Décisions | Sommaires
ACJC/1345/2024 du 22.10.2024 sur JTPI/8163/2024 ( SML ) , CONFIRME
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE C/1824/2024 ACJC/1345/2024 ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE Chambre civile DU MARDI 24 OCTOBRE 2024 |
Entre
Monsieur A______, domicilié ______ [GE], recourant contre un jugement rendu par le Tribunal de première instance de ce canton le 17 juin 2024,
et
Madame B______, domiciliée ______ [GE], intimée, représentée par Me D______, avocat,
A. Par jugement JTPI/8163/2024 du 17 juin 2024, expédié pour notification aux parties le 27 juin 2024, le Tribunal de première instance, considérant que "la pièce" produite par B______ était un titre de mainlevée au sens de l'art. 80 LP, a prononcé la mainlevée définitive de l'opposition formée au commandement de payer, poursuite n° 1______ (ch. 1), a arrêté les frais judiciaires à 400 fr. compensés avec l'avance effectuée par la précitée et mis à la charge de A______, condamné à en rembourser B______ (ch. 2 et 3) ainsi qu'à lui verser 1'342 fr. à titre de dépens.
B. Par acte du 6 juillet 2024 à la Cour de justice, A______, comparant en personne, a formé recours contre le jugement précité, concluant à l'annulation de celui-ci et à l'annulation du commandement de payer et de la poursuite n° 1______.
A titre préalable, il a requis la suspension de l'effet exécutoire attaché au jugement entrepris, ce qui a été rejeté par arrêt de la Cour du 12 juillet 2024.
Il a formé des allégués nouveaux et produit des pièces nouvelles.
B______ a conclu (par un courrier d'une page de texte) à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet, sous suite de frais et dépens.
Par avis du 13 septembre 2024, les parties ont été avisées de ce que la cause était gardée à juger.
C. Il résulte les faits pertinents suivants de la procédure de première instance:
a. Le 27 janvier 2024, B______ a saisi le Tribunal d'une requête de mainlevée définitive de l'opposition formée au commandement de payer, poursuite 1______, dirigée contre A______.
Elle a produit un chargé de neuf pièces, comportant une procuration consentie "dans le cadre du recouvrement en Suisse et à l'étranger de toutes les créances qu'elle détient contre A______" en faveur de son avocat du 15 janvier 2022, le commandement de payer précité frappé d'opposition, un jugement JTPI/11208/2022 du Tribunal du 27 septembre 2022, une ordonnance OTPI/46/2022 du Tribunal du 4 février 2022, un jugement du Tribunal de police du 30 mai 2022 (procédure P/2______/2017), la page de garde et le dispositif d'un arrêt AARP/35/2023 de la Chambre pénale de la Cour de justice du 30 janvier 2023, une ordonnance de séquestre (procédure C/3______/2023) du Tribunal du 26 juin 2023, un courrier d'opposition à ce séquestre du 10 juillet 2023 émanant de A______, et un jugement OSQ/2/2024 du 15 janvier 2024 du Tribunal rejetant cette opposition à séquestre.
Ledit commandement de payer (dont il est précisé qu'il se rapporte à une poursuite en validation du séquestre n° 4______) comporte quatre postes de respectivement 1'446 fr. avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 2 juillet 2022, 2'000 fr. avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 2 juillet 2022, 32'232 fr. 50 avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 2 juillet 2022, et 3'756 fr. avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 1er février 2023. Les titres de créance sont désignés ainsi: pour le poste 1 "Jugement TPI du 27.9.2022 (JTPI/11208/2022) condamnant A______ à verser à B______ les sommes de Fr. 1'046.- (dépens) et Fr. 400.- (frais), soit au total Fr. 1'446.-", pour le poste 2: "Ordonnance TPI du 3.2.2022 (OTPI/46/2022)", pour le poste 3: "jugement TP du 30.5.2022 (P/2______/2017)", pour le poste 4: "arrêt de la Chambre pénale du 30 janvier 2023 (AARP/35/2023)".
Le jugement JTPI/11208/2022 du Tribunal, dans la procédure de mainlevée définitive C/5______/2022 entre B______ et A______, a notamment condamné le second à verser à la première 400 fr. à titre de remboursement de l'avance de frais judiciaires et 1'046 fr. à titre de dépens.
L'ordonnance OTPI/46/2022 du Tribunal, rendue, sur mesures provisionnelles, le 4 février 2022 dans la procédure C/6______/2015 entre A______ et B______, a notamment condamné le premier à verser à la seconde 2'000 fr. à titre de dépens.
Le jugement du Tribunal de police du 30 mai 2022, rendu dans la procédure P/2______/2017 entre le Ministère public et B______ d'une part, A______ d'autre part, a, outre une condamnation à une peine privative de liberté avec sursis pour violation d'obligation d'entretien, notamment condamné ce dernier à verser à la précitée 32'232 fr. 50 à tire de juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure.
L'arrêt AARP/35/2023 de la Chambre pénale de la Cour de justice, rendu le 30 janvier 2023 dans la procédure P/2______/2017 entre les parties susmentionnées, a notamment confirmé le jugement du Tribunal de police susmentionné, et condamné A______ à verser à B______ 3'756 fr. à titre d'indemnité pour ses dépenses obligatoires dans la procédure d'appel.
L'ordonnance de séquestre (C/7______/2023) rendue par le Tribunal 26 juin 2023 à la requête de B______ contre A______ vise les cas de séquestre de l'art. 271 al. 1 ch. 4 et 6 LP et porte sur les créances de 1'446 fr., 2'000 fr, 32'232 fr. 50 et 3'756 fr., avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 2 juillet 2022 et dès le 1er février 2023 pour la quatrième, résultant des décisions mentionnées ci-dessus. Elle vise la "quote-part d'une demie" de A______ de la parcelle 8______ de la commune de C______ [GE] sise chemin 9______ no. ______.
Le jugement OSQ/2/2024 rendu par le Tribunal le 15 janvier 2024, entre A______ et B______, a rejeté l'opposition à l'ordonnance de séquestre du 26 juin 2023 formée par A______.
b. Les parties ont été convoquées à une audience du Tribunal fixée le 17 juin 2024.
Elles ont reçu parallèlement une convocation à la même audience, dans la cause C/10_____/2024, opposant également A______ à B______, représentée par le même conseil.
Par courrier déposé au Tribunal le 14 juin 2024, A______ a requis l'annulation de l'audience fixée au 17 juin suivant.
c. A l'audience du Tribunal du 17 juin 2024, selon le procès-verbal d'audience (dont la teneur est identique à celui rédigé dans la procédure C/10_____/2024), le conseil de B______ a persisté dans ses conclusions, tandis que A______ a demandé l'annulation de l'audience, et la récusation du Tribunal. Il a observé que la procédure sommaire n'était pas applicable, ajoutant: "Je constate que le Tribunal ne connaît pas le droit", que "les documents" qui lui avaient été envoyés étaient frauduleux, l'avocat de B______ ayant commis une infraction pénale et fait valoir que les procurations ne comportaient pas de signature ou une signature falsifiée.
Sur quoi, la cause a été gardée à juger.
1. 1.1 S'agissant d'une procédure de mainlevée de l'opposition, seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. b et 309 let. b ch. 3 CPC). La procédure sommaire s'applique (art. 251 let. a CPC).
1.2 Le recours, écrit et motivé, doit être introduit auprès de l'instance de recours dans les dix jours à compter de la notification de la décision motivée (art. 251let. a et 321 al. 1 et 2 CPC).
1.3 Dans le cadre d'un recours, le pouvoir d'examen de la Cour est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC). L'autorité de recours a un plein pouvoir d'examen en droit, mais un pouvoir limité à l'arbitraire en fait, n'examinant par ailleurs que les griefs formulés et motivés par le recourant (Hohl/De Poret Bortolaso/Aguet, Procédure civile, Tome II, 2ème édition, Berne, 2010, n. 2307).
Le recours étant instruit en procédure sommaire, la preuve des faits allégués doit être apportée par titres (art. 254 CPC). Les maximes des débats et de disposition s'appliquent (art. 55 al. 1, 255 a contrario et art. 58 al. 1 CPC).
S'agissant d'une procédure de mainlevée définitive, la Cour doit vérifier d'office si la requête est fondée sur un titre de mainlevée valable (arrêt du Tribunal fédéral 5P.174/2005 du 7 octobre 2005 consid. 2.1). Dans cette mesure, la Cour applique librement le droit.
2. Les allégations nouvelles du recourant ne sont pas recevables; les conclusions du recourant qui vont au-delà du rejet du recours sont en tout état irrecevables (art. 326 al. 1 CPC).
La Cour examinera ainsi la cause sur la base du dossier dont disposait le Tribunal.
3. Le recourant, dans une écriture au caractère prolixe et comportant notamment plusieurs passages inconvenants à l'endroit du Tribunal ainsi que des autorités judiciaires en général, soulève pêle-mêle divers points, dont seuls deux, à bien le comprendre, peuvent être rattachés à des griefs recevables: une violation de l'art. 68 al. 2 CPC, en tant que la procuration en faveur du conseil de l'intimée ne serait pas valable, et une violation du droit d'être entendu en raison d'une absence de motivation du jugement.
3.1 Selon l'art. 80 al. 1 LP, le créancier qui est au bénéfice d'un jugement exécutoire peut requérir du juge la mainlevée définitive de l'opposition.
Aux termes de l'art. 81 al. 1 LP, lorsque la poursuite est fondée sur un jugement exécutoire rendu par un tribunal ou une autorité administrative suisse, le juge ordonne la mainlevée définitive de l'opposition, à moins que l'opposant ne prouve par titre que la dette a été éteinte ou qu'il a obtenu un sursis, postérieurement au jugement, ou qu'il ne se prévale de la prescription.
Il appartient au débiteur d'établir que sa dette est éteinte par titre. Contrairement à ce qui vaut pour la mainlevée provisoire (art. 82 al. 2 LP), le poursuivi ne peut se borner à rendre sa libération vraisemblable, il doit, au contraire, en apporter la preuve stricte (ATF 124 III 501 consid. 3a).
La preuve du caractère exécutoire incombe au poursuivant. Elle peut résulte d'une attestation de l'autorité qui a statué (arrêt du Tribunal fédéral 5A_389/2018 consid. 2.4). Selon la doctrine, cette attestation n'est pas indispensable lorsque le caractère exécutoire découle de la loi ou des circonstances, en particulier du temps écoulé depuis la notification et du fait que le poursuivi ne prétend pas avoir contesté la décision (abbet/veuillet, La mainlevée de l'opposition, 2ème éd. 2022, ad art. 80 n. 149 et les références citées).
3.2 L'art. 68 al. 1 CPC dispose que toute personne capable d'ester en justice peut se faire représenter au procès. Le représentant doit justifier de ses pouvoirs par une procuration (art. 68 al. 3 CPC). Le Tribunal fédéral a eu l'occasion de préciser que le tribunal saisi peut exiger une procuration spécifique pour la procédure en cours afin de lever le doute quant à la validité de la procuration pour cette procédure (arrêt du Tribunal fédéral 5A_510/2018 du 26 septembre 2018 consid. 3.4.1).
3.3 La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu, consacré par l'art. 29 al. 2 Cst., le devoir pour le juge de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse en saisir la portée, l'attaquer utilement s'il y a lieu, et l'autorité de recours, exercer son contrôle. Pour répondre à ces exigences, il suffit que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision (ATF 143 IV 40 consid. 3.4.3; 143 III 65 consid. 5.2; 142 I 135 consid. 2.1). Il n'est pas tenu de discuter tous les arguments soulevés par les parties, mais peut se limiter à ceux qui lui paraissent pertinents (ATF 146 II 335 consid. 5.1; 143 III 65 consid. 5.2; 142 II 154 consid. 4.2; 139 IV 179 consid. 2.2).
En procédure sommaire, la motivation peut être plus succincte qu'en procédure ordinaire (Mazan, Basler Kommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung, 3ème éd., 2017, n. 7 ad art. 256 CPC).
3.4 En l'espèce, le recourant n'a apporté aucune démonstration à sa thèse selon laquelle la procuration produite par l'intimée comporterait une signature falsifiée. Le Tribunal était ainsi fondé à ne pas douter de la validité des pouvoirs de l'avocat de l'intimée.
S'agissant de la motivation, elle est lapidaire, ce qui n'est pas, en soi, critiquable en procédure sommaire. La mention de "la pièce produite", alors qu'on comprend que sont en réalité visés les différentes décisions de justice déposées par l'intimée référencées dans le commandement de payer, est certes malheureuse mais ne porte pas à conséquence. Il en va de même de la question des pouvoirs de l'avocat de l'intimée (qui avait été soulevée en audience par le recourant, et n'a, il est vrai, été qu'implicitement traitée), puisque l'objection n'était pas pertinente.
Pour le surplus, en elles-mêmes, les décisions de justice produites constituent des titres au sens de l'art. 80 LP. L'intimée n'a pas produit d'attestations du caractère exécutoire des décisions précitées, alors qu'il lui aurait appartenu de le faire. Le recourant ne fait toutefois pas valoir et ne démontre pas que les dettes seraient éteintes, pas plus qu'il ne soutient que ces décisions ne seraient pas en force et exécutoires. A cet égard, il sera observé que la première d'entre elles était susceptible d'un recours, non doté d'effet suspensif sauf requête en ce sens (art. 325 CPC), que la deuxième était susceptible d'un appel mais sans effet suspensif automatique s'agissant de mesures provisionnelles (art. 315 al. 4 let. b CPC), que la troisième a été confirmée par la quatrième, décision elle-même susceptible d'un recours au Tribunal fédéral non doté d'effet suspensif (art. 103 al. 2 let. b LTF).
Au vu de ce qui précède, le premier juge était fondé à prononcer la mainlevée définitive requise.
Le recours sera dès lors rejeté.
4. Le recourant, qui succombe, supportera les frais de son recours (art. 106 al. 1 CPC), arrêtés à 800 fr., décision sur effet suspensif comprise (art. 48, 61 OELP), compensés avec l'avance opérée, acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC). Il sera condamné à en rembourser l'intimée.
Il versera à l'intimée 500 fr. à titre de dépens de recours, au vu de la très brève écriture de réponse, et du peu de complexité de l'objet de la procédure (art. 84, 85, 88, 90 RTFMC).
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La Chambre civile :
A la forme :
Déclare recevable le recours formé par A______ contre le jugement JTPI/8163/2024 rendu le 17 juin 2024 par le Tribunal de première instance dans la cause C/1824/2024–S1 SML.
Au fond :
Rejette ce recours.
Déboute les parties de toutes autres conclusions.
Sur les frais :
Arrête les frais judiciaires du recours à 800 fr., compensés avec l'avance effectuée, acquise à l'ETAT DE GENEVE.
Les met à la charge de A______.
Condamne A______ à verser à B______ 800 fr.
Condamne A______ à verser à B______ 500 fr. à titre de dépens de recours.
Siégeant :
Madame Pauline ERARD, présidente; Madame Sylvie DROIN, Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Laura SESSA, greffière.
La présidente : Pauline ERARD |
| La greffière : Laura SESSA |
Indication des voies de recours :
Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.
Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.