parce qu'elle ne se soumet pas à son obligation de collaborer (ch. 3) ou si son comportement permet de conclure qu'elle se refuse à obtempérer aux instructions des autorités (ch. 4). Ces deux dernières dispositions décrivent toutes deux des comportements permettant de conclure à l’existence d’un risque de fuite ou de disparition, de sorte que les deux éléments doivent être envisagés ensemble (arrêt du Tribunal fédéral 2C_128/2009 du 30 mars 2009 consid. 3.1).

2.2 En l’espèce, le recourant a fait l'objet d'une décision de renvoi les 25 mars 2021 et 24 mars 2023. Lors de son audition par la police le 28 novembre 2023, le recourant a reconnu, notamment, ne pas s’être conformé à une interdiction d’entrée en Suisse valable du 26 août 2022 au 23 août 2025. Il avait par ailleurs déjà reconnu, lors de l’exercice de son droit d’être entendu devant l’OCPM, le 25 janvier 2023, être allé en France et être revenu en Suisse. Il a confirmé ces propos lors de son audition devant le TAPI. Les conditions des art. 76 al. 1 let. b ch. 1 et 75 al. 1 let. c LEI sont en conséquence remplies.

Son refus persistant de se soumettre à la décision de renvoi, l’absence de domicile et d’attaches familiales en Suisse permettent de surcroît d’admettre l'existence d'un risque réel et concret que, s'il était libéré, il n'obtempérerait pas aux instructions de l'autorité lorsque celle-ci lui ordonnera de monter à bord de l'avion devant le reconduire dans son pays et qu'il pourrait être amené à disparaître dans la clandestinité, de sorte que le motif de détention prévu par l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEI est aussi rempli.

Il n’est pas nécessaire d’analyser si l’hypothèse de l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 cum l’art. 75 al. 1 let. f LEI, relative au dépôt d’une demande d’asile dans le but manifeste d’empêcher l’exécution d’un renvoi, est remplie.

3.             Le recourant fait valoir que son renvoi est impossible, de sorte que sa détention administrative viole le principe de la proportionnalité.

3.1 Ce principe, garanti par l'art. 36 al. 3 Cst., se compose des règles d'aptitude – qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé –, de nécessité – qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, l'on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés – et de proportionnalité au sens étroit – qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 140 I 218 consid. 6.7.1 ; 136 IV 97 consid. 5.2.2).

3.2 Selon l'art. 79 al. 1 LEI, la détention en vue du renvoi ne peut excéder six mois au total. Cette durée maximale peut néanmoins, avec l'accord de l'autorité judiciaire cantonale, être prolongée de douze mois au plus, lorsque la personne concernée ne coopère pas avec l'autorité compétente (art. 79 al. 2 let. a LEI) ou lorsque l'obtention des documents nécessaires au départ auprès d'un État qui ne fait pas partie des États Schengen prend du retard (art. 79 al. 2 let. b LEI).

3.3 La détention doit être levée notamment si l'exécution du renvoi ou de l'expulsion s'avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles (art. 80 al. 6 let. a LEI). L'exécution du renvoi est impossible lorsque le rapatriement est pratiquement exclu, même si l'identité et la nationalité de l'étranger sont connues et que les papiers requis peuvent être obtenus (arrêt du Tribunal fédéral 2C_984/2020 du 7 janvier 2021 consid. 4.1 et les références). Tel est par exemple le cas lorsqu'un État refuse explicitement, ou du moins de manière clairement reconnaissable et cohérente, de reprendre certains de ses ressortissants (ATF 130 II 56 consid. 4.1.3 ; 125 II 217 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_768/2020 du 21 octobre 2020 consid. 5.1). Le facteur décisif est de savoir si l'exécution de la mesure d'éloignement semble possible dans un délai prévisible respectivement raisonnable avec une probabilité suffisante (arrêts du Tribunal fédéral 2C_955/2020 précité consid. 5.1 ; 2C_597/2020 du 3 août 2020 consid. 4.1).  

3.4 Les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi ou de l'expulsion doivent être entreprises sans tarder (art. 76 al. 4 LEI ; « principe de célérité ou de diligence »). Il s'agit d'une condition à laquelle la détention est subordonnée (arrêt du Tribunal fédéral 2A.581/2006 du 18 octobre 2006 ; ATA/1305/2022 du 21 décembre 2022 consid. 4d ; ATA/611/2021 du 8 juin 2021 consid. 5a). Le principe de célérité est violé si les autorités compétentes n'entreprennent aucune démarche en vue de l'exécution du renvoi pendant une durée supérieure à deux mois et que leur inactivité ne repose pas en première ligne sur le comportement des autorités étrangères ou de la personne concernée elle-même (ATF 139 I 206 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1132/2018 du 21 janvier 2019 consid. 3.3).

3.5 En l’espèce, le recourant ne peut être suivi lorsqu’il prétend être de nationalité algérienne. D’une part, il a été reconnu par les autorités tunisiennes. D’autre part, il ne produit aucun document permettant d’accréditer ses allégations.

De même, aucun élément ne permet de considérer que son renvoi vers la Tunisie ne serait pas possible. Le commissaire a produit des copies de laissez-passer récemment délivrés en faveur de ressortissants tunisiens, y compris pour des retours non volontaires. Les autorités tunisiennes avaient par ailleurs déjà manifesté, le 20 septembre 2023, leur accord à la délivrance d’un tel document de voyage en faveur du recourant. Rien ne laisse à penser que le laissez-passer ne serait pas délivré pour le prochain vol, organisé pour le 9 janvier 2024, et aucun élément du dossier ne permet de retenir que le renvoi ne serait pas possible.

Le recourant allègue que la décision viole le principe de proportionnalité. Or, sa mise en détention est une mesure apte à atteindre l’intérêt public à l’exécution de l’éloignement du recourant. Celui-ci est important, l’intéressé ayant été plusieurs fois condamné pénalement et ayant fait l’objet de deux décisions de renvoi, auxquelles il ne s’est pas soumis et de deux décisions d’interdiction d’entrée qu’il n’a pas respectées. Il a par ailleurs reconnu consommer de la cocaïne lors de sa dernière audition devant la police.

Le recourant prétend que sa détention ne serait pas nécessaire, car il ne s’oppose pas à un départ de Suisse, acceptant de partir s’il est libéré. Or, rien ne l’empêche de demander à prendre un vol de retour pour son pays d’origine. On peine à discerner en quoi sa liberté permettrait mieux de garantir son départ. Le recourant ne peut notamment pas être suivi lorsqu’il indique ne pas avoir compris qu’il était astreint à se présenter une fois par semaine à l’OCPM. En effet, lors de son audition par la police, le 28 novembre 2023, il a renoncé à solliciter l’intervention d’un interprète et a parfaitement su répondre aux questions qui lui étaient posées pendant plus d’une heure et demie d’interrogatoire. Il doit en conséquence être retenu à son encontre qu’il n’a pas respecté les obligations que lui avaient imposées l’OCPM. En outre, si son intérêt privé à être libéré est grand, l’intérêt public doit primer au vu de son comportement. Aucune mesure moins incisive que la mise en détention administrative n’apparaît à apte à garantir le départ de Suisse de l’intéressé.

Enfin, la durée de la mesure est compatible avec la limite posée par l’art. 79 LEI.

Au vu de ce qui précède, l’ordre de mise en détention administrative du recourant pour une durée de trois mois est conforme au droit et au principe de proportionnalité.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

4.             La procédure étant gratuite, aucun émolument ne sera perçu. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 14 décembre 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 30 novembre 2023 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les 30 jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Pascal STEINER, avocat du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au commissaire de police, au Tribunal administratif de première instance, au secrétariat d'État aux migrations ainsi qu'à l'établissement de détention administrative Favra, pour information.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

B. SPECKER

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

la greffière :