Décisions | Chambre civile
ACJC/840/2024 du 25.06.2024 sur JTPI/7314/2023 ( OO ) , MODIFIE
En droit
Par ces motifs
république et | canton de genève | |
POUVOIR JUDICIAIRE C/23710/2018 ACJC/840/2024 ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE Chambre civile DU MARDI 25 JUIN 2024 |
Entre
Madame A______, domiciliée ______, appelante d'un jugement rendu par la 1ère Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 21 juin 2023, représentée par Me B______, avocat,
et
C______ Sàrl, sise ______, intimée, représentée par Me Christian GROSJEAN, avocat, PBM Avocats SA, avenue de Champel 29, case postale, 1211 Genève 12.
A. Par jugement JTPI/7314/2023 rendu le 21 juin 2023, notifié aux parties le surlendemain, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal) a condamné A______ à payer à C______ Sàrl 190'944 fr. avec intérêts à 5% dès le 20 novembre 2017 (chiffre 1 du dispositif), arrêté les frais judiciaires à 33'700 fr., compensés avec les avances de fournies par les parties, soit 31'450 fr. par C______ Sàrl et 2'250 fr. par A______, mis à raison de 22'190 fr. à la charge de C______ Sàrl et de 11'510 fr. à celle de A______, condamné A______ à payer 9'260 fr. à C______ Sàrl à titre de remboursement des frais judiciaires (ch. 2), condamné C______ Sàrl à payer à A______ 8'965 fr. à titre de dépens (ch. 3) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 4).
B. a. Par acte déposé au greffe de la Cour de justice (ci-après : la Cour) le 22 août 2023, A______ a formé appel de ce jugement. Elle a sollicité son annulation et a conclu à ce que la Cour condamne C______ Sàrl à lui payer 14'260 fr. avec intérêts à 5% dès le 21 octobre 2017, sous suite de frais judiciaires et dépens.
b. Dans sa réponse du 30 octobre 2023, C______ Sàrl a conclu, sur appel principal, au rejet de celui-ci, sous suite de frais judiciaires et dépens. Sur appel joint, elle a conclu à l'annulation du jugement entrepris, cela fait, à ce que la Cour condamne A______ à lui payer 440'000 fr. avec intérêts à 5% dès le 20 novembre 2017, sous suite de frais judiciaire et dépens.
c. A______ a répliqué sur appel principal, persistant dans ses conclusions. Sur appel joint, elle a conclu au déboutement de C______ Sàrl de toutes ses conclusions, sous suite de frais judiciaires et dépens.
d. C______ Sàrl a dupliqué sur appel principal et répliqué sur appel joint. Elle a persisté dans ses conclusions.
e. A______ a dupliqué sur appel joint, persistant dans ses conclusions.
f. Les parties ont toutes deux encore fait usage de leur droit de répliquer de manière spontanée, persistant dans leurs conclusions respectives.
g. Le 23 avril 2023, la Cour a informé les parties de ce que la cause était gardée à juger.
C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier :
a. En 1998, A______ a acquis la parcelle 1______, Commune de D______ [GE], d'une surface de 3'420 m2, sur laquelle sont construits deux anciens bâtiments d'habitation de, respectivement, 106 m2 et 70 m2 classés depuis les années 1960, une orangerie et un jardin arborisé à la française.
La parcelle avait fait l'objet, dans les décennies précédentes et par ses propriétaires antérieurs, de plusieurs demandes d'autorisation de construire et projets de promotions immobilières, sans succès, notamment en raison du classement de ses bâtiments.
b. En automne 2014, A______ ayant l'intention de vendre sa parcelle, s'est notamment adressée à des tiers courtiers immobiliers et à C______ Sàrl, dont le but est "toutes activités dans le domaine de l'architecture" et dont les administrateurs sont E______ et F______, tous deux architectes.
L'objectif convenu par les parties était de valoriser la parcelle par l'obtention d'une autorisation de construire maximisant la surface constructible, ce qui faciliterait une vente à un prix plus élevé, par exemple à des investisseurs ou des promoteurs immobiliers.
c. Les 16 et 17 février 2015, A______ et C______ Sàrl ont par conséquent signé un "Contrat relatif aux prestations de mises en valeur d'une propriété immobilière" concernant la propriété susévoquée.
Le contrat comporte plusieurs sections qui se rapportent aux différentes activités devant être déployées.
Au titre du courtage, le contrat prévoit que celui-ci serait non exclusif et que la commission de C______ Sàrl serait de 3% du prix de vente final.
Au titre de la mise en valeur par l'obtention de droits à bâtir, ceux-ci pouvaient être estimés à 3'913 m2. Il s'agissait de négocier avec le département alors compétent, soit le Département de l'aménagement, du logement et de l'énergie (DALE), pour déterminer la meilleure procédure à suivre, puis d'établir un plan localisé de quartier (PLQ) ou de déposer une demande préalable. Il faudrait aussi consulter le Service des monuments et des sites (SMS) et la Ville de Genève.
Au titre des "synergies immobilières et architecturales, avances de frais", C______ Sàrl était prête à avancer les "frais de l'étude de mise en valeur" - soit ses propres honoraires - alors estimés à 281'340 fr. TTC.
Le taux horaire appliqué par C______ Sàrl serait de 140 fr., un tableau fournissant une estimation des "gains par l'action de C______ Sàrl" étant annexé. Si la vente devait intervenir, le promettant-acquéreur ou l'acquéreur final prendrait en charge les honoraires de C______ Sàrl. Si aucune vente n'intervenait, A______ devrait alors la rémunérer.
Au moment de la signature du contrat, il était connu de C______ Sàrl que A______ manquait de liquidités, d'où la décision de lui avancer les frais et de les faire supporter, cas échéant, par l'acquéreur.
Le tableau annexé susmentionné détaille les différentes étapes du travail et les honoraires estimés y relatifs. La rémunération d'architecte de C______ Sàrl était calculée en différentes étapes et prévue de s'élever :
– à 21'600 fr. TTC à titre d'"Avance de frais", pour le "Démarrage du travail de C______ Sàrl", démarrage prévu au 15 février 2015;
– à 18'900 fr. TTC d'honoraires supplémentaires, pour le "Choix de la procédure au DALE : zone primaire ou PLQ" et le "Départ de la plus-value" de la parcelle, choix prévu au 15 mars 2015;
– à 30'240 fr. TTC d'honoraires supplémentaires, pour le "Dépôt d'une DP [demande provisoire] ou d'une DR [demande de renseignements]" portant sur l'obtention de "Droits à bâtir = 3'913 m2", dépôt prévu au 15 juillet 2015;
– à 70'200 fr. TTC d'honoraires supplémentaires, pour l'"Obtention des Droits - IUS : 1.23", c'est-à-dire de "Droits à bâtir = 3'913 m2", obtention prévue au 15 juillet 2016;
– à 140'400 fr. TTC d'honoraires supplémentaires, pour le "Dépôt d'une DD [demande définitive d'autorisation de construire]" avec "Droits à bâtir = 3'913 m2", dépôt prévu le 15 juillet 2017.
Les honoraires d'architecte totaux, tels que chiffrés sous colonne "A payer TTC" et additionnés sous ligne "Totaux droits à bâtir", étaient ainsi estimés à 281'340 fr. TTC (21'600 fr. + 18'900 fr. + 30'240 fr. + 70'200 fr. + 140'400 fr.); ce montant correspond à celui, devisé dans le contrat, pour les "frais de l'étude mise en valeur" de la parcelle.
Le montant prévisible dus au titre du courtage est arrêté à 210'600 fr. TTC.
Enfin, sous le titre "Particularités", il est précisé : "Pour tout ce qui a trait aux prestations d'architectes SIA, c'est la norme 102 SIA qui tient lieu de référence".
d. Le 7 mai 2015, C______ Sàrl, qui avait déjà entamé son travail, a établi, à l'intention de A______, une facture se référant à une "Vente et Achat Parcelle A______ – G______ prévue le lundi 11 mai 2015", libellée comme suit :
"Facture à valoir sur Contrat de Mise en valeur signé les 16 et 17 avril 2015
Selon : Contrat signé le 16 et 17 avril 2015 / Les prestations accomplies / l'art. 1 page 2 du dit contrat / Tableau récapitulatif annexé
Soit TTC à 8% :
Avance de frais à 100% = Frs. 21'600.-
Choix de la procédure à 100% = Frs. 18'900.-
Procédure d'obtention des droits à 70% = Frs. 49'140.-
Courtages en cours à 60% = Frs. 126'360.-.
Total TCC / Montant en demande = Frs. 216'000.- TTC."
Cette facture a été établie par C______ Sàrl en raison et dans la perspective d'une vente par A______ de sa parcelle; cette vente n'a pas eu lieu.
C______ Sàrl n'a pas recherché le paiement de la facture précitée; néanmoins, en considération notamment de celle-ci, A______ a commencé dès juillet 2015, sur une base spontanée, à lui payer des acomptes sur sa rémunération d'architecte.
e. Le 30 septembre 2015, C______ Sàrl a soumis à l'autorité compétente, pour le compte de A______, une demande préalable d'autorisation de construire (DP) portant sur sept résidences contiguës sur la parcelle, correspondant à 3'913 m2 de droits à bâtir supplémentaires sur celle-ci.
Par décision du 13 juin 2016, l'autorité a refusé de délivrer l'autorisation préalable sollicitée car le projet de construction de sept résidences élaboré par C______ Sàrl avait été négativement préavisés par la Commune et différents services concernés et n'était pas conforme aux dispositions légales applicables.
Par jugement définitif du 30 août 2017, le Tribunal administratif de première instance, sur recours de A______, a confirmé la décision de l'autorité du 13 juin 2016 de refus de la demande préalable d'autorisation de construire.
f. Déjà avant de recevoir la décision de refus de l'autorité du 13 juin 2016, C______ Sàrl a soumis à sa consultation informelle, sans dépôt d'une demande préalable (DP) ou d'une demande de renseignement (DR) en autorisation de construire, un projet de construction, modifié, de cinq résidences sur la parcelle.
g. Le 13 septembre 2016, une séance a réuni E______, ainsi que des directeurs et une historienne du SMS. Un procès-verbal a été établi, duquel il ressort : "[Selon la Directrice générale du SMS, il] n'a jamais été question que cette parcelle soit destinée à être densifiée, ainsi que le démontrent les diverses planifications du quartier, en zone développement 3. Cette situation devait être connue de la propriétaire au moment où elle a acquis cette parcelle. Cela, étant la mesure de classement ne prive pas la parcelle de droits à bâtir, mais le projet proposé doit être subordonné à l'existant et respecter l'échelle modeste des bâtiments classés. […] [La Directrice] ne verrait pas d'inconvénient à ce qu'une nouvelle proposition soit soumise à la commission (sous forme de consultation préalable). […] Concernant le projet modifié exposé ce jour par M. E______, soit la réduction du
nombre de villas à 5 et un accès au parking souterrain par la rue 2______ en lieu et place de la rue 3______, [la Direction du SMS indique] que celui-ci représente une atteinte encore trop importante. Le projet reste lourd, la totalité de la parcelle est excavée, les nouveaux bâtiments seront exposés au bruit, sans jardin. A leur avis, la densité devrait être ramenée à une, voire deux unités maximum. […] Monsieur E______ prend acte de cette possibilité, mais fait valoir que le Plan Financier à 5 Résidences dégage déjà un prix au m2 élevé, et que la réduction à une ou deux unités risque de rendre l'opération impossible."
h. En octobre 2016, C______ Sàrl a soumis à la consultation informelle de l'autorité, sans dépôt d'une demande préalable (DP) ou d'une demande de renseignement (DR) en autorisation de construire, un projet de construction, modifié, de quatre résidences (deux fois deux villas jumelées) sur la parcelle.
Le 9 novembre 2016, l'autorité a derechef émis, de manière informelle, un préavis négatif au projet de quatre résidences soumis à sa consultation.
i. Pour chacun des trois projets de construction, à sept, à cinq et à quatre résidences qu'elle a successivement soumis à l'autorité, C______ Sàrl a chaque fois établi de nouveaux jeux de plans, simulations architecturales en 3D et constitué des dossiers de demandes formelles ou informelles d'autorisation.
Ce travail d'architecte a en particulier été effectué par un architecte employé de C______ Sàrl qui y a consacré, dès avril 2015 et pendant un an, quelque 90% de son temps de travail de 40 heures par semaines, et un temps indéterminé par la suite; E______ et F______ y ont également participé.
C______ Sàrl a tenu avec l'autorité compétente et ses différents services, commissions ou offices concernés, plusieurs discussions et réunions en vue de tenter de faire accepter ses projets successifs.
j. Entre février 2015 et l'été 2017, C______ Sàrl, en sus et à côté de son activité d'architecte, a également entrepris, en collaboration ou en concurrence avec divers tiers courtiers déjà mandatés par A______, de trouver un acquéreur pour sa parcelle.
A cette fin, C______ Sàrl a démarché plusieurs investisseurs, tenu des réunions avec eux et établi à leur intention des plans et des projets de montages financiers personnalisés et successivement modifiés pour ses projets à sept, cinq puis quatre résidences, en vue de les convaincre du caractère profitable d'un achat suivi d'une promotion immobilière de la parcelle.
k. A______ a été régulièrement informée de l'avancement de son dossier, mais non de l'évolution des honoraires de C______ Sàrl.
Les différents témoins entendus par le Tribunal ont déclaré à ce sujet :
H______, architecte employé par C______ Sàrl de 2014 à 2019, entendu après la fin de son emploi, a confirmé que A______ assistait à des séances de bureau lors desquelles le travail accompli lui était présenté. Elle avait formulé des commentaires, selon ce que E______ lui avait expliqué. Après le refus du premier projet, A______ avait été informée des démarches auprès de l'administration par courriel et lui-même l'avait informée téléphoniquement. Il en était allé de même lors de la préparation du troisième projet. Il ignorait par contre si elle avait été renseignée sur l'incidence relative aux frais et honoraires.
I______, travaillant dans la société de son fils qui avait été chargée de vendre la parcelle de A______, a exposé que les plans architecturaux et financiers [soit les plans correspondants à la rentabilité d'une éventuelle construction, mais ne concernant pas les honoraires de l'architecte] de chacun des projets liés à sa parcelle et établis par E______ avaient été soumis à A______ : il en avait discuté avec elle en présence des futurs acquéreurs. Elle avait approuvé ces plans et les modifications effectuées en fonction des exigences des autorités.
J______, qui avait été chargé de vendre la propriété par I______ et son fils, a confirmé que A______ participait aux réunions avec les potentiels acquéreurs et était tenue informée des modifications de plans financiers. E______ et A______ lui avaient transmis les plans financiers et architecturaux.
K______, intervenu en tant que courtier pour la vente de la parcelle de A______, a confirmé lui aussi que celle-ci participait aux réunions lors desquelles tout élément qui pouvait valoriser le projet était discuté.
Quant aux parties, elles ont déclaré ce qui suit sur ce point :
E______ a confirmé qu'il tenait A______ informée par courriels, par sms et, parfois, par téléphone ou de vive voix. Il était arrivé que le fils de celle-ci assiste aux entretiens. Comme une autorisation n'avait pas pu être rapidement obtenue - cas envisagé au moment de la rédaction du contrat -, il était dans l'intérêt de tout le monde de déposer des projets alternatifs. La question financière, soit le coût engendré par cette activité supplémentaire n'était pas la première préoccupation, car la rémunération finale serait payée au moment de la vente. Il était donc vrai qu'il n'en avait pas parlé avec A______. Par contre, il y avait eu plusieurs discussions sur les différents projets : il était clair qu'une augmentation inévitable du travail et des coûts aurait lieu, ce dont A______ pouvait se rendre compte. Celle-ci avait toujours reçu un exemplaire de tous les projets et plans financiers.
A______ a déclaré avoir commencé à payer la facture qu'elle avait reçue en lien avec le projet à sept résidences. E______ lui avait alors dit qu'il fallait continuer à essayer et elle était d'accord avec cela. Elle était consciente que les diverses demandes impliquaient du travail : elle payait des acomptes pour cette raison. Dans son esprit, le travail supplémentaire était compris dans le projet initial. Elle a admis avoir participé à de nombreuses réunions où il était question des chances d'obtenir une autorisation et du prix de vente, mais non des honoraires de C______ Sàrl. Elle n'avait posé aucune question sur l'éventuelle augmentation des honoraires pour l'élaboration des différents projets.
l. A______ a été assistée d'un avocat au moins dès la fin septembre 2016, lequel a reçu en copie des documents et des informations de C______ Sàrl.
Ainsi, le 26 septembre 2016, C______ Sàrl a notamment adressé un courriel à A______ et à son avocat explicitant son nouveau projet à deux villas mitoyennes. Par la suite, l'avocat a été mis en copie des informations données à A______, soit plusieurs courriels jusqu'en novembre 2016.
m. A réception du jugement du Tribunal administratif de première instance du 30 août 2017 précité, A______, soit pour elle son conseil, a signifié le 21 septembre 2017 à C______ Sàrl qu'elle résiliait leur contrat avec effet immédiat.
A cette date, A______ avait déjà payé à C______ Sàrl 85'000 fr. d'acomptes.
n. Le 27 septembre 2017, C______ Sàrl a adressé à A______ sa facture finale, faisant état de 4'818 heures d'activité facturées au tarif horaire de 140 fr. HT pour un total de 674'520 fr. HT; après déduction de 85'000 fr. d'acomptes, elle lui réclamait le paiement de 636'681 fr. TTC ([674'520 fr. – 85'000 fr.] + 8% de TVA).
Etait annexé à cette facture un document intitulé "Récapitulation des coûts" qui décrit poste par poste et chronologiquement les différentes activités et le nombre d'heures tels que facturés.
o. Le 6 octobre 2017, A______, soit pour elle son conseil, a intégralement contesté le principe et la quotité des honoraires réclamés par C______ Sàrl.
p. Le 30 octobre 2018, A______ a vendu sa parcelle à un tiers investisseur pour le prix de 7'800'000 fr., sans l'intervention de C______ Sàrl.
q. Le 25 octobre 2018, le nouveau propriétaire de la parcelle, soit pour lui un nouvel architecte qu'il a mandaté à cette fin, a déposé auprès de l'autorité une demande préalable (DP) d'autorisation de construire un immeuble de logements sur la parcelle.
Par décision du 15 novembre 2018, l'autorité a refusé l'autorisation requise.
r. Par demande du 22 mars 2019, déposée au Tribunal de première instance, après l'échec de la tentative de conciliation le 6 décembre 2018, C______ Sàrl, agissant en paiement du solde de sa facture finale du 27 septembre 2017, a réclamé la condamnation de A______ à lui payer 636'681 fr. avec intérêts à 5% dès le 20 novembre 2017.
C______ Sàrl a notamment produit sa facture finale du 27 septembre 2017, sans alléguer en détail chacun des postes dans son écriture.
s. Par réponse et demande reconventionnelle du 31 juillet 2019, A______ a conclu au rejet de la demande et à la condamnation de C______ Sàrl à lui payer 14'260 fr. avec intérêts à 5% dès le 21 octobre 2017, en restitution d'un trop-perçu de rémunération qu'elle lui aurait déjà payé.
Elle a admis que les parties avaient intégré la norme SIA 102 dans leur contrat.
t. Par réponse du 23 octobre 2019, C______ Sàrl a conclu au rejet de la demande reconventionnelle.
u. Les parties ont persisté dans leurs conclusions principales et reconventionnelles respectives dans leurs plaidoiries finales écrites du 26 septembre 2022, et la cause a été gardée à juger après transmission à C______ Sàrl d'une réplique spontanée écrite de A______, sur laquelle celle-là n'a pas dupliqué.
v. Dans la décision entreprise, le Tribunal a relevé que les parties avaient, notamment, conclu un contrat de courtage. Aucune rémunération n'avait été prévue par les parties en cas d'insuccès, c'est-à-dire en l'absence d'une vente de l'immeuble concerné. Ainsi, les prétentions de C______ Sàrl pour ce pan de son activité n'étaient pas justifiées. Quant au contrat d'architecte, il comportait à la fois des prestations d'entrepreneur et de mandataire, respectivement l'élaboration d'un projet et de plans de construction en vue de l'obtention d'une autorisation de construire et l'élaboration d'une stratégie en vue de ce but. La responsabilité contractuelle était soumise aux règles du mandat. Le premier projet de sept résidences était exempt de reproches : l'issue de la demande d'autorisation sollicitée était aléatoire, les règles de diligence n'ayant pas été violées. Il en allait différemment des deuxième et troisième projets visant cinq, puis quatre résidences. C______ Sàrl aurait dû avertir sa mandante des faibles chances d'obtenir une autorisation de construire au vu des motifs avancés pour le premier refus, voire du fait que ses demandes étaient vouées à l'échec. L'augmentation massive des coûts devisés, ce en raison de la soumission de plusieurs projets successifs, n'avait pas été portée à la connaissance de la mandante non plus. Le premier projet avait absorbé l'entier des coûts devisés. Une réduction des honoraires était donc justifiée, correspondant à la suppression des honoraires facturés pour les deuxième et troisième projets. En outre, les honoraires facturés pour des activités antérieures à la conclusion du contrat n'étaient pas dus.
1. 1.1 Le jugement querellé est une décision finale de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC), rendue dans une affaire patrimoniale, dont la valeur litigieuse au dernier état des conclusions était supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC). La voie de l'appel est ainsi ouverte.
1.2 Interjeté dans le délai et les formes prescrits par la loi (art. 130, 131, 142 al. 1, 145 al. 1 let. a et 311 al. 1 CPC) auprès de l'autorité compétente (art. 120 al. 1 let. a LOJ), l'appel est dans cette mesure recevable.
Il en va de même de l'appel joint déposé avec la réponse sur appel principal (art. 313 al. 1 CPC).
Par commodité, A______ sera désignée comme l'appelante et C______ Sàrl comme l'intimée.
2. A titre préalable, il faut trancher l'applicabilité au litige du règlement SIA 102 (édition 2014), question discutée par les parties.
2.1
2.1.1 A teneur de l'art. 55 CPC, les parties allèguent les faits sur lesquels elles fondent leurs prétentions et produisent les preuves qui s'y rapportent (al. 1). Les dispositions prévoyant l'établissement des faits et l'administration des preuves d'office sont réservées (al. 2).
Les normes SIA sont des règles éditées par la société suisse des ingénieurs et des architectes. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, les règles émanant d'organismes privés ne se voient pas reconnaître la qualité de règle de droit, même si elles sont détaillées et exhaustives, comme peuvent l'être les normes SIA (ATF 132 III 285 consid. 1.3). Le Tribunal fédéral ne reconnaît pas non plus aux normes SIA la valeur d'usage : les parties doivent donc les avoir intégrées à leur contrat. Si une partie se prévaut d'une norme SIA, alors elle doit alléguer et prouver que cette norme fait partie du contrat (ATF 118 II 295 consid. 2a; arrêt du Tribunal fédéral 4A_455/2021 du 26 janvier 2022 consid. 5.2).
Les faits notoires ou notoirement connus du tribunal et les règles d'expérience généralement reconnues ne doivent pas être prouvés (art. 151 CPC).
La question de savoir si la norme SIA 118 était notoire n'a pas fait l'objet d'une jurisprudence constante (voir à ce titre les références citées dans l'arrêt du Tribunal fédéral 4A_455/2021 du 26 janvier 2022 consid. 5.2). Dans ce dernier arrêt, le Tribunal fédéral a néanmoins considéré qu'il était suffisant d'alléguer et de prouver que les parties avaient intégré cette norme dans leur contrat.
Il était par contre excessif d'exiger que les parties citent et prouvent les dispositions applicables de la norme, pour qu'elles soient considérées comme apportées au procès (arrêt du Tribunal fédéral 4A_582/2016 du 6 juillet 2017 consid. 4.1, 4.5 et 4.6; Hürlimann / Siegenthaler, CHK - Handkommentar zum Schweizer Privatrecht, 4ème éd. 2023, n. 6a ad art. 363 CO; Siegenthaler, Nochmals zur Notorietät der SIA-Norm 118, DC 2022 p. 318).
L'intégration des normes SIA peut résulter soit d'un accord exprès, soit d'un accord tacite. Elle découle souvent d'un simple renvoi aux dispositions de cette norme. Savoir si les parties ont intégré ou non une norme SIA à leur contrat dépend de l'interprétation de leurs volontés (art. 1 et 18 CO; arrêts du Tribunal fédéral 4A_667/2016 du 3 avril 2017 consid. 3.2; 4A_106/2015 du 27 juillet 2015 consid. 5.1 et 5.2).
2.1.2 En droit suisse des contrats, la question de savoir si les parties ont conclu un accord est soumise au principe de la priorité de la volonté subjective sur la volonté objective (ATF 144 III 93 consid. 5.2.1; 123 III 35 consid. 2b).
En procédure, le juge doit donc rechercher, dans un premier temps, la réelle et commune intention des parties (interprétation subjective), le cas échéant empiriquement, sur la base d'indices. Constituent des indices en ce sens non seulement la teneur des déclarations de volonté - écrites ou orales -, mais encore le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté réelle des parties, qu'il s'agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat ou de faits postérieurs à celle-ci, en particulier le comportement ultérieur des parties établissant quelles étaient à l'époque les conceptions des contractants eux-mêmes (ATF 144 III 93 consid. 5.2.2 et les arrêts cités; arrêt du Tribunal fédéral 4A_254/2021 du 21 décembre 2021 consid. 5.2.1).
Si le juge ne parvient pas à déterminer la volonté réelle et commune des parties - parce que les preuves font défaut ou ne sont pas concluantes - ou s'il constate qu'une partie n'a pas compris la volonté exprimée par l'autre à l'époque de la conclusion du contrat - ce qui ne ressort pas déjà du simple fait qu'elle l'affirme en procédure, mais doit résulter de l'administration des preuves -, il doit recourir à l'interprétation normative (ou objective), à savoir rechercher leur volonté objective, en déterminant le sens que, d'après les règles de la bonne foi, chacune d'elles pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l'autre. Il s'agit d'une interprétation selon le principe de la confiance (ATF
144 III 93 consid. 5.2.3 et les arrêts cités; arrêt du Tribunal fédéral 4A_254/2021 du 21 décembre 2021 consid. 5.2.2).
2.2. En l'espèce, il est incontesté que, dans leur contrat, les parties ont soumis leurs relations à la norme SIA 102. Il n'existe pas le moindre indice permettant de retenir que les parties ont voulu, en leur for intérieur et contrairement aux termes clairs de leur accord, ne pas soumettre leurs relations à cet ensemble de règles. L'appelante, même non spécialiste du domaine, ne peut simplement affirmer qu'elle n'entendait pas intégrer cette norme ou que les parties n'en ont jamais spécialement discuté l'application. Cela est insuffisant tant pour retenir une volonté subjective divergente de sa part au moment de la conclusion du contrat que pour admettre que ces normes ne lui seraient pas opposables.
En tout état, l'appelante a, dans ses écritures de première instance, expressément acquiescé à l'allégué de l'intimée sur l'intégration de la norme, de sorte qu'il est exclu qu'elle puisse s'opposer à son application à ce stade.
Certes, la jurisprudence du Tribunal fédéral susrésumée se rapporte essentiellement à la norme SIA 118, mais rien ne justifie de traiter différemment les autres normes SIA, en particulier la norme SIA 102 qui est couramment appliquée dans le cadre des relations entre l'architecte et son client. Il faut donc admettre que, même si la norme SIA 102 n'a pas été remise à l'appelante au moment du contrat, ni n'a été extensivement alléguée dans les écritures introductives d'instance de l'intimée, elle doit être prise en compte dans l'appréciation du présent litige.
Ainsi, il sera fait application des dispositions topiques de la norme SIA 102.
3. La question des honoraires dus à l'intimée est litigieuse.
3.1
3.1.1 Lorsque l'architecte s'oblige à établir des plans et d'autres documents concernant des travaux de construction ou de transformation d'un immeuble, ainsi qu'à diriger ces travaux, on est en présence d'un contrat d'architecte global. Selon la jurisprudence, il s'agit d'un contrat mixte, qui est soumis, selon les prestations à fournir par l'architecte, aux règles du mandat ou à celles du contrat d'entreprise (ATF 134 III 361 consid. 5.1 et 6.2.2; 127 III 543 consid. 2a; arrêt du Tribunal fédéral 4A_210/2015 du 2 octobre 2015 consid. 4). Cette qualification de contrat mixte soumet la prétention litigieuse aux règles permettant de trouver la solution la plus appropriée aux circonstances (arrêts du Tribunal fédéral 4A_89/2017 du 2 octobre 2017 consid. 4 et 4A_514/2016 du 6 avril 2017 consid. 3.1.1).
Ainsi, la responsabilité de l'architecte en tant que planificateur (études préalables, avant-projets, projets et préparation des plans et des documents de soumission) relève du contrat d'entreprise (art. 363 et suivants CO) puisqu'il lui est possible de garantir un résultat, mesurable et objectivement constatable (arrêts du Tribunal fédéral 4A_514/2016 du 6 avril 2017 consid. 3.1.2 et 4A_89/2017 du 2 octobre 2017 consid. 4).
Lorsque l'architecte est amené à fournir des conseils, les règles du mandat sont applicables (par exemple : la proposition d'assainir un bâtiment ; ATF 127 III 328 consid. 2c; Aebi-Mabillard, La rémunération de l'architecte, 2015, n. 366; Chaix, Commentaire Romand - CO I, 3ème éd. 2021, n. 27 ad art. 363 CO).
3.1.2 Lorsque le prix a été fixé à forfait, l'entrepreneur est tenu d'exécuter l'ouvrage pour la somme fixée, et il ne peut réclamer aucune augmentation, même si l'ouvrage a exigé plus de travail ou de dépenses que ce qui avait été prévu (art. 373 al. 1 CO).
Lorsque le prix de l'ouvrage n'a pas été fixé d'avance, ou s'il ne l'a été qu'approximativement, il doit être déterminé d'après la valeur du travail et les dépenses de l'entrepreneur (art. 374 CO).
L'art. 375 CO prévoit que lorsque le devis approximatif arrêté avec l'entrepreneur se trouve sans le fait du maître dépassé dans une mesure excessive, le maître a le droit, soit pendant, soit après l'exécution, de se départir du contrat (al. 1). Si la construction est élevée sur son fonds, il peut demander une réduction convenable du prix des travaux (al. 2).
Le devis approximatif revêt un caractère indicatif; il s'agit d'une estimation, par l'entrepreneur, du prix probable de sa prestation. Il tend à orienter le maître dans sa volonté de s'engager à certaines conditions, de sorte qu'il constitue un élément essentiel du contrat (arrêts du Tribunal fédéral 4A_302/2014 du 6 février 2015 consid. 3.1; 4A_577/2008 du 31 mars 2009 consid. 3.1 et les références citées).
Le devis est dépassé lorsque le prix final des prestations convenues est supérieur au montant estimé initialement par l'entrepreneur pour lesdites prestations. En principe, un dépassement de l'ordre de 10% n'est pas excessif, mais des circonstances particulières peuvent permettre de retenir un taux plus élevé (ATF 115 II 460).
Les travaux supplémentaires commandés ou acceptés par le maître ne sont pas pris en compte dans cette comparaison. En d'autres termes, les modifications de commandes sont considérées comme un fait du maître au sens de l'art. 375 CO (ATF 92 II 328 consid. 2a; arrêts du Tribunal fédéral 4A_302/2014 du 6 février 2015 consid. 3.1; 4D_63/2013 du 18 février 2014 consid. 2.2 et les nombreuses références doctrinales citées).
Par ailleurs, le maître ne peut pas se prévaloir d'un dépassement de devis excessif d'une manière contraire aux règles de la bonne foi. Ainsi, l'acceptation du dépassement de devis prive le maître des droits découlant de l'art. 375 CO (arrêt du Tribunal fédéral 4A_302/2014 du 6 février 2015 consid. 3.1).
3.1.3 Une rémunération est due au mandataire si la convention ou l'usage lui en assure une (art. 394 al. 3 CO). Lorsque les services sont fournis à titre professionnel, le mandat est onéreux en vertu de l'usage (ATF 139 III 259 consid. 2.1).
Les honoraires dus à un mandataire sont fixés en première ligne d'après la convention des parties (ATF 101 II 109 consid. 2). A défaut de convention des parties et de règle cantonale, le montant des honoraires doit être fixé selon l'usage (ATF 101 II 109 consid. 2; 135 III 259 consid. 2.2). En l'absence de convention ou d'usage en la matière, le juge fixe la rémunération du mandataire en tenant compte de toutes les circonstances pertinentes, de manière à ce qu'elle soit objectivement proportionnée aux services rendus (ATF 135 III 259 consid. 2.2). Il prendra en considération le genre et la durée du mandat, l'importance et la difficulté de l'affaire, les responsabilités en jeu, ainsi que la situation du mandataire, en particulier son genre d'activités (ATF 117 II 282 consid. 4c;
101 II 109 consid. 2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_353/2012 du 25 janvier 2013 consid. 4.2.2).
Le fardeau de la preuve d'une convention sur la rémunération, du mode de celle-ci et de l'adéquation entre les services rendus et la rémunération réclamée incombe au mandataire. Celui-ci doit donc alléguer et, en cas de contestation, prouver les circonstances de fait pertinentes à cet égard (art. 8 CC; arrêts du Tribunal fédéral 4A_267/2010 du 28 juillet 2010 consid. 3; 4A_100/2008 du 29 mai 2008 consid. 4.1; 4C_61/2001 du 14 juin 2001 consid. 3b, non publié in ATF
127 III 543). Lorsque les honoraires sont établis sur la base d'un tarif horaire, le mandataire supporte également le fardeau de la preuve - et, partant, celui de l'allégation - pour le temps consacré à l'exécution du mandat. En cas de contestation des heures facturées, c'est au mandataire qu'il appartient de démontrer leur réalité; le mandant n'a en principe rien à prouver. La preuve ne résulte pas déjà du fait que le mandataire a fait parvenir une note d'honoraires à son mandant ou que cette note n'a pas été contestée pendant un certain temps. En principe, un fait est tenu pour établi lorsque le juge a pu se convaincre de la vérité d'une allégation. La loi, la doctrine et la jurisprudence ont apporté des exceptions à cette règle d'appréciation des preuves. L'allégement de la preuve est alors justifié par un "état de nécessité en matière de preuve", qui se rencontre lorsque, par la nature même de l'affaire, une preuve stricte n'est pas possible ou ne peut être raisonnablement exigée, en particulier si les faits allégués par la partie qui supporte le fardeau de la preuve ne peuvent être établis qu'indirectement et par des indices. Tel peut être le cas de la survenance d'un sinistre en matière d'assurance-vol ou de l'existence d'un lien de causalité naturelle, respectivement hypothétique. Le degré de preuve requis se limite alors à la vraisemblance prépondérante qui est soumise à des exigences plus élevées que la simple vraisemblance. La vraisemblance prépondérante suppose que, d'un point de vue objectif, des motifs importants plaident pour l'exactitude d'une allégation, sans que d'autres possibilités ne revêtent une importance significative ou n'entrent raisonnablement en considération (ATF 133 III 81 consid. 4.2.2). Une telle difficulté de preuve n'existe pas pour le mandataire appelé à prouver les heures qu'il a passées pour exécuter un mandat. S'il a tenu un décompte détaillé de ses activités, il parviendra à prouver la réalité de la plupart des opérations facturées et à défaut de décompte, il ne peut que s'en prendre à lui-même. Le mandant, par contre, n'est guère en mesure de démontrer que des opérations facturées auxquelles il n'aurait pas participé n'ont en réalité pas eu lieu ou ont duré moins longtemps que ce qui est indiqué. Un allégement de la preuve en faveur du mandataire ne se justifie donc pas (arrêt du Tribunal fédéral 4A_212/2008 du 15 juillet 2008 consid. 3.1).
Il est loisible aux parties de fixer les honoraires selon un forfait convenu à l'avance (arrêt du Tribunal fédéral 4A_287/2015 du 22 juillet 2015 consid. 2).
A l'instar d'un entrepreneur assujetti à l'art. 373 al. 1 CO, le mandataire qui a stipulé une rémunération à forfait ne peut exiger aucune augmentation au motif que, le cas échéant, sa mission a exigé des efforts plus importants que ce qui était prévu (arrêt du Tribunal fédéral 4A_601/2012 du 14 octobre 2012 consid. 2).
3.1.4 Selon la jurisprudence, l'architecte doit spécifier au maître les coûts du projet envisagé, y compris ceux générés par ses propres honoraires. Ce devoir d'information est plus grand quand le maître n'est pas un professionnel de la construction (arrêt du Tribunal fédéral 4A_462/2008 du 22 décembre 2008 consid. 5.2). Cette obligation résulte de son devoir de fidélité (art. 321 al. 1 CO applicable par renvoi de l'art. 398 al. 1 CO). L'architecte supporte une responsabilité générale d'information et de conseil. Il doit ainsi singulièrement spécifier au maître les coûts du projet envisagé y compris ceux générés par ses propres honoraires (arrêt du Tribunal fédéral 4A_196/2017 du 1er septembre 2014 consid. 4.1). Cette obligation se heurte toutefois aux règles de la bonne foi : selon la jurisprudence, il y a violation de la bonne foi si le client ne s'est jamais plaint durant des années des notes d'honoraires et qu'il estime soudain que celles-ci sont insuffisamment détaillées (arrêt du Tribunal fédéral 4A_144/2012 du 11 septembre 2012 consid. 3.2.2; Aebi-Mabillard, op. cit., n. 454).
3.1.5 Lorsque la maxime des débats est applicable (art. 55 al. 1 CPC), il incombe aux parties, et non au juge, de rassembler les faits du procès. Les parties doivent alléguer les faits sur lesquels elles fondent leurs prétentions (fardeau de l'allégation subjectif), produire les moyens de preuve qui s'y rapportent (fardeau de l'administration des preuves) et contester les faits allégués par la partie adverse (fardeau de la contestation), le juge ne devant administrer les moyens de preuve que sur les faits pertinents et contestés (art. 150 al. 1 CPC) (ATF 149 III 105 consid. 5.1; 144 III 519 consid. 5.1). A cet égard, il importe peu que les faits aient été allégués par le demandeur ou par le défendeur puisqu'il suffit que les faits fassent partie du cadre du procès pour que le juge puisse en tenir compte (ATF 149 III 105 consid. 5.1; 143 III 1 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_164/2021 du 21 décembre 2021 consid. 3.1). Il n'en demeure pas moins que celui qui supporte le fardeau de la preuve (art. 8 CC) et donc, en principe, le fardeau de l'allégation objectif, a toujours intérêt à alléguer lui-même les faits pertinents, ainsi qu'à indiquer au juge ses moyens de preuve, pour qu'ils fassent ainsi partie du cadre du procès (ATF 149 III 105 consid. 5.1; 143 III 1 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_164/2021 précité consid. 3.1).
Conformément au but poursuivi par l'art. 221 al. 1 lit. d et e CPC, il faut en principe satisfaire aux fardeaux de l'allégation et de la motivation dans les mémoires. Un simple renvoi global aux pièces annexes ne suffit en général pas (arrêts du Tribunal fédéral 4A_264/2015 du 10 août 2015 consid. 4.2.2; 5A_61/2015 du 20 mai 2015 consid. 4.2.1.3; 4A_317/2014 du 17 octobre 2014 consid. 2.2 et 4A_195/2014 et 197/2014 du 27 novembre 2014 consid. 7.3). Il importe que le tribunal et la partie adverse n'aient pas besoin de rechercher la présentation des faits dans l'ensemble des annexes. Ce n'est pas à eux qu'il incombe de fouiller dans les pièces pour chercher si l'on peut y trouver des éléments en faveur de la partie qui supporte le fardeau de l'allégation (arrêts du Tribunal fédéral 4A_195 et 197/2014 précité consid. 7.3.3).
Si les faits sont allégués dans leurs contours essentiels dans un mémoire (ATF 136 III 322 consid. 3.4.2) et qu'il est renvoyé à une annexe pour les détails, il faut au contraire examiner si la partie adverse et le tribunal peuvent obtenir ainsi les informations nécessaires, de telle sorte qu'il semble inutilement formaliste de les reprendre dans le mémoire, ou si le renvoi est insuffisant parce que les informations nécessaires ne sont pas clairement et complètement contenues dans les annexes ou qu'il faudrait les y rechercher. Il ne suffit pas que les informations requises se trouvent sous une forme ou une autre dans les annexes. Il faut aussi qu'il soit assuré que l'on puisse y accéder sans problème et il ne doit pas y avoir de marge d'interprétation. Le renvoi, dans le mémoire, doit désigner spécifiquement une pièce déterminée du dossier et il doit clairement ressortir du renvoi lui-même quelle partie de la pièce doit valoir allégation de partie. Un accès sans problème est assuré lorsqu'une pièce est claire par elle-même et contient exactement les informations requises (respectivement les informations citées dans le mémoire). Si ces conditions ne sont pas réunies, un renvoi ne peut suffire que si les annexes sont concrétisées et expliquées dans le mémoire (arrêt du Tribunal fédéral 4A_264/2015 précité consid. 4.2.2), de telle sorte que les informations sont aisément accessibles et ne doivent pas être interprétées, ni reconstituées (arrêts du Tribunal fédéral 4A_284/2017 du 22 janvier 2018 consid. 4.2 et 4.3 et 4A_281/2017 du 22 janvier 2018 consid. 5, in CPC Online, Bastons Bulletti, newsletter du 21 mars 2018).
En ce qui concerne l'allégation d'une facture, d'un compte ou d'un dommage, les différents postes doivent être présentés dans la demande sous plusieurs numéros, car cela est nécessaire pour permettre au défendeur de se déterminer clairement (ATF 144 III 519 consid. 5.2.1.2; 144 III 54 consid. 4.1.3.5). Il a été admis qu'exceptionnellement, l'allégué de la demande n'indique que le montant total du dommage lorsque le demandeur peut se référer à une pièce qu'il produit et qui contient toutes les informations nécessaires de manière claire et complète, au point que l'exigence de la reprise du détail de la facture, du compte ou du dommage dans les allégués de la demande n'aurait pas de sens. Il ne suffit pas que la pièce produite contienne, sous une forme ou sous une autre, lesdites informations. Leur accès doit être aisé et aucune marge d'interprétation ne doit subsister (ATF 144 III 519 consid. 5.2.1.2; arrêts du Tribunal fédéral 4A_415/2021 du 18 mars 2022 consid. 5.4; 4A_164/2021 du 21 décembre 2021 consid. 3.2 et 4A_535/2018 du 3 juin 2019 consid. 4.2.1). Lorsque le demandeur allègue dans ses écritures un montant dû en produisant une facture ou un compte détaillés, qui contient les informations nécessaires de manière explicite, on peut exiger du défendeur qu'il indique précisément les positions de la facture ou les articles du compte qu'il conteste, à défaut de quoi la facture ou le compte est censé admis et n'aura donc pas à être prouvé (ATF 144 III 519 consid. 5.2.2.3).
3.1.6 L'art. 4.32 de la norme SIA 102 (édition 2014) prévoit une marge de tolérance de 10% lors de l'établissement d'un devis des coûts de construction par l'architecte.
A teneur de l'art 6.1.2 SIA 102, la base pour le calcul des honoraires d'après le temps effectif est constituée par le temps employé par tous les collaborateurs travaillant directement au mandat et par les taux horaires offerts correspondants.
L'art. 6.1.3 SIA 102 prévoit que les prestations rémunérées d'après le temps employé effectif doivent être consignées dans des rapports de travail pouvant être consultés par le mandant. Elles doivent faire l'objet de décompte périodique.
Selon l'art. 6.5 SIA 102, dans les cas de mandats dont les honoraires sont calculés d'après le temps employé effectif, il est recommandé de convenir, avant le début des travaux, d'un montant indicatif et de la marche à suivre en cas de modification de ce montant en cours de mandat (art. 6.5.1). L'architecte est tenu d'informer dès que possible le mandat si, par suite d'extension du mandat ou de modification des conditions-cadres, il est prévisible que le montant indicatif sera dépassé (art. 6.5.4).
L'art. 7 SIA 102 se réfère à un mode de rémunération différent, soit le calcul des honoraires d'après le coût d'ouvrage déterminant le temps nécessaire : les prestations d'architecte sont alors proportionnées au coût de l'ouvrage (art. 7.1.1). Dans ce cadre, la réalisation de variantes du projet initial est prévue (art. 7.11.3). Selon cette dernière disposition, si, à la demande du mandant ou avec son accord, l'architecte fournit en complément du projet initial, sur la base d'exigences nouvelles, un ou plusieurs avant-projets ou projets notablement différents, il a droit à des honoraires supplémentaires pour chacune des prestations supplémentaires. Les honoraires pour les variantes sont calculés d'après l'estimation de leur propre coût d'ouvrage déterminant le temps nécessaire, moyennant une réduction de 50%.
3.2 Dans son appel, l'appelante fait grief au Tribunal d'avoir admis 1'870 heures facturées pour le projet comprenant sept résidences, soit un montant de 261'800 fr. au taux horaire de 140 fr. Ce montant, conformément au devis de l'intimée, n'aurait dû être facturé qu'en cas de réalisation de toutes les prestations de l'intimée pour le projet à sept résidences, soit l'obtention de droits à bâtir et le dépôt d'une demande d'autorisation de construire définitive. De surcroît, aucun décompte d'heures n'avait été établi. L'appréciation globale de toutes les heures facturées pour l'ensemble des projets démontrait une tendance à l'exagération du travail réellement effectué. Les seules prestations méritant une rémunération étaient : "avance de frais" (21'600 fr.), "choix de la procédure au DALE : zone primaire ou PLQ" (18'900 fr.) et "dépôt d'une DP ou d'une DR" (30'240 fr.), soit un total de 70'740 fr. TTC.
Dans son appel joint, l'intimée fait grief au Tribunal d'avoir retenu que le contrat écrit manquait de clarté et que l'appelante ne possédait pas de connaissances et d'expérience en matière d'architecture, respectivement n'était pas suffisamment informée. En outre, il aurait fallu prendre en compte l'utilité du travail qu'elle avait fourni, y compris après la fin de son mandat et en vue de la vente de la parcelle. Il était faux de soutenir que le projet à quatre résidences était d'emblée voué à l'échec.
Les griefs des parties seront ainsi examinés ensemble en fonction des thèmes qu'ils visent.
3.3 En l'espèce, le refus du Tribunal d'allouer des honoraires à l'intimée en vertu du contrat de courtage conclu par les parties n'est plus litigieux.
3.4 S'agissant ensuite de l'activité d'architecte proprement dite, la qualification du contrat opérée par le Tribunal, à savoir que la convention des parties mêlait des éléments de contrat d'entreprise (élaboration de plans essentiellement) et de mandat (conseils et représentation devant les autorités) n'est plus remise en cause en appel, à juste titre. Il en va de même de la décision du Tribunal d'appliquer les principes applicables au contrat de mandat pour calculer la rémunération due.
3.5 Il convient à titre préalable d'examiner le mode de calcul de la rémunération de l'intimée.
Sur ce point, le Tribunal a retenu que le montant de 281'340 fr. d'honoraires avait été "approximativement devisé" par l'intimée. Par ailleurs, le contrat prévoit expressément un taux horaire pour les prestations de l'intimée et use du terme "estimation" pour le calcul des honoraires devisés. Ces éléments confirment la volonté des parties de donner à ce montant une valeur indicative et non pas contraignante. Aucun élément concret ne permet donc de retenir que les parties seraient convenues d'un forfait.
Cette appréciation n'est pas contestée par les parties. L'appelante se limite à affirmer péremptoirement qu'il était exclu de dépasser le montant estimé, donc à en faire matériellement un forfait. Il sera donc retenu que les parties étaient convenues d'une facturation au temps passé et d'un montant devisé estimatif, mais non d'un forfait.
3.6 Dans un deuxième temps, il faut déterminer si les honoraires facturés correspondent à des prestations effectivement réalisées par l'intimée, ce que conteste l'appelante.
L'intimée, mandataire, a remis une facture détaillée à l'appelante le 27 septembre 2017, laquelle comprend un descriptif des activités effectuées et du temps correspondant. L'appelante a contesté le montant total réclamé et, se référant au devis initial, considéré que seul le montant y figurant et concernant les trois premières étapes du projet méritait rémunération.
En procédure, l'intimée a respecté son obligation d'alléguer en fournissant une facture détaillée à laquelle elle a renvoyé et dont il n'était pas nécessaire qu'elle reprenne l'intégralité des postes dans ses écritures, sauf à alourdir inutilement ces dernières. Par contre, l'appelante, en se limitant à contester globalement l'activité fournie et en renvoyant au devis initial, n'a pas remis en cause ce décompte horaire avec suffisamment de précision : il lui incombait en effet d'indiquer précisément quelles prestations étaient injustifiées, voire inutiles, ce qu'elle n'a pas fait. Il n'appartient pas à l'autorité judiciaire d'y procéder à sa place. En conséquence, en l'absence de contestation suffisante, il y a lieu de retenir que l'intimée a effectué les heures qu'elle a alléguées, à l'instar de ce qu'a retenu implicitement le Tribunal.
3.7 Dans un troisième temps, il faut examiner si l'appelante a suffisamment été informée de l'évolution des honoraires de l'intimée, soit une augmentation massive du montant initialement devisé.
Le contrat prévoyait que les honoraires devisés s'élevaient à un total de 70'740 fr. TTC (21'600 fr. + 18'900 fr. + 30'240 fr.) jusqu'au dépôt d'une demande provisoire d'autorisation de construire et avant l'obtention des droits à bâtir. Puis, le 7 mai 2015, soit environ trois mois après la conclusion du contrat précité, l'intimée a établi une facture intermédiaire qui reprenait les montants de 21'600 fr. et 18'900 fr., ainsi que 49'140 fr. (pour les 70% de la "procédure d'obtention des droits" correspondant au total de 70'200 fr. pour ce poste dans le contrat) et des honoraires de courtage. Dans la foulée et au vu de cette facture, l'appelante a commencé à payer des acomptes. Il faut admettre qu'à ce stade les obligations et les frais prévisibles étaient clairement compréhensibles pour l'appelante, qu'elle soit ou non assistée d'une personne qualifiée. Rien ne permet de retenir qu'elle n'aurait pas compris les frais auxquelles elle s'exposait, ce d'autant moins qu'elle a commencé à verser des montants à l'intimée sans poser davantage de questions.
Il est à relever que la description du poste relatif à des honoraires en 70'200 fr. dans le contrat s'agissant de l'obtention des droits à bâtir est peu claire : la formulation de la clause contractuelle laisse entendre que la rémunération de l'architecte serait due dès l'obtention de ces droits à bâtir, même si une requête d'autorisation définitive n'était pas encore déposée. L'intimée a réclamé paiement de ce montant, alors que les droits en question n'avaient pas été obtenus. Comme l'appelante ne s'y est pas opposée, cela démontre que, dans selon l'accord subjectif des parties, ce montant était dû même si les droits en question n'étaient pas encore obtenus.
S'agissant des informations données et reçues postérieurement, l'intimée ne soutient pas avoir renseigné l'appelante sur l'évolution de sa note d'honoraires avant l'envoi de sa facture à la fin du mandat. Certes, elle l'a régulièrement informée de l'évolution du projet et de la réalisation de variantes à ses plans initiaux et prévus dans le contrat, de sorte que l'appelante ne peut pas prétendre ne pas avoir su que des variantes successives étaient conçues, puis soumises aux autorités. Reste à savoir si l'appelante pouvait inférer de bonne foi et apprécier, de par la connaissance du travail relatif à ces variantes, l'évolution des honoraires de l'intimée.
Au vu de l'avancement de son projet, l'appelante pouvait s'attendre, notamment, après la réception de la facture du 7 mai 2015 à ce que les honoraires des trois premières étapes soient dus, soit 70'740 fr., ce qu'elle ne conteste d'ailleurs plus aujourd'hui. Il en va de même de la quatrième étape relative aux droits à bâtir (70'200 fr.), conformément à ce qui résulte des considérants ci-dessus. Elle ne peut pas être suivie lorsqu'elle soutient avoir cru que l'établissement de variantes successives, non anticipées dans le contrat et au vu de la facturation au temps passé prévue par celui-ci, ne coûterait pas davantage. Elle a ainsi, eu égard aux témoignages concordants recueillis par le Tribunal et à ses propres déclarations, participé régulièrement aux réunions concernant le projet et été informées des travaux effectués par l'intimée. Elle a en outre validé la décision de continuer à essayer d'obtenir des droits à bâtir. Elle était ainsi consciente que l'intimée continuait à travailler sur le projet en excédant ce qui était initialement convenu, soit la préparation d'un seul projet à sept résidences. Son niveau de connaissance en matière de constructions ne change rien à cela.
De plus, au moins pendant une partie de l'exécution des prestations litigieuses, elle était conseillée par un avocat. L'appelante le conteste, mais elle n'explique d'aucune manière pourquoi, s'il ne l'avait pas assistée, l'homme de loi aurait reçu en copie les courriels de l'intimée. Qu'il ait été ou non spécialiste en matière de droit des constructions est sans importance : ses qualités professionnelles de juriste lui permettaient de conseiller utilement sa cliente.
En fonction des informations alors reçues, l'appelante pouvait s'attendre, pour chacun des projets, à une facturation des trois premières étapes, allant jusqu'au dépôt d'une demande provisoire d'autorisation de construire, ainsi que de la quatrième étape liée à l'obtention des droits à bâtir.
Par contre, le montant devisé pour le dépôt de d'une demande définitive d'autorisation de construire, soit 140'400 fr. selon le contrat, n'a jamais été évoqué et ne pouvait d'ailleurs pas être anticipé par l'appelante, puisqu'aucun des projets n'a jamais atteint ce stade.
De plus, comme l'invoque l'intimée, la réalisation de variantes sous l'égide de la norme SIA 102 implique une réduction de 50% des honoraires du projet principal. Or, les deuxième et troisième projets réalisés étaient des variantes, ce qui est admis par l'intimée elle-même.
Ainsi, l'appelante pouvait et devait s'attendre, avant la réception de la facture finale et au vu des informations en sa possession, à devoir payer le montant devisé de 140'940 fr. (21'600 fr. + 18'900 fr. + 30'240 fr. + 70'200 fr.) pour le premier projet, puis la moitié de ce montant pour les deux variantes, soit un total de 281'880 fr. TTC. (140'940 fr. + 2 x 70'470 fr.).
En facturant soudainement 636'681 fr. TTC, soit un montant plus de deux fois supérieur au devis estimatif, sans renseigner l'appelante, ni attirer son attention sur le dépassement de ce devis, l'intimée a violé ses obligations d'information qui résultent tant du contrat de mandat la liant à l'appelante que des règles SIA dont elle se réclame. L'intimée admet elle-même n'avoir jamais communiqué à ce sujet avec l'appelante. L'absence de décompte périodique et de toute information sur le dépassement du montant devisé constitue une violation fautive du contrat imputable à l'intimée dont elle doit assumer les conséquences.
Par conséquent, la créance en honoraires de l'intimée s'élève au montant de 281'880 fr.
3.8 Enfin, il faut examiner si les prestations de l'intimée se sont avérées inutiles comme le prétend l'appelante et qu'aucune rémunération n'est due.
Le Tribunal a, dans ce cadre, considéré que les prestations de l'intimée relatives aux deuxième et troisième projet étaient inutiles, mais que le refus de l'autorité opposé au premier projet ne lui était pas imputable et qu'elle devait donc être rémunérée pour cette activité.
L'interprétation du Tribunal est trop sévère pour l'intimée. En effet, comme l'avait soulevé l'autorité administrative lors de la réunion du 13 septembre 2016, l'appelante devait être consciente, au moment de l'achat, que sa parcelle n'était pas destinée à être densifiée, mais cela n'excluait pas pour autant une extension des droits à bâtir. Cela démontre qu'une marge d'appréciation importante existait dès avant l'intervention de l'intimée. Le fait de proposer un premier projet à sept résidences ne fait ainsi pas l'objet de critique de l'appelante. Ensuite, contrairement à ce qui semble ressortir du jugement entrepris, il ne peut être reproché à l'intimée d'avoir soumis un projet à cinq résidences, compte tenu du motif de refus du projet à sept résidences, dès lors que ce projet a été soumis, par anticipation, avant le rejet de la première demande, ce procédé n'étant pas critiqué par l'appelante. Enfin, la réunion du 13 septembre 2016 a laissé ouverte la possibilité d'un projet à "deux unités maximum", ce qui correspond au dernier projet de deux fois deux villas contiguës proposé par l'intimée. Par ailleurs, l'acquéreur subséquent de la parcelle, qui avait connaissance des travaux de l'intimée et a mandaté un nouvel architecte, a lui aussi tenté, sans y parvenir, d'obtenir une extension des droits à bâtir, ce qui constitue un indice que toute possibilité de succès n'était pas exclue, même après l'intervention de l'intimée. En tout état, cette chronologie révèle que les attentes des autorités n'étaient pas limpides, même pour un spécialiste qu'il s'agisse de l'intimée ou de tout autre architecte.
Quoi qu'il en soit, aucun autre élément de preuve au dossier ne permet de conclure que les démarches de l'intimée étaient vouées à l'échec, respectivement que son travail était inutile.
D'ailleurs, le jugement entrepris ne tient pas suffisamment compte des enjeux financiers importants qui pouvaient être liés à l'obtention de droits à bâtir supplémentaires. En effet, au vu de la localisation de cette parcelle et de sa faible densité, une extension des droits à bâtir était susceptible de la valoriser grandement, ce qui justifiait de tenter de soumettre plusieurs variantes à l'autorité, avec le risque que comportait un éventuel refus. L'appelante était tenue au courant de l'évolution des projets et des refus et n'a jamais demandé à l'intimée de cesser son activité. De plus, elle savait, comme le souligne à plusieurs reprises le Tribunal, que sa parcelle était l'objet depuis plus de cinquante ans de tentatives de densification et que la tâche s'avérerait ardue. L'appelante était ainsi consciente du caractère aléatoire des démarches qui pourraient se justifier au regard des bénéfices envisagés.
La thèse soutenue par l'intéressée en procédure est d'ailleurs peu compréhensible et paraît contradictoire : ayant commencé à payer des acomptes sur le travail de l'intimée, elle soutient désormais que celui-ci était totalement inutile. Il en est de même de ses conclusions qui tendent à accepter le principe d'une rémunération réduite, donc à admettre l'utilité, au moins partielle, de l'activité de l'intimée.
Il est ainsi incontestable que l'intimée a fourni une activité en établissant des plans, en conseillant l'appelante et en prenant contact avec les autorités. Cette activité professionnelle correspond à ce qui était convenu dans le contrat et mérite rémunération. En tant que mandataire, l'intimée ne supporte pas d'obligation de résultat : comme l'a souligné à juste titre le Tribunal, l'obtention d'une autorisation de construire était soumis à l'appréciation de l'autorité et était donc, pour une part, aléatoire.
Pour le surplus, l'appelante ne formule pas de grief quant à la bonne facture des prestations réalisées par l'intimée, se limitant à des affirmations sans renvoi à des éléments factuels concrets. Enfin, le fait que les prestations de l'intimée n'aient pas été utiles à l'acquéreur de la parcelle est sans pertinence, puisque celui-ci n'était pas partie au contrat d'architecte.
Ainsi, les prestations de l'intimée n'étaient pas inutiles et méritent rémunération dans la mesure décrite ci-dessus.
4. Le jugement entrepris sera donc annulé et réformé en ce que l'appelante sera condamnée à verser 196'880 fr. (281'880 fr. - 85'000 fr. d'acomptes) à l'intimée, avec intérêts.
5. 5.1 Si l'instance d'appel statue à nouveau, elle se prononce sur les frais de la première instance (art. 318 al. 3 CPC).
En l'espèce, le présent arrêt ne modifie, dans son résultat, que de manière minime la solution retenue par le premier juge. De plus, les frais judiciaires et les dépens fixés par celui-ci sont conformes au tarif applicable (art. 17, 73 et 74 RTFMC pour les frais judiciaires et 84 et suivants RTFMC pour les dépens) et ne font pas l'objet de critiques des parties en appel.
Ainsi, les frais judiciaires et dépens de première instance seront confirmés.
5.2
5.2.1 L'art. 106 al. 2 CPC prescrit de répartir les frais lato sensu – i.e les frais judiciaires et les dépens (art. 95 al. 1 CPC) – selon le sort de la cause lorsqu'aucune des parties n'obtient entièrement gain de cause.
La répartition doit être proportionnelle à la mesure dans laquelle chaque partie a succombé. Pour déterminer cette proportion, il faut généralement comparer ce que chaque partie a obtenu par rapport aux conclusions litigieuses. Lorsque celles-ci émanent d'une demande principale et d'une demande reconventionnelle qui ne s'excluent pas mutuellement, le juge doit en principe additionner les valeurs litigieuses respectives et examiner ce qu'obtient finalement chaque partie à l'aune de cette somme globale (cf. art. 94 al. 2 CPC; arrêt du Tribunal fédéral 4D_11/2021 du 1er juin 2021 consid. 2.2).
Concernant plus particulièrement les dépens, lorsque chacune d'elles a encouru des frais d'avocat, elle dispose en principe contre l'autre d'une créance en paiement de dépens réduits, proportionnelle à son gain partiel dans le procès. Logiquement, il est procédé à une compensation entre ces créances respectives (arrêt du Tribunal fédéral 4D_11/2021 précité consid. 2.4).
5.2.2 S'agissant de l'appel principal, l'appelante succombe intégralement et supportera les frais judiciaires arrêtés à 9'000 fr. (art. 17 et 35 RTFMC).
Les frais judiciaires d'appel joint, fixés eux aussi à 9'000 fr. (art. 17 et 35 RTFMC), seront intégralement supportés par l'intimée qui n'obtient gain de cause que sur un faible montant.
Les montants dus au titre des frais judiciaires d'appel seront compensés avec les avances fournies par les parties, qui seront acquises à l'Etat de Genève (art. 311 al. 1 CPC).
Quant aux dépens, étant donnés que les deux parties succombent dans leur appel principal, respectivement leur appel joint, et que les valeurs litigieuses des deux appels étaient similaires, ils seront compensés. Aucun montant ne sera donc alloué.
* * * * *
La Chambre civile :
A la forme :
Déclare recevables l'appel interjeté le 22 août 2023 par A______, ainsi que l'appel joint interjeté par C______ Sàrl le 30 octobre 2023, contre le jugement JTPI/7314/2023 rendu le 21 juin 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/23710/2018.
Au fond :
Annule le chiffre 1 du dispositif du jugement entrepris, cela fait statuant à nouveau :
Condamne A______ à verser à C______ Sàrl 196'880 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 20 novembre 2017.
Confirme pour le surplus le jugement entrepris.
Déboute les parties de toutes autres conclusions.
Sur les frais :
Arrête les frais judiciaires d'appel principal à 9'000 fr., les met à la charge de A______ et les compense avec les avances versées qui sont acquises à l'Etat de Genève.
Arrête les frais judiciaires d'appel joint à 9'000 fr., les met à la charge de C______ Sàrl et les compense avec les avances versées qui sont acquises à l'Etat de Genève.
Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.
Siégeant :
Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, juges; Madame Jessica ATHMOUNI, greffière.
Indication des voies de recours :
Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.
Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.