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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2146/2022

JTAPI/1301/2022 du 29.11.2022 ( LDTR ) , REJETE

Descripteurs : TRAVAUX DE CONSTRUCTION;RÉNOVATION D'IMMEUBLE;ÉGALITÉ DE TRAITEMENT
Normes : LDTR.12; Cst.8
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2146/2022 LDTR

JTAPI/1301/2022

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 29 novembre 2022

 

dans la cause

 

A______, représenté par Me Corinne NERFIN, avocate, avec élection de domicile

 

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE

 


EN FAIT

1.             A______ (ci-après : la propriétaire) est propriétaire de l’immeuble sis sur la parcelle n° 1______ de la Commune de B______ (ci-après : la commune), à l’adresse rue du C______ 2______, lequel comprend notamment un appartement de quatre pièces, d’une surface d’environ 82,3 m2, situé au 3ème  étage.

2.             Par requête déposée auprès du département du territoire (ci-après : DT ou le département) le 17 février 2022, la propriétaire a sollicité, par le biais de son mandataire D______ SA (ci-après : la régie), la délivrance d’une autorisation de construire en procédure accélérée portant sur la rénovation de l’appartement précité.

3.             Plusieurs documents étaient joints à cette demande, notamment le formulaire D12 « APA - rénovation/transformation d’un appartement destiné à la location », à teneur duquel les travaux, dont le coût total estimé se montait à CHF 168'287.- toutes taxes comprises, consistaient en : l’expertise relatives aux substances dangereuses (CHF 2’000.-), la réfection complète des peintures (CHF 38'048.-), la réfection des installations électriques (CHF 12'000.-), la fourniture et la pose de carrelages et faïences ainsi que divers piquages (CHF 17'554.-), le remplacement de l’ancien agencement de cuisine (CHF 19'081.-), la réfection des installations sanitaires (CHF 16'131.-), les menuiseries intérieures (CHF 21'486.-), le ponçage et la vitrification des parquets ainsi que la fourniture et la pose de nouveaux parquets (CHF 10'604.-), le contrôle et la réparation des stores intérieurs (CHF  5'859.-), l’entretien de l’installation de chauffage (CHF 4'725.-), le nettoyage de fin de chantier (CHF 800.-) et enfin les divers et imprévus (CHF 800.-). Le loyer actuel net, qui se montait à CHF 13'776.- l’an, soit CHF 3’444.- la pièce l’an, serait porté à CHF 14'112.- l’an après travaux, soit CHF 3'528.- la pièce l’an.

4.             Dans le cadre de l’instruction de cette demande, enregistrée sous le n° APA 3______, diverses instances de préavis ont été consultées et la propriétaire a soumis une version modifiée du projet. Ainsi :

-          Le service LDTR de l’office cantonal du logement et de la planification foncière (ci-après : OCLPF), a requis la production de pièces complémentaires, par préavis du 11 mars 2022, soit les plans existants (en noir) et futurs (en noir ou rouge) dument cotés permettant de calculer le nombre de pièces existantes et futures ainsi que la lettre de résiliation du locataire actuel.

Cette instance s’est ensuite prononcée favorablement sous conditions, par préavis du 12 mai 2022. Les dispositions de la LDTR devraient être respectées. Après travaux, le loyer du logement concerné ne devrait pas excéder CHF 14'112.- par an, soit CHF 3'538.- la pièce l’an, pour une durée de cinq ans à dater de la remise en location après la fin des travaux. Toute modification devrait faire l’objet d’une demande complémentaire. La rubrique « Remarques » précisait encore que les travaux concernés étaient considérés comme des travaux lourds, non-nécessaires, qui modifiaient la typologie en faisant intervenir beaucoup de corps de métier, surtout pour le changement cuisine-chambre qui nécessitait un soin particulier au niveau de la ventilation et des installations sanitaires ;

-          Le 24 février 2022, la police du feu a émis un préavis favorable sous conditions ;

-          Après avoir requis la production de pièces complémentaires dans son préavis du 28 février 2022, le service des monuments et des sites (ci-après : SMS) a émis, le 4 mai 2022, un préavis favorable sous conditions, soit le maintien et la restauration soignée des éléments caractéristiques et dignes d’intérêt au sens de l’art. 83 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) tels que les boiseries, les parquets, les plafonds avec rosace et corniches moulurées, les fenêtres, les portes et les armoires à panneaux ainsi que la porte palière, dont l’amélioration feu devrait être réalisée de l’intérieur et dont la face extérieure devrait être préservée. Les carrelages (cuisine et salle de bain), vraisemblablement d’origine et donc caractéristiques de l’époque de construction du bâtiment, devraient être maintenus ou, si nécessaire, remplacés par un revêtement d’aspect similaire en cohérence avec l’aménagement de l’appartement. Les travaux concernés consistaient en des travaux d’entretien et en une amélioration du confort des locaux sanitaires et de la cuisine impliquant une modification mineure de l’espace du séjour et du réduit ;

-          Suite au préavis du 23 février 2022, par le biais duquel elle a requis la production de pièces complémentaires, soit la procuration des propriétaires, la direction des autorisations de construire (ci-après : DAC) s’est prononcée favorablement sans observations le 22 avril 2022.

5.             Par décision du 31 mai 2022, se référant à la version du projet n° 2 du 11 avril 2022, le DT a délivré l’APA 3______, qui a été publiée dans la feuille d’avis officielle du même jour.

Les conditions figurant dans les préavis du service LDTR du 12 mai 2022, du SMS du 4 mai 2022 et de la police du feu du 24 février 2022 devraient être strictement respectées et faisaient partie intégrante de l’autorisation, étant précisé que les réserves qui y figuraient primaient les plans visés ne varietur.

6.             Par acte du 29 juin 2022, la propriétaire, représentée par la régie, a interjeté recours devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) contre la décision APA 3______ concluant, préalablement, à l’octroi d’un délai pour compléter son recours et produire toute décision rendue par le DT dont il serait fait état dans la cause A/4______ actuellement pendante devant le tribunal et, principalement, à l’annulation de la décision précitée en tant qu’elle ordonnait un contrôle du loyer durant cinq ans et à ce que cette durée soit fixée à trois ans dès la remise en location après la fin des travaux, sous suite de frais et dépens.

L’autorité intimée avait violé l’art. 12 LDTR et excédé son pouvoir d’appréciation en retenant l’existence d’une transformation lourde. Les travaux concernés ne portaient que sur un seul logement de l’immeuble et seule la cloison - située dans le réduit attenant à la future cuisine et séparant l’ancien séjour de la salle de bain, en tout état déjà modifiée par les anciens locataires -, serait rebâtie afin de diminuer la surface dudit réduit à 8,3 m2 au profit du confort et de l’habitabilité de cette future cuisine, dont la surface finale serait portée à 23,3 m2 au lieu de 17,6 m2. Hormis cette modification mineure, la configuration et la typologie des pièces resteraient inchangées, aucun mur porteur n’étant abattu ou modifié et le logement restant un appartement de quatre pièces. Ainsi, seule la cuisine – actuellement située dans la pièce de 10,7 m2 côté cour – et l’agencement de celle-ci seraient déplacés d’une chambre vers l’ancien séjour de 23,3 m2 situé côté rue. Cette permutation avait pour unique effet d’améliorer l’habitabilité du logement, compte tenu de la création d’une chambre côté cour à l’abri des nuisances sonores de la rue à la place de l’ancienne cuisine, et les seuls travaux sur l’ancienne installation consisteraient à condamner les conduites d’alimentation sanitaire existantes, étant précisé que la gaine technique resterait en place pour l’alimentation du WC séparé jouxtant cette pièce. Ce déplacement de la cuisine serait peu impactant dès lors que les raccords sanitaires et électriques nécessaires pourraient être tirés depuis la gaine technique alimentant déjà la salle de bain limitrophe au réduit. Les conduits y relatifs transiteraient par un galandage/doublage du mur créé dans le réduit entre la salle de bain et la future cuisine. Les autres travaux autorisés consistaient en des travaux de rénovation classique englobant des travaux d’entretien et de rénovation. Les parquets seraient en outre conservés, sauf dans l’ancienne cuisine où celui-ci n’était pas présent et serait ajouté, les moulures aux murs seraient entretenues et conservées, tout comme l’installation de chauffage qui serait en outre contrôlée. Toutes les menuiseries intérieures et la serrurerie seraient révisées et les armoires seraient doublées par l’intérieur et conservées en totalité, y compris leurs portes d’époque et leurs poignées et porte palière mise au norme avec conservation du panneau extérieur jugé digne d’intérêt patrimonial par le SMS. L’aspect parfaitement standard de ces travaux avait d’ailleurs conduit ce service à préciser dans son préavis qu’il ne s’agissait pas d’une transformation lourde mais de travaux d’entretien et d’une amélioration du confort des locaux sanitaires et de la cuisine impliquant une modification mineure de l’espace du séjour et du réduit. Ces travaux apparaissaient nécessaires pour améliorer le confort et l’habitabilité du logement, voire indispensables pour remettre en ordre le réduit dont l’aspect bricolé ressortait des photographies au dossier. Cette modification mineure ne pouvait être assimilée à une transformation lourde et la notion de travaux nécessaires fixée par le DT, qui était exorbitante au texte de l’art. 12 LDTR, n’était pas pertinente pour juger de l’aspect lourd ou mineur de la rénovation réalisée. La permutation chambre-cuisine n’entraînerait pas davantage d’interventions de corps de métier que si la configuration initiale était demeurée inchangée.

Une violation du principe d’égalité de traitement était également à déplorer. L’appréciation du DT tendant au contrôle du loyer durant cinq ans dans le présent cas était contraire à la pratique. En effet, dans des situations similaires et en présence de travaux d’importance analogue dans d’autres immeubles lui appartenant, elle s’était vue appliquer une période de blocage de loyer de trois ans, la notion de « transformation lourde » n’ayant pas été retenue. Ainsi, elle avait obtenu, selon les documents joints, le 17 novembre 2020, l’APA 5______ s’agissant de la rénovation d’un appartement de cinq pièces et demie similaire au cas d’espèce et prévoyant un contrôle du loyer de trois ans. De plus, elle avait été autorisée à procéder, le 15 décembre 2020, par le biais de l’APA 6______, à la transformation et la rénovation d’un appartement de six pièces et demie, soit l’installation d’une cuisine dans une alcôve avec une modification mineure des cloisonnements, avec un blocage du loyer pendant trois ans. En outre, prouvait l’existence de décisions disparates et d’une pratique peu uniforme du DT s’agissant de l’appréciation de la notion de transformation lourde et de la durée du blocage de loyer y relative le fait que ce dernier avait été invité, dans le cadre de la procédure de recours pendante A/4______ relative à l’APA 7______ portant sur un appartement de quatre pièces dans le même immeuble que le présent cas, à produire toutes les autorisations de construire délivrées entre novembre 2020 et fin août 2021 dans lesquelles un blocage du loyer de cinq ans avait été ordonné. Les travaux entrepris étaient, dans ce dernier cas, exactement les mêmes que dans la présente cause, avec la permutation de la cuisine d’une chambre à une alcôve, pour un coût total d’environ CHF 140'000.-. Enfin, la décision querellée s’éloignait des jurisprudences rendues en la matière, qui réservaient le blocage du loyer durant cinq ans aux cas de reconstruction à neuf et complète de logements.

7.             Par complément au recours du 14 juillet 2022, la recourante, désormais représentée par un conseil, a persisté dans ses conclusions.

Conformément aux documents annexés, durant la procédure A/8______ relative à la demande d’APA 9______ déposée en juin 2016, le DT avait admis que la rénovation d’un appartement de quatre pièces de 63 m2 pour un coût estimé à CHF 66'840.- sans modification du montant annuel du loyer initial après travaux, ne constituait pas une transformation lourde. Elle s’était également vue délivrer, en mai 2015, l’APA 10______, qui prévoyait un contrôle du loyer durant trois ans, dans le cadre de la rénovation d’un appartement de six pièces de 103 m2, pour un coût estimé à CHF 117'448.-, moyennant des travaux équivalents à ceux concernés par la décision querellée. Partant, rien ne justifiait de soumettre le loyer du logement concerné à un contrôle supérieur à trois ans.

8.             Dans ses observations du 30 août 2022, le DT a conclu au rejet du recours, sous suite de frais.

Aucune violation de l’art. 12 LDTR n’était à déplorer. Les travaux projetés impliquaient la création et la démolition de plusieurs galandages, la fermeture d’ouverture (porte), la démolition d’espaces de rangement, la permutation de l’affectation de plusieurs pièces et le déplacement et l’agrandissement de la cuisine impliquant la réalisation d’un îlot central et de nouveaux branchements aux divers réseaux (électricité, arrivée d’eau froide et chaude, écoulements pour l’évacuation et ventilation mécanique). Les travaux prévus auraient également pour conséquence une augmentation de la puissance électrique et des travaux sur les gaines de ventilation. De plus, le remplacement d’une pièce sèche par une pièce humide - et vice versa - exigeait un travail à nu des surfaces, les revêtements actuels devant être enlevés, tandis que les gaines de réseaux existantes devraient être évacuées. La salle de bain et les toilettes seraient par ailleurs refaites et des éléments y seraient ajoutés (lavabo, WC). En outre, étaient prévus la réfection complète des peintures, de l’ensemble des installations électriques, la pose de nouveaux carrelages et faïences, divers piquages, la pose d’une nouvelle cuisine avec un agencement différent, la réfection totale des sanitaires et des menuiseries intérieures, le ponçage et la vitrification des parquets, la pose de nouveaux revêtements de sol, la réparation des stores intérieurs et l’entretien de l’installation de chauffage. Les travaux concernés portaient donc sur une transformation complète et importante, comme le démontrait le coût estimatif des travaux de plus de CHF 40'000.- par pièce. En outre, toutes les pièces subissaient des travaux, accompagnés pour certains d’un changement de destination. Sa position respectait la lettre, l’esprit et le but de l’art. 12 LDTR, qui était d’éviter des travaux lourds si des travaux moins importants étaient réalisables, afin de limiter leur coût et leur potentiel impact sur les loyers pour que ceux-ci demeurent le plus abordables possible. Au surplus, l’appréciation du SMS n’était pas pertinente quant à l’application de l’art. 12 LDTR, ce service se limitant à examiner le projet sous l’angle de sa politique publique et donc à établir l’impact des travaux sur le patrimoine existant, de sorte qu’elle ne contredisait nullement l’appréciation de l’OCLPF.

Un traitement différencié entre l’autorisation litigieuse et les cas invoqués par la recourante était justifié. S’agissant des APA 5______ et 6______, c’était par mégarde que l’OCLPF avait fixé, dans ses préavis, la période de contrôle à trois  ans au lieu de cinq ans, de sorte que la recourante ne pouvait s’en prévaloir. L’APA 9______ démontrait en outre qu’un contrôle du loyer d’une durée de cinq  ans avait également été ordonné pour des travaux moins importants que ceux litigieux. Concernant cette APA, c’était uniquement par gain de paix durant la procédure de recours qu’il avait consenti à réduire cette durée à trois ans, eu égard au fait qu’il s’agissait d’un cas limite de transformation lourde (hormis la démolition d’une cloison pour ouvrir le séjour sur la cuisine, aucun changement de typologie ni permutation de pièces n’étaient prévus, de sorte que les travaux alors concernés s’apparentaient à une rénovation totale à l’identique, contrairement au présent cas). Les travaux relatifs à cette APA 9______ avaient d’ailleurs coûté CHF 100'000.- de moins que dans le cas litigieux, alors que les deux logements comprenaient chacun quatre pièces. Pour le surplus, le loyer avait également été bloqué durant cinq ans s’agissant de l’APA 7______ (cause A/4______ pendante) qui concernait le même type d’appartement et de travaux que dans le présent cas. Enfin, dans un arrêt illustrant sa réelle pratique et s’appliquant par analogie au cas d’espèce (ATA/260/2014 du 15 avril 2014), la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) avait confirmé un contrôle des loyers durant cinq ans en lien avec des travaux de CHF 58'379.- correspondant à un montant de CHF 14'594.75 par pièce, avec l’abattage de trois cloisons pour créer un salon spacieux en faisant disparaître une chambre et un hall, la pose de deux nouvelles portes, la démolition et la reconstruction de corniches et de plafonds et la refonte des espaces, des cloisons, des appareils, des équipements et du réseau des sanitaires ainsi que le changement complet du réseau électrique.

9.             Par réplique du 23 septembre 2022, la recourante a persisté dans ses conclusions, sous la plume de son conseil.

Les travaux autorisés correspondaient en tous points à des travaux de rénovation complets suite au départ de locataires en place depuis vingt-neuf ans. Pris séparément, ils relevaient de la rénovation usuelle et non d’une transformation lourde et la politique actuelle du DT décourageait les propriétaires d’effectuer les travaux indispensables et d’intérêt public dans les logements vétustes. Il était évident que tous les matériaux de l’appartement (portes, murs, parquets, cuisine, salle de bain, ventilation, électricité, et réseaux d’arrivée d’eau chaude et froide) étaient à rénover complètement. La réfection de la salle de bain et de la cuisine ne constituait pas des rénovations lourdes, tels que la création de logements ou la modification importante de la typologie du logement concerné. Le seul but de l’inversion de la cuisine et de la chambre, qui n’apportait aucune plus-value au bailleur, était le confort du futur locataire. L’alimentation en eau de la future cuisine serait raccordée aux deux tuyaux de la salle de bain, de sorte que la création de nouvelles gaines ne serait pas nécessaire, et il suffirait de fermer les canalisations existantes dans l’ancienne cuisine devenue une chambre. Enfin, le coût des travaux s’expliquait notamment par le standing, le type et l’âge du bâtiment, de nombreux matériaux (portes, murs, parquets) devant être conservés sur requête du SMS.

10.         Par duplique du 19 octobre 2022, le DT a persisté dans ses conclusions.

Le fait qu’aucuns travaux n’avaient été réalisés durant vingt-neuf ans et que la permutation des pièces bénéficierait principalement au locataire ne permettait pas de nier la qualification des travaux projetés dans leur globalité, qui n’étaient pour le surplus nullement indispensables, leur coût élevé confirmant leur ampleur.

11.         Par jugement rendu le 29 novembre 2022 dans le cadre de la cause A/4______, le tribunal a rejeté le recours interjeté par la recourante contre la décision du DT du 11 août 2021 relative à l’APA 7______ prévoyant un contrôle du loyer durant cinq ans.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par le département en application de la LDTR et de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05, art. 143 et 145 al. 1 LCI ; art. 45 al. 1 LDTR).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), en soi non réalisée dans le cas d'espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l'égalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; 123 V 150 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_107/2016 du 28 juillet 2016 consid. 9).

4.             La recourante se prévaut tout d’abord d’une violation de l’art. 12 LDTR.

5.             La LDTR a pour but de préserver l’habitat et les conditions de vie existants, ainsi que le caractère actuel de l’habitat dans les zones visées à l’art. 2 LDTR (art. 1 al.  1 LDTR).

Elle prévoit notamment à cet effet, et tout en assurant la protection des locataires et des propriétaires d'appartements, des restrictions à la démolition, à la transformation et au changement d'affectation des maisons d'habitation (art. 1 al. 2 let. a LDTR).

6.             Une autorisation est nécessaire pour toute transformation ou rénovation de tout ou partie d'une maison d'habitation (art. 9 al. 1 LDTR).

Le DT accorde l'autorisation si les logements transformés répondent, quant à leur genre, leur loyer ou leur prix, aux besoins prépondérants de la population (art. 9 al. 2 1ère phr. LDTR).

7.             Selon l'art. 3 al. 1 LDTR, par transformation, on entend tous les travaux qui ont pour objet : a) de modifier l’architecture, le volume, l’implantation, la destination, la distribution intérieure de tout ou partie d’une maison d’habitation ; b) la création de nouveaux logements, notamment dans les combles ; c) la création d’installations nouvelles d’une certaine importance, telles que chauffage, distribution d’eau chaude, ascenseur, salles de bains et cuisines ; d) la rénovation, c’est-à-dire la remise en état, même partielle, de tout ou partie d’une maison d’habitation, en améliorant le confort existant sans modifier la distribution des logements, sous réserve de l’al. 2.

8.             En vertu de l'art. 10 al. 1 LDTR, le DT fixe, comme condition de l'autorisation, le montant maximum des loyers des logements après travaux. Il tient compte des critères énumérés à l'art. 11 LDTR (« mode de calcul »).

9.             Les loyers maximaux ainsi fixés sont soumis au contrôle de l’Etat pendant une période de cinq à dix ans pour les constructions nouvelles et pendant une période de trois ans pour les immeubles transformés ou rénovés, durée qui peut être portée à cinq ans en cas de transformation lourde (art. 12 LDTR).

Le Tribunal fédéral a reconnu à la LDTR sa compatibilité avec les dispositions concernant le droit de propriété et la liberté économique consacrées aux art. 26 al.  1 et 27 al. 1 Cst. (ATF 116 Ia 401 ; arrêt 2C_184/2013 du 8 janvier 2014). En effet, en matière de logement, il est interdit aux cantons d’intervenir dans les rapports directs entre les parties au contrat de bail, réglé exhaustivement par le droit fédéral. Cela étant, les cantons demeurent libres d’édicter des mesures destinées à combattre la pénurie sur le marché locatif. Ainsi, les règles de contrôle temporaire des loyers prévues par la LDTR respectent le principe de primauté du droit fédéral, étant précisé que cette intervention étatique est limitée dans le temps et que les parties demeurent libres de modifier le contrat de bail à l'issue de la période de contrôle (Arrêt du Tribunal fédéral 1P.20/2005 du 18 mars 2005 consid. 2.2).

10.         S’agissant de la fixation de la durée du contrôle étatique du loyer d’un logement après travaux, la chambre administrative a eu l’occasion de retenir :

-          Dans un arrêt du 16 août 2005, que la transformation de vingt-huit chambres indépendantes en quatre appartements de cinq pièces pouvait être qualifiée de transformation lourde au sens de l’art. 12 LDTR, de sorte qu’une durée de contrôle des loyers de cinq ans était justifiée (ATA/567/2005 consid. 25) ;

-          Dans un arrêt du 16 février 2010 où l'autorisation visait la reconstruction à neuf du 4ème étage (combles) et la création d'un attique, que ces travaux devaient être considérés respectivement comme une transformation lourde et une construction nouvelle. En application de l'art. 12 LDTR, le contrôle de ces loyers pendant cinq ans ne pouvait qu'être confirmé (ATA/100/2010, consid.  5b) ;

-          Dans une jurisprudence du 6 février 2013, que la création d’un appartement de six pièces au 6ème étage (combles) constituait une transformation lourde, de sorte que la durée de contrôle du loyer de cinq ans prévue par le DT devait être confirmée (ATA/66/2013 consid. 7) ;

-          Dans un arrêt du 25 juin 2013, que les travaux tendant à la création d’un appartement de six pièces de 120 m2 dans les combles, pour un montant de CHF 682'600.-, et à la réalisation de divers autres travaux dans l’immeuble abritant cet appartement, devaient être qualifiés, vu « leur importance et leur impact » sur les loyers après travaux des logements de cet immeuble, de transformation lourde (ATA/391/2013 consid. 16) ;

-          Dans un arrêt du 1er octobre 2013, que la reconstruction à neuf des combles et la création de deux appartements dans chacun des trois immeubles concernés représentaient une transformation lourde, accompagnée à juste titre d’un délai de contrôle des loyers de cinq ans (ATA/642/2013 consid. 9) ;

Les cinq jurisprudences mentionnées supra sont également citées par la doctrine au titre d’exemples de cas de transformations lourdes ayant conduit à l’application d’une durée de contrôle de cinq ans (Emmanuelle GAIDE/Valérie DÉFAGO GAUDIN, La LDTR : démolition, transformation, changement d'affectation et aliénation. Immeubles de logement et appartements, 2014, n. 6.1 pp. 328-329), étant relevé que selon les précitées, c’était à juste titre que l’ATA/391/2013 se référait à l’ampleur des travaux pour porter la durée du contrôle du loyer des appartements existants de trois à cinq ans.

-          Dans un arrêt du 15 avril 2014, s’agissant d’un appartement de quatre pièces et demie dans lequel avaient été réalisés, sans autorisation, notamment la démolition complète de trois cloisons entre l’entrée, la cuisine, la chambre et le hall afin de créer un nouvel espace de jour plus spacieux côté cour, qui avait pour conséquence la disparition d’une chambre et du hall, la démolition/reconstruction de parties de corniches et de plafonds, le rafraîchissement de la seconde chambre et de la pièce jusqu’alors utilisée comme séjour (côté rue), la pose d’un nouveau carrelage de sol à la cuisine, la refonte des espaces, cloisons, appareils, équipements et du réseau des sanitaires ainsi que le changement complet du réseau électrique et l’installation de nouveaux câblages, prises et interrupteurs, que ces travaux - d’un montant total de CHF 58'379.- et qui avaient pour conséquence une augmentation du loyer après travaux -, pouvaient à juste titre être qualifiés de transformations lourdes justifiant l’application d’un délai de contrôle de cinq  ans (ATA/260/2014 consid. 16) ;

11.         Les préavis ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Selon le système prévu par la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés n'ont qu'un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi. Lorsque la consultation d'une instance de préavis est imposée par la loi, son préavis a un poids certain dans l'appréciation qu'est amenée à effectuer l'autorité de recours et il convient de ne pas le minimiser (ATA/146/2021 du 9 février 2021 consid. 10a ; ATA/934/2019 du 21 mai 2019 consid. 8c ; ATA/537/2017 du 9 mai 2017 consid. 4c).

Selon une jurisprudence bien établie, chaque fois que l'autorité inférieure suit les préavis requis, la juridiction de recours doit s'imposer une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des entités ayant formulé un préavis dans le cadre de l'instruction de la demande d'autorisation, pour autant que l'autorité inférieure ait suivi l'avis de celles-ci. Elle se limite à examiner si le département ne s'est pas écarté sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d'émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/146/2021 précité consid. 10a ; ATA/1724/2019 du 26 novembre 2019 consid. 7d ; ATA/1274/2017 du 12  septembre 2017 consid. 5).

12.         En l’espèce, seule est litigeuse la question de savoir si c’est à juste titre que le DT a considéré que les transformations envisagées étaient lourdes, avec pour conséquence que le contrôle du loyer devait être porté à cinq ans.

Il ressort du dossier que les travaux autorisés portent sur la réfection complète des peintures du logement de quatre pièces concerné, la réfection des installations électriques, la pose de carrelages et faïences ainsi que des piquages, la pose d’un nouvel agencement de cuisine, la réfection des installations sanitaires, la réfection des menuiseries intérieures, le ponçage et la vitrification des parquets ainsi que la pose d’un nouveau parquet, la réparation des stores intérieurs, l’entretien de l’installation de chauffage mais également sur la modification de la disposition des pièces du logement. En effet, des permutations étaient prévues s’agissant de la cuisine, qui serait déplacée vers l’ancien séjour, et de la pièce qui accueille actuellement la cuisine, qui deviendrait une chambre. Ces permutations auraient notamment pour conséquence que la cloison du réduit attenant au séjour actuel devrait être détruite et rebâtie afin de diminuer la surface dudit réduit au profit de la future cuisine. À ce titre, le fait que d’anciens locataires aient procédé à des transformations de cette cloison, comme avancé par la recourante, n’est pas déterminant, dès lors que cet ouvrage aurait en tout état dû être modifié pour procéder aux travaux autorisés, indépendamment de sa modification antérieure.

Partant, il peut être constaté que les travaux autorisés portent non seulement sur une permutation de pièces, mais également sur la transformation d’une pièce humide en pièce sèche et vice versa, avec toutes les modifications nécessaires qui en découlent. Pour le surplus, le montant des travaux relatifs à l’autorisation querellée avoisine, au vu des pièces au dossier, CHF 168'287.-, soit environ CHF 40'000.- par pièce. Ce montant peut être qualifié de non négligeable dans le cadre de la rénovation d’un logement de quatre pièces d’environ 82 m2, même si ce dernier est situé dans un immeuble de standing comprenant des matériaux d’époque, comme invoqué par la recourante. Il ressort en outre clairement du descriptif des coûts des travaux (formulaire D12) que certains postes des travaux sont directement liés aux permutations précitées et non uniquement aux rénovations envisagées. Enfin, il ressort des pièces au dossier que le loyer du logement concerné sera augmenté suite aux travaux, passant de CHF 13’776.- l’an, soit CHF 3’444.- la pièce l’an, à CHF 14’112.- l’an, soit CHF 3’528 la pièce l’an après travaux. Ainsi, il convient de constater que les critères mis en avant au regard de la casuistique de jurisprudence mentionnée supra, laquelle est également reprise par la doctrine spécialisée en matière de LDTR pour qualifier une intervention de transformation lourde, notamment le critère de l’importance des travaux, sont in casu remplis.

En conclusion, sans remettre en cause le bien-fondé des transformations envisagées au regard de l’habitabilité du logement, il convient toutefois de constater, au vu de ce qui précède, que le DT, se fondant notamment sur le préavis du service LDTR, n’a pas mésusé de son pouvoir d’appréciation ni violé la loi en retenant que les travaux de rénovation de l’appartement concerné devaient être considérés comme des transformations lourdes et, partant, entraîner une durée de contrôle du loyer de cinq ans selon l’art. 12 LDTR.

13.         La recourante se prévaut également d’une violation du principe d’égalité de traitement, eu égard au sort différent qui avait été réservé dans le cadre d’APA déposées par ses soins portant sur des travaux similaires dans d’autres biens immobiliers lui appartenant.

14.         Une décision viole le principe de l'égalité de traitement consacré à l'art. 8 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (RS 101-Cst.), lorsqu'elle établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou qu'elle omet de faire des distinctions qui s'imposent au vu des circonstances, c'est-à-dire lorsque ce qui est semblable n'est pas traité de manière identique et ce qui est dissemblable ne l'est pas de manière différente. L'inégalité de traitement apparaît ainsi comme une forme particulière d'arbitraire, consistant à traiter de manière inégale ce qui devrait l'être de manière semblable ou inversement. Il faut que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante. Les situations comparées ne doivent pas nécessairement être identiques en tous points, mais leur similitude doit être établie en ce qui concerne les éléments de fait pertinents pour la décision à prendre (cf. ATF 146 II 56 consid. 9.1 ; 144 I 113 consid. 5.1.1 ; 142 I 195 consid. 6.1 ; 137 I 167 consid. 3.5 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_195/2021 du 28 octobre 2021 consid. 5.1.2 ; 1C_270/2021 du 1er octobre 2021 consid. 3.1 ; 2C_538/2020 du 1er décembre 2020 consid. 3.2 ; 2C_949/2019 du 11 mai 2020 consid. 6.3 ; 8C_107/2019 du 4 juin 2019 consid.  4.2.1 ; 1C_564/2015 du 2 juin 2016 consid. 3.1). Il n'y a pas d'arbitraire du seul fait qu'une solution autre que celle choisie semble concevable, voire préférable. Pour qu'une décision soit annulée pour cause d'arbitraire, il ne suffit pas que sa motivation soit insoutenable ; il faut encore que cette décision soit arbitraire dans son résultat (ATF 144 I 318 consid. 5.4 et les références ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_523/2019 du 1er avril 2021 consid. 2 ; 2C_713/2020 du 8  décembre 2020 consid. 2.3 ; 1C_12/2019 du 11 novembre 2019 consid. 2.1.1).

15.         L'inapplication ou la fausse application de la loi dans un cas particulier n'attribue en principe pas à l'administré le droit d'être traité par la suite illégalement. En effet, selon la jurisprudence, le principe de la légalité de l'activité administrative prévaut en principe sur celui de l'égalité de traitement. En conséquence, le justiciable ne peut généralement pas se prétendre victime d'une inégalité devant la loi, lorsque celle-ci est correctement appliquée à son cas, alors qu'elle aurait été faussement, voire pas appliquée du tout, dans d'autres cas. Cela présuppose cependant, de la part de l'autorité dont la décision est attaquée, la volonté d'appliquer correctement à l'avenir les dispositions légales en question. Le citoyen ne peut prétendre à l'égalité dans l'illégalité que s'il y a lieu de prévoir que l'administration persévérera dans l'inobservation de la loi. Il faut encore que l'autorité n'ait pas respecté la loi selon une pratique constante, et non pas dans un ou quelques cas isolés, et qu'aucun intérêt public ou privé prépondérant n'impose de donner la préférence au respect de la légalité (arrêt du Tribunal fédéral 1C_270/2021 du 1er octobre 2021 consid. 3.1 et les arrêts cités ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 2C_949/2019 du 11 mai 2020 consid. 6.3 et les arrêts cités ; 1C_231/2018 du 13 novembre 2018 consid. 4.1). C'est seulement lorsque toutes ces conditions sont remplies que le citoyen est en droit de prétendre, à titre exceptionnel, au bénéfice de l'égalité dans l'illégalité (arrêt du Tribunal fédéral 6B_921/2019 du 19 septembre 2019 consid. 1.1 ; 1C_231/2018 du 13 novembre 2018 consid. 4.1).

16.         Un changement de pratique administrative doit reposer sur des motifs sérieux et objectifs, c’est-à-dire rétablir une pratique conforme au droit, mieux tenir compte des divers intérêts en présence ou d’une connaissance plus approfondie des intentions du législateur, d’un changement de circonstances extérieures, de l’évolution des conceptions juridiques ou des mœurs. Les motifs doivent être d’autant plus sérieux que la pratique suivie jusqu’ici est ancienne. À défaut, elle doit être maintenue (ATF 145 II 270 consid. 4.5.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_28/2019 du 23 décembre 2019 consid. 5.1 ; ATA/1174/2020 du 24 novembre 2020 consid. 8b et les références citées).

17.         Valant pour l’ensemble de l’activité étatique, le principe de la bonne foi exige que l’administration et les administrés se comportent réciproquement de manière loyale. En particulier, l’administration doit s’abstenir de toute attitude propre à tromper l’administré et elle ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d’une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 138 I 49 consid. 8.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_18/2015 du 22 mai 2015 consid. 3). Il protège le citoyen dans la confiance légitime qu’il met dans les assurances reçues des autorités lorsqu’il a réglé sa conduite d’après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l’administration (ATF 137 II 182 consid. 3.6.2).

18.         En l’espèce, sur la base des éléments au dossier, aucun changement de pratique ni inégalité de traitement n’est à constater en lien avec l’autorisation querellée. La recourante relève - à juste titre - une contradiction avec les APA 5______ et 6______ portant sur des travaux plus ou moins similaires au présent cas. Cela étant, il n'apparaît pas que le traitement différencié, certes regrettable mais qui découle, de l’aveu de l’autorité intimée, d’une erreur, revête un caractère arbitraire.

S’agissant de l’APA 9______, dans le cadre de laquelle la durée de contrôle du loyer avait été réduite de cinq à trois ans durant la procédure de recours, également invoquée par la recourante pour en déduire une inégalité de traitement, il ressort des éléments au dossier, notamment des explications du DT dans ses observations du 30 août 2022 que les documents produits par la recourante ne contredisent pas, qu’hormis la démolition d’une cloison pour ouvrir le séjour sur la cuisine, aucune permutation de pièces n’était prévue. En outre, il ressort des documents produits par la recourante relatifs à cet APA 9______ que les travaux concernés avaient coûté CHF 100'000.- de moins que le cas litigieux. Quant à l’APA 10______, il ressort des documents produits par la recourante en annexe de son complément au recours, notamment de la requête d’autorisation de construire y relative, que cette APA concernait la rénovation complète d’un appartement de six pièces de 103 m2. En outre, les travaux étaient estimés à plus de CHF 117'000.-. Par conséquent, force est de constater que les situations précitées diffèrent du présent cas, de sorte que la recourante ne saurait valablement les invoquer pour en déduire une violation du principe de l’égalité de traitement. Enfin, la recourante se prévaut du fait que, dans le cadre de la procédure A/4______ relative à l’APA 7______, le tribunal avait invité le DT à produire toutes les autorisations de construire délivrées entre novembre 2020 et fin août 2021 dans lesquelles un blocage du loyer de cinq ans avait été ordonné, pour en déduire la preuve de l’existence de décisions disparates et d’une pratique peu uniforme du DT quant à la notion de transformation lourde et de la durée du blocage de loyer y relative. À ce titre, il sera relevé que la requête du tribunal précitée consistait en une mesure d’instruction dans le cadre de la cause A/4______. Il ne saurait être déduit de cette seule mesure que la pratique du DT serait disparate ou peu uniforme. Partant, infondé, cet argument tombe à faux.

Le tribunal constate, pour le surplus, que les APA approuvées par le DT entre novembre 2020 et juillet 2021, produites par ce dernier sur requête du tribunal et dont la recourante a eu connaissance dans le cadre de la procédure A/4______, confirment la pratique exposée par le DT et rien ne laisse à penser qu’il entend s’en écarter à l’avenir et qu’hormis les deux APA précitées, il ne l’a pas appliquée de manière constante. En effet, même si certaines de ces autorisations concernent vraisemblablement des travaux plus conséquents que le cas d’espèce, ce que le DT ne conteste pas, il n’en demeure pas moins que plusieurs de ces autorisations portent sur des transformations comparables et se sont vues appliquer le même délai de contrôle du loyer. Ainsi, l’APA 11______, à propos de laquelle la recourante admet d’ailleurs une similitude avec son propre cas, prévoit une durée de contrôle du loyer de cinq ans pour la transformation et la rénovation d’un appartement de quatre pièces pour un coût total d’environ CHF 102'799.-, soit CHF 4'032.- par pièce l’an, alors même que, contrairement au cas litigieux, aucune modification des affectations n’était prévue dans ce logement. Dans le même sens, l’APA 12______, même si elle concerne la transformation d’un bureau en deux appartement de trois pièces pour un coût de CHF 48'750.- par logement, ne prévoit pas de permutation entre pièces sèches et pièces humides, contrairement au présent cas. En outre, l’APA 13______, relative à la transformation et à la rénovation d’un appartement de trois pièces et demie pour un coût total des travaux de CHF 150'000.- prévoit, comme dans le présent cas, une rénovation de la salle de bain ainsi qu’un déplacement de la cuisine. Enfin, le cas des APA 14______/1 et 14______/2 – qui concernent la transformation et la rénovation d’un appartement de trois pièces et demie pour un montant total de CHF 76'500.- - confirme la position adoptée par le DT dans le présent cas s’agissant des permutations de pièces. En effet, alors que la première de ces autorisations, qui prévoyait notamment la permutation des pièces accueillant la salle de bain, la cuisine et une chambrette, s’est vue appliquer un délai de contrôle de cinq ans, l’APA complémentaire, qui n’envisageait plus la rocade susmentionnée, a pu bénéficier d’une durée du contrôle du loyer ramenée à trois ans. Pour le surplus, le nombre relativement restreint d’APA prévoyant une durée de contrôle du loyer de cinq ans délivrées par le DT durant la période de neuf mois examinée ne permet pas de conclure que ce département serait enclin, comme le prétend la recourante, à retenir régulièrement l’existence de transformations lourdes.

Par conséquent, aucune violation du principe d’égalité de traitement n’est à déplorer dans le présent cas.

19.         En conclusion, entièrement mal fondé, le recours est rejeté.

20.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante, qui succombe, est condamnée au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 900.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 29 juin 2022 par A______ contre la décision du département du territoire du 31 mai 2022 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge de la recourante un émolument de CHF 900.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Marielle TONOSSI, présidente, Suzanne AUBERT-LEBET, Claire BOLSTERLI, Thierry ESTOPPEY et Diane SCHASCA, juges assesseurs.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Marielle TONOSSI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

Le greffier