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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2616/2016

ATA/1334/2017 du 26.09.2017 sur JTAPI/936/2016 ( ICCIFD ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2616/2016-ICCIFD ATA/1334/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 26 septembre 2017

4ème section

 

dans la cause

 

Madame et Monsieur A______

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

et

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 20 septembre 2016 (JTAPI/936/2016)


EN FAIT

1. Par décision du 7 juillet 2016, l'administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) a rejeté la réclamation formée le 8 juin 2016 par Madame et Monsieur A______ (ci-après : les époux A______) contre leur taxation d'office concernant l'exercice fiscal 2014.

La réclamation déposée ne répondait pas aux exigences de moyens de preuve concernant la contestation des taxations d'office, malgré la demande de l'AFC-GE envoyée par pli recommandé.

2. Le 4 août 2016, les époux A______ ont interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre la décision sur réclamation précitée, sans prendre de conclusions formelles.

Ils avaient reçu en juin 2016 avec surprise un avis de taxation concernant l'année 2014, alors qu'il pensait que leur déclaration avait déjà été remise. Actuellement, leur déclaration était prête mais l'AFC-GE ne voulait pas accepter leur dossier au vu de la décision attaquée.

3. Par pli recommandé séparé du 9 août 2016, le TAPI a demandé aux époux A______ de verser un montant de CHF 700.- à titre d'avance de frais au plus tard le 9 septembre 2016, sous peine d'irrecevabilité de leur recours.

4. Ledit pli recommandé a été retourné au TAPI avec la mention « non réclamé ». Le destinataire avait été avisé dans sa case postale le 10 août 2016 que le délai de garde courait jusqu'au 17 août 2016.

5. Par jugement du 20 septembre 2016, le TAPI a déclaré le recours irrecevable faute de paiement de l'avance de frais.

Celle-ci n'avait pas été effectuée dans le délai imparti, et rien ne permettait de retenir que les époux A______ avaient été victimes d'un empêchement non fautif de s'en acquitter en temps utile.

6. Par acte déposé le 14 octobre 2016, les époux A______ ont interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité, concluant à une nouvelle analyse de tous les éléments de leur dossier afin de pouvoir se mettre en ordre avec l'AFC-GE.

Ils n'avaient jamais reçu le recommandé du 9 août 2016 cité dans le jugement du TAPI, ni même aucun récépissé de la part de la Poste, ni non plus aucun retour d'envoi sous courrier simple.

7. Le 20 octobre 2016, le TAPI a communiqué son dossier sans formuler d'observations.

8. Le 17 novembre 2016, l'AFC-GE s'en est rapporté à justice quant à l'issue du recours.

9. Le 1er décembre 2016, le juge délégué a fixé aux époux A______ un délai au 16 décembre 2016 pour indiquer par quel moyen et à quel date le paiement de l'avance de frais au TAPI – qui avait été reçue le 14 novembre 2016, soit après l'expiration du délai – avait été effectué, et si des circonstances particulières était à l'origine du non-respect du délai.

10. Par courrier non daté mais reçu le 5 décembre 2016, M. A______ a simplement fait parvenir à la chambre administrative le récépissé postal de son paiement du 10 novembre 2016.

11. Le 5 décembre 2016, le juge délégué a fixé aux parties un délai au 13 janvier 2017 pour formuler toutes requêtes ou observations complémentaires, après quoi la cause serait gardée à juger.

12. Le 6 janvier 2017, les époux A______ ont persisté dans leur recours, sans ajout d'élément concernant le motif d'irrecevabilité retenu par le TAPI.

13. Le 12 janvier 2017, l'AFC-GE a indiqué n'avoir pas de requête ni d'observations complémentaires à faire valoir.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Les recourants n'ont pas pris de conclusions formelles mais demandent que la chambre administrative reprenne les éléments de leur dossier fiscal de fond concernant l'année 2014. Même formulée valablement, une telle conclusion serait irrecevable.

En effet, lorsqu'une juridiction déclare un recours irrecevable, le recourant ne peut conclure qu'à l'annulation du jugement et au renvoi à l'autorité inférieure pour nouvelle décision (arrêt du Tribunal fédéral 2C_176/2012 du 18 octobre 2012 consid. 1.3 non publié aux ATF 138 II 536).

3. a. L'exigence de l'avance de frais et les conséquences juridiques en cas de non-paiement de celle-ci relèvent du droit de procédure cantonal. Par conséquent, les cantons sont libres, dans le respect des garanties constitutionnelles, d'organiser cette matière à leur guise (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1022/2012 du 25 mars 2013 consid. 5.1 ; ATA/1077/2015 du 6 octobre 2015 consid. 2 ; ATA/916/2015 du 8 septembre 2015 consid. 2a et la jurisprudence citée).

b. Selon l’art. 86 LPA, la juridiction saisie invite le recourant à payer une avance de frais destinée à couvrir les frais et émoluments de procédure présumables. À cette fin, elle lui fixe un délai suffisant (al. 1). Si l’avance de frais n’est pas faite dans le délai imparti, la juridiction déclare le recours irrecevable (al. 2).

Les juridictions administratives disposent d'une grande liberté d’organiser la mise en pratique de cette disposition et peuvent donc opter pour une communication des délais de paiement par pli recommandé (ATA/194/2016 du 1er mars 2016 consid. 2b ; ATA/916/2015 précité consid. 2b et la jurisprudence citée).

c. À rigueur de texte, l'art. 86 LPA ne laisse aucune place à des circonstances extraordinaires qui justifieraient que l’avance de frais n’intervienne pas dans le délai imparti. La référence au « délai suffisant » de l’al. 1 de cette disposition laisse une certaine marge d’appréciation à l’autorité judiciaire saisie (ATA/916/2015 précité consid 2c ; ATA/881/2010 du 14 décembre 2010 consid. 4a). En outre, selon la jurisprudence, il convient d’appliquer par analogie la notion de cas de force majeure de l’art. 16 al. 1 LPA afin d’examiner si l’intéressé a été empêché sans sa faute de verser l’avance de frais dans le délai fixé (ATA/916/2015 précité consid. 2c et la jurisprudence citée). Tombent sous cette notion les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d’activité de l’intéressé et qui s’imposent à lui de façon irrésistible (ATA/916/2015 précité consid 2c ; ATA/378/2014 du 20 mai 2014 consid. 3d ; ATA/515/2009 du 13 octobre 2009 consid. 4b ; ATA/40/1998 du 27 janvier 1998 consid. 3a).

A été considéré comme un cas de force majeure donnant lieu à restitution de délai le fait qu’un détenu, qui disposait d’un délai de recours de trois jours, n’ait pu expédier son recours dans ce délai, du fait qu’il ne pouvait le poster lui-même et qu’en outre ce pli avait été soumis à la censure de l’autorité (ATA/515/2009 précité consid. 6). Il en allait de même du recourant qui se voyait impartir, par pli recommandé, un délai de quinze jours pour s’acquitter d’une avance de frais alors que le délai de garde pour retirer le pli en question était de sept jours, de sorte qu’il ne restait qu’une semaine au justiciable pour s’exécuter (ATA/477/2009 du 20 septembre 2009 consid. 5).

En revanche, n’ont pas été considérés comme des cas de force majeure une panne du système informatique du mandataire du recourant l’ayant empêché de déposer un acte de recours dans le délai légal (ATA/222/2007 du 8 mai 2007 consid. 3b), le fait qu'un avocat ait transmis à son client la demande d'avance de frais par pli simple en prenant le risque que celui-ci ne reçoive pas ce courrier (ATA/596/2009 du 17 novembre 2009 consid. 6), pas plus que la maladie, celle-ci n'étant admise comme motif d’excuse que si elle empêche le recourant d’agir par lui-même ou de donner à un tiers les instructions nécessaires pour agir à sa place (ATA/50/2009 du 27 janvier 2009 consid. 3c).

4. Le délai de paiement au 9 septembre 2016, qui constitue un délai raisonnable au sens de l’art. 86 al. 1 LPA, a été imparti aux recourants par pli recommandé.

La notification d’un acte soumis à réception, comme une décision ou une communication de procédure, est réputée faite au moment où l’envoi entre dans la sphère de pouvoir de son destinataire (Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. II, 3ème éd., 2011, n. 2.2.8.3 p. 302 s). Il suffit que celui-ci puisse en prendre connaissance (ATF 137 III 308 consid. 3.1.2 ; 118 II 42 consid. 3b ; 115 Ia 12 consid. 3b ; arrêts du Tribunal fédéral 2P.259/2006 du 18 avril 2007 consid. 3.1 ; 2A.54/2000 du 23 juin 2000 consid. 2a et les références citées). Celui qui, pendant une procédure, omet de prendre les dispositions nécessaires pour que les envois postaux lui soient transmis ne peut se prévaloir de son absence lors de la tentative de notification d’une communication officielle à son adresse habituelle s’il devait s’attendre, avec une certaine vraisemblance, à recevoir une telle communication (ATF 130 III 396 consid. 1.2.3 p. 399 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_549/2009 du 1er mars 2010 consid. 3.2.1 et les références citées). Un envoi est réputé notifié à la date à laquelle son destinataire le reçoit effectivement (ATA/378/2014 précité consid. 3b).

5. La preuve de la notification d’un acte et de la date de celle-ci incombe en principe à l’autorité qui entend en tirer une conséquence juridique. L’autorité qui veut contrer le risque d’un échec de la preuve de la notification peut communiquer ses décisions par pli recommandé. En tel cas, lorsque le destinataire de l’envoi n’est pas atteint et qu’un avis de retrait est déposé dans sa boîte aux lettres ou dans sa case postale, l’envoi est considéré comme notifié au moment où il est retiré. Si le retrait n’a pas eu lieu dans le délai de garde, il est réputé notifié le dernier jour de celui-ci (ATF 134 V 49 consid 4 ; 130 III 396 consid. 1.2.3).

C’est seulement en présence d’un empêchement non fautif du destinataire de la décision que la notification de celle-ci ne déploie pas ses effets ou que ceux-ci sont reportés.

6. a. Le formalisme excessif, prohibé par l’art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), est réalisé lorsque la stricte application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi, complique de manière insoutenable la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l'accès aux tribunaux (ATF 135 I 6 consid. 2.1 p. 9 ; 134 II 244 consid. 2.4.2 ; ATA/1077/2015 précité consid. 6a ; ATA/836/2014 du 28 octobre 2014 consid. 7a).

b. Il n'y a pas de rigueur excessive à ne pas entrer en matière sur un recours lorsque, conformément au droit de procédure applicable, la recevabilité de celui-ci est subordonnée au versement d'une avance de frais dans un délai déterminé. Il faut cependant que son auteur ait été averti de façon appropriée du montant à verser, du délai imparti pour le paiement et des conséquences de l'inobservation de ce délai (ATF 104 Ia 105 consid. 5 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_734/2012 précité consid. 3.1 ; 2C_645/2008 du 24 juin 2009 consid. 2.2). La gravité des conséquences d'un retard dans le paiement de l'avance sur la situation du recourant n'est pas pertinente (arrêts du Tribunal fédéral 2C_703/2009 du 21 septembre 2010 consid. 4.4.2 ; 2C_645/2008 précité consid. 2.2 ; 2C_450/2008 du 1er juillet 2008 consid. 2.3.4).

7. En l’espèce, les recourants n’ont pas versé l’avance de frais au TAPI dans le délai imparti par cette juridiction, mais plus de deux mois plus tard.

En outre, le pli recommandé n’ayant pu être délivré immédiatement le 10 août 2016, un avis de retrait a été déposé dans la boîte aux lettres des recourants, selon le suivi en ligne des envois recommandés par la poste (www.poste.ch). Le retrait n’ayant pas eu lieu dans le délai de garde échéant le 17 août 2016, l’envoi est réputé leur être parvenu à cette dernière date, conformément à la jurisprudence, si bien que le délai de paiement a commencé valablement à courir et est donc échu le 9 septembre 2016 à teneur des principes jurisprudentiels précités.

Par ailleurs, les recourants ne font état d’aucune autre circonstance propre à envisager un empêchement non fautif, qui ne leur aurait pas permis de s'acquitter de l'avance de frais dans le délai. Ils se contentent de prétendre n'avoir pas reçu l'avis postal, sans donner le moindre élément permettant de rendre vraisemblable une telle affirmation.

De plus, selon la jurisprudence (ATA/194/2016 précité consid. 7 ; ATA/1077/2015 du 6 octobre 2015 consid. 7), les recourants ne pouvaient pas partir du principe qu'ils recevraient également la demande d'avance de frais par pli simple, une telle démarche ne constituant pas une obligation légale en cas de non-délivrance d’un pli recommandé envoyé par un tribunal.

8. Dans ces circonstances, le TAPI était en droit de déclarer le recours irrecevable, vu l’absence de paiement dans le délai imparti.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

9. Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge conjointe et solidaire des recourants (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 14 octobre 2016 par Madame et Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 20 septembre 2016 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Madame et de Monsieur A______, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 400.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt aux recourants, à l'administration fiscale cantonale, à l’administration fédérale des contributions ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : M. Verniory, président, Mmes Payot Zen-Ruffinen et Krauskopf, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :