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Décisions | Assistance juridique

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AC/900/2023

DAAJ/104/2023 du 28.09.2023 sur AJC/2107/2023 ( AJC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

AC/900/2023 DAAJ/104/2023

COUR DE JUSTICE

Assistance judiciaire

DÉCISION DU JEUDI 28 SEPTEMBRE 2023

 

 

Statuant sur le recours déposé par :

 

Monsieur A______, domicilié ______ [GE],

représenté par Me Yann ARNOLD, avocat, rue Du-Roveray 16, case postale, 1211 Genève 6,

 

contre la décision du 19 avril 2023 de la vice-présidence du Tribunal civil.

 

 


EN FAIT

A.           a. A______ (ci-après : le recourant), né le ______ 1985, et B______, née le ______ 1992, tous deux ressortissants du Kosovo, se sont mariés le ______ 2015 et sont les parents de trois enfants, soit C______, D______ et E______, nés respectivement les ______ 2016, ______ 2018 et ______ 2022 à Genève.

Le recourant indique être arrivé à Genève en 2007. Son épouse en avril 2015.

b. Le 12 mars 2018, le recourant a déposé auprès de l'Office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) une demande de régularisation de ses conditions de séjour pour lui-même, son épouse et ses deux enfants.

A l'appui de sa demande, il a notamment fourni des certificats de salaire, un extrait de compte individuel, un contrat de travail, une lettre de licenciement au nom de la société F______ Sàrl, un certificat médical, un formulaire M et OCIRT ainsi qu'un formulaire de demande Papyrus.

c. Par courrier du 13 janvier 2020, l'OCPM a transmis le dossier du recourant au Secrétariat d'Etat aux migrations (ci-après : SEM) avec un préavis favorable.

d. Le SEM ayant retourné le dossier à l'OCPM en juillet 2020 "pour nouvel examen", cette autorité a ensuite dénoncé le dossier auprès du Ministère public pour suspicion de faux documents.

e. Le 24 février 2022, le recourant a été condamné par le Ministère public pour faux dans les certificats, entrée et séjour illégal, exercice d'une activité lucrative sans autorisation et comportement frauduleux à l'égard des autorités.

f. Par pli du 8 novembre 2022, l'OCPM a informé le recourant de son intention de lui refuser l'octroi d'une autorisation de séjour et de prononcer son renvoi de Suisse et a invité l'intéressé à se déterminer.

g. Par décision du 27 février 2023, après exercice du droit d'être entendu, l'OCPM a refusé de soumettre la requête du recourant et de sa famille avec un préavis positif au SEM et a prononcé leur renvoi de Suisse.

La situation du recourant ne répondait pas aux critères de l'opération Papyrus, puisqu'il avait fourni de faux documents afin de justifier une partie de son séjour en Suisse et avait été condamné pénalement pour ces faits. Par ailleurs, il ne pouvait être déduit du silence du juge pénal que ce dernier aurait renoncé à l'expulsion judiciaire du recourant au sens de l'art. 66a du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), dans la mesure où l'infraction de faux dans les titres ne figurait pas dans la liste de cette disposition légale. En outre, l'épouse du recourant était sans emploi et ne pouvait se prévaloir du niveau de français requis. Quand bien même le séjour du recourant pouvait être qualifié de long, celui-ci devait être relativisé en comparaison avec les années passées dans son pays d'origine où il avait obtenu une maturité et travaillé dans le domaine de la construction avec son père et son oncle. Enfin, les enfants du recourant n'étaient pas encore adolescents, de sorte que leur intégration en Suisse n'était pas déterminante.

Il n'invoquait pas et, a fortiori, n'avait pas démontré l'existence d'obstacles au retour au Kosovo. Le dossier ne faisait pas non plus apparaître que l'exécution du renvoi de la famille ne serait pas possible, pas licite ou ne pourrait pas être raisonnablement exigée.

h. Par acte du 30 mars 2023, le recourant a interjeté recours contre cette décision devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), concluant notamment à son annulation et à l'octroi d'une autorisation de séjour en faveur de lui-même et de sa famille.

Il a notamment fait valoir qu'il avait consulté G______ à l'époque de sa condamnation pénale et que ce syndicat lui aurait indiqué qu'il n'était pas nécessaire de contester sa condamnation, de sorte qu'il n'avait pas formé opposition à l'ordonnance pénale. Selon lui, les documents considérés comme des faux par la justice pénale – en particulier le certificat médical attestant de consultations médicales en 2007, 2008 et 2009 – étaient pourtant tous authentiques. Ce document démontrait bien sa présence en Suisse entre 2007 et 2009. Il a par ailleurs fourni d'autres certificats médicaux plus récents attestant du fait qu'il était suivi par un médecin à Genève depuis 2007. Les autorités pénales avaient également considéré que le contrat de travail avec la société F______ Sàrl ainsi que la lettre de résiliation de cette dernière étaient des faux, au motif que la société n'avait jamais payé les cotisations sociales le concernant et que le contrat de travail contenait un "item Date" du 19 octobre 2017 dans l'inventaire informatique. Le recourant a affirmé qu'il avait pourtant bien travaillé pour cette société, arguant notamment qu'il n'était pas invraisemblable qu'une société qui emploie un étranger sans titre de séjour ne le déclare pas et ne paie pas ses charges sociales. Le recourant considérait qu'il fallait s'écarter des faits retenus par les autorités pénales, dès lors que le médecin qui a établi les certificats médicaux et les responsables de F______ Sàrl n'avaient pas été entendus. En conséquence, il estimait remplir les conditions de l'opération Papyrus. Par ailleurs, il a soutenu que sa famille était financièrement indépendante et bien intégrée en Suisse (en particulier les enfants, dont l'aîné était scolarisé depuis plusieurs années), ce qu'il offrait de prouver par de nombreux témoins. Il considérait que sa famille remplissait également les conditions d'un cas de rigueur.

Enfin, l'OCPM ne pouvait pas prononcer son renvoi, dans la mesure où le Ministère public avait renoncé implicitement à son expulsion. Il s'est prévalu à ce titre d'une jurisprudence du Tribunal fédéral selon laquelle il convenait d'admettre qu'un juge pénal renonçait toujours à prononcer une expulsion pénale au sens l'art. 62 al. 2 et 63 al. 3 LEI même lorsqu'il omettait de traiter cette problématique dans son arrêt, de sorte que l'autorité administrative ne pouvait pas se fonder uniquement sur les infractions ainsi jugées pour révoquer l'autorisation de séjour ou d'établissement de l'étranger condamné.

Le mémoire de recours a été transmis à la vice-présidence du Tribunal de première instance sans les pièces qui l'accompagnaient.

B.            Le 20 mars 2023, le recourant a sollicité l'assistance juridique pour la procédure de recours susvisée.

C.           Par décision du 19 avril 2023, notifiée le 29 avril 2023, la vice-présidence du Tribunal civil a rejeté la requête d'assistance juridique précitée, au motif que la cause du recourant était dénuée de chances de succès.

D.           a. Recours est formé contre cette décision, par acte expédié le 19 mai 2023 à la Présidence de la Cour de justice. Le recourant conclut, avec suite de frais, à l'annulation de la décision entreprise, au constat de ce que sa cause présente des chances de succès, à l'admission de sa requête d'assistance juridique avec effet au 20 mars 2023 et à la fixation du nombre d'heures d'activité d'avocat allouées (étant précisé que son conseil avait d'ores et déjà consacré 15 heures d'activité à la défense de ses intérêts).

Le recourant produit une pièce nouvelle, soit une attestation signée par les enseignantes de C______ portant sur un bilan des compétences de l'enfant à réaliser en vue d'un suivi logopédique.

b. La vice-présidence du Tribunal civil a renoncé à formuler des observations.

EN DROIT

1.             1.1. La décision entreprise est sujette à recours auprès de la présidence de la Cour de justice en tant qu'elle refuse l'assistance juridique (art. 10 al. 3 LPA), compétence expressément déléguée à la vice-présidente soussignée sur la base des art. 29 al. 5 LOJ et 10 al. 1 du Règlement de la Cour de justice (RSG E 2 05.47). Le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours dans un délai de 30 jours (art. 10 al. 3 LPA, 130, 131 et 321 al. 1 CPC, applicables par renvoi des art. 10 al. 4 LPA et 8 al. 3 RAJ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_171/2011 du 15 juin 2011 consid. 2.2).

1.2. En l'espèce, le recours est recevable pour avoir été interjeté dans le délai utile et en la forme écrite prescrite par la loi.

1.3. Lorsque la Cour est saisie d'un recours (art. 10 al. 3 LPA), son pouvoir d'examen est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_171/2011 précité). Il appartient en particulier au recourant de motiver en droit son recours et de démontrer l'arbitraire des faits retenus par l'instance inférieure (Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., n. 2513-2515).

1.4. Il n'y a pas lieu d'entendre le recourant, celui-ci ne le sollicitant pas et le dossier contenant suffisamment d'éléments pour statuer (art. 10 al. 3 LPA; arrêt du Tribunal fédéral 2D_73/2015 du 30 juin 2016 consid. 4.2).

2.             2.1. A teneur de l'art. 326 al. 1 CPC, les conclusions et les allégations de faits nouvelles sont irrecevables dans le cadre d'une procédure de recours. Sont néanmoins recevables les faits susceptibles de rendre la procédure sans objet (ATF 145 III 422 consid. 5.2 et les références citées).

2.2. Par conséquent, les allégués de faits dont le recourant n'a pas fait état en première instance et la pièce nouvelle ne seront pas pris en considération, étant relevé qu'il est en toute hypothèse douteux que les problèmes logopédiques que présente C______ soient subitement apparus postérieurement à la décision attaquée.

3.             Reprenant l'art. 29 al. 3 Cst., l'art. 117 CPC prévoit que toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit à l'assistance judiciaire à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès.

Un procès est dépourvu de chances de succès lorsque les perspectives de le gagner sont notablement plus faibles que les risques de le perdre, et qu'elles ne peuvent donc être considérées comme sérieuses, de sorte qu'une personne raisonnable et de condition aisée renoncerait à s'y engager en raison des frais qu'elle s'exposerait à devoir supporter; en revanche, une demande ne doit pas être considérée comme dépourvue de toute chance de succès lorsque les perspectives de gain et les risques d'échec s'équilibrent à peu près ou lorsque les premières sont seulement un peu plus faibles que les seconds. Ce qui est déterminant est de savoir si une partie, qui disposerait des ressources financières nécessaires, se lancerait ou non dans le procès après une analyse raisonnable. Une partie ne doit pas pouvoir mener un procès qu'elle ne conduirait pas à ses frais, uniquement parce qu'il ne lui coûte rien (ATF 142 III 138 consid. 5.1; ATF 128 I 225 consid. 2.5.3).

Pour déterminer les chances de succès d'un recours, le juge peut prendre en considération la décision de première instance, en comparant celle-ci avec les griefs soulevés. De la sorte, l'examen sommaire des chances de succès auquel il doit procéder est simplifié. Cet examen ne doit toutefois pas conduire à ce qu'une partie voit quasiment rendu impossible le contrôle d'une décision qu'elle conteste (arrêt du Tribunal fédéral 5A_572/2015 du 8 octobre 2015 consid. 4.1).

La situation doit être appréciée à la date du dépôt de la requête et sur la base d'un examen sommaire (ATF 142 III 138 consid. 5.1; 133 III 614 consid. 5).

L'absence de chances de succès peut résulter des faits ou du droit. L'assistance sera refusée s'il apparaît d'emblée que les faits pertinents allégués sont invraisemblables ou ne pourront pas être prouvés (arrêt du Tribunal fédéral 4A_614/2015 du 25 avril 2016 consid. 3.2).

4. Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi, non réalisée en l’espèce. (al. 2; art. 10 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10, a contrario).

5. 5.1. Le 1er janvier 2019, est entrée en vigueur une modification de la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr), devenue la LEI. Conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral (arrêts du Tribunal fédéral 2C_841/2019 du 11 octobre 2019 consid. 3; 2C_737/2019 du 27 septembre 2019 consid. 4.1), les demandes déposées avant le 1er janvier 2019 sont régies par l'ancien droit, étant précisé que la plupart des dispositions de la LEI sont demeurées identiques.

5.2. En l'occurrence, la demande de régularisation des conditions de séjour pour le recourant et les membres de sa famille ayant été formée le 12 mars 2018, leur dossier est soumis aux dispositions de la LEI dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2018.

5.3. L'art. 30 al. 1 let. b LEI permet de déroger aux conditions d'admission en Suisse, telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI, notamment aux fins de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

5.4. L'art. 31 al. 1 OASA, dans sa teneur au moment du dépôt de la demande d'autorisation de séjour, prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant (let. a), du respect de l'ordre juridique suisse (let. b), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière ainsi que de sa volonté de prendre part à la vie économique et d'acquérir une formation (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f), ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (Directives du Secrétariat d'État aux migrations, domaine des étrangers, 2013, état au 12 avril 2017, ch. 5.6.12 [ci-après : directives SEM]).

5.5. Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d'études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n'arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l'aide sociale ou des liens conservés avec le pays d'origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2; arrêts du Tribunal administratif fédéral [ci-après : TAF] C-5414/2013 du 30 juin 2015 consid. 5.1.4; C-6379/2012 et C‑6377/2012 du 17 novembre 2014 consid. 4.3; C-1240/2012 du 24 juillet 2014 consid. 5.3; ATA/353/2019 du 2 avril 2019 consid. 5d; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4d).

5.6. Dans l'examen d'un cas de rigueur concernant le renvoi d'une famille, il importe de prendre en considération la situation globale de celle-ci. Dans certaines circonstances, le renvoi d'enfants peut engendrer un déracinement susceptible de constituer un cas personnel d'extrême gravité.

D'une manière générale, lorsqu'un enfant a passé les premières années de sa vie en Suisse et y a seulement commencé sa scolarité, il reste encore attaché dans une large mesure à son pays d'origine, par le biais de ses parents. Son intégration au milieu socioculturel suisse n'est alors pas si profonde et irréversible qu'un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet (arrêt du TAF C-636/2010 du 14 décembre 2010 consid. 5.4 et la référence citée). Avec la scolarisation, l'intégration au milieu suisse s'accentue. Dans cette perspective, il convient de tenir compte de l'âge de l'enfant lors de son arrivée en Suisse et au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, du degré et de la réussite de la scolarité, de l'état d'avancement de la formation professionnelle, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d'exploiter, dans le pays d'origine, la scolarisation ou la formation professionnelle entamée en Suisse. Un retour dans la patrie peut, en particulier, représenter une rigueur excessive pour des adolescents ayant suivi l'école durant plusieurs années et achevé leur scolarité avec de bons résultats. L'adolescence, une période comprise entre douze et seize ans, est en effet une période importante du développement personnel, scolaire et professionnel, entraînant souvent une intégration accrue dans un milieu déterminé (ATF 123 II 125 consid. 4b; arrêt du Tribunal fédéral 2C_75/2011 du 6 avril 2011 consid. 3.4; ATA/203/2018 du 6 mars 2018 consid. 9a). Sous l'angle du cas de rigueur, il est considéré que cette pratique différenciée réalise la prise en compte de l'intérêt supérieur de l'enfant, telle qu'elle est prescrite par l'art. 3 ch. 1 de la Convention relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989 (CDE - RS 0.107), entrée en vigueur pour la Suisse le 26 mars 1997; arrêts du Tribunal fédéral 2A.679/2006 du 9 février 2007 consid. 3 et 2A.43/2006 du 31 mai 2006 consid. 3.1; arrêt du Tribunal administratif fédéral C 3592/2010 du 8 octobre 2012 consid. 6.2; ATA/434/2020 du 31 avril 2020 consid. 10).

5.7. L'opération Papyrus développée par le canton de Genève a visé à régulariser la situation des personnes non ressortissantes UE/AELE bien intégrées et répondant à différents critères.

Les critères pour pouvoir bénéficier de cette opération sont les suivants selon le livret intitulé « Régulariser mon statut de séjour dans le cadre de Papyrus » disponible sous https://www.ge.ch/regulariser-mon-statut-sejour-cadre-papyrus/criteres-respecter (ATA/877/2021 du 31 août 2021 consid. 7a) :

- avoir un emploi;

- être indépendant financièrement;

- ne pas avoir de dettes;

- avoir séjourné à Genève de manière continue sans papiers pendant cinq ans minimum (pour les familles avec enfants scolarisés) ou dix ans minimum pour les autres catégories, à savoir les couples sans enfants et les célibataires; le séjour doit être documenté;

- faire preuve d'une intégration réussie (minimum niveau A2 de français du cadre européen commun de référence pour les langues et scolarisation des enfants notamment);

- absence de condamnation pénale (autre que séjour illégal).

Le livret précise en outre que les dossiers de régularisation déposés jusqu'au 31 décembre 2018 seront instruits selon les critères précités et la pratique mise en œuvre dans le cadre du projet pilote Papyrus.

Dans le cadre du projet pilote Papyrus, le SEM a procédé à une concrétisation des critères légaux en vigueur pour l'examen des cas individuels d'extrême gravité dans le strict respect des dispositions légales et de ses directives internes. Il ne s'agit pas d'un nouveau droit de séjour en Suisse ni d'une nouvelle pratique. Une personne sans droit de séjour ne se voit pas délivrer une autorisation de séjour pour cas de rigueur parce qu'elle séjourne et travaille illégalement en Suisse, mais bien parce que sa situation est constitutive d'un cas de rigueur en raison notamment de la durée importante de son séjour en Suisse, de son intégration professionnelle ou encore de l'âge de scolarisation des enfants (ATA/1000/2019 du 11 juin 2019 consid. 5b et les arrêts cités).

L' "opération Papyrus" étant un processus administratif simplifié de normalisation des étrangers en situation irrégulière à Genève, il n'emporte en particulier aucune dérogation aux dispositions légales applicables à la reconnaissance de raisons personnelles majeures justifiant la poursuite du séjour en Suisse (art. 30 al. 1 let. b LEI), pas plus qu'à celles relatives à la reconnaissance d'un cas individuel d'extrême gravité (art. 31 al. 1 OASA), dont les critères peuvent entrer en ligne de compte pour l'examen desdites raisons personnelles majeures (ATA/584/2017 du 23 mai 2017 consid. 4c).

Selon le site internet de l'État de Genève, le projet pilote Papyrus a pris fin le 31 décembre 2018, date limite pour le dépôt des dossiers de régularisation auprès de l'OCPM (ATA/340/2020 du 7 avril 2020 consid. 9c).

5.8. Sous l'angle étroit de la protection de la vie privée, l'art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) ouvre le droit à une autorisation de séjour, mais à des conditions restrictives, l'étranger devant établir l'existence de liens sociaux et professionnels spécialement intenses avec la Suisse, notablement supérieurs à ceux qui résultent d'une intégration ordinaire (ATF 130 II 281 consid. 3.2.1). Lorsque l'étranger réside légalement depuis plus de dix ans en Suisse, il y a lieu de partir de l'idée que les liens sociaux qu'il y a développés sont suffisamment étroits pour qu'il bénéficie d'un droit au respect de sa vie privée; lorsque la durée de la résidence est inférieure à dix ans, mais que l'étranger fait preuve d'une forte intégration en Suisse, le refus de prolonger ou la révocation de l'autorisation de rester en Suisse peut également porter atteinte au droit au respect de la vie privée (ATF 144 I 266). Les années passées en Suisse dans l'illégalité ou au bénéfice d'une simple tolérance ne sont pas déterminantes pour le calcul de la durée du séjour légal dans ce pays (ATF 137 II 1 consid. 4.3; 134 II 10 consid. 4.3; arrêt du Tribunal fédéral 2C_369/2022 du 1er septembre 2022 consid. 5.4).

5.9. Lorsque le complexe de faits soumis au juge administratif a fait l’objet d’une procédure pénale, le juge administratif est en principe lié par le jugement pénal, notamment lorsque celui-ci a été rendu au terme d’une procédure publique ordinaire au cours de laquelle les parties ont été entendues et des témoins interrogés (arrêt du Tribunal fédéral 1C_202/2018 du 18 septembre 2018 consid. 2.2; ATA/2019/2023 du 7 mars 2023 consid. 2g; ATA/783/2022 du 9 août 2022 consid. 3a; ATA/712/2021 du 6 juillet 2021 consid. 7a). Il convient d’éviter autant que possible que la sécurité du droit soit mise en péril par des jugements opposés, fondés sur les mêmes faits (ATF 137 I 363 consid. 2.3.2). Le juge administratif peut toutefois s’en écarter lorsque les faits déterminants pour l'autorité administrative n'ont pas été pris en considération par le juge pénal, lorsque des faits nouveaux importants sont survenus entre-temps, lorsque l'appréciation à laquelle le juge pénal s'est livré se heurte clairement aux faits constatés ou encore lorsque le juge pénal ne s'est pas prononcé sur toutes les questions de droit (ATF 139 II 95 consid. 3.2; 136 II 447 consid. 3.1; 129 II 312 consid. 2.4).

Si les faits retenus au pénal lient donc en principe l’autorité et le juge administratifs, il en va différemment des questions de droit et de l’appréciation juridique à laquelle s’est livrée le juge pénal (arrêt du Tribunal fédéral 1C_202/2018 du 18 septembre 2018 consid. 2.2; ATA/783/2022 précité consid. 3a; ATA/712/2021 précité consid. 7a).

5.10. Conformément à l'art. 62 al. 2 LEI, entré en vigueur le 1er octobre 2016, soit en même temps que les nouvelles dispositions relatives à l'expulsion pénale (art. 66a ss CP), est illicite toute révocation, mais aussi refus d'octroyer une autorisation (arrêt du Tribunal fédéral 2C_362/2019 du 10 janvier 2020 consid. 8.1) ou de la renouveler (ATF 146 II 49 consid. 5.3), fondée uniquement sur des infractions commises après le 1er octobre 2016, pour lesquelles un juge pénal a déjà prononcé une peine ou une mesure mais a renoncé à prononcer une expulsion. Il en va de même si la révocation, respectivement le refus est basé sur des infractions commises avant le 1er octobre 2016, mais que le juge pénal a entre-temps renoncé à prononcer l'expulsion, pour autant que celui-ci ait également tenu compte de toutes les infractions commises avant cette date dans son examen du cas de rigueur au sens de l'art. 66a al. 2 CP (ATF 146 II 1 consid. 2.2). L'autorité compétente en matière de droit des étrangers conserve toutefois la compétence de révoquer ou refuser une autorisation sur le vu d'autres éléments non liés à l'infraction, tels que – par exemple – des faits jusqu'alors inconnus au moment du jugement ou qui sont survenus après coup, ou d'autres éléments ne relevant que de la législation sur les étrangers, auxquels ils peuvent encore se référer pour se prononcer sur le droit de l'étranger à demeurer en Suisse (arrêts du Tribunal fédéral 2C_362/2019 précité consid. 8.1; 2C_628/2019 du 18 novembre 2019 consid. 7.1; ATA/707/2020 du 4 août 2020 consid. 16b; FF 2013 5373 p. 5440).

5.11. En l'espèce, il semble qu'indépendamment de la question de savoir si le Ministère public a renoncé à l'expulsion facultative de l'art. 66abis CP, la décision de l'OCPM se base sur la situation du recourant et de sa famille dans son ensemble, notamment sur le fait que la durée de son séjour en Suisse devrait être relativisée en comparaison avec les années passées dans son pays d'origine, pays où il s'est rendu très régulièrement ces dernières années afin de rendre visite à sa famille. Il apparaît également que la femme du recourant n'a pas d'emploi et ne peut se prévaloir d'un niveau de français suffisant.

Le bien-fondé de l'argumentation du recourant portant sur une éventuelle renonciation implicite de l'expulsion pénale par le Ministère public paraît donc incertain.

Par ailleurs, à première vue, le recourant ne remplit pas les conditions posées dans le cadre de l'opération « Papyrus » au vu de sa condamnation pénale du 24 février 2022 pour faux dans les certificats, entrée et séjour illégal, exercice d'une activité lucrative sans autorisation et comportement frauduleux à l'égard des autorités.

Même si le recourant conteste avoir présenté des faux dans le cadre de cette opération, force est de constater qu'il n'a pas recouru contre cette condamnation. Elle est donc en force. En outre, quand bien même cette dernière est intervenue par voie d’ordonnance pénale – sans qu'il n'apparaisse qu'une instruction approfondie n'ait été menée – le recourant n'a produit aucune pièce devant l'instance précédente qui laisserait à penser que le juge administratif pourrait s'écarter des faits retenus par le Ministère public.

Ne remplissant pas l'une des conditions cumulatives de l’opération « Papyrus », le recourant ne semble ainsi pas pouvoir se prévaloir d’une régularisation de son séjour fondée sur ce motif.

Dans la mesure où l'opération « Papyrus » constitue une concrétisation des critères légaux en vigueur pour l'examen des cas individuels d'extrême gravité, il est également a priori douteux que le recourant puisse obtenir une autorisation de séjour dans le cadre de cet examen. Outre que la durée de son séjour devrait être relativisée, dès lors qu’il s’est déroulé dans l’illégalité, le recourant, qui travaille dans le domaine de la construction, en tant que plâtrier-peintre au sein de son entreprise dont on ignore tout (date de la création, nombre d'employés, bilans, notamment), ne paraît pas avoir réalisé une intégration professionnelle exceptionnelle. En effet, il ne semble pas avoir acquis à travers son emploi des connaissances professionnelles si spécifiques qu'il ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine ou ailleurs. Selon la décision de l'OCPM, avant son arrivée en Suisse, il travaillait déjà dans le domaine de la construction avec son père et son oncle. Par ailleurs, la jurisprudence retient que celui qui place l'autorité devant le fait accompli, en l’occurrence en venant illégalement en Suisse et en y prenant une activité lucrative, doit s'attendre à ce que celle-ci se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit que d'éviter les inconvénients qui en découlent pour lui (ATF 123 II 248 consid. 4a; arrêts du Tribunal fédéral 1C_33/2014 du 18 septembre 2014 consid. 4.1; 1C_269/2013 du 10 décembre 2013 consid. 4.1).

Le recourant est arrivé en Suisse à l'âge de 21 ans. Ce n'est donc pas dans ce pays qu'il a passé son enfance, son adolescence et les nombreuses années de sa vie d'adulte, périodes qui apparaissent comme essentielles pour la formation de la personnalité et, partant, pour l'intégration sociale et culturelle. Il ressort par ailleurs de son acte de recours formé par-devant le TAPI que le recourant et sa femme disposent toujours de membres de leur famille (parents et frère) au Kosovo et s'y sont rendus très régulièrement ces dernières années selon la décision de l'OCPM. Ils semblent ainsi pouvoir compter sur l’appui de leur famille.

Enfin, prima facie, compte tenu du fait que le séjour du recourant s’est essentiellement déroulé dans l’illégalité, il ne pourrait pas se plaindre d’une violation de l’art. 8 CEDH.

Les mêmes considérations semblent devoir s'appliquer à la femme du recourant, dans la mesure où celle-ci est arrivée en Suisse en avril 2015, à l'âge de 22 ans, paraît être en bonne santé, n'exerce pas d'activité professionnelle et maîtrise imparfaitement le français.

Quant aux enfants, ils sont âgés de respectivement 7 ans, bientôt 5 ans et bientôt 1 an. C______ est au début de sa scolarité. Les enfants n'ont toutefois pas encore atteint l'âge de l'adolescence, période entraînant souvent une intégration accrue dans un milieu déterminé. Ils demeurent ainsi dépendants affectivement et culturellement de leurs parents, dont ils devraient suivre le sort. Il est donc difficile qu'ils puissent faire valoir un intérêt supérieur propre au sens de l’art. 3 ch. 1 CDE qui justifierait la prise en compte de leur situation personnelle pour admettre l’existence d’un cas de rigueur.

6. 6.1. Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, les autorités compétentes rendent une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel une autorisation est refusée ou dont l'autorisation, bien que requise, est révoquée ou n'est pas prolongée après un séjour autorisé. La décision de renvoi est assortie d'un délai de départ raisonnable (art. 64d al. 1 LEI).

A teneur de l'art. 83 LEI, le renvoi d'un étranger ne peut être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (al. 1). L'exécution du renvoi n'est pas possible lorsque l'intéressé ne peut quitter la Suisse pour son Etat d'origine, son Etat de provenance ou un Etat tiers ni être renvoyé dans un de ces Etats (al. 2). Elle n'est pas licite lorsque le renvoi serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (al. 3). Elle n'est pas raisonnablement exigible si elle met concrètement en danger l'étranger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (al. 4).

6.2. En l'espèce, le recourant n'allègue pas que l'exécution du retour de sa famille dans son pays d'origine serait impossible, illicite ou inexigible au regard de l'art. 83 LEI et le dossier ne laisse pas apparaître d'éléments qui tendraient à démontrer le contraire.

Au vu de ce qui précède, la vice-présidence du Tribunal civil était fondée à retenir que les chances de succès du recours du recourant auprès du TAPI paraissaient très faibles. C'est donc de manière conforme au droit qu'elle a refusé d'octroyer le bénéfice de l'assistance judiciaire au recourant pour cette procédure.

Partant, le recours, mal fondé, sera rejeté.

7. Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure d'assistance juridique (art. 119 al. 6 CPC). Par ailleurs, il n'y a pas lieu à l'octroi de dépens, vu l'issue du recours.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA VICE-PRÉSIDENTE DE LA COUR :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé par A______ contre la décision rendue le 19 avril 2023 par la vice-présidence du Tribunal civil dans la cause AC/900/2023.

Au fond :

Le rejette.

Déboute A______ de toutes autres conclusions.

Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires pour le recours.

Notifie une copie de la présente décision à A______ en l'Étude de Me Yann ARNOLD (art. 137 CPC).

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, vice-présidente; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière de droit public; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 82 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la décision attaquée. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.