Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision
AARP/371/2024 du 15.10.2024 sur JTDP/240/2024 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE P/22375/2020 AARP/371/2024 COUR DE JUSTICE Chambre pénale d'appel et de révision Arrêt du 15 octobre 2024 |
Entre
A______, domicilié ______, France, comparant par Me B______, avocat,
appelant,
contre le jugement JTDP/240/2024 rendu le 26 février 2024 par le Tribunal de police,
et
LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,
C______ et D______, parties plaignantes,
intimés.
EN FAIT :
A. Saisine de la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR)
a. En temps utile, A______ appelle du jugement JTDP/240/2024 du
26 février 2024, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a acquitté de dommages à la propriété, mais l'a reconnu coupable de tentative d'escroquerie et de conduite sans permis de conduire, et condamné à une peine pécuniaire de 60 jours-amende, à
CHF 50.- l'unité, sous déduction d'un jour-amende correspondant à un jour de détention avant jugement, peine partiellement complémentaire à celle prononcée le
4 mai 2021, avec sursis (délai d'épreuve : trois ans), frais à sa charge.
Le TP a renoncé à révoquer le sursis octroyé le 4 mai 2021, mais a adressé au condamné un avertissement formel et prolongé le délai d'épreuve d'une année.
b. A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant à son acquittement du chef de tentative d'escroquerie et à l'indemnisation de ses frais d'avocat, frais à charge de l'État.
c.a. Selon l'ordonnance pénale du 19 décembre 2022, il est reproché à A______ ce qui suit :
· le 11 novembre 2020, au domicile des époux C______ et D______ sis route 1______ no. ______, [code postal] E______ [GE], de concert avec un individu non identifié, il a sciemment endommagé le toit de la maison des plaignants, alors âgés de 78 et 75 ans, et tenté astucieusement de leur faire réaliser des travaux inutiles. Pour ce faire, il a scié une partie d'un liteau, remplacé une tuile saine par une tuile cassée et détaché du toit des morceaux de ciment, puis présenté aux époux C______/D______ des clichés ainsi qu'un bout de liteau pourri et les morceaux de ciment, leur expliquant que des travaux plus importants s'imposaient, puis augmenté le prix du devis initial de CHF 1'800.- à CHF 9'800.-, avant de feindre de négocier jusqu'à CHF 5'800.-, pour les inciter à lui confier les travaux de rénovation du toit, dans le but de se procurer un enrichissement illégitime ;
· le 12 novembre 2021, à la place Longemalle, en direction de la place Bel-Air, Genève, il a circulé au volant d'un véhicule automobile sans être titulaire d'un permis de conduire valable, lequel avait été annulé par les autorités françaises en date du 13 août 2021.
B. Faits résultant du dossier de première instance
Les faits liés au chef d'infraction de conduite sans permis de conduire n'étant pas contestés, il est renvoyé à ce sujet à l'exposé du premier juge (art. 82 al. 4 du Code de procédure pénale [CPP]).
a.a. Le 20 novembre 2020, les époux C______/D______ ont déposé plainte contre
A______, unique titulaire de l'entreprise individuelle F______, inscrite au registre du commerce de Genève (RC) depuis le ______ 2019.
a.b. À l'appui de leur plainte, les plaignants ont exposé ceci :
Désirant effectuer des travaux d'entretien sur leur toiture (nettoyage et traitement anti-mousse), ils avaient cherché sur internet une entreprise de couvreur et fait appel à F______ après avoir consulté le site internet de celle-ci.
Le 11 novembre 2020, A______ était arrivé accompagné d'un tiers non identifié. Les deux hommes étaient montés sur le toit afin d'évaluer les travaux. Ils étaient revenus dans l'après-midi et avaient proposé un devis de CHF 1'800.-, prix qui leur avait paru cher, mais plausible au vu des estimations qu'ils avaient fait établir précédemment.
Après être remontés sur le toit, les deux hommes étaient redescendus pour présenter à D______ un cliché illustrant leur toiture endommagée par une infiltration d'eau. Ils avaient également montré deux gros morceaux de ciment et un bout de bois pourri, expliquant que les premiers s'étaient détachés du toit, tandis que le second, également présenté à C______, était une partie d'un liteau de leur toit. Ils avaient indiqué que des travaux plus importants seraient nécessaires, proposant un nouveau devis de CHF 9'800.-. Ils avaient d'abord offert un rabais de 10% devant leur réticence, puis de CHF 4'000.-, évoquant la possibilité de récupérer du matériel sur des chantiers, quand ils avaient indiqué désirer faire appel à un spécialiste. Ils avaient alors réalisé qu'ils avaient affaire à des individus malhonnêtes.
Afin de gagner du temps, C______ leur avait demandé un nouveau devis pour le lendemain. Les deux hommes étaient remontés sur le toit et les plaignants les avaient entendus faire usage d'une scie, avant qu'ils ne quittent les lieux.
C______ avait alors contacté G______, charpentier à la retraite, à qui le couple confiait ses travaux auparavant. Il avait constaté une tuile cassée et dit qu'en cas d'infiltration d'eau, les dégâts devaient être de faible importance, alors que le prix de CHF 9'800.- correspondait à une intervention majeure sur l'entier du toit. Par conséquent, C______ avait informé A______, par courriel, de ce qu'elle ne souhaitait plus ses services.
Le lendemain, H______, employé de I______ SÀRL, avait constaté, sur le toit, une tuile cassée, qui n'était pas d'origine, et un morceau de tuile cassé. Une partie d'un liteau avait été sciée, alors que ses extrémités et le bois en dessous étaient en parfait état. Les morceaux de ciment qui manquaient à la faîtière pouvaient avoir été détachés volontairement. Il avait trouvé un sac poubelle posé à l'endroit endommagé, un bidon de liquide de traitement anti-mousse, qui semblait périmé et inutilisable, et une scie. À son avis, seul un nettoyage et un traitement anti-mousse étaient nécessaires. Les constatations de H______ avaient été confirmées dans un courriel de J______, associée-gérante de I______ SÀRL, le 16 novembre 2020.
a.c. À l'appui de leur plainte, les époux C______/D______ ont, notamment, produit le devis, annulé, du 11 novembre 2020 (pièce 2) ; le courriel envoyé par C______ à A______ le 11 novembre 2020 pour renoncer à ses services (pièce 3) ; les clichés de l'intervention de H______ (pièces 4 à 10) ainsi que le courriel de J______ du 16 novembre 2020 (pièce 11).
b. A______ a été arrêté et entendu par la police le 12 novembre 2021.
Il a indiqué ne pas se souvenir des époux C______/D______. Il était l'auteur du devis daté du 11 novembre 2020, étant précisé qu'il ignorait qui avait écrit sur le document puisqu'il était illettré, peut-être un membre de sa famille.
En remplaçant des tuiles cassées, il avait remarqué une infiltration d'eau, dont l'auréole était visible sur les clichés produits par les plaignants. Il avait remplacé le liteau pourri et avait vu qu'il n'y avait pas d'étanchéité sur le toit, soit pas d'écran de toiture. En l'absence d'un tel écran, l'eau ne pouvait pas s'évacuer et tombait sur le placo, qui pourrissait. Cela pouvait faire des dommages importants. Il avait dit aux clients de faire un nettoyage sur la charpente, un traitement de celle-ci et de réparer les liteaux, qui étaient en mauvais état, cela sur les deux parties du toit. Ce n'était pas un travail gratuit, c'étaient de gros travaux de plusieurs jours, voire plusieurs semaines. Il fallait découvrir tout le toit et tout refaire, soit refaire l'écran sous toiture. Cela expliquait le prix conséquent.
En l'occurrence, pour nettoyer le toit, il devait remplacer les tuiles fissurées afin que l'eau ne s'infiltre pas. Le placo était déjà endommagé.
Il avait coupé le bout de liteau pourri avec une scie à main et l'avait montré à C______ pour qu'elle le constate. Elle l'avait touché, avait confirmé et lui avait demandé ce qu'il fallait faire. Il lui avait expliqué que pour ne plus avoir d'infiltration, il fallait mettre un écran sous toiture. Quand elle avait refusé le devis à CHF 9'800.-, il avait proposé de laisser tomber la peinture à la résine. En la déduisant du devis et en la remplaçant par l'écran sous toiture, il pouvait réduire le coût à
CHF 5'800.-, ce qui lui semblait raisonnable. Cela restait un trop grand budget pour les clients, alors il avait proposé d'annuler le devis. Ils s'étaient mis d'accord. Il avait signé le document avec la mention de l'annulation et il était parti. Il ne comprenait pas pourquoi les clients avaient déposé plainte contre lui ; il avait été honnête.
c. Le 22 février 2022, A______ et les époux C______/D______ ont été entendus contradictoirement devant le Ministère public (MP).
d.a. Les époux C______/D______ ont confirmé la teneur de leur plainte.
Ils avaient contacté A______ en raison d'une accumulation de feuilles dans les chéneaux qu'ils voulaient faire déboucher. Ils n'avaient jamais eu de problème au niveau de la toiture, tels que des infiltrations d'eau. Ils l'entretenaient régulièrement, le traitement anti-mousse étant fait tous les trois ou quatre ans.
Les deux hommes leur avaient dit que le toit était pourri, qu'il y avait un dégât d'eau, qu'il fallait tout remplacer, y compris les liteaux, sur une surface de trois rangs de tuiles sur quatre mètres. Ils leur avaient présenté un bout de toit et un morceau de bois pourris provenant soi-disant de leur toiture. A______ leur avait montré une photographie sur son téléphone portable qui illustrait un gros trou avec une tuile cassée. Le bout de bois n'était pas proprement scié, mais effilé sur le bout. Il ne ressemblait pas à un liteau, mais plutôt à un déchet de chantier. Cela n'avait pas éveillé leurs soupçons sur le moment. A______ le leur avait montré avant de remonter sur le toit et qu'ils n'entendent le bruit de la scie. Après l'intervention de A______, I______ SÀRL avait effectué une réparation urgente et provisoire, soit la pose d'un bout de bois à la place du liteau scié.
d.b. A______ a confirmé ses déclarations faites devant la police.
C______ l'avait appelé parce qu'il y avait des feuilles dans les chéneaux. Le lendemain, il avait dit aux clients qu'il fallait nettoyer la toiture en raison de la mousse. Il avait vérifié chaque tuile avant de procéder au nettoyage pour éviter que l'eau ne s'infiltre. Il avait vu deux tuiles cassées et un bout de liteau pourri, qu'il avait scié et montré aux clients. Le bout de liteau pourri se trouvait sous une tuile cassée. Il les avait remplacés. Il avait fait le nettoyage à haute pression.
Il avait proposé aux clients d'ajouter un écran d'étanchéité ainsi que de la résine, ce qui justifiait le prix de CHF 9'800.-. Il avait diminué le prix à CHF 5'800.- car il lui restait un peu de matériel. Il n'avait pas l'habitude de pratiquer ce type de rabais.
Invité à commenter les photographies des plaignants produites sous pièces 4 et 5, il a confirmé avoir posé une tuile de couleur différente, précisant qu'elle était neuve, et leur avoir montré une photographie similaire à la seconde, sur laquelle on voyait sur le placo une auréole, soit des taches sombres indiquant une infiltration d'eau, ainsi que la partie du liteau qu'il avait sciée. La partie brune faite de carton bouillie n'était pas étanche et, avec le temps, cela faisait des infiltrations d'eau. Les extrémités du liteau étaient saines car la partie pourrie se trouvait sous la tuile.
Il ne se souvenait plus d'avoir montré des bouts de la faîtière aux plaignants. Il y avait de la mousse sur celle-ci et de petits morceaux en étaient tombés.
e.a. Entendu par le MP le 19 avril 2022, K______, charpentier et associé-gérant de la société I______ SÀRL, a expliqué qu'il s'était rendu chez les époux C______/D______ en novembre 2020 pour un entretien de toiture et n'avait rien constaté de catastrophique hormis une tuile cassée. Il n'était pas monté sur le toit.
Confronté aux photographies des plaignants produites sous pièces 5 et 6, le témoin a indiqué qu'il y avait une infiltration sous la tuile cassée. Il y avait un écran de protection de type pavatex (fibres de bois). Il n'était donc pas nécessaire d'ajouter un écran de sous toiture d'étanchéité car la toiture était équipée, en cas d'infiltration, avec du matériau d'époque. Il était possible qu'une partie du liteau soit pourrie, alors que les extrémités étaient saines, si la fuite tombait à cet endroit. Le bout cassé visible sur la photographie sous pièce 4 étant le bout manquant à la tuile.
f. Selon le devis du 16 octobre 2020 établi par K______, I______ SÀRL devait intervenir chez les époux C______/D______ notamment pour le "remplacement des tuiles cassées et fissurées" Selon la note du
14 décembre 2020, I______ SÀRL a facturé aux époux C______/D______
CHF 1'669.35 TTC, ce montant et les prestations correspondant au devis précité.
g. Devant le TP, A______ a persisté dans ses déclarations, soit qu'en soulevant une tuile, il avait remarqué que le liteau en dessous était pourri. Il l'avait scié à la demande de C______ après lui avoir montré le cliché et l'avait remplacé, de même que les tuiles cassées. L'écran, dont le témoin K______ indiquait qu'il était en pavatex, était en carton compressé et, en cas de fuite, cela provoquait avec le temps de la pourriture, étant précisé que les toits n'étaient plus construits avec ce genre de matériau désormais. Il n'avait pas touché à la faîtière, laquelle ne présentait pas de problème. Il avait estimé le prix en fonction de la surface du toit et proposé une réduction car il lui restait du produit.
i. En première instance, A______ a sollicité l'indemnisation de ses frais de défense et produit une note d'honoraires couvrant l'activité déployée par son avocat du 21 février 2022 au 26 février 2024 d'un montant de CHF 5'581.94, TVA incluse.
C. Procédure d'appel
a. L'instruction de la cause a été ordonnée par la voie écrite avec l'accord des parties (art. 406 al. 2 CPP).
b.a. Selon son mémoire d'appel, A______ persiste dans ses conclusions, sollicitant une "peine juste" tenant compte de l'acquittement partiel.
b.b. Il produit une note d'honoraires couvrant l'activité déployée par son avocat du
27 février au 30 juillet 2024 d'un montant de CHF 3'690.-, TVA incluse.
c. Par mémoire de réponse, le MP conclut au rejet de l'appel.
d. Dans leur courrier du 5 août 2024 à l'attention du MP, les parties plaignantes n'ont pas pris de conclusions formelles.
e. Les arguments des parties seront discutés, ci-après, en fonction de leur pertinence.
D. a. A______, né le ______ 1992, est ressortissant français. Il est marié de manière coutumière et père d'une fille de dix ans. Il vit en France avec sa famille.
Il affirme travailler en qualité d'indépendant dans le bâtiment, son salaire net oscillant entre CHF 3'000.- et CHF 3'500.- par mois. Il n'a pas de diplôme de couvreur et a appris son métier "sur le tas". Son épouse ne travaille pas et perçoit le revenu de solidarité active (RSA). Il n'a ni dette, ni fortune.
b. À teneur de son casier judiciaire, A______ a été condamné le 4 mai 2021 par le TP pour usure ainsi que délits à la Loi fédérale sur les étrangers et l'intégration (LEI) et sanctionné d'une peine pécuniaire de 90 jours-amende, à CHF 50.- l'unité, avec sursis (délai d'épreuve : trois ans).
EN DROIT :
1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 CPP).
La Chambre n'examine que les points attaqués du jugement de première instance
(art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP)
2. 2.1. La présomption d'innocence, garantie par les art. 10 CPP, 32 al. 1 Cst., 14 par. 2 Pacte ONU II et 6 par. 2 CEDH, ainsi que son corollaire, le principe in dubio pro reo, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large. En tant que règle sur le fardeau de la preuve, elle signifie, au stade du jugement, que le fardeau de la preuve incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. Comme règle d'appréciation des preuves, la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait (ATF 145 IV 154 consid. 1.1).
2.2. Quiconque, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, induit astucieusement en erreur une personne par des affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais ou la conforte astucieusement dans son erreur et détermine de la sorte la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d’un tiers, est puni d’une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire (art. 146 al. 1 CP).
Le juge peut atténuer la peine si l’exécution d’un crime ou d’un délit n’est pas poursuivie jusqu’à son terme ou que le résultat nécessaire à la consommation de l’infraction ne se produit pas ou ne pouvait pas se produire (art. 22 al. 1 CP).
2.3. Il y a tromperie astucieuse lorsque l'auteur recourt à un édifice de mensonges, à des manœuvres frauduleuses, à une mise en scène ou lorsqu'il donne simplement de fausses informations, si leur vérification n'est pas possible, ne l'est que difficilement ou ne peut raisonnablement être exigée, de même que si l'auteur dissuade la dupe de vérifier ou prévoit, en fonction des circonstances, qu'elle renoncera à le faire en raison d'un rapport de confiance particulier. L'astuce n'est pas réalisée si la dupe pouvait se protéger avec un minimum d'attention ou éviter l'erreur avec le minimum de prudence que l'on pouvait attendre d'elle. Il n'est cependant pas nécessaire qu'elle ait fait preuve de la plus grande diligence ou qu'elle ait recouru à toutes les mesures possibles pour éviter d'être trompée. L'astuce n'est exclue que si elle n'a pas procédé aux vérifications élémentaires que l'on pouvait attendre d'elle au vu des circonstances (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1324/2023 du 3 juin 2024 consid. 2).
2.4.1. Il n'est pas contesté que l'appelant a, lors de son intervention du 11 novembre 2020, rapidement indiqué aux plaignants qu'une infiltration d'eau avait provoqué des dégâts sur leur toiture, en leur montrant un cliché ainsi qu'un morceau de bois pourri.
Il est également admis qu'il a affirmé que d'importants travaux – soit la pose d'un écran de sous toiture contre les infiltrations – étaient indispensables, proposant d'abord un devis de CHF 9'800.-, montant réduit de 10% puis à CHF 5'800.-.
L'appelant conteste avoir tenté de tromper les plaignants en proposant cet ouvrage.
2.4.2. Les déclarations des parties sont contradictoires.
L'appelant s'est montré constant dans ses explications. Il avait soulevé une tuile cassée et remarqué une infiltration d'eau sous celle-ci. La partie sous le liteau était faite de carton, matériau qui n'était plus utilisé et qui pourrissait avec le temps. Il avait donc proposé aux plaignants la pose d'un écran de sous toiture, qui était une tâche d'envergure et justifiait le prix. Il avait offert une réduction, ce que les clients avaient refusé.
Certes, certains éléments du dossier tendent à démontrer que la pose d'un tel écran n'était pas indispensable, à commencer par les déclarations du témoin K______, selon lesquelles le toit était déjà équipé d'un écran en pavatex (fibres de bois) contre les infiltrations d'eau, étant souligné que ce dernier est charpentier de formation, contrairement à l'appelant qui a appris son métier "sur le tas".
Dans le prolongement de ce qui précède, la réduction, rapide et conséquente, du devis face à la réticence des plaignants (10% puis moins CHF 4'000.-), âgés, interpelle défavorablement, ce d'autant que l'appelant a varié sur le motif de ce rabais, évoquant d'abord l'abandon de la peinture à la résine au profit de l'écran (police), puis un reste de matériau (MP/TP), encore que l'on ne peut exclure que renoncer à ladite peinture puisse générer un moindre coût (art. 10 al. 3 CPP).
Cela étant, en l'absence d'une expertise, il convient de se montrer prudent. L'employé H______, seul protagoniste à avoir examiné le toit hormis l'appelant, n'a pas été entendu dans la procédure, G______ pas davantage. Le témoin K______ n'est pas monté sur le toit. À cela s'ajoute qu'il a expliqué que la toiture était protégée par un écran fait dans un matériau "d'époque", ce qui n'exclut pas en définitive la thèse de l'appelant, selon laquelle celui-ci serait obsolète.
Dès lors, on ne peut exclure qu'il puisse s'agir ici de deux avis professionnels divergents, sans être en mesure de les évaluer, ce qui, a minima au bénéfice du doute, écarte l'élément constitutif de la tromperie.
Par ces motifs déjà, l'appelant devra être acquitté.
2.4.3. Fallût-il en douter, la condition de l'astuce telle que décrite dans l'ordonnance pénale du 19 décembre 2022, dont la teneur lie la Cour (art. 9 et 350 al. 1 CPP), fait également défaut.
Il est non contesté que l'appelant a scié la partie médiane d'un liteau et remplacé une tuile, celui-ci ayant, de manière constante, expliqué que le bois était pourri, tandis que la tuile était fissurée, ce qui avait entrainé une infiltration d'eau. Il soutient avoir montré un cliché et le bout de liteau aux clients pour ce même motif.
Or, le dossier tend à confirmer qu'il existait bien une tuile cassée et une infiltration d'eau qui peut avoir entrainé la pourriture du liteau comme l'explique l'appelant.
Le témoin K______ a constaté une tuile cassée lors de l'établissement du devis du 12 octobre 2020, ce qui résulte des prestations listées dans ledit devis, étant précisé qu'aucun élément ne permet d'établir que l'appelant aurait remplacé une tuile d'origine en bon état par une tuile neuve fissurée. Le témoin K______ a encore confirmé qu'on observait une infiltration d'eau sur les photographies et que la partie médiane d'un liteau pouvait pourrir, même si ses extrémités étaient saines.
S'agissant de la faîtière, l'appelant a, certes, légèrement varié indiquant que les dégâts provenaient de la mousse (MP), puis ne pas avoir vu de problème au niveau de celle-ci (TP), mais il a contesté de manière constante l'avoir touchée. Aucun élément du dossier ne permet d'objectiver l'inverse, faute d'expertise ou d'avoir entendu l'employé H______.
En outre, on rappellera que l'appelant a été acquitté du chef de dommages à la propriété en première instance, sans contestation des parties, de sorte qu'il est désormais établi judiciairement qu'il n'a pas intentionnellement abimé la toiture.
Ainsi le comportement de l'appelant était soit justifié par l'état de la toiture, soit l'état de fait n'a pas été établi, de sorte que la condition de l'astuce fait défaut dans les deux cas.
Le MP échoue dans la preuve qui lui incombe.
Par ce second motif, l'appelant doit être acquitté.
Le jugement sera réformé sur ce point.
3. 3.1. La conduite sans autorisation est passible d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire (art. 95 al. 1 let. a LCR).
3.2. Le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir. La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (art. 47 CP).
3.3.1. La faute de l'appelant ne saurait être sous-estimée. Il s'en est pris à la circulation publique. Il a roulé en Suisse, alors qu'il ne pouvait ignorer que son permis de conduire avait été annulé en France. Son mobile est égoïste. Il a agi par convenance personnelle et au mépris des règles sur la circulation routière en vigueur dans notre pays. Sa situation personnelle est sans lien avec les faits. Il ne conteste ni les faits ni sa condamnation. Il a un antécédent judiciaire, étant précisé que 90 unités pénales n'ont pas suffi à le détourner de la récidive.
3.3.2. Au vu de ce qui précède, le prononcé d'une peine pécuniaire de 60 jours-amende, sous déduction d'un jour-amende, correspondant à un jour de détention avant jugement (art. 51 CP), se justifie.
À cet égard, n'est pas considérée comme une modification au détriment du condamné l'acquittement sur un chef d'accusation en appel sans réduction correspondante de la peine prononcée en première instance (arrêt du Tribunal fédéral 6B_461/2018 du
24 janvier 2019 et 6B_145/2022 du 13 avril 2023 consid. 4.3).
Le montant du jour-amende sera fixé à CHF 50.- pour tenir compte de la situation personnelle et financière de l'appelant (art. 34 al. 2 CP).
3.3.3. L'octroi du sursis, dont la durée du délai d'épreuve est adéquate, et l'absence de révocation du sursis prononcé le 4 mai 2021 sont acquis à l'appelant (art. 391 al. 2 CPP). Vu la récidive dans le délai d'épreuve, l'avertissement et la prolongation du délai d'épreuve, points qui ne sont au demeurant pas discutés, seront confirmés
(art. 46 al. 2 CP).
4. 4.1. L'appelant obtient gain de cause en appel pour la tentative d'escroquerie. Il succombe sur la peine. Il se justifie, dès lors, de mettre à sa charge un tiers des frais de la procédure d'appel, y compris un émolument d'arrêt de CHF 1'200.-. Les intimés n'ayant pas déposé de conclusions formelles en appel, le solde est laissé à la charge de l'État (art. 428 al. 1 CPP).
4.2. L'appelant est, en définitive, condamné pour un tiers des infractions reprochées, de sorte qu'il se justifie de mettre à sa charge un tiers des frais de la procédure préliminaire et de première instance (art. 428 al. 3 cum art. 426 al. 1 CPP).
Le solde demeurera à charge de l'État.
4.3. La décision sur les frais préjugeant de la question de l'indemnisation
(ATF 147 IV 47 consid. 4.1 ; 144 IV 207 consid. 1.8.2), l'appelant peut prétendre à l'indemnisation de deux tiers de ses frais de défense pour la procédure préliminaire et de première instance et à deux tiers de ceux liés à l'appel (art. 429 al. 1 let. a CPP).
Les notes d'honoraires produites par l'appelant respectant globalement les principes légaux et jurisprudentiels régissant l'indemnisation du prévenu, il sera alloué à l'appelant pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits :
· une indemnité de CHF 3'721.30 (2/3 fois CHF 5'581.94) pour la procédure préliminaire et de première instance ;
· une indemnité de CHF 2'460.- (2/3 fois CHF 3'690.-) pour la procédure d'appel.
* * * * *
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/240/2024 rendu le
26 février 2024 par le Tribunal de police dans la procédure P/22375/2020.
L'admet partiellement.
Annule ce jugement.
Et statuant à nouveau :
Acquitte A______ de dommages à la propriété (art. 144 al. 1 CP) et de tentative d'escroquerie (art. 22 al. 1 CP cum art. 146 al. 1 CP).
Déclare A______ coupable de conduite sans permis de conduire (art. 95 al. 1 let. a LCR).
Condamne A______ à une peine pécuniaire de 60 jours-amende, sous déduction d'un jour-amende, correspondant à un jour de détention avant jugement (art. 34 CP).
Fixe le montant du jour-amende à CHF 50.-.
Met A______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à trois ans
(art. 42 et 44 CP).
Avertit A______ de ce que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).
Renonce à révoquer le sursis octroyé le 4 mai 2021 par le Tribunal de police de Genève, mais adresse un avertissement à A______ et prolonge le délai d'épreuve d'un an (art. 46 al. 2 CP).
Ordonne la restitution à A______ de la scie rouillée et du pulvérisateur avec son tuyau figurant sous chiffres 1 et 2 de l'inventaire no 2______ du 16 décembre 2020 (art. 267 al. 1 et 3 CPP).
Ordonne la restitution à A______ des montants de CHF 3.- et EUR 325.25 figurant sous chiffre 1 de l'inventaire no 3______ du 12 novembre 2021 (art. 267 al. 1 et 3 CPP).
Prend acte de ce que le premier juge a arrêté les frais de la procédure préliminaire et de première instance à CHF 1'667.-, y compris un émolument de jugement complémentaire de CHF 600.-.
Condamne A______ à un tiers de frais de la procédure préliminaire et de première instance, soit CHF 555.70 le solde, soit CHF 1'111.30, demeurant à la charge de l'État
(art. 426 al. 1 CPP cum art. 428 al. 3 CPP).
Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 1'415.-, y compris un émolument d'arrêt de
CHF 1'200.-, et met un tiers de ces frais, soit CHF 471.70 à la charge de A______, le solde demeurant à la charge de l'État (art. 428 al. 1 CPP).
Alloue à A______ une indemnité de CHF 3'721.30, TVA incluse, pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits au cours de la procédure préliminaire et de première instance (art. 429 al. 1 CPP).
Alloue à A______ une indemnité de CHF 2'460.-, TVA incluse, pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits pour la procédure d'appel (art. 429
al. 1 CPP cum art. 436 al. 1 CPP).
Notifie le présent arrêt aux parties.
Le communique, pour information, au Tribunal pénal, à l'Office cantonal de la population et des migrations (OCPM) et à l'Office cantonal des véhicules (OCV).
La greffière : Lylia BERTSCHY |
| Le président : Fabrice ROCH |
Indication des voies de recours :
Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.
| ETAT DE FRAIS |
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| COUR DE JUSTICE |
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Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).
Total des frais de procédure du Tribunal de police : | CHF | 1'667.00 |
Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision |
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Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c) | CHF | 00.00 |
Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i) | CHF | 140.00 |
Procès-verbal (let. f) | CHF | 00.00 |
Etat de frais | CHF | 75.00 |
Emolument de décision | CHF | 1'200.00 |
Total des frais de la procédure d'appel : | CHF | 1'415.00 |
Total général (première instance + appel) : | CHF | 3'082.00 |