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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/11309/2022

ACPR/471/2022 du 06.07.2022 sur OTMC/1839/2022 ( TMC ) , REJETE

Descripteurs : DÉTENTION PROVISOIRE;RISQUE DE COLLUSION
Normes : CPP.221

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/11309/2022 ACPR/471/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 6 juillet 2022

 

Entre

A______, actuellement détenu à la prison C______, comparant par Me B______, avocat, place ______, Genève,

recourant,

 

contre l'ordonnance de mise en détention provisoire rendue le 5 juin 2022 par le Tribunal des mesures de contrainte,

 

et

LE TRIBUNAL DES MESURES DE CONTRAINTE, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève - case postale 3715, 1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A.           Par acte déposé le 15 juin 2022, A______ recourt contre l'ordonnance du 5 juin 2022, notifiée sur-le-champ à l'audience, par laquelle le Tribunal des mesures de contrainte (ci-après : TMC) l'a mis en détention provisoire jusqu'au 2 septembre 2022.

Le recourant conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de ladite ordonnance et à sa mise en liberté immédiate, moyennant le cas échéant toute mesure de substitution utile.

B.            Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. A______ a été arrêté le 2 juin 2022.

Il est soupçonné de rixe (art. 133 CP) pour avoir, à Genève, le 22 mai 2022, aux environs de 00h20, dans l'établissement "D______", sis rue 1______, pris part activement à une altercation physique impliquant à tout le moins trois personnes appartenant à deux bandes de motards, soit la bande "E______", d'une part, dont il est membre, et la bande "F______", d'autre part, étant précisé qu'au cours de cette altercation, plusieurs coups de feu ont été tirés et une balle a traversé le testicule droit du précité ainsi que son muscle ischio-jambier droit, le blessant de la sorte.

b. Selon les premières investigations de la police, corroborées par les images des caméras de vidéosurveillance de l'établissement, l'affrontement a mis aux prises G______ et H______ ainsi qu'un troisième individu non identifié, appartenant aux "F______", d'une part, et le prévenu et I______, membres des "E______", d'autre part. Quatre coups de feu ont été tirés. G______ est soupçonné d'avoir tiré les deux premiers et I______ les deux autres. H______ est soupçonné d'avoir fait usage d'un spray au poivre notamment à l'encontre du prévenu, lequel est soupçonné d'avoir alors "foncé dans le tas" et lancé une chaise en direction de H______ et de G______.

c. Auditionné par la police le 2 juin 2022 puis par le Ministère public le lendemain, A______ a déclaré en substance avoir voulu boire un verre à la rue de l'1______ avec d'autres membres des "E______". Après avoir repéré des "F______" dans le bar, il était entré dans celui-ci dans l'intention de leur parler. Il s'était alors fait sprayer le visage et les yeux avec un gel irritant par un des membres de ce groupe, avait fait un mouvement de recul, puis, énervé, avait "foncé dans le tas", avait poussé une chaise en direction de la personne lui ayant sprayé le visage, avait lancé la chaise, avait entendu quatre coups de feu, avait été touché par un projectile au niveau de l'entrejambe, avait quitté le bar et avait marché le plus rapidement possible afin de se mettre à l'abri, n'ayant pas remarqué que son ami I______ avait une arme à feu et avait tiré.

Informé du fait que les images de vidéosurveillance le montraient entrer une première fois dans l'établissement avant d'en ressortir puis d'y entrer à nouveau en compagnie d'un autre membre des "E______", le prévenu a répondu avoir été sprayé et déstabilisé, raison pour laquelle il était retourné en arrière. Il ignorait combien de ses "frères" étaient entrés avec lui dans le bar la seconde fois. Il soutenait n'y être entré qu'une fois.

d. Le prévenu est âgé de 50 ans, ressortissant français, divorcé, père d'un fils de neuf ans et domicilié en Suisse avec sa compagne. Il a déclaré avoir suivi sa scolarité en Suisse, n'avoir pas terminé son apprentissage et être ensuite parti faire l'armée en France. À la suite d'un accident de travail, il était à l'AI. Il avait été condamné le 6 janvier 2015 par le Ministère public de Genève à une peine pécuniaire de 80 jours-amende à CHF 30.- pour violation grave des règles de la circulation routière.

e. Devant le TMC, le prévenu a contesté tous risques de collusion, fuite et réitération. Il était une victime et avait collaboré. Il vivait en Suisse depuis plus de 40 ans. Son seul "épisode français" était son service militaire obligatoire en France. Il s'occupait seul de son fils qui avait besoin de lui et était déscolarisé à la suite de problèmes comportementaux à l'école.

C.            Dans son ordonnance querellée, le TMC relève que les charges sont suffisantes pour justifier la mise en détention du prévenu, au vu des constatations de la police, des images de vidéosurveillance, qui montrent que le prévenu a pris une part active à l'altercation, et des déclarations de ce dernier, quand bien même il affirme n'avoir eu aucune intention de se rendre dans le bar dans lequel se trouvaient les "F______" pour en découdre avec eux.

Si le prévenu était aussi une victime, eu égard à la blessure subie et au fait qu'il s'était fait asperger de gaz lacrymogène, il avait également persisté dans ses agissements alors que dans un premier temps il s'était éloigné de la bagarre.

Les évènements en amont de la rixe avaient aussi leur importance et devraient être instruits pour déterminer les responsabilités de chacun, la version de vouloir se rendre dans un bar pour boire un verre avec des camarades et la rencontre fortuite avec les "F______" étant peu crédible en l'état au vu du déroulement des faits.

L'instruction ne faisait que commencer s'agissant de déterminer les personnes présentes et le rôle de chacun.

Le risque de fuite était ténu, nonobstant la nationalité française du prévenu, celui-ci ayant des attaches avec Genève. À terme, ce risque pourrait être pallié par des mesures de substitution.

Il existait un risque de collusion important avec les autres personnes ayant participé à l'altercation du 22 mai 2022, que ce soit avec les "frères" des "E______" du prévenu ou éventuellement avec ses adversaires des "F______", avec lesquels il devra être confronté; il convenait d'éviter qu'il ne puisse entrer en contact avec eux, sous peine de compromettre l'instruction et la recherche de la vérité. Ce risque existait également avec des tiers témoins qu'il s'agira d'identifier. Le simple engagement du prévenu, voire l'assignation à domicile, ne suffiraient pas à pallier ce risque en l'état au vu des enjeux pour lui des déclarations des tiers et coprévenus.

Il existait enfin un risque concret de réitération sous forme de représailles du prévenu à l'endroit d'un ou de plusieurs membres des "F______" au vu des circonstances des faits instruits dans la présente cause et du code d'honneur du prévenu.

Aucune mesure de substitution n'était susceptible, à ce stade, d'atteindre les mêmes buts que la détention au vu des risques ainsi retenus.

La durée de la mise en détention provisoire ordonnée était proportionnée, au vu des faits reprochés au prévenu et de la peine concrètement encourue en cas de condamnation.

Enfin, le service médical de la prison saurait considérer les nécessités de soins du prévenu.

D.           a. À l'appui de son recours, A______ maintient qu'alors qu'il pénétrait dans l'établissement sans arme et sans le moindre geste menaçant, il avait été agressé par un individu l'arrosant de gaz ou de gel lacrymogène, ce qui l'avait amené, après une réaction de repli, à se ruer sur son agresseur "dans ce que l'on pourrait, au pire, qualifier d'état excusable d'excitation ou de saisissement". La version policière du déroulement des faits omettait de relever le rôle essentiel et déterminant joué par cet individu dans le déclenchement des hostilités. Après avoir été "gazé", il avait réagi dans un laps de temps extrêmement bref, sans prendre le temps de la réflexion. Il était une victime dans cette affaire. Les bandes de vidéosurveillance étaient parlantes.

Le risque de fuite était exclu, étant précisé qu'il s'était spontanément annoncé à la police, par l'intermédiaire de son conseil, pour y être entendu; il aurait eu amplement le temps de fuir après les faits. Il n'existait aucun risque de récidive, sous l'angle notamment de représailles, sauf à placer en détention tous les membres des "E______" en Suisse et à l'étranger. Quant au risque de collusion, il avait dit la vérité et ses déclarations étaient corroborées par les images de vidéosurveillance. Enfin, ses deux agresseurs avaient été arrêtés. Il était prêt, le cas échéant, à se soumettre à des mesures de substitution.

b. Dans ses observations, le Ministère public conclut au rejet du recours, sous suite de frais. Les charges étaient suffisantes, le prévenu étant soupçonné d'avoir pris activement part à l'altercation. Sa version n'était pas plus crédible que celle constatée par la police dans son rapport de renseignements du 27 mai 2022 après visionnement des bandes de vidéosurveillance. S'il était aussi une victime, il fallait retenir, à l'instar du TMC, qu'il avait persisté dans ses agissements alors que dans un premier temps, il s'était éloigné de la bagarre. L'instruction, qui ne faisait que commencer, avait pour tâche d'identifier tous les participants à l'altercation, de comprendre le contexte et d'établir les responsabilités de chacun, les images de la vidéosurveillance n'étant qu'un élément parmi d'autres. Que le prévenu envisageât de plaider la légitime défense ne lui était d'aucun secours à ce stade de la procédure.

Bien que ténu, le risque de fuite existait, étant précisé que ce n'était que le 31 mai 2022 que le prévenu avait pris contact avec la justice pour signaler qu'il avait été blessé lors de l'altercation. Depuis lors, il revêtait la qualité de prévenu. Un déménagement de celui-ci en France n'était par ailleurs pas exclu, eu égard à la situation de son fils.

Le risque de collusion avec les personnes ayant participé à l'altercation subsistait, étant précisé qu'une audience de confrontation était agendée au 29 juin 2022. À cela s'ajoutait un risque de collusion avec des tiers témoins à identifier, d'autant que l'altercation n'impliquait pas seulement les quatre prévenus actuellement en détention mais également d'autres membres des "F______" et des "E______", dont le prévenu n'avait pas voulu donner l'identité à la police. La police était en train de procéder à un important travail d'identification afin de permettre l'interpellation et l'audition desdites personnes. Contrairement à ce qu'affirmait le prévenu, les faits n'avaient pas été filmés dans leur intégralité et il conviendra de déterminer ce qui s'était passé en amont, et en particulier qui avait informé les "E______" de la présence des "F______" à "D______" et quel était le but du déplacement des membres des "E______" à la rue de l'1______, le cas échéant de déterminer si les autres membres des "E______" étaient armés. Certes, le prévenu avait eu douze jours pour contacter ses "frères" avant son interpellation mais rien n'indiquait qu'il ne cherchera pas à les contacter à nouveau dans la mesure où, après la confrontation, il disposera d'informations complémentaires sur la procédure.

Un risque de réitération sous forme de représailles était sérieux et concret, que ce soit de la part du prévenu ou d'un de ses "frères" des "E______" à l'endroit d'un ou plusieurs membres des "F______", ou vice-versa. La détention provisoire de l'intéressé était de nature à limiter ce risque dès lors qu'il connaissait l'identité des autres personnes ayant participé à l'altercation.

c. Le TMC maintient les termes de son ordonnance sans autre remarque.

d. Le prévenu réplique. H______ avait déclenché le début des hostilités en le sprayant. Il s'était défendu et G______ avait tiré, le blessant sérieusement. Le rapport de police omettait de préciser que H______ avait joué un rôle déterminant dans le déclenchement des hostilités. Quand bien même il aurait eu l'intention d'en découdre avec les "F______", pourquoi ces derniers l'attendaient-ils dans un café "les armes à la main" et pourquoi l'avaient-il agressé alors qu'il n'avait même pas franchi le seuil de l'établissement ?

E. a. Le 29 juin 2022 s'est tenue l'audience de confrontation des quatre prévenus devant le Ministère public.

En substance, I______ a déclaré qu'alors qu'il était au Club House des E______, quelqu'un avait reçu un appel téléphonique disant qu'il y avait des F______ à l'"D______". Plusieurs membres avaient décidé de s'y rendre pour leur demander de ne pas porter leurs couleurs à Genève. Il y était allé en voiture avec A______, les autres membres de la bande devant les rejoindre sur place. Au total, ils étaient cinq ou six. I______ était entré dans l'établissement derrière A______. Ce dernier avait été sprayé alors qu'il s'approchait des "F______". Lorsqu'il avait vu G______ pointer son arme et faire feu sur lui, il avait sorti son arme, craignant pour sa vie et celle de son "frère". Il a contesté toute menace de sa part et ignorait pourquoi H______ affirmait qu'il en avait après lui. Il était à visage découvert. A______ a indiqué avoir un masque covid.

A______, sur question de son conseil, a indiqué qu'il était aux bords du lac avec sa compagne lorsqu'on l'avait invité à rejoindre les "E______" pour boire un verre. On ne lui avait rien dit d'autre.

H______ a confirmé avoir, préalablement à l'altercation, vu dans la rue un groupe de "E______" arriver et averti G______. Alors qu'il regardait A______ entrer dans l'établissement puis avancer, il avait fait usage de son spray. Il avait vu le précité reculer d'un coup. Il pensait que c'était en réaction à son sprayage. A______ était ensuite revenu à la charge, balançant une chaise. Il n'avait pas vu que G______ avait une arme. Il ignorait s'il était armé. Il ne l'avait pas vu pointer son arme sur A______, étant fixé sur l'entrée. Il pensait que les "E______" savaient très bien pourquoi ils étaient venus. Ils étaient venus à cinq alors qu'eux n'étaient que deux. Il s'était senti menacé, ayant reçu des menaces des "E______" deux ou trois mois plus tôt, pour lesquelles il n'avait pas déposé plainte.

G______ a déclaré avoir pensé qu'ils n'allaient pas s'en sortir. Il ignorait qui était ciblé. Il était pris au piège et craignait pour sa vie. Il ne pensait pas que H______ savait qu'il était armé. Il avait vu un groupe d'individus en noir lui arriver dessus, armes à la main. Alors il avait sorti son arme. Il avait vu une arme "c'est sûr". Il ignorait pourquoi H______, qui se trouvait à ses côtés dans l'"D______" à ce moment-là n'avait vu personne armé.

A______, à la question de savoir si dans la seconde où il entrait et sortait de l'établissement, il avait vu un "F______" armé, a répondu qu'il voyait et ne voyait pas en fin de compte. Il voyait flou. Il pleurait, avait du gel partout sur le visage. Il avait aperçu l'arme effectivement mais sur le moment il s'était dit qu'elle n'était pas réelle. Il réitérait n'avoir fait qu'un pas en arrière et non un mouvement de recul. Il n'y avait pas eu de premier et de deuxième assaut.

I______ a encore contesté que certains de ses "frères" étaient armés et tenaient une arme à feu quand A______ était entré dans l'établissement.

b. De prochaines audiences de confrontation auront lieu courant juillet.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 222 et 393 al. 1 let. c CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             2.1. Pour qu'une personne soit placée en détention provisoire ou pour des motifs de sûreté, il doit exister à son égard des charges suffisantes ou des indices sérieux de culpabilité, susceptibles de fonder de forts soupçons d'avoir commis une infraction (art. 221 al. 1 CPP). L'intensité de ces charges n'est pas la même aux divers stades de l'instruction pénale; si des soupçons, même encore peu précis, peuvent être suffisants dans les premiers temps de l'enquête, la perspective d'une condamnation doit apparaître avec une certaine vraisemblance après l'accomplissement des actes d'instruction envisageables. Au contraire du juge du fond, le juge de la détention n'a pas à procéder à une pesée complète des éléments à charge et à décharge ni à apprécier la crédibilité des personnes qui mettent en cause le prévenu. Il doit uniquement examiner s'il existe des indices sérieux de culpabilité justifiant une telle mesure (ATF 143 IV 330 consid. 2.1; 143 IV 316 consid. 3.1 et 3.2).

2.2. En l'espèce, le recourant ne conteste pas avoir pris part, dans un établissement public, à une altercation opposant deux bandes de motards rivales à l'occasion de laquelle plusieurs coups de feu ont été échangés et lors de laquelle il a été lui-même blessé.

Il ne conteste pas les charges de rixe à proprement dit, en tant qu'il admet avoir "pété un plomb" et "foncé dans le tas", mais s'estime avant tout victime, se référant en cela aux images de vidéosurveillance de l'établissement.

Or, bien que l'altercation ait été très rapide – 22 secondes entre le début de la rixe et la fusillade, selon le rapport de renseignements de la police du 27 mai 2022 –, il semblerait que le recourant, après être entré dans l'établissement, ait fait volte-face en direction de la sortie avant d'y revenir, suivi d'un de ses "frères" des "E______", ce qui corroborerait la thèse selon laquelle il voulait en découdre avec les "F______". La thèse inverse selon laquelle ce seraient les "F______" qui attendaient les "E______" armes à la main dans une sorte de guet-apens n'est pas plus ou moins crédible à ce stade de l'enquête, qui n'en est qu'à ses débuts.

L'audience de confrontation qui vient de se tenir ne permet pas de lever tout doute à cet égard.

Partant, le recourant ne saurait se disculper sur la seule base de sa propre interprétation des images de vidéosurveillance qui, au demeurant, n'ont pas pu saisir l'intégralité de la scène, comme le relève la police dans son rapport.

Quant à la question d'une éventuelle légitime défense, elle n'entre pas en ligne de compte sous l'angle des charges.

3.             Le recourant conteste le risque de collusion.

3.1.  Conformément à l'art. 221 al. 1 let. b CPP, la détention provisoire ne peut être ordonnée que lorsque le prévenu est fortement soupçonné d'avoir commis un crime ou un délit et qu'il y a sérieusement lieu de craindre qu'il compromette la recherche de la vérité en exerçant une influence sur des personnes ou en altérant des moyens de preuve. Pour retenir l'existence d'un risque de collusion, l'autorité doit démontrer que les circonstances particulières du cas d'espèce font apparaître un danger concret et sérieux de manœuvres propres à entraver la manifestation de la vérité, en indiquant, au moins dans les grandes lignes et sous réserve des opérations à conserver secrètes, quels actes d'instruction doivent être encore effectués et en quoi la libération du prévenu en compromettrait l'accomplissement. Dans cet examen, entrent en ligne de compte les caractéristiques personnelles du détenu, son rôle dans l'infraction ainsi que ses relations avec les personnes qui l'accusent. Entrent aussi en considération la nature et l'importance des déclarations, respectivement des moyens de preuve susceptibles d'être menacés, la gravité des infractions en cause et le stade de la procédure. Plus l'instruction se trouve à un stade avancé et les faits sont établis avec précision, plus les exigences relatives à la preuve de l'existence d'un risque de collusion sont élevées (ATF 137 IV 122 consid. 4.2; 132 I 21 consid. 3.2; arrêt du Tribunal fédéral 1B_577/2020 du 2 décembre 2020 consid. 3.1).

3.2.  En l'occurrence, il n'est pas contesté que de nombreuses zones d'ombre entourent encore les circonstances de la fusillade du 22 mai 2022.

L'altercation n'a pas seulement impliqué le prévenu, H______, G______ et I______, actuellement tous en détention, mais aussi d'autres tiers et/ou membres des "F______" et des "E______" que la police cherche à présent à identifier en vue de leur audition, ceci afin de déterminer les rôles et responsabilités de chacun. Les circonstances en amont de l'altercation doivent également être élucidées, ce que le prévenu concède.

Or, il existe un risque réel que celui-ci, dorénavant nanti des charges pesant sur lui, ne compromette la recherche de la vérité en contactant des tiers témoins que lui seul connaît et dont il refuse de donner les noms ou exerce sur eux des pressions aux fins qu'ils corroborent sa thèse selon laquelle il ne serait qu'une victime.

L'acuité de ce risque ne saurait être palliée par aucune mesure de substitution, et le recourant n'en propose du reste pas. Une interdiction de contact, seule mesure envisageable, ne peut en principe porter que sur des personnes déterminées (arrêts 1B_485/2019 du 12 novembre 2019 consid. 3.4.2; 1B_121/2019 du 8 avril 2019 consid. 4.4), et apparaîtrait non seulement insuffisante, au vu des enjeux pour le prévenu, mais également difficilement contrôlable.

4. L'admission de ce risque dispense d'examiner si s'y ajoutent les risques de fuite et de réitération.

5. La durée de la détention provisoire subie demeure proportionnée à ce stade, eu égard aux soupçons pesant sur le recourant et à la peine concrètement encourue en cas de condamnation.

6. Le recours s'avère ainsi infondé et doit être rejeté.

7. Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui comprendront un émolument de CHF 900.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP; E 4 10.03). En effet, l'autorité de recours est tenue de dresser un état de frais pour la procédure de deuxième instance, sans égard à l'obtention de l'assistance judiciaire (arrêts du Tribunal fédéral 1B_372/2014 du 8 avril 2015 consid. 4.6 et 1B_203/2011 du 18 mai 2011 consid. 4).

8. Le recourant plaide au bénéfice d'une défense d'office.

8.1. Selon la jurisprudence, le mandat de défense d'office conféré à l'avocat du prévenu pour la procédure principale ne s'étend pas aux procédures de recours contre les décisions prises par la direction de la procédure en matière de détention avant jugement, dans la mesure où l'exigence des chances de succès de telles démarches peut être opposée au détenu dans ce cadre, même si cette question ne peut être examinée qu'avec une certaine retenue. La désignation d'un conseil d'office pour la procédure pénale principale n'est pas un blanc-seing pour introduire des recours aux frais de l'État, notamment contre des décisions de détention provisoire (arrêt du Tribunal fédéral 1B_516/2020 du 3 novembre 2020 consid. 5.1).

8.2. En l'occurrence, quand bien même le recourant succombe, on peut admettre que l'exercice du présent recours ne procède pas d'un abus.

L'indemnité du défenseur d'office sera fixée à la fin de la procédure (art. 135 al. 2 CPP).

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, qui comprennent un émolument de CHF 900.-.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, au recourant (soit, pour lui, son défenseur), au Ministère public et au Tribunal des mesures de contrainte.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.


 

P/11309/2022

ÉTAT DE FRAIS

 

ACPR/

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

 

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

 

- délivrance de copies (let. b)

CHF

 

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

 

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

900.00

 

-

CHF

 

 

Total (Pour calculer : cliquer avec bouton de droite sur le montant total puis sur « mettre à jour les champs » ou cliquer sur le montant total et sur la touche F9)

CHF

985.00