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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/7123/2022

ACPR/647/2022 du 23.09.2022 sur ONMMP/1697/2022 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : ORDONNANCE DE NON-ENTRÉE EN MATIÈRE;AGRESSION;MENACE(DROIT PÉNAL)
Normes : CPP.310; CP.180

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/7123/2022 ACPR/647/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du vendredi 23 septembre 2022

 

Entre

A______, domiciliée ______[GE], comparant en personne,

recourante,

contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 23 mai 2022 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. Par acte expédié le 3 juin 2022, A______ recourt contre l'ordonnance du 23  mai 2022, communiquée par pli simple, par laquelle le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur sa plainte du 4 février 2022.

La recourante, sans prendre de conclusion formelle, conteste l'ordonnance querellée.

b. Par courrier expédié le 21 juin 2022, elle demande à bénéficier de l'assistance juridique pour être exonérée des frais de procédure.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Le 4 février 2022, A______ a déposé plainte pénale contre la concierge de son immeuble, B______, avec laquelle elle était en conflit depuis 2016.

Le 2 février 2022, alors qu'elle descendait les escaliers de l'immeuble avec sa chienne, la concierge avait dévié sa serpillère sur l'animal. Elle lui avait par ailleurs asséné un coup à l'abdomen, l'avait frappée à la main et à la cuisse gauches – sans la blesser –, et avait renversé son seau d'eau dans sa direction.

B______ l'avait déjà agressée le 14 mars 2020, avant d'attaquer sa chienne à deux reprises, tout d'abord le 26 juillet 2021 en tapant sur une vitre et en claquant sur une porte métallique dans le but de l'effrayer, puis, début janvier 2022, en lui jetant un objet de nettoyage dans sa direction, ce qu'un voisin ayant assisté à la scène pouvait confirmer. En outre, elle salissait son paillasson, agressait d'autres locataires et mettait régulièrement des saletés dans leurs boîtes aux lettres.

b. à l'appui de sa plainte, A______ a produit une clé USB contenant diverses vidéos filmées au moyen de son téléphone portable. Sur la vidéo du 2 février 2022, on voit B______ effectuer un geste avec sa serpillère vers la chienne de la plaignante, ce qui l'effraie et lui fait accélérer le pas. à ce moment-là, A______, téléphone à la main, s'approche de B______, qui lève le bras dans sa direction en disant "je vais te donner un coup". Ensuite, A______ descend les escaliers et on entend un bruit d'eau qui tombe par terre. Sur les autres vidéos, on voit la plaignante rentrer et sortir de chez elle, téléphone à la main, et l'on entend des bruits de claquement de porte.

c. Entendue par la police le 21 février 2022, B______ a nié les faits reprochés, précisant que la plaignante cherchait constamment à la provoquer en la filmant avec son téléphone.

C. Dans sa décision querellée, le Ministère public a, à titre liminaire, admis le caractère exploitable des vidéos produites, dans la mesure où, d'une part, les prises de vues avaient été faites dans un lieu ouvert à tous les locataires et, d'autre part, la mise en cause se savait filmée.

Sur le fond, il n'y avait pas de prévention pénale suffisante dès lors que – outre le caractère contradictoire des déclarations des parties – les images produites ne permettaient pas d'accréditer l'une ou l'autre version des faits. Par ailleurs, la plaignante n'avait pas la qualité pour déposer plainte pénale pour des dommages subis par des tiers.

D. a. Dans son recours, A______ fait valoir que, contrairement à ce qu'avait retenu le Ministère public, les images produites permettaient non seulement d'entendre le coup de B______, mais également une déclaration vocale disant "je te donne un coup" (sic), ainsi que le bruit de l'eau versée sur elle. Elle réitère pour le surplus les faits relatés dans sa plainte, précisant avoir fourni des explications détaillées à la police quant à l'agression du 14 mars 2020. Elle fait aussi état de nouvelles agressions contre elle et sa chienne de la part de la mise en cause.

b. Par courrier du 12 septembre 2022, elle expose que le 5 précédent, B______ avait bloqué la moitié du passage avec son chariot de nettoyage, l'avait poussée avec son corps, lui avait passé sa serpillère mouillée et sale sur sa chaussure en toile et l'avait insultée. B______ s'amusait également, avec une autre voisine qui venait d'emménager, à lancer des cailloux sur son store, ce qui faisait du bruit ; elle claquait aussi ses outils de nettoyage contre les portes et murs, ce qui faisait "un bruit énorme".

 

EN DROIT :

1.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

2.             2.1. Le recours a été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP) – les formalités de notification (art. 85 al. 2 CPP) n'ayant pas été observées –, concerne une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émane de la plaignante (art. 104 al. 1 let. b CPP), qui dispose d'un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP), s'agissant des faits prétendument commis à son encontre.

En revanche, la recourante ne saurait se plaindre des agissements perpétrés à l'encontre d'autres locataires, dès lors qu'elle n'est pas titulaire du bien juridiquement protégé par les dispositions légales invoquées. Il s'ensuit que de tels griefs sont irrecevables.

2.2. Bien que ne contenant pas de conclusions formelles, la motivation du recours est suffisante s'agissant d'un acte rédigé par un plaideur en personne (art. 385 al. 1 CPP).

3.             à titre liminaire, la Chambre de céans constate que la recourante ne revient pas sur les griefs qu'elle soulevait dans sa plainte en relation avec "l'agression" sur sa chienne avec la serpillère du 2 février 2022, ainsi que sur "l'agression" de début janvier 2022. Partant, leur sort est scellé par l'ordonnance rendue.

Il n'y a pas non plus à entrer en matière sur des faits qui n'ont pas fait l'objet de la décision querellée. Ainsi en va-t-il des nouvelles agressions mentionnées dans le recours et des faits survenus postérieurement au dépôt du recours et exposés dans le pli du 12 septembre dernier.

4.             La recourante reproche au Ministère public de ne pas être entré en matière sur sa plainte.

4.1. Selon l'art. 310 al. 1 let. b CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière lorsqu'il ressort de la plainte qu'il existe des empêchements de procéder, par exemple lorsque le délai pour déposer plainte prévu par l'art. 31 CP n'a pas été respecté (arrêt du Tribunal fédéral 6B_848 du 4 décembre 2018 consid. 1.5).

Aux termes de l'art. 31 CP, le droit de porter plainte se prescrit par trois mois. Le délai court du jour où l'ayant droit a connu l'auteur de l'infraction.

4.2. Selon l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le procureur rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière, lorsqu'il ressort de la plainte que les éléments constitutifs d'une infraction ne sont pas réalisés. Cette condition s'interprète à la lumière de la maxime "in dubio pro duriore", selon laquelle une non-entrée en matière ne peut généralement être prononcée que s'il apparaît clairement que les faits ne sont pas punissables. Le ministère public et l'autorité de recours disposent, dans ce cadre, d'un pouvoir d'appréciation (ATF 143 IV 241 consid. 2.2.1 p. 243; arrêt du Tribunal fédéral du 23 septembre 2021 consid. 4.1.1).

4.3. Le Code pénal réprime, sur plainte, le comportement de celui qui : se sera livré sur une personne à des voies de fait qui n'auront causé ni lésion corporelle ni atteinte à la santé (art. 126 CP) ; aura endommagé une chose appartenant à autrui (art.  144  CP); aura alarmé ou effrayé une personne par une menace grave (art.  180  CP).

Sur le plan objectif, l'art. 180 CP suppose la réalisation de deux conditions. Premièrement, il faut que l'auteur ait émis une menace grave, soit une menace objectivement de nature à alarmer ou à effrayer la victime. On tient compte de la réaction qu'aurait une personne raisonnable, dotée d'une résistance psychologique plus ou moins normale, face à une situation identique (ATF 122 IV 97 consid. 2b p.  100 ; ATF 99 IV 212 consid. 1a p. 215 ss; arrêt du Tribunal fédéral 6B_578/2016 du 19 août 2016 consid. 2.1). L'exigence d'une menace grave doit conduire à exclure la punissabilité lorsque le préjudice évoqué apparaît objectivement d'une importance trop limitée pour justifier la répression pénale. En second lieu, il faut que la victime ait été effectivement alarmée ou effrayée, peu importe que les menaces lui aient été rapportées de manière indirecte par un tiers. Elle doit craindre que le préjudice annoncé se réalise (arrêts du Tribunal fédéral 6B_578/2016 du 19 août 2016 consid.  2.1 ; 6B_871/2014 du 24 août 2015 consid. 2.2.2 ; 6B_820/2011 du 5 mars 2012 consid. 3).

4.4.1. En l'espèce, la recourante n'a agi que le 4 février 2022, s'agissant de l'agression du 14 mars 2020 et de l'attaque contre sa chienne du 26 juillet 2021. Elle a donc laissé s'écouler plus de trois mois après la connaissance des faits et de leur auteur, de sorte que sa plainte est tardive.

La non-entrée en matière sur ces points sera ainsi confirmée, par substitution de motifs.

4.4.2. L'altercation du 2 février 2022 est confirmée par les éléments du dossier. Cependant, les versions des parties sont contradictoires quant à son déroulement. Dans ce contexte, la recourante allègue que la mise en cause lui aurait donné des coups à l'abdomen, à la cuisse et à la main, et, aurait versé un seau d'eau dans sa direction. Force est toutefois de constater que, hormis ses déclarations, le dossier ne recèle pas d'indice concret venant étayer les agressions alléguées. En effet, les images visionnées permettent tout au plus de retenir que la mise en cause aurait levé le bras en direction de la recourante, d'une part, et d'entendre un bruit d'eau tombant par terre, d'autre part.

On entend certes la mise en cause dire à la recourante "je vais te donner un coup". Force est toutefois de constater que – indépendamment du sens à attribuer à ces paroles – la recourante n'a pas soutenu, ni dans sa plainte ni dans son recours, avoir été alarmée ou effrayée par ces propos, de sorte qu'un élément constitutif de l'infraction de menaces (art. 180 CP) fait défaut.

Ces propos ne viennent par ailleurs pas confirmer qu'un coup avait effectivement été donné.

Enfin, la mise en cause a contesté les déprédations sur le paillasson de la recourante et il n'existe aucun élément dans la procédure permettant de corroborer la version de cette dernière. Aucun acte d'enquête complémentaire ne semble pouvoir être raisonnablement entrepris pour étayer ses accusations, la recourante n'en proposant du reste aucun.

Il résulte de ce qui précède qu'il n'existe pas de prévention pénale suffisante à l'encontre de la mise en cause pour les faits dénoncés. C'est donc à bon droit que le Ministère public n'est pas entré en matière sur la plainte de la recourante à ce propos.

5. La recourante demande à être mise au bénéfice de l'assistance judiciaire afin d'être dispensée des frais de procédure.

5.1. à teneur de l'art. 136 al. 1 CPP, la Direction de la procédure accorde entièrement ou partiellement l'assistance judiciaire à la partie plaignante pour lui permettre de faire valoir ses prétentions civiles lorsqu'elle est indigente (let. a) et que l'action civile ne paraît pas vouée à l'échec (let. b). L'assistance judiciaire comprend, notamment, l'exonération des frais de procédure (art. 136 al. 2 let. b CPP).

La cause du plaignant ne doit pas être dénuée de toute chance de succès. L'assistance judiciaire peut donc être refusée lorsqu'il apparaît d'emblée que la démarche est manifestement irrecevable, que la position du requérant est juridiquement infondée ou que la procédure pénale est vouée à l'échec (arrêts du Tribunal fédéral 1B_173/2014 du 17 juillet 2014 consid. 3.1.1 et 1B_254/2013 du 27 septembre 2013 consid. 2.1.1 et les références citées).

5.2. En l'occurrence, quand bien même la recourante semble indigente, il a été jugé supra que ses griefs étaient, d'emblée, juridiquement infondés.

La requête d'assistance judiciaire ne peut donc qu'être rejetée.

6. La recourante, qui succombe, supportera les frais envers l'état, arrêtés en totalité à CHF 500.- pour tenir compte de sa situation financière (art. 428 al. 1 CPP).

* * * * *

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Rejette le recours.

Rejette la demande d'assistance judiciaire.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, fixés en totalité à CHF  500.-.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, à la recourante et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Daniela CHIABUDINI, juges; Madame Arbenita VESELI, greffière.

 

La greffière :

Arbenita VESELI

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/7123/2022

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

415.00

-

CHF

Total (Pour calculer : cliquer avec bouton de droite sur le montant total puis sur « mettre à jour les champs » ou cliquer sur le montant total et sur la touche F9)

CHF

500.00