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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3570/2023

ATA/621/2025 du 03.06.2025 sur JTAPI/655/2024 ( LCI ) , REJETE

Recours TF déposé le 09.07.2025, 1C_392/2025
Descripteurs : AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET DROIT PUBLIC DES CONSTRUCTIONS;CONSTRUCTION ET INSTALLATION;TRAVAUX DE CONSTRUCTION;SUSPENSION DE LA PROCÉDURE;DROIT D'ÊTRE ENTENDU;INSPECTION LOCALE;ZONE AGRICOLE;CONFORMITÉ À LA ZONE;AUTORISATION DÉROGATOIRE(EN GÉNÉRAL);REMISE EN L'ÉTAT;PROPORTIONNALITÉ;INTÉRÊT PUBLIC;PESÉE DES INTÉRÊTS;PERMIS DE CONSTRUIRE;SUPPRESSION(EN GÉNÉRAL);RÉTABLISSEMENT DE L'ÉTAT ANTÉRIEUR;ZONE DE DÉVELOPPEMENT
Normes : Cst; Cst; LAT.14; LAT.16.al1; LAT.16a; LAT.21.al1; LAT.22; LAT.24; OAT.3.al1; OAT.34; LPA.14.al1; LPA.37.letc; LPA.70; LCI.1; LCI.3.al3; LCI.129.lete; LCI.130; LCI.131; LCI.132; LaLAT.12.al4; LaLAT.13.al1; LaLAT.20.al2; LaLAT.27; LGZD.1; LGZD.2.al1; LGZD.2.al2; LGZD.3.al1; LZIAM.4.al1.letb
Résumé : Recours contre un jugement du TAPI confirmant, d'une part, le refus de délivrer une autorisation de construire (mise en conformité portant sur l'aménagement d'une surface de dépôt de matériel pour une durée provisoire de 54 mois sur 2 parcelles adjacentes) en zone de développement 3 (zone d'affectation primaire : zone agricole) n'ayant pas encore fait l'objet d'un PLQ et, d'autre part, l'ordre de remise en état de l'une des deux parcelles concernées. Application des normes relatives à la zone agricole (zone d'affectation primaire), lesdites parcelles n'étant pas situées dans le périmètre d'un PLQ en force. Les installations projetées ne sont pas comme conformes à la zone agricole et leur implantation hors de la zone à bâtir n'est pas imposée par leur destination. Le refus de délivrer l'autorisation est donc conforme au droit. Enfin, les conditions cumulatives permettant l'ordre de remise en état sont remplies ; en particulier, l'intérêt privé des recourants à maintenir les lieux en l'état ne l'emporte pas sur l'intérêt public prépondérant à la préservation des zones agricoles et à la distinction essentielle entre espace bâti et non-bâti. Il apparaît douteux que les aménagements réalisés soient nécessaires à la poursuite des activités des recourants, compte tenu de la présence, sur les parcelles concernées, d'affiches d'une société active dans le montage d'échafaudages ainsi que du stationnement de camionnettes et de voitures de type berline sans lien avec l'activité agricole des intéressés. Rejet du recours.
En fait
En droit

 

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3570/2023-LCI ATA/621/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 3 juin 2025

3ème section

 

dans la cause

 

A______ et B______ recourants
représentés par Me Guillaume FRANCIOLI, avocat

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

et

COMMUNE DE C______ intimés

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 27 juin 2024 (JTAPI/655/2024)


EN FAIT

A. a. A______ et B______ (ci-après : les frères A______ et B______), agriculteurs, sont copropriétaires de la parcelle n° 11'040 de la commune de C______ (ci‑après : la commune). Le premier est également propriétaire de la parcelle adjacente n° 11'041.

Ces parcelles sont situées en zone de développement 3, avec pour zone d'affectation primaire (ou zone de fond) la zone agricole. Elles se trouvent dans le quartier des D______, entre la route de la E______ à l'est et le chemin des F______ au nord. Un plan localisé de quartier (ci-après : PLQ), référencé sous n° 1______, est en cours d'élaboration.

b. Le 7 juin 2021, le canton, avec les communes concernées, notamment celle de C______, et la Fondation pour les terrains industriels de Genève (FTI), s'est doté d'une « feuille de route » pour analyser les demandes d'utilisations temporaires dans le périmètre des D______ et les impacts paysagers/fonctionnels qui en découlaient. Selon ce document, en principe, en l'absence de PLQ adopté pour la zone de développement 3, plus aucune autorisation ne serait délivrée pour des utilisations temporaires.

c. Le 29 juin 2021, les frères A______ et B______ ont conclu un contrat de bail à loyer avec l'ancien département des infrastructures (ci-après : DI), soit pour lui l'office cantonal du génie civil (ci-après : OCGC), avec un terme prévu au 31 décembre 2023, portant sur la location d'une majeure partie de la parcelle n° 11'040 (10'032 m2 sur 11'955 m2) afin de permettre un stockage des terres liées aux travaux de l'extension du tramway Genève - Saint‑Julien.

B. a. Le 24 septembre 2021, à la suite d'une dénonciation, le département du territoire (ci-après : DT) a ouvert un dossier d'infraction sous le numéro I-2______ portant sur la parcelle n° 11'040. Étaient en cause plusieurs éléments constructifs situés sur la parcelle, soit une zone de dépôt, l'aménagement d'un parking au nord, l'aménagement d'un parking en enrobé et la construction d'une base de vie en containers au sud.

b. Les frères A______ et B______ ont répondu au DT que la parcelle était louée par l'État et qu'ils en avaient informé les personnes concernées.

c. L'OCGC a confirmé qu'il louait une partie de la parcelle n° 11'040 pour la réalisation de la première étape de l'extension du tramway.

Selon le plan d'emprise no 3______-C du 14 avril 2021 produit par l'OCGC, qui distinguait quatre surfaces (S1, S2, S3 et S4), les surfaces S2 et S3 étaient utilisées comme installations de chantier et la surface S1 comme lieu de stockage provisoire de terre. Les surfaces S1 et S2 seraient rendues à l'agriculture à la fin du chantier du tramway, soit fin 2023. La surface S4 restait sous l'entière responsabilité des propriétaires et n'était pas utilisée pour le chantier.

d. Le 13 mai 2022, après avoir réalisé un reportage photographique de la parcelle n° 11'040 le 3 mai 2022, le DT a ordonné aux frères A______ et B______ de déposer une requête d'autorisation de construire concernant l'aménagement d'une zone de dépôt clôturée et l'aménagement d'un parking clôturé au nord de la parcelle n° 11'040 (surface S4).

C. a. Parallèlement, le 3 mai 2022, un collaborateur du DT a effectué un transport sur place sur la parcelle n° 11'041. Il a constaté l'aménagement d'une zone de dépôt de matériel et la construction d'un dépôt en bois et en containers au nord de la parcelle, ainsi que l'entreposage de plusieurs containers, la construction d'un couvert à voitures et l'installation d'une clôture bâchée. Une procédure d'infraction a été ouverte sous le numéro I-4______.

b. Par courrier du 13 mai 2022, le DT a interpellé B______ (copropriétaire de la parcelle n° 11'040) au sujet des éléments constatés le 3 mai 2022 sur la parcelle n° 11'041 et lui a imparti un délai pour se déterminer.

c. Par décision du 17 juin 2022, adressée à B______, le DT lui a ordonné de rétablir une situation conforme au droit d'ici le 29 août 2022 en procédant à l'enlèvement des éléments constatés le 3 mai 2022 sur la parcelle n° 11'041 et à la remise en état du terrain naturel.

D. a. Le 24 août 2022, A______ a déposé une demande définitive (ci‑après : DD) d'autorisation de construire, enregistrée sous la référence DD 5______, en vue de la mise en conformité partielle des infractions I-2______ et I‑4______. Le projet portait sur l'aménagement d'une surface de dépôt de matériel sur les parcelles nos 11'040 et 11'041 pour une durée provisoire de 54 mois.

b. Lors de l'instruction de la requête, l'office de l'urbanisme (ci-après : OU), l'office cantonal de la nature et de l'agriculture (ci-après : OCAN), le service de géologie, sols et déchets (ci-après : GESDEC) et la commune ont préavisé défavorablement le projet.

L'OU a relevé que la nature et le volume du matériel stocké apparaissaient sans rapport avec l'activité agricole du requérant. De plus, le possible déménagement de l'exploitation, mis en avant par l'intéressé pour justifier le stockage de matériel de construction lui appartenant, n'avait pas de traduction formelle puisqu'aucune demande d'autorisation de construire n'avait été déposée en ce sens depuis 2017, année où cette possibilité avait été évoquée. Face à des utilisations temporaires répétées dans le périmètre du grand projet (des D______) et des impacts paysagers/fonctionnels qui en découlaient, le canton s'était doté le 7 juin 2021 d'une feuille de route pour traiter les demandes d'autorisation d'occupation temporaires des parcelles des D______ en distinguant les implantations en zone industrielle et artisanale (ci-après : ZDIA) des implantations en zone de développement 3. En principe, en l'absence de PLQ sur la zone de développement 3, plus aucune autorisation ne devait être délivrée pour des utilisations temporaires, et ce malgré des autorisations délivrées en dérogation à titre exceptionnel avant 2021. L'utilisation des parties au nord des parcelles nos 11'040 et 11'041 n'avaient pas fait l'objet d'une quelconque autorisation par le passé, notamment via la DD 6______, qui excluait ces parties nord de la demande. Ainsi, l'usage proposé à titre provisoire, soit notamment le stockage de matériel de chantier, la cabane de chantier et les camionnettes sans lien avec l'activité agricole, dérogeait à cette zone et à la feuille de route.

L'OCAN a exposé que même si la parcelle était située en zone de développement, la zone de fond agricole s'appliquait tant que le PLQ n'était pas en force. Les aménagements projetés n'étaient pas conformes à la zone, faute d'informations tangibles de la part du requérant sur son projet agricole à H______.

Selon le GESDEC, le projet constituait une atteinte portée au sol non admissible, puisque le requérant n'avait pas démontré que le projet n'avait pas d'incidence durable sur la fertilité des sols.

La commune a estimé que l'étalement du stock ne répondait pas aux objectifs d'une utilisation rationnelle du sol. Le stockage de matériel de chantier et le stationnement de camionnettes semblait disproportionné au regard des besoins strictement liés à l'activité agricole. La proposition était contraire aux objectifs défendus jusque-là pour un développement qualitatif du secteur concerné, en particulier en lien avec le développement de la zone de développement 3. De plus, la zone de stockage pouvait dégrader la qualité du sol voué à accueillir les espaces publics plantés, dans le cadre du futur PLQ. L'utilisation du foncier, même temporaire, pouvait entrer en contradiction avec le besoin de stockage de ces terres le temps des chantiers des D______.

c. Par décision du 29 septembre 2023, le DT a refusé de délivrer l'autorisation de construire sollicitée, faisant siens les préavis défavorables précités.

d. Par décision du 6 octobre 2023, le DT a ordonné à B______ la remise en conformité au droit de la parcelle n° 11'041, en procédant à la suppression de la zone de dépôt de matériel, du dépôt en bois et en containers au nord de la parcelle ainsi que des containers, du couvert à voitures, de la clôture bâchée et à la remise en état du terrain naturel. Une amende de CHF 2'000.- lui a en outre été infligée.

 

e. Par décisions séparées du 13 octobre 2023, le DT a ordonné aux frères A______ et B______ de rétablir une situation conforme au droit, d'ici au 8 décembre 2023, en procédant à la suppression, à l'évacuation et à la démolition de la zone de dépôt au nord de la parcelle n° 11'040, y compris les clôtures (1), et du parking au nord de la parcelle (2) ainsi qu'en procédant à la remise en état du terrain naturel.

Une amende de CHF 1'000.- a en outre été infligée à chacun des intéressés. Le montant des amendes tenait compte de la gravité de l'infraction commise et notamment du fait que la zone concernée se situait hors de la zone à bâtir.

E. a. Par acte du 30 octobre 2023, les frères A______ et B______ ont recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre le refus de délivrer l'autorisation de construire.

Le recours a été enregistré sous le numéro de cause A/3570/2023.

b. Par acte du 13 novembre 2023, les frères A______ et B______ ont recouru auprès du TAPI contre la décision de remise en état de la parcelle n° 11'040 et les amendes de CHF 1'000.- infligées à chacun d'eux, concluant à leur annulation. Le recours a été enregistré sous le numéro de cause A/3787/2023.

c. Par décision du 12 décembre 2023, le TAPI a joint les causes A/3570/2023 et A/3787/2023 sous le numéro de cause A/3570/2023, les deux recours se rapportant à un même complexe de faits.

d. Par courrier du 16 février 2024, s'excusant de « l'erreur d'adressage », le DT a annulé les décisions des 17 juin 2022 et 6 octobre 2023 adressées à B______.

e. Par décision du 15 mars 2024, le DT a ordonné à A______ la remise en état de la parcelle n° 11'041 (I-4______) et a prononcé à son endroit une amende de CHF 2'000.-.

f. Par acte du 17 avril 2024, enregistré sous le numéro de cause A/1296/2024, A______ a recouru auprès du TAPI contre cette décision, concluant principalement à son annulation et préalablement à la jonction de la procédure avec la cause A/3570/2023.

g. Par jugement du 27 juin 2024 (JTAPI/655/2024), le TAPI a rejeté le recours concernant la cause A/3570/2023.

h. Par jugement du 31 octobre 2024, le TAPI a déclaré irrecevable le recours portant sur la cause A/1296/2024, pour défaut de motivation.

 

F. a. Par acte remis à la poste le 29 août 2024, les frères A______ et B______ ont interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement du 27 juin 2024, concluant principalement à son annulation, à l'octroi de l'autorisation de construire DD 5______/1 ainsi qu'à l'annulation des décisions I-2______ et I-4______ rendues les 13 octobre 2023 et 15 mars 2024. Préalablement, ils ont sollicité la tenue d'un transport sur place sur les parcelles nos 11'040 et 11'041, la suspension de la procédure et des décisions de remise en état jusqu'à l'adoption du PLQ du quartier des D______ et, à défaut, la suspension de la procédure jusqu'à droit jugé dans la cause A/1296/2024.

Le TAPI avait refusé à tort de joindre les causes A/3572/2023 et A/1296/2024, ce qui leur avait causé un préjudice.

Les règles de la zone de développement auraient dû s'appliquer au projet. Subsidiairement, ce dernier était conforme à l'affectation de la zone agricole. Enfin, l'ordre de remise en état était disproportionné.

b. Le DT et la commune ont conclu au rejet du recours.

c. Dans leur réplique, les recourants ont relevé qu'au vu des circonstances, un transport sur place permettrait une évaluation directe du faible impact visuel, sonore et environnemental des installations et amas de terres présents sur les parcelles. Le reportage photographique et les préavis n'étaient plus d'actualité au vu de l'année écoulée depuis les faits litigieux.

d. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Le litige porte sur la conformité au droit du refus du DT d'octroyer l'autorisation DD 5______ sollicitée, de l'ordre de remise en état de la parcelle n° 11'040 et de l'amende de CHF 1'000.- prononcée à l'endroit de chacun des recourants.

3.             Les recourants sollicitent la suspension de la procédure jusqu'à l'adoption du PLQ du quartier des D______ ou, à défaut, jusqu'à droit jugé par le TAPI dans la cause A/1296/2024.

3.1 Lorsque le sort d'une procédure administrative dépend de la solution d'une question de nature civile, pénale ou administrative relevant de la compétence d'une autre autorité et faisant l'objet d'une procédure pendante devant ladite autorité, la suspension de la procédure administrative peut, le cas échéant, être prononcée jusqu'à droit connu sur ces questions (art. 14 al. 1 LPA). L'art. 14 LPA est une norme potestative et son texte clair ne prévoit pas la suspension systématique de la procédure chaque fois qu'une autorité civile, pénale ou administrative est parallèlement saisie (ATA/54/2025 du 14 janvier 2025 consid. 2.1 ; ATA/833/2024 du 9 juillet 2024 consid. 3.1 ; ATA/129/2023 du 7 février 2023 consid. 2a).

3.2 Selon l’art. 78 LPA, l’instruction des recours est suspendue par la requête simultanée de toutes les parties, le décès d’une partie, la faillite d’une partie, sa mise sous curatelle de portée générale, la cessation des fonctions en vertu desquelles l’une des parties agissait, le décès, la démission, la suspension ou la destitution de l’avocat ou du mandataire qualifié constitué (let. a à f).

3.3 En l'espèce, le sort de la présente procédure ne dépend pas de la solution d'une question de nature civile, pénale ou administrative relevant de la compétence d'une autre autorité et faisant l'objet d'une procédure pendante devant ladite autorité, ce que les recourants ne prétendent d'ailleurs pas.

L'adoption future du PLQ du quartier des D______, dont les recourants se prévalent pour justifier leur demande de suspension, est un fait incertain que le DT n'avait pas à prendre en compte pour prononcer sa décision, celui-ci devant statuer sur la base des plans en vigueur au moment de rendre sa décision, ce qui n'était pas le cas dudit PLQ.

Par ailleurs, au vu des enjeux liés à la décision querellée, notamment la remise en état d'une parcelle sise en zone agricole, il existe un intérêt prépondérant à ce que la cause soit tranchée rapidement. Or, la suspension de la procédure dans l'attente de l'adoption du PLQ, dont la date reste incertaine, irait à l'encontre de cet intérêt.

Enfin, la cause A/1296/2024, en partie connexe à la présente procédure, ne porte pas sur une question dont la réponse serait nécessaire à la résolution du présent litige. Au demeurant, le TAPI a rendu un jugement dans ladite cause, si bien qu'en toute hypothèse la demande de suspension pour ce motif est devenue sans objet.

Pour ces raisons, la suspension de la procédure ne sera pas ordonnée.

Pour le surplus, ni le DT ni la commune n'ont sollicité la suspension, si bien que celle-ci ne peut pas non plus être prononcée sur la base de l'art. 78 LPA.

4.             Les recourants sollicitent la tenue d'un transport sur place.

4.1 Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour la personne intéressée d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre. Il n'empêche toutefois pas l'autorité de mettre un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient pas l'amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_359/2022 du 20 avril 2023 consid. 3.1 et les références citées).

4.2 En droit genevois, la procédure administrative est en principe écrite ; toutefois, si le règlement et la nature de l'affaire le requièrent, l'autorité peut procéder oralement (art. 18 LPA). Elle réunit les renseignements et procède aux enquêtes nécessaires pour fonder sa décision. Elle apprécie les moyens de preuve des parties (art. 20 al. 1 LPA). S’il y a lieu, elle peut notamment, afin de constater un fait par elle-même, ordonner le transport sur place (art. 37 let. c LPA).

4.3 En l'espèce, les recourants estiment qu'un transport sur place serait nécessaire pour une évaluation directe du faible impact visuel, sonore et environnemental des installations et amas de terres présents sur les parcelles, le reportage photographique et les préavis n'étant plus d'actualité au vu de l'année écoulée depuis les faits litigieux.

Or, d'une part, à supposer que les éléments cités par les recourants soient déterminants pour l'issue du litige, les reportages photographiques versés au dossier ainsi que les préavis rendus par les instances spécialisées sont suffisants pour apprécier l'impact visuel, sonore et environnemental des installations et amas de terres présents sur les parcelles en cause. D'autre part, les recourants ne sauraient prétendre de bonne foi que le reportage photographique et les préavis ne seraient plus d'actualité au vu de l'année écoulée depuis les faits litigieux, les intéressés ayant au contraire indiqué, dans leur acte de recours, que la situation était restée inchangée depuis plusieurs années. Au demeurant, dans leur réplique, ils n'ont pas expliqué ni documenté en quoi la situation aurait changé depuis une année.

Le transport sur place n'apparaît donc pas nécessaire et ne sera pas ordonné.

Pour le surplus, les recourants se sont vu offrir la possibilité de faire valoir leurs arguments par écrit. Il se sont ainsi exprimés de manière circonstanciée sur l'objet du litige et ont produit les pièces auxquelles ils se sont référés dans leurs écritures. Il en va de même du DT et de la commune. La chambre de céans dispose ainsi d'un dossier complet qui lui permet de statuer en connaissance de cause.

5.             Les recourants reprochent au TAPI de ne pas avoir joint les causes A/3570/2023 et A/1296/2024.

5.1 L'art. 70 LPA prévoit que l’autorité peut, d’office ou sur requête, joindre en une même procédure des affaires qui se rapportent à une situation identique ou à une cause juridique commune (al. 1). La jonction n’est toutefois pas ordonnée si la première procédure est en état d’être jugée alors que la ou les autres viennent d’être introduites (al. 2).

L'art. 70 LPA est de nature potestative et n'oblige pas le juge à joindre des causes quand bien même celles-ci seraient connexes (ATA/1332/2024 du 12 novembre 2024 consid. 4.3).

5.2 En l'espèce, quand bien même les causes A/3570/2023 et A/1296/2024 entretiennent un lien de connexité, le recourant n'avait aucun droit à la jonction des causes, l'art. 70 LPA étant de nature potestative et n'obligeant pas le juge à joindre des causes quand bien même celles-ci seraient connexes. Pour ce motif déjà, le grief est infondé, ce d'autant plus que l'on ne discerne pas ce que les recourants entendent en tirer.

En outre, au moment du dépôt du recours dans la cause A/1296/2024 le 17 avril 2024, le DT avait déjà déposé sa duplique dans la cause A/3570/2023 (5 avril 2024). Par conséquent, le TAPI était fondé à retenir, dans son jugement du 27 juin 2024, que « la procédure A/3570/2024 était en état d'être jugée alors que la procédure A/1296/2024 a[vait] été récemment introduite, de sorte que la situation visée par l'art. 70 al. 2 LPA [était] manifestement donnée », et que la jonction ne pouvait ainsi être ordonnée, conformément à cette dernière disposition.

Le grief sera donc écarté.

6.             Les recourants contestent le bien-fondé du refus du DT d'octroyer l'autorisation DD 5______ sollicitée.

Ils revendiquent d'abord l'application des normes applicables à la zone de développement.

6.1 Selon l'art. 22 de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT - RS 700), aucune construction ou installation ne peut être créée ou transformée sans autorisation de l’autorité compétente (al. 1). L’autorisation est délivrée si la construction ou l’installation est conforme à l’affectation de la zone et si le terrain est équipé (al. 2). Le droit fédéral et le droit cantonal peuvent poser d’autres conditions (al. 3).

En droit genevois, l'art. 22 LAT est repris par l'art. 1 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05), qui prévoit notamment que sur tout le territoire du canton nul ne peut, sans y avoir été autorisé élever en tout ou partie une construction ou une installation, notamment un bâtiment locatif, industriel ou agricole, une villa, un garage, un hangar, un poulailler, un mur, une clôture ou un portail (al. 1 let. a).

 

6.2 Aux termes de l’art. 14 LAT, les plans d’affectation règlent le mode d’utilisation du sol (al. 1). Ils délimitent en premier lieu les zones à bâtir, les zones agricoles, les zones à protéger et les autres zones et territoires, prévus par le droit cantonal (al. 2).

Les plans d’affectation ont force obligatoire pour chacun (art. 21 al. 1 LAT), particuliers et autorités (ATF 143 II 276 consid. 4.2.1). Les plans d'affectation ont le plus souvent un effet obligatoire qualifié de négatif, à savoir empêcher tout usage non conforme à l'affectation de la zone ou tout aménagement ne respectant pas les prescriptions d'un plan d'affectation. En tant qu'il s'agit d'une construction, cette conformité est vérifiée dans la procédure du permis de construire (ATA/332/2022 du 29 mars 2022 consid. 5b et les références citées).

Selon l'art. 12 al. 4 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LaLAT - L 1 30), qui règle la procédure d’élaboration des plans d’affectation au sens de l’art. 14 LAT (art. 1 let. b LaLAT), en vue de favoriser l’urbanisation, la restructuration de certains territoires, l’extension des villages ou de zones existantes, la création de zones d’activités publiques ou privées, le Grand Conseil peut délimiter des périmètres de développement, dits zones de développement, dont il fixe le régime d’affectation. Le Grand Conseil peut créer des zones de développement vouées à des affectations spécifiques qui précisent celles visées aux art. 19, 30 et 30A ou au besoin s’en écartent. À l’intérieur de ces périmètres, le Conseil d’État peut, en vue de la délivrance d’une autorisation de construire, autoriser le département à faire application des normes résultant de la zone de développement, en lieu et place de celles de la zone à laquelle elle se substitue.

L’affectation et le régime d’aménagement des terrains compris à l’intérieur d’une ou plusieurs zones peuvent être précisés par divers types de plans et règlements, à savoir notamment les plans localisés de quartier visés par la loi sur l’extension des voies de communication et l’aménagement des quartiers ou localités du 9 mars 1929 (LExt - L 1 40) et par la loi générale sur les zones de développement du 29 juin 1957 (LGZD - L 1 35 ; art. 13 al. 1 let. a LaLAT).

6.3 Les dispositions de la LGZD fixent les conditions applicables à l’aménagement et l’occupation rationnelle des zones de développement affectées à l’habitat, au commerce et aux autres activités du secteur tertiaire, ainsi que les conditions auxquelles le Conseil d’État peut autoriser l’application des normes d’une telle zone (art. 1 LGZD).

L'art. 2 al. 1 LGZD prévoit que la délivrance d’autorisations de construire selon les normes d’une zone de développement est subordonnée, sous réserve des demandes portant sur des objets de peu d’importance ou provisoires, à l’approbation préalable par le Conseil d’État d’un plan localisé de quartier au sens de l’art. 3 LGZD, assorti d’un règlement (let. a) et des conditions particulières applicables au projet, sauf pour des demandes portant sur des objets à édifier dans les périmètres de développement de la 5e zone résidentielle (let. b).

Selon l'art. 2 al. 2 LGZD, en dérogation à l'art. 2 al. 1 let. a, le Conseil d'État peut, après consultation du Conseil administratif ou du maire de la commune, renoncer à l'établissement d'un plan localisé de quartier, notamment dans les périmètres de développement de la 5e zone résidentielle (let. a), en zone de développement affectée à de l'équipement public (let. b) ou dans les quartiers de développement déjà fortement urbanisés (let. c). Le but de cette dernière disposition est d'éviter une longue procédure d'établissement d'un PLQ lorsque le périmètre a déjà été largement réalisé selon les normes applicables à la zone et qu'il ne reste que quelques parcelles isolées (arrêt du Tribunal fédéral 1C_41/2024 du 9 décembre 2024 consid. 5.2). Toutefois, l'octroi d'une dérogation à l'obligation préalable d'adoption d'un plan localisé de quartier en application de l'art. 2 al. 2 LGZD n'est pas envisageable lorsque la zone de développement 3 se substitue à la zone agricole. En effet, lorsque la zone de fond est agricole, l'octroi d'une dérogation à l'obligation d'adopter un plan localisé de quartier pour délivrer directement une autorisation de construire pour un objet relevant d'une zone à bâtir contreviendrait à l'obligation de planifier tirée de l'art. 2 LAT (ATF 124 II 252 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_416/2018 du 15 juillet 2019 consid. 6.2).

6.4 Selon la jurisprudence de la chambre administrative, il ressort tant de la LaLAT que de la LGZD que la délimitation d’une zone de développement par le Grand Conseil ne suffit pas à elle seule pour l’application des normes de la zone de développement. Ces dernières ne sont applicables qu’après autorisation du Conseil d’État ou renonciation par ce dernier à l’établissement d’un PLQ. Les normes de la zone primaire restent donc applicables à la zone de développement constructible aussi longtemps que le Conseil d’État n’a pas autorisé leur application en approuvant un PLQ, assorti d’un règlement, et les conditions particulières applicables au projet ou renoncé à l’établissement d’un PLQ. Ainsi, par exemple, un terrain en zone agricole de développement demeure soumis aux normes applicables à la zone agricole jusqu’à autorisation d’application des normes de la zone de développement par le Conseil d’État ou renonciation à l’établissement d’un PLQ (ATA/1144/2018 du 30 octobre 2018 consid. 3e ; ATA/436/2018 du 8 mai 2018 consid. 6c ; ATA/857/2014 du 4 novembre 2014 consid. 8).

Cette jurisprudence a d'ailleurs été implicitement rappelée dans un arrêt du 28 novembre 2023, qui a confirmé un refus d’autorisation de construire au motif que le projet concerné (deux immeubles de sept étages, comprenant 48 logements, reliés par une arcade commerciale, avec parking souterrain sur deux niveaux) était projeté sur une parcelle sise en zone de développement 3 (zone de fond 5) mais qui n’était pas située dans le périmètre d’un PLQ, étant précisé que le projet ne pouvait pour le surplus pas bénéficier d'une dérogation à l’exigence d’un PLQ (ATA/1280/2023 du 28 novembre 2023 consid. 5.6).

6.5 En l'espèce, les parcelles nos 11'040 et 11'041 sont situées en zone de développement 3, avec comme zone d'affectation primaire la zone agricole. Un PLQ, celui des D______, est certes en cours d'élaboration dans la zone concernée mais lesdites parcelles ne sont pas situées dans le périmètre d'un PLQ en force. Par conséquent, ce sont les normes applicables à la zone d'affectation primaire, soit en l'occurrence la zone agricole, qui trouvent application, et non pas celles de la zone de développement.

Aucune dérogation à l'obligation d'adopter un PLQ n'est d'ailleurs envisageable, sous peine de contrevenir à l'obligation de planifier tirée de l'art. 2 LAT.

Pour le surplus, le recourant prétend que la jurisprudence précitée serait restrictive et que l'obligation d'adopter un PLQ pour l'application des normes de la zone de développement ne ressortirait pas directement de la loi. Or, l'art. 2 al. 1 let. a LGZD est suffisamment explicite en tant qu'il prévoit que, sous réserve des exceptions prévues à l'art. 2 al. 2 LGZD, qui n'entrent pas en considération in casu, la délivrance d’autorisations de construire selon les normes d’une zone de développement est subordonnée à l’approbation préalable par le Conseil d’État d’un PLQ. L'argument n'est donc pas fondé.

7.             Les recourants soutiennent ensuite que les constructions et installations érigées sur les parcelles nos 11'040 et 11'041 seraient conformes à l'affectation de la zone agricole.

7.1 La zone agricole est régie, au niveau fédéral, par les art. 16 et 16a LAT ainsi que par les art. 20 ss LaLAT au niveau cantonal.

Selon l'art. 16 al. 1 LAT, les zones agricoles servent à garantir la base d'approvisionnement du pays à long terme, à sauvegarder le paysage et les espaces de délassement et à assurer l'équilibre écologique ; elles devraient être maintenues autant que possible libres de toute construction en raison des différentes fonctions de la zone agricole et comprennent, d'une part, les terrains qui se prêtent à l'exploitation agricole ou à l'horticulture productrice et sont nécessaires à l'accomplissement des différentes tâches dévolues à l'agriculture (let. a) et, d'autre part, les terrains qui, dans l'intérêt général, doivent être exploités par l'agriculture (let. b).

7.2 L'art. 16a LAT fixe les conditions générales auxquelles des constructions et des installations peuvent être considérées comme conformes à l'affectation de la zone agricole (arrêt du Tribunal fédéral 1C_631/2019 du 2 octobre 2020 consid. 2.4.2). Selon cette disposition, sont conformes à l'affectation de la zone agricole les constructions et installations qui sont nécessaires à l'exploitation agricole ou à l'horticulture productrice (al. 1). Celles qui servent au développement interne d'une exploitation agricole ou d'une exploitation pratiquant l'horticulture productrice le sont également. Le Conseil fédéral règle les modalités (al. 2). Les constructions et installations dépassant le cadre de ce qui peut être admis au titre du développement interne peuvent être déclarées conformes à l’affectation de la zone et autorisées lorsqu’elles seront implantées dans une partie de la zone agricole que le canton a désignée à cet effet moyennant une procédure de planification (al. 3).

Seules les constructions dont la destination correspond à la vocation agricole du sol peuvent ainsi donner lieu à une autorisation ordinaire au sens de l'art. 22 al. 2 let. a LAT. En d'autres termes, le sol doit être le facteur de production primaire et indispensable et les modes d'exploitation dans lesquels le sol ne joue pas un rôle essentiel ne sont pas agricoles (ATF 129 II 413 consid. 3.1 ; 125 II 278 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_631/2019 du 2 octobre 2020 consid. 2.4.2).

7.3 La zone agricole est en principe inconstructible. Aussi, le fait qu'une construction soit reconnue conforme à l'affectation de la zone ne signifie pas encore que le permis doit être délivré. En effet, l'autorité compétente doit examiner en premier lieu si la nouvelle activité peut être réalisée dans les locaux existants ; si tel n'est pas le cas, elle doit en outre vérifier que la nouvelle construction n'est pas surdimensionnée par rapport à l'utilisation envisagée et les besoins de l'exploitation et qu'aucun intérêt prépondérant ne s'oppose à l'implantation du nouveau bâtiment à l'endroit prévu (art. 34 al. 4 de l'ordonnance sur l’aménagement du territoire du 28 juin 2000 - OAT - RS 700.1 ; ATF 129 II 413 consid. 3.2, arrêt du Tribunal fédéral 1C_631/2019 consid. 2.4.5 ; ATA/730/2023 du 4 juillet 2023 consid. 6.2).

7.4 Selon l'art. 34 al. 1 à 3 OAT, sont conformes à l’affectation de la zone agricole les constructions et installations qui servent à l’exploitation tributaire du sol ou au développement interne, ou qui sont – dans les parties de la zone agricole désignées à cet effet conformément à l’art. 16a al. 3 LAT – nécessaires à une exploitation excédant les limites d’un développement interne et qui sont utilisées pour la production de denrées se prêtant à la consommation et à la transformation et provenant de la culture de végétaux et de la garde d’animaux de rente (al. 1 let. a) ; l’exploitation de surfaces proches de leur état naturel (al. 1 let. b). Sont en outre conformes à l’affectation de la zone les constructions et installations qui servent à la préparation, au stockage ou à la vente de produits agricoles ou horticoles si ces derniers sont produits dans la région et que plus de la moitié d’entre eux proviennent de l’exploitation où se trouvent lesdites constructions et installations ou d’exploitations appartenant à une communauté de production (al. 2 let. a) ; si la préparation, le stockage ou la vente ne revêt pas un caractère industriel, et (al. 2 let. b) ; si l’exploitation où se trouvent lesdites constructions et installations conserve son caractère agricole ou horticole (al. 2 let. c). Sont enfin conformes à l’affectation de la zone les constructions qui servent au logement indispensable à l’entreprise agricole, y compris le logement destiné à la génération qui prend sa retraite (al. 3).

L'art. 34 al. 4 OAT prévoit qu'une autorisation ne peut être délivrée que si la construction ou l’installation est nécessaire à l’exploitation en question (let. a) ; si aucun intérêt prépondérant ne s’oppose à l’implantation de la construction ou de l’installation à l’endroit prévu (let. b), et s’il est prévisible que l’exploitation pourra subsister à long terme (let. c).

La pesée des intérêts exigée à l'art. 34 al. 4 let. b OAT doit se faire à l'aune des buts et principes de l'aménagement du territoire énoncés aux art. 1 et 3 LAT, en particulier l'intérêt public tendant à prévenir le mitage du territoire (arrêt du Tribunal fédéral 1C_341/2019 du 24 août 2020 consid. 3.1.3).

7.5 Les constructions nouvelles doivent être limitées à celles qui sont réellement indispensables à l'exploitation afin de garantir que la zone en question demeure une zone non constructible (ATF 133 II 370 consid. 4.2 ; 129 II 413 consid. 3.2). L'autorité compétente doit dès lors examiner en premier lieu si la nouvelle activité peut être réalisée dans des locaux existants (ATF 129 II 413 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_170/2019 du 9 avril 2020 consid. 3.1) ou sur des surfaces disponibles dans la zone constructible (ATF 123 II 499 consid. 3b/cc). Si tel n'est pas le cas, elle doit vérifier que la nouvelle construction correspond à l'utilisation envisagée et aux besoins objectifs de l'exploitation (ATF 129 II 413 consid. 3.2 ; 125 II 278 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_341/2019 du 24 août 2020 consid. 3.1.3).

7.6 Selon la doctrine, quatre aspects sont essentiels pour examiner la conformité à l’affectation de la zone selon l’art. 16a LAT : le but agricole ou horticole au sens de l’art. 16 al. 1 LAT ; le mode de production – principalement tributaire ou non tributaire du sol ; la nécessité d’exploitation à l’emplacement demandé pour les affectations souhaitées ; les intérêts qui pourraient s’opposer au projet en question à l’emplacement demandé (Alexander RUCH/Rudolf MUGGLI, in Heinz AEMISEGGER/Pierre MOOR/Alexander RUCH/Pierre TSCHANNEN [éd.], Commentaire pratique LAT : Construire hors zone à bâtir, 2017, n. 10 ad art 16a LAT).

7.7 Le droit genevois, plus particulièrement l'art. 20 al. 2 LaLAT, prévoit que la zone agricole est destinée à l’exploitation agricole ou horticole. Ne sont autorisées en zone agricole que les constructions et installations qui sont destinées durablement à cette activité et aux personnes l’exerçant à titre principal (let a) ; respectent la nature et le paysage (let. b) ; respectent les conditions fixées par les art. 34 ss OAT (let. c).

7.8 Dans le système de la LCI, les demandes d’autorisation sont soumises, à titre consultatif, au préavis des communes, des départements et des organismes intéressés. L’autorité de décision n’est pas liée par ces préavis (art. 3 al. 3 LCI). Ainsi, les avis ou préavis ne lient pas les autorités et n’ont qu’un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l’autorité reste libre de s’en écarter pour des motifs pertinents et en raison d’un intérêt public supérieur. Selon une jurisprudence constante, chaque fois que l'autorité administrative suit les préavis des instances consultatives, l'autorité de recours observe une certaine retenue, en fonction de son aptitude à trancher le litige, l'autorité technique consultative étant composée de spécialistes capables d'émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/739/2024 du 18 juin 2024 consid. 6.5 et l'arrêt cité).

7.9 La procédure administrative est régie par la maxime inquisitoire, selon laquelle l'autorité établit les faits d’office (art. 19 LPA) sans être limitée par les allégués et les offres de preuves des parties. Dans la mesure où l'on peut raisonnablement exiger de l’autorité qu’elle les recueille, elle réunit ainsi les renseignements et procède aux enquêtes nécessaires pour fonder sa décision. Elle apprécie les moyens de preuve des parties et recourt s’il y a lieu à d'autres moyens de preuve (art. 20 LPA). Ce principe n’est toutefois pas absolu ; sa portée est restreinte par le devoir des parties de collaborer à la constatation des faits (art. 22 LPA). Celui-ci comprend en particulier l’obligation des parties d’apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d’elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l’absence de preuves (ATF 128 II 139 consid. 2b ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_454/2017 du 16 mai 2018 consid. 4.1 ; ATA/429/2024 du 26 mars 2024 consid. 6.3 et l'arrêt cité).

7.10 En l'espèce, la demande d'autorisation porte sur l'aménagement d'une surface de dépôt de matériel, déjà réalisé, sur les parcelles nos 11'040 et 11'041, sises en zone agricole, pour une durée provisoire de 54 mois.

Il ressort des explications des recourants données dans le cadre de l'instruction de la demande (voir le courrier de leur mandataire du 6 décembre 2022) que la surface de dépôt de matériel aurait pour objectif de stocker leur « matériel agricole ». Aucune autre information n'a toutefois été fournie. Les recourants n'expliquent pas non plus en quoi ce matériel serait indispensable pour leur activité agricole ni même en quoi il consisterait concrètement.

À l'inverse, comme l'a relevé de façon pertinente le DT dans ses écritures devant la chambre de céans, il ressort du reportage photographique réalisé le 3 mai 2022 que des affiches de G______ SA, active dans la location, le montage et le démontage dans le domaine de l'échafaudage, ont été posées sur le pourtour de la partie nord de la parcelle n° 11'041. Le matériel déposé semble donc résulter de la location d'espaces de stockage à des tiers. À cela s'ajoute que, dans son préavis défavorable, l'OU a exposé, sans être contredit en cours de procédure par les recourants, que l'usage proposé à titre provisoire aurait trait au stockage de matériel de chantier, à une cabane de chantier et au stationnement de camionnettes sans lien avec l'activité agricole.

Ainsi, il y a lieu de retenir que la destination de la construction en cause ne correspond pas à la vocation agricole du sol et qu'elle ne sert ni à la préparation, ni au stockage ni à la vente de produits agricoles. La construction ne sert du reste pas non plus au logement indispensable à l’entreprise agricole des recourants.

Pour le surplus, l'OU et l'OCAN, instance spécialisée en matière d'agriculture, ont préavisé défavorablement le projet, relevant d'une part que les aménagements projetés n'étaient pas conformes à la zone faute d'informations tangibles de la part du requérant sur son projet agricole à H______ et, d'autre part, que la nature et le volume du matériel stocké apparaissaient sans rapport avec l'activité agricole des requérants.

Par conséquent, et comme l'a retenu à juste titre le TAPI, les installations projetées ne peuvent être considérées comme conformes à la zone agricole, si bien que la délivrance d'une autorisation de construire ordinaire n'est pas possible.

8.             Reste à déterminer si les recourants peuvent bénéficier d'une autorisation dérogatoire.

8.1 Les conditions de dérogation pour des constructions hors de la zone à bâtir sont prévues par le droit fédéral (art. 24 à 24d LAT). Ces dispositions sont complétées ou reprises par les art. 26, 26A et 27 LaLAT (ATA/228/2025 du 4 mars 2025 consid 3).

Selon l'art. 24 LAT, en dérogation à l’art. 22 al. 2 let. a LAT, des autorisations peuvent être délivrées pour de nouvelles constructions ou installations ou pour tout changement d’affectation si l’implantation de ces constructions ou installations hors de la zone à bâtir est imposée par leur destination (let. a) ; aucun intérêt prépondérant ne s’y oppose (let. b).

L'art. 27 LaLAT, applicable à Genève, reprend les mêmes conditions. Il précise néanmoins que la dérogation ne doit léser aucun intérêt prépondérant, notamment du point de vue de la protection de la nature et des sites et du maintien de la surface agricole utile pour l’entreprise agricole (let. b).

Aux termes de l'art. 3 al. 1 OAT, lorsque, dans l'accomplissement et la coordination de tâches ayant des effets sur l'organisation du territoire, les autorités disposent d'un pouvoir d'appréciation, elles sont tenues de peser les intérêts en présence. Ce faisant, elles déterminent les intérêts concernés (let. a), apprécient ces intérêts notamment en fonction du développement spatial souhaité et des implications qui en résultent (let. b) et fondent leur décision sur cette appréciation, en veillant à prendre en considération, dans la mesure du possible, l'ensemble des intérêts concernés (let. c). Elles exposent leur pondération dans la motivation de leur décision (art. 3 al. 2 OAT).

8.2 Selon la pratique, l'implantation d'une construction est imposée par sa destination au sens de l'art. 24 let. a LAT lorsqu'un emplacement hors de la zone à bâtir est dicté par des motifs techniques, des impératifs liés à l'exploitation d'une entreprise, la nature du sol (implantation dite imposée « positivement » par la destination de la construction) ou lorsque l'ouvrage est exclu de la zone à bâtir pour des motifs particuliers. De même, l'implantation hors de la zone à bâtir peut exceptionnellement se justifier si l'ouvrage en question ne peut être édifié à l'intérieur de celle-ci en raison des nuisances qu'il occasionne (ouvrage négativement imposé par sa destination ; ATA/565/2023 du 30 mai 2023 consid. 7.2 ; Piermarco ZEN‑RUFFINEN/Christine GUY-ECABERT, Aménagement du territoire, construction, expropriation, 2001, n. 575 p. 267), pour autant que l'ampleur de celles-ci dépasse sensiblement celle qui serait habituelle et réputée tolérable dans une zone à bâtir (Rudolf MUGGLI, in Heinz AEMISEGGER et al., op. cit., p. 180 n. 14 ad art. 24 LAT). Il suffit que l'emplacement soit relativement imposé par la destination : il n'est pas nécessaire qu'aucun autre emplacement n'entre en considération ; il doit toutefois exister des motifs particulièrement importants et objectifs qui laissent apparaître l'emplacement prévu plus avantageux que d'autres endroits situés à l'intérieur de la zone à bâtir (ATF 136 II 214 consid. 2.1 ; 129 II 63 consid. 3.1). Seuls des critères objectifs sont déterminants, à l'exclusion des préférences du constructeur dictées par des raisons de commodité ou de convenance personnelle (ATF 136 II 214 consid. 2.1 ; 129 II 63 consid. 3.1 ; 124 II 252 consid. 4a). L'examen du lieu de situation imposé par la destination apparaît incomplet lorsqu'aucune solution alternative ni aucun emplacement alternatif n'ont été débattus (ATF 136 II 214 consid. 2.2 et les références citées). L'application du critère de l'art. 24 let. a LAT doit être stricte, dès lors que cette disposition contribue à l'objectif de séparation du bâti et du non‑bâti (ATF 132 II 21 consid. 6.4 ; 124 II 252 consid. 4a ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_482/2017 du 26 février 2018 consid. 2.2 ; 1C_877/2013 du 31 juillet 2014 consid. 3.1.1 ; ATA/1059/2023 du 26 septembre 2023 consid. 5.2).

8.3 La pesée des intérêts exigée par l'art. 24 let. b LAT comprend en outre la détermination de tous les intérêts, publics et privés, touchés par le projet (art. 3 al. 1 let. a OAT). Il s'agit d'abord des intérêts poursuivis par la LAT elle-même (notamment la préservation des terres cultivables, l'intégration des constructions dans le paysage, la protection des rives, sites naturels et forêts - art. 3 al. 2 LAT -, la protection des lieux d'habitation - art. 3 al. 3 let. b LAT), mais aussi des autres intérêts protégés dans les lois spéciales ; les intérêts privés sont également pris en compte (ATF 134 II 97 consid. 3.1 ; 129 II 63 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_877/2013 du 31 juillet 2014 consid. 3.2.1).

8.4 L'autorité administrative jouit d'un large pouvoir d'appréciation dans l'octroi de dérogations. Cependant, celles-ci ne peuvent être accordées ni refusées d'une manière arbitraire. Tel est le cas lorsque la décision repose sur une appréciation insoutenable des circonstances et inconciliable avec les règles du droit et de l'équité et se fonde sur des éléments dépourvus de pertinence ou néglige des facteurs décisifs. Quant aux autorités de recours, elles doivent examiner avec retenue les décisions par lesquelles l'administration accorde ou refuse une dérogation. L'intervention des autorités de recours n'est admissible que dans les cas où le département s'est laissé guider par des considérations non fondées objectivement, étrangères au but prévu par la loi ou en contradiction avec elle. Les autorités de recours sont toutefois tenues de contrôler si une situation exceptionnelle justifie l'octroi de ladite dérogation, notamment si celle-ci répond aux buts généraux poursuivis par la loi, qu'elle est commandée par l'intérêt public ou d'autres intérêts privés prépondérants ou encore lorsqu'elle est exigée par le principe de l'égalité de traitement, sans être contraire à un intérêt public (ATA/495/2025 du 6 mai 2025 consid. 2.9 ; ATA/539/2023 du 23 mai 2023 consid. 4.3 et l'arrêt cité).

8.5 En l'espèce, la chambre de céans ne discerne pas en quoi l'aménagement d'une surface de dépôt de matériel, soit l'objet litigieux, sur les parcelles agricoles concernées serait imposé par des motifs techniques, des impératifs liés à l'exploitation de l'entreprise des recourants ou la nature du sol. Si les recourants allèguent certes que l'entreposage du matériel et l'utilisation des parcelles seraient indispensables à la poursuite de leurs activités, ils n'expliquent pas en quoi tel serait le cas et ne parviennent a fortiori pas à le démontrer.

En outre, les recourants soutiennent eux-mêmes que les installations et amas de terres présents sur les parcelles n'ont qu'un faible impact visuel et sonore, ce qui n'est pas contesté par les autres parties. Il n'y a donc pas lieu de retenir que l'ouvrage en question ne pourrait pas être édifié à l'intérieur de la zone à bâtir en raison d'éventuelles nuisances qu'il occasionnerait.

Le TAPI a encore relevé que les recourants n'avaient pas allégué ni démontré qu'ils auraient cherché en vain un autre emplacement en zone à bâtir, étant précisé qu'il en existait manifestement à proximité, notamment dans la ZDIA située à proximité. Les recourants critiquent ce raisonnement. Ils estiment en effet que le secteur des D______ est soumis aux mêmes problématiques d'aménagement et aux mêmes règles régissant la zone. Ils n'auraient aucun intérêt à déposer une demande d'autorisation pour des projets similaires dans une zone adjacente, qui serait confrontée aux mêmes contraintes que la zone actuelle. Ils n'estiment pas non plus devoir poursuivre les recherches dans la zone puisque l'espace prévu à H______ permettrait un déménagement du matériel litigieux.

Il ressort de la consultation du système d'information du territoire à Genève (SITG), accessible en ligne, que la ZDIA située à l'ouest et au sud-ouest des parcelles litigieuses fait l'objet de plans directeurs et de règlements directeurs adoptés les 6 novembre 1996 (plan n° 7______) et 9 mai 2018 (plan n° 8______), si bien que l’application des normes de la zone industrielle ou de la zone de développement d’activités mixtes y est possible (art. 4 al. 1 let. b de la loi générale sur les zones de développement industriel ou d’activités mixtes du 13 décembre 1984 - LZIAM - L 1 45). Quant à la ZDIA située au nord-ouest de la parcelle, elle ne fait certes l'objet d'aucun plan mais elle est déjà fortement bâtie. Pour ces raisons, et contrairement à ce que prétendent les recourants, la ZDIA mentionnée par le TAPI n'est pas confrontée aux mêmes problématiques et aux mêmes règles que les parcelles litigieuses. Il ne peut dès lors être reproché au TAPI d'avoir constaté que les recourants n'avaient pas allégué ni démontré qu'ils auraient cherché en vain un autre emplacement en zone à bâtir, ce que les intéressés ne prétendent du reste pas. Il peut également être ajouté que les recourants n'allèguent pas, ni a fortiori ne démontrent, avoir entrepris des démarches en vue de la location d'un ou plusieurs locaux leur permettant de stocker leur matériel.

Par ailleurs, en tant que les recourants estiment ne pas devoir poursuivre les recherches dans la zone, puisque l'espace prévu à H______ permettrait un déménagement du matériel litigieux, il s'agit là d'une simple convenance personnelle qui ne saurait être prise en compte. En outre, comme l'a relevé l'OU dans son préavis défavorable, sans être contredit, les intéressés évoquent depuis 2017 la possibilité d'un déménagement à H______ mais aucune demande d'autorisation de construire n'a été déposée en lien avec cet éventuel déménagement et les intéressés ne donnent que très peu d'informations sur leur projet futur.

Par surabondance, et comme l'a relevé à juste titre le TAPI, le refus de délivrer l'autorisation de construire sollicitée s'inscrit dans la logique de la « feuille de route » adoptée le 7 juin 2021 par le DT visant à empêcher toute utilisation temporaire de parcelles comprises dans le périmètre du grand projet des D______ contraire à l'affectation de la zone ou qui risquerait de constituer un obstacle à la réalisation dudit projet.

Au vu ce qui précède, l’implantation des installations litigieuses, hors de la zone à bâtir, n'est pas imposée par leur destination. Ainsi, et dès lors que la première condition cumulative de l'art. 24 LAT, nécessaire à l'octroi d'une autorisation dérogatoire, n'est pas remplie, le DT n'a pas abusé de son pouvoir d'appréciation en refusant de délivrer l'autorisation de construire visant la régularisation partielle des infractions I-2______ et I-4______.

Pour le surplus, et compte tenu de ce qui précède, il n'y a pas lieu d'examiner si la seconde condition cumulative de l'art. 24 LAT, soit l'absence d'intérêt prépondérant s'opposant à l'octroi de l'autorisation, est remplie ou non.

9.             Les recourants se plaignent du caractère disproportionné de l'ordre de remise en état.

9.1 Lorsque l’état d’une construction, d’une installation ou d’une autre chose n’est pas conforme aux prescriptions de la LCI, des règlements qu’elle prévoit ou des autorisations délivrées en application de ces dispositions légales ou réglementaires, le département peut notamment en ordonner la remise en état, la réparation, la modification, la suppression ou la démolition (art. 129 let. e et 130 LCI). Les propriétaires ou leurs mandataires, les entrepreneurs et les usagers sont tenus de se conformer aux mesures ordonnées par le DT en application des art. 129 et 130 LCI (art. 131 LCI). Le département notifie aux intéressés, par lettre recommandée, les mesures qu'il ordonne. Il fixe un délai pour leur exécution, à moins qu'il n'invoque l'urgence (art. 132 al. 1 LCI).

9.2 Depuis l’arrêt du Tribunal fédéral précisant que la prescription trentenaire ne s'applique pas hors de la zone à bâtir (ATF 147 II 309), quatre conditions cumulatives sont nécessaires pour un ordre de remise en état en zone agricole à savoir : 1) l’ordre doit être dirigé contre le perturbateur ; 2) les installations en cause ne doivent pas avoir été autorisées en vertu du droit en vigueur au moment de leur réalisation ; 3) l’autorité ne doit pas avoir créé chez l’administré concerné, que ce soit par des promesses, par des infractions, des assurances ou encore un comportement des conditions telles qu’elle serait liée par la bonne foi ; 4) l’intérêt public au rétablissement d’une situation conforme au droit doit l’emporter sur l’intérêt privé de l’intéressé au maintien des installations litigieuses (principe de proportionnalité ; ATA/160/2025 du 11 février 2025 consid. 5.5 confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_165/2025 du 23 avril 2025).

9.3 Le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 5 al. 2 Cst., exige qu’une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés et qu’ils ne puissent pas être atteints par une mesure moins incisive. En outre, ce principe interdit toute limitation allant au-delà du but visé et exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (ATF 145 I 297 consid. 2.4.3.1 et les références citées). Traditionnellement, le principe de la proportionnalité se compose des règles d'aptitude - qui exigent que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé -, de nécessité - qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, l'on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés - et de proportionnalité au sens étroit - qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1P. 269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/278/2025 du 18 mars 2025 consid. 5.6.3).

9.4 Dans la règle, l’intérêt public majeur à la préservation des zones agricoles et la distinction fondamentale entre espace bâti et non-bâti l’emporte (ATF 147 II 309 consid. 5.5 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_8/2022 du 5 décembre 2022 ; 1C_60/2021 du 27 juillet 2021 consid. 3.4.2 confirmant l'ATA/1304/2020 du 15 décembre 2020). Lorsque des constructions ou des installations illicites sont réalisées en dehors de la zone à bâtir, le droit fédéral exige en principe que soit rétabli un état conforme au droit. Le principe de la séparation de l'espace bâti et non bâti, qui préserve différents intérêts publics, est de rang constitutionnel ; il fait partie intégrante de la notion d'utilisation mesurée du sol de l'art. 75 al. 1 Cst. (ATF 147 II 309 consid. 5.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_214/2024 du 7 mai 2025 consid. 4.1). Cette séparation doit par conséquent, en dehors des exceptions prévues par la loi, demeurer d'application stricte (ATF 132 II 21 consid. 6.4). Si des constructions illégales, contraires au droit de l'aménagement du territoire, sont indéfiniment tolérées en dehors de la zone constructible, le principe de la séparation du bâti et du non-bâti est remis en question et un comportement contraire au droit s'en trouve récompensé. S'ajoute à cela que la remise en état poursuit encore d'autres intérêts publics, à savoir la limitation du nombre et des dimensions des constructions en zone agricole (ATF 132 II 21 consid. 6.4), ainsi que le respect du principe de l'égalité devant la loi (arrêts du Tribunal fédéral 1C_645/2023 du 10 décembre 2024 consid. 4.1 ; 1C_197/2021 du 12 novembre 2021 consid. 2.1.1 et les arrêts cités). À cet égard, l'absence de vocation agricole et la proximité d'habitations ne sont pas déterminantes (arrêt du Tribunal fédéral 1C_164/2007 du 13 septembre 2007 consid. 4.3 ; ATA/160/2025 précité consid. 5.8). C'est pourquoi, en règle générale, les constructions érigées sans droit en zone agricole doivent être supprimées, à moins que - à titre exceptionnel - l'écart constaté par rapport à ce qu'admet le droit se révèle mineur et qu'une remise en état ne soit pas dans l'intérêt public. La jurisprudence réserve encore les situations dans lesquelles le bénéficiaire de l'autorisation de construire frappée de nullité pouvait de bonne foi se croire autorisé à construire (ATF 136 II 359 consid. 6 ; 132 II 21 consid. 6 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_214/2024 précité consid. 4.1).

Le Tribunal fédéral, particulièrement strict en zone agricole, a ainsi confirmé les ordres de démolition ou d'enlèvement des constructions ou installations suivantes érigées sans autorisation : une palissade en bois, un mobil‑home, un chalet, un sous‑sol, des containers utilisés pour loger des employés d'une exploitation agricole, un appentis de 12.54 m2 et un cabanon de jardin de 10.29 m2 (arrêt du Tribunal fédéral 1C_482/2017 du 26 février 2018), un paddock et un abri pour chevaux (arrêt du Tribunal fédéral 1C_589/2017 du 16 novembre 2018). De manière générale dans l'examen de la proportionnalité, les intérêts des propriétaires sont mis en retrait par rapport à l'importance de préserver la zone agricole d'installations qui n'y ont pas leur place. Le Tribunal fédéral a déjà énoncé, concernant le canton de Genève, que « s'agissant de constructions édifiées dans la zone agricole dans un canton déjà fortement urbanisé où les problèmes relatifs à l'aménagement du territoire revêtent une importance particulière, l'intérêt public au rétablissement d'une situation conforme au droit l'emporte sur celui, privé, du recourant à l'exploitation de son entreprise sur le site litigieux » (arrêt du Tribunal fédéral 1C_446/2010 du 18 avril 2011, consid. 5.1.1 et les références citées ; ATA/160/2025 précité consid. 5.10).

9.5 La chambre administrative a, pour sa part, confirmé l'ordre de remise en état d'une clôture en zone agricole au motif que l'intérêt public à la préservation des terres agricoles, comprenant de plus des surfaces d'assolement, ainsi que l'intérêt public au rétablissement d'une situation conforme au droit doivent l'emporter sur l'intérêt privé du recourant à mettre en place diverses installations non autorisées et non autorisables sur la parcelle (ATA/1370/2018 du 18 décembre 2018 consid. 10). Dans un cas plus récent, la chambre de céans a retenu qu’il importait peu que les bâtiments existants sur une parcelle n'aient eu, depuis plus de trente ans, aucune affectation agricole : cela ne rendait pas disproportionné l'ordre de remise en état portant sur d'autres éléments nouvellement aménagés sans avoir requis une autorisation de construire et qui n’étaient pas autorisables vu la zone concernée (zone agricole et forêts ; ATA/684/2022 du 28 juin 2022 consid. 15).

Encore plus récemment et à la suite d'une pesée des intérêts en présence, la chambre administrative a confirmé l'ordre de remise en état d'un parking, qui plus est, agrandi par un revêtement goudronné, d'une piscine, de diverses installations d’agrément, d'une clôture et d'un portail sur une parcelle sise en zone agricole. Il existait un intérêt public certain au rétablissement d'une situation conforme au droit. Les aménagements en question n’avaient jamais été autorisés et la situation était d'autant plus délicate que la parcelle était sise en zone agricole. L'intérêt privé du propriétaire à continuer à profiter des aménagements en cause en dehors de la zone à bâtir ne devait pas se voir reconnaître un poids excessif dans la balance des intérêts en présence, si bien qu'il devait céder le pas à l’intérêt public (ATA/160/2025 précité consid. 5.12).

9.6 Selon l'art. 3 al. 1 LGZD, les PLQ prévoient notamment l’implantation à l’intérieur d’une aire d’implantation d’une surface supérieure d’au plus le double de celle d’implantation, le gabarit et la destination des bâtiments à construire (let. a) ; les espaces libres, privés ou publics, notamment les places, promenades, espaces verts et places de jeux pour enfants (let. b) ; les terrains réservés aux équipements publics autres que ceux visés à l’al. 3 et leur éventuelle cession gratuite dans la mesure de la contrepartie offerte par les reports de droits à bâtir prévus par le tableau et schéma de répartition et localisation des droits à bâtir visé à la let. g (let. c).

Les projets de construction établis selon les normes d’une zone de développement doivent être conformes aux PLQ adoptés en application de l’art. 2 (art. 3 al. 5 LGZD).

10.         En l'espèce, l'ordre de remise en état porte sur la zone de dépôt aménagée dans la partie nord de la parcelle n° 11'040, y compris les clôtures, et le parking aménagé dans la partie nord de ladite parcelle. La remise en état du terrain naturel a également été ordonnée.

Il a été vu que la zone de dépôt située dans la partie nord de la parcelle n° 11'040, y compris les clôtures, n'est pas conforme à l'affectation de la zone et que l'autorisation de construire visant à régulariser cet élément, construit sans autorisation, a en conséquence et à juste titre été refusée. Le parking situé dans la partie nord de la parcelle a également été aménagé sans autorisation et n'a pas fait l'objet d'une demande de régularisation. Ces installations ne sont donc pas conformes à la LCI, en particulier à son art. 1 al. 1 let. a, qui exige d'être au bénéfice d'une autorisation notamment pour élever une installation et aménager un garage et une clôture, et à son art. 82 portant sur les dispositions applicables à la zone agricole et renvoyant aux 20 à 22 LaLAT. À cet égard également, il y a donc bien une atteinte au principe de séparation du bâti et du non‑bâti rappelé ci-avant.

L'ordre de remise en état est dirigé contre les recourants, soit les perturbateurs en tant que copropriétaires de la parcelle n° 11'040 sur laquelle se trouvent les installations litigieuses.

Rien ne permet d'affirmer que le DT aurait créé chez les recourants des assurances telles qu’il serait lié par le principe de la bonne foi. Ces deniers ne le prétendent d'ailleurs plus.

La mesure prononcée à l'encontre des recourants, qui vise en définitive à rendre à l'agriculture la surface occupée par les installations litigieuses, est apte à atteindre le but visé, soit la préservation des zones agricoles et la distinction fondamentale entre espace bâti et non-bâti. Il n'existe manifestement pas de mesures moins incisives.

L'intérêt privé des recourants à maintenir les lieux en l'état ne l'emporte pas sur l'intérêt public à la préservation des zones agricoles et à la distinction essentielle entre espace bâti et non-bâti. Cet intérêt public est fondamental, tandis que l’intérêt des recourants à continuer l’exploitation des aménagements réalisés, même s'il est important, ne saurait se voir reconnaître un poids prépondérant dans la balance des intérêts en présence, compte tenu de l'affectation agricole de la zone concernée. En outre et surtout, il apparaît douteux que les aménagements réalisés soient nécessaires à la poursuite de leurs activités, au vu des éléments constatés le 3 mai 2022 lors du transport sur place, en particulier la présence d'affiches d'une société active dans la location, le montage et le démontage d'échafaudages ainsi que le stationnement de camionnettes et de voitures de type berline sans lien avec l'activité agricole des intéressés. Il y a également lieu de tenir compte du respect de la loi et du principe de l'égalité devant elle.

À cela s'ajoute le fait que le GESDEC, soit l'autorité spécialisée en matière de protection de l'environnement (art. 2 al. 2 du règlement sur la protection des sols du 16 janvier 2008 - RSol - K 1 70.13), a considéré que le projet constituait une atteinte portée au sol non admissible, puisque les recourants n'avaient pas démontré que le projet n'avait pas d'incidence durable sur la fertilité des sols. Quand bien même les intéressés contestent ce point de vue, ils n'apportent aucune preuve de ce que la qualité des sols serait préservée ; ils se limitent en effet à soutenir que tel serait le cas dans la mesure où l'installation ne serait que temporaire, ce qui n'est toutefois pas suffisant pour s'écarter de l'avis de l'instance spécialisée. Ainsi, dans la pesée des intérêts, l'atteinte portée au sol par les installations litigieuses doit également être prise en considération.

L'argument des recourants selon lequel l'entreposage du matériel et l'utilisation des parcelles ne concerneraient qu'une période limitée n'emporte pas conviction. D'une part, ils ont eux-mêmes indiqué avoir, au fil du temps et à tout le moins depuis 2018, entreposé du matériel sur les parcelles. Ainsi, depuis plus de cinq ans au minimum au moment où la décision a été rendue, la parcelle était déjà utilisée de façon contraire à l'affectation de la zone, si bien que l'on ne saurait admettre que la situation ne concernerait qu'une période limitée. D'autre part, rien ne permet d'affirmer que les recourants déménageront prochainement à H______, ce qu'ils soutiennent depuis 2017 déjà sans toutefois avoir démontré une concrétisation de leur projet.

Il ressort des plans fournis par les recourants que la surface concernée par l'ordre de remise en état fait 2'014 m2. Contrairement à qu'ils prétendent, cette surface n'est pas négligeable. Au demeurant, on ne saurait accorder un poids prépondérant à la seule surface d'un terrain agricole faisant l'objet d'un ordre de remise en état, sauf à vider de leur sens toutes les normes visant la préservation des surfaces agricoles. Par ailleurs, en soutenant que le lieu concerné ne porterait que sur une faible portion du nord des parcelles, les recourants admettent implicitement que la remise en état n'est pas de nature à engendrer pour eux des difficultés particulières.

Les recourants prétendent encore que la remise en état serait disproportionnée puisque la zone ne serait plus agricole prochainement, au vu de l'adoption prochaine d'un PLQ. Or, ledit PLQ n'a toujours pas été adopté et il est notoire que la mise en œuvre d'une zone de développement à la suite de l'adoption d'un PLQ prend du temps, ce qui laisse un intervalle de temps durant lequel la parcelle concernée conservera sa vocation agricole. Les surfaces de la parcelle n° 11'040 louées par l'OCGC (S1 et S2) pour la réalisation de la première étape de l'extension du tramway des TPG ont d'ailleurs dû être rendues à l'agriculture à la fin du chantier (2023), malgré le projet de PLQ. Par ailleurs, si, en cas d'adoption de celui-ci, la zone concernée se verra certes appliquer les normes de la zone de développement et non plus celles de la zone agricole, cela ne signifie pas nécessairement qu'une construction y sera érigée. En effet, des espaces libres, privés ou publics, notamment des places, promenades et espaces verts sont prévues dans les PLQ. Ainsi, il existe un intérêt à ce que la qualité des sols soit conservée malgré l'adoption future d'un PLQ.

À cela s'ajoute le fait que l'ordre de remise en conformité a été prononcé il y a déjà plus d'un an et demi au jour du prononcé du présent arrêt et que les recourants ne sauraient tirer avantage du seul écoulement du temps depuis l'ordre de remise en conformité, dans la mesure où celui-là est principalement dû aux procédures judicaires qu'ils ont eux‑mêmes entamées.

Enfin, les intéressés ne peuvent rien tirer du JTAPI/650/2024 du 27 juin 2024, dans lequel le TAPI a considéré en substance que la modification prévue de la LAT, qui rétablit la prescription trentenaire, devait être prise en considération dans le cadre du principe de la proportionnalité. D'une part, la chambre de céans n'est pas liée par les jugements du TAPI. D'autre part, la présente situation diffère de celle jugée par cette juridiction dans le jugement précité, puisque, in casu, les installations en cause n'ont pas été érigées depuis plus de 30 ans. En outre, rien ne permet d'affirmer à ce stade qu'elles seront conformes au PLQ qui sera, le cas échéant, adopté. Il n'y a dès lors pas de place pour un « effet anticipé » de ce PLQ, y compris sous l'angle du principe de la proportionnalité.

Pour le surplus, l'on ne se trouve ni dans un cas où l'écart constaté par rapport à ce qu'admet le droit apparaitrait mineur ni dans un cas où une remise en état porterait atteinte à un intérêt public particulier.

Au vu de ce qui précède, les conditions permettant l'ordre de remise en état sont réunies, si bien que le DT n'a pas abusé de son pouvoir d'appréciation en le prononçant.

Mal fondé, le grief sera écarté.

Les considérations qui précèdent conduisent au rejet du recours, étant précisé que les recourants ne formulent plus de grief en lien avec l'amende qui leur a été infligée.

11.         Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge solidaire des recourants (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité ne sera accordée, la commune n'y ayant en toute hypothèse pas conclu (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 29 août 2024 par A______ et B______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 27 juin 2024 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'500.- à la charge solidaire de A______ et B______

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

 

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Guillaume FRANCIOLI, avocat des recourants, au département du territoire-OAC, à la commune de C______, au Tribunal administratif de première instance, à l’office fédéral du développement territorial (ARE), à l’office fédéral de l’agriculture (OFAG) et à l’office fédéral de l’environnement (OFEV).

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Patrick CHENAUX, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. MARMY

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :