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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/3036/2025

ACPR/569/2025 du 22.07.2025 sur OTDP/1257/2025 ( TDP ) , REJETE

Descripteurs : OPPOSITION(PROCÉDURE);DÉFAUT(CONTUMACE);COMPARUTION PERSONNELLE;EMPÊCHEMENT(EN GÉNÉRAL)
Normes : cpp.356.al4

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/3036/2025 et P/8692/2025 ACPR/569/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mardi 22 juillet 2025

 

Entre

A______, représenté par Me Dina BAZARBACHI, avocate, Étude BAZARBACHI LAHLOU & ARCHINARD, rue Micheli-du-Crest 4, 1205 Genève,

recourant,

contre l'ordonnance rendue le 21 mai 2025 par le Tribunal de police,

et

LE TRIBUNAL DE POLICE, rue des Chaudronniers 9, case postale 3715, 1211 Genève 3,

LE SERVICE DES CONTRAVENTIONS, chemin de la Gravière 5, case postale 104, 1211 Genève 8,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. Par acte déposé le 2 juin 2025, A______ recourt contre l'ordonnance du 21 mai précédent, notifiée le lendemain, par laquelle le Tribunal de police a constaté son défaut à l'audience du 20 mai 2025 et dit que ses oppositions aux ordonnances pénales du Service des contraventions (ci-après : SdC) n° 1______ et 2______ du 9 août 2024 étaient réputées retirées, et celles-ci assimilées à des jugements entrés en force.

Le recourant conclut, sous suite de frais et dépens, préalablement, à la restitution de l'effet suspensif et, principalement, à l'annulation de ladite ordonnance, à ce qu'il soit dit que les procédures P/3036/2025 et P/8692/2025 suivent leur cours; cela fait, au renvoi de la cause au Tribunal de police pour convocation d'une nouvelle audience.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a.a. Par ordonnance pénale n° 1______ du 2 août 2024, le SdC a déclaré A______ coupable de contravention à la LStup et l'a condamné à une amende de CHF 650.-.

a.b. Par ordonnance pénale n° 2______ du 2 août 2024, le SdC a déclaré A______ coupable d'infraction à la LTV et l'a condamné à une amende de CHF 240.-.

b. Le 9 août 2024, sous la plume de son conseil, A______ a formé opposition à ces deux ordonnances.

c. Par ordonnances des 3 février et 9 avril 2025, le SdC a maintenu ses décisions et transmis la procédure au Tribunal de police.

d. Par mandat de comparution du 14 avril 2025, notifié à A______ le lendemain à son domicile, le Tribunal de police l'a cité à comparaître personnellement à une audience appointée au 20 mai 2025, à 9h00. Le mandat précisait, en caractère gras, que, si le prévenu ne se présentait pas à l'audience, sans excuse valable, l'opposition serait réputée retirée et l'ordonnance pénale déclarée exécutoire, conformément à l'art. 356 al. 4 CPP.

E .A______ n'a pas comparu à l'audience.

À teneur du procès-verbal d'audience, son conseil, Me Dina BAZARBACHI, était toutefois présente et a expressément sollicité du Tribunal de police la possibilité de représenter son client, ce qui lui a été refusé. Après avoir invité le conseil du prévenu à se prononcer sur l'absence de ce dernier et ses conséquences, le Tribunal de police a indiqué qu'il rendrait une ordonnance constatant le retrait d'opposition.

f. Par efax du 20 mai 2025, Me Dina BAZARBACHI a indiqué s'être rendue à la l'établissement fermé de La Brenaz (ci-après : La Brenaz) après l'audience, où A______ lui avait expliqué avoir été malade toute la nuit, ce qu'il avait précisé le matin aux agents de détention venus le chercher pour le convoyage.

Elle a produit un courrier écrit le même jour par son client, à teneur duquel ce dernier indiquait n'avoir pas été en mesure de se présenter devant le Tribunal. Il avait été malade toute la nuit (vomissements). Au matin, ses jambes "ne le portaient plus". Il transmettrait un certificat médical "dans les plus brefs délais" et autorisait son avocate à le représenter "pour toutes audiences à l'avenir".

C. Dans son ordonnance, le Tribunal de police retient que A______ ne s'était pas présenté à l'audience du 20 mai 2025 et avait refusé d'y être conduit [depuis La Brenaz], sans excuse valable. Il n'avait pas sollicité de report d'audience ni demandé à être dispensé de comparaître aux débats, moyennant représentation par son conseil. Qu'il ait été ou non malade la nuit précédant l'audience, les éléments apportés postérieurement à l'audience – une autorisation formelle de son conseil pour le représenter et un courrier de cette dernière du 20 mai 2025 à 12h13 selon lequel elle s'était rendue à La Brenaz où elle avait rencontré son client qui lui avait dit avoir été malade toute la nuit et n'avoir absolument pas été en mesure de se rendre à l'audience par convoyage, ce qu'il avait indiqué aux gardiens – ne démontraient pas qu'il aurait été dans l'impossibilité de s'y rendre. Les informations reçues du greffe de la prison démontraient au contraire qu'il avait refusé, sans motif particulier, d'être conduit à l'audience. Le prévenu aurait pu et dû, en présence d'un problème de santé l'empêchant de comparaître aux débats, en informer son conseil, par l'intermédiaire du greffe de la prison, ce qu'il n'avait pas fait. Son conseil ne pouvait pas, sans instructions de son client, demander à le représenter, alors qu'elle ignorait les raisons de sa non comparution. Dès lors, son opposition était réputée retirée et les ordonnances pénales assimilées à des jugements entrés en force.

D. a. Dans son recours, A______ fait valoir une violation de l'at. 356 al. 4 CPP. Un interlocuteur de La Brenaz avait confirmé le jour de l'audience que lui-même était souffrant la veille et le matin de l'audience, ce qui justifiait son absence. Le courriel du gardien indiquant qu'il avait "refusé sa conduite sans motifs particuliers" se basait sur des informations erronées et incohérentes avec celles du collaborateur précité. Les symptômes dont il souffrait – des vomissements et un état de faiblesse tel que ses jambes ne le portaient plus, avec la précision qu'un transport en fourgon cellulaire était particulièrement pénible lorsque l'on était souffrant – l'avaient empêché de se rendre à l'audience. L'arrêt ACPR/210/205 du 18 mars 2025 trouvait application. Il allait de soi que son avocate le représentât, dès lors que cette dernière, qui le représentait de longue date, avait parlé avec lui des tenants et aboutissants de la procédure et des perspectives de succès. Seule une question de droit restait litigieuse, à savoir un vice de forme affectant les ordonnances pénales et justifiant leur annulation, conformément à l'art. 80 al. 2 CPP. Il serait, dans ces conditions, injustifié de lui reprocher un quelconque désintérêt pour la procédure, vu de plus le courrier qu'il avait adressé le 20 mai 2025 au Tribunal de police pour expliquer la raison de son absence. Les faits étaient reconnus et ne nécessitaient pas son audition. Cette autorité pouvait donc le dispenser de comparaître en application de l'art. 336 al. 3 CPP.

Le Tribunal de police avait fait preuve de formalisme excessif. Il s'imposait d'appliquer avec rigueur la garantie fondamentale de l'accès au juge au sens de l'art. 6 § 1 CEDH, surtout dans les dossiers sur ordonnance pénale.

b. Le Tribunal de police se réfère à son ordonnance, en précisant qu'aucun certificat médical n'avait été produit par le recourant quant à son incapacité alléguée de comparaître.

c. Le Ministère public conclut au rejet du recours. La situation différait de celle décrite dans l'arrêt ACPR/210/2025, qui avait trait à une absence communiquée à l'avance et pour des motifs attestés médicalement.

d. Le SdC s'en remet à justice. S'agissant de la demande de restitution de l'effet suspensif, la procédure de recouvrement était suspendue jusqu'à droit connu sur le recours.

e. Le recourant renonce à répliquer.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. b CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             Le recourant reproche au Tribunal de police d'avoir considéré que son absence à l'audience du 20 mai 2025 n'avait pas été valablement excusée et, partant, que ses oppositions aux ordonnances pénales du 2 août 2024 étaient réputées retirées.

2.1.       À teneur de l'art. 356 al. 4 CPP, si l'opposant à une ordonnance pénale fait défaut aux débats devant le tribunal de première instance sans être excusé et sans se faire représenter, son opposition est réputée retirée. Toutefois, à la différence de ce que prévoit l'art. 355 al. 2 CPP pour la procédure d'opposition devant le ministère public, l'opposant qui fait défaut aux débats devant le Tribunal a le droit de se faire représenter, à moins que, lorsqu'il est prévenu, sa présence n'ait pas été exigée par la direction de la procédure (Message relatif à l'unification du droit de la procédure pénale (CPP) du 21 décembre 2005, FF 2006 1275). En d'autres termes, devant le tribunal de première instance, lorsque l'opposant est le prévenu, sa représentation n'est possible que si la direction de la procédure n'a pas exigé sa présence (arrêts du Tribunal fédéral 6B_289/2013 du 6 mai 2014 consid. 12.2 ; 6B_747/2012 du 7 février 2014 consid. 3.3). Cela suppose une indication expresse dans le mandat de comparution que sa présence est obligatoire avec mention des conséquences en cas d'absence, par exemple, par la reproduction du texte de l'art. 356 al. 4 CPP (arrêt du Tribunal fédéral 6B_592/2012 du 11 février 2013 consid. 3).

L'art. 356 al. 4 CPP ne définit pas à quelles conditions un empêchement peut être considéré comme excusé ou non. Conformément à l'art. 94 al. 1 CPP, applicable par analogie, une partie peut demander la restitution du délai si elle a été empêchée de l'observer et qu'elle est de ce fait exposée à un préjudice important et irréparable. Elle doit toutefois rendre vraisemblable que le défaut n'est imputable à aucune faute de sa part. Un empêchement subjectif suffit. La jurisprudence admettant que cette norme permet à l'opposant défaillant de demander la restitution du terme de comparution (arrêt du Tribunal fédéral 6B_360/2013 du 3 octobre 2013 consid. 3.3), il n'y a pas de raison de se montrer plus sévère à l'égard de l'opposant qui annonce son absence et demande le renvoi avant les débats. De même, la jurisprudence a déduit des garanties conventionnelles et constitutionnelles du droit de l'accusé à être jugé en sa présence que l'absence doit être considérée comme valablement excusée non seulement en cas de force majeure (impossibilité objective de comparaître), mais également en cas d'impossibilité subjective, due à des circonstances personnelles ou à une erreur non imputable au défaillant (ATF 127 I 213 consid. 3a).

Cette disposition consacre une fiction légale de retrait de l'opposition en cas de défaut injustifié, à l'instar de l'art. 355 al. 2 CPP, auquel elle correspond (ATF 142 IV 158 consid. 3.1 et 3.5). L’absence de l’intéressé doit dès lors clairement démontrer son désintérêt à la procédure, ce qui implique que le prévenu ait effectivement eu connaissance de la citation à comparaître, qu’il ait conscience des conséquences de sa non-apparition et qu’il renonce à ses droits en toute connaissance des règles juridiques. D’autre part, la fiction légale du retrait ne peut s’appliquer que si l’on peut déduire de bonne foi du défaut non excusé un désintérêt pour la suite de la procédure pénale (A. KUHN / Y. JEANNERET [éds], Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 2a ad art. 355).

La doctrine mentionne, comme motifs d'excuse, la maladie, le service militaire ou l'absence à l'étranger, le service civil ou un autre service public affectant la disponibilité de la personne convoquée, la maladie d'un enfant ou d'un proche parent dont la personne convoquée a la charge et pour les soins duquel elle ne trouve pas de remplaçant à brève échéance, la grève d'une compagnie aérienne, le décès très récent d'un proche parent ou d'autres situations d'exceptions, voire des engagements de la vie privée pris de longue date, avant la notification du mandat (vacances, voyage d'affaires) (A. KUHN / Y. JEANNERET [éds], op. cit., n. 4 ad art. 205; M. NIGGLI / M. HEER / H. WIPRÄCHTIGER, Schweizerische Strafprozessordnung / Schweizerische Jugendstrafprozessordnung, Basler Kommentar StPO/JStPO, Bâle 2011, n. 6 ad art. 205).

La personne convoquée doit spontanément présenter à l'autorité pénale les pièces justificatives qui étayent son empêchement. Sous peine de faire preuve de formalisme excessif, l’autorité lui permettra néanmoins de compléter ses motifs ou pièces justificatives si elle avait omis de tous les indiquer ou les réunir au moment de l’annonce de son empêchement (A. KUHN / Y. JEANNERET [éds], op.cit., n. 4-5 ad art. 205).

2.2.       En l'espèce, il n'est pas contesté que le recourant a fait défaut à l'audience du 20 mai 2025, alors que sa présence était exigée par le Tribunal de police, qui l'avait dûment rendu attentif, dans le mandat de comparution du 14 avril 2025, aux conséquences d'une absence non excusée.

Le recourant n'a produit aucun certificat médical susceptible d'attester son incapacité de se présenter à l'audience du 20 mai 2025, malgré sa lettre manuscrite précisant qu'un tel certificat serait transmis au plus vite. Il lui était pourtant loisible de le faire dans le délai de recours. En tant qu'elles ne sont corroborées par aucun élément au dossier, les seules déclarations du recourant sur son état de santé, recueillies par son avocate immédiatement après l'audience, ne permettent pas de retenir, même au stade de la vraisemblance, un motif d'empêchement de se présenter à l'audience précitée. Une incapacité à comparaître aurait en effet pu être constatée par le service médical de la prison, même postérieurement à l'audience prévue le matin, dans l'hypothèse alléguée où les symptômes seraient apparus au cours de la nuit. Sur ce point, la situation du recourant diffère des faits ayant donné lieu à l'arrêt ACPR/210/205 dont il se prévaut.

En outre, l'autorisation, accordée après l'audience par le recourant à son conseil, de le représenter pour les audiences à venir, ne permettait pas de passer outre la nécessité d'une comparution personnelle à l'audience du 20 mai 2025, quand bien même seules des questions juridiques, selon le recourant, devaient être examinées.

En définitive, le recourant a eu effectivement connaissance de la citation à comparaître, ainsi que des conséquences d'une non-comparution ; il a, malgré ce qui précède, renoncé à comparaître. Par la suite, après un entretien avec son avocate venue spontanément le voir à la prison, il a invoqué son état de santé, sans toutefois, à un quelconque moment, et malgré la possibilité de consulter le service médical de la prison, produire de pièce justificative. Un tel comportement dénote un désintérêt pour la procédure. Partant, l'absence du recourant à l'audience du 20 mai 2025 ne peut, au regard de la jurisprudence précitée et sans pièce justificative, être considérée comme valablement excusée.

Par conséquent, le Tribunal de police a retenu à juste titre que le recourant n'avait pas comparu, sans excuse, et a, dès lors, correctement appliqué la loi en jugeant que l'opposition devait être réputée retirée, ceci quand bien même son avocate aurait été présente à l'audience.

3.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.

4.             Au vu de l'issue du recours, la demande d'effet suspensif est sans objet.

5.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 700.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette la demande d'effet suspensif.

Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 700.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, au Tribunal de police, au Ministère public et au Service des contraventions.

Siégeant :

Madame Valérie LAUBER, présidente; Madame Françoise SAILLEN AGAD et Monsieur Vincent DELALOYE, juges; Monsieur Sandro COLUNI, greffier.

 

Le greffier :

Sandro COLUNI

 

La présidente :

Valérie LAUBER

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/8692/2025

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

20.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

605.00

Total

CHF

700.00