Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/755/2017

ATA/1307/2018 du 05.12.2018 ( AIDSO ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/755/2017-AIDSO ATA/1307/2018

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 5 décembre 2018

1ère section

 

dans la cause

 

Mme A______

M. A______, agissant par le service de protection de l’adulte, soit pour lui Madame Ana ZUMBINO, cheffe de service, et Monsieur Antoine CORNUT, intervenant

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES



EN FAIT

1. M. A______, né en 1940, a épousé à Genève, en août 2004, Mme A______, née B______ en 1973.

Mme A______ était alors mère de cinq enfants issus de relations précédentes, nés en 1987, 1989, 1991, 1994, respectivement 2001.

2. Le 13 mars 2009, M. A______ a formé auprès du service des prestations complémentaires (ci-après : SPC) une demande de prestations complémentaires à l’assurance vieillesse, survivants et invalidité (ci-après : AVS-AI).

La demande intervenait notamment en raison de la présence d’un enfant en situation de handicap dans la famille.

3. Par décision du 14 avril 2009, le SPC a accordé à M. A______, à compter du 1er mars 2009, des prestations complémentaires fédérales (ci-après : PCF) et des prestations complémentaires cantonales (ci-après : PCC).

Plusieurs autres décisions ont été rendues par le SPC par la suite.

4. Le 5 janvier 2016, Mme A______ a formé auprès du SPC une demande de prestations d’aide sociale, contresignée par son mari, qui habitait en ménage commun avec elle.

Son contrat de travail à durée déterminée ayant pris fin le 31 décembre 2015, elle était sans activité ni revenu, et ne pouvait plus solliciter
l’assurance-chômage.

5. Par décision du 28 janvier 2016, le SPC a fixé à un montant nul les prestations mensuelles d’assistance auquel avait droit M. A______ dès le
1er février 2016.

6. Par courrier du 24 mars 2016 concernant les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI (ci-après : PC), le SPC a informé M. A______ qu’il maintenait la suspension du gain potentiel de son épouse, à la suite des documents concernant les recherches d’emploi et de gain d’activité lucrative que cette dernière avait produits en février 2016.

7. Le 5 août 2016, M. A______ a intégré l’établissement médico-social
(ci-après : EMS) « C______ ».

8. Par décision du 29 septembre 2016, le SPC a fixé le droit aux prestations d’aide sociale de M. A______ à CHF 1’272.- par mois dès le 1er octobre 2016, ce sur la base notamment d’un gain potentiel estimé de CHF 23’890.45.

9. Le 24 octobre 2016, Mme A______ a communiqué au SPC un contrat de travail à durée déterminée conclu le 7 octobre précédent avec une fondation gérant un EMS, fixant son salaire annuel brut à CHF 49’971.20.

10. Par décision du 4 novembre 2016, le SPC a établi le droit de M. A______, dès le 1er décembre 2016, à des PCF de CHF 3’674.- mensuellement, aucun montant n’étant dû pour le PCC, ce sur la base notamment d’un gain potentiel estimé de CHF 24’390.35.

11. Par décision du même jour, le droit aux prestations d’aide sociale de
M. A______ dès le 1er décembre 2016 également a été fixé à CHF 1’300.- par mois, ce sur la base notamment d’un gain potentiel estimé de CHF 24’390.35.

12. Par décision du 14 novembre 2016, le SPC a, établi le droit de
M. A______, pour le mois de novembre 2016, à des PCF de CHF 3’674.- mensuellement, aucun montant n’étant dû pour les PCC, ce sur la base notamment d’un gain d’activité lucrative de CHF 23’127.60 et d’un gain potentiel estimé de CHF 1’262.75.

13. Par décision du même jour, le SPC a établi le droit de Mme A______ dès le 1er novembre 2016 à CHF 608.- pour les PCF et 761.- pour les PCC, sur la base notamment du même gain d’activité lucrative et du même gain potentiel estimé que dans la décision concernant son mari.

14. Par décision du 14 novembre 2016 aussi, le SPC a, à compter du
1er décembre 2016, supprimé le droit aux prestations d’aide sociale de
M. A______.

Était joint à la décision le plan de calcul des prestations d’aide sociale pour la période à compter du 1er décembre 2016. Celui-ci retenait notamment, à titre de revenu déterminant, un gain d’activité lucrative de CHF 23’127.60 ainsi qu’un gain potentiel estimé de CHF 1’262.75 dans la colonne « montant présenté ». Dans la colonne « aide sociale » figurait seulement un « gain » de
CHF 23’127.60.

15. Le 22 novembre 2016, par son directeur, l’EMS « C______ » a fait « recours » au nom de M. A______ contre la décision du SPC du 14 novembre 2016 retenant un gain d’activité lucrative et supprimant l’aide sociale accordée à celui-ci.

M. A______ était effectivement marié et il était compréhensible que « les gains [soient] partagés ». Toutefois, au vu de la situation familiale de l’épouse de M. A______, il était difficile pour cette dernière de régler les frais de pension de son mari à l’EMS.

L’EMS avait par ailleurs effectué une demande de mise sous curatelle pour la gestion administrative des affaires de M. A______.

16. Par courrier du 5 décembre 2016, le SPC a indiqué à l’EMS que l’opposition formée le 22 novembre 2016 avait été enregistrée et transmise pour examen à son service juridique, et ferait l’objet d’une décision sur oppostion ultérieure.

Référence était faite aux art. 9 al. 3 et 11 al. 1 de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI du 6 octobre 2006 (loi sur les prestations complémentaires, LPC - RS 831.30).

En outre, afin de pallier la prise en compte du gain potentiel estimé dans le calcul des prestations de M. A______, et non le non-paiement des factures devant être régularisées par son épouse, le droit à l’aide sociale de celui-ci avait été examiné et aucune prestation de ce type ne pouvait lui être accordée, ses ressources, y compris les prestations complémentaires, couvrant ses dépenses.

17. Le 16 janvier 2017, le SPC a, concernant M. A______, rendu deux décisions sur opposition, l’une concernant les PC et l’autre concernant les prestations d’aide sociale.

a. Dans sa décision sur opposition concernant les prestations d’aide sociale, le SPC a rejeté l’opposition formée.

Étaient cités les art. 22 al. 1 de la loi sur l’insertion et l’aide sociale individuelle du 22 mars 2007 (LIASI - J 4 04) et 4 let. a de la loi sur le revenu déterminant unifié du 19 mai 2005 (LRDU - J 4 06).

Les revenus comprenaient la moitié des gains d’activité lucrative effectivement réalisés par Mme A______, épouse du résident de l’EMS. Par ailleurs, aucun montant n’avait été pris en compte à titre de gain potentiel (hypothétique) dans le calcul des prestations d’aide sociale, le montant de
CHF 1’262.75 n’étant pas reporté dans la colonne « aide sociale ». Il incombait ainsi à Mme A______ de contribuer au paiement partiel des frais de pension de son époux.

La décision indiquait qu’elle pouvait faire l’objet d’un recours dans les trente jours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative).

b. Dans sa décision sur opposition concernant les PC, le SPC a rejeté également l’opposition formée.

La législation en vigueur, en particulier les art. 9 al. 3 LPC ainsi que 1a et 1b de l’ordonnance sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 15 janvier 1971 (OPC-AVS/AI - 831.301), prévoyait le partage de la plupart des revenus et de la fortune des conjoints lorsque l’un d’eux résidait en home.

Les revenus à partager comprenaient les gains d’activité lucrative, qu’ils soient effectivement réalisés ou hypothétiques. Il incombait ainsi à
Mme A______ de contribuer au paiement partiel des frais de pension de son époux.

18. Par pli mis à la poste le 15 février 2017 et adressé au SPC, communiqué tout d’abord à la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : chambre des assurances sociales) qui l’a transmis à la chambre administrative, Mme A______ a indiqué qu’en réponse au « courrier daté du 16 janvier 2017 », elle s’opposait à la « décision de contribuer partiellement au paiement des frais de pension de [son] mari M. A______ ».

Elle était en effet dans l’incapacité de participer à ses frais de pension dans la mesure où elle avait des charges personnelles (loyer, factures) ainsi que des parents malades dans son pays de naissance dont elle s’occupait financièrement. Elle percevait un salaire net d’environ CHF 3’450.- par mois, lequel pouvait parfois augmenter de CHF 20.- ou CHF 30.-, ainsi que des PC d’environ
CHF 1’300.-. C’était afin de ne pas porter atteinte à son minimum vital qu’elle s’opposait à une participation aux frais de pension de son époux.

19. Le 31 mars 2017, le SPC a conclu au rejet du recours, sur la base de sa position déjà exprimée dans sa décision sur opposition en matière de prestations d’aide sociale, Mme A______ ne faisant valoir aucun argument susceptible de conduire à une appréciation différente du cas.

20. Par écriture du 5 mai 2017, Mme A______ a indiqué qu’elle maintenait
« [ses] dires », elle-même et son époux étant dans l’incapacité de payer notamment la participation de la recourante aux frais de celui-ci au sein de l’EMS.

Elle n’avait actuellement plus d’emploi et venait de s’inscrire au chômage.

21. Par lettres simple et recommandée du 20 février 2018, notifiée le 27 février suivant, la chambre administrative a demandé à Mme A______ d’indiquer, jusqu’au 6 mars 2018, si elle entendait contester la décision sur opposition du SPC du 16 janvier 2017 portant sur les prestations d’aide sociale ou celle portant sur les PC ou encore les deux à la fois.

22. Par plis simple et recommandé du 23 mars 2018, notifié le 28 mars suivant, sans nouvelle de Mme A______, la chambre administrative a réitéré la demande exposée dans son courrier du 20 février 2018, précisant qu’en l’absence de réponse de sa part dans le délai imparti au 25 avril 2018, il serait considéré qu’elle n’avait pas recouru contre la décision portant sur les PC.

23. Mme A______ ne s’est pas manifestée dans le délai imparti.

24. En réponse à une question posée par écrit par la chambre administrative du 27 juin 2018, le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant (ci-après : TPAE) a, par courrier du 28 juin 2018, communiqué à celle-ci son ordonnance du
28 juillet 2017 instituant une curatelle de représentation avec gestion du patrimoine en faveur de M. A______ et désignant la cheffe de secteur et un intervenant en protection de l’adulte au sein service de protection de l’adulte
(ci-après : SPAd) aux fonctions de curateurs, avec notamment pour tâches de représenter M. A______ dans ses rapports avec les tiers, en particulier pour les affaires administratives et juridiques.

25. Par lettre du 17 août 2018, le SPAd a sollicité un délai supplémentaire d’au moins un mois pour répondre à la question posée le 2 juillet précédent par la chambre administrative relative à l’existence éventuelles d’autres décisions qui auraient été rendues par le SPC après le 16 janvier 2017 et à toutes autres circonstances nouvelles pertinentes en lien avec la présente cause.

26. Le 29 août 2018, en réponse à la même question de la chambre administrative, le SPC a transmis à cette dernière les pièces dont celle-ci n’avait pas encore eu connaissance, à savoir des décisions en matière de PC concernant M. A______ et Mme A______, de même que des courriers, dont un du directeur de l’EMS de M. A______ du 3 mai 2017 faisant suite à une décision du 26 avril 2017 en matière de PC concernant ce dernier et demandant au SPC de prendre en compte, à titre de nouvel élément, le fait que Mme A______ était inscrite au chômage depuis le 6 avril 2017.

27. Le 25 septembre 2018 s’est tenue une audience de comparution personnelle des parties devant le juge délégué de la chambre administrative.

a. C’était particulièrement la prise en compte de la moitié de ses revenus pour la fixation des prestations d’aide sociale de M. A______ que Mme A______ contestait.

À la suite d’une aggravation de son état de santé, son mari avait dû être hospitalisé à l’hôpital B______, lequel leur avait dit qu’il ne pouvait rentrer à la maison que si des exigences particulières concernant les soins, notamment d’hygiène, étaient remplies. Vu les circonstances, Mme A______ avait été obligée, malgré ses souhaits, de lui trouver un EMS, en été 2016. Les époux étaient toujours ensemble et liés par leur mariage. Elle rendait visite à son époux en moyenne deux fois par semaine. Elle vivait toujours dans la maison que son mari lui avait laissée, avec quatre enfants majeurs. Parmi eux, il y avait sa fille handicapée, mais pas l’enfant de cette dernière.

Mme A______ ne versait rien pour son mari, notamment pas pour l’EMS. L’EMS lui avait demandé de l’argent au début du séjour de son mari, mais, comme elle lui avait écrit qu’elle n’avait pas les moyens de payer, cet établissement ne l’avait pas rappelée.

b. Selon le juriste représentant le SPC, il y avait auparavant un dossier unique pour les époux A______ concernant les PC, ce qui aurait aussi valu s’il y avait eu alors des prestations d’aide sociale. À partir du moment où M. A______ était entré en EMS, le dossier restait commun même s’il y avait des numéros différents pour l’aspect informatique. Pour les PC, il y avait un calcul séparé pour Mme et M. A______. Cela valait aussi pour l’aide sociale. Les gains de
Mme A______ pris en compte pour les PC faisaient l’objet d’un abattement prévu par la loi, ce qui expliquait la différence du montant retenu par rapport à celui pour l’aide sociale.

Comme le prévoyait la loi, tous les revenus, y compris le salaire de l’épouse, étaient partagés en deux, la moitié étant attribuée au dossier de
M. A______ et l’autre moitié à celui de Mme A______. En revanche, les dépenses étaient traitées différemment, les frais d’EMS étant attribués à
M. A______ et le loyer à Mme A______, ce en application des art. 9
al. 3 LPC et 1c OPC-AVS/AI. Le calcul était identique pour les prestations d’aide sociale.

Juridiquement, seul M. A______ était bénéficiaire des prestations que le SPC versait, même si, d’un point de vue pratique et légal, il versait certaines prestations à Mme A______. Le dossier de Mme A______ était totalement dépendant de celui de son époux, qui était titulaire d’une rente AVS.

En PC, les revenus fictifs étaient pris en compte et étaient parfois importants. C’était en général dans ce cas que l’aide sociale pouvait intervenir du fait que celle-ci ne prenait en compte que les revenus effectifs. Or, dans le cas présent, il n’y avait quasiment pas de revenus fictifs, sauf le gain potentiel estimé de CHF 1’262.75 qui avait été pris en compte pour les PC mais pas pour les prestations d’aide sociale. Pour les personnes à domicile, les barèmes (besoins vitaux pris en compte) des PC étaient plus élevés que ceux pour l’aide sociale, sauf concernant les frais d’EMS, cette dépense étant la même dans le cadre des deux types de prestations.

Si le SPC calculait les revenus et dépenses des époux A______ ensemble, il arriverait aussi à une absence de droit à l’aide sociale. Ce serait un calcul comme si les époux avaient un domicile commun. Il ne faisait pas un tel calcul commun dans les situations des époux A______. Ceux-ci étaient traités comme un groupe familial au sens de l’art. 13 de la loi sur l’insertion et l’aide sociale individuelle du 22 mars 2007 (LIASI - J 4 04), mais avec un calcul individualisé. Ils étaient toujours considérés comme un couple. Pour ce qui était de l’aspect « calcul commun ou séparé », le SPC appliquait par analogie les dispositions en matière de PC également pour l’aide sociale.

c. D’après la juriste représentant le SPAd pour M. A______, ces explications du représentant du SPC, de même que le calcul effectué par ce dernier, paraissaient correctes pour autant qu’il s’agisse d’un groupe familial.

Sur le fond, le SPAd ne soutenait pas le recours formé par Mme A______, mais sans autorisation du protégé ou, à défaut, du TPAE, il ne pouvait pas retirer ce recours.

d. Mme A______ a confirmé que son couple formait un groupe familial.

28. Par lettre du 24 octobre 2018, le SPC a maintenu sa position.

29. Dans ses observations du 25 octobre 2018, le SPAd, pour son protégé
M. A______, a relevé que la pratique du SPC consistant à faire une application analogique des dispositions en matière de PC également en matière d’aide sociale ne semblait pas conforme au droit, un groupe familial au sens de l’art. 13 LIASI impliquant de vivre en ménage commun avec le demandeur. Les époux A______ ne vivant pas sous le même toit, ils ne pouvaient dès lors pas être considérés comme un groupe familial au sens strict de cette disposition légale. La situation financière ne devait ainsi pas être retenue dans les plans de calcul de son mari en matière d’aide sociale.

30. Mme A______ n’a pas formulé d’observations dans le délai imparti.

31. Par pli du 8 novembre 2018, la chambre administrative a informé les parties que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. a. La chambre administrative est l’autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative, sous réserve des compétences de la chambre constitutionnelle de la Cour de justice (ci-après : chambre constitutionnelle) et de la chambre des assurances sociales (art. 132 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05). Elle examine d’office sa compétence, qui est déterminée par la loi et ne peut être créée par accord entre les parties (art. 11 al. 1 et 2 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10). Sauf exceptions prévues par la loi ou lorsque le droit fédéral ou une loi cantonale prévoit une autre voie de recours (art. 132 al. 8 LOJ), elle statue sur les recours formés contre les décisions des autorités et juridictions administratives au sens des art. 4, 4A, 5, 6 al. 1 let. a et e, et 57 LPA (art. 132
al. 2 LOJ).

L’Hospice général (ci-après : hospice) est l’organe d’exécution de la LIASI sous la surveillance du département de la cohésion sociale (ci-après : département ; art. 3 al. 1 LIASI). Les décisions sur opposition de la direction de l’hospice peuvent faire l’objet d’un recours à la chambre administrative dans un délai de trente jours à partir de leur notification (art. 52 LIASI).

Le SPC gère et verse les prestations d’aide sociale pour les personnes en âge AVS, au bénéfice d’une rente de l’assurance-invalidité ou au bénéfice de prestations complémentaires familiales (art. 3 al. 2 LIASI). Selon le Tribunal fédéral, le SPC agit dans ce cadre pour le compte de l’hospice (arrêts du Tribunal fédéral 9C_816/2015 du 22 mars 2016 consid. 3 ; 8C_1041/2012 du 11 juillet 2013 consid. 1.2). L’art. 52 LIASI s’applique par analogie aux décisions du SPC (art. 22 al. 3 du règlement d’exécution de la loi sur l’insertion et l’aide sociale individuelle du 25 juillet 2007 - RIASI - J 4 04.01).

En l’espèce et au regard notamment de l’arrêt du Tribunal fédéral 9C_816/2015 précité confirmant l’ATAS/729/2015 du 29 septembre 2015, en tant que la décision sur opposition rendue le 16 janvier 2017 par le SPC a trait à l’application de la LIASI, la chambre administrative est matériellement compétente pour connaître du présent recours.

La recourante n’ayant pas réagi aux lettres de la chambre administrative des 20 février et 23 mars 2018, il doit être considéré qu’elle n’a pas recouru contre la décision sur opposition rendue le 16 janvier 2017 par le SPC en matière de PC.

b. En vertu de l’art. 64 al. 2 LPA, le recours adressé à une autorité incompétente est transmis d’office à la juridiction administrative compétente et le recourant en est averti. L’acte est réputé déposé à la date à laquelle il a été adressé à la première autorité.

Dans la mesure où le recours du 15 février 2017 contre la décision sur opposition du 16 janvier 2017 a été interjeté en temps utile devant le SPC, qui a transmis la cause à la chambre des assurances sociales, laquelle l’a, à son tour, transmis à la chambre de céans, l’acte est réputé déposé à la date à laquelle il a été adressé à la première de ces autorités, de sorte qu’ayant été formé dans le délai légal de trente jours (art. 62 al. 1 let. a LPA), il est recevable sous cet angle.

c. Le destinataire de la décision (art. 60 al. 1 let. a LPA) est M. A______. Le recours a toutefois été formé par elle, en tant que conjoint, qui est l’épouse du destinataire. D’une part, conformément à l’art. 9 LPA, elle, en tant que conjoint, peut le représenter valablement dans la procédure. D’autre part, la recourante affirme composer avec son mari un groupe familial au sens de l’art. 13 LIASI, de sorte qu’elle serait le cas échéant touchée directement par la décision sur opposition querellée et aurait un intérêt personnel digne de protection à ce que l’acte soit annulé ou modifié (art. 60 al. 1 let. b LPA). Le recours est dès lors recevable sur ce point aussi.

d. Selon l’art. 65 LPA, l’acte de recours contient, sous peine d’irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant (al. 1). Il contient également l’exposé des motifs ainsi que l’indication des moyens de preuve (al. 2 1ère phr.).

Compte tenu du caractère peu formaliste de cette disposition, la jurisprudence fait preuve d’une certaine souplesse s’agissant de la manière par laquelle sont formulées les conclusions du recourant. Le fait qu’elles ne ressortent pas expressément de l’acte de recours n’est, en soi, pas un motif d’irrecevabilité, pour autant que l’autorité judiciaire et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant (ATA/1243/2017 du 29 août 2017 consid. 2a ; ATA/518/2017 du 9 mai 2017 consid. 2a). Ainsi, une requête en annulation d’une décision doit être déclarée recevable dans la mesure où le recourant a, de manière suffisante, manifesté son désaccord avec la décision ainsi que sa volonté qu’elle ne déploie pas d’effets juridiques (ATA/1243/2017 précité consid. 2a).

En l’occurrence, le recours ne contient pas de conclusions formelles en annulation de la décision sur opposition du SPC du 16 janvier 2017. On comprend toutefois de l’acte de recours que la recourante, faisant « opposition » à ladite décision, est en désaccord avec celle-ci et qu’elle souhaite son annulation, et qu’elle refuse que ses propres revenus soient pris en compte dans la détermination du droit aux prestations d’aide sociale de son mari et qu’elle participe aux frais de pension de ce dernier. Le recours est ainsi recevable de ce point de vue également.

e. En définitive, le recours est recevable.

2. Le litige porte sur le calcul du montant des prestations d’aide sociale du recourant, et dès lors éventuellement de la recourante si elle est membre du groupe familial de celui-ci, à compter du 1er décembre 2016, et plus particulièrement sur la question de savoir si les revenus de l’épouse doivent être pris en compte dans le calcul du revenu déterminant et si elle doit participer aux frais de pension de ce dernier.

Pour répondre à ces questions, la première question à trancher sera celle de savoir si la recourante forme avec le recourant au groupe familial au sens de
l’art. 13 LIASI.

Pour les motifs qui suivent, pourra demeurer indécise la question de savoir sur quelle base et dans quelle mesure l’intimé était fondé à revenir par décision du 14 novembre 2016 sur sa décision du 4 novembre 2016 d’octroi de prestations d’aide sociale avec effet au 1er décembre 2016. Il en va de même de la conformité au droit de la pratique du SPC consistant en l’application analogique des dispositions en matière de PC également en matière de prestations d’aide sociale.

3. a. Aux termes de l’art. 12 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), quiconque est dans une situation de détresse et n’est pas en mesure de subvenir à son entretien a le droit d’être aidé et assisté et de recevoir les moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine.

Ce droit à des conditions minimales d’existence fonde une prétention des justiciables à des prestations positives de l’État. Il ne garantit toutefois pas un revenu minimum, mais uniquement la couverture des besoins élémentaires pour survivre d’une manière conforme aux exigences de la dignité humaine, tels que la nourriture, le logement, l’habillement et les soins médicaux de base. L’art. 12 Cst. se limite, autrement dit, à ce qui est nécessaire pour assurer une survie décente afin de ne pas être abandonné à la rue et réduit à la mendicité (ATF 142 I 1 consid. 7.2.1 ; 136 I 254 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_9/2013 du
16 mai 2013 consid. 5.1 ; ATA/457/2017 du 25 avril 2017 consid. 9a et les arrêts cités).

b. En droit genevois, la LIASI et le RIASI concrétisent l’art. 12 Cst. (ATA/457/2017 précité consid. 9b), tout en allant plus loin que ce dernier.

La LIASI a pour but de prévenir l’exclusion sociale et d’aider les personnes qui en souffrent à se réinsérer dans un environnement social et professionnel
(art. 1 al. 1 LIASI), ainsi que de soutenir les efforts des bénéficiaires de la loi à se réinsérer sur le marché du travail et dans la vie sociale en général. Elle vise aussi à garantir à ceux qui se trouvent dans la détresse matérielle et morale des conditions d’existence conformes à la dignité humaine (art. 1 al. 2 LIASI). Ses prestations sont fournies sous forme d’accompagnement social, de prestations financières et d’insertion professionnelle (art. 2 LIASI).

c. Aux termes de l’art. 8 LIASI, ont droit à des prestations d’aide financière les personnes majeures qui ne sont pas en mesure de subvenir à leur entretien ou à celui des membres de la famille dont ils ont la charge (al. 1). Ces prestations ne sont pas remboursables, sous réserve des art. 12 al. 2 et 36 à 41 LIASI (al. 2).

d. L’aide sociale est soumise au principe de subsidiarité, lequel est rappelé par l’art. 12 Cst. La personne dans le besoin doit avoir épuisé les possibilités
d’auto-prise en charge, les engagements de tiers et les prestations volontaires de tiers (ATA/290/2017 du 14 mars 2017 ; ATA/343/2014 du 13 mai 2014 ; Félix WOLFFERS, Fondement du droit de l’aide sociale, 1995, p. 77). L’aide est subsidiaire, de manière absolue, à toute autre ressource, mais elle est aussi subsidiaire à tout revenu que le bénéficiaire pourrait acquérir par son insertion sociale ou professionnelle (MGC 2005-2006/I A p. 259 ; ATA/878/2016 du
18 octobre 2016 consid. 3d ; ATA/4/2015 du 6 janvier 2015).

L’art. 9 al. 1 LIASI prévoit ainsi que les prestations d’aide financière versées sont subsidiaires à toute autre source de revenus, aux prestations découlant du droit de la famille ou de la loi fédérale sur le partenariat enregistré entre personnes du même sexe du 18 juin 2004 (LPart - RS 211.231), ainsi qu’à toute autre prestation à laquelle le bénéficiaire et les membres du groupe familial ont droit, en particulier aux prestations d’assurances sociales fédérales et cantonales, et aux prestations communales, à l’exception des prestations occasionnelles. Conformément à l’art. 9 al. 2 LIASI, le bénéficiaire et les membres du groupe familial doivent faire valoir sans délai leurs droits auxquels l’aide financière est subsidiaire et doivent mettre tout en œuvre pour améliorer leur situation sociale et financière.

e. L’art. 11 al. 1 LIASI décrit le cercle des bénéficiaires des prestations d’aide financière en prévoyant qu’y ont droit les personnes qui ont leur domicile et leur résidence effective sur le territoire genevois (let. a), ne sont pas en mesure de subvenir à leur entretien (let. b) et répondent aux autres conditions de la loi
(let. c), soit celles des art. 21 à 28 LIASI, ces conditions étant cumulatives (ATA/357/2017 du 28 mars 2017 consid. 5a).

4. a. En vertu de l’art. 13 LIASI intitulé « unité économique de référence », les prestations d’aide financière sont accordées au demandeur et au groupe familial dont il fait partie (al. 1). Le groupe familial est composé du demandeur, de son conjoint, concubin ou partenaire enregistré vivant en ménage commun avec lui, et de leurs enfants à charge (al. 2).

b. Dans le projet de loi (PL 9676) initial, du 4 octobre 2005, l’art. 13
al. 2 LIASI prévoyait que le groupe familial est composé du demandeur, de son conjoint non séparé de corps ni de fait ou de son concubin ou partenaire lié par un partenariat enregistré, et de leurs enfants à charge (MGC 2005-2006/I A 232). En effet, en s’inspirant de la législation fiscale, le conjoint séparé de fait deviendrait une unité d’aide sociale distincte. Le règlement devrait prévoir qu’au terme d’un délai raisonnable (en principe un mois), le conjoint devrait avoir introduit une action judiciaire (mesures protectrices de l’union conjugale, séparation de corps ou divorce), afin qu’une pension alimentaire à laquelle l’aide sociale est subsidiaire, soit fixée et que la constitution d’un domicile distinct soit constatée (MGC 2005-2006/I A 264 s.).

Le Conseil d’État a toutefois proposé un amendement correspondant à la teneur de l’art. 13 al. 2 LIASI finalement adopté, qui a été accepté par la Commission des affaires sociales du Grand Conseil (PL 9676-A - P 1573-A du
8 janvier 2007 p. 50) puis adopté par le Grand Conseil.

c. Ni la LIASI ni le RIASI ne traitent expressément la situation d’un bénéficiaire de prestations d’aide sociale au sein d’un groupe familial au sens de l’art. 13 LIASI qui doit quitter le domicile familial pour être pris en charge dans un établissement tel qu’un EMS ou home.

Il apparaît donc opportun d’examiner ci-après les solutions qui pourraient être apportées à une telle situation dans d’autres lois et règlementations, puis de déterminer si l’on peut ou non s’en inspirer.

d. Selon l’art. 23 al. 1 du Code civil suisse du 10 décembre 1907
(CC - RS 210), dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2013, le domicile de toute personne est au lieu où elle réside avec l’intention de s’y établir ; le séjour dans une institution de formation ou le placement dans un établissement d’éducation, un home, un hôpital ou une maison de détention ne constitue en soi pas le domicile. L’al. 2 précise que nul ne peut avoir en même temps plusieurs domiciles. Conformément à l’art. 24 CC, toute personne conserve son domicile aussi longtemps qu’elle ne s’en est pas créé un nouveau (al. 1). Le lieu où elle réside est considéré comme son domicile, lorsque l’existence d’un domicile antérieur ne peut être établie ou lorsqu’elle a quitté son domicile à l’étranger et n’en a pas acquis un nouveau en Suisse (al. 2).

Selon la jurisprudence, lors du placement dans un établissement par des tiers, on devra exclure régulièrement la création d’un domicile à cet endroit, l’installation dans l’établissement relevant de la volonté de tiers et non de celle de l’intéressé. Il en va en revanche autrement lorsqu’une personne majeure et capable de discernement décide de son plein gré, c’est-à-dire librement et volontairement, d’entrer dans un établissement pour une durée illimitée et choisit par ailleurs librement l’établissement ainsi que le lieu de séjour. Dans la mesure où, lors de l’entrée dans un établissement qui survient dans ces circonstances, le centre de l’existence est déplacé en ce lieu, un nouveau domicile y est constitué. L’entrée dans un établissement doit aussi être considérée comme le résultat d’une décision volontaire et libre lorsqu’elle est dictée par « la force des choses », tel le fait de dépendre d’une assistance ou d’avoir des difficultés financières (ATF 141 V 530 consid. 5.2 ; 134 V 236 consid. 2.1).

e. Aux termes de l’art. 4 de la loi fédérale sur la compétence en matière d’assistance des personnes dans le besoin du 24 juin 1977 (LAS - RS 851.1), la personne dans le besoin a son domicile selon ladite loi (domicile d’assistance) dans le canton où elle réside avec l’intention de s’y établir ; ce canton est appelé canton de domicile (al. 1). Le domicile s’acquiert par la déclaration d’arrivée à la police des habitants et, pour les étrangers, par la délivrance d’une autorisation de résidence, à moins qu’il ne soit prouvé que le séjour a commencé plus tôt ou plus tard ou encore qu’il n’est que provisoire (al. 2). À teneur de l’art. 5 LAS, le séjour dans un home, un hôpital ou toute autre institution et, s’il s’agit d’une personne majeure, le placement dans une famille décidé par une autorité, ne constituent pas un domicile d’assistance. En vertu de l’art. 9 LAS, la personne quittant son canton de domicile perd le domicile d’assistance qu’elle avait jusqu’alors (al. 1). En cas de doute, le départ est censé avoir lieu le jour où il est annoncé à la police des habitants (al. 2). L’entrée dans un home, un hôpital ou toute autre institution et, s’il s’agit d’une personne majeure, le placement dans une famille, décidé par une autorité ne mettent pas fin au domicile d’assistance (al. 3).

D’après les travaux préparatoires, la notion de domicile telle qu’elle figure dans cette loi est dans une large mesure la même que celle du concordat sur l’assistance au lieu de domicile, lequel, de son côté, correspond dans la plupart des cas à l’art. 23 CC (Message du Conseil fédéral à l’appui d’une loi fédérale sur la compétence en matière d’assistance des personnes dans le besoin du
17 novembre 1976, FF 1976 III 1229 ss, spéc. 1239)

f. À teneur de l’art. 9 al. 3 LPC, pour les couples dont l’un des conjoints ou les deux vivent dans un home ou dans un hôpital, la PC annuelle est calculée séparément pour chacun des conjoints. La fortune est prise en compte à raison de la moitié pour chacun des conjoints. Les dépenses reconnues et les revenus déterminants sont généralement soumis au partage par moitié. Le Conseil fédéral règle les exceptions.

L’art. 1a OPC-AVS/AI précise que pour les couples dont l’un des conjoints au moins vit en permanence ou pour une longue période dans un home ou dans un hôpital, la PC annuelle est calculée séparément pour chacun des conjoints selon les art. 1b à 1d. Selon l’art. 1b al. 1 OPC-AVS/AI, les revenus déterminants (y compris l’imputation de la fortune selon l’art. 11 al. 1 let. c LPC) des deux époux sont additionnés. Le montant total ainsi obtenu est ensuite réparti par moitié entre chacun d’eux. Aux termes de l’art. 1c OPC-AVS/AI, les dépenses reconnues sont prises en compte pour le conjoint directement concerné par elles. Quand une dépense concerne indifféremment les deux conjoints, elle est prise en compte par moitié pour chacun d’eux (al. 1). Pour le conjoint qui ne vit pas dans un home ou dans un hôpital, les dépenses reconnues de loyer pour personnes seules sont prises en compte (al. 2).

g. Ainsi, ni le CC ni la LAS ni la LPC ni l’OPC-AVS/AI ne contiennent une notion telle qu’un groupe familial dont les membres vivent en ménage commun avec le demandeur.

Les règles afférentes aux PC traitent précisément la situation d’un couple dont l’un des membres se trouve dans un home ou un hôpital, ce qui n’est pas le cas dans la LIASI et le RIASI.

h. En vertu l’art. 21 al. 1 LIASI, ont droit aux prestations d’aide financière les personnes dont le revenu mensuel déterminant n’atteint pas le montant destiné à la couverture des besoins de base et dont la fortune ne dépasse pas les limites fixées par le RIASI. À teneur de l’al. 2, font partie des besoins de base notamment le forfait pour l’entretien fixé par règlement du Conseil d’État (let. a) et le loyer ainsi que les charges ou, si le demandeur est propriétaire de sa demeure permanente, les intérêts hypothécaires, dans les limites fixées par règlement du Conseil (let. b).

L’art. 22 LIASI prévoit que sont pris en compte les revenus et les déductions sur le revenu prévus aux art. 4 et 5 de la loi sur le revenu déterminant unifié du 19 mai 2005 (LRDU - J 4 06), sous réserve des exceptions figurant aux al. 2 et 3, non applicables en l’espèce (al. 1). Sont assimilées aux ressources de l’intéressé celles des membres du groupe familial (al. 6), principe qui vaut aussi pour la fortune prise en compte (art. 23 al. 2 LIASI).

L’art. 2 al. 1 RIASI, afférent au « forfait mensuel pour l’entretien » (art. 21 al. 2 let. a LIASI), détermine la prestation mensuelle de base selon le nombre de personnes, à partir de CHF 977.- pour une personne. L’al. 2 précise que la prestation de base couvre les besoins suivants : a) alimentation ; b) habillement ; c) consommation d’énergie, sans les charges locatives ; d) entretien du ménage ; e) achats de menus articles courants ; f) frais de santé (tels que médicaments achetés sans ordonnance), sans franchise ni quote-part ; g) transport ; h) communication ; i) loisirs et formation ; j) soins corporels ; k) équipement personnel (tel que fournitures de bureau) ; l) divers.

L’art. 3 al. 1 RIASI, qui concerne les « loyers et charges » (art. 21 al. 2
let. b LIASI), prévoit que le loyer et les charges locatives ainsi que les éventuels frais de téléréseau sont pris en compte intégralement, conformément au bail et à la convention de chauffage, jusqu’à concurrence des montants maximaux suivant la composition du groupe familial et le nombre de membres qui le composent (let. a à f).

Il s’ensuit que le fait de vivre seul ou en ménage commun avec d’autres personnes a des conséquences sur l’ampleur des prestations octroyées. Notamment, une personne seule reçoit proportionnellement une prestation mensuelle de base plus élevée que si elle était en ménage commun (art. 2
al. 1 RIASI) et son loyer individuel est pris en compte intégralement (art. 3
al. 1 RIASI ; ATA/590/2018 du 12 juin 2018 consid. 3b ; ATA/207/2014 du
1er avril 2014 consid. 3b). De surcroît, les besoins énoncés à l’art. 2 al. 2 let. a, c
et d à tout le moins RIASI supposent une vie en ménage commun, sous le même toit. Enfin, l’art. 13 al. 3 in fine LIASI, à teneur duquel les enfants qui sont momentanément absents du domicile du demandeur pour raisons d’études ou de formation, sont considérés comme faisant ménage commun avec celui-ci, constitue la seule exception à l’identité de domicile contenue dans cette loi.

Dans le cas d’une communauté de majeurs – ascendant ou descendant vivant avec le demandeur en ménage commun –, institution proche de celle du groupe familial au sens de l’art. 13 LIASI, il a été retenu que le domicile de l’appelée en cause se trouvait être le même que celui de son père, avec lequel elle vivait donc en ménage commun au sens de l’art. 26 al. 1 LIASI et constituait une communauté de majeurs au sens de cette disposition légale et de l’art. 10
al. 1 RIASI (ATA/590/2018 précité consid. 7).

i. L’interprétation systématique opérée ci-dessus confirme ce qui ressort du texte même de l’art. 13 al. 2 LIASI, à savoir qu’un groupe familial au sens de cet article suppose que ses membres vivent ensemble en ménage commun,
c’est-à-dire sous le même toit.

5. a. Tel n’est en l’espèce pas le cas des recourants, quand bien même la cause de la prise en charge de l’époux dans un EMS – ou home – n’est pas due à leurs souhaits mais à une nécessité indépendante de leur volonté.

L’intéressée ne peut pas être suivie quant à son souhait de voir le groupe familial maintenu entre son conjoint et elle-même, souhait du reste incompatible avec son refus de participer aux frais de pension de son mari, en particulier de voir ses propres revenus pris en compte dans la détermination du droit aux prestations d’aide sociale de celui-ci. L’absence d’un tel groupe familial ne réduit en rien l’affection, les soins et l’assistance que les époux se portent mutuellement.

La situation des époux ne saurait se rapprocher de celle visée par les règles relatives à la communauté de majeurs (art. 26 al. 1 LIASI et 10 RIASI) ou à la cohabitation (art. 26 al. 2 LIASI et 11 RIASI).

b. Le fait que la recourante ne forme pas un groupe familial avec le recourant exclut que les revenus, fortune et besoins de celle-là soient pris en compte dans la détermination du droit aux prestations d’aide sociale de celui-ci comme s’ils formaient un groupe familial.

L’époux doit être considéré comme le demandeur au sens de l’art. 13 al. 1 et 2 LIASI comme l’a indiqué le SPC lors de l’audience de comparution personnelle des parties et comme cela découle du fait qu’il est le seul en âge AVS selon
l’art. 3 al. 2 let. a LIASI créant la compétence du SPC pour lui également en matière de prestations d’aide sociale.

c. Il s’ensuit que la recourante obtient gain de cause quant à son refus de voir ses propres revenus pris en compte dans la détermination, par calcul, du droit aux prestations d’aide sociale de celui-ci.

Cela implique que les conjoints doivent, depuis l’intégration du recourant dans un EMS, voir leurs situations être traitées dans des dossiers séparés, celle de l’épouse pouvant le cas échéant relever de la compétence – générale – de l’hospice (art. 3 al. 1 LIASI), ce qui n’exclut en l’état pas d’emblée une éventuelle application du principe de subsidiarité de l’art. 9 LIASI et donc une éventuelle « participation » de la recourante, à ce titre, aux frais de pension de son mari.

La décision sur opposition du 16 janvier 2017 ainsi que la décision initiale du 14 décembre 2016 en matière d’aide sociale doivent en conséquence être annulées et la cause doit donc être renvoyée au SPC afin qu’il rende une nouvelle décision au sens des considérant.

6. Vu l’issue du litige, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée aux recourants, qui n’y ont pas conclu et qui ne sont pas représentés par des mandataires professionnels (art. 87 al. 2 LIASI).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 15 février 2017 par Mme A______ et M. A______ contre la décision sur opposition du service des prestations complémentaires du 16 janvier 2017, en matière d’aide sociale ;

au fond :

l’admet partiellement ;

annule la décision sur opposition du 16 janvier 2017 et la décision du 14 décembre 2016 du service des prestations complémentaires, en matière d’aide sociale ;

renvoie la cause au service des prestations complémentaires pour nouvelle décision au sens des considérants ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Mme A______, au service de protection de l’adulte pour M. A______, au service des prestations complémentaires, ainsi que, pour information, à la chambre des assurances sociales de la Cour de justice.

Siégeant : M. Thélin, président, Mme Krauskopf, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :