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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/4337/2025

ACPR/576/2025 du 28.07.2025 sur ONMMP/2504/2025 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : ORDONNANCE DE NON-ENTRÉE EN MATIÈRE;ACCIDENT DE LA CIRCULATION;ANIMAL;DOMMAGES À LA PROPRIÉTÉ(DROIT PÉNAL)
Normes : CPP.310.al1.leta; CP.144; LPA.26

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/4337/2025 ACPR/576/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 28 juillet 2025

 

Entre

A______, représenté par Me Maïssa FATTAL, avocate, SLRG Avocats, quai Gustave-Ador 2, 1207 Genève,

recourant,

 

contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 28 mai 2025 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B,
1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 6 juin 2025, A______ recourt contre l'ordonnance du 28 mai 2025, notifiée le surlendemain, par laquelle le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur sa plainte du 14 février 2025 contre inconnu.

Le recourant conclut, sous suite de frais, à l'annulation de l'ordonnance querellée et au renvoi de la cause au Ministère public pour l'ouverture d'une instruction et la mise en œuvre des actes d'enquête, qu'il énumère. Il sollicite également d'être mis au bénéfice de l'assistance judiciaire gratuite pour la procédure de recours.

b. Selon le rapport établi le 12 juin 2025 par le Greffe de l'assistance juridique, le recourant n'est pas indigent. Par ordonnance du 17 juin 2025, la Direction de la procédure a donc rejeté sa demande d'assistance judiciaire gratuite. Par courrier du 4 juillet 2025, il a alors conclu à l'octroi de dépens chiffrés en cas d'admission du recours.

c. Le recourant a versé les sûretés en CHF 1'000.- qui lui étaient réclamées par la Direction de la procédure.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Le 5 février 2025, aux alentours de 8h00, B______ a heurté, au volant de son véhicule automobile de marque C______, le chien – de race Shih Tzu – de A______, sur le passage pour piétons en regard du 16, rue 1______, causant ainsi son décès.

Dans la continuité dudit passage pour piétons se trouve un îlot central, lui-même suivi d'un second passage pour piétons situé à hauteur du 11, rue 1______.

b. Le 14 février 2025, A______ a déposé plainte contre inconnu, tant en son nom que pour le compte de son enfant D______, né le ______ 2014, pour dommages à la propriété (art. 144 CP), infraction à la loi sur la circulation routière et toute autre disposition pénale susceptible de trouver application, en exposant ce qui suit :

Le 5 février 2025 au matin, il avait emmené son fils à l'école E______, sise no. ______ rue 2______. Il tenait leur chien en laisse. Ils s'étaient engagés sur le passage pour piétons qu'ils empruntaient habituellement, en présence de F______ – patrouilleuse scolaire –, lorsque le conducteur d'une voiture avait percuté leur chien. Ils avaient été profondément choqués par cet évènement. Ledit automobiliste, qui ne s'était pas arrêté à temps, n'avait pas fait preuve de la prudence requise.

À titre d'actes d'instruction, il sollicitait l'audition de F______ et d'une témoin prénommée "G______" ainsi que l'extraction des images de vidéosurveillance pouvant se trouver à proximité de l'accident.

À l'appui de sa plainte, il a produit notamment:

-          le contrat de vente du chien, duquel il ressortait que A______ et son épouse en étaient les propriétaires;

-          trois photographies du lieu de l'accident sur lesquelles étaient apposées une croix sur la dernière ligne jaune du passage pour piétons, côté pair de la rue 1______ et une autre sur la première ligne jaune du passage pour piétons côté impair de cette même rue.

c. La police a procédé à des auditions:

c.a. F______ a déclaré qu'elle avait souvent vu A______ car il emmenait tous les matins son fils à l'école. Leur chien était tenu en laisse. Le matin en question, ils marchaient vite, car la cloche de l'école avait déjà sonné. Ils étaient arrivés au niveau du passage pour piétons, côté pair de la rue 1______. Elle avait alors interrompu la circulation afin qu’ils puissent passer en toute sécurité. Ils n'avaient pas traversé en même temps, l'enfant s'étant engagé alors que A______ se trouvait encore sur le trottoir avec son chien. À ce moment, il n'y avait pas de voiture. Après le passage de l'enfant, elle était passée entre ce dernier et A______ pour se diriger vers le passage pour piétons situé côté impair de la rue 1______. Elle leur avait à tous deux demandé, "comme d'habitude", d'attendre au niveau de l'îlot central pour qu'elle ait le temps de bloquer la circulation, ce qu'ils avaient fait. Ils n'avaient pas traversé simultanément, l'enfant étant déjà arrivé sur le trottoir lorsque A______ s'était engagé sur le passage pour piétons. Au moment où ce dernier s'était retrouvé à l'abord de la première ligne jaune dudit passage, elle avait entendu un heurt. Elle s'était immédiatement retournée et avait vu le chien écrasé sur la dernière ligne jaune du passage pour piétons côté pair de la rue 1______. À cet instant, elle était toujours en train de bloquer la circulation venant du côté impair de ladite rue. Le conducteur s'était immédiatement arrêté. Elle n'avait pas vu le heurt.

Sont joints au procès-verbal deux croquis sur lesquels F______ a indiqué l'emplacement des protagonistes avant et après l'accident.

c.b. Entendu en qualité de prévenu, B______ a déclaré qu'il exerçait en tant que chauffeur professionnel. Ce jour-là, il circulait sur la rue 1______ en direction de la rue 3______ afin de conduire un client à la rue 4______. Il était arrivé vers le passage pour piétons côté pair de la rue 1______ lorsque la patrouilleuse scolaire lui avait fait signe de s'arrêter, ce qu'il avait fait. La précitée avait fait traverser un groupe composé d'adultes et d'un enfant en direction du côté impair de ladite rue. À plusieurs mètres derrière eux, une femme et un homme, accompagné de son chien, marchaient en direction du groupe, qu'ils avaient rejoint sur l'îlot central, où ils avaient attendu que la patrouilleuse scolaire leur fasse signe d'avancer. Celle-ci avait alors arrêté les voitures arrivant depuis la rue 5______ et le groupe avait commencé à traverser. À ce moment-là, il avait lentement redémarré son véhicule, sa vitesse n'étant en aucun cas excessive. Il avait alors senti un "à-coup" comme s'il avait roulé sur une pierre. L'homme s'était mis à hurler en se prenant la tête dans les mains. Lui-même avait ouvert la portière de son véhicule et aperçu le chien. Une dame était arrivée en lui disant d'appeler la police, ce qu'il avait fait après avoir déplacé son véhicule à la rue 3______.

Il n'avait pas pu voir le chien sur le passage pour piétons car cet animal était tout petit. Il ne comprenait pas comment l'animal était revenu sur ses pas étant donné que son maître était presque arrivé sur le trottoir côté impair de la rue 1______. La longueur de la laisse était inadaptée en plein centre-ville. En tant que chauffeur professionnel, il était toujours extrêmement attentif devant les passages pour piétons, a fortiori en présence d'un enfant.

Est joint au procès-verbal un croquis sur lequel B______ a indiqué l'emplacement des protagonistes au moment de l'accident; le chien se trouvait sur la dernière ligne jaune du passage pour piétons côté pair de la rue 1______, l'homme se situait à l'avant dernière ligne jaune du passage pour piétons côté impair de ladite rue; la patrouilleuse scolaire bloquait la circulation arrivant depuis la rue 5______ et l'enfant était sur le trottoir côté impair de la rue 1______.

d. Selon le rapport de renseignements du 18 avril 2025, la police s'était rendue sur les lieux et avait été mise en présence de A______, son fils D______, F______ et B______.

Au vu des éléments recueillis sur place, elle avait pu déterminer que B______ s'était arrêté pour laisser passer les piétons qui marchaient en direction du côté impair de la rue 1______. Il avait redémarré une fois que tout le monde s'était engagé sur le passage pour piétons dudit côté de la rue. Il avait senti avoir roulé sur quelque chose avec la roue avant gauche de sa voiture, immobilisant alors immédiatement son véhicule. A______ et son fils étaient accompagnés de leur chien qui les suivait "plusieurs mètres derrière eux". Au moment où ils s'étaient engagés sur le passage pour piétons côté impair de la rue 1______, le chien se trouvait encore sur celui côté pair de ladite rue.

La police n'avait pas pu exploiter de caméras de vidéosurveillance à l'endroit du heurt. A______ était enregistré comme seul propriétaire du chien. Il avait cité dans sa plainte G______ en tant que témoin des faits. Le 28 février 2025, la police avait pu la joindre par téléphone. Elle n'avait pas pu être formellement auditionnée car elle était retournée vivre aux Philippines. Elle leur avait néanmoins indiqué ne pas avoir vu le heurt, et ses déclarations sur ce qu'il s'était passé après concordaient avec celles des autres témoins. B______ était connu des services de police pour six affaires, survenues entre 2016 et 2022, en lien avec la circulation routière.

C. Dans son ordonnance querellée, le Ministère public considère que B______ n'avait pas volontairement écrasé le chien du plaignant, ni même envisagé et accepté cette possibilité. Il avait redémarré son véhicule au moment où les piétons – dont faisait partie le plaignant – avaient entamé la traversée du passage côté impair. Le chien – de petite taille – se trouvait alors encore à la hauteur de la dernière ligne jaune du passage pour piétons côté pair soit à environ quatre mètres du plaignant. Il ne pouvait ainsi être reproché au mis en cause de ne pas l'avoir vu au moment de redémarrer son véhicule. L'élément subjectif de l'infraction de dommages à la propriété (art. 144 CP) faisait donc défaut (art. 310 al. 1 let. a CPP).

D. a. Dans son recours, A______ reproche au Ministère public d'avoir constaté les faits de manière incomplète et erronée. Ils reposaient sur les seules déclarations de B______ et de F______, diamétralement opposées. Il aurait ainsi dû tenir une audience de confrontation, respectivement procéder à son audition (à lui) avant de rendre l'ordonnance litigieuse. Le Ministère public avait également apprécié arbitrairement les preuves en prenant la liberté de donner plus de poids aux allégations de B______ qui, en réalité, manquaient de pertinence en raison notamment de son "appréciation subjective et non fondée" de la longueur de la laisse.

Le Ministère public avait également violé son droit d'être entendu, dans la mesure où ni lui ni son fils n'avaient été auditionnés, l'ordonnance litigieuse ne s'appuyant donc que sur les déclarations contradictoires de B______ et de F______.

Le Ministère public avait finalement écarté à tort sa plainte. Les éléments constitutifs des art. 26 de la loi sur la protection des animaux [LPA ; RS 455] et 26 LCR étaient réalisés. B______ s'était également rendu coupable de dommages à la propriété, à tout le moins par dol éventuel. Ce dernier avait indiqué avoir vu le chien à plusieurs reprises sur la zone piétonne et avait ainsi redémarré son véhicule sans s'assurer que l'animal ne s'y trouvait plus. Il tentait a posteriori de se dédouaner d'un comportement répréhensible dont il était pleinement conscient. Un passage pour piétons était une zone nécessitant une attention particulière, a fortiori en présence d'un animal. Le mis en cause ne pouvait être considéré comme un conducteur occasionnel susceptible d'être surpris par une situation exceptionnelle, car il exerçait en tant que chauffeur professionnel. L'intéressé avait par le passé été condamné à six reprises pour des infractions à la loi sur la circulation routière, ce qui démontrait un comportement récurrent de négligence face aux risques.

À titre d'actes d'instruction, il sollicite l'audition de son fils et la sienne, ainsi que la tenue d'une audience de confrontation.

b. À réception des sûretés, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

EN DROIT :

1.             1.1. Le recours a été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerne une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émane de la partie plaignante qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

Ceci vaut pour l'infraction de dommages à la propriété dont se plaint le recourant, étant en effet précisé que ce dernier n'a pas d'intérêt juridique protégé en lien avec des infractions à la LCR (cf. arrêt ACPR/493/2024 du 3 juillet 2024, consid. 1.2.). L'existence d'un intérêt juridiquement protégé, au sens de l'art. 382 CPP, n'est en effet admise que lorsque le recourant est directement et immédiatement touché dans ses droits par l’ordonnance attaquée. La violation d'un intérêt relevant d'un autre sujet de droit est insuffisante pour créer la qualité pour recourir (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1004/2022 du 23 mai 2023 consid. 3.1.1).

1.2. Dans son courrier du 4 juillet 2025, le recourant conclut à l'octroi de dépens chiffrés en cas d'admission du recours. De jurisprudence constante, la motivation d'un recours doit être entièrement contenue dans l'acte de recours lui-même et ne saurait être complétée ou corrigée ultérieurement (arrêt du Tribunal fédéral 1B_183/2012 du 20 novembre 2012 consid. 2). Toutefois, ladite conclusion découle de l'ordonnance du 17 juin 2025 de la Chambre de céans, par laquelle sa demande d'assistance judiciaire gratuite a été rejetée, ce que le recourant ignorait au moment du dépôt de son recours, de sorte qu'elle sera déclarée recevable (arrêt du Tribunal fédéral 7B_106/2023 du 1er juillet 2025 consid. 5.4).

1.3. Le recourant ne prétend également pas agir au nom de son fils mineur (art. 106 al. 2 CPP), son recours ayant été déposé en son nom personnel uniquement, sans qu'il soit possible d'en déduire qu'il entendait représenter son enfant. Cela étant, cette question peut souffrir de demeurer indécise, au vu de l'issue du recours, qui est partant recevable.

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.


 

3.             Le recourant se plaint d'une constatation incomplète et erronée, voire arbitraire, des faits.

Dès lors que la Chambre de céans jouit d'un plein pouvoir de cognition en droit et en fait (art. 393 al. 2 CPP ; ATF 137 I 195 consid. 2.3.2), les éventuelles constatations incomplètes ou inexactes, voire arbitraires, du Ministère public auront été corrigées dans l'état de fait établi ci-devant.

Partant, ce grief sera rejeté.

4.             Le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu, dans la mesure où ni lui ni son fils n'avaient été auditionnés dans le cadre de la procédure.

4.1. Le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., comprend notamment pour le justiciable le droit de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d'obtenir l'administration des preuves pertinentes et valablement offertes, de participer à l'administration des preuves essentielles et de se déterminer sur son résultat lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 142 II 218 consid. 2.3).

Diverses mesures d'investigation peuvent être mises en œuvre avant l'ouverture d'une instruction, telle que l'audition du suspect par la police sur délégation du ministère public (arrêt du Tribunal fédéral 6B_875/2018 du 15 novembre 2018 consid. 2.2.1). Durant cette phase préalable, le droit de participer à l'administration des preuves ne s'applique en principe pas. Avant de rendre une ordonnance de non-entrée en matière, le ministère public n'a pas à en informer les parties et il n'a pas à leur donner la possibilité d'exercer leur droit d'être entendu, lequel sera assuré, le cas échéant, dans le cadre de la procédure de recours, ou elles pourront faire valoir, auprès d'une autorité qui dispose d'un plein pouvoir d'examen (art. 391 al. 1 et 393 al. 2 CPP), tous leurs griefs, de nature formel et matériel (arrêt du Tribunal fédéral 6B_854/2018 du 23 octobre 2018 consid. 3.1).

4.2. En l'espèce, la procédure n'a pas dépassé la phase des simples investigations et aucune instruction n'a été ouverte, de sorte que le Ministère public était dispensé d'inviter les parties à se déterminer oralement ou par écrit avant de prononcer l'ordonnance querellée. La motivation de cette dernière, claire et suffisante, permettait en outre aux parties de contester la décision dans le cadre d'un recours en toute connaissance de cause, ce que le recourant a, au demeurant, fait.

Par conséquent, ce grief sera rejeté.


 

5.             Le recourant estime que les conditions d'une non-entrée en matière ne sont pas réalisées dans la mesure où B______ aurait commis plusieurs infractions.

5.1.       À teneur de l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ne sont manifestement pas réunis.

Conformément à cette disposition, la non-entrée en matière est justifiée lorsque la situation est claire sur le plan factuel et juridique. Tel est le cas lorsque les faits visés ne sont manifestement pas punissables, faute, de manière certaine, de réaliser les éléments constitutifs d'une infraction. Au stade de la non-entrée en matière, on ne peut admettre que les éléments constitutifs d'une infraction ne sont manifestement pas réalisés que lorsqu'il n'existe pas de soupçon suffisant conduisant à considérer un comportement punissable ou lorsqu'un éventuel soupçon initial s'est entièrement dissipé (ATF 141 IV 87 consid. 1.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 6B_196/2020 du 14 octobre 2020 consid. 3.1).

5.2.       Selon l'art. 144 al. 1 CP, se rend coupable de dommages à la propriété quiconque, sans droit, endommage, détruit ou met hors d'usage une chose appartenant à autrui ou frappé d'un droit d'usage ou d'usufruit au bénéfice d'autrui.

Conformément à l'art. 110 al. 3bis CP, cette disposition s'applique également aux animaux (M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI (éds), Code pénal - Petit commentaire, 2e éd., Bâle 2017, n. 4 ad art. 144 CP).

5.3.       Le dommage à la propriété est une infraction intentionnelle, en ce sens que l'auteur doit avoir conscience, au moins sous la forme du dol éventuel, de porter atteinte à une chose appartenant à autrui. Les dommages causés par négligence ne sont pas punissables (ATF 116 IV 143 consid. 2.b).

5.4.1. Selon l'art. 12 al. 2 CP, agit intentionnellement quiconque commet un crime ou un délit avec conscience et volonté ; l'auteur agit déjà avec intention, sous la forme du dol éventuel, lorsqu'il tient pour possible la réalisation de l'infraction et l'accepte pour le cas où celle-ci se produirait. Il y a donc dol éventuel lorsque l'auteur, qui ne veut pas le résultat dommageable pour lui-même, envisage le résultat de son acte comme possible et l'accepte au cas où il se produirait mais également lorsque le résultat dommageable s'impose à l'auteur de manière si vraisemblable que son comportement ne peut raisonnablement être interprété que comme l'acceptation de ce résultat (ATF 137 IV 1 consid. 4.2.3; arrêt du Tribunal fédéral 6B_718/2017 du 17 janvier 2018 consid. 2.1). Le dol éventuel est une forme d'intention, qui se distingue de la négligence consciente sur le plan volitif, non pas cognitif. En d'autres termes, la différence entre le dol éventuel et la négligence consciente réside dans la volonté de l'auteur et non dans la conscience. Dans les deux cas, l'auteur est conscient que le résultat illicite pourrait se produire, mais, alors que celui qui agit par négligence consciente escompte qu'il ne se produira pas, celui qui agit par dol éventuel l'accepte pour le cas où il se produirait (ATF 133 IV 9 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1189/2014 du 23 décembre 2015 consid. 5.2). Savoir si l'auteur s'accommode de la concrétisation du risque dépend des circonstances. Doivent être pris en compte le degré de probabilité de la réalisation du risque, la gravité de la violation du devoir de diligence, les mobiles de l'auteur, ainsi que sa façon d'agir. Plus le risque que le danger se réalise est grand, plus la violation du devoir de diligence est grave, plus il se justifiera de retenir que l'auteur s'est accommodé de la survenance du résultat. Il n'est cependant pas nécessaire que le risque de voir le danger se concrétiser soit particulièrement élevé pour admettre le dol éventuel. La simple conscience du résultat potentiel n'est toutefois pas suffisante (ATF 133 IV 9 consid. 4.1).

5.4.2. Conformément à l'art. 12 al. 3 CP, il y a négligence si, par une imprévoyance coupable, l'auteur a agi sans se rendre compte ou sans tenir compte des conséquences de son acte. Il faut que l'auteur ait, d'une part, violé les règles de prudence que les circonstances lui imposaient pour ne pas excéder les limites du risque admissible et que, d'autre part, il n'ait pas déployé l'attention et les efforts que l'on pouvait attendre de lui pour se conformer à son devoir (ATF 135 IV 56 consid. 2.1). Pour déterminer plus précisément les devoirs imposés par la prudence, on peut se référer à des normes édictées par l'ordre juridique pour assurer la sécurité et éviter des accidents (ATF 143 IV 138 consid. 2.1). S'agissant d'un accident de la route, il convient de se référer aux règles de la circulation routière (ATF 122 IV 133 consid. 2a ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_33/2021 du 12 juillet 2021 consid. 3.1).

5.5. Selon l'art. 26 al. 1 LPA, se rend coupable de mauvais traitements infligés aux animaux, quiconque, intentionnellement, maltraite un animal, le néglige ou le surmène inutilement ou porte atteinte à sa dignité d'une autre manière (let. a) ou met à mort un animal de façon cruelle ou par malice (let. b). Lesdites infractions peuvent ne pas être commises intentionnellement, la négligence étant suffisante (art. 26 al. 2 LPA).

La LPA vise à protéger la dignité et le bien-être de l'animal, mais non sa vie, se limitant à réprimer la mise à mort cruelle ou par malice d'animaux (art. 1 LPA; Message relatif à la révision de la loi sur la protection des animaux du 9 décembre 2002, FF 2003 p. 613; arrêt du Tribunal fédéral 2C_147/2019 du 20 août 2019 consid. 5.6.1). Ladite loi entend par dignité la valeur propre de l'animal, qui doit être respectée par les personnes qui s'en occupent. Il y a atteinte à la dignité de l’animal lorsque la contrainte qui lui est imposée ne peut être justifiée par des intérêts prépondérants. Tel est notamment le cas si des douleurs, des maux ou des dommages sont causés à l'animal lorsqu'il est mis dans un état d’anxiété ou avili, lorsqu’on lui fait subir des interventions modifiant profondément son phénotype ou ses capacités, ou encore lorsqu’il est instrumentalisé de manière excessive (art. 3 let. a LPA).

5.6. En l'espèce, le chien du plaignant, d'une race de petite taille, a été percuté sur un passage-piétons par une automobile conduite par le mis en cause, ce qui a causé son décès. L'animal est considéré à teneur du Code pénal comme une chose, de sorte que, sous l'angle d'un dommage à la propriété, seul un délit intentionnel est réprimé par l'art. 144 CP, également sous la forme du dol éventuel.

Or, à teneur du dossier, il apparait que tout au plus une négligence pourrait être reprochée au conducteur. Il est en effet établi, en particulier par la patrouilleuse scolaire qui a fait traverser le matin en question le plaignant et son fils, accompagnés du chien, que le mis en cause, au volant de véhicule automobile professionnel, s'est arrêté devant le passage pour piétons au signe qu'elle lui avait fait de s'arrêter. Il apparait aussi, selon les dires de cette dernière, que le plaignant ne remet pas en cause, qu'il était, avec son fils, pressé de rejoindre l'école, dans la mesure où la cloche de 8h00 avait déjà sonné. Il ressort des photographies annotées du plaignant et ses croquis, de même que celui de la patrouilleuse scolaire, que le petit chien se trouvait sur la dernière bande jaune du passage côté pair de la rue 1______, alors que le plaignant et son fils avaient déjà rejoint le passage piétons côté impair de cette rue, après avoir parcouru l'ilot central. Ainsi, quand bien même le recourant aurait commis une négligence selon la LCR, pour avoir démarré sans toute la circonspection nécessaire, en particulier en dirigeant son regard à quelques mètres du sol sur sa gauche, à hauteur des roues de son véhicule, pour se rendre compte que le petit chien n'avait pas fini de traverser le passage, cela ne permettrait pas de conclure à une intention, sous la forme du dol éventuel, selon l'art. 144 CP.

Le fait que le mis en cause ait déclaré avoir senti un "à-coup", comme s'il avait "roulé sur une pierre", suggère qu’il ne s’attendait pas au heurt avec l'animal. Rien ne permet ainsi de supposer qu'il aurait envisagé et accepté le résultat de son acte au cas où il se produirait.

Aucun acte d'instruction ne serait au surplus de nature à modifier cette appréciation. Le rapport de police indique qu'aucune image de vidéosurveillance n'a pu être exploitée. Quant à la personne mentionnée comme témoin par le recourant, elle est, aux dires de la police, repartie vivre définitivement aux Philippines et n'aurait en tout état pas vu le heurt. L’audition du recourant et de son fils, respectivement la tenue d’une audience de confrontation entre les parties, ne seraient pas de nature à apporter d’éléments probants supplémentaires, chacun allant vraisemblablement maintenir sa propre version des faits. Il est de plus rappelé que c'est déjà sur la base des détails donnés par le plaignant même, corroborés par les dires de la patrouilleuse, que le déroulement de l'accident peut être expliqué, de sorte que son audition n'apporterait rien de plus.

Enfin, le présent litige s'inscrit dans le cadre d'un accident de la circulation routière, qui n'entre pas dans le champ de protection des animaux prévu par la LPA, étant rappelé que cette loi vise à protéger la dignité et le bien-être de l'animal, mais non sa vie, se limitant, à cet égard, à réprimer la mise à mort cruelle ou par malice d'animaux, ce qui n'est nullement le cas de figure en cause.

C'est ainsi à juste titre que le Ministère public a rendu une ordonnance de non-entrée en matière considérant l'absence de soupçons de la commission de l'infraction de dommages à la propriété.

6.             Infondé, le recours sera rejeté.

7.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui seront arrêtés à CHF 1'000.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03), prélevés sur les sûretés.

8.             Corrélativement, aucun dépens ne lui sera alloué (ATF 144 IV 207 consid. 1.8.2).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 1'000.-.

Dit que ce montant sera prélevé sur les sûretés versées.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Madame Valérie LAUBER, juge, et
Monsieur Pierre BUNGENER, juge suppléant; Madame Séverine CONSTANS, greffière.

 

La greffière :

Séverine CONSTANS

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse
(art. 48 al. 1 LTF).


 

P/4337/2025

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

915.00

Total

CHF

1'000.00