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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/2308/2024

ACPR/675/2025 du 25.08.2025 sur OMP/17738/2025 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : DÉFENSE D'OFFICE;DÉBUT
Normes : CPP.130; CPP.131; CPP.132; RAJ.5

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/2308/2024 ACPR/675/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 25 août 2025

 

Entre

A______, représenté par Me B______, avocate,

recourant,

 

contre l'ordonnance de nomination d'un défenseur d'office rendue le 21 juillet 2025 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B,
1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte déposé le 4 août 2025, A______ recourt contre l'ordonnance du 21 juillet 2025, expédiée par pli simple, par laquelle le Ministère public a ordonné la défense d'office en sa faveur en la personne de Me B______, avec effet au 18 juin 2025.

b. Le recourant conclut, préalablement à bénéficier de la défense d'office pour la procédure de recours, principalement à l'annulation partielle de l'ordonnance querellée, en tant qu'elle n'ordonne la défense d'office qu'à partir du 18 juin 2025 et dire que celle-ci prend effet au 25 juin 2024; subsidiairement à ce qu'il soit ordonné au Ministère public de rendre une nouvelle décision ordonnant la défense d'office avec effet au 25 juin 2024.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. La procédure P/2308/2024 a été ouverte à l'encontre de A______ suite à une plainte déposée contre lui le 27 septembre 2023. Il a, dans ce cadre, été entendu, en qualité de prévenu, le 20 décembre 2023 par la police, assisté d'un avocat de permanence, Me B______, excusée par Me C______. Élection de domicile a été faite en l'étude de cette avocate.

Les droits et obligations communiqués à A______ lors de son audition précisent qu'il pouvait en tout temps faire appel à un avocat de son choix, à ses frais, et qu'il pouvait, par ailleurs, demander au Ministère public la désignation d'un défenseur d'office.

Le rapport de police du 11 janvier 2024 indique que A______ était, lors de son audition, assisté d'un avocat de permanence et non d'un avocat de choix. Élection de domicile était faite en l'étude de l'avocate de permanence.

b. Le 25 juin 2024, le Ministère public a rendu une ordonnance d'ouverture d'instruction pour infraction à l'art. 189 CP. Le lendemain, par pli adressé à Me B______, il a convoqué A______ pour une audience fixée le 5 août suivant, à laquelle il s'est présenté assisté de Me B______, excusée par Me C______.

c. Me B______ a assisté A______ pour la suite de la procédure.

Lors de l'audience du 1er novembre 2024, il a été rappelé à A______ qu'il avait l'obligation d'être assisté d'un avocat, ce à quoi il a répondu que son avocate était Me B______, élection de domicile étant faite en son étude.

Figure encore au dossier une fiche "demande de photocopies" remplie le 13 décembre 2024 par Me C______, laquelle a indiqué le numéro du compte de l'étude et coché la case "oui" à la rubrique "Défense d'office (prévenu-e)". Cette fiche indique un coût de CHF 386.-.

d. Par courrier du 18 juin 2025, Me B______ a relevé que, bien qu'assurant "la fonction de défenseur d'office" de A______ depuis son audition à la police, elle avait constaté qu'aucune ordonnance de nomination d'office en sa faveur ne figurait au dossier. Les conditions d'une défense obligatoire étant remplies, le précité devait être mis au bénéfice d'une défense d'office, avec effet rétroactif au 20 décembre 2023.

C. Dans l'ordonnance querellée, le Ministère public a constaté que A______ - dont la situation financière répondait aux critères de l'art. 132 al. 1 let. b et al. 2 et 3 CPP - n'avait pas sollicité la nomination d'office de son avocate avant le 18 juin 2025, de sorte que l'effet rétroactif était arrêté au jour de la demande.

D. a. Dans son recours, A______ relève n'avoir jamais été invité par le Ministère public à désigner un conseil privé à ses frais ni n'avoir été informé de ce que Me B______ était considérée comme intervenant en qualité de défenseure de choix, à ses frais. Lui-même et son avocate avaient dès lors compris que cette dernière intervenait en tant que défenseure d'office en raison d'un cas de défense obligatoire, référence étant en particulier faite à la demande de photocopies du 13 décembre 2024.

Le Ministère public n'avait pas examiné sa requête sous l'angle de la défense obligatoire, pourtant expressément visée. Or les conditions d'une telle défense étaient clairement remplies, et ce depuis l'ouverture de l'instruction le 25 juin 2024.

Lui-même n'avait pas désigné de défenseur privé. Si le Ministère public avait – à juste titre – constaté qu'il avait l'obligation d'être assisté d'un avocat, il ne lui avait nullement demandé s'il souhaitait un défenseur de choix, à ses frais, ou qu'un défenseur d'office lui fût désigné. Il n'avait jamais explicitement indiqué que Me B______ était son avocate "de choix", à ses propres frais; il ne l'avait d'ailleurs pas choisie, l'intéressée étant intervenue comme avocate de permanence. Son conseil avait dès lors, du moins implicitement, été désigné défenseure d'office.

Son indigence empêchait quoi qu'il en soit le Ministère public de considérer de bonne foi qu'il avait souhaité l'assistance d'un avocat de choix, à ses frais. Il appartenait au contraire à cette autorité de pourvoir à la nomination d'un défenseur d'office, sans qu'il n'ait lui-même à en faire la demande, et ce dès l'instant où les conditions d'une telle nomination avaient été réunies, le 25 juin 2024.

b. À réception du recours, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.


 

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             Le recourant conteste la date de début de l'effet de la nomination de son défenseur d'office.

3.1. L'art. 130 CPP dispose qu'à certaines conditions, notamment s'il encourt une peine privative de liberté de plus d'un an ou une expulsion, le prévenu doit avoir un défenseur (défense obligatoire). En cas de défense obligatoire, la direction de la procédure pourvoit à ce que le prévenu soit assisté aussitôt d'un défenseur (art. 131 al. 1 CPP). Ainsi, la défense obligatoire (art. 130 CPP) a pour but de pourvoir impérativement le prévenu d'un défenseur, notamment lorsque le prévenu encourt une peine privative de liberté de plus d'un an ou une mesure entraînant une privation de liberté (let. b). Qu'elle soit assurée par un défenseur d'office ou privé, la défense obligatoire est donc exigée dans des cas que l'on estime suffisamment graves pour imposer au prévenu un conseil juridique afin de protéger au mieux ses intérêts dans le cadre de la procédure. L'autorité doit ainsi interpeller le prévenu en lui indiquant qu'il doit être assisté d'un avocat; si le prévenu annonce d'emblée qu'il n'a pas les moyens d'en désigner un, la direction de la procédure pourvoira aussitôt à la nomination d'un avocat d'office selon l'art. 133 CPP (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE [éds], Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, Bâle 2019, 2ème édition, n. 9 et 10 ad art. 131).

3.2. L'art. 132 al. 1 CPP prévoit quant à lui que la direction de la procédure ordonne une défense d'office en cas de défense obligatoire si le prévenu ne désigne pas de défenseur privé (let. a), ou si le prévenu ne dispose pas des moyens nécessaires et que l'assistance d'un défenseur est justifiée pour sauvegarder ses intérêts (let. b). La défense d'office selon l'art. 132 CPP intervient donc dans les cas où le prévenu ne bénéficie pas de l'assistance d'un avocat, notamment car il n'en a pas les moyens financiers (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE [éds], op. cit., n. 1 ad art. 132). La nomination d'un défenseur d'office intervient, quel que soit le motif pour lequel la défense obligatoire n'est pas assumée, et ce sans que le prévenu n'ait à en faire la requête, étant précisé qu'une telle requête est toutefois possible, notamment lorsqu'il s'agit de passer d'une défense de choix à une défense d'office (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE [éds], op. cit., n. 29 ad art. 132 CPP).

En tout temps, le prévenu, même indigent, peut choisir de recourir aux services d'un avocat de choix, qu'il rémunère; en pareil cas, les conditions d'une défense d'office disparaissent, et le mandat du précédent conseil est révoqué (ACPR/71/2014 du 3 février 2014 ; L. MOREILLON / A. PAREIN-REYMOND, CPP, Code de procédure pénale, Bâle 2013, n. 3 ad art. 134 ; N. SCHMID, Schweizerische Strafprozessordnung : Praxiskommentar, 2ème éd., Zurich 2013, n. 3a ad art. 127).

3.3. A Genève, la Directive C.8 du Procureur général, bien que n'ayant pas force de loi, précise les modalités de désignation des défenseurs obligatoires ou d'office par le Ministère public ainsi que de l'octroi de l'assistance judiciaire (art. 130, 132 et 136 CPP).

3.4. L'art. 5 al. 1 du règlement sur l'assistance juridique et l'indemnisation des conseils juridiques et défenseurs d'office en matière civile, administrative et pénale (RAJ - E 2 05.04) dispose que l'assistance juridique est en règle générale octroyée avec effet au jour du dépôt de la requête.

Cette dernière norme confère des droits identiques à ceux déduits de l'art. 29 al. 3 Cst féd. (ACPR/639/2020 du 15 septembre 2020 consid. 2.1.2.).

3.5. En l'espèce, le recourant a, d'emblée, fait élection de domicile en l'étude de l'avocate l'ayant assisté lors de son audition à la police, laquelle a continué à l'assister dans la suite de la procédure. Il bénéficiait dès lors d'une défense, dont il n'est pas contesté qu'elle était en l'espèce obligatoire au sens de l'art. 130 CPP.

Sous l'angle de la défense d'office, notion distincte et qui répond à d'autres critères que celle de la défense obligatoire, la confusion qui a apparemment prévalu dans l'esprit du recourant, et de son avocate, n'est pas imputable au Ministère public.

Comme rappelé plus haut, le prévenu en situation de défense obligatoire, même indigent, peut choisir de recourir à un avocat de choix. C'est dans cette logique que, conformément à l'art. 5 RAJ, il appartient au prévenu de requérir la nomination d'office de son conseil. Ce droit a d'ailleurs été rappelé en l'espèce au recourant lorsqu'il a été entendu, assisté de son conseil, par la police.

Sa défense étant assurée, le Ministère public n'avait aucune obligation d'ordonner, de son propre chef, une défense d'office en sa faveur. Le recourant, assisté d'une avocate à qui il revenait de le lui expliquer, devait ainsi requérir lui-même la nomination d'office de celle-ci.

Si le recourant a certes, dans son pli du 18 juin 2025, sollicité l'octroi de l'assistance juridique avec effet rétroactif au 20 décembre 2023, force est de constater qu'il n'a aucunement explicité pour quels motifs il n'aurait pas pu déposer sa requête immédiatement après l'audition à la police, à tout le moins dès qu'il a reçu la convocation pour l'audience du 5 août 2024.

Conformément aux principes susvisés, c'est donc bien à la date du 18 juin 2025, jour du dépôt de la demande, que l'assistance judiciaire pouvait être octroyée.

4.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.

5.             Le recourant sollicite également l'assistance judiciaire pour la procédure de recours.

En l'espèce, quand bien même le recourant serait indigent, force est de retenir que le recours était voué à l'échec pour les motifs exposés plus haut, de sorte que les conditions pour l'octroi de l'assistance judiciaire pour la procédure de recours ne sont pas remplies (art. 29 al. 3 Cst. ; arrêt du Tribunal fédéral 7B_84/2025 du 28 mars 2025 consid 6.1 et références citées).

La demande sera donc rejetée.

6.             La procédure de recours est gratuite (art. 20 RAJ).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Laisse les frais de la procédure de recours à la charge de l'État.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Valérie LAUBER, présidente; Mesdames Catherine GAVIN et
Françoise SAILLEN AGAD, juges; Madame Arbenita VESELI, greffière.

 

La greffière :

Arbenita VESELI

 

La présidente :

Valérie LAUBER

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse
(art. 48 al. 1 LTF).