Skip to main content

Décisions | Sommaires

1 resultats
C/2937/2024

ACJC/955/2024 du 19.07.2024 sur JTPI/4925/2024 ( SML ) , SANS OBJET

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/2937/2024 ACJC/955/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU VENDREDI 19 JUILLET 2024

 

Entre

A______ SA, ayant son siège c/o Monsieur B______, directeur, ______ (VS), recourante contre un jugement rendu par le Tribunal de première instance de ce canton le 22 avril 2024, représentée par Me Cristiano PAIVA, avocat, CMP Avocats, avenue Léopold-Robert 11a, 2300 La Chaux-de-Fonds (NE).



 


EN FAIT

A. a. Le 6 février 2024, A______ SA a saisi le Tribunal de première instance (ci-après: le Tribunal) d'une requête en mainlevée provisoire de l'opposition formée par C______ SA [commandement de payer, poursuite no 1______].

C______ SA a formé opposition totale au commandement de payer.

b. Par décision DTPI/1580/2024 du 12 février 2024, le Tribunal a imparti à A______ SA un délai au 13 mars 2024 pour fournir une avance de frais de 500 fr. et l'a informée qu'en cas de jugement d'irrecevabilité de la requête en mainlevée d'opposition pour non-paiement de l'avance ou en cas de retrait de ladite requête un émolument de 100 fr. à 200 fr. pourrait être perçu.

c. Par jugement du 12 février 2024, la faillite de C______ SA a été prononcée avec effet le jour même.

d. Par décision DTPI/3128/2024 du 20 mars 2024, le Tribunal a constaté le non-paiement de l'avance de frais dans le délai initial imparti et a fixé à A______ SA un délai supplémentaire au 10 avril 2024 pour s'en acquitter en précisant qu'en l'absence de paiement dans le délai fixé, la requête en mainlevée d'opposition serait déclarée irrecevable. Il a par ailleurs rappelé qu'en cas de jugement d'irrecevabilité de la requête en mainlevée d'opposition pour non-paiement de l'avance ou en cas de retrait de ladite requête un émolument de 100 fr. à 200 fr. serait perçu.

e. Par courrier du 3 avril 2024, A______ SA a informé le Tribunal de la faillite de C______ SA. Elle a ajouté que dans la mesure où ladite faillite avait, en application de l'art. 206 LP, eu pour effet d'éteindre les poursuites en cours à l'encontre de C______ SA et partant d'engendrer la caducité des procédures de mainlevée encore pendantes, la cause n'avait plus d'objet et pouvait être rayée du rôle, sans qu'un retrait de la requête en mainlevée provisoire de l'opposition déposée par ses soins soit nécessaire. Elle a par ailleurs requis qu'il soit, au vu des circonstances particulières, statué sans frais.

B. a. Par jugement JTPI/4925/2024 du 22 avril 2024, notifié le 25 avril 2024, le Tribunal, statuant par voie de procédure sommaire, a donné acte à A______ SA du retrait de sa requête en mainlevée par courrier du 3 avril 2024, a arrêté les frais judiciaires à 500 fr. et a condamné cette dernière à verser cette somme à l'Etat de Genève.

b. Par acte expédié le 3 mai 2024 au greffe de la Cour de justice, A______ SA a formé recours contre ledit jugement.

Elle a conclu, sous suite de frais, principalement à ce que le jugement entrepris soit réformé en ce sens que la cause est devenue sans objet à la suite du prononcé de la faillite de C______ SA, de sorte que l'affaire est rayée du rôle sans frais. Subsidiairement, elle a conclu, sous suite de frais, à l'annulation du jugement entrepris et au renvoi de la cause au Tribunal pour nouvelle décision au sens des considérants. Elle a également sollicité la production par l'autorité précédente de l'intégralité du dossier de la cause.

Préalablement, A______ SA a requis que son recours soit assorti de l'effet suspensif. Par arrêt ACJC/571/2024 du 7 mai 2024, la Cour de justice a admis ladite requête et dit qu'il serait statué sur les frais de ladite décision dans l'arrêt à rendre au fond.

c. Par courrier du 29 mai 2024, elle a été informée de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel étant irrecevable dans les affaires relevant de la compétence du tribunal de la mainlevée selon la LP (art. 309 let. b ch. 3 CPC), seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. a CPC).

Le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de la Chambre civile de la Cour de justice dans les dix jours à compter de la notification de la décision motivée (art. 251 let. a et 321 al. 1 et 2 CPC, art. 120 al. 1 let. a LOJ).

1.2 En l'espèce, le recours a été interjeté auprès de l'autorité compétente, dans le délai utile de 10 jours et selon la forme requise, de sorte qu'il est recevable.

1.3 Le pouvoir d'examen de la Cour est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC).

1.4 La Cour de céans demandant, en cas de recours, d'office le dossier de première instance à l'autorité précédente conformément à l'art. 327 al. 1 CPC, la requête de la recourante tendant à la production dudit dossier est sans objet.

2. La recourante reproche au premier juge d'avoir constaté arbitrairement les faits et violé l'art. 206 LP en considérant son courrier du 3 avril 2024 comme un retrait de sa requête en mainlevée, alors qu'elle y relevait expressément qu'un tel retrait n'est pas nécessaire pour que la cause prenne fin compte tenu de la faillite de sa partie adverse. La cause aurait donc dû être rayée du rôle en application de l'art. 206 LP. Par ailleurs, ladite faillite étant un évènement qu'elle ne pouvait pas prévoir, le premier juge aurait dû retenir l'existence de circonstances particulières et statuer sans frais en application des art. 2 et 7 du Règlement genevois fixant le tarif des frais en matière civile. Enfin, en tout état, même en admettant qu'elle ait procédé à un retrait de sa requête, les décisions d'avance de frais rendues mentionnaient que, dans une telle hypothèse, l'émolument perçu serait de 100 à 200 fr. et non de 400 fr.

2.1 Le désistement est une déclaration unilatérale sans conditions du demandeur envers le tribunal, selon laquelle il retire ses conclusions ou une partie de celles-ci (retrait partiel; ATF 149 III 145 consid. 2.6.3). La déclaration de retrait doit revêtir la forme écrite (art. 241 al. 1 CPC; Tappy, Commentaire romand CPC, 2ème éd., 2019, n. 23 ad art. 241 CPC) et être expresse (arrêt du Tribunal fédéral 5A_216/2018 du 11 septembre 2018 consid. 5.1.2).

2.2 A teneur de l'art. 206 al. 1 LP, les poursuites dirigées contre le failli s'éteignent et aucune poursuite ne peut être faite durant la liquidation de la faillite pour des créances nées avant l'ouverture de la faillite.

Les procès qui se rapportent à des poursuites qui s'éteignent deviennent eux-mêmes caducs. Il en va ainsi de la procédure de mainlevée de l'opposition dans laquelle le failli est défendeur: elle devient sans objet à l'ouverture de la faillite (Romy, Commentaire romand LP, 2005, n. 8 ad art. 206 LP).

2.3 Lorsque la procédure prend fin à la suite d'un désistement d'action ou devient sans objet pour d'autres raisons, elle est rayée du rôle (art. 241 al. 3 et 242 CPC) et il est statué sur les frais (art. 104 et ss CPC).

2.4 Selon la jurisprudence, l'art. 16 LP constitue une base légale permettant de déroger valablement à l'art. 96 CPC renvoyant au droit cantonal en matière de frais; les émoluments des décisions judiciaires en matière de LP soumises à la procédure sommaire (art. 251 CPC) - à l'instar des mainlevées de l'opposition - se déterminent dès lors selon les dispositions de l'OELP et non selon le tarif cantonal (ATF 139 III 195 consid. 4; 133 III 687 consid. 2.3).

L’émolument pour les décisions judiciaires rendues dans une procédure sommaire en matière de poursuite est fonction de la valeur litigieuse. Pour une valeur litigieuse supérieure à 10'000 fr. et ne dépassant pas 100'000 fr., l'émolument est de 60 fr. à 500 fr. (art. 48 OELP).

2.5 En l'espèce, c'est à tort que le premier juge a considéré que la recourante avait, par son courrier du 3 avril 2024, procédé à un retrait de sa requête en mainlevée. Un tel retrait doit en effet être formulé de manière expresse. Or, dans le courrier, la recourante précisait expressément qu'il n'était pas nécessaire qu'elle retire sa requête dès lors que la cause n'avait plus d'objet en raison de la faillite de sa partie adverse et devait ainsi être rayée du rôle en application de l'art. 206 al. 1 LP.

Le premier juge s'est ainsi mépris en donnant acte à la recourante du retrait de sa requête en mainlevée. Compte tenu du prononcé de la faillite de C______ SA le 12 février 2024, laquelle a eu, en application de l'art. 206 al. 1 LP, pour conséquence d'éteindre la poursuite que la recourante a engagée contre celle-ci, la cause est devenue sans objet et devait être rayée du rôle.

Cela étant, le premier juge a rendu deux décisions d'avances de frais ainsi que le jugement entrepris, de sorte que la perception d'un émolument se justifiait.

L'émolument fixé apparaît en revanche excessif au regard de la fourchette prévue par l'art. 48 OELP en présence d'une valeur litigieuse de 56'048 fr. 10 et de la mention figurant dans les décisions d'avance de frais selon laquelle en cas de jugement d'irrecevabilité pour non-paiement de l'avance ou en cas de retrait de la requête en mainlevée seul un émolument de 100 à 200 fr. serait perçu, de telles hypothèses étant assimilables à un jugement rayant la cause du rôle. Il sera en conséquence réduit à 100 fr.

Pour le surplus, la recourante ne conteste pas, à juste titre, la mise à sa charge des frais judiciaires.

Le jugement entrepris sera en conséquence annulé et il sera statué à nouveau dans le sens de ce qui précède (art. 327 al 3 let. p CPC).

3. Les frais judiciaires du recours, comprenant l'émolument de décision sur effet suspensif, seront arrêtés à 300 fr. (art. 48 et 61 OELP) et mis à hauteur de 100 fr. à la charge de la recourante, qui succombe partiellement, le solde, de 200 fr., étant laissé à la charge du canton (art. 107 al. 2 CPC).

La part de frais judiciaires de la recourante de première et seconde instance sera compensée à due concurrence avec l'avance qu'elle a versée, laquelle reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 CPC). Le solde de l'avance fournie par ses soins lui sera restitué.

Il ne sera pour le surplus pas alloué de dépens de recours, l’art. 107 al. 2 CPC ne permettant pas de mettre des dépens à la charge de l’Etat de Genève.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :


A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 3 mai 2024 par A______ SA contre le jugement JTPI/4925/2024 rendu le 22 avril 2024 par le Tribunal de première instance dans la cause C/2937/2024–S1 SML.

Au fond :

Annule ledit jugement et statuant à nouveau :

Constate que la cause est devenue sans objet.

Raye la cause du rôle.

Sur les frais:

Arrête les frais judiciaires de première et seconde instance à 400 fr., les met à la charge de A______ SA à concurrence de 200 fr., et laisse le solde à la charge de l'Etat de Genève.

Dit qu'ils sont compensés à hauteur de 200 fr. avec l'avance fournie par A______ SA, qui reste dans cette mesure acquise à l'Etat de Genève.

Invite les Services financiers du Pouvoir judiciaire à restituer à A______ SA 100 fr. à titre de solde de son avance de frais.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens de recours.

Siégeant :

Madame Pauline ERARD, présidente; Madame Sylvie DROIN, Madame
Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Laura SESSA, greffière.

La présidente :

Pauline ERARD

 

La greffière :

Laura SESSA

 


 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.