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Décisions | Sommaires

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C/22104/2024

ACJC/1414/2025 du 09.10.2025 sur JTPI/8090/2025 ( SML ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/22104/2024 ACJC/1414/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU JEUDI 9 OCTOBRE 2025

 

Entre

LA SOCIETE COOPERATIVE DU DOMAINE A______, sise ______ (VD), recourante contre un jugement rendu par le Tribunal de première instance de ce canton le 27 juin 2025, représentée par Me Matthieu GENILLOD, avocat, Alphalex Avocats SA, Avenue du Tribunal-Fédéral 1, Case postale 9, 1001 Lausanne,

et

Monsieur B______, domicilié ______ [GE], intimé, représenté par
Me Christian TAMISIER, avocat, THCB Avocats, Rue Saint-Léger 8, 1205 Genève.

 


EN FAIT

A.           Par jugement JTPI/8090/2025 du 27 juin 2025, expédié pour notification aux parties le 30 juin 2025, le Tribunal de première instance a débouté LA SOCIETE COOPERATIVE DU DOMAINE A______ de sa requête en mainlevée provisoire (ch. 1), a arrêté les frais judiciaires à 400 fr., compensés avec l’avance opérée et laissés à la charge de la précitée (ch. 2 et 3), et dit qu’il n’était pas alloué de dépens (ch. 4).

Il a considéré que LA SOCIETE COOPERATIVE DU DOMAINE A______ n’avait pas produit de titre au sens de l’art. 82 LP, et qu’elle n’avait pas explicité le bien-fondé du montant réclamé.

B.            Par acte du 16 juillet 2025 à la Cour de justice, LA SOCIETE COOPERATIVE DU DOMAINE A______ a formé recours contre ce jugement. Elle a conclu à l’annulation de celui-ci, cela fait au prononcé de la mainlevée de l’opposition formée au commandement de payer, poursuite n° 1______, sous suite de frais et dépens, subsidiairement au renvoi de la cause au Tribunal pour nouvelle décision.

B______ a conclu au rejet du recours, sous suite de frais et dépens. Il a produit une pièce nouvelle.

LA SOCIETE COOPERATIVE DU DOMAINE A______ s’est encore déterminée, persistant dans ses conclusions, et a produit des pièces nouvelles.

B______ a persisté dans ses conclusions, aux termes de ses dernières déterminations.

Par avis du 10 septembre 2025, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

C.           Il résulte de la procédure de première instance les faits pertinents suivants :

a. Le 23 septembre 2024, LA SOCIETE COOPERATIVE DU DOMAINE A______, société coopérative inscrite au Registre du commerce vaudois en 20##, a saisi le Tribunal d’une requête de mainlevée provisoire de l’opposition, dirigée contre B______, sous suite de frais et dépens.

Elle a allégué que B______, qui était propriétaire des parcelles n° 2______ et 3______ (grevées des servitudes ID.1999/4______ et ID.1999/5______) de la commune de C______ (VD), faisant « partie du périmètre du domaine A______ » et représentant une valeur d’assurance incendie totale de 4'601'175 fr. (soit 15,5 millièmes du domaine A______), était l’un de ses associés. En cette qualité, il était redevable d’une participation aux travaux d’entretien et de rénovation des routes du domaine A______.

Elle a notamment produit ses statuts. A teneur de l’art. 2 de ceux-ci, elle a pour but la défense des intérêts économiques de ses membres par la gestion des servitudes ID.1999/4______ et ID. 1999/5______, l’entretien et l’amélioration du domaine A______, notamment l’administration, l’entretien et l’usage de la route principale et des routes secondaires donnant accès aux différentes parcelles du domaine. Selon l’art. 3, « chaque propriétaire d’une parcelle construite […] du domaine A______ peut être associé de la coopérative. La qualité d’associé est liée à la propriété de la parcelle construite ».

Elle a versé un document intitulé « décompte propriétaire – 2023- B______ », qu’elle a allégué consister en un appel de fonds pour la période 2022-2023 à titre de participation pour l’administration, l’entretien et l’usage de routes du domaine A______, transmis « à tous les associés », dont B______. Ce document fait état d’un « solde reporté » par 14'631 fr. 70 et d’un « appel de fonds 2023 » par 7'223 fr. 90, soit un total de 21'855 fr. 60. Selon LA SOCIETE COOPERATIVE DU DOMAINE A______, le montant de 7'223 fr. 90 représentait 15.5/1000 du budget de 470'000 fr. des « comptes 2022-2023 route principale et routes secondaires », tel que mentionné dans le procès-verbal de l’assemblée générale du 24 février 2024, qu’elle a produit (à laquelle B______ a assisté, sans droit de vote en qualité de représentant d’un coopérateur tiers).

Elle a allégué que seuls 18'474 fr. 20 représentaient ladite participation, le solde relevant du « budget annuel 2023-2024 ».

Elle a déposé copie d’un commandement de payer, poursuite n° 1______, portant sur 18'474 fr. 20, qu’elle avait fait notifier le 17 juin 2024 par l’Office cantonal des poursuites à B______, frappé d’opposition. Le titre de la créance était énoncé ainsi : « Contribution à la rénovation de la route principale du domaine A______ ».

b. A l’audience du Tribunal du 17 mars 2025, LA SOCIETE COOPERATIVE DU DOMAINE A______ a persisté dans ses conclusions. B______ a contesté « la dette » et conclu au déboutement de LA SOCIETE COOPERATIVE DU DOMAINE A______ des fins de ses conclusions. Il a déposé des pièces, dont résulte notamment qu’il a acquis les parcelles susmentionnées en 2000 et qu’il a reçu un bulletin d’adhésion à LA SOCIETE COOPERATIVE DU DOMAINE A______ (outre le projet des statuts) demeuré non signé.

Selon ce qu’a retenu le Tribunal dans son jugement, il a plaidé être dépourvu de légitimation passive, n’ayant pas adhéré à LA SOCIETE COOPERATIVE DU DOMAINE A______, constituée après qu’il avait acquis les parcelles concernées; il a relevé l’absence de titre de mainlevée.

Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1 S'agissant d'une procédure de mainlevée, seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. b et 309 let. b ch. 3 CPC). La procédure sommaire s'applique (art. 251 let. a CPC).

1.2 Aux termes de l'art. 321 al. 1 et 2 CPC, le recours, écrit et motivé, doit être introduit auprès de l'instance de recours dans les dix jours à compter de la notification de la décision motivée.

Interjeté en temps utile et selon les formes prescrites, le recours est recevable, étant relevé que même s'il ne comporte pas formellement de conclusions, il ne fait pas de doute que la recourante sollicite la mainlevée de l'opposition formée par l'intimé au commandement de payer.

1.3 Le recours est recevable pour violation du droit et constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC). L'autorité de recours a un plein pouvoir d'examen en droit, mais un pouvoir limité à l'arbitraire en fait, n'examinant par ailleurs que les griefs que les parties adressent à la motivation du premier jugement (ATF 144 III 394 consid. 4.1.4; arrêt du Tribunal fédéral 4A_10/2024 du 26 mai 2025 consid. 5.1).

1.4 La procédure sommaire étant applicable, la preuve des faits allégués doit être apportée par titres (art. 254 al. 1 CPC). Les maximes des débats et de disposition s'appliquent (art. 55 al. 1, 255 let. a a contrario et art. 58 al. 1 CPC).

2. Selon l'art. 326 al. 1 CPC, les conclusions, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables.

Les pièces nouvelles produites par les parties et les allégués qui s’y rapportent ne sont donc pas recevables.

3. La recourante fait grief au Tribunal de ne pas avoir admis qu’elle serait au bénéfice d’un titre de mainlevée provisoire, constitué à bien la comprendre, essentiellement du procès-verbal de son assemblée générale.

3.1 En vertu de l'art. 82 LP, le créancier dont la poursuite se fonde sur une reconnaissance de dette constatée par acte authentique ou sous seing privé peut requérir la mainlevée provisoire (al. 1); le juge la prononce si le débiteur ne rend pas immédiatement vraisemblable sa libération (al. 2).

Constitue une reconnaissance de dette au sens de l'art. 82 al. 1 LP, en particulier, l'acte sous seing privé, signé par le poursuivi - ou son représentant -, d'où ressort sa volonté de payer au poursuivant, sans réserve ni condition, une somme d'argent déterminée, ou aisément déterminable, et exigible (ATF 145 III 20 consid. 4.1.1; 139 III 297 consid. 2.3.1 et les références).

Une reconnaissance de dette peut résulter du rapprochement de plusieurs pièces, dans la mesure où les éléments nécessaires en résultent (ATF 139 III 297 consid. 2.3.1; 136 III 627 consid. 2 et la référence).

Pour valoir titre de mainlevée provisoire, une reconnaissance de dette doit chiffrer de manière précise le montant de la prétention déduite en poursuite ou renvoyer à un document écrit qui permet au juge de la mainlevée de déterminer avec exactitude le montant dû. La créance doit être déterminée ou déterminable au moment de la signature de la reconnaissance de dette (ABBET/VEUILLET, La mainlevée de l'opposition, 2ème éd., 2022, n. 47 et 48 ad art. 82 LP).

Le juge de la mainlevée peut procéder à l'interprétation objective du titre produit, fondée sur le principe de la confiance. Il convient ainsi de tenir compte non seulement du texte mais également du but de l'acte. Le juge ne peut toutefois prendre en compte que des éléments intrinsèques au titre; des éléments extrinsèques échappent à son pouvoir d'examen. Une détermination exhaustive de la volonté des parties ou l'interprétation exhaustive du contrat ne sont pas de la compétence du juge de la mainlevée. Si le sens ou l'interprétation du titre est source de doutes ou si la reconnaissance ne ressort que d'actes concluants, la mainlevée provisoire doit être refusée (ABBET/VEUILLET, op. cit., n. 35 ad art. 82 LP).

La procédure de mainlevée n'a un caractère sommaire au sens propre qu'en ce qui concerne les moyens libératoires du débiteur. Par conséquent, s'agissant de l'existence du titre de mainlevée, l'application de la procédure sommaire n'implique pas en soi un abaissement du degré de la preuve à la simple vraisemblance. Le degré de preuve requis est donc, à cet égard, celui de la preuve stricte (arrêt du Tribunal fédéral 5A_740/2018 du 1er avril 2019 consid. 6.1.3).

3.2. En l’occurrence, la recourante ne prétend pas qu’elle serait au bénéfice d’un quelconque document signé par l’intimé dont résulterait la volonté de payer de celui-ci. Elle ne critique pas le raisonnement du premier juge portant sur la circonstance que l’intimé n’a pas adhéré à la coopérative et n’a pas souscrit aux statuts. Elle se limite à se prévaloir de la qualité de propriétaire de l’intimé, laquelle est en effet acquise, pour en déduire que le précité serait son associé, ce qui ne convainc pas au regard du texte peu précis de l’art. 3 desdits statuts. Si celui-ci fait dépendre la qualité d’associé de la propriété d’une parcelle construite (sans précision de localisation), il stipule dans le même temps que tout propriétaire peut (sans préciser qu’il devrait) être membre. Cette disposition devrait donc en tout état faire l’objet d’une interprétation, ce qui excède le pouvoir du juge de la mainlevée.

La recourante se réfère en outre à la présence de l’intimé à son assemblée générale, ce qui est établi, avec toutefois la précision que celui-ci représentait un tiers, à teneur du procès-verbal produit ; rien ne saurait donc en être retiré s’agissant de sa qualité de membre de la recourante.

Dès lors, le premier juge a retenu à raison l’absence de reconnaissance de dette au bénéfice de la recourante.

Par ailleurs, en ce qui concerne le montant de la créance déduite en poursuite, si la recourante a explicité en première instance le calcul d’une part de celui-ci (7'223 fr. 90, correspondant aux 15,5/1000 du budget de 470'000 fr. prévu pour l’exercice 2022-2023), le solde demeure sans précision. La recourante n’a, en effet, visé aucune pièce qui permettrait de comprendre les bases du « solde reporté » de 14'631 fr. 70. Les allégués consacrés au total (21'855 fr. 60), dont seuls 18'474 fr. 20 auraient trait aux travaux de rénovation des routes, le solde (3'381 fr. 40) relevant d’une « participation au budget annuel 2023-2024 » ne sont pas plus clairs, voire contradictoires par rapport aux explications rappelées ci-dessus. Dans ces circonstances contrairement à l’opinion de la recourante, le premier juge était fondé à considérer que le bien-fondé du montant réclamé n’était pas déterminable.

Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté.

4. La recourante, qui succombe, supportera les frais de son recours (art. 106 al. 1 CPC), arrêtés à 600 fr. (art. 48, 61 OELP), compensés avec l’avance opérée, acquise à l’Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Elle versera en outre à l’intimé 600 fr. à titre de dépens de recours (art. 84, 85, 89, 90 RTFMC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :


A la forme :

Déclare recevable le recours formé le 16 juillet 2025 par LA SOCIETE COOPERATIVE DU DOMAINE A______ contre le jugement JTPI/8090/2025 rendu le 27 juin 2025 par le Tribunal de première instance dans la cause C/22104/2024–22 SML.

Au fond :

Rejette ce recours.

Déboute les parties de toute autre conclusion.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires du recours à 600 fr, compensés avec l’avance opérée, acquise à l’Etat de Genève.

Les met à la charge de LA SOCIETE COOPERATIVE DU DOMAINE A______.

Condamne LA SOCIETE COOPERATIVE DU DOMAINE A______ à verser à B______ 600 fr. à titre de dépens de recours.

Siégeant :

Madame Pauline ERARD, présidente; Madame Sylvie DROIN, Madame
Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Laura SESSA, greffière.

 

La présidente :

Pauline ERARD

 

La greffière :

Laura SESSA

 

 

 

 


 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.