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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/83/2023

ATA/425/2023 du 25.04.2023 ( FPUBL ) , IRRECEVABLE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/83/2023-FPUBL ATA/425/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 25 avril 2023

 

dans la cause

 

Monsieur A______ recourant
représenté par Me Fanny Roulet-Tribolet, avocate

contre

COMMUNE DE B______ intimée
représentée par Me François Bellanger, avocat



EN FAIT

A. a. Monsieur A______ a été engagé en 2016 par la commune de B______ (ci-après : la commune) en qualité de sergent-partenariat proximité. Il occupe actuellement un poste de sergent-major.

b. Il a été en incapacité de travail du 4 juillet au 4 décembre 2022.

c. Par courrier du 25 octobre 2022, les ressources humaines de la commune lui ont transmis copie du procès-verbal de la séance du 6 octobre 2022 réunissant la
quasi-totalité du service et à laquelle il n’avait pas été convié. D’autres personnes en congé y avaient assisté. Les débats avaient notamment porté sur la réception d’une lettre anonyme.

d. Les conditions de son retour au travail sont litigieuses. Il a été libéré de son obligation de travailler dès le 12 décembre 2022.

B. a. Par décision du 20 décembre 2022, déclarée exécutoire nonobstant recours, le Conseil administratif de la commune (ci-après : CA) a décidé d’ouvrir une enquête administrative à l’encontre de M. A______ et de suspendre son activité, au motif de « sous-performances, de pointages irréguliers et comportements inadéquats ».

b. Par acte du 11 janvier 2023, M. A______ a interjeté recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision. Il a conclu à son annulation. À titre préalable, il a requis la restitution de l’effet suspensif ainsi que la production, par la commune, de l’intégralité de son dossier.

L’ouverture d’une enquête administrative lui causait un dommage irréparable en portant atteinte à sa réputation. Il contestait les reproches, vagues, qui lui étaient adressés, et qui étaient anciens soit antérieurs à son arrêt de travail de longue durée.

Son droit d’être entendu, l’art. 111 du statut du personnel de la commune du 14 décembre 2010 (LC 30 151 – ci-après : le statut) et le principe de l’égalité de traitement avaient été violés.

c. Après un échange d’écritures, la présidence de la chambre administrative a rejeté la requête en restitution de l’effet suspensif au recours.

d. La commune a conclu à l’irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet.

e. Dans sa réplique, le recourant a persisté dans ses conclusions. Il contestait les trois reproches formulés dans la décision querellée.

f. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Le recours a été interjeté en temps utile (art. 62 al. 1 let. b et 63 al. 1 let. c de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA-GE - E 5 10) devant la juridiction compétente (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du
26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05).

2.             La question de sa recevabilité doit être tranchée en premier lieu, les griefs du recourant – qu'ils soient de forme ou de fond, à l'exception éventuelle d'un constat de nullité non plaidé en l'espèce – ne pouvant être traités que si le recours est recevable (ATA/265/2021 du 2 mars 2021 consid. 2).

2.1 Selon l'art. 57 let. c in initio LPA, les décisions incidentes peuvent faire l'objet d'un recours si elles risquent de causer un préjudice irréparable. Selon la même disposition in fine, elles peuvent également faire l'objet d'un tel recours si cela conduisait immédiatement à une solution qui éviterait une procédure probatoire longue et coûteuse.

2.2 L'art. 57 let. c LPA a la même teneur que l'art. 93 al. 1 let. a et b de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110). Le préjudice irréparable visé par l’art. 93 al. 1 let. a et b LTF suppose que le recourant ait un intérêt digne de protection à ce que la décision attaquée soit immédiatement annulée ou modifiée (ATF 127 II 132 consid. 2a ; 126 V 244 consid. 2c). Un préjudice est irréparable lorsqu'il ne peut être ultérieurement réparé par une décision finale entièrement favorable au recourant (ATF 138 III 46 consid. 1.2 ; 134 III 188 consid. 2.1 et 2.2). Un intérêt économique ou un intérêt tiré du principe de l'économie de la procédure peut constituer un tel préjudice (ATF 127 II 132 consid. 2a ; 126 V 244 consid. 2c). Le simple fait d'avoir à subir une procédure et les inconvénients qui y sont liés ne constitue toutefois pas en soi un préjudice irréparable (ATF 133 IV 139 consid. 4 et les références citées). Un dommage de pur fait, tel que la prolongation de la procédure ou un accroissement des frais de celle-ci, n'est notamment pas considéré comme un dommage irréparable de ce point de vue (ATF 133 IV 139 précité consid. 4 ; 131 I 57 consid. 1).

2.3 La chambre administrative a précisé à plusieurs reprises que l'art. 57 let. c LPA devait être interprété à la lumière de ces principes (ATA/1622/2017 du 19 décembre 2017 consid. 4c ; cette interprétation est critiquée par certains auteurs qui l'estiment trop restrictive : Stéphane GRODECKI/Romain JORDAN, Questions choisies de procédure administrative, SJ 2014 II p. 458 ss).

2.4 Lorsqu'il n'est pas évident que le recourant soit exposé à un préjudice irréparable, il lui incombe d'expliquer dans son recours en quoi il serait exposé à un tel préjudice et de démontrer ainsi que les conditions de recevabilité de son recours sont réunies (ATF 136 IV 92 consid. 4 ; ATA/1622/2017 précité consid. 4d ; ATA/1217/2015 du 10 novembre 2015 consid. 2d).

2.5 La jurisprudence de la chambre de céans se montre, de manière générale, restrictive dans l'admission d'un préjudice irréparable (ATA/663/2018 du 26 juin 2018 consid. 3d ; ATA/1622/2017 du 19 décembre 2017 consid. 4d).

La décision d'ouverture d'une enquête administrative ne cause pas un préjudice irréparable, dès lors qu'une décision après l'enquête administrative, qui serait entièrement favorable à l’intéressé, permet de réparer une éventuelle atteinte, notamment à sa personnalité (ATA/1222/2022 du 6 décembre 2022 consid. 3h ; ATA/265/2021 du 2 mars 2021 consid. 4 ; ATA/1018/2018 du 2 octobre 2018 consid. 11a).

L'atteinte à la réputation et à l’avenir professionnel n’est en soi pas susceptible de causer un préjudice irréparable puisqu'une décision finale, dans l'hypothèse où elle serait entièrement favorable au recourant, permettrait de la réparer (ATA/1164/2021 du 2 novembre 2021 consid. 6a ; ATA/1559/2019 du 21 octobre 2019 et les référence citées) ;

2.6 En l’espèce, la décision d’ouverture d’une enquête administrative est une décision incidente. L'admission du recours ne conduirait pas à une décision finale permettant d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse ; le recourant ne le soutient d'ailleurs pas. Seule l'existence d'un préjudice difficilement réparable engendré par la décision querellée permettrait d'admettre la recevabilité du recours.

Dans la mesure où il appartenait au recourant de rendre vraisemblable que la décision querellée lui cause un préjudice difficilement réparable, il lui incombait d’apporter un minimum d’éléments sur sa situation. Ceux-ci font cependant défaut. En outre, les résultats de l’enquête administrative permettront de déterminer si son ouverture était justifiée. Il est ainsi possible qu’une décision finale lui soit entièrement favorable, permettant de réparer une éventuelle atteinte.

Ainsi, le recourant n'a pas rendu vraisemblable l'existence d'un préjudice irréparable. Partant, faute de remplir les conditions de l’art. 57 let. c LPA, le recours doit être déclaré irrecevable.

3.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 800.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA).

Aucune indemnité ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA), pas plus qu'à la commune, collectivité publique de plus de 10'000 habitants, taille suffisante pour disposer d’un service juridique, et par conséquent apte à assurer la défense de ses intérêts sans recourir aux services d’un avocat (ATA/1324/2017 du 26 septembre 2017 consid. 6 ; ATA/415/2017 du 11 avril 2017 consid. 13 ; ATA/753/2016 du 6 septembre 2016 consid. 8 et les références citées).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

déclare irrecevable le recours interjeté le 11 janvier 2023 par Monsieur A______ contre la décision de la commune de B______ du 20 décembre 2022 ;

met un émolument de CHF 800.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Fanny Roulet-Tribolet, avocate du recourant, ainsi qu'à Me François Bellanger, avocat de la commune de B______.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Verniory, Mme Lauber,
M. Mascotto, Mme Michon Rieben, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

Sibilla Hüsler Enz

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :