Décisions | Chambre pénale de recours
ACPR/644/2025 du 14.08.2025 ( MP ) , REJETE
république et | canton de Genève | |
POUVOIR JUDICIAIRE P/23229/2024 ACPR/644/2025 COUR DE JUSTICE Chambre pénale de recours Arrêt du jeudi 14 août 2025 |
Entre
A______, domicilié ______ [VS], agissant en personne,
recourant,
contre l'ordonnance de jonction rendue le 25 juin 2025 par le Ministère public,
et
LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,
intimé.
EN FAIT :
A. Par acte expédié le 30 juin 2025, A______ recourt contre l'ordonnance du 25 précédent, communiquée par pli simple, à teneur de laquelle le Ministère public a joint la procédure P/13737/2025 à la présente cause (P/23229/2024), toutes deux dirigées contre lui.
L'on comprend de cet acte qu'il s'oppose à ladite jonction.
B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :
a.a. Le 6 octobre 2024, B______ a déposé plainte pénale contre A______, au motif que ce dernier l'avait, dans un courriel daté du 2 du même mois, aussi bien injuriée, en la traitant de xénophobe, fasciste et antisémite, que menacée de ternir sa réputation auprès de son employeur.
Elle a joint à son acte ledit courriel.
a.b.a. À réception de cette plainte, le Ministère public – soit pour lui le Procureur C______ – a ouvert la présente procédure (P/23229/2024), qu'il a transmise à la police (art. 309 al. 2 CPP) pour audition de A______ en qualité de prévenu.
a.b.b. Le précité a refusé de donner suite au mandat de comparution que lui a envoyé cette dernière autorité.
b.a.a. Par pli du 14 juin 2025, D______, époux de la prénommée, a porté plainte contre A______, lui reprochant d'avoir insinué, dans un email adressé le 12 du même mois à diverses personnes, qu'il pourrait manifester de l'antisémitisme, portant par-là atteinte à son honneur.
b.a.b. Dans cet email, annexé audit pli, A______ affirme, entre autres, que le Procureur E______ serait le "petit frère" du plaignant.
D______ conteste, dans sa plainte, tout lien de parenté avec ce magistrat.
b.b. La cause P/13737/2025, ouverte à la suite de cette seconde plainte, est également instruite par le Procureur C______.
c.a. Par lettre du 25 juin 2025, le Ministère public a informé A______ qu'il : était prévenu d'infractions aux art. 177 CP (injure), voire 173 (diffamation) ou 174 (calomnie) CP, ainsi que 180 CP (menaces), pour avoir adopté les comportements décrits par les époux B______/D______ dans leurs plaintes – documents qui étaient joints en annexe –; était invité à présenter d'éventuelles observations sur celles-ci; disposait, entre autres droits, de celui de consulter le dossier.
c.b. Cette lettre, expédiée en recommandé, n'a pas été réclamée par A______ dans le délai de garde auprès de l'office postal, arrivé à échéance le 4 juillet 2025.
Le Procureur la lui a derechef envoyée, par pli recommandé, le 25 du même mois.
C. Dans sa décision de jonction déférée, le Ministère public a considéré qu'il se justifiait d'instruire ensemble les deux causes précitées, celles-ci étant dirigées contre le même prévenu et portant sur des faits connexes (art. 29 CPP).
D. a. À l'appui de son recours, A______ invoque trois principaux griefs.
Tout d'abord, il n'avait pas eu connaissance des plaintes déposées contre lui, de sorte qu'il n'avait pu s'exprimer à leur sujet. L'autorité intimée l'avait donc "priv[é] de [s]es droits à l'information".
Ensuite, ces plaintes ne pouvaient, "en l'état", être "associées [ni] traitées conjointement".
Enfin, il y avait, "[à] l'évidence", "influence et décisio[n] sous influence du Procureur E______". Il convenait "que cela cesse immédiatement et que [ce magistrat] soit verbalisé pour excès de compétence et abus de pouvoir".
b. À réception de cet acte, la cause a été gardée à juger.
EN DROIT :
1. Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance de jonction, sujette à contestation auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP; Y. JEANNERET/ A. KUHN/ C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 4 in fine ad art. 30), et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à l'annulation de cette ordonnance (art. 115 cum 382 CPP).
2. La juridiction de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les actes manifestement mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.
3. Le recourant soutient, à bien le comprendre, que l'autorité intimée aurait violé son droit d'être entendu, en rendant la décision déférée avant qu'il n'ait pu prendre connaissance des plaintes déposées par les époux B______/D______.
3.1. Concrétisant le droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst. féd., 3 al. 2 let. c et 107 al. 1 let. a CPP), l'art. 101 al. 1 CPP permet aux parties de prendre connaissance du dossier pénal (arrêt du Tribunal fédéral 7B_1429/2924 du 20 mars 2025 consid. 3.2).
Cette dernière norme confère au prévenu un accès à la procédure, au plus tard après sa première audition et l'administration des preuves principales par le procureur.
Avant ce stade, la consultation du dossier est soumise à la seule discrétion du ministère public (ATF 137 IV 172 consid. 2.3; arrêt du Tribunal fédéral 7B_207/2023 du 22 février 2024 consid. 2.3.1).
3.2.1. En l'espèce, le recourant, prévenu dans les causes P/23229/2024 et P/13737/2025, ne bénéficiait, au jour du prononcé de la décision entreprise, soit le 25 juin 2025, d'aucun droit d'accès au dossier, faute d'avoir été interrogé par le Procureur.
Il ne saurait donc se plaindre d'une violation de l'art. 101 al. 1 CPP, ni a fortiori de son droit d'être entendu.
3.2.2. Par ailleurs, si le recourant était allé retirer à l'office postal le recommandé que le Ministère public lui avait adressé le 25 juin 2025, il aurait alors disposé des plaintes déposées par les conjoints précités dans le délai pour recourir contre l'ordonnance attaquée – laquelle, également datée du 25 juin 2025, lui a été communiquée par pli simple –, à supposer qu'il les estimât utiles à cette fin.
3.3. Ces considérations scellent le sort du grief.
4. Le recourant conteste la jonction de la procédure P/13737/2025 à la présente cause (P/23229/2024).
4.1.1. En vertu de l'art. 29 al. 1 let. a CPP, les infractions sont poursuivies et jugées conjointement lorsqu'un prévenu a commis plusieurs crimes/délits.
Cette disposition consacre, à l'instar de l'art. 49 al. 1 CP, le principe de l'unité de la procédure/des poursuites, à teneur duquel les actes répréhensibles perpétrés par un même délinquant doivent être instruits, puis le cas échéant jugés, ensemble (ATF 138 IV 214 consid. 3.2).
4.1.2. Selon l'art. 30 CPP, si des raisons objectives le justifient, le ministère public peut ordonner la disjonction de causes.
La conduite de procédures séparées doit cependant rester l'exception. Elle tend à garantir la rapidité de l'instruction et à éviter un retard inutile (arrêt du Tribunal fédéral 7B_1184/2024 du 11 avril 2025 consid. 2.2.1 et 2.2.2).
4.2. In casu, le recourant est soupçonné d'avoir commis diverses infractions, objets des deux affaires précitées. Ces infractions doivent donc, en principe, être poursuivies conjointement (art. 29 al. 1 let. a CPP).
Aucun motif ne milite pour que les causes soient traitées séparément (art. 30 CPP). En effet, leur état d'avancement est analogue (l'instruction débutant pour chacune d'elles) et les actes imputés au recourant sont essentiellement similaires (à savoir des atteintes à l'honneur).
À cela s'ajoute que la jonction querellée présentera l'avantage, selon ce que le Ministère public décidera, d'éviter de devoir rendre deux décisions au fond à l'encontre du prévenu et, le cas échéant, d'avoir à prononcer une peine complémentaire (art. 49 al. 2 CP).
Il s'ensuit que l'ordonnance déférée est exempte de critique.
5. Le recourant semble considérer que le Procureur E______ aurait "influ[é]" sur le traitement des procédures P/23229/2024 et P/13737/2025, singulièrement sur le prononcé de la décision entreprise.
L'on ne voit toutefois pas que tel ait pu être le cas, ce magistrat ne s'étant, à aucun moment, occupé de l'une ou l'autre desdites procédures.
Le grief est donc dénué de fondement.
6. En conclusion, le recours se révèle infondé et doit être rejeté.
7. Le prévenu succombe (art. 428 al. 1 CPP).
Il supportera, en conséquence, les frais de la cause, fixés en totalité à CHF 900.- (art. 3 cum 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP;
E 4 10.03).
* * * * *
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Rejette le recours.
Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, fixés à CHF 900.-.
Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant et au Ministère public.
Siégeant :
Madame Valérie LAUBER, présidente; Madame Catherine GAVIN et Monsieur
Vincent DELALOYE, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.
Le greffier : Julien CASEYS |
| La présidente : Valérie LAUBER |
Voie de recours :
Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse
(art. 48 al. 1 LTF).
P/23229/2024 | ÉTAT DE FRAIS |
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COUR DE JUSTICE
Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).
Débours (art. 2) | | |
- frais postaux | CHF | 10.00 |
Émoluments généraux (art. 4) | | |
- délivrance de copies (let. a) | CHF | 00.00 |
- délivrance de copies (let. b) | CHF | 00.00 |
- état de frais (let. h) | CHF | 75.00 |
Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13) | | |
- décision sur recours (let. c) | CHF | 815.00 |
Total | CHF | 900.00 |