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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2857/2020

JTAPI/837/2021 du 26.08.2021 ( OCIRT ) , REJETE

Descripteurs : AUTORISATION DE TRAVAIL;PRIORITÉ DES TRAVAILLEURS INDIGÈNES
Normes : Cst.29.al2; LEI.11; LEI.18; LEI.21.al1
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2857/2020

JTAPI/837/2021

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 26 août 2021

 

dans la cause

 

A______, représentée par Me Jean DONNET, avocat, avec élection de domicile

contre

OFFICE CANTONAL DE L'INSPECTION ET DES RELATIONS DU TRAVAIL

 


EN FAIT

1.             A______ est une société en nom collectif inscrite au registre du commerce de Genève le ______2016, qui a pour but : « vente de tapis, d’objets d’art, lavage et expertise ». Elle a repris et continué les affaires de l’entreprise individuelle Tapis d’Orient, B______ « commerce de tapis d'Orient », inscrite le ______1978 et radiée le ______2016. Monsieur C______, qui dispose d'une signature individuelle, en est l’un des trois associés.

2.             Monsieur D______, né le ______1972, est ressortissant d’Iran.

A teneur de son curriculum vitae, en 2012, il a obtenu un « certificat de compétence » après avoir suivi un cours de « réparation professionnelle de tapis » en Iran. Il a travaillé auprès de diverses sociétés en Suisse : E______, à Lausanne (de juillet 2011 à avril 2013), F______, à Vevey (de mai 2013 à juillet 2016) et G______, à Forel, dès le 20 mars 2017. D’août 2016 au 19 mars 2017, il a travaillé en tant qu’indépendant à Forel. Le perse est sa langue maternelle et il a des connaissances en français, en anglais et en allemand « compréhension orale et écrite, niveau B2 ».

3.             Par arrêt du ______2020, la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après : CDAP) a confirmé la décision du service de la population (ci-après : SPOP) du 6 septembre 2019 ayant refusé de le mettre au bénéfice d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur et prononcé son renvoi de Suisse.

Il ressort notamment de cet arrêt qu’il était venu pour la première fois en Suisse en 1997 en qualité d’expert pour surveiller la réparation de tapis. Il y était ensuite revenu à plusieurs reprises entre 2001 et 2009, munis de visas de courte durée. Dès le 25 août 2010, il avait bénéficié d’une autorisation de séjour au titre du regroupement familial, suite à son mariage avec une compatriote au bénéfice d’une autorisation de séjour pour études en Suisse. En 2005, il avait commencé une activité d’import/export de tapis iraniens en Suisse liée à leur restauration et leur réparation. D’abord salarié, il s’était ensuite occupé, à titre d’indépendant, du rayon de vente de tapis iraniens d’une enseigne de meubles lors de ses séjours temporaires en Suisse. Le 17 mars 2017, il avait fondé sa propre société, G______, dont il était l’unique associé gérant et qui avait pour but l’achat, la vente, l’expertise, la réparation et le nettoyage de tapis. Le 20 mars 2017, il avait conclu avec cette dernière un contrat de travail portant sur une activité d’expert en tapis à temps complet. Son permis de séjour avec activité lucrative était toutefois arrivé à échéance et il n’en avait pas obtenu la prolongation, son épouse ayant achevé ses études.

4.             Par requête du 25 juin 2020, A______, sous la plume de son conseil, a sollicité l'octroi d'une autorisation de séjour avec activité lucrative en faveur de M. D______, qu’elle souhaitait engager en qualité de responsable de son département de réparation et de nettoyage. Elle était établie à Genève depuis quarante-cinq ans. Hormis la vente de tapis, elle proposait également un service de réparation, d’entretien et de nettoyage de tapis, qui ne pouvait être effectué que par des spécialistes en la matière. Peu de personnes en Suisse disposaient des compétences nécessaires. Malgré les trois réparateurs qu’elle employait, elle était contrainte d’envoyer la grande majorité des tapis à réparer et à nettoyer auprès de partenaires en Iran et en Turquie. L’engagement d’un quatrième réparateur permettrait d’éviter cette sous-traitance, d’économiser les frais d’envoi inhérents et de gagner du temps dans le traitement des commandes. M. D______ disposait d’un savoir-faire indéniable acquis en Iran et d’une solide expérience. De plus, il avait, tant en Iran qu’en Suisse, développé d’excellentes relations avec des fabricants, des fournisseurs et des clients et avait participé à des ventes aux enchères. Son engagement était indispensable à la poursuite des activités de la société et à son développement. Avant de déposer cette requête, elle avait passé diverses annonces, afin de s’assurer qu’aucun candidat ne correspondait au profil du poste. Elle a notamment joint les pièces suivantes :

-          un formulaire M dûment complété, faisant état d'un salaire mensuel brut de CHF 10'500.- pour une activité à plein temps ;

-          un contrat de travail daté du 12 mai 2020, fixant l’entrée en service « dès l’obtention de permis » ;

-          le certificat de compétence précité (« Second Grade Carpet Darner »), obtenu le 19 juillet 2012 ;

-          le texte d'une annonce publiée le 30 mai 2020 sur le site « anibis.ch » pour un poste de « Réparateur professionnel de tapis », avec le profil suivant : « 5 ans d’expérience professionnelle en entretien de tapis abimé (détachage, lavage et réparation) ; excellentes connaissances pratiques concernant la fabrication de tapis ; être rigoureux et capable de fournir un travail de qualité ; être passionné par son métier ; personne serviable, disponible et dynamique ; parler allemand et français » ;

-          le texte d'une même annonce publiée le 5 juin 2020 sur le site « petitesannonces.ch » ;

-          un courrier de l’office cantonal de l’emploi (ci-après : OCE) du 25 mai 2020, lui faisant savoir qu’à ce jour, il n’avait retenu aucun dossier de candidat à l’emploi répondant aux critères d’exigences du poste, qui figurait dans sa base de données depuis le 8 mai 2020.

5.             Par courriel du 24 juillet 2020, l’office cantonal de l’inspection et des relations du travail (ci-après : OCIRT) a sollicité la production des comptes 2018 et 2019 de la société.

6.             Celle-ci a fait suite à cette demande le 27 juillet 2020, relevant que son chiffre d’affaires total, plus particulièrement celui du nettoyage et de la réparation de tapis, était en progression constante et qu'un fort développement de cette activité était attendue. Elle avait déjà informé sa clientèle et ses relations d’affaires du fait que M. D______ « devrait travailler en son sein » et qu’il apporterait un savoir-faire « quasiment exclusif » dans la région lémanique et même au-delà. Suite à cette annonce, elle avait enregistré de « nombreuses demandes ».

7.             Par décision du 29 juillet 2020, après examen du dossier par la commission tripartite, l'OCIRT a refusé l'octroi de l'autorisation sollicitée, au motif que l'admission de M. D______ en vue de l'exercice d'une activité lucrative ne servait pas les intérêts économiques de la Suisse, au sens de l'art. 18 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20). De plus, l'ordre de priorité de l'art. 21 LEI n'avait pas été respecté, l'employeur n'ayant pas démontré qu'aucun travailleur en Suisse ou ressortissant d'un pays de l'UE ou de l'AELE n'avait pu être trouvé.

8.             Par acte du 14 septembre 2020, sous la plume de son conseil, A______ (ci-après : la recourante) a interjeté recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant, avec suite de frais et dépens, à son annulation et à la délivrance de l’autorisation requise. Elle a préalablement sollicité l'octroi d'un délai de vingt jours pour compléter ses écritures.

L’autorité intimée avait rendu une décision dont la motivation lacunaire ne permettait pas d’en comprendre la portée. Il ne s’agissait pas d’un cas de « dumping » salarial visant à maintenir une infrastructure avec une main d’œuvre peu qualifiée prête à travailler pour un bas salaire. Elle avait démontré le caractère très spécifique du poste à pourvoir et il ne s’agissait manifestement pas d’un artisanat pratiqué en Suisse ou en Europe. Les spécialistes dans ce domaine n’étaient pas nombreux, ce qui expliquait le montant du salaire qu’elle proposait. Il n’y avait donc « aucun risque de concurrence » avec des travailleurs en Suisse. De plus, il ressortait de ses rapports de gestion 2018 et 2019 que son chiffre d’affaires total était en progression, plus particulièrement celui du secteur du nettoyage et de la réparation de tapis. Partant, on ne pouvait retenir que l’engagement de M. D______ ne présentait aucun intérêt économique pour le tissu économique local et helvétique. Par ailleurs, l’OCIRT lui avait reproché de ne pas avoir apporté la preuve « qu’aucun travailleur en Suisse ou ressortissant d’un pays UE/AELE n’a[vait] pu être trouvé ». Or, s’agissant d’un « fait négatif », il était particulièrement difficile d’en apporter la preuve. Cela étant, elle avait annoncé la vacance du poste à l’OCE et avait passé des annonces auprès de sites appropriés. Compte tenu de la spécificité du poste à pourvoir, la preuve de ce fait négatif était extrêmement difficile, voire impossible à apporter.

9.             Le 15 octobre 2020, sous la plume de son conseil, la recourante a adressé une demande de reconsidération à l’OCIRT.

Suite à la décision litigieuse, elle avait publié d’autres annonces, afin de pourvoir le poste en question. Hormis celles parues en mai 2020 sur « anibis.ch » et « petitesannonces.ch », qui avaient été renouvelées à six reprises, elle avait placé des annonces dans la « Tribune de Genève », « 24 heures » et adressé une nouvelle offre d’emploi à l’office régional de placement. Elle avait reçu une dizaine de candidatures ne correspondant aucunement au profil recherché. La plupart des candidats n’étaient pas diplômés et aucun n’avait la moindre expérience dans le domaine du tapis, ni même du textile en général. Il apparaissait ainsi clairement que ses recherches n’aboutiraient à aucun résultat en Suisse ou dans les pays avoisinants. Elle avait ainsi déployé sans succès les efforts nécessaires, afin de pourvoir le poste. En l’état, seul M. D______ remplissait tous les critères utiles. Sous l’angle des intérêts économiques de la Suisse, elle participait sans aucun doute, depuis quarante-cinq ans, au maintien du tissu économique local. Elle avait conservé son activité en ville, employait six personnes et comptait en engager davantage. Elle était une référence dans le milieu du tapis et sa clientèle dépassait les frontières cantonales.

10.         Par courrier du 15 octobre 2020, la recourante a notamment sollicité la suspension de l’instruction de son recours jusqu’à ce que l’OCIRT se prononce sur sa demande de reconsidération. Elle a notamment joint les pièces suivantes :

-          des annonces parues dans « 24 heures » et la « Tribune de Genève » le 6 octobre 2020 ;

-          une annonce parue sur la plateforme « Job-Room » de l’OCE le 1er [ou le 4] octobre 2020 [date difficilement lisible] ;

-          dix curriculum vitae.

11.         Par courrier du 30 octobre 2020, l’OCIRT a indiqué qu’il ne s’opposait pas à la suspension de la procédure.

12.         Par décision du 4 novembre 2020, le tribunal a suspendu l’instruction du recours en application de l’art. 78 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

13.         Par décision du 11 novembre 2020, après un nouvel examen du dossier par la commission tripartite, l’OCIRT a fait savoir à la recourante qu’en dépit des arguments avancés à l’appui de sa demande de « révision », elle maintenait son refus pour les motifs ressortant de sa décision du 29 juillet 2020.

14.         Par courrier du 7 décembre 2020, l’OCIRT a sollicité la reprise de la procédure.

15.         Par courrier du 10 décembre 2020, le tribunal a informé les parties de la reprise de l’instruction de la cause.

16.         Dans ses observations du 8 février 2021, l’OCIRT a conclu au rejet du recours.

L’autorisation de séjour délivrée en dernier lieu à M. D______ était arrivée à échéance le 5 juillet 2017 et, suite à l’arrêt de la CDAP du ______ 2020, un nouveau délai de départ au 30 juin 2020 lui avait été imparti. Cela étant, les titres de séjour dont le précité avait précédemment bénéficiés ne lui ayant conféré aucun droit, il devait être considéré comme un nouveau demandeur d’emploi.

Il ressortait du dossier qu’il était titulaire d’un certificat de « réparateur de tapis de 2ème année », qu’il avait travaillé dans le domaine de la vente de tapis depuis 2005, plus particulièrement comme réparateur depuis 2011. Or, aucune de ces qualifications n’était spécifique au point d’admettre que la recourante se trouvait dans l’impossibilité de recruter, au sein de l’UE/AELE, un travailleur titulaire d’un passeport européen doté des compétences requises. En outre, dans le cadre de la procédure vaudoise qui avait abouti à la décision du SPOP du 6 septembre 2019, M. D______ avait produit une attestation datée du 26 septembre 2019, établie par M. C______, « au nom de l’entreprise F______ », à teneur de laquelle ils collaboraient « depuis plusieurs années ». Compte tenu notamment du nombre réduit des recherches effectuées par la recourante, il apparaissait que son choix s’était porté sur M. ______ par convenance personnelle, au vu de leur « expérience commune ». Il y avait ainsi lieu de douter de la « valeur des recherches insuffisantes » faite par la recourante avant le dépôt de sa demande. L’annonce du poste à l’OCE et sa publication sur deux sites suisses de « petites annonces » en ligne étaient insuffisantes. En outre, selon la jurisprudence, les démarches intervenues après un refus d’octroi d’autorisation de séjour avec activité lucrative devaient être considérées comme entreprises dans le seul but de s’acquitter des exigences légales. Malgré le fait qu’elle admettait rencontrer des difficultés pour trouver un profil similaire à celui de M. ______, la recourante n’avait pas étendu ses recherches au marché européen. Partant, elle n’avait pas prouvé avoir déployé tous les efforts possibles pour trouver un travailleur correspondant au profil requis en Suisse ou au dans les pays de l'UE/AELE. Le principe de l’ordre de priorité de l’art. 21 LEI n’avait ainsi pas été respecté.

17.         Le 15 mars 2021, la recourante a répliqué sous la plume de son conseil.

L’OCIRT semblait considérer que le candidat choisi n’était pas suffisamment qualifié. Or, il perdait de vue que la réparation de tapis d’Orient, plus particulièrement de tapis iraniens, n’était pas une « science exacte ». Cette activité relevait de l’artisanat, domaine dans lequel l’expérience primait, au-delà des certificats et des diplômes. Or, M. D______ disposait de qualifications personnelles telles qu’il devait être considérer comme un spécialiste, compte tenu de l’extrême spécificité de ce domaine. Par ailleurs, sa présence aurait un effet positif sur le développement de la société, surtout dans une période où les ventes pourraient souffrir d’une certaine « morosité économique ». Son service de réparation-restauration était particulièrement apprécié par les propriétaires de tapis d’Orient, dont les prix pouvaient atteindre des milliers, voire des dizaines de milliers de francs. L’admission de M. D______ représentait ainsi un intérêt manifeste pour le tissu économique genevois, qui devait laisser une place au secteur de l’artisanat. Par ailleurs, on ne pouvait lui reprocher de ne pas avoir mené des recherches sur le marché européen de l’emploi, étant tout de même précisé que six des dix candidatures qu’elle avait reçues provenaient de France. En tout état, s’agissant d’un secteur artisanal « profondément ancré dans une tradition et des pratiques ancestrales », elle aurait plutôt dû mener ses recherches dans les pays orientaux, mais une telle démarche n’aurait pas répondu aux critères légaux.

Elle s’est référée pour le surplus à sa demande de reconsidération et a persisté dans les conclusions prises dans son recours.

18.         Dans sa duplique du 16 avril 2021, l’OCIRT a indiqué que les dernières écritures de la recourante n’étaient pas de nature à changer sa décision. Celle-ci ne semblait pas avoir pleinement saisi la portée du respect de l’ordre de priorité. Il appartenait à l’employeur de prouver qu'il avait effectué des recherches parmi les personnes bénéficiant de la priorité (ressortissant UE/AELE). Sa remarque selon laquelle elle aurait plutôt dû concentrer ses recherches dans les pays orientaux n’était d’aucune pertinence. Cela étant, malgré l’insuffisance de ses recherches, elle reconnaissait désormais qu’il existait des travailleurs bénéficiant de la priorité, puisqu’elle affirmait avoir notamment « identifié » six candidats en France.

EN DROIT

1.             Le tribunal connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l’OCIRT en matière de marché du travail (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 57, 60 et 62 à 65 LPA).

3.             Les arguments formulés par les parties à l'appui de leurs conclusions respectives ainsi que le contenu des pièces versées aux dossiers seront repris et discutés dans la mesure utile (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1C_72/2017 du 14 septembre 2017 consid. 4.1 ; 1D_2/2017 du 22 mars 2017 consid. 5.1 ; 1C_304/2016 du 5 décembre 2016 consid. 3.1 ; 1C_592/2015 du 27 juillet 2016 consid. 4.1 ; 1C_229/2016 du 25 juillet 2016 consid. 3.1 et les arrêts cités), étant rappelé que, saisi d'un recours, le tribunal applique le droit d'office et que s'il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, il n'est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

4.             Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l'espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2).

5.             L'autorité chargée d'appliquer la loi dispose d'un pouvoir d'appréciation lorsque celle-ci lui laisse une certaine marge de manœuvre, laquelle peut notamment découler de la liberté de choix entre plusieurs solutions, ou encore de la latitude dont l'autorité dispose au moment d'interpréter des notions juridiques indéterminées contenues dans la loi. Bien que l'interprétation de notions juridiques indéterminées relève du droit, que le juge revoit en principe librement, un tribunal doit néanmoins restreindre sa cognition, lorsqu'il résulte de l'interprétation de la loi que le législateur a voulu, par l'utilisation de telles notions, reconnaître à l'autorité de décision une marge de manœuvre que le juge doit respecter, étant précisé que cette dernière ne revient pas à limiter le pouvoir d'examen du juge à l'arbitraire. Viole le principe de l'interdiction de l'arbitraire le tribunal, qui, outrepassant son pouvoir d'examen, corrige l'interprétation défendable qu'une autorité disposant d'autonomie a opérée d'une norme déterminée (ATF 140 I 201 consid. 6.1 et les différents arrêts cités).

Lorsqu'elle estime que l'autorité inférieure est mieux en mesure d'attribuer à une notion juridique indéterminée un sens approprié au cas à juger, l'autorité de recours s'impose donc une certaine retenue. Il en va ainsi lorsque l'interprétation de la norme juridique indéterminée fait appel à des connaissances spécialisées ou particulières en matière de comportement, de technique, économique ou de subventions (cf. ATA/155/2021 du 9 février 2021 consid. 6b ; ATA/1311/2020 du 15 décembre 2020 consid. 7c ; ATA/1274/2017 du 12 septembre 2017 consid. 6 et la jurisprudence citée).

6.             En procédure administrative, tant fédérale que cantonale, la constatation des faits est gouvernée par le principe de la libre appréciation des preuves (art. 20 al. 1 2ème phr. LPA ; ATF 139 II 185 consid. 9.2 ; 130 II 482 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_668/2011 du 12 avril 2011 consid. 3.3 ; ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4b). Le juge forme ainsi librement sa conviction en analysant la force probante des preuves administrées ; ce n'est ni le genre, ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4b et les arrêts cités).

7.             Dans un grief d'ordre formel, qu'il convient d'examiner en premier lieu (cf. ATF 132 V 387 consid. 5.1), la recourante se plaint du manque de motivation de la décision litigieuse.

8.             Garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu est une garantie constitutionnelle de caractère formel, dont la violation doit entraîner l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recourant sur le fond (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 et les références). Il implique notamment, pour l'autorité, l'obligation de motiver sa décision. Selon une jurisprudence constante, l'obligation de motiver n'impose pas à l'autorité d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_298/2017 du 30 avril 2018 consid. 2.1). Il suffit, au regard de ce droit, qu'elle mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que les intéressés puissent se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 142 II 154 consid. 4.2 ; 139 IV 179 consid. 2.2 ; 138 I 232 consid. 5.1). La portée de l'obligation de motiver dépend des circonstances concrètes, telles que la nature de la procédure, la complexité des questions de fait ou de droit, ainsi que la gravité de l'atteinte portée à la situation juridique des parties. Dès lors que l'on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision de l'autorité, le droit à une décision motivée est respecté, même si la motivation présentée est erronée. En outre, la motivation peut être implicite et résulter des différents considérants de la décision (ATF 141 IV consid. 3.2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_415/2019 du 27 mars 2020 consid. 2.1 et les arrêts cités ; 1C_298/2017 du 30 avril 2018 consid. 2.1). Il n'y a ainsi violation du droit d'être entendu que si l'autorité ne satisfait pas à son devoir minimum d'examiner les problèmes pertinents (ATF 134 I 83 consid. 4.1 ; 133 III 439 consid. 3.3 ; 130 II 530 consid. 4.3 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_56/2015 du 13 mai 2015 consid. 2.1).

9.             En l’espèce, si la décision entreprise ne contient effectivement pas les motifs pour lesquels l’admission en vue de l’exercice d’une activité lucrative de M. D______ ne sert pas les intérêts économiques de la Suisse, elle mentionne les bases légales topiques ayant été appliquées et, manifestement, la recourante a été en mesure d’en comprendre le sens et la portée. Elle a ainsi pu exposer en détails dans son recours les raisons qui commandaient à son sens la délivrance du permis de séjour requis. Le caractère succinct de cette motivation ne justifie donc aucunement le renvoi de la cause à l’autorité intimée, ce qui entraînerait une procédure purement formelle et un retard inutile, ce d’autant que cette dernière s’est expliquée plus en détail depuis lors (cf. ATF 137 I 195 consid. 2.3.2 ; 133 I 201 consid. 2.2 ; 132 V 387 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_572/2011 du 3 avril 2012 consid. 2.1 et les références citées ; 1C_272/2010 du 16 mars 2011 consid. 2.6.2 ; ATA/301/2012 du 15 mai 2012). C’est le lieu de rappeler qu’un défaut de motivation peut être réparé par la prise de position de l’autorité intimée, suite à un recours, si l’administré se voit offrir la possibilité de s’exprimer à son sujet et que l’autorité de recours peut examiner librement les questions de fait et de droit (cf. ATF 133 I 201 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_272/2010 du 16 mars 2011 consid. 2.6.2), ce qui a été le cas en l’occurrence. Ce grief doit donc être écarté.

10.         Selon l'art. 11 LEI, tout étranger qui entend exercer en Suisse une activité lucrative doit être titulaire d'une autorisation, quelle que soit la durée de son séjour ; il doit la solliciter auprès de l'autorité compétente du lieu de travail envisagé (al. 1). Est considérée comme activité lucrative toute activité salariée ou indépendante, qui procure normalement un gain, même si elle est exercée gratuitement (al. 2). En cas d'activité salariée, la demande d'autorisation est déposée par l'employeur (al. 3).

11.         Les conditions d'octroi d'une autorisation de travail sont régies par les dispositions de la LEI et de ses ordonnances d'application, ainsi que, conformément à l'art. 89 de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), par les directives émises par le SEM (Directives et circulaires, Séjour avec activité lucrative, état au 1er août2021 ; ci-après : directives LEI), qui ne lient pas le juge, mais dont celui-ci peut tenir compte pour assurer une application uniforme de la loi envers chaque administré, pourvu qu'elles respectent le sens et le but de la norme applicable (cf. not. ATA/1660/2019 du 12 novembre 2019 ; ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 ; ATA/866/2018 du 28 août 2018 ; ATA/1280/2015 du 1er décembre 2015).

12.         Qu'il s'agisse d'une première prise d'emploi, d'un changement d'emploi ou du passage du statut de travailleur salarié vers un statut de travailleur indépendant, une décision cantonale préalable concernant le marché du travail est nécessaire pour l'admission en vue de l'exercice de l'activité lucrative (art. 40 al. 2 LEI).

Aux termes de l'art. 83 al. 1 let. a OASA, avant d'octroyer une première autorisation de séjour ou de courte durée en vue de l'exercice d'une activité lucrative, l'autorité cantonale du marché du travail décide si les conditions sont remplies pour exercer une activité lucrative salariée ou indépendante au sens des art. 18 à 25 LEI.

À Genève, la compétence pour traiter les demandes d'autorisation de séjour avec prise d'emploi est dévolue à l'OCIRT (cf. ATA/1660/2019 du 12 novembre 2019 consid. 3c et les références citées).

13.         À teneur de l'art. 18 LEI, un étranger peut être admis en vue de l'exercice d'une activité lucrative salariée aux conditions suivantes : son admission sert les intérêts économiques du pays (let. a), son employeur a déposé une demande (let. b) et les conditions fixées aux art. 20 à 25 LEI sont remplies (let. c), notamment les exigences relatives à l'ordre de priorité (art. 21 LEI), les conditions de rémunération et de travail (art. 22 LEI), ainsi que les exigences portant sur les qualifications personnelles requises (art. 23 LEI).

Ces conditions sont cumulatives (cf. ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5b et les arrêts cités).

14.         En raison de sa formulation potestative, l'art. 18 LEI ne confère aucun droit à M. D______ (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_819/2C_798/2018 du 17 septembre 2018 consid. 4.1 ; 2D_4/2015 du 23 janvier 2015 consid. 3 ; ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5b) et les autorités compétentes bénéficient d'un large pouvoir d'appréciation dans le cadre de son application (arrêts du Tribunal administratif fédéral C-5184/2014 du 31 mars 2016 consid. 5.1 ; C-5420/2012 du 15 janvier 2014 consid. 6.2 ; ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5b ; ATA/1368/2018 du 18 décembre 2018 consid. 3b ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 2C_860/2011 du 25 octobre 2011 consid. 2). De même, en tant qu'employeur, la recourante ne dispose d'aucun droit à engager ce dernier en vue de l'exercice d'une activité lucrative en Suisse (cf. not. arrêt du Tribunal fédéral 2D_57/2015 du 21 septembre 2015 consid. 3 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-5184/2014 du 31 mars 2016 consid. 3 ; ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5b).

15.         La notion d'« intérêt économique du pays », formulée de façon ouverte, concerne au premier chef le domaine du marché du travail. Il s'agit, d'une part, des intérêts de l'économie et de ceux des entreprises. D'autre part, la politique d'admission doit favoriser une immigration qui n'entraîne pas de problèmes de politique sociale, qui améliore la structure du marché du travail et qui vise à plus long terme l'équilibre de ce dernier (Message du Conseil fédéral du 8 mars 2002 concernant la loi sur les étrangers, in FF 2002 3469 ss, p. 3485 s. et 3536). En particulier, les intérêts économiques de la Suisse seront servis lorsque, dans un certain domaine d'activité, il existe une demande durable à laquelle la main d'oeuvre étrangère en cause est susceptible de répondre sur le long terme (arrêts du Tribunal administratif fédéral F-4226/207 du 8 octobre 2019 consid. 4.5.1 ; C-5912/2011 du 26 août 2015 consid. 7.1 ; C-5420/2012 du 15 janvier 2014 consid. 6.1 et les références citées ; C_8717/2010 du 8 juillet 2011 consid. 5 ; ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5d ; ATA/187/2018 du 27 février 2018 consid. 4a ; ATA/1018/2017 du 27 juin 2017 consid. 4c). L'art. 3 al. 1 LEI concrétise le terme en ce sens que les chances d'une intégration durable sur le marché du travail suisse et dans l'environnement social sont déterminantes. L'activité économique est dans l'intérêt économique du pays si l'étranger offre par là une prestation pour laquelle il existe une demande non négligeable et qui n'est pas déjà fournie en surabondance (cf. ATA/896/2018 du 4 septembre 2018 consid. 6b ; Peter UEBERSAX in Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE [éd.], Code annoté de droit des migrations, vol. 2 : LEtr, 2017, p. 145 s. et les références citées).

Il convient de tenir compte en particulier de la situation sur le marché du travail, de l'évolution économique durable et de la capacité de l'étranger concerné à s'intégrer. Il ne s'agit pas de maintenir une infrastructure avec une main-d'œuvre peu qualifiée disposée à travailler pour de bas salaires, ni de soutenir des intérêts particuliers. Par ailleurs, les étrangers nouvellement entrés dans le pays ne doivent pas faire concurrence aux travailleurs en Suisse en provoquant, par leur disposition à accepter de moins bonnes conditions de rémunération et de travail, un dumping salarial et social (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral F-5074/2018 du 25 juin 2020 consid. 5.3 ; F-4226/207 du 8 octobre 2019 consid. 4.5.1 ; C-857/2013 du 19 mai 2014 consid. 8.3 ; C-3518/2011 du 16 mai 2013 consid. 5.1 ; C-2485/2011 du 11 avril 2013 consid. 6 ; C-6135/2008 du 11 août 2008 consid. 8.2 ; ATA/1280/2015 du 1er décembre 2015 consid. 12 ; ATA/940/2015 du 15 septembre 2015 consid. 7c ; directives LEI, ch. 4.3.1).

16.         Un étranger ne peut être admis en vue de l'exercice d'une activité lucrative que s'il est démontré qu'aucun travailleur en Suisse ni aucun ressortissant d'un État avec lequel a été conclu un accord sur la libre circulation des personnes correspondant au profil requis n'a pu être trouvé (art. 21 al. 1 LEI).

En d'autres termes, l'admission de ressortissants d'États tiers n'est possible que si, à qualifications égales, aucun travailleur en Suisse ou ressortissant d'un État membre de l'UE ou de l'AELE ne peut être recruté. Le principe de la priorité des travailleurs résidants doit être appliqué à tous les cas, quelle que soit la situation de l'économie et du marché du travail (arrêt du Tribunal fédéral 2C_434/2014 du 8 août 2014 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-5184/2014 du 31 mars 2016 consid. 5.3.1 ; ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5c ; ATA/1368/2018 du 18 décembre 2018 consid. 3c).

Les conditions d'admission ont matériellement pour but de gérer de manière « restrictive » l'immigration ne provenant pas de la zone UE/AELE, de servir conséquemment les intérêts économiques à long terme et de tenir compte de manière accrue des objectifs généraux relatifs aux aspects politiques et sociaux du pays et en matière d'intégration (cf. notamment ATAF 2011/1 consid. 6.1 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral C-5184/2014 du 31 mars 2016 consid. 5.3.1 ; C-6198/2014 du 18 mai 2015 consid. 6.1 ; C-857/2013 consid. 5).

Les employeurs sont tenus d'annoncer le plus rapidement possible aux offices régionaux de placement les emplois vacants qu'ils présument ne pouvoir repourvoir qu'en faisant appel à du personnel venant de l'étranger. Les offices de placement jouent un rôle clé dans l'exploitation optimale des ressources offertes par le marché du travail sur l'ensemble du territoire suisse. L'employeur doit, de son côté, entreprendre toutes les démarches nécessaires - annonces dans les quotidiens et la presse spécialisée, recours aux médias électroniques et aux agences privées de placement - pour trouver un travailleur disponible. On attend des employeurs qu'ils déploient des efforts en vue d'offrir une formation continue spécifique aux travailleurs disponibles sur le marché suisse du travail (ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5c et les arrêts cités ; directives LEI, ch. 4.3.2.1).

Il revient à l'employeur de démontrer avoir entrepris des recherches à une grande échelle afin de repourvoir le poste en question par un travailleur indigène ou ressortissant d'un État membre de l'UE/AELE et qu'il s'est trouvé dans une impossibilité absolue de trouver une personne capable d'exercer cette activité (ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5c ; ATA/1368/2018 du 18 décembre 2018 consid. 3c ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-6074/2010 du 19 avril 2011 consid. 5.3).

L'employeur doit être en mesure de rendre crédibles les efforts qu'il a déployés, en temps opportun et de manière appropriée, en vue d'attribuer le poste en question à des candidats indigènes ou à des candidats ressortissants de l'UE/AELE. Des ressortissants d'États tiers ne seront contactés que dans le cas où les efforts entrepris n'ont pas abouti. Il convient dès lors de veiller à ce que ces démarches ne soient pas entreprises à la seule fin de s'acquitter d'une exigence. Elles doivent être engagées suffisamment tôt, dans un délai convenable avant l'échéance prévue pour la signature du contrat de travail. En outre, il faut éviter que les personnes ayant la priorité ne soient exclues sur la base de critères professionnels non pertinents tels que des séjours à l'étranger, des aptitudes linguistiques ou techniques qui ne sont pas indispensables pour exercer l'activité en question, etc. (ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5c ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-3286/2017 du 18 décembre 2017 consid. 6.2 ; F-1992/2015 du 10 mars 2017 consid. 5.5C-106/2013 du 23 juillet 2014 consid. 7.1 ; C-1123/2013 du 13 mars 2014 consid. 6.7 ; C-4873/2011 du 13 août 2013 consid. 5.3).

Même si la recherche d'un employé possédant les aptitudes attendues de la part de l'employeur peut s'avérer ardue et nécessiter de nombreuses démarches auprès des candidats potentiels, de telles difficultés ne sauraient à elles seules, conformément à une pratique constante des autorités en ce domaine, justifier une exception au principe de la priorité de recrutement énoncée à l'art. 21 LEI (cf. ATA/1156/2020 du 17 novembre 2020 consid. 6c ; ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5c ; ATA/1368/2018 du 18 décembre 2018 consid. 3c ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C_8717/2010 du 8 juillet 2011 consid. 8.1).

La seule publication d'une annonce auprès de l'OCE, bien que diffusée également dans le système EURES, ne peut être considérée comme une démarche suffisante. (cf. ATA/1147/2018 du 30 octobre 2018 consid. 11). Par ailleurs, des démarches intervenues après un refus d'octroi d'autorisation de séjour avec activité lucrative doivent être considérées comme entreprises dans le seul but de s'acquitter des exigences légales (cf. ATA/2/2015 du 6 janvier 2015 consid. 2c).

17.         En l’espèce, l'analyse à laquelle a procédé l'OCIRT, qui dispose en la matière d'un large pouvoir d'appréciation, n'apparaît pas inappropriée. Il n'est en tout cas pas fondé sur des éléments dépourvus de pertinence, négligeant des facteurs décisifs ou guidée par une appréciation insoutenable des circonstances, que ce soit dans son approche ou dans son résultat. Au vu des circonstances, on ne peut admettre qu'il a fait un usage excessif ou abusif dudit pouvoir d'appréciation, étant rappelé que lorsque le législateur a voulu conférer à l'autorité de décision un pouvoir d'appréciation dans l'application d'une norme, le juge qui, outrepassant son pouvoir d'examen, corrige l'application pourtant défendable de cette norme à laquelle ladite autorité a procédé viole lui-même le principe de l'interdiction de l'arbitraire (cf. ATF 140 I 201 consid. 6.1 et les références citées).

Ni les compétences professionnelles de M. D______, ni les avantages qu’il procurerait à la recourante, ni encore la place que cette dernière occupe dans le paysage économique genevois, suisse, voire au-delà, compte tenu notamment de son domaine d'activité, ne sont remises en cause. Cela étant, sous l’angle du respect du principe de la priorité, force est effectivement de constater que la recourante n'a de loin pas déployé tous les efforts que l'on pouvait raisonnablement attendre d'elle pour trouver un travailleur indigène ou ressortissant de l'UE/AELE afin de pourvoir le poste considéré, malgré les spécificités de celui-ci. Au contraire, ces dernières auraient à elles seules dû la conduire à entreprendre des démarches bien plus étendues.

Elle a certes annoncé la vacance du poste à l’OCE, laquelle était visible dans la base de données de celui-ci dès le 8 mai 2020. Sans même attendre les résultats de cette publication ou entreprendre d’autres démarches, elle a conclu un contrat de travail avec M. D______ le 12 mai 2020 déjà, fixant son entrée en service « dès l’obtention de permis ». Ce n’est que les 30 mai et 5 juin suivants qu’elle a publié une annonce sur les sites « anibis.ch » et « petitesannonces.ch », peu avant de solliciter la délivrance de l’autorisation litigieuse, le 25 juin 2020 seulement. Ce n’est aussi qu’après avoir pris connaissance de la décision querellée, refusant de faire droit à sa demande en raison, notamment, du non-respect de l’ordre de priorité, qu’elle a effectué de plus amples démarches, de surcroît de façon toujours très « timide ». Elle s'est ainsi bornée à adresser une annonce à l’OCE, qui a été publiée sur la plateforme « Job-Room » le 1er octobre 2020, ainsi qu’une annonce à la « Tribune de Genève » et à « 24 heures », publiée le 6 octobre 2020.

Elle n’a ainsi manifestement pas entrepris des démarches en temps opportun.

La chronologie des faits montre clairement que les deux annonces publiées sur les sites « anibis.ch » et « petitesannonces.ch », postérieurement à la conclusion du contrat, l'ont été avant tout pour s’acquitter d’une obligation légale, alors que qu'elle souhaitait assez clairement, et dès le départ, engager M. D______ et lui seul.

De plus, les démarches qu'elle a déployées - sur des sites internet on ne peut plus généralistes - sont en tout état de cause clairement insuffisantes. Peu importe à cet égard qu’elle ait renouvelé ses annonces à six reprises.

Il apparaît également que le processus de recrutement a été plutôt bref.

Après les premières démarches effectuées en mai et juin 2020, la recourante n’en a entreprises aucune autre avant octobre 2020 et elle ne semble pas les avoir poursuivies au-delà : le 15 octobre 2020, elle s'est bornée à produire les dix curriculums vitae (de personnes n'ayant manifestement pas le profil recherché) qu'elle avait supposément reçus (à des dates non précisées) suite à ses annonces. Elle n’a pas démontré, ni même allégué avoir continué ses recherches ensuite.

Compte tenu du profil spécifique recherché, elle était tenue de procéder à des recherches plus approfondies que celles qu'elle a effectuées. Elle ne pouvait ainsi se contenter d’annoncer la vacance du poste à l'OCE, même à deux reprises (ATA/1156/2020 du 17 novembre 2020 consid. 7), ni de publier quelques annonces dans la presse locale. Il lui appartenait au contraire de diffuser sa recherche à plus large échelle, en particulier sur des sites et dans une presse plus spécialisées, tant en Suisse que dans l'UE, d'éventuellement mandater une agence de placement à cette fin, de recourir aux réseaux sociaux ou encore de s’adresser à des organismes spécialisés (par exemple la Guilde internationale du tapis d'Orient, association basée à Pully [VD] ayant pour but de « rassembler les collectionneurs et amateurs de Tapis d'Orient ainsi que les importateurs et grossistes en tapis afin, notamment, de créer une bibliothèque spécialisée, publier une revue, organiser des échanges expositions et expertises ainsi que des voyages en Orient »), ce qu'elle n'a toutefois pas fait.

Dans ces conditions, force est de retenir, avec l'autorité intimée, que la recourante n'est pas parvenue à démontrer avoir été réellement et concrètement dans l'impossibilité de trouver un travailleur correspondant aux exigences du poste sur le marché local ou européen, en particulier parce qu'elle avait, en vain, entrepris toutes les recherches utiles et nécessaires susceptibles d'être attendues d'elle, qui permettraient de retenir que la condition de l'ordre de priorité de l'art. 21 al. 1 LEI serait remplie.

L'une des conditions légales cumulatives applicables n'ayant pas été respectée, il n'est pas nécessaire d'examiner si les autres conditions de l'art. 18 LEI sont réalisées, en particulier, la question de savoir si l'admission de M. D______ servirait ou non les intérêts économiques du pays (let. a).

18.         Au vu de ce qui précède, il faut constater que la décision querellée ne viole pas le droit fédéral. Le recours, mal fondé, doit donc être rejeté.

19.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe. Vu cette issue, aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA a contrario).

20.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au SEM.

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 14 septembre 2020 par A______ contre la décision prise à son égard le 29 juillet 2020 par l'office cantonal de l’inspection et des relations du travail ;

2.             le rejette ;

3.             met un émolument de CHF 500.- à la charge de la recourante, lequel est couvert par son avance de frais du même montant ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10, rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Au nom du Tribunal :

Le président

Yves JOLIAT

 

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

 

Genève, le 26 août 2021

 

La greffière