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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2475/2023

JTAPI/70/2024 du 29.01.2024 ( OCPM ) , REJETE

ATTAQUE

Descripteurs : AUTORISATION DE SÉJOUR;FORMATION(EN GÉNÉRAL);CAS DE RIGUEUR;RESPECT DE LA VIE FAMILIALE;RESPECT DE LA VIE PRIVÉE;DÉCISION DE RENVOI
Normes : LEI.27; LEI.30.al1.letb; CEDH.8; LEI.83
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2475/2023

JTAPI/70/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 29 janvier 2024

 

dans la cause

 

Madame A______, agissant en son nom et celui de son enfant mineur B______, représentés par Me Patricia MICHELLOD, avocate, avec élection de domicile

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Madame A______, née le ______ 1993, est ressortissante d’Albanie.

2.             Arrivée en Suisse le 20 décembre 2017, elle s’est vue délivrer par l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) une autorisation de séjour pour études dont la validité est arrivée à échéance le 31 juillet 2020, afin d’obtenir un Master en sciences infirmières en juin 2021, après une période d’apprentissage intensif du français auprès de BUG: PAS DE REMPLACEMENT POUR 'l'école de langue française et d'informatique' (ci-après : C______) de mars 2018 à juillet 2019.

À teneur de sa requête y relative datée du 2 mars 2018, une fois sa formation en Suisse terminée, elle entendait retourner en Albanie pour mettre y en pratique les connaissances acquises. Étaient en outre joints :

-          le Bachelor en infirmerie obtenu par ses soins le 26 mai 2016 auprès d’une université albanaise ;

-          son curriculum vitae, à teneur duquel, après avoir effectué toute sa scolarité en Albanie, elle y avait travaillé auprès d’une société immobilière de 2011 à 2015 comme vendeuse puis dans le département de pédiatrie d’un hôpital de 2013 à 2016 ;

-          une attestation de prise en charge financière en sa faveur, à hauteur de CHF 2'540.- mensuels durant cinq ans, signée le 27 février 2018 par un ressortissant kosovar titulaire d’une autorisation d’établissement et

-          un engagement à quitter la Suisse au terme de ses études signé par ses soins le 13 mars 2018.

3.             Par courrier du 1er mai 2019, Mme A______ a informé l’OCPM qu’elle n’avait pas réussi à atteindre le niveau de français nécessaire pour intégrer le Master visé dans le délai initialement envisagé. Elle pensait toutefois être en mesure d’y parvenir d’ici juin 2020, de sorte que l’obtention de son Master pourrait être attendue fin juin 2022.

4.             Faisant suite à une demande de renseignements de l’OCPM, l’école C______ a précisé, par courriel du 19 juin 2019, que Mme A______ avait interrompu sa formation en français pour des raisons médicales, celle-ci étant hospitalisée depuis deux mois.

5.             Par requête du 2 octobre 2020, Mme A______ a sollicité auprès de l’OCPM, sous la plume du D______, la délivrance d’un permis de séjour humanitaire pour raisons médicales.

Elle souffrait d’un cancer, diagnostiqué en avril 2019, qui avait nécessité une intervention chirurgicale puis une chimiothérapie, de sorte qu’elle avait dû interrompre ses études. Dans l’incapacité d’exercer une activité lucrative au vu de son état de santé, elle émargeait à l’aide sociale depuis novembre 2019. Le traitement et les suivis médicaux nécessaires à sa santé n’étaient pas disponibles en Albanie.

Plusieurs documents étaient joints, notamment :

-          deux formulaires médicaux établis par le secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) complétés respectivement le 26 juin 2020 par le docteur E______ faisant état, chez la patiente, d’une « tumeur du sac Vitellin de l’ovaire gauche FIGO IC3 » et confirmant une intervention chirurgicale suivie d’une chimiothérapie, qui avait déterminé l’apparition d’une polyneuropathie, d’une asthénie et d’une toxicité pulmonaire. L’évolution était bonne et elle ne bénéficiait d’aucun traitement. Un suivi régulier clinique, biologique et radiologique était nécessaire afin d’identifier une éventuelle récidive précoce pour mettre en place un traitement rapide adapté. Il était ainsi nécessaire que la patiente reste à Genève, de sorte que l’octroi d’un permis de séjour devait être favorisé. Aucun médecin ni structure médicale en Albanie n’était connu ; respectivement le 1er octobre 2020 par le docteur F______, à teneur duquel la patiente nécessitait un suivi oncologique trois à quatre fois par an et

-          la traduction française de l’attestation établie le 16 juillet 2020 par le docteur G______ de l’hôpital H______ (Albanie), selon laquelle le protocole appliqué par ses soins à la pathologie dont souffrait la patiente était différent de celui suivi en Suisse, de sorte qu’elle devait continuer son traitement sur le sol helvétique.

6.             Faisant suite à une demande de renseignements de l’OCPM, Mme A______ a produit, par courrier du 3 août 2021 :

-          Un rapport médical établi le 23 juillet 2021 par le Dr E______ faisant état d’une maladie qui restait en rémission et ne nécessitait actuellement aucun traitement. La patiente était apte à passer le test oral de français A2 et le pronostic médical à court et moyen terme quant à sa capacité d’apprentissage était excellent. Elle était en outre apte à participer à la vie économique ou à acquérir une formation. Il était nécessaire pour elle de demeurer à Genève en vue d’un suivi adapté dans une structure ayant « la plateforme nécessaire pour une prise en charge adéquate d’une récidive d’une maladie grave » et

-          une attestation du Dr F______, non datée, indiquant qu’elle avait subi une « hystéroscopie opératoire avec résection de septum » le 17 juin 2021.

7.             Par courrier du 4 janvier 2021 [recte : 2022], Mme A______ a informé l’OCPM que son état de santé s’était dégradé, la tumeur étant potentiellement en train de réapparaître.

Était joint un formulaire médical établi par le SEM complété par le Dr E______ le 16 décembre 2021, à teneur duquel l’état général de la patiente était bon. Les derniers bilans biologiques des 25 octobre et 22 novembre 2021 ayant montré une « augmentation du CA 125 », de nouvelles investigations se justifiaient. Un ultrason gynécologique et un IRM pelvien avaient révélé des structures kystiques sur l’ovaire résiduel, qu’il convenait de suivre de manière rapprochée. Aucun traitement n’était actuellement nécessaire. Des contrôles biologiques devaient être effectués toutes les six semaines, ainsi qu’un IRM pelvien dans les trois mois. Il a confirmé ses déclarations précédentes s’agissant de la nécessité pour la patiente de rester à Genève en vue de bénéficier d’un suivi adapté.

8.             Par attestation du 1er avril 2022, l’Hospice général (ci-après : HG) a indiqué que Mme A______ percevait des prestations financières depuis le 1er décembre 2019, à hauteur de CHF 4'768.15 pour 2019, de CHF 35'455.90 pour 2020, de CHF 38'792.15 pour 2021 et de CHF 9'676.80 pour 2022.

9.             Il ressort de l’extrait du registre des poursuites établi le 4 avril 2022 que la précitée ne fait l’objet d’aucune poursuite ni acte de défaut de biens.

10.         Faisant suite à une demande de renseignements de l’OCPM, la représentation diplomatique helvétique en Albanie a précisé, par courriel du 21 avril 2022, que les traitements nécessaires à Mme A______ étaient disponibles à l’hôpital universitaire de Tirana et dans les hôpitaux privés « I______ » et « J______ ». La caisse d’assurance-maladie remboursait une catégorie précise de médicaments.

11.         Par courrier du 4 mai 2022, l’OCPM a informé Mme A______ de son intention de refuser de renouveler son titre de séjour et de prononcer son renvoi de Suisse et lui a imparti un délai de trente jours pour faire usage de son droit d’être entendu.

12.         Par courriels des 1er juin et 29 juillet 2022, le nouveau conseil de Mme A______ a sollicité auprès de l’OCPM, avec succès, la prolongation du délai imparti pour se déterminer, tout en précisant que sa mandante était enceinte de Monsieur K______, titulaire d’une autorisation d’établissement dans le canton de Vaud.

13.         Faisant usage de son droit d’être entendu, Mme A______ a sollicité, par pli du 2 septembre 2022, la suspension de l’instruction de sa demande de titre de séjour et a produit plusieurs documents.

Le père de son futur enfant - potentiellement titulaire d’un permis d’établissement, voire de la nationalité suisse - n’avait eu de cesse de la menacer et l’avait invitée à interrompre sa grossesse. Elle avait interpellé cet homme, par le biais d’un courrier d’avocat, afin de discuter de la situation de leur enfant à naître, faute de quoi elle introduirait une action en paternité. Ainsi, il apparaissait judicieux de suspendre la procédure jusqu’à ce que la situation y relative s’éclaircisse. Inscrite auprès de l’C______ depuis juin 2022, elle souhaitait obtenir le niveau B2 en français afin de reprendre des études universitaires. Elle travaillait en outre à satisfaction en qualité de vendeuse-caissière à L______, pour le D______, dans le cadre d’un stage du 30 avril 2022 au 30 avril 2023, démontrant ainsi ses efforts d’intégration socio-professionnelle. Enfin, elle était médicalement suivie tous les trois mois, étant rappelé que, comme expliqué par le Dr E______, il était nécessaire qu’elle reste dans le canton pour bénéficier d’un suivi adapté.

14.         Par courriel du 16 septembre 2022, l’OCPM a informé Mme A______ de la mise en attente de son dossier durant six mois afin d’évaluer les procédures introduites en vue de faire reconnaître son enfant et son intégration socio-professionnelle.

15.         Le 28 janvier 2023 est né à Genève B______, de nationalité albanaise, fils de Mme A______. Aucune filiation paternelle ne figure sur le certificat de naissance de cet enfant.

16.         Par courriel du 16 février 2023, le nouveau conseil de Mme A______ a sollicité la prolongation de la suspension de l’instruction de sa demande pour une durée de deux mois ; dans ce cadre, l’OCPM lui a accordé un délai au 17 avril 2023 pour exercer son droit d’être entendu.

17.         Faisant usage de ce droit, Mme A______, par pli du 17 avril 2023, sous la plume de son nouveau conseil, a requis, principalement, la reconsidération du projet de décision de refus et à ce qu’il soit renoncé à son renvoi et, subsidiairement, la suspension de l’instruction de sa demande de titre de séjour jusqu’à droit connu sur l’action en paternité intentée par ses soins.

Les conditions de renouvellement d’un titre de séjour pour formation étaient remplies. Elle disposait d’un logement. En outre, dès lors qu’elle effectuait un stage de longue durée auprès de L______ et que « ses amis sur place », notamment Monsieur M______, l’aidaient financièrement, elle disposait des ressources économiques nécessaires. Elle possédait, pour le surplus, au vu de sa formation antérieure, les qualifications nécessaires pour apprendre le français afin d’effectuer un Master dans le domaine médical. L’arrêt de cette formation, dû à son cancer, était indépendant de sa volonté. Dès lors qu’elle avait pu cesser tout traitement aux environs de fin novembre 2021, son inscription en mai 2022 à des cours de français intensifs, nonobstant sa grossesse, démontrait sa volonté de poursuivre sa formation.

Le refus de renouveler son titre de séjour violerait en outre l’art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101). Bien que le père présumé de son enfant, de nationalité suisse, n’ait jamais donné suite aux courriers qu’elle lui avait adressés, il ne niait pas sa paternité. Ainsi, elle envisageait de déposer une action en paternité à son encontre. Quant à elle, elle n’avait jamais commis d’infraction en Suisse et entretenait une relation intacte avec son enfant.

Plusieurs documents étaient joints, notamment, en sus de pièces déjà produites :

-          une attestation d’inscription à des cours de français intensifs auprès de l’école C______ durant un an à compter du 7 juin 2022 et des attestations de suivi de cours dans ce même établissement du 26 mars au 14 décembre 2018, du 4 février au 17 avril 2019 et du 12 avril au 11 juin 2021 ;

-          le contrat relatif à son activité de réinsertion pour bénéficiaires de prestation d’aide sociale établi par l’HG en vue d’une activité de vente du 30 avril 2022 au 30 avril 2023 auprès du D______, lequel ne faisait état d’aucune rémunération et

-          des décomptes de virements de prestations sociales de l’HG pour les mois de décembre 2022 à février 2023 pour des montants mensuels oscillant entre CHF 2'376.- et CHF 2'176.-.

18.         Par courrier du 24 avril 2023, Mme A______ a notamment transmis à l’OCPM un contrat de bail pour un logement de trois pièces et demie établi à son nom et à celui de M. M______ à compter du 16 février 2022, étant précisé qu’elle y vivrait seule avec son fils, le précité se portant codébiteur solidaire du paiement du loyer.

19.         Par décision du 27 juin 2023, l’OCPM a refusé de prolonger l’autorisation de séjour en faveur de Mme A______ et de délivrer un titre de séjour en faveur de son fils, a prononcé leur renvoi et leur a imparti un délai au 26 septembre 2023 pour quitter la Suisse.

Les conditions de l’art. 27 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) n’étaient pas remplies. Le cancer de la précitée étant en rémission et les traitements y relatifs étant terminés depuis 2021, sa capacité d’études était pleine et entière dès ce moment-là. Or, ce n’était qu’en mai 2022 qu’elle avait repris des cours de français intensifs. Elle avait donc disposé de trente mois, soit le double du temps initialement prévu dans son plan d’études, pour atteindre le niveau de français requis. En outre, elle ne disposait pas de moyens financiers suffisants puisqu’elle émargeait à l’aide sociale.

Les critères du cas de rigueur n’étaient pas davantage réalisés. Elle dépendait de l’aide sociale depuis trois ans et demie, alors même qu’elle était entrée en Suisse au bénéfice d’une garantie de prise en charge financière par un tiers d’une durée de cinq ans. Désormais en bonne santé, rien ne laissait à penser qu’elle se retrouverait dans une situation médicale précaire en cas de retour en Albanie. Dans l’hypothèse où un éventuel traitement serait nécessaire, rien ne démontrait qu’il n’y serait pas disponible.

Elle ne pouvait enfin pas se prévaloir de l’art. 8 CEDH. Nonobstant la longue suspension de l’instruction de sa requête, aucune démarche n’avait été entreprises pour établir la filiation paternelle de son fils et il n’avait pas été démontré que le potentiel père avait des liens économiques et/ou affectifs avec cet enfant. Quant à ce dernier - non scolarisé et en bonne santé - sa réintégration dans son pays d’origine ne devrait pas poser de problèmes insurmontables.

20.         Par acte du 28 juillet 2023, Mme A______ a interjeté recours, sous la plume de son conseil, à l’encontre de cette décision devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant, préalablement, à la suspension de la procédure jusqu’à droit connu sur la procédure civile en constatation de paternité formée le 13 juin 2023 à l’encontre de M. K______ et, principalement, à son annulation et à la prolongation de son titre de séjour et à l’octroi d’un tel titre en faveur de son fils, sous suite de frais et dépens. Elle a également sollicité la comparution personnelle des parties.

La suspension requise était nécessaire. En effet, dès que M. K______, « présumé suisse et, à tout le moins, au bénéfice d’un permis d’établissement », serait reconnu comme étant le père de son fils, tant cet enfant qu’elle-même ne pourraient être renvoyés.

Les conditions d’une autorisation de séjour pour formation étaient remplies. Le fait qu’elle avait bénéficié antérieurement d’une telle autorisation afin de suivre un Master en sciences infirmières démontrait qu’elle répondait aux critères posés par l’art. 27 al. 1 let. a LEI. Elle disposait en outre d’un logement approprié. Elle pouvait également se prévaloir de moyens financiers suffisants, étant précisé qu’après avoir effectué un stage d’une année, était actuellement en recherche active d’un nouvel emploi et que ses amis à Genève la soutenaient financièrement. Sa formation antérieure lui permettait de suivre le plan d’études qu’elle s’était fixé. Le traitement médical relatif à son cancer ayant pris fin le 22 novembre 2021, elle s’était inscrite en mai 2022, après s’être entièrement remise de ce traitement, à des cours de français intensifs, pour compenser le temps perdu en raison de sa maladie. Ce suivi intensif, nonobstant sa grossesse, démontrait sa motivation à respecter son plan d’études et son assiduité à suivre sa formation.

Son renvoi et celui de son fils contreviendraient à l’art. 8 CEDH. Cet enfant était, en effet, présumé suisse si son père l’était. Dans cette hypothèse, dès lors qu’elle entretenait de fortes relations avec son fils, elle ne pourrait pas elle-même être renvoyée. Il en irait de même si le père de son fils devait être au bénéfice d’une autorisation d’établissement, un tel titre devant alors être octroyé à cet enfant, dont le renvoi serait impossible, tout comme le sien propre. Enfin, n’ayant commis aucune infraction, elle ne présentait pas une menace pour la Suisse.

Plusieurs documents étaient joints, notamment :

-          la requête en constatation de paternité adressée le 13 juin 2023 au Tribunal de première instance, à teneur de laquelle M. K______ n’avait pas souhaité reconnaître son fils, dont il contestait être le père, et exerçait une pression psychologique sur sa famille et sur elle-même ;

-          une attestation du N______ du 26 juillet 2023 indiquant que B______ était suivi, avec sa mère, à la consultation pédopsychiatrique périnatale des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) depuis sa naissance. Cette dernière, qui bénéficiait d’un soutien dans un contexte de monoparentalité, s’était montrée investie et régulière au cours du suivi, dont la poursuite était souhaitée afin de veiller au bon développement psycho-moteur et cognitif de l’enfant et

-          une attestation d’inscription auprès de l’école C______ en vue de suivre des cours de français intensifs à hauteur de vingt heures hebdomadaires dès le 7 juin 2022 pour obtenir le diplôme DELF B2, la durée des études prévue étant d’un an, soit jusqu’à fin juin 2023.

21.         Dans ses observations du 11 août 2023, l’OCPM a conclu au rejet du recours.

Tout en confirmant que les conditions d’un titre de séjour pour formation ou pour cas de rigueur n’étaient pas remplies, il a précisé que le seul dépôt d’une action en paternité contre un tiers dont la recourante alléguait qu’il serait le père de son enfant ne justifiait pas la suspension de la présente procédure. L’invocation de l’art. 8 CEDH tombait à faux, le fils de la recourante n’ayant juridiquement pas de père bénéficiant d’un droit de séjour durable en Suisse avec lequel il entretiendrait des relations personnelles et économiques étroites.

22.         Par courrier du 15 août 2023, le tribunal a informé les parties que la demande de suspension de la procédure était refusée, les conditions y relatives n’étant pas réalisées.

23.         Par pli du 1er septembre 2023, la recourante a transmis au tribunal copie de la demande d’assistance juridique adressée au Greffe de l’assistance juridique, à teneur de laquelle elle n’exerçait aucune activité professionnelle, étant précisé qu’elle avait récemment perdu son emploi et en recherchait un autre, de sorte qu’elle émargeait pour l’instant à l’aide sociale. Elle ne percevait aucune pension alimentaire pour son fils et ne possédait pas de véhicule. Ses ressources financières mensuelles se montaient à CHF 3'134.- (HG) et CHF 300.- (allocations familiales).

24.         Dans le délai prolongé à deux reprises, la recourante a, par réplique du 30 octobre 2023, persisté dans ses conclusions.

L’exécution de son renvoi et de celui de son fils n’était pas raisonnablement exigible, dans la mesure où elle les mettrait tous deux en danger. M. K______ et plusieurs amis de ce dernier l’avait menacée à maintes reprises durant sa grossesse afin qu’elle avorte et lui avaient même proposé de l’emmener au Kosovo pour ce faire. Elle s’était vue offrir par M. K______ CHF 20'000.- pour avorter, la moitié lui étant due lors de son départ pour le Kosovo et la seconde lorsque l’avortement aurait été finalisé. Ce dernier étant marié et père de famille, il ne souhaitait pas reconnaître B______ ni même le voir et refusait de répondre à ses messages. Comme démontré par les traductions libres en français de différents messages reçus par ses soins de la part de M. K______, ce dernier, en sus de nombreuses insultes, l’avait notamment menacée en ces termes : « […] T’as intérêt à répondre car je finirai par te retrouver T’as meilleur temps d’aller te suicider Tu vas vraiment le regretter », « […] disparais sinon je vais te niquer ta race et arrête de m’écrire sale race de merde » puis « Je vais te niquer ta race pute que tu es et arrête de m’écrire ». En outre, durant la semaine du 18 septembre 2023, la police lui avait indiqué que sa voiture avait été retrouvée accidentée suite, vraisemblablement, à un acte volontaire. Elle craignait en outre que M. K______, qui possédait une arme, s’en prenne physiquement à elle comme cela avait été le cas par le passé, ou à son fils. Cet homme, ainsi que ses proches au Kosovo, avaient également menacé à plusieurs reprises sa famille au Kosovo. Ainsi, leur renvoi de Suisse impliquerait une « atteinte sérieuse » à son intégrité physique et à celle de son fils. En effet, elle ne serait pas protégée au Kosovo et si l’épouse ou la famille de M. K______ apprenaient l’existence d’un enfant adultérin, il en découlerait de lourdes conséquences pour elle. Enfin, elle avait désormais été engagée, à compter du 29 septembre 2023, en tant que serveuse à temps plein au restaurant O______ pour un revenu mensuel brut de CHF 4'225.-.

Étaient notamment joints :

-          un courrier manuscrit de quatre pages rédigé en langue étrangère, sans mention de son auteur ni de la date de rédaction, comportant quelques phrases dactylographiées en français ainsi que des échanges WhatsApp en langue étrangères accompagnés de traductions libres en français, reprenant en substance les éléments exposés par la recourante dans sa réplique s’agissant de la teneur des messages que lui avaient adressés M. K______ et

-          une photographie de la carrosserie d’un véhicule endommagée au niveau de la portière.

25.         Par duplique du 20 novembre 2023 accompagnée d’une copie de l’autorisation provisoire de travail délivrée à P______ Sàrl en faveur de la recourante le 20 novembre 2023, l’OCPM a persisté dans ses conclusions, tout en précisant que l’inexigibilité du renvoi de la recourante et de son fils, en sus de n’être invoquée qu’au stade de la réplique, n’avait nullement été démontrée.

26.         Par pli du 29 novembre 2023, l’OCPM a notamment transmis au tribunal un formulaire de prise d’emploi établi le 21 novembre 2023 par Q______ SA en vue d’engager à temps plein, dès le 1er décembre 2023, la recourante en qualité de serveuse moyennant un salaire mensuel brut de CHF 3'582.- ainsi que le contrat de travail et l’autorisation de travail provisoire y relatifs délivrée le 28 novembre 2023.

EN DROIT

1.             Le tribunal connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l’OCPM relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             La recourante sollicite la comparution personnelle des parties.

4.             Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) comprend notamment le droit, pour l'intéressé, de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d'avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 142 II 218 consid. 2.3 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités). Toutefois, ce droit ne peut être exercé que sur les éléments qui sont déterminants pour décider de l'issue du litige. Il est ainsi possible de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes, lorsque le fait dont les parties veulent rapporter l'authenticité n'est pas important pour la solution du cas, lorsque les preuves résultent déjà de constatations versées au dossier ou lorsque le juge parvient à la conclusion qu'elles ne sont pas décisives pour la solution du litige ou qu'elles ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_576/2021 du 1er avril 2021 consid. 3.1 ; 2C_946/2020 du 18 février 2021 consid. 3.1 ; 1C_355/2019 du 29 janvier 2020 consid. 3.1).

Par ailleurs, le droit d'être entendu ne comprend pas celui d'être entendu oralement (cf. not. art. 41 in fine LPA ; ATF 140 I 68 consid. 9.6.1 ; 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_668/2020 du 22 janvier 2021 consid. 3.3 ; 2C_339/2020 du 5 janvier 2021 consid. 4.2.2 ; ATA/672/2021 du 29 juin 2021 consid. 3b) ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 130 II 425 consid. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_725/2019 du 12 septembre 2019 consid. 4.1 ; 2C_1004/2018 du 11 juin 2019 consid. 5.2.1).

5.             En l'espèce, le tribunal estime que la recourante a eu la possibilité de faire valoir ses arguments par le biais des écritures usuelles et de produire tout moyen de preuve qu’elle estimait utile en annexe de celles-ci. Ainsi, il convient de retenir que le dossier contient les éléments suffisants et nécessaires, tels qu'ils ressortent des écritures des parties, des pièces produites et du dossier de l'autorité intimée, pour statuer sur le litige. Quant à certaines allégations de la recourante qui, comme il le sera constaté dans le cadre de l’examen du litige sur le fond ci-après, demeurent non démontrées à ce jour, le tribunal considère, par le biais d’une appréciation anticipée des preuves, que sa comparution personnelle ne serait en tout état pas déterminante, de sorte qu’il n’apparaît pas nécessaire d’y procéder.

Par conséquent, la demande d'instruction, en soi non obligatoire, sera rejetée.

6.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

7.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

8.             Selon la maxime inquisitoire, qui prévaut en particulier en droit public, l'autorité définit les faits pertinents et ne tient pour existants que ceux qui sont dûment prouvés. Elle ne dispense pas pour autant les parties de collaborer à l'établissement des faits ; il incombe à celles-ci d'étayer leurs propres thèses, de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuves disponibles, spécialement lorsqu'il s'agit d'élucider des faits qu'elles sont le mieux à même de connaître (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 4.1 ; 2C_1156/2018 du 12 juillet 2019 consid. 3.3).

Lorsque les preuves font défaut ou s'il ne peut être raisonnablement exigé de l'autorité qu'elle les recueille pour les faits constitutifs d'un droit, le fardeau de la preuve incombe à celui qui entend se prévaloir de ce droit (cf. ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_27/2018 du 10 septembre 2018 consid. 2.2 ; 1C_170/2011 du 18 août 2011 consid. 3.2 et les réf. citées ; ATA/99/2020 du 28 janvier 2020 consid. 5b). Il appartient ainsi à l'administré d'établir les faits qui sont de nature à lui procurer un avantage et à l'administration de démontrer l'existence de ceux qui imposent une obligation en sa faveur (ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4a ; ATA/1155/2018 du 30 octobre 2018 consid. 3b.

Par ailleurs, en procédure administrative, tant fédérale que cantonale, la constatation des faits est gouvernée par le principe de la libre appréciation des preuves (art. 20 al. 1 2ème phr. LPA ; ATF 139 II 185 consid. 9.2 ; 130 II 482 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_668/2011 du 12 avril 2011 consid. 3.3 ; ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4b). Le juge forme ainsi librement sa conviction en analysant la force probante des preuves administrées et ce n'est ni le genre, ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4b et les arrêts cités).

9.             La LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (cf. art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants albanais.

10.         La décision attaquée refuse tout d’abord la délivrance d’un titre de séjour pour formation en faveur de la recourante.

11.         Selon l'art. 27 al. 1 LEI, un étranger peut être admis en vue d'une formation ou d'une formation continue aux conditions suivantes : la direction de l'établissement confirme qu'il peut suivre la formation ou la formation continue envisagées (let. a) ; il dispose d'un logement approprié (let. b) ; il dispose des moyens financiers nécessaires (let. c) ; il a le niveau de formation et les qualifications personnelles requis pour suivre la formation ou le perfectionnement prévus (let. d). Selon l'art. 23 al. 2 OASA, les qualifications personnelles sont suffisantes notamment lorsqu'aucun séjour antérieur, aucune procédure de demande antérieure, ni aucun autre élément n'indique que la formation ou le perfectionnement invoqués visent uniquement à éluder les prescriptions générales sur l'admission et le séjour des étrangers (cf. ATA/1035/2019 du 18 juin 2019 consid. 8b).

Les conditions de l’art. 27 al. 1 LEI étant cumulatives, une autorisation de séjour pour l'accomplissement d'une formation ne saurait être délivrée que si l'étudiant étranger satisfait à chacune d'elles (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-1359/2010 du 1er septembre 2010 consid. 5.3 ; ATA/899/2022 du 6 septembre 2022 consid. 4b ; ATA/1096/2021 du 19 octobre 2021 consid. 2c). Cela étant, l'autorité cantonale compétente dispose d'un large pouvoir d'appréciation, l'étranger ne bénéficiant pas d'un droit de séjour en Suisse fondé sur l'art. 27 LEI (arrêts du Tribunal fédéral 2D_49/2015 du 3 septembre 2015 consid. 3, ATA/1035/2019 du 18 juin 2019 consid. 8e).

12.         En l’espèce, force est de constater que la condition posée à l’art. 27 al. 1 let. a LEI n’est pas remplie. La recourante n’a pas démontré être actuellement inscrite auprès d’un centre de formation, notamment l’école C______. En effet, la dernière attestation d’inscription auprès de cette école figurant au dossier date de juin 2022 et prévoit une obtention du diplôme de français visé fin juin 2023. Aucun élément ne laisse à penser que la recourante fréquenterait toujours cet établissement à ce jour, ni même d’ailleurs qu’elle aurait finalement obtenu ce diplôme, étant précisé que cette dernière supporte, à ce propos, le fardeau de la preuve. Au contraire, le fait qu’elle exerce, à teneur des contrats de travail produits en faveur d’P______ Sàrl puis de Q______ SA, une activité lucrative à temps plein depuis septembre 2023 implique qu’elle n’a vraisemblablement pas pu poursuivre ses cours intensifs de français, qui se montaient, selon l’attestation de juin 2022 précitée, à vingt heures hebdomadaires. Partant, faute d’avoir démontré être actuellement inscrite auprès d’un institut de formation en vue d’obtenir un quelconque diplôme, le refus de l’autorité intimée de prolonger le titre de séjour pour formation de la recourante en prête pas le flanc à la critique.

13.         La décision attaquée retient également l’absence de cas de rigueur s’agissant de la recourante et de son fils.

14.         Il est notamment possible de déroger aux conditions d'admission dans le but de tenir compte des cas individuels d'extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs (art. 30 al.1 let. b LEI).

15.         L'art. 31 al. 1 OASA, qui fixe les critères déterminants pour la reconnaissance d’un cas individuel d’une extrême gravité au sens de la disposition légale précitée, prévoit que lors de l’appréciation d’un cas d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant sur la base des critères d’intégration définis à l’art. 58a al. 1 LEI (let. a), de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de la situation financière (let. d), de la durée de la présence en Suisse (let. e), de l'état de santé (let. f), ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g).

16.         Il ressort de la formulation de l'art. 30 al. 1 let. b LEI, qui est rédigé en la forme potestative, que l'étranger n'a aucun droit à l'octroi d'une dérogation aux conditions d'admission pour cas individuel d'une extrême gravité et, partant, à l'octroi (respectivement au renouvellement ou à la prolongation) d'une autorisation de séjour fondée sur cette disposition (cf. ATF 138 II 393 consid. 3.1 et ATF 137 II 345 consid. 3.2.1). Aussi, conformément à la pratique et à la jurisprudence constantes en la matière, les conditions mises à la reconnaissance d'une situation d'extrême gravité doivent être appréciées de manière restrictive. Il est nécessaire que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Cela signifie que ses conditions de vie et d'existence, comparées à celles applicables à la moyenne des étrangers, doivent être mises en cause de manière accrue, autrement dit qu'une décision négative prise à son endroit comporte pour lui de graves conséquences. Lors de l'appréciation d'un cas de rigueur, il y a lieu de tenir compte de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce. La reconnaissance d'une situation d'extrême gravité n'implique pas forcément que la présence de l'étranger en Suisse constitue l'unique moyen pour échapper à une situation de détresse. Par ailleurs, le fait que l'étranger ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu'il s'y soit bien intégré (au plan professionnel et social) et que son comportement n'ait pas fait l'objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas individuel d'extrême gravité ; encore faut-il que la relation de l'intéressé avec la Suisse soit si étroite qu'on ne puisse exiger de lui qu'il aille vivre dans un autre pays, notamment dans son pays d'origine.

L'art. 30 al. 1 let. b LEI n'a pas pour but de soustraire le requérant aux conditions de vie de son pays d'origine, mais implique qu'il se trouve personnellement dans une situation si grave qu'on ne peut exiger de sa part qu'il tente de se réadapter à son existence passée. Des circonstances générales affectant l'ensemble de la population restée sur place, en lien avec la situation économique, sociale, sanitaire ou scolaire du pays en question, et auxquelles le requérant serait également exposé à son retour ne sauraient davantage être prises en considération, tout comme des données à caractère structurel et général, telles que les difficultés d'une femme seule dans une société donnée (ATF 123 II 125 consid. 5b/dd ; arrêt du Tribunal fédéral 2A.245/2004 du 13 juillet 2004 consid. 4.2.1). Au contraire, dans la procédure d'exemption des mesures de limitation, seules des raisons exclusivement humanitaires sont déterminantes, ce qui n'exclut toutefois pas de prendre en compte les difficultés rencontrées par le requérant à son retour dans son pays d'un point de vue personnel, familial et économique (ATF 123 II 125 consid. 3 ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8 ; ATA/1131/2017 du 2 août 2017 consid. 5e).

La question n'est donc pas de savoir s'il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d'examiner si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises (arrêt du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; ATA/92/ 2020 du 28 janvier 2020 consid.4f).

17.         Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d’un cas d’extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse et la situation de ses enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d'études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n'arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l'aide sociale ou des liens conservés avec le pays d'origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-2584/2019 du 11 décembre 2019 consid. 5.3 ; F-6510/2017 du 6 juin 2019 consid. 5.6).

18.         La durée totale du séjour constitue un critère important de reconnaissance d'un cas de rigueur. Il importe cependant de rappeler que selon la jurisprudence applicable en la matière, le simple fait pour un étranger de séjourner en Suisse pendant de longues années ne permet pas d'admettre un cas personnel d'une extrême gravité. En outre, la durée d'un séjour illégal, ainsi qu'un séjour précaire ne doivent normalement pas être pris en considération ou alors seulement dans une mesure très restreinte (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-4145/2017 du 10 octobre 2018 consid. 5.1 et les références citées).

Lorsqu'une personne a passé toute son enfance, son adolescence et le début de sa vie d'adulte dans son pays d'origine, il y reste encore attaché dans une large mesure. Son intégration au milieu socioculturel suisse n'est alors pas si profonde et irréversible qu'un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet. Il convient de tenir compte de l'âge du recourant lors de son arrivée en Suisse, et au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, de la situation professionnelle, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d'exploiter ses connaissances professionnelles dans le pays d'origine (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-646/2015 du 20 décembre 2016 consid. 5.3).

19.         Doivent également être pris en compte l'existence d'une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse ou le fait que l'intéressé démontre souffrir d'une sérieuse atteinte à la santé qui nécessite, pendant une longue période, des soins permanents ou des mesures médicales ponctuelles d'urgence, indisponibles dans le pays d'origine, de sorte qu'un départ de Suisse serait susceptible d'entraîner de graves conséquences pour sa santé (cf. ATF 128 II 200 consid. 5.3 ; ATA/645/2013 du 1er octobre 2013). Il sied de rappeler à cet égard que les motifs médicaux constituent avant tout un obstacle à l'exécution du renvoi et qu'une personne qui ne peut se prévaloir que d'arguments d'ordre médical ne se distingue pas de ses compatriotes restés dans son pays d'origine et souffrant de la même maladie (cf. notamment les arrêts du Tribunal administratif fédéral F-4125/2016 du 26 juillet 2017 consid. 5.4.1; C-770/2015 du 16 octobre 2015 consid. 5.3, C-5450/2011 du 14 décembre 2012 consid. 6.4 et C-5560/2015 du 6 janvier 2016 et références citées).

20.         Il doit également être tenu compte de l’art. 3 par. 1 CDE, qui impose d’accorder une importance primordiale à l’intérêt supérieur de l’enfant (arrêt du Tribunal fédéral 2C_639/2012 du 13 février 2013 consid. 4.3). Les dispositions de la CDE ne font toutefois pas de l’intérêt de l’enfant un critère exclusif, mais un élément d’appréciation, dont l’autorité doit tenir compte lorsqu’il s’agit de mettre en balance les différents intérêts en présence, étant relevé que les dispositions de cette convention ne confèrent aucune prétention directe à l’octroi d’une autorisation de séjour (ATF 139 I 315 consid. 2.4).

21.         L'art. 8 par. 1 CEDH peut être invoqué par un ressortissant étranger pour s'opposer à une séparation d'avec sa famille et obtenir une autorisation de séjour en Suisse à la condition qu'il entretienne des relations étroites, effectives et intactes avec un membre de celle-ci disposant d'un droit de présence assuré en Suisse, ce qui suppose que celui-ci ait la nationalité suisse ou qu'il soit au bénéfice d'une autorisation d'établissement ou d'un droit certain à une autorisation de séjour (ATF 135 I 143 consid. 1.3.1 ; 130 II 281 consid. 3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_1023/2016 du 11 avril 2017 consid. 5.1).

Les relations familiales qui, sous cet angle, peuvent fonder un droit à une autorisation de police des étrangers sont avant tout celles qui concernent la famille dite nucléaire, soit celles qui existent entre époux, ainsi qu'entre parents et enfants mineurs vivant en ménage commun (ATF 140 I 77 consid. 5.2 ; 137 I 113 consid. 6.1 ; 135 I 143 consid. 1.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_293/2018 du 5 octobre 2018 consid. 1.4).

22.         Sous l'angle étroit de la protection de la vie privée, l'art. 8 CEDH ouvre le droit à une autorisation de séjour, mais à des conditions restrictives, l'étranger devant établir l'existence de liens sociaux et professionnels spécialement intenses avec la Suisse, notablement supérieurs à ceux qui résultent d'une intégration ordinaire (cf. not. ATF 130 II 281 consid. 3.2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_255/2020 du 6 mai 2020 consid. 1.2.2 ; 2C_498/2018 du 29 juin 2018 consid. 6.1).

Lorsque l'étranger réside légalement depuis plus de dix ans en Suisse, il y a lieu de partir de l'idée que les liens sociaux qu'il y a développés sont suffisamment étroits pour qu'il bénéficie d'un droit au respect de sa vie privée ; lorsque la durée de la résidence est inférieure à dix ans, mais que l'étranger fait preuve d'une forte intégration en Suisse, le refus de prolonger ou la révocation de l'autorisation de rester en Suisse peut également porter atteinte au droit au respect de la vie privée (ATF 144 I 266 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_603/2019 du 16 décembre 2019 consid. 6.2 ; 2C_459/2019 du 17 mai 2019 consid. 3.1).

Les années passées en Suisse dans l'illégalité ou au bénéfice d'une simple tolérance - par exemple en raison de l'effet suspensif attaché à des procédures de recours - ne sont pas déterminantes (ATF 137 II 1 consid. 4.3 ; 134 II 10 consid. 4.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_603/2019 du 16 décembre 2019 consid. 6.2 ; 2C_436/2018 du 8 novembre 2018 consid. 2.2).

23.         Dans le cadre de l'exercice de leur pouvoir d'appréciation, les autorités compétentes doivent tenir compte des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger, ainsi que de son degré d'intégration (art. 96 al. 1 LEI).

24.         En l’espèce, il ressort du dossier que la recourante est arrivée en Suisse le 20 décembre 2017 au bénéfice d’une autorisation de séjour pour études, dont la validité est arrivée à échéance le 31 juillet 2020. S’agissant de ce titre de séjour, il sera rappelé qu’il était, par essence, temporaire, jusqu’à l’obtention, dans le délai convenu, du diplôme visé. La recourante ne pouvait d’ailleurs ignorer ce caractère temporaire dès lors qu’elle a signé, le 13 mars 2018, un engagement à quitter la Suisse au terme de ses études. Elle a par la suite séjourné sur le sol helvétique, tout comme son fils à compter de sa naissance, au bénéfice d’une simple tolérance de la part des autorités suite au dépôt de sa demande de titre de séjour en octobre 2020. Partant, son séjour, d’une durée de six ans, effectué sous couvert d’une autorisation temporaire puis d’une simple tolérance, ne saurait être déterminant.

Pour le surplus, l’intégration socioprofessionnelle de la recourante est loin d’être exceptionnelle. Certes, cette dernière ne fait l’objet d’aucune poursuite ni acte de défaut de biens et peut se prévaloir d’un casier judiciaire vierge. Toutefois, à teneur du dossier, elle a bénéficié de prestations complètes de l’HG depuis le 1er décembre 2019. Cette dépendance à l’aide sociale ne saurait s’expliquer, contrairement à ses allégations, par une incapacité d’exercer une activité lucrative en raison de sa maladie, dès lors que ses frais de son séjour pour formation devaient - en tout état et indépendamment du fait qu’elle exerce ou non une telle activité lucrative - être pris en charge par un tiers à hauteur de CHF 2'540.- par mois durant cinq ans, soit jusqu’en février 2023, conformément à l’attestation de prise en charge financière jointe à sa demande de permis de séjour pour études. En outre, l’activité rémunérée de serveuse, qu’elle exerce à temps plein depuis environ quatre mois, ne saurait conduire à la conclusion qu’elle aurait fait montre d’une réussite professionnelle remarquable ou acquis en Suisse des connaissances professionnelles si spécifiques qu’elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays. Il n’a pas été démontré qu’elle maîtriserait désormais le français ni qu’elle aurait tissé des liens amicaux particuliers dans le canton, y posséderait des membres de sa famille en sus de son fils ou y aurait fait preuve d’une intégration sociale particulière.

De plus, arrivée en Suisse à l’âge de 24 ans, la recourante a passé son enfance et son adolescence, périodes décisives pour la formation de la personnalité, ainsi que le début de sa vie d’adulte et la majorité de son existence dans son pays d’origine. Partant, force est de constater qu’elle en maîtrise la langue ainsi que les us et coutumes. En outre, il ressort des documents produits par ses soins en annexe de sa demande de permis de séjour pour études qu’elle a effectué toute sa scolarité en Albanie, laquelle s’est soldée par l’obtention d’un Bachelor en infirmerie délivré en mai 2016 par une université albanaise. De plus, à teneur de son curriculum vitae, elle a travaillé auprès d’une société immobilière de 2011 à 2015 puis dans le département de pédiatrie d’un hôpital dans son pays de 2013 à 2016. Ainsi, elle y a forcément conservé des attaches et le fait qu’elle ait déjà été intégrée sur le marché de l’emploi albanais durant cinq ans et bénéficie d’un titre universitaire dans ce pays devrait y faciliter sa réintégration professionnelle.

Par conséquent, il convient de retenir, sans toutefois minimiser la période d’adaptation qui sera certainement nécessaire à la recourante, que cette dernière, actuellement âgée de 30 ans devrait normalement être en mesure de se réintégrer au Kosovo sans rencontrer d’obstacles insurmontables avec l’aide, si nécessaire, des structures locales de soutien cas échéant, étant rappelé que le fait que la situation socio-économique en Albanie soit plus difficile qu'en Suisse ou que ce premier pays ne bénéficie pas des mêmes structures d’aide aux mêmes conditions qu’en Suisse ne constitue pas en soi un motif permettant de retenir un cas d'extrême gravité. À cet égard, il convient en effet de ne pas confondre le fait que la recourante préférerait poursuivre son existence en Suisse avec la question de savoir si cette dernière serait capable de se réintégrer en Albanie avec son fils.

Quant à son état de santé, qui ne saurait en tout état, conformément à la jurisprudence citée supra, justifier à lui seul la reconnaissance d’un cas de rigueur, il sera examiné ci-après sous l’angle de l’existence d’éventuels obstacles à son renvoi, étant quoi qu’il en soit relevé que la recourante ne bénéficie plus d’aucun traitement médical depuis plusieurs années, à teneur des éléments au dossier.

S’agissant enfin du fils de la recourante actuellement âgé d’1 an, au vu de son très jeune âge et du fait qu’il n’est pas encore scolarisé, il ne peut être retenu qu’il aurait fait preuve en Suisse d’une intégration particulière. En outre, compte tenu de la capacité d’adaptation des jeunes enfants, il apparaît qu’un déménagement, en compagnie de sa mère qui s’occupe de lui depuis sa naissance et dont elle est, selon ses explications, très proche, dans le pays d’origine de cette dernière, présenterait des obstacles insurmontables pour lui.

Dans ces circonstances, le tribunal considère que l'autorité intimée n'a pas mésusé de son pouvoir d'appréciation en estimant que la recourante et son fils ne satisfaisaient pas aux conditions restrictives prévues pour la reconnaissance d'un cas de rigueur.

25.         La recourante ne peut pas davantage se prévaloir d’une violation de son droit au respect de sa vie familiale et/ou de celle de son fils. En effet, aucun élément au dossier ne démontre l’existence d’un quelconque lien de filiation entre son fils et un ressortissant suisse, respectivement un ressortissant étranger titulaire d’un droit de séjour sur le sol helvétique pouvant être considéré comme durable au sens de la jurisprudence applicable. Ainsi, ses allégations selon lesquelles M. K______ serait le père de son fils demeurent non prouvées à ce jour. Il en va en outre de même du statut administratif de cet homme en Suisse. Enfin et en tout état, quand bien même il en irait différemment, ce dernier n’a aucune relation, tant économique que personnelle, avec cet enfant, qu’il refuse de voir et dont il n’accepte pas l’existence, selon les propres explications de la recourante. Partant, le lien étroit, effectif et intact avec un membre de la famille disposant d’un droit de présence assuré en Suisse exigé par la jurisprudence en vue de l’application de l’art. 8 CEDH ne serait de toute manière pas réalisé.

26.         En outre, dès lors que le séjour légal de la recourante en Suisse a duré moins de dix ans, que son intégration sur le sol helvétique n’apparaît, au surplus, pas exceptionnelle comme vu ci-dessus, et que son fils, âgé d’un an, vit en Suisse depuis sa naissance au bénéfice d’un simple tolérance durant l’examen du bien-fondé de la requête de titre de séjour déposée par ses soins, la précitée ne saurait tirer bénéfice de l’art. 8 CEDH sous l’angle du respect du droit à sa vie privée et à celle de son fils (cf. not. arrêt du Tribunal fédéral 2C_919/2019 du 25 février 2020 consid. 7).

27.         Il ressort de ce qui précède que l'OCPM n'a violé ni le droit constitutionnel, ni le droit fédéral, ni encore excédé ou abusé de son pouvoir d'appréciation (art. 96 LEI) en refusant de délivrer l’autorisation de séjour sollicitée.

28.         Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, les autorités compétentes rendent une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel une autorisation est refusée ou dont l'autorisation, bien que requise, est révoquée ou n'est pas prolongée après un séjour autorisé.

Le renvoi constitue la conséquence logique et inéluctable du rejet d'une demande tendant à la délivrance ou la prolongation d'une autorisation de séjour, l'autorité ne disposant à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation (ATA/1118/2020 du 10 novembre 2020 consid. 11a).

29.         La recourante se prévaut, dans le cadre de sa réplique, de l’inexigibilité de son renvoi et de celui de son fils.

30.         Selon l'art. 83 LEI, le SEM décide d'admettre provisoirement l'étranger si l'exécution du renvoi ou de l'expulsion n'est pas possible, n'est pas licite ou ne peut être raisonnablement exigée (al. 1). L'exécution n'est pas possible lorsque l'étranger ne peut pas quitter la Suisse pour son État d'origine, son État de provenance ou un État tiers, ni être renvoyé dans un de ces États (al. 2). L'exécution n'est pas licite lorsque le renvoi de l'étranger dans son État d'origine, dans son État de provenance ou dans un État tiers est contraire aux engagements de la Suisse relevant du droit international (al. 3). L'exécution de la décision peut ne pas être raisonnablement exigée si le renvoi ou l'expulsion de l'étranger dans son pays d'origine ou de provenance le met concrètement en danger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (al. 4).

31.         L’art. 83 al. 3 LEI vise notamment l'étranger pouvant démontrer qu'il serait exposé à un traitement prohibé par l'art. 3 CEDH ou l'art. 3 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants du 10 décembre 1984 (Conv. torture - RS 0.105 ; ATA/1004/2021 du 28 septembre 2021 consid. 4a ; ATA/997/2020 du 6 octobre 2020 consid 6a et les arrêts cités).

Pour apprécier l'existence d'un risque réel de mauvais traitements, il convient d'appliquer des critères rigoureux. Il s'agit de rechercher si, eu égard à l'ensemble des circonstances de la cause, il y a des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé, si on le renvoie dans son pays, y courra un risque réel d'être soumis à un traitement contraire à l'art. 3 CEDH (cf. arrêts du Tribunal fédéral 6B_908/2019 du 5 novembre 2019 consid. 2.1.2 et les références citées ; 2D_55/2015 du 9 mai 2016 consid. 4.1).

Le retour forcé d'une personne touchée dans sa santé est susceptible de constituer une violation de l'art. 3 CEDH si elle se trouve à un stade de sa maladie avancé et terminal, au point que sa mort apparaît comme une perspective proche. Il s'agit de cas très exceptionnels, en ce sens que la personne concernée doit connaître un état à ce point altéré que l'hypothèse de son rapide décès après le retour confine à la certitude et qu'elle ne peut espérer un soutien d'ordre familial ou social. Un tel cas exceptionnel peut aussi être reconnu lorsqu'il existe des motifs sérieux de croire qu'en l'absence d'un traitement ou d'accès à un traitement, se fait jour un risque réel que la personne renvoyée soit exposée à un déclin grave, rapide et irréversible de son état de santé, lequel entraînerait des souffrances intenses ou une réduction significative de l'espérance de vie (cf. arrêt du Tribunal administratif fédéral E-1236/2022 du 30 mars 2022).

32.         L'art. 83 al. 4 LEI s'applique en premier lieu aux « réfugiés de la violence », soit aux étrangers qui ne remplissent pas les conditions de la qualité de réfugié parce qu'ils ne sont pas personnellement persécutés, mais qui fuient des situations de guerre, de guerre civile ou de violence généralisée, et ensuite aux personnes pour qui un retour reviendrait à les mettre concrètement en danger, notamment parce qu'elles ne pourraient plus recevoir les soins dont elles ont besoin ou qu'elles seraient, selon toute probabilité, condamnées à devoir vivre durablement et irrémédiablement dans un dénuement complet et, ainsi, exposées à la famine, à une dégradation grave de leur état de santé, à l'invalidité, voire à la mort. En revanche, les difficultés socio-économiques qui sont le lot habituel de la population locale, en particulier des pénuries de soins, de logement, d'emploi et de moyens de formation, ne suffisent pas en soi à réaliser une telle mise en danger (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral D-5367/2015 du 24 mars 2020 consid. 8 ; F-838/2017 du 27 mars 2018 consid. 4.3 ; ATA/490/2020 du 19 mai 2020 consid. 11d ; ATA/515/2016 du 14 juin 2016 consid. 6b).

S'agissant plus spécifiquement d’une personne en traitement médical en Suisse, l'exécution du renvoi ne devient inexigible que dans la mesure où elle pourrait ne plus recevoir les soins essentiels garantissant des conditions minimales d'existence, de sorte que son état de santé se dégraderait très rapidement au point de conduire d'une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable, et notablement plus grave de son intégrité physique (ATA/189/2023 du 28 février 2023 consid. 2.2 ; ATA/91/2022 du 1er février 2022 consid. 4 ; ATA/801/2018 du 6 août 2018 consid. 10d et les arrêts cités).

33.         À teneur de l'art. 90 LEI - qui est également applicable en matière d'examen de l'exécutabilité du renvoi (cf. arrêt du Tribunal administratif fédéral F-546/2016 du 13 juin 2017 consid. 4.4) - l'étranger doit collaborer à la constatation des faits déterminants pour son application. Il doit en particulier fournir des indications exactes et complètes sur les éléments déterminants pour la réglementation du séjour et fournir sans retard les moyens de preuves nécessaires ou s'efforcer de se les procurer dans un délai raisonnable (ATF 142 II 265 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-838/2017 du 27 mars 2018 consid. 5.1).

34.         En l’espèce, il ressort des derniers certificats médicaux au dossier que le cancer dont la recourante a souffert est guéri et qu’elle ne nécessite à ce titre plus aucun traitement. Ainsi, son état de santé ne saurait faire échec à l'exécution de son renvoi. Dans le même sens, le fait que son fils soit suivi, selon l’attestation établie le 26 juillet 2023 par le Dr N______, à la consultation pédopsychiatre périnatale des HUG afin qu’elle bénéficie elle-même d’un soutien dans son contexte de monoparentalité, ne saurait constituer un obstacle à leur renvoi. En effet, il ressort de cette attestation que ce suivi constitue une aide à la parentalité de la recourante, rien ne laissant toutefois à penser qu’il serait dû à un problème de santé de cet enfant, ce que la recourante ne prétend d’ailleurs pas. Il n’a en outre pas été démontré que la recourante ne pourrait pas bénéficier de conseils et d’aide s’agissant de son rôle de parent, en cas de besoin, en Albanie.

Quant à ses craintes de représailles, en cas de retour en Albanie, de la part de l’homme dont elle allègue qu’il serait le père de son fils, le tribunal peine à comprendre - même à retenir que les traductions libres en français des messages versés au dossier constitueraient des menaces sérieuses envers sa vie et son intégrité corporelle ou celles de son fils - en quoi tous deux seraient davantage en danger en se trouvant en Albanie, à des milliers de kilomètres de cet homme, qu’en restant en Suisse dans le même pays que celui-ci. Quant à ses allégations selon lesquelles ce dernier s’en serait pris à son véhicule, rien ne démontre que le véhicule - non identifié - apparaissant sur la photographie au dossier lui appartient, étant relevé qu’elle a indiqué dans le formulaire de demande d’assistance judiciaire qu’elle ne possédait aucun véhicule et qu’aucune plainte pénale n’a été déposée par ses soins pour ces faits, à teneur du dossier. Il en va de même des prétendues menaces dont elle expose avoir fait l’objet, qui n’ont vraisemblablement pas débouché sur le dépôt d’une plainte, à teneur du dossier. S’agissant des allégations selon lesquelles la famille de cet homme pourrait attenter à leur sécurité en Albanie, il s’agit en l’état de simples suppositions non démontrées, étant en outre rappelé qu’à ce jour, aucun lien de parenté entre M. K______ et le fils de la recourante n’a été établi. Quoi qu’il en soit et le cas échéant, elle pourrait s’adresser aux autorités policières de son lieu d’origine en cas de besoin.

Par conséquent, eu égard aux développements qui précèdent, l’exécution du renvoi de la recourante et de son fils apparaît licite et raisonnablement exigible. Partant, il sera également confirmé.

35.         En conclusion, entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

36.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante, qui succombe, est condamnée au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

37.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au SEM.

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 28 juillet 2023 par Madame A______, agissant en son nom et celui de son enfant mineur B______, contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 27 juin 2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge de la recourante un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Michèle PERNET

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière