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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/5976/2024

ACPR/939/2024 du 13.12.2024 sur ONMMP/1783/2024 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : DIFFAMATION;CALOMNIE;HARCÈLEMENT SEXUEL(DROIT DU TRAVAIL)
Normes : CPP.310.al1; CP.173; CP.174

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/5976/2024 ACPR/939/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du vendredi 13 décembre 2024

 

Entre

A______, représenté par Me Steve ALDER, avocat, FONTANET & Associés, Grand-Rue 25, 1211 Genève 3,

recourant,

contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 23 avril 2024 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 6 mai 2024, A______ recourt contre l'ordonnance du 23 avril 2024, notifiée le 25 suivant, par laquelle le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur sa plainte pénale, déposée le 4 mars 2024 contre B______.

Le recourant conclut, sous suite des frais et dépens non chiffrés, à l'annulation de l'ordonnance querellée et au renvoi de la cause au Ministère public pour ouverture d'une instruction.

b. Le recourant a versé les sûretés de CHF 1'200.- qui lui étaient réclamées par la Direction de la procédure.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______ et B______ travaillaient au sein de C______ (ci-après : C______), le premier en qualité de chef de service D______ (ci-après : D______) et la seconde comme secrétaire.

b. Le 21 juin 2023, à la suite d'un courrier qu'elle avait rédigé récapitulant différents griefs à l'égard de sa hiérarchie – en particulier contre A______ – et de ses collègues, B______ a été reçue par la responsable des Ressources humaines du secrétariat général du département E______ (ci-après : E______), auquel C______ était rattaché. Elle a notamment expliqué avoir été heurtée par des images inadéquates et choquantes partagées sur un groupe WhatsApp réunissant l'ensemble des collaborateurs et collaboratrices du D______. Elle reprochait également à A______ de l'avoir "prise en grippe" et mise à l'écart.

c. Le 28 août 2023, A______ a été entendu par le directeur général de C______ et la responsable des Ressources humaines. Le 30 octobre 2023, il a établi une note de synthèse sur ses relations avec B______, admettant certains problèmes – liés entre autres à l'absentéisme de l'intéressée, à son manque de ponctualité, ses difficultés à s'intégrer à l'équipe en place et à respecter les règles, et son aversion pour l'autorité – auxquels il avait tenté de remédier avec bienveillance et compréhension, sans succès.

d. Le ______ 2023, B______, sous la plume de son conseil, a adressé au Groupe de confiance de l'État de Genève (ci-après : Groupe de confiance) une lettre intitulée "plainte pour harcèlement moral et sexuel au travail" et a demandé l'ouverture d'une investigation contre A______ en expliquant qu'"après avoir beaucoup réfléchi, [elle] n'avait pas d'autres solutions que de déposer la présente plainte pour harcèlement moral et harcèlement sexuel sur son lieu de travail".

Elle lui reprochait, en substance, de ne pas l'avoir prise au sérieux ni valorisée. A______ l'avait notamment accueillie le premier jour de son travail "d'une façon désagréable, en mentionnant d'entrée de cause, qu'il n'avait pas demandé à avoir une secrétaire supplémentaire". Il ne lui confiait pas suffisamment de tâches, lui faisait des reproches quant à ses pauses et ses timbrages, alors que le même traitement n'était pas réservé à d'autres collègues du service. Elle avait également le sentiment que, comme elle ne participait que rarement aux sorties entre collègues, A______, qui avait instauré un climat malsain "en voulant asseoir son autorité par un certain pouvoir de type patriarcal", s'était mis à "pratiquer une sorte de comportement punitif", "avec une pression psychologique intermittente mais toujours existante de manière sous-jacente", en contrôlant davantage ses tâches, "en essayant de trouver des failles", en lui interdisant de prendre des congés ou en adoptant une "attitude humiliante" à son endroit.

Par ailleurs, elle avait été heurtée par des images, respectivement messages envoyés sur le groupe WhatsApp par les employés, qui y échangeaient des plaisanteries "pour la plupart à caractère inapproprié", "en-dessous de la ceinture", "scabreuses, répétitives et discriminatoires" et transmettaient des "gags et images sordides, sexistes, à caractère pornographique, humiliants et honteux" "dénigrantes envers la femme, l'homme et les handicapés", et auxquelles A______, au lieu de faire preuve d'exemplarité en tant que supérieur hiérarchique, lui avait reproché de ne pas suffisamment participer. A______ lui avait également dit, via WhatsApp : "On peut plus travailler pour toi. Faut que tu changes de job. Mets toi à l'Ai. C'est plus possible".

Ne pouvant plus subir cette ambiance de travail, ces plaisanteries déplacées, sexistes et importunes, ainsi que l'attitude de son supérieur hiérarchique visant à la rabaisser au travail, elle avait demandé aux Ressources humaines de la protéger, ce qui avait abouti à l'entretien du 21 juin 2023. Or, depuis lors, la situation n'avait pas évolué, ce qui l'amenait "par conséquent et au vu de ces faits, [à déposer] la présente plainte pour harcèlement moral et harcèlement sexuel, afin que les atteintes portées à [sa] personnalité et à [sa] santé […] perpétrées par M. A______ […] soient traitées et reconnues".

À l'appui, elle a produit différentes pièces, dont les échanges d'e-mails avec A______ et la correspondance du groupe WhatsApp avec ses collègues.

e. Le 15 novembre 2023, le Groupe de confiance a transmis à A______ la demande d'ouverture d'information.

f. Par pli du 4 janvier 2024, adressé en copie à la responsable des Ressources humaines du E______, A______ a contesté les faits qui lui étaient reprochés, reprenant les explications développées dans sa synthèse du 30 octobre 2023. En particulier, B______ s'était absentée régulièrement depuis le début de son activité à C______ et avait toujours eu des problèmes de ponctualité et de respect des horaires. Dans ce contexte, "la charge de travail due aux nombreuses absences de B______ [s'était] reportée de facto sur les autres collaboratrices et collaborateurs du service ; plusieurs dossiers [avaient] ainsi été bloqués et [n'avaient] pu être résolus qu'avec retard". Elle avait également des problèmes relationnels avec ses collègues, respectivement sa hiérarchie. En effet, "elle se positionnait systématiquement en concurrence avec ses pairs et n'arrivait pas à collaborer avec d'autres collègues féminines". Elle était "difficilement gérable, procédurière et exploitait les failles du système" tout en ayant une attitude "complètement fermée, réfractaire et peu encline à la communication". Le groupe WhatsApp avait été créé par un collaborateur et avait toujours eu une vocation purement privée, tous les participants ayant décidé de leur propre chef de le rejoindre. Certains messages, respectivement photos envoyés pouvaient être inappropriés mais "ils ne visaient aucunement B______ personnellement, ni directement, ni indirectement".

g. Le 27 février 2024, A______ a écrit au directeur du E______, puisque B______ l'avait également dénoncé auprès du service des Ressources humaines de ce dernier. Étant donné qu'elle travaillait désormais au sein de ce service, il craignait qu'elle puisse avoir une influence sur le traitement de la cause et les éventuelles suites que ledit service pourrait envisager de donner à la dénonciation.

h. Le 4 mars 2024, A______ a déposé plainte pénale contre B______ des chefs de calomnie, voire diffamation et/ou injure.

En résumé, il lui reproche d'avoir porté atteinte à son honneur, en l'accusant sciemment de comportements constitutifs de harcèlement moral et sexuel, le faisant ainsi apparaître comme une personne méprisable à l'encontre du Groupe de confiance. S'il avait pu recadrer la mise en cause en raison notamment de la qualité de son travail, de ses absences et de ses retards, cela ne s'apparentait aucunement à du harcèlement moral. Il était toujours intervenu de manière professionnelle et courtoise à son égard, sans la traiter différemment de ses autres collègues. Il ne l'avait jamais harcelée sexuellement. Cette accusation grave était aussi fausse que scandaleuse car il n'y avait aucun élément, dans la dénonciation de B______, étayant tant soit peu les accusations de harcèlement sexuel qu'elle proférait, aucune description pouvant donner à penser qu'il se serait livré à de tels comportements à son endroit, que ce soit par des propos ou des gestes. Elle n'avait d'ailleurs pas mentionné d'actes de ce type dans son courrier adressé aux Ressources humaines du E______. B______ ne pouvait ignorer la fausseté de ses accusations et elle avait agi dans le but notamment d'amener le Groupe de confiance à ouvrir une procédure à son encontre. Il sollicitait, à titre de mesures d'instruction, l'audition de nombreuses personnes [qu'il a énumérées].

C. Dans l'ordonnance querellée, le Ministère public retient que les griefs de la mise en cause ne portaient pas atteinte à l'honneur de A______. Les propos litigieux concernaient pour l'essentiel son rôle de supérieur hiérarchique. Aucun des reproches formulés ne présentait une connotation sexuelle et avaient en plus été formulés dans le cadre d'une procédure ouverte auprès du Groupe de confiance, compétent pour traiter de ce type de problématique.

D. a. Dans son recours, A______ considère que les accusations litigieuses étaient très graves et excédaient la mesure admissible. La mise en cause avait agi intentionnellement, dans le but de porter atteinte à son honneur. Elle n'avait pas hésité à l'accuser – sans étayer ses propos – de harcèlement sexuel, soit d'un comportement fortement réprouvé, en sachant que cette accusation était infondée et encore moins démontrée. Compte tenu de la spécificité de la procédure menée par le Groupe de confiance, les Ressources humaines de C______, du E______ et du D______ avaient également été informées de ses accusations, ce qui ne pouvait pas être considéré comme étant un cercle restreint de personnes.

À l'appui, il produit notamment le procès-verbal de l'audition, le 4 avril 2024, de la responsable des Ressources humaines du E______ par le Groupe de confiance.

b. Dans ses observations, le Ministère public persiste dans les termes de l'ordonnance querellée.

c. Dans sa réplique, A______ relève que les observations du Ministère public n'appellent aucun commentaire particulier.

E. Le 15 août 2024, A______ a transmis à la Chambre de céans le rapport du Groupe de confiance du 7 précédent, aux termes duquel ladite autorité a constaté "une atteinte à la personnalité de sa part à l'encontre de Mme B______" en lien avec le message WhatsApp lui recommandant de se "mettre à l'AI", mais "ni harcèlement sexuel ni harcèlement psychologique", les accusations d'inégalité de traitement, de mise à l'écart, d'actes hostiles répétés ou de propos dénigrants n'ayant pas été démontrées.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner du plaignant qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             Le recourant reproche au Ministère public une constatation inexacte et erronée des faits.

Dès lors que la Chambre de céans jouit d'un plein pouvoir de cognition en droit et en fait (art. 393 al. 2 CPP; ATF 137 I 195 consid. 2.3.2), les éventuelles constatations incomplètes ou inexactes du Ministère public auront été corrigées dans l'état de fait établi ci-devant.

Partant, ce grief sera rejeté

3.             Le recourant reproche au Ministère public de ne pas être entré en matière sur sa plainte pénale. Dans la mesure où il n'invoque plus, dans son recours, l'art. 177 CP, la cause ne sera analysée qu'à l'aune des art. 173 CP et 174 CP, à l'exclusion de l'art. 177 CP.

3.1.       Aux termes de l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ne sont manifestement pas réunis.

Conformément à cette disposition, la non-entrée en matière est justifiée lorsque la situation est claire sur le plan factuel et juridique. Tel est le cas lorsque les faits visés ne sont manifestement pas punissables, faute, de manière certaine, de réaliser les éléments constitutifs d'une infraction. Au stade de la non-entrée en matière, on ne peut admettre que les éléments constitutifs d'une infraction ne sont manifestement pas réalisés que lorsqu'il n'existe pas de soupçon suffisant conduisant à considérer un comportement punissable ou lorsqu'un éventuel soupçon initial s'est entièrement dissipé. En revanche, si le rapport de police, la dénonciation ou les propres constatations du ministère public amènent à retenir l'existence d'un soupçon suffisant, il incombe en principe à ce dernier d'ouvrir une instruction (art. 309 al. 1 let. a CPP). Cela implique que les indices de la commission d'une infraction soient importants et de nature concrète, ce qui n'est pas le cas de rumeurs ou de suppositions. Le soupçon initial doit reposer sur une base factuelle plausible, laissant apparaître la possibilité concrète qu'une infraction ait été commise (ATF 141 IV 87 consid. 1.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 6B_196/2020 du 14 octobre 2020 consid. 3.1). Dans le doute, lorsque les conditions d'une non-entrée en matière ne sont pas réalisées avec une certitude absolue, l'instruction doit être ouverte (ATF 143 IV 241 consid. 2.2.1; ATF 138 IV 86 consid. 4.1).

3.2.1. Selon l'art. 173 ch. 1 CP, se rend coupable de diffamation quiconque, en s'adressant à un tiers, accuse une personne ou jette sur elle le soupçon de tenir une conduite contraire à l'honneur, ou de tout autre fait propre à porter atteinte à sa considération, ainsi que celui qui aura propagé une telle accusation ou un tel soupçon.

La calomnie (art. 174 CP) est une forme qualifiée de diffamation, dont elle se distingue par le fait que les allégations propagées sont fausses et que l'auteur doit avoir eu connaissance de la fausseté de ses allégations (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1254/2019 du 16 mars 2020 consid. 6.1).

3.2.2. L'honneur protégé par ces dispositions est conçu de façon générale comme un droit au respect, qui est lésé par toute assertion propre à exposer la personne visée au mépris en sa qualité d'homme. La réputation relative à l'activité professionnelle n'est pas pénalement protégée; il en va ainsi des critiques qui visent la personne de métier, même si elles sont de nature à blesser ou à discréditer. En revanche, il y a atteinte à l'honneur, même dans ce domaine, si la commission d'une infraction pénale est évoquée (ATF 145 IV 462 consid. 4.2.2).

Pour apprécier si une déclaration est attentatoire à l'honneur, il faut se fonder non pas sur le sens que lui donne la personne visée, mais sur une interprétation objective selon la signification qu'un destinataire non prévenu doit, dans les circonstances d'espèce, lui attribuer (ATF 137 IV 313 consid. 2.1.3).

Un texte doit être analysé non seulement en fonction des expressions utilisées, prises séparément, mais aussi selon le sens général qui se dégage du texte dans son ensemble (ATF 145 IV 462 consid. 4.2.3; 137 IV 313 consid. 2.1.3). Il doit également être tenu compte des titres et des intertitres, dont la typographie met en évidence le texte et qui frappent ainsi l'attention du lecteur. Ils sont sensés résumer l'essentiel du contenu du texte mais peuvent induire en erreur des lecteurs qui ne lisent que ceux-ci si leur contenu ne correspond pas à celui de l'article. Il convient de se placer du point de vue du lecteur moyen et de retenir l'impression que les allégations ont faite sur une personne non prévenue, dotée de connaissances moyennes et d'une pleine capacité de jugement (ATF 137 IV 313, consid. 2.1.3).

3.2.3. Pour qu'il y ait diffamation ou calomnie, il faut encore que le prévenu s'adresse à un tiers. Est en principe considérée comme telle toute personne autre que l'auteur et l'individu visé par les propos litigieux (ATF 145 IV 462, consid. 4.3.3).

Des déclarations objectivement attentatoires à l'honneur peuvent toutefois être justifiées par le devoir d'alléguer des faits dans le cadre d'une procédure (ATF 135 IV 177 consid. 4). L'art. 14 CP dispose en effet que celui qui agit comme la loi l'ordonne ou l'autorise se comporte de manière licite, même si l'acte est punissable en vertu du code pénal ou d'une autre loi. La licéité de l'acte est, en tous les cas, subordonnée à la condition qu'il soit proportionné à son but (ATF 107 IV 84 consid. 4; arrêts du Tribunal fédéral 6B_960/2017 du 2 mai 2018 consid. 3.2; 6B_507/2017 du 8 septembre 2017 consid. 3.4). Ainsi, tant la partie que son avocat peuvent se prévaloir de l'art. 14 CP à condition de s'être exprimés de bonne foi, de s'être limités à ce qui est nécessaire et pertinent et d'avoir présenté comme telles de simples suppositions (ATF 131 IV 154 consid. 1.3.1; 123 IV 97 consid. 2c/aa; 118 IV 248 consid. 2c et d; 116 IV 211 consid. 4a).

3.3. À teneur de l'art. 1 al. 1 du Règlement relatif à la protection de la personnalité à l'État de Genève du 12 octobre 2012 (RPPers; B 5 05.10), le Conseil d'État veille à la protection de la personnalité de tous ses collaborateurs dans le cadre de leur activité professionnelle. À cette fin, il a instauré un Groupe de confiance, dont la mission principale consiste à traiter les demandes des personnes qui font appel à lui et à contribuer à ce que cessent les atteintes constatées, d'entente avec la hiérarchie (art. 4 al. 1 et 5 al. 3 RPPers).

Le Groupe de confiance est chargé de la mise en œuvre du dispositif de protection de la personnalité prévu par le RPPers (art. 5 al. 1 RPPers). Sur requête du membre du personnel qui, dans sa relation du travail avec d'autres personnes, estime être atteint dans sa personnalité, le Groupe de confiance peut procéder à des démarches informelles et ouvrir une procédure d'investigation, qui a pour but d'établir les faits et de déterminer si les éléments constitutifs d'une atteinte à la personnalité sont réalisés ou non (art. 19 et 20 al. 1 RPPers). Avant d'ouvrir l'investigation, il peut procéder à une enquête préliminaire du cas et entendre les parties, ainsi que les témoins qu'il juge utiles (art. 22 cum 26 al. 1 RPPers). En vertu de l'art. 23 al. 1 RPPers, le Groupe de confiance notifie à l'autorité d'engagement une copie de la demande et des éventuelles pièces annexées (art. 23 al. 1 RPPers).

3.4. En l'espèce, dans la mesure où la mise en cause accusait le recourant, dans le titre de sa lettre du ______ 2023, de comportements pouvant être constitutifs de "harcèlement moral et sexuel", ses propos pourraient a priori être de nature à jeter sur lui le soupçon d'une conduite contraire à l'honneur et porter atteinte à sa considération au sens de l'art. 173 CP.

Cela étant, concernant le harcèlement moral, les critiques de la mise en cause concernent pour l'essentiel les compétences professionnelles du recourant, en particulier son rôle de supérieur hiérarchique. L'intéressé semble d'ailleurs l'avoir bien compris dès lors qu'il dit dans sa plainte "qu'à la rigueur il pouvait tolérer d'être accusé d'harcèlement moral". S'agissant du harcèlement sexuel, aucun reproche ne reprend cette accusation, dans le corps de son texte, ni même ne laisse à penser que le recourant aurait pu adopter un comportement inapproprié à son égard. Seuls sont évoqués des images, respectivement des messages à connotation sexuelle qui auraient pu être envoyés sur le groupe WhatsApp créé par les collaborateurs du service. Il n'apparaît toutefois pas que la mise en cause les aurait imputés au recourant, ni qu'elle aurait prétendu qu'ils la visaient personnellement. On comprend de ses griefs qu'elle s'est sentie heurtée par le caractère "en-dessous de la ceinture" desdits messages et images et reprochait au recourant de n'avoir pas régulé le contenu du groupe WhatsApp et, ainsi, protégé sa personnalité. Il apparaît ainsi que les termes de "harcèlement sexuel" qu'elle a utilisés dans le titre de sa lettre se réfèrent à l'atmosphère suscitée selon elle par ces messages, et non pas à un comportement inapproprié, voire pénal, du recourant à son égard, et qu'elle a voulu souligner des dysfonctionnements au sein du service, sans souhaiter exposer le recourant au mépris en sa qualité d'être humain. Afin de démontrer que ses propos étaient conformes à la réalité et/ou qu'elle les avait tenus de bonne foi, la mise en cause a produit différentes pièces, susceptibles d'étayer ses allégations, qui laissent apparaitre qu'elle s'est limitée à mentionner dans sa plainte ce qui était nécessaire et pertinent. L'on ne distingue dès lors pas dans ses démarches de volonté de porter atteinte au recourant, mais plutôt de faire cesser des comportements qu'elle percevait de bonne foi comme inadéquats, de sorte qu'une intention de nuire fait manifestement défaut.

À cela s'ajoute que les propos dénoncés n'ont été portés qu'à la connaissance des membres du Groupe de confiance et des Ressources humaines de C______, du E______ et du D______, dont le travail consiste précisément à traiter et évaluer ce type de problématique. Ils étaient donc parfaitement informés et conscients des circonstances particulières dans lesquelles les allégations étaient formulées et en mesure de prendre du recul par rapport à celles-ci. Contrairement à ce que prétend le recourant, aucun élément ne permet de retenir que l'écrit litigieux aurait été transmis à d'autres tiers, étant précisé que les personnes entendues en qualité de témoins dans le cadre de la procédure d'investigation du Groupe de confiance sont soumises à une obligation de secret eu égard à leur qualité de fonctionnaire (art. 320 CP). La diffusion paraît ainsi mesurée et confidentielle.

Par conséquent, compte tenu des circonstances, de l'impression d'ensemble qui se dégage de la lettre du ______ 2023 et du cercle restreint auquel elle était destinée, c'est à juste titre que le Ministère public a considéré qu'il n'existait pas de soupçons suffisant de la commission d'infractions contre l'honneur et n'est pas entré en matière sur les faits dénoncés.

Les auditions sollicitées par le recourant dans sa plainte ne sont, à cet égard, pas propres à modifier cette solution.

4.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.

5.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 1'200.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

6.             Corrélativement, aucun dépens ne lui sera alloué (ATF 144 IV 207 consid. 1.8.2).

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à
CHF 1'200.-.

Dit que ce montant sera prélevé sur les sûretés versées.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Françoise SAILLEN AGAD, juges; Madame Olivia SOBRINO, greffière.

 

La greffière :

Olivia SOBRINO

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/5976/2024

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

1'115.00

- demande sur récusation (let. b)

CHF

Total

CHF

1'200.00