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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2236/2020

JTAPI/108/2021 du 03.02.2021 ( OCPM ) , REJETE

REJETE par ATA/821/2021

Descripteurs : CAS DE RIGUEUR;REGROUPEMENT FAMILIAL;FRAUDE À LA LOI
Normes : LEI.30.al1.letb; OASA.31.al1; CEDH.8; LEI.62.al1.leta
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2236/2020

JTAPI/108/2021

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 3 février 2021

 

dans la cause

 

Monsieur A______ et Madame B______, représentés par Me Manon PASQUIER, avocate, avec élection de domicile

 

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1967, et Mme B______, née le ______ 1969, sont ressortissants du Kosovo.

2.             Le 13 mars 1995, M. A______ a épousé au Kosovo Madame C______, également ressortissante du Kosovo.

3.             De cette union sont nés deux garçons : D______, le ______ 1996, et E______, le ______ 1998.

4.             Le 29 décembre 2003, M. A______ a obtenu un passeport français.

5.             Il est arrivé en Suisse en 2005 et a trouvé du travail en tant que manoeuvre sur divers chantiers, obtenant d'abord une autorisation de séjour de courte durée (livret L), puis un permis B. Celui-ci a été renouvelé à plusieurs reprises, soit jusqu'au 4 août 2013.

6.             Son épouse et ses deux enfants l'ayant ensuite rejoint, ils ont obtenu à leur tour un permis B.

7.             Le 13 juin 2007, M. A______ a subi un accident professionnel. Selon le compte rendu opératoire des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) du 19 juin 2007, son pied droit s'était pris en étau dans une presse, provoquant une fracture ouverte. Cette blessure a nécessité plusieurs interventions chirurgicales, la dernière ayant eu lieu en octobre 2012.

8.             Depuis cet accident, M. A______ n'a plus été en mesure de travailler, de sorte qu'il a été pris en charge par l'assurance accidents, puis par l'assurance invalidité (AI) et l'Hospice général.

9.             Par jugement passé en force de chose jugée le 15 septembre 2012, le Tribunal de première instance a prononcé le divorce de M. A______ et de Mme C______, les deux enfants demeurant avec leur mère.

10.         Le 14 novembre 2012, M. A______ s'est marié au Kosovo avec Mme B______, laquelle est ensuite venue habiter chez lui à Genève.

11.         Par lettre datée du 3 avril 2013, le Consulat général de France à Genève a informé l'office cantonal de la population, devenu le 11 décembre 2013 l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), que M. A______ avait obtenu frauduleusement son passeport français sur la base d'un acte de naissance falsifié.

12.         Par lettre du 25 avril 2013, afin de se prononcer sur le renouvellement de son autorisation de séjour, l'OCPM a invité M. A______ à lui remettre divers documents et renseignements.

13.         Selon un procès-verbal d'audition du 13 juin 2013, M. A______ a reconnu devant la police judiciaire genevoise avoir effectivement obtenu son passeport français sur la base d'un acte de naissance falsifié qu'il avait acheté à des compatriotes.

Par ordonnance du 8 juillet 2013, le Ministère public genevois a toutefois décidé de ne pas entrer en matière sur cette infraction pour motif de prescription.

14.         Par lettre du 18 juillet 2013, l'OCPM a invité M. A______ à lui fournir divers renseignements complémentaires, notamment : tout document attestant de sa bonne intégration en Suisse, une liste des membres de sa famille au Kosovo en indiquant la nature et la fréquence des contacts entretenus avec eux, les raisons pour lesquelles il ne pourrait pas retourner au Kosovo compte tenu de sa situation.

15.         Par lettre et formulaire M datés respectivement des 7 et 8 janvier 2014, Mme B______ a sollicité l'octroi d'un permis de séjour au titre de regroupement familial.

16.         Par courrier du 3 septembre 2014, M. A______ a répondu à la lettre du 18 juillet 2013 sur les points suivants. Son père et ses deux frères vivaient avec leur épouse et leurs enfants sous le même toit. Il les appelait trois fois par semaine. Il ne pouvait pas retourner au Kosovo, car il n'y possédait pas de maison. Les soins médicaux n'étaient pas appropriés à son état de santé, qui s'était péjoré depuis un an. Il souhaitait également que ses enfants puissent poursuivre leur scolarité à Genève.

17.         Se plaignant de céphalées irradiant dans sa nuque et ses épaules, M. A______ a été diagnostiqué par le service d'oncologie des HUG, selon un rapport médical du 9 décembre 2014, comme souffrant d'un astrocytome fibrillaire de grade 2, soit une tumeur cérébrale qui, du fait de sa localisation, ne pouvait pas être traitée chirurgicalement, mais par radiothérapie et chimiothérapie.

18.         Dès le 1er mars 2015, M. A______ a été mis au bénéfice d'une rente AI entière basée sur un degré d'invalidité de 100%. Vu son état de santé, des mesures professionnelles ne se justifiaient pas.

19.         Selon un extrait du registre des poursuites daté du 8 novembre 2017, il faisait l'objet d'actes de défaut de biens pour un total de plus de CHF 23'000.-.

20.         Invité à fournir divers renseignement et documents dans le cadre d'un examen de ses conditions de séjour en Suisse, M. A______ a expliqué, par lettre du 21 novembre 2017, qu'il se rendait chaque semaine chez les médecins pour suivre son traitement. Il était déprimé, n'avait plus beaucoup d'amis et restait la plupart du temps chez lui. Ses deux enfants lui rendaient visite chaque semaine. Sa rente AI était complétée par l'aide sociale, mais il était dans l'attente d'une réponse du service des prestations complémentaires (SPC) pour un complément de sa rente AI. Son épouse, Mme B______, suivait des cours de français. Elle avait effectué un stage de vendeuse à 50% auprès de F______ et travaillé comme cueilleuse dans une ferme à Meyrin. Désireuse de s'intégrer et d'être indépendante financièrement, elle cherchait quotidiennement du travail.

21.         Selon une attestation de l'Hospice général du 11 septembre 2019, M. A______ recevait des prestations financières depuis décembre 2009, excepté durant une période d'interruption du 1er mars 2011 au 1er octobre 2013. Les montants annuels versés étaient les suivants : CHF 12'515.45 en 2013, CHF 51'110.95 en 2014, CHF 49'917.50 en 2015, CHF 44'214.05 en 2016, CHF 42'299.55 en 2017, CHF 43'348.45 en 2018 et CHF 28'403.80 jusqu'en août 2019.

22.         En 2019, sa rente AI annuelle s'élevait à CHF 7'356.-.

23.         Par lettre du 31 janvier 2020, l'OCPM a informé M. A______ de son intention de refuser le renouvellement de son autorisation de séjour et par voie de conséquence de refuser l'octroi d'une telle autorisation à son épouse. Un délai de trente jour lui était accordé pour formuler ses observations et éventuelles objections.

24.         Par courrier de leur conseil du 2 mars 2020, Mme B______ et M. A______ ont fait usage de leur droit d'être entendu. L'état de santé précaire de ce dernier et la détresse personnelle qui en découlait devaient à eux seuls justifier la reconnaissance d'un cas de rigueur.

25.         Par décision du 22 juin 2020, l'OCPM a refusé la prolongation de l'autorisation de séjour de M. A______ et l'octroi de l'autorisation de séjour de Mme B______.

M. A______ avait été déchu de la nationalité française, dès lors qu'il l'avait acquise de façon frauduleuse, ce que l'intéressé avait reconnu.

La durée de son séjour en Suisse (depuis août 2005) n'était pas déterminante, étant donné qu'il avait vécu jusqu'à 37 ans au Kosovo. Il dépendait de l'aide sociale depuis le 1er décembre 2009, l'Hospice général lui ayant déjà versé à la date du 2 mai 2020 un montant total de plus de CHF 330'000.-. La rente mensuelle qu'il recevait de l'AI, soit CHF 607.-, était manifestement insuffisante pour bénéficier d'un titre de séjour. Son intégration ne revêtait pas un caractère exceptionnel et aucun élément du dossier n'indiquait que l'arrivée de son épouse en Suisse permettrait d'assurer l'entretien de leur ménage. Le traitement médical suivi par M. A______ ne suffisait pas à justifier la reconnaissance d'un cas personnel d'extrême gravité. La nécessité d'un suivi médical n'était pas contestée, mais celui-ci pouvait être assuré au Kosovo ou en se rendant en Suisse pour un séjour de courte durée au moyen d'un visa de type C. Rien ne s'opposait à son retour dans son pays d'origine. Il y était d'ailleurs retourné en 2018 et 2019 notamment, afin de rendre visite à sa famille. En outre, sa rente AI pouvait lui être versée au Kosovo, conformément à l'accord conclu entre ce pays et la Suisse. Un délai au 19 août 2020 lui était imparti, ainsi qu'à son épouse, pour quitter le territoire suisse.

26.         Par acte déposé le 23 juillet 2020, sous la plume de leur conseil, M. A______ et Mme B______ ont interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) contre cette décision, concluant principalement, sous suite de frais et de dépens, à son annulation et à ce que l'OCPM soit condamné à prolonger l'autorisation de séjour de M. A______ et à octroyer une autorisation de séjour à son épouse. Préalablement, ils ont conclu à l'audition des deux fils de M. A______ en qualité de témoins.

Le recourant n'avait aucune attache au Kosovo, ses deux fils constituant sa seule famille. Ces derniers, désormais majeurs et indépendants financièrement, avaient acquis la nationalité suisse par naturalisation. Ils l'assistaient et l'entouraient dans sa vie au quotidien.

Outre les séquelles de son accident professionnel au pied droit et la poursuite du traitement de sa tumeur au cerveau, M. A______ avait souffert d'une pneumonie pour laquelle il avait été hospitalisé entre novembre 2017 et juin 2018. En février 2018, il avait dû être opéré pour une inflammation de la vésicule biliaire. Ses problèmes de santé l'avaient de surcroît plongé dans une profonde dépression nécessitant une prise en charge psychiatrique et psychothérapeutique depuis janvier 2017. Selon un rapport médical du Dr F______ du 20 juillet 2020, la « complexité de la prise en charge multidisciplinaire », « les connaissances médicales et les moyens thérapeutiques nécessaires pour traiter les pathologies présentes », ainsi que « la nécessité d'un cadre thérapeutique stable et solide » allaient à l'encontre d'un traitement médical dans le pays d'origine.

La révocation de l'autorisation de séjour au motif que le recourant avait fait de fausses déclarations ou dissimulé des faits essentiels apparaissait disproportionnée au vu des graves problèmes de santé physique et psychique dont il souffrait et des difficultés de mise en place d'un nouveau suivi médical au Kosovo. La réintégration du recourant dans son pays d'origine était dès lors manifestement et notablement plus difficile que celle de la moyenne des étrangers. Son état de santé et sa situation de détresse personnelle présentaient à eux seuls le caractère exceptionnel requis pour reconnaître un cas de rigueur pouvant donner droit à une autorisation de séjour. Par ailleurs, concernant sa dépendance à l'aide sociale, il fallait tenir compte du fait que le recourant avait été empêché de prendre part à la vie économique en raison de son état de santé. La recourante avait quant à elle la volonté et l'aptitude totale à travailler, afin de subvenir à leur entretien.

En outre, l'état de santé du recourant le rendait dépendant de ses deux fils, lesquels lui assuraient au quotidien un soutien « incommensurable sur le plan logistique, mais également du point de vue psychique ». Le refus de lui octroyer un permis B, alors qu'il se trouvait dans une situation de forte dépendance par rapport à ses fils, était contraire à l'art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101).

Enfin, ses troubles respiratoires le classant parmi les personnes vulnérables à la Covid-19, son renvoi au Kosovo risquait de l'entraîner vers une issue fatale.

27.         Dans ses observations du 24 septembre 2020, l'OCPM a conclu au rejet du recours.

L'intégration du recourant ne pouvait être qualifiée de bonne dans la mesure où il bénéficiait de prestations de l'Hospice général depuis 2009. En dépit des années passées en Suisse, au vu des divers rapports médicaux remis, il ne semblait pas pouvoir s'exprimer et/ou comprendre correctement le français. La durée de son séjour (près de quinze ans) devait être relativisée en raison de son caractère illégal, due à sa nationalité française obtenue frauduleusement, et de sa présence en Suisse par tolérance depuis 2013. Sur le plan pénal, l'utilisation frauduleuse de la nationalité française dans le cadre de l'obtention de ses titres de séjours était constitutive d'un délit au sens de l'art. 118 al. 1 LEI et d'un crime selon l'art. 253 du code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0). Le recourant n'avait pas démontré entretenir de relations étroites avec ses fils, ni que sa réintégration dans son pays d'origine serait compromise. Il pouvait y recevoir sa rente AI et rien n'indiquait il y serait isolé, dès lors que les visas de retour obtenus en 2018 et 2019 pour rendre visite à sa famille au Kosovo démontraient qu'il entretenait des liens avec elle. Les strictes conditions permettant de reconnaitre un cas de rigueur n'étaient dès lors par remplies dans le cas présent. Il en allait de même de l'applicabilité de l'art. 8 CEDH au rapport de dépendance allégué vis-à-vis de ses fils.

Dans le mesure où les arguments dont pouvait se prévaloir le recourant étaient essentiellement d'ordre médical, son cas devait être examiné sous l'angle de l'exigibilité de son renvoi au sens de l'art. 83 al. 4 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20). Afin de pouvoir se déterminer sur cette question, l'OCPM demandait que le recourant produisît les rapports médicaux détaillant la situation de toutes ses pathologies et leur évolution potentielle à court et moyen terme. Il ne s'opposait pas à l'audition du recourant et de ses médecins traitants.

Enfin, le sort de la recourante dépendait étroitement de la suite qui serait donnée à la demande du recourant.

28.         Par réplique du 21 octobre 2020, les recourants ont persisté dans les conclusions de leur recours. Des motifs médicaux ne constituaient pas seulement un obstacle à l'exécution du renvoi, mais pouvaient aussi conduire à la reconnaissance d'un cas de rigueur au sens de l'art. 30 al. 1 let. b LEI. Les visas obtenus en 2018 et 2019 l'avaient été dans le « strict et triste contexte du décès » du père du recourant.

Ils ont produit plusieurs certificats médicaux datés d'octobre 2020, ainsi qu'un rapport des HUG du 10 mai 2019 relatif à l'astrocytome fibrillaire de grade 2. Selon ce dernier document, le recourant avait suivi une radio-chimiothérapie en janvier 2015 et un examen IRM en mai 2019 qui ne constatait aucun signe de progression de la maladie. « L'imagerie du 06.05.2019 retrouve la maladie connue, inchangée depuis les dernières imageries. Il s'agit donc d'une stabilité clinique et radiologique à plus de 4 ans de la fin des traitements, pour laquelle nous proposons la poursuite du suivi clinique semestriel et contrôle radiologique annuel dans notre service. M. A______ est informé de la nécessité de reconsulter plus tôt en cas de changement de la symptomatologie ». Un rapport médical établi le 19 octobre 2020 par le Dr G______, spécialiste en pneumologie, relève que « sa qualité de vie sur le plan respiratoire peut être qualifiée comme bonne malgré les séquelles ventilatoires sévères objectivées. Après deux ans de suivi sur une base semestrielle sans dégradation ni progression de sa pathologie respiratoire, je lui recommande un suivi annuel par radiographie du thorax et fonctions pulmonaires. (...) Ces séquelles ventilatoires ne justifient pas d'autre prise en charge particulière sur le plan médical respiratoire ». S'agissant de ses troubles psychiques, le certificat médical du Dr H______, médecin psychiatre et psychothérapeute, daté du 14 octobre 2020, mentionne notamment que M. A______ voit ses fils tous les week-ends. « S'il ne les voit pas durant 2 semaines, il devient anxieux et dépressif. Suite au retrait de son permis de séjour (B) en 2013, son état psychique s'est beaucoup perturbé nécessitant un suivi psychologique au Centre médical de Carteret de 2013 au 5 janvier 2017. Il ne supporte plus son statut irrégulier en Suisse où il vit depuis 15 ans ce qui déstabilise son état psychique. (...) La décision de renvoi au Kosovo le met dans un état critique avec des idées suicidaires de se jeter sous un train ou une voiture. Il n'ose plus sortir seul par crainte de passer à l'acte et de se suicider. Il se sent désespéré, impuissant et dans une impasse ». Les recourants ont indiqué qu'ils ne s'opposaient pas à l'audition des médecins traitants concernés.

29.         Par duplique du 5 novembre 2020, l'OCPM a persisté dans ses conclusions tendant au rejet du recours, les pièces remises n'étant pas de nature à modifier sa position. Même si les pathologies dont souffrait le recourant ne pouvaient être minimisées, rien n'indiquait qu'un retour au Kosovo entraînerait un risque grave et imminent pour sa vie. Ce pays disposait des infrastructures nécessaires permettant un suivi médical, de sorte que l'exécution de son renvoi devait être considérée comme exigible au sens de la loi. Il était rappelé que les rentes AI étaient exportables au Kosovo.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l'espèce, contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l'espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, p. 179 n. 515).

4.             Saisi d'un recours, le tribunal applique le droit d'office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n'est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

5.             Tel que garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour le justiciable de produire des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (cf. ATF 142 II 218 consid. 2.3 ; 140 I 285 consid. 6.3.1). Ce droit ne s'étend toutefois qu'aux éléments pertinents pour décider de l'issue du litige et le droit de faire administrer des preuves n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 136 I 229 consid. 5.2 ; ATA/168/2020 du 11 février 2020 consid. 2 et les références citées). Par ailleurs, il ne confère pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (art. 41 in fine LPA ; ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_51/2018 du 17 janvier 2019 consid. 4.1 ; 2C_901/2014 du 27 janvier 2015 consid. 3).

6.             En l'espèce, les recourants ont pu développer leur argumentation dans leur recours et déposer les pièces justificatives qu'ils estimaient utiles. Pour sa part, le tribunal dispose d'éléments suffisants et nécessaires pour statuer immédiatement sur le litige. Dès lors, il ne se justifie pas de procéder à l'audition des recourants et de témoins.

7.             Le 1er janvier 2019, la loi sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr - RS 142.20) et ses ordonnances d'exécution, en particulier l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), ont connu une modification partielle comprenant également un changement de dénomination de la loi (modification de la LEtr du 16 décembre 2016). Ainsi, la LEtr s'appelle désormais loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RO 2018 3171), étant précisé que la plupart de ses dispositions sont demeurées identiques. En parallèle sont entrées en vigueur la modification de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 15 août 2018 (OASA - RO 2018 3173), ainsi que la révision totale de l'ordonnance sur l'intégration des étrangers du 15 août 2018 (OIE - RO 2018 3189).

En l'absence de disposition transitoire et dans la mesure où dans le cas particulier, l'application du nouveau droit ne conduirait pas à une issue différente de l'examen de l'affaire sous l'angle des anciennes dispositions, il y a lieu d'appliquer la LEtr dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2018 (dans le même sens, cf. ATF 135 II 384 consid. 2.3). Cela étant, le tribunal de céans, à l'instar du Tribunal fédéral, dénommera ci-après LEI les dispositions qui n'ont pas changé au 1er janvier 2019 et « ancien art. LEtr » dans le cas contraire (arrêts du Tribunal fédéral 2C_1133/2018 du 18 février 2019 consid. 5 ; 2C_1151/2018 du 15 janvier 2019 consid. 6.1).

8.             La LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l'OASA, règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants du Kosovo.

9.             Conformément l'art. 126 al. 1 LEI (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1075/2019 du 21 avril 2020 consid. 1.1), les demandes déposées avant le 1er janvier 2019 sont régies par l'ancien droit.

10.         En l'espèce, dès lors que la demande de renouvellement de l'autorisation de séjour du recourant et celle de regroupement familial pour la recourante ont été déposées avant le 1er janvier 2019, ce sont la LEI et l'OASA dans leur teneur avant le 1er janvier 2019 qui s'appliquent.

11.         À teneur de l'art. 62 al. 1 let. a LEI, l'autorité compétente peut révoquer une autorisation, à l'exception de l'autorisation d'établissement, ou une autre décision fondée sur la présente loi, notamment dans le cas où l'étranger ou son représentant légal a fait de fausses déclarations ou a dissimulé des faits essentiels durant la procédure d'autorisation.

12.         Selon l'art. 30 al. 1 let. b LEI, il est possible de déroger aux conditions d'admission d'un étranger en Suisse telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI pour tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

13.         L'art. 31 al. 1 OASA prévoit que, pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant (let. a), du respect par celui-ci de l'ordre juridique suisse (let. b), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière ainsi que de sa volonté de prendre part à la vie économique et d'acquérir une formation (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f), ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g).

14.         Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4 ; ATA/353/2019 du 2 avril 2019 consid. 5c ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4c). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/38/2019 précité consid. 4c).

15.         Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en oeuvre dans son pays d'origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d'études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n'arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l'aide sociale ou des liens conservés avec le pays d'origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral [ci-après : TAF] C-5414/2013 du 30 juin 2015 consid. 5.1.4 ; C-6379/2012 et C-6377/2012 du 17 novembre 2014 consid. 4.3 ; C-1240/2012 du 24 juillet 2014 consid. 5.3 ; ATA/353/2019 précité consid. 5d ; ATA/38/2019 précité consid. 4d).

16.         Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l'examen d'un cas d'extrême gravité, elle doit néanmoins être examinée à la lumière de l'ensemble des circonstances du cas particulier et être relativisée lorsque l'étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l'obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2). La durée du séjour (légal ou non) est ainsi un critère nécessaire, mais pas suffisant à lui seul pour la reconnaissance d'un cas de rigueur.

La jurisprudence requiert, de manière générale, une très longue durée. Par durée assez longue, la jurisprudence entend une période de sept à huit ans (arrêt du TAF C-7330/2010 du 19 mars 2012 ; Minh SON NGUYEN/Cesla AMARELLE, Code annoté de droit des migrations, vol. 2 : LEtr, Berne, 2017, p. 269 et les références citées).

Le Tribunal fédéral a considéré que l'on ne saurait inclure dans la notion de séjour légal les périodes où la présence de l'intéressé est seulement tolérée en Suisse, et qu'après la révocation de l'autorisation de séjour, la procédure de recours engagée n'emporte pas non plus une telle conséquence sur le séjour (arrêt du Tribunal fédéral 2C_926/2010 du 21 juillet 2011 ; Minh SON NGUYEN/Cesla AMARELLE, op. cit., p. 270).

17.         Selon la jurisprudence, il n'y a pas d'intégration réussie lorsque l'étranger n'exerce pas d'activité lucrative qui lui permette de couvrir ses besoins et qu'il dépend des prestations sociales pendant une période relativement longue (arrêts du Tribunal fédéral 2C_385/2016 précité consid. 4.1 ; 2C_748/2014 du 12 janvier 2015 consid. 3.2 ; 2C_352/2014 du 18 mars 2015 consid. 4.3 ; 2C_385/2014 du 19 janvier 2015 consid. 4.1). Des périodes d'inactivité de durée raisonnable n'impliquent pas forcément une absence d'intégration professionnelle. L'essentiel en la matière est que l'étranger subvienne à ses besoins, n'émarge pas à l'aide sociale et ne s'endette pas de manière disproportionnée (arrêts du Tribunal fédéral 2C_364/2017 du 25 juillet 2017 consid. 6.2 ; 2C_1066/2017 du 31 mars 2017 consid. 3.3 ; 2C_385/2016 précité consid. 4.1).

18.         L'exigence de participation à la vie économique repose sur le principe selon lequel l'intéressé doit être apte à subvenir lui-même à ses besoins. L'étranger doit en principe être en mesure de pourvoir à son propre entretien et à celui de sa famille, grâce à son revenu, à sa fortune ou à des prestations provenant de tiers auxquelles il a droit. Font partie de ces dernières, par exemple, les prestations d'entretien au titre du code civil ou les prestations des assurances sociales telles que la prévoyance vieillesse, survivants et invalidité et l'indemnité de chômage. En revanche, celui qui bénéficie de l'aide sociale ne participe pas à la vie économique (Secrétariat d'État aux migrations, Directives LEI, octobre 2013, état au 1er janvier 2021, ch. 3.3.1.4.1).

19.         L'art. 30 al. 1 let. b LEI n'a pas pour but de soustraire le requérant aux conditions de vie de son pays d'origine, mais implique qu'il se trouve personnellement dans une situation si grave qu'on ne peut exiger de sa part qu'il tente de se réadapter à son existence passée. Des circonstances générales affectant l'ensemble de la population restée sur place, en lien avec la situation économique, sociale, sanitaire ou scolaire du pays en question et auxquelles le requérant serait également exposé à son retour, ne sauraient davantage être prises en considération, tout comme des données à caractère structurel et général, telles que les difficultés d'une femme seule dans une société donnée (ATF 123 II 125 consid. 5b.dd ; arrêt du Tribunal fédéral 2A.245/2004 du 13 juillet 2004 consid. 4.2.1). Au contraire, dans la procédure d'exemption des mesures de limitation, seules des raisons exclusivement humanitaires sont déterminantes, ce qui n'exclut toutefois pas de prendre en compte les difficultés rencontrées par le requérant à son retour dans son pays d'un point de vue personnel, familial et économique (ATF 123 II 125 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 précité consid. 5.2 ; arrêts du TAF C-5414/2013 précité consid. 5.1.4 ; C-6379/2012 et C-6377/2012 précité consid. 4.3 ; ATA/1130/2017 du 2 août 2017).

La question n'est donc pas de savoir s'il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d'examiner si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1 ; ATA/353/2019 précité consid. 5d).

20.         Selon la jurisprudence, des motifs médicaux peuvent, selon les circonstances, conduire à la reconnaissance d'un cas de rigueur lorsque l'intéressé démontre souffrir d'une sérieuse atteinte à la santé qui nécessite, pendant une longue période, des soins permanents ou des mesures médicales d'urgence, indisponibles dans le pays d'origine, de sorte qu'un départ de Suisse serait susceptible d'entraîner de graves conséquences pour sa santé. En revanche, le seul fait d'obtenir en Suisse des prestations médicales supérieures à celles offertes dans le pays d'origine ne suffit pas à justifier une exception aux mesures de limitation (ATF 128 II 200 consid. 5.3 ; ATA/1162/2020 du 17 novembre 2020 consid. 6c ; ATA/801/2018 du 7 août 2018 consid. 8a et les arrêts cités).

En l'absence de liens d'une certaine intensité avec la Suisse, l'aspect médical et les éventuelles difficultés de réintégration de la personne concernée dans le pays d'origine ne sauraient justifier, à eux seuls, l'octroi d'un permis humanitaire pour cas de rigueur (arrêts du TAF C-2712/2012 du 9 juillet 2014 consid. 5.7 ; C-3216/2010 du 29 janvier 2014 consid. 3.6). Le cas échéant, ces critères ne peuvent en effet être pris en considération que dans le cadre de l'examen de la licéité et de l'exigibilité de l'exécution du renvoi (arrêts du TAF F.4125/2016 du 26 juillet 2017 consid. 5.4.1; C-2712/2012 précité consid. 5.7 ; ATA/1162/2020 précité consid. 6c ; ATA/801/2018 du 7 août 2018 consid. 8b).

21.         Pour être valable, le refus d'autorisation ou la révocation de celle-ci ne se justifie que si elle constitue une mesure proportionnée aux circonstances du cas d'espèce, au sens des art. 96 LEI et 8 par. 2 CEDH à l'issue d'une pesée des divers intérêts en jeu (ATF 135 II 377 consid. 4.3). La pesée des intérêts accomplie sous l'angle de la LEI se confond largement avec celle que le juge doit effectuer lors de la mise en oeuvre de l'art. 8 par. 2 CEDH (ATF 135 II 377 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_139/2013 du 11 juin 2013 consid. 7.1 ; ATA/1331/2020 du 22 décembre 2020).

22.         S'agissant de l'examen des critères d'intégration, les autorités compétentes disposent d'un large pouvoir d'appréciation (cf. art. 96 al. 1 LEI ; ATF 134 II 1 consid. 4.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_364/2017 du 25 juillet 2017 consid. 6.4 ; ATA/778/2020 du 18 août 2020).

23.         En l'espèce, le tribunal observe tout d'abord que le recourant a pu bénéficier, durant les années 2005 à 2013, d'un permis de séjour L, puis d'un permis B, grâce à son acquisition frauduleuse de la nationalité française. Ce fait, reconnu par le recourant, est de nature à justifier la révocation des titres de séjour précités en application de l'art. 62 al. 1 let. a LEI.

24.         Les recourants sollicitant cependant la délivrance d'un permis de séjour en invoquant les art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 OASA, il convient d'examiner ci-dessous si M. A______ en remplit les conditions. Dans l'affirmative, Mme B______ pourrait alors se voir également délivrer une autorisation de séjour au titre de regroupement familial.

25.         Le recourant réside en Suisse depuis 2005, soit depuis un peu plus de quinze ans. Cette durée doit être toutefois relativisée, dès lors que les titres de séjour qu'il a obtenus l'ont été de manière frauduleuse et que, depuis 2013, sa présence sur le territoire helvétique découle d'une simple tolérance.

26.         Il ne ressort pas du dossier que son intégration soit remarquable. Depuis son accident de travail en juin 2007, il n'est plus en mesure de travailler. Sa rente AI mensuelle d'un peu plus de CHF 600.- n'étant pas suffisante pour vivre à Genève, il dépend depuis décembre 2009 de prestations reçues de l'Hospice général, dont le montant total cumulé s'élevait à plus de CHF 330'000.- en mai 2020. En novembre 2017, il faisait l'objet d'actes de défaut de biens pour plus de CHF 23'000.-.

Il n'apparaît pas non plus qu'il ait des attaches particulières avec la Suisse et qu'il s'y soit créé un réseau d'amis proches. Hormis ses deux fils naturalisés, il n'allègue pas avoir de la parenté en Suisse. Bien qu'il y réside depuis une quinzaine d'années, ses connaissances de la langue françaises restent très limitées.

Arrivé en Suisse en 2005, à l'âge de 38 ans, le recourant n'entretient pas avec notre pays une relation si étroite au point qu'on ne puisse pas exiger de lui qu'il retourne au Kosovo, où il a passé toute son enfance et son adolescence, périodes décisives pour la formation de la personnalité.

27.         Concernant les possibilités de réintégration dans l'État de provenance, le recourant a des frères demeurant au Kosovo et très vraisemblablement d'autres parents et amis vivant là-bas. Il y est d'ailleurs retourné en 2018 ou 2019. Le fait de ne pas posséder de maison dans son pays natal ne devrait pas constituer un obstacle majeur, car rien n'indique qu'il ne pourrait pas louer un logement. D'un point de vue financier, le coût de la vie au Kosovo étant bien moins élevé qu'en Suisse, le recourant devrait pouvoir subvenir à son entretien et à celui de son épouse grâce aux rentes AI qu'il pourra se faire verser de Suisse en application de la convention de sécurité sociale entre la Confédération suisse et la République du Kosovo du 8 juin 2018, entrée en vigueur le 1er septembre 2019 (RS 0.831.109.475.1).

28.         Les récents certificats médicaux fournis par le recourant tendent à démontrer que son état de santé somatique s'est stabilisé et qu'il ne suit plus actuellement de thérapie concernant son astrocytome et les séquelles respiratoires de sa pneumonie, hormis des contrôles cliniques et radiologiques à effectuer semestriellement pour l'astrocytome et annuellement pour ses poumons.

S'agissant des troubles anxio-dépressifs pour lesquels le recourant est soigné avec des médicaments antidépresseurs, il ressort du certificat médical du Dr G______ du 14 octobre 2020 que son état psychique a été fortement perturbé suite au retrait de son permis de séjour en 2013. À cet égard, il y a lieu de souligner que les problèmes psychiques engendrés par la crainte de voir définitivement perdues ses perspectives d'avenir en Suisse ou l'imminence d'un renvoi ne sont pas susceptibles de justifier la reconnaissance d'un cas de rigueur. De telles réactions peuvent être couramment observées chez les personnes dont la demande d'autorisation de séjour a été rejetée, sans qu'il faille pour autant y voir un empêchement dirimant à l'exécution du renvoi. L'on ne saurait en effet, de manière générale, prolonger indéfiniment le séjour d'une personne en Suisse au seul motif qu'un retour dans son pays d'origine risquerait d'exacerber des symptômes dépressifs (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-4478/2016 du 29 janvier 2018 consid. 5.4 et les références citées).

Ainsi, en l'absence de liens d'une certaine intensité avec la Suisse, ces problèmes de santé ne sauraient à eux seuls justifier l'octroi d'une autorisation de séjour.

29.         Par conséquent, au regard de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce et pour les motifs exposés ci-dessus, le tribunal considère que le recourant ne se trouve pas dans une situation représentant un cas individuel d'une extrême gravité au sens des art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 al. 1 OASA.

30.         Les recourants invoquent également une violation de l'art. 8 CEDH.

31.         Le Tribunal fédéral admet qu'un étranger puisse, exceptionnellement et à des conditions restrictives, déduire un droit à une autorisation de séjour de l'art. 8 par. 1 CEDH, s'il existe un rapport de dépendance particulier entre lui et un proche parent hors famille nucléaire au bénéfice d'un droit de présence assuré en Suisse (nationalité suisse ou autorisation d'établissement), par exemple en raison d'une maladie ou d'un handicap (ATF 129 II 11 consid. 2 p. 14; 120 Ib 257 consid. 1d p. 260 s.). Lorsque ce n'est pas l'étranger, mais la personne au bénéfice d'un droit de présence assuré en Suisse qui est dépendante, il a jugé que l'étranger pouvait également faire valoir un droit lui ouvrant la voie du recours en matière de droit public en application de l'art. 8 CEDH. Tel est notamment le cas si la personne dépendante nécessite un soutien de longue durée en raison de graves problèmes de santé et que ses besoins ne seraient pas convenablement assurés sans la présence en Suisse de l'étranger qui sollicite une autorisation de séjour. En revanche, des difficultés économiques ou d'autres problèmes d'organisation ne rendent en principe pas irremplaçable l'assistance de proches parents et ne fondent donc pas un droit à se prévaloir de l'art. 8 CEDH pour obtenir le droit de séjourner en Suisse (cf. arrêt 2C_817/2010 du 24 mars 2011 et références citées; à propos de la notion de dépendance: cf. ATF 120 Ib 257 consid. 1d et 1e p. 261 ss). Le Tribunal fédéral a par exemple reconnu l'existence d'une relation irremplaçable s'agissant de grands-parents qui avaient développé une relation forte avec les petits-enfants après qu'ils étaient venus s'en occuper en Suisse suite à la mort de leur fille. La médication et le jeune âge d'un des petit-fils qui était malade nécessitaient dans ce cas une flexibilité et une disponibilité que seuls les grands-parents étaient à même d'apporter, la grand-mère ayant adopté une position de mère de substitution (cf. arrêts 2D_10/2018 du 16 mai 2018 consid. 4.1 ; 2C_369/2015 du 22 novembre 2015 consid. 4).  

32.         En l'espèce, le recourant allègue, sans fournir plus de détails, que les séquelles de son accident de travail de 2007 avaient restreint ses capacités « ambulatoires ». Sa tumeur cérébrale et ses troubles respiratoires, apparus par la suite, avaient mis encore davantage son moral à l'épreuve. Par leur présence, ses deux fils l'avaient non seulement soutenu sur un plan logistique dans ses activités quotidiennes, mais également sur le plan psychique. Il se serait ainsi installé dans un rapport de dépendance avec ses fils dont il ne pouvait plus se passer, au risque de tomber dans une détresse psychologique encore plus profonde.

33.         Le recourant n'explique pas en quoi ses besoins logistiques ne seraient pas convenablement assurés sans leur assistance et que celle-ci serait irremplaçable dans son cas. Selon le registre de l'OCPM, ses fils sont majeurs et domiciliés chez leur mère. Ils travaillent tous les deux, ce qui limite leur disponibilité et flexibilité. À teneur du certificat médical du Dr H______ du 14 octobre 2020, le recourant ne les voit pas quotidiennement, mais durant les week-ends, ce qui tend également à relativiser le rapport de dépendance qu'il allègue. Par ailleurs, il convient de rappeler que le recourant vit en ménage avec son épouse, de sorte qu'il est censé bénéficier de sa présence et de son soutien au quotidien. Dans ces circonstances, on ne saurait déduire un droit à une autorisation de séjour fondé sur l'art. 8 CEDH. Ce grief est écarté.

34.         Enfin, dès lors que le recourant se voit refuser la prolongation de son autorisation de séjour, son épouse n'a pas droit à l'octroi d'un tel permis, que ce soit au titre d'un regroupement familial ou à un autre titre.

35.         Selon l'art. 64 al. 1 LEI, les autorités compétentes renvoient de Suisse tout étranger qui n'a pas d'autorisation alors qu'il y est tenu (let. a), ainsi que tout étranger dont l'autorisation est refusée, révoquée ou n'a pas été prolongée (let. c) en assortissant ce renvoi d'un délai de départ raisonnable (al. 2).

36.         Le renvoi d'un étranger ne peut toutefois être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI). L'exécution du renvoi d'un étranger n'est pas possible lorsque celui-ci ne peut quitter la Suisse pour son État d'origine, son État de provenance ou un État tiers, ni être renvoyé dans un de ces États (art. 83 al. 2 LEI). Elle n'est pas licite lorsqu'elle serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (art. 83 al. 3 LEI). Elle n'est pas raisonnablement exigible si elle met concrètement en danger l'étranger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEI).

37.         S'agissant plus spécifiquement des personnes en traitement médical en Suisse, l'exécution du renvoi ne devient inexigible, en cas de retour dans leur pays d'origine, que dans la mesure où elles pourraient ne plus recevoir les soins essentiels garantissant des conditions minimales d'existence. Par soins essentiels, il faut entendre les soins de médecine générale et d'urgence absolument nécessaires à la garantie de la dignité humaine (arrêt du TAF E-3320/2016 du 6 juin 2016 et les références citées ; ATA/1160/2020 du 17 novembre 2020 consid. 7b). Ainsi, si les soins essentiels nécessaires peuvent être assurés dans le pays d'origine de l'étranger concerné, l'exécution du renvoi sera raisonnablement exigible. Elle ne le sera plus, en raison de l'absence de possibilités de traitement adéquat, si l'état de santé de l'intéressé se dégradait très rapidement au point de conduire d'une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable, et notablement plus grave de son intégrité physique (arrêt du TAF E-2693/2016 du 30 mai 2016 consid. 4.1 et les références citées ; ATA/801/2018 précité consid. 10d et les arrêts cités).

38.         Il ressort de la jurisprudence du Tribunal administratif fédéral que les troubles psychiques sérieux avec un risque suicidaire sont couramment observés chez les personnes confrontées à l'imminence d'un renvoi. Les autorités ne sauraient retenir, en l'absence de graves pathologies dont découlerait directement l'impossibilité d'exiger le renvoi, qu'une telle situation s'oppose d'emblée à l'exécution de cette mesure. Ni une tentative de suicide ni des tendances suicidaires ne s'opposent à l'exécution du renvoi, y compris sous l'angle de l'exigibilité, seule une mise en danger concrète devant être prise en considération. Enfin l'on ne saurait de manière générale prolonger indéfiniment le séjour d'une personne en Suisse au seul motif que la perspective d'un retour exacerbe un état psychologique perturbé (Arrêt du TAF D-5756/2012 du 13 décembre 2012 ; ATA/1217/2020 du 01.12.2020).

39.         Concernant des troubles anxio-dépressifs, il existe au Kosovo sept centres de traitement ambulatoire pour les maladies psychiques (Centres Communautaires de Santé Mentale) ainsi que des services de neuropsychiatrie pour le traitement des cas de psychiatrie aiguë au sein des hôpitaux généraux dans les villes de Prizren, Peja, Gjakova, Mitrovica, Gjilan, Ferizaj et Pristina. De plus, grâce à la coopération internationale, de nouvelles structures appelées « Maisons de l'intégration » ont vu le jour dans certaines villes. Ces établissements logent des personnes atteintes de troubles mineurs de la santé mentale dans des appartements protégés et leur proposent un soutien thérapeutique et socio-psychologique (arrêts du TAF F-7044/2014 du 19 juillet 2016 consid. 5.5.4 ; C-2748/2012 du 21 octobre 2014 ; C-5631/2013 du 5 mars 2014 consid. 5.3.3 et jurisprudence citée ; ATA/357/2018 du 17 avril 2018 ; ATA/1455/2017 du 31 octobre 2017). Par conséquent, il y a lieu de retenir que des soins psychiatriques sont disponibles au Kosovo.

40.         S'agissant des contrôle médicaux périodiques relatifs à la tumeur cérébrale, le Tribunal administratif fédéral a relevé l'existence d'un institut oncologique au centre hospitalier universitaire de Pristina, avec possibilité d'effectuer des contrôles radiologiques après une chimiothérapie, ainsi que la clinique privée "Rezonanca", laquelle pourrait également procéder à tous les traitements et suivis ultérieurs (arrêt F-1282/2015 du 18 juillet 2016 consid. 7.2.2).

41.         Quant au contrôle pneumologique annuel, il ressort de la jurisprudence que celui-ci est accessible également au Kosovo (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-3505/2018 du 20 novembre 2018 consid. 3.3).

42.         En outre, la situation liée au virus COVID-19, par son caractère temporaire, n'est pas de nature à remettre en cause l'exécution du renvoi. Le Tribunal administratif fédéral avait en effet considéré que « s'il [le virus COVID -19] devait, dans un cas d'espèce, retarder momentanément l'exécution du renvoi, celle-ci interviendrait plus tard, en temps approprié » (arrêt D-1233/2018 du 29 avril 2020).

43.         Ainsi, au vu de ce qui précède, la mesure de renvoi prononcée par l'OCPM est raisonnablement admissible et ne peut qu'être confirmée.

44.         En conséquence, mal fondé, le recours sera rejeté.

45.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), les recourants, pris conjointement et solidairement, qui succombent, sont condamnés au paiement d'un émolument s'élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l'avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l'issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

46.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d'État aux migrations.


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 23 juillet 2020 par Monsieur A______ et Madame B______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 22 juin 2020 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Caroline DEL GAUDIO-SIEGRIST

 

 

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière