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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/19602/2020

AARP/379/2023 du 02.11.2023 sur JTDP/142/2023 ( PENAL ) , REJETE

Recours TF déposé le 10.11.2023, 6B_1285/2023
Descripteurs : DISPOSITIONS PÉNALES DE LA LCR;ERREUR DE DROIT(DROIT PÉNAL)
Normes : CP.177; CP.286; LCR.97.al1.lete; LCR.97.al1.letf; LCR.90; LCR.91a.al1; CPP.389.al1; CPP.389.al3; CP.21; CP.54
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/19602/2020 AARP/379/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 28 septembre 2023

 

Entre

A______, domicilié ______ [GE], comparant en personne,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/142/2023 rendu le 2 février 2023 par le Tribunal de police,

 

et

B______, domicilié p.a. Police, case postale 236, 1211 Genève 8, comparant en personne,

C______, domiciliée p.a. Police, case postale 236, 1211 Genève 8, comparant en personne,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 2 février 2023, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a reconnu coupable d'injure (art. 177 al. 1 du Code pénal [CP]), d'empêchement d'accomplir un acte officiel (art. 286 al. 1 CP), d'entrave aux mesures de constatation de l'incapacité de conduire (art. 91a al. 1 de la loi sur la circulation routière [LCR]), de falsification ou contrefaçon de plaques de contrôle (art. 97 al. 1 let. e LCR), d'utilisation de plaques de contrôle falsifiées ou contrefaites (art. 97 al. 1 let. f LCR) et de violation simple des règles de la circulation routière (art. 90 al. 1 LCR), tout en l'acquittant de diffamation (art. 173 ch. 1 CP) et d'entrave aux mesures de constatation de l'incapacité de conduire (art. 91 al. 1 let. e LCR) pour les faits du 18 octobre 2020. Le TP l'a condamné à une peine pécuniaire de 100 jours-amende, à CHF 30.- l'unité, avec un sursis de quatre ans, renonçant par ailleurs à révoquer le sursis octroyé le 17 avril 2019 par le Ministère public (MP) mais adressant un avertissement à A______ et prolongeant le délai d'épreuve d'un an. A______ a enfin été condamné aux frais de la procédure, arrêtés à 1'800.-, le solde étant laissé à la charge de l'Etat, ainsi qu'à un émolument complémentaire de CHF 600.-.

A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant à son acquittement des chefs d'injure, d'empêchement d'accomplir un acte officiel, de violation de l'art. 91a al. 1 LCR et de l'art. 97 al. 1 let. e et f LCR.

b.a. Selon l'ordonnance pénale du 20 décembre 2021, il est encore reproché ce qui suit à A______ :

Il a, à Genève, le 18 octobre 2020 entre 20h00 et 20h30, à la hauteur du n° 2 de la place de Cornavin,

-          apposé sur son véhicule automobile une plaque d'immatriculation contrefaite par ses soins, portant le numéro GE 1______, correspondant au numéro officiel, faits qualifiés de falsification ou contrefaçon de plaques de contrôle au sens de l'art. 97 al. 1 let. e LCR et d'utilisation de plaques de contrôles falsifiées ou contrefaites au sens de l'art. 97 al. 1 let. f LCR ;

-          lors de son interpellation par la police, porté atteinte à l'honneur de C______ et de B______ en leur disant notamment "fuck the police", faits qualifiés d'injure au sens de l'art. 177 al. 1 CP ;

-          fait usage de violence à l'encontre d'agents de police, empêchant ceux-ci d'accomplir des actes entrant dans leurs fonctions ou les rendant plus difficiles, en particulier en se débattant alors qu'ils tentaient de l'interpeller et de lui passer les menottes, causant de la sorte une contusion nasale à la gendarme C______, ainsi que des contusions aux deux genoux et une douleur au gros orteil du pied gauche du caporal B______ (faits qualifiés d'infraction à l'art. 285 ch. 1 al. 1 par le MP, requalifiés d'infraction à l'art. 286 CP par le TP) ;

Il a, à Genève, le 13 février 2021, à l'avenue de l'Ain, alors qu'il était au volant d'un véhicule automobile immatriculé GE 2______ dont il venait de perdre la maîtrise, quitté les lieux sans prévenir les services de police et sans attendre leur arrivée alors qu'il devait se douter, qu'au vu des circonstances, des mesures visant à mesurer sa capacité de conduire seraient ordonnées, et sans respecter ses devoirs en cas d'accident avec dégâts matériels, faits qualifiés d'entrave aux mesures de constatation de l'incapacité de conduire au sens de l'art. 91a al. 1 LCR.

b.b. Il ne conteste plus sa culpabilité pour avoir :

- le 18 octobre 2020, dans les circonstances décrites plus haut, effectué un demi-tour sur route en franchissant une double ligne de sécurité (art. 90 al. 1 LCR cum art. 26 et 27 LCR),

- le 13 février 2021, dans les circonstances décrites plus haut, perdu la maîtrise du véhicule et ainsi heurté le terre-plein séparant les deux voies de circulation, percuté un arbre et terminé sa course sur une voie de circulation, faits qualifiés de violation simple des règles de la circulation routière au sens de l'art. 90 al. 1 LCR cum art. 31 LCR.

b.c. Il a par ailleurs été acquitté des chefs de :

-          diffamation (art. 173 ch. 1 CP), pour avoir traité B______ de "raciste" devant notamment C______ et les badauds gravitant autour de la gare Cornavin ;

-          entrave aux mesures de constatation de l'incapacité de conduire (art. 91 al. 1 let. e LCR), pour avoir refusé de se soumettre à une prise de sang ou à un prélèvement d'urine pour les faits du 19 octobre 2020.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

Faits du 18 octobre 2020

a.a. Il ressort du rapport d'arrestation que le caporal B______ et la gendarme C______ procédaient au contrôle du véhicule en cause, stationné sur les cases dépose-minute de la place de Cornavin et dépourvu de plaque d'immatriculation avant. Contacté par téléphone, A______, détenteur du véhicule, s'est rendu sur les lieux. Il présentait une alcoolémie de 0.52 mg/l. Lorsqu'il a été question d'éclaircir les faits à la Brigade routière et accident (BRA), A______ est rapidement devenu agressif et injurieux, à tel point qu'il a dû être maitrisé par la force. Dans le cadre de cette arrestation, les deux policiers ont subi de légères contusions et/ou dermabrasions, attestées médicalement. A______ avait voulu créer un scandale en criant "fuck the police" et en traitant le caporal de raciste devant les badauds.

Pour ces faits, B______ et C______ ont déposé plainte pénale. B______ a précisé, notamment, que A______, une fois rendu attentif aux faits qui lui étaient reprochés, avait commencé à hausser le ton et rétorqué qu'en Australie, pays dont il était ressortissant, les policiers lui auraient simplement dit de rentrer chez lui en pareil cas. L'intéressé avait ajouté que les lois suisses ne le concernaient ni ne l'intéressaient. Lui-même lui avait répondu que si ces règles ne lui plaisaient pas, il était libre de quitter le pays, mais qu'il devait en tout état les respecter.

a.b. Des images de vidéosurveillance, il peut être constaté qu'à 20h02, A______ circulait sur la place Cornavin en direction de la rue de Lausanne, avant de faire un demi-tour sur route et s'arrêter sur les places "dépose-minute". A 20h14, le caporal B______ et la gendarme C______ sont arrivés et ont contrôlé le véhicule de A______. Ce dernier, accompagné d'un tiers, a rejoint les policiers auxquels il a donné des papiers. S'en est suivi une conversation et le précité a pris son téléphone tout comme le caporal B______. Ensuite, la gendarme C______ l'a fait souffler dans l'éthylotest une première fois, puis une seconde fois. L'intéressé a remis de nouveaux papiers aux policiers puis a ressorti son téléphone. Enfin, à 20h30, au niveau du capot de la voiture, alors que les policiers souhaitaient lui passer les menottes, le prévenu a maintenu ses bras proche de son corps, puis les a agités. Le caporal B______ l'a alors amené avec force au sol pour passer la seconde menotte et l'a ensuite placé en position latérale de sécurité, celui-ci semblant inconscient mais les jambes gesticulantes. Durant toute l'intervention, la tierce personne est restée aux côtés des protagonistes, sans s'immiscer ni paraitre inquiète pour l'intéressé, y compris lorsque celui-ci s'est retrouvé au sol.

b.a. Lors de son audition devant la police, A______ a requis l'assistance de son avocat, lequel ne pouvait cependant se déplacer. En conséquence, il a refusé de s'exprimer, de signer le procès-verbal, ainsi que de se soumettre aux prélèvements de sang et d'urine pour déterminer le taux d'alcool, la présence de drogues ou celle de médicaments.

b.b. A______ se plaignant de douleurs au poignet gauche, il a été examiné par un médecin dont le rapport indique que l'influence de l'alcool était légère, que le patient avait tendance à beaucoup se plaindre de ses contusions ainsi que de ses problèmes médicaux, de sorte qu'il a été mis au bénéfice d'une prescription pour du Dafalgan 1g ainsi qu'au besoin, d'un comprimé de Temesta et d'Irfen 400 mg.

b.c. Entendu à plusieurs reprises au Ministère public (MP), A______ a indiqué que la plaque de sa voiture était tombée et qu'il avait contacté son mécanicien, lequel lui avait conseillé d'écrire le numéro de la plaque sur un papier et de l'apposer sur le pare-brise. C'était le dimanche et il attendait lundi pour régler l'affaire. Il reconnaissait donc les faits mais pas leur illicéité.

S'agissant des deux autres infractions reprochées, il a contesté la version des policiers, avec lesquels il y avait eu, selon ses dires, beaucoup d'incompréhensions. Il a par ailleurs fait état de violences policières à son égard, faits pour lesquels il a aussi déposé plainte pénale et au sujet desquels la procédure P/3______/2020 est toujours pendante.

Il n'avait pas injurié les policiers, car ce n'était pas dans son caractère, mais il reconnaissait avoir dit au caporal que ce dernier était raciste, car de son point de vue tel était le cas.

Il a nié avoir empêché ou rendu plus difficile l'accomplissement d'un acte officiel. Il a d'abord déclaré que le policier s'était énervé lorsqu'il lui avait demandé de cesser de tenir des propos racistes et, alors qu'il contactait son avocat pour lui dicter le numéro de matricule de son interlocuteur, celui-ci lui avait brusquement sauté dessus pour le menotter, ce qui lui avait fait très mal. Il est ensuite revenu sur ses déclarations, relatant que lorsque les policiers avaient tenté de lui passer les menottes, il avait essayé de leur expliquer qu'il avait des douleurs aux poignets. Lorsqu'ils avaient tenu ses poignets, il avait voulu leur dire que cela faisait très mal mais ils ne comprenaient pas ou ne l'avaient pas écouté. Il avait raidi les bras car il avait un problème qui faisait que lorsque l'on appuyait à un certain endroit, il avait une décharge électrique dans l'avant-bras et ses bras se raidissaient par réflexe. C'était la douleur qui avait fait qu'il avait raidi ses avant-bras. Enfin, il a allégué qu'il s'agissait d'un malentendu entre la police et lui-même, dès lors qu'il n'avait pas tout de suite compris qu'ils allaient l'interpeler ; il aurait, sinon, immédiatement présenté ses bras. C'est cette dernière version qu'il a maintenue devant le TP.

Il a encore allégué que dans sa chute, sa tête avait heurté le sol et il avait perdu connaissance, souffrant d'une blessure ancienne au lobe frontal. Un de ses amis, soit D______, ou plutôt, E______, avait été témoin de la scène. Dans la voiture qui l'emmenait à la BRA, "le policier" l'avait traité de "sale australien". Enfin, il a tantôt indiqué se souvenir "très bien" des faits peu avant, avoir perdu le fil des événements mais pu reconstituer ses souvenirs grâce à un témoin.

b.d. C______ a confirmé devant le MP sa plainte pénale. Son collègue et A______ semblaient se comprendre. Elle n'avait ni entendu ni dit "sale australien", précisant que le caporal B______ n'avait jamais insulté le précité. Elle avait, en revanche, entendu ce dernier dire "Fuck the police" ainsi que "raciste". Elle avait eu du mal à lui passer les menottes tant il raidissait les muscles de ses bras. À aucun moment, il ne s'était plaint de douleurs aux poignets.

b.e. B______ a également confirmé la sienne. Il avait parlé en anglais avec A______ qui le comprenait. Il avait consulté son commissaire à deux reprises afin de savoir que faire, ce dernier leur ayant dit de l'emmener à la BRA. Il avait expliqué cela à l'intéressé lui enjoignant de les suivre, ce qu'il avait refusé de faire. Ils lui avaient signifié qu'il était en arrestation provisoire et lui avaient demandé de se laisser menotter tranquillement mais l'individu raidissait ses bras. Il avait tenté de lui faire une clé de bras pour lui passer la seconde menotte mais A______ s'était raidi encore plus et avait tourné la tête vers lui afin de continuer à l'invectiver. Il n'avait eu d'autre choix que de le maîtriser physiquement en procédant à un contrôle du cou et, vu la carrure du précité, ils étaient tous les deux tombés. Une fois au sol, ce dernier s'était laissé complètement aller. Il l'avait donc retourné pour finaliser le menottage et avait essayé de le redresser avant de finalement le placer en position latérale de sécurité. L'intéressé respirait et il ne s'en était plus occupé dès la prise en charge par ses collègues.

b.f. Par courrier de son conseil du 11 mars 2022, A______ a contesté avoir adopté un comportement défiant à l'égard de B______ et de C______, dès lors qu'il ressortait des images de vidéosurveillance qu'il avait coopéré avec la police. Il avait été inconscient une fois menotté.

Il a produit le message Whatsapp adressé à un avocat le jour des faits à 20h26 dans lequel il écrivait "Hello my lawyer […] I have a problem with one police officer he was very racist to me he was telling me go back to your country […]".

c.a. Entendu au MP, E______, témoin, a déclaré qu'il était présent au moment de l'interpellation de A______, se tenant à un mètre de distance de celui-ci. Il n'avait pas compris ce qui s'était dit, ni ce qu'il s'était passé, sinon que le ton était monté entre l'intéressé et la police ; il s'était alors éloigné d'un mètre supplémentaire. Les policiers avaient empêché A______ de prendre des photos de l'intervention et s'étaient également opposés à ce qu'il appelât quelqu'un. Lui-même supposait qu'il avait dû refuser de collaborer ou tenu des propos qui avaient déplu aux policiers, voire des insultes, raison pour laquelle ils étaient intervenus. Il n'avait pas vu de violence ou de résistance de la part de A______.

c.b. F______, gérant du garage G______ à H______ [GE], a contesté avoir conseillé à A______ de remplacer sa plaque d'immatriculation perdue par une en carton. Ce dernier ne l'avait d'ailleurs jamais appelé à ce sujet. En tout état, si un client lui disait avoir perdu une de ses plaques, il l'aurait invité à aller porter plainte et à contacter l'Office cantonal des véhicules.

d.a.  A______ a encore produit divers documents dont notamment un rapport du Dr I______, neurologue, du 18 novembre 2022 comprenant une analyse des images de vidéosurveillance. Le médecin décrit lui-même que le patient, après s'être opposé à la mise en place de menottes, s'était fait saisir par le policier, entrainant ce dernier dans sa chute. Une fois au sol, il n'avait d'abord plus bougé ; puis, une fois mis en position latérale de sécurité, il avait commencé à présenter des symptômes "[pouvant] ressembler à une crise d'épilepsie tonico-clonique généralisée". Selon le rapport de l'examen électroneuromyographique effectué par ce même médecin, A______ souffre de douleurs au poignet droit depuis une fracture survenue il y a 15 ans, un diagnostic de pseudarthrose ayant été posé. L'analyse révèle que le "Tinel est positif des deux côtés, la force est diminuée du mouvement de la pince de la main des deux côtés, un peu plus marquée à gauche avec lâchages algiques des deux côtés surtout à droite (…) les réflexes myotatiques sont normaux et symétriques aux membres supérieurs", concluant que de tels signes sont compatibles avec un syndrome du tunnel carpien bilatéral. Enfin, figure également une copie du procès-verbal de l'audience du 1er septembre 2022 s'étant tenue par-devant le MP dans la procédure P/3______/2020 au terme de laquelle l'intéressé déclare n'avoir jamais été formellement informé qu'il était en état d'arrestation, ne pas s'être opposé aux menottes mais en avoir demandé les motifs. Lors de cette audience, il a encore déclaré, référence faite aux images de vidéosurveillance, être arrivé avec E______.

Faits du 13 février 2021

a. L'intervention de la police a été requise, le 13 février 2021, suite à un accident de la circulation à hauteur du n° 2 du chemin de Blandonnet, à Vernier. Sur place, la police a constaté l'abandon d'un véhicule automobile totalement endommagé, photographies à l'appui. La voiture était partie en embardée contre le terre-plein central qui séparait les deux voies de circulation, avait heurté un arbre et terminé sa course sur ledit terre-plein et une voie de circulation. Son détenteur, J______, a déclaré l'avoir prêtée à A______.

Se présentant cinq jours plus tard à la police, A______ a admis avoir été au volant du véhicule dont il avait perdu la maîtrise, la voiture ayant glissé sur une plaque de verglas.

b. Lors de ses différentes auditions, A______ a beaucoup varié dans ses explications.

Ainsi, il a d'abord expliqué avoir quitté les lieux de l'accident après environ 45 minutes et sur conseil d'un des inconnus venus prêter secours. En état de choc, le dos douloureux et une dent cassée, il était confus et ne pensait pas devoir rester sur les lieux. Il souffrait beaucoup de douleurs préexistantes amplifiées du fait de l'accident. On lui avait proposé d'appeler une ambulance, ce qu'il avait refusé pour des raisons financières. Des personnes lui étaient venues en aide pour pousser la voiture vers une zone herbeuse. On lui avait dit de ne pas s'inquiéter, que la voiture était assurée, stationnée sur le bord de la route et qu'une dépanneuse allait être appelée, de sorte qu'il avait pris le bus pour rentrer chez lui. Dans un second temps, il a ajouté que les personnes présentes lui avaient assuré avoir averti la police.

Il a aussi indiqué avoir souhaité rentrer chez lui pour récupérer son téléphone, sans se rappeler que ledit objet se trouvait dans le véhicule. Revenant à deux reprises sur ses déclarations, il a successivement relaté avoir cherché son téléphone en vain dans la voiture – où il devait pourtant se trouver, puisqu'au moment de l'accident il venait de terminer une conversation avec son épouse – avant d'assurer l'avoir eu dans son champ de vision mais été dans l'incapacité de l'utiliser car il était "inconscient dans sa propre conscience".

Il avait toujours eu l'intention de revenir sur les lieux, mais seulement après avoir pris un médicament qui se trouvait à son domicile. Une fois chez lui, il avait toutefois pris trois médicaments, soit un antidépresseur, un antidouleur (Tramadol) et de la morphine, dont le mélange l'avait fait s'endormir. Il n'avait pas voulu se soustraire aux mesures visant à déterminer son incapacité de conduire ; en tout état, il ne buvait pas d'alcool depuis six ou sept mois et ne prenait ses médicaments qu'avant de dormir. Avant l'accident, il avait uniquement pris un médicament pour le lactose. Il n'allait plus conduire. Il avait consulté un médecin le jour même ou le lendemain.

En dernier lieu, il a ajouté avoir eu une fuite urinaire dans la voiture immédiatement après l'accident, ce qui l'avait choqué et apeuré. Il était dans une situation inconfortable, souillé d'urine et des personnes sur place lui disaient de partir. L'accident avaient rendu ses douleurs au dos insupportables. Pour toutes ces raisons, soit la peur, les médicaments à prendre et son état général, il était rentré chez lui. Il s'était rendu à la police le lendemain. Cela étant, il y avait dans la voiture tous ses documents de sorte qu'il pouvait être facilement retrouvé.

c. Par courrier de son conseil du 11 mars 2022, A______ a indiqué qu'il n'avait aucune raison de soupçonner, après 45 minutes d'attente, que la police souhaiterait le soumettre à des mesures de constatation de sa capacité de conduire.

d. K______, témoin des faits, a indiqué avoir vu, avec son mari, deux individus aux abords d'un véhicule accidenté sur le terre-plein au niveau de l'intersection. Quelques minutes plus tard, passant en sens inverse, elle avait vu que le véhicule avait été déplacé et se trouvait en travers, en partie, sur la chaussée, gênant le trafic. Les deux individus avaient quitté les lieux. Elle et son mari avaient donc appelé la police.

e. Devant le TP, A______ a indiqué qu'il souffrait encore des séquelles de l'épisode du 13 février 2021, en référence aux divers certificats médicaux versés à la procédure, attestant de la péjoration de son état de santé.

C. a. En amont de l'audience d'appel, A______ a produit plusieurs documents dont le procès-verbal de l'audience du 6 mars 2023 dans la procédure P/3______/2020 relatif à l'audition des autres policiers intervenus dans le cadre de son transport à la BRA le 18 octobre 2020, une expertise pluridisciplinaire de son état de santé à l'attention de l'assurance-invalidité, ainsi que ses rapports pré- et post-opératoires, l'appelant se plaignant de complications survenues après son intervention chirurgicale du 21 février 2021, notamment.

b. Devant la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR), bien que n'ayant pas réitéré ses réquisitions de preuve rejetées, il a sollicité à la fin des débats, l'établissement d'une expertise médicale portant sur son état d'esprit au moment de ces deux épisodes.

c. Sur le fond, A______ a indiqué confirmer ses précédentes déclarations au sujet du 18 octobre 2020 tout en soulignant contester non seulement la version donnée par l'agent de police, mais aussi les propos qu'il aurait lui-même admis. Pour la première fois en appel, il a nié avoir dit que le policier était raciste ; son avocate avait dû prononcer ce mot à un moment donné. Cela étant, il avait ressenti un traitement raciste à son encontre.

Il a argué que le policier ne lui avait pas expliqué qu'il allait l'arrêter et lui-même n'avait alors pas pu expliquer qu'il avait d'importants problèmes aux poignets. Le représentant des forces de l'ordre lui avait simplement dit qu'il devait le suivre. Il ne se rappelait plus s'il avait eu un raidissement ce jour-là, se référant pour le surplus aux documents médicaux produits.

Il admettait avoir confectionné et utilisé une fausse plaque d'immatriculation, comme on le lui avait conseillé. Il ne niait pas non plus avoir fait demi-tour sur route. Cependant, il avait la ferme conviction que ce n'était pas des raisons suffisantes pour l'arrêter ce jour-là, d'une part, et la peine infligée était trop sévère pour quelqu'un qui avait déjà tant perdu et souffert, rappelant qu'il avait également été maltraité médicalement, tout ceci ayant désormais conduit à son infirmité.

Il a indiqué qu'au moment de l'accident du 13 février 2021, il n'était pas conscient de ce qui se passait ; s'agissant d'un véhicule de prêt, il ne savait pas comment procéder, comptant revenir s'en occuper le lendemain. Pour ces raisons, il avait abandonné la voiture, avec tous ses documents ainsi que son téléphone à l'intérieur. La police savait où il résidait, s'était rendue chez lui mais, pour une raison qu'il ignorait, n'avait pas frappé à sa porte.

d. A______ conclut à son acquittement. Selon lui, la barrière de la langue avait conduit à cette situation. Il comprenait qu'il avait fauté, mais sa peine était trop sévère.

e. Le MP avait conclu au rejet de l'appel.

D. A______, ressortissant australien né le ______ 1981, est marié et père de sept enfants mineurs, dont cinq en Australie pour lesquels il ne verse aucune contribution d'entretien. Il perçoit CHF 4'149.20 de l'Hospice général ainsi que CHF 600.- d'allocations familiales. Ses charges mensuelles consistent en CHF 1'844.- de loyer, CHF 601.40 d'assurance-maladie et CHF 138.80 de frais de transport. Il a des dettes à hauteur d'environ CHF 38'600.-.

Selon l'extrait de son casier judiciaire suisse, il a été condamné, le 17 avril 2019, par le MP à une peine pécuniaire de 30 jours-amende à CHF 30.- l'unité, avec un sursis de trois ans, ainsi qu'à deux amendes de respectivement CHF 100.- et CHF 500.- pour avoir circulé sans assurance- responsabilité civile (art. 96 al. 2 ch. 1 LCR) et sans permis de circulation ou plaques de contrôles (art. 96 al. 1 let. a LCR).

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. 2.1.1. Selon l'art. 339 al. 4 CPP, applicable par renvoi de l'art. 405 al. 1 CPP, les questions incidentes soulevées en cours de débats sont traitées comme des questions préjudicielles.

2.1.2. Aux termes de l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure de recours se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. L'art. 389 al. 3 CPP règle les preuves complémentaires. Ainsi, la juridiction de recours peut administrer, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours (arrêt du Tribunal fédéral 6B_78/2012 du 27 août 2012 consid. 3.1). Conformément à l'art. 139 al. 2 CPP, il n'y a pas lieu d'administrer des preuves sur des faits non pertinents, notoires, connus de l'autorité ou déjà suffisamment prouvés. L'autorité cantonale peut ainsi refuser des preuves nouvelles qui ne sont pas nécessaires au traitement de l'appel, en particulier lorsqu'une appréciation anticipée non arbitraire de la preuve démontre que celle-ci ne sera pas de nature à modifier le résultat de celles déjà administrées (ATF 144 II 427 consid. 3.1.3 ; 141 I 60 consid. 3.3 ; 136 I 229 consid. 5.3).

2.2. En l'espèce, la question incidente de l'appelant tendant à expertiser son état d'esprit au moment des faits des 18 octobre 2020 et 13 février 2021 doit être rejetée. En effet, si tant est qu'il soit possible d'établir une telle disposition d'esprit trois ans plus tard, cette question n'est pas pertinente pour trancher les faits, suffisamment instruits au demeurant. En outre, aucun élément au dossier ne permet de douter de sa responsabilité au moment des faits, au regard, notamment, du rapport pluridisciplinaire – établi postérieurement – qui ne retient aucun trouble sur le plan psychique. Enfin, la Cour relève que les nombreux documents médicaux produits n'apparaissent pas véritablement pertinents, puisqu'ils ne concernent ni les faits, ni les conséquences directes de ceux-ci.

3. 3.1.1. Le principe in dubio pro reo découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 Cst. et 10 al. 3 CPP. Il concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1 ; 127 I 28 consid. 2a).

Ce principe signifie, au stade du jugement, que le fardeau de la preuve incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. Le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes sérieux et irréductibles quant à l'existence de ce fait, une certitude absolue ne pouvant toutefois être exigée. (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3 ; 127 I 38 consid. 2a).

3.1.2. Le juge du fait dispose d'un large pouvoir dans l'appréciation des preuves (ATF 120 Ia 31 consid. 4b). Confronté à des versions contradictoires, il forge sa conviction sur la base d'un ensemble d'éléments ou d'indices convergents. Un ou plusieurs arguments corroboratifs peuvent demeurer fragiles si la solution retenue peut être justifiée de façon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature à emporter la conviction (ATF 129 I 8 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_324/2017 du 8 mars 2018 consid. 1.1).

Des faits du 18 octobre 2020

3.1.3. Se rend coupable d'injure quiconque aura, par la parole, l'écriture, l'image, le geste ou par des voies de fait, attaqué autrui dans son honneur (art. 177 al. 1 CP).

Pour apprécier si une déclaration est attentatoire à l'honneur, il faut se fonder non pas sur le sens que lui donne la personne visée, mais sur une interprétation objective selon le sens qu'un destinataire non prévenu doit, dans les circonstances d'espèce, lui attribuer (ATF 133 IV 308 consid. 8.5.1 ; 119 IV 44 consid. 2a ; 117 IV 27 consid. 2c).

3.1.4. L'art. 286 CP réprime quiconque aura empêché une autorité, un membre d'une autorité ou un fonctionnaire de faire un acte entrant dans ses fonctions.

Pour qu'il y ait opposition aux actes de l'autorité au sens de l'art. 286 CP, il faut que l'auteur, par son comportement, entrave l'autorité ou le fonctionnaire dans l'accomplissement d'un acte officiel. La norme définit une infraction de résultat. Il n'est pas nécessaire que l'auteur parvienne à éviter effectivement l'accomplissement de l'acte officiel. Il suffit qu'il le rende plus difficile, l'entrave ou le diffère (ATF 133 IV 97 consid. 4.2 ; 127 IV 115 consid. 2 ; 124 IV 127 consid. 3a p. 129).

Le comportement incriminé à l'art. 286 CP suppose une résistance qui implique une certaine activité (ATF 133 IV 97 consid. 4.2 ; 127 IV 115 consid. 2) On peut penser à celui qui, en restant fermement à sa place, ne se laisse pas ou difficilement emmener (B. CORBOZ, Les infractions en droit suisse, vol. II, 3e éd., 2010, n. 13 ad art. 286 CP). De même, le fait de garder fermement les mains dans les poches de son pantalon, alors que les gendarmes tentent de les faire sortir pour passer les menottes, revient à opposer une résistance active physique, qui dépasse le cadre de la simple désobéissance et qui empêche la police de procéder à une mesure de contrôle de sécurité, notamment de s'assurer que la personne n'est pas armée, constitutive d'infraction à l'art. 286 CP (arrêt du Tribunal fédéral 6B_333/2011 consid. 2.2.2).

L'infraction réprimée à l'art. 286 CP requiert l'intention ; le dol éventuel suffit.

3.1.5. Aux termes de l'art. 97 al. 1 let. e LCR, est puni d'une peine privative de liberté de trois ans ou d'une peine pécuniaire quiconque falsifie ou contrefait des plaques de contrôle pour en faire usage. La lettre f de cette disposition réprime également l'utilisation de telles plaques dans la circulation publique.

Des copies fidèles de vraies plaques de contrôle sont considérées comme falsifiées dès lors qu'elles n'ont pas été établies par l'autorité compétente et indifféremment du matériel utilisé. Aucune intention ou action d'induire en erreur n'est requise et la négligence est punissable (ATF 143 IV 515 consid. 1.1 à 1.3).

3.1.6. Selon l'art. 21 CP, quiconque ne sait ni ne peut savoir au moment d'agir que son comportement est illicite n'agit pas de manière coupable. Le juge atténue la peine si l'erreur était évitable.

L'erreur sur l'illicéité vise le cas où l'auteur agit en ayant connaissance de tous les éléments constitutifs de l'infraction, et donc avec intention, mais en croyant par erreur agir de façon licite. La réglementation relative à l'erreur sur l'illicéité repose sur l'idée que le justiciable doit faire tout son possible pour connaître la loi et que son ignorance ne le protège que dans des cas exceptionnels (ATF 129 IV 238 consid. 3.1). Pour exclure l'erreur de droit, il suffit que l'auteur ait eu le sentiment de faire quelque chose de contraire à ce qui se doit ou qu'il eût dû avoir ce sentiment (ATF 104 IV 217 consid. 2). Seul peut être mis au bénéfice de l'erreur sur l'illicéité celui qui a une raison suffisante de se croire en droit d'agir, soit à qui aucun reproche ne peut être adressé parce que son erreur provient de circonstances qui auraient pu induire en erreur toute personne consciencieuse (ATF 128 IV 201 consid. 2). L'erreur sera notamment considérée comme évitable lorsque l'auteur avait ou aurait dû avoir des doutes quant à l'illicéité de son comportement (ATF 121 IV 109 consid. 5) ou s'il a négligé de s'informer suffisamment alors qu'il savait qu'une réglementation juridique existait (ATF 120 IV 208 consid. 5b).

3.2. En l'espèce, l'appelant reconnait avoir créé et utilisé une réplique en papier de sa plaque de contrôle perdue, de sorte que les éléments constitutifs objectifs de l'infraction sont manifestement réalisés. Sa justification, à savoir qu'il aurait agi sur conseil de son garagiste en attendant de se rendre à l'OCV ne lui est d'aucun secours. En effet, le témoin F______ a formellement contesté avoir jamais été contacté à ce propos par l'appelant, lui-même connaissant parfaitement la procédure devant être suivie en pareil cas. En tout état, même à le suivre, l'appelant ne remplit pas les conditions de l'erreur sur l'illicéité, puisque son erreur n'était pas inévitable. Toute personne consciencieuse n'aurait en effet pas tenu la contrefaçon en cause pour licite en se contentant de l'avis d'un garagiste, sans se renseigner auprès des autorités compétentes en matière d'immatriculation, ce d'autant que cette démarche ne présentait aucune difficulté.

En ce qui concerne les injures et l'empêchement d'accomplir un acte officiel, la Cour relève, à titre liminaire, que les déclarations du témoin E______ n'apportent aucun éclairage probant, dans la mesure où celui-ci a reconnu n'avoir rien compris de ce qu'il s'était dit ou passé, d'une part, et la vidéo ne montrant aucun tiers se situant à quelques mètres du lieu d'interpellation, la personne se trouvant aux côtés des protagonistes étant – selon les premières déclarations de l'appelant – un autre témoin dénommé D______, de sorte que la présence de l'intéressé sur les lieux apparait douteuse, d'autre part.

Le premier juge a tenu pour établi que l'appelant s'était rendu coupable d'injure dès lors que les policiers avaient rapporté de manière constante et cohérente que celui-ci avait dit "fuck the police" et traité le caporal de "raciste", ce qu'il avait de surcroît reconnu, s'agissant de ce dernier terme. Compte tenu de la teneur de l'acte d'accusation et du fait que le dispositif retient l'acquittement de l'appelant pour l'infraction de diffamation, la Cour estime que ce dernier a bien été acquitté de toute prévention pour le mot "raciste", aucune requalification juridique n'ayant été annoncée sur ce terme alors que tel a été le cas pour l'art. 286 CP. Cela étant, la Cour apprécie le revirement de l'appelant, qui nie désormais avoir traité le caporal de raciste, comme une nouvelle démonstration de son caractère versatile. Par opposition, les policiers, agents publics assermentés, ont été constants dans leurs déclarations et aucun élément au dossier ne permet d'établir qu'ils auraient menti ou été à la recherche d'un quelconque bénéfice secondaire, de sorte qu'ils apparaissent crédibles. L'expression "fuck the police" est manifestement attentatoire à l'honneur, ce qui n'est pas contesté pour le surplus. Aussi, c'est à bon droit que le premier juge a reconnu l'appelant coupable d'injure.

S'agissant enfin de l'empêchement d'accomplir un acte officiel, il est établi, à teneur des images de vidéosurveillance ainsi que des propos concordants des policiers, que l'appelant ne s'est volontairement pas laissé menotter, gardant tantôt les bras figés contre son corps, tantôt les remuant pour tenter de se libérer de l'emprise des policiers. Ses explications quant à un éventuel réflexe de raidissements involontaire ne convainquent pas la Cour, laquelle relève que les rapports médicaux – établis deux ans après les faits – ne soulignent aucune anormalité à ce niveau. Par ailleurs, après visionnement desdites images, son propre médecin en a déduit qu'il "s'était opposé aux menottes" ; c'est dire à quel point la situation ne souffre d'aucune autre interprétation possible.

Au vu de ce qui précède, les condamnations de l'appelant pour injures, empêchement d'accomplir un acte officiel, contrefaçon et utilisation de plaques de contrôle seront confirmées.

Des faits du 13 février 2021

3.3. Aux termes de l'art. 91a al. 1 LCR, quiconque, en qualité de conducteur d'un véhicule automobile, s'oppose ou se dérobe intentionnellement à une prise de sang, à un contrôle au moyen de l'éthylomètre ou à un autre examen préliminaire réglementé par le Conseil fédéral, qui a été ordonné ou dont le conducteur devait supposer qu'il le serait, ou quiconque s'oppose ou se dérobe intentionnellement à un examen médical complémentaire ou fait en sorte que des mesures de ce genre ne puissent atteindre leur but, sera puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

La dérobade est liée à la violation des devoirs en cas d'accident. En effet, ce n'est qu'en cas d'accident, où des éclaircissements sur le déroulement des événements s'avèrent nécessaires, que l'on peut dire que le conducteur devait s'attendre avec une haute vraisemblance à ce qu'une mesure visant à établir son alcoolémie soit ordonnée (ATF 126 IV 53 consid. 2a ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_927/2014 du 16 janvier 2015 consid. 2.1 et 6B_17/2012 du 30 avril 2012 consid. 3.2.1). Ainsi, les éléments constitutifs de la dérobade sont au nombre de deux : (1) l'auteur doit violer une obligation d'aviser la police en cas d'accident, alors que cette annonce est destinée à l'établissement des circonstances de l'accident et est concrètement possible ; (2) l'ordre de se soumettre à une mesure d'investigation de l'état d'incapacité de conduire doit apparaître objectivement comme hautement vraisemblable au vu des circonstances (ATF 142 IV 324 consid. 1.1.1).

L'art. 51 al. 1 LCR dispose qu'en cas d’accident où sont en cause des véhicules automobiles ou des cycles, toutes les personnes impliquées devront s’arrêter immédiatement. Elles sont tenues d’assurer, dans la mesure du possible, la sécurité de la circulation.

Selon l'art. 55 al. 1 LCR, les conducteurs de véhicules, de même que les autres usagers de la route impliqués dans un accident, peuvent être soumis à un alcootest. Il est possible d'ordonner une telle investigation même en l'absence de tout soupçon préalable. Par ailleurs, l'art. 10 al. 1 de l'ordonnance sur le contrôle de la circulation routière (OCCR) permet à la police de procéder de manière systématique à des tests préliminaires pour déterminer s'il y a eu consommation d'alcool. Il y a donc de manière générale lieu de s'attendre à un contrôle de l'alcoolémie en cas d'accident, sous réserve que celui-ci soit indubitablement imputable à une cause totalement indépendante du conducteur (ATF 142 IV 324 consid. 1.1.2 et 1.1.3).

L'élément subjectif est donné lorsque l'auteur connaissait les faits fondant son obligation d'avertir la police d'une part. D'autre part, il faut qu'il ait eu la conscience de la haute vraisemblance de la prise de sang et qu'il ait voulu entraver cette mesure (ATF 131 IV 36 consid. 2.2.4 rendu sous l'empire de l'art. 91 al. 3 aLCR ; arrêt 6B_927/2014 précité).

3.4. En l'espèce, l'appelant a admis avoir perdu la maitrise de son véhicule, créant de la sorte un accident. Au vu de l'ampleur de l'embardée et des dégâts (véhicule en dommage total), l'appelant ne pouvait ignorer son obligation d'aviser la police, ne serait-ce que pour déplacer sa voiture de la voie de circulation, ainsi que celle de se soumettre à tous les contrôles utiles permettant d'éclaircir les circonstances. Ses explications quant au fait qu'il ne pouvait lui-même prévenir la police ne sont pas crédibles, arguant tantôt penser avoir oublié son téléphone chez lui alors qu'il venait de terminer une conversation avec son épouse (sic!), tantôt le chercher en vain dans le véhicule, puis enfin l'avoir eu dans son champ de vision sans pouvoir réagir en raison de son état de choc. Il n'est pas davantage crédible lorsqu'il allègue être parti après avoir attendu un moment, tandis que des badauds se seraient occupés d'appeler une dépanneuse et les forces de l'ordre. La procédure a en effet établi que ce n'était qu'à la suite de l'appel de la témoin K______ que la police avait été avertie de l'accident, d'une part, et de la présence du véhicule abandonné sur la chaussée, d'autre part, l'intervention de la police n'ayant pas été demandée auparavant. Ainsi, l'appelant n'a jamais – directement ou indirectement – prévenu la police de l'accident, pas plus qu'il ne s'est rendu au poste de police, selon ses explications confuses, le lendemain voire le surlendemain, le rapport établissant par ailleurs qu'il ne s'est présenté que cinq jours plus tard.

Cela étant, la Cour observe que l'appelant a beaucoup varié dans ses déclarations et s'est contredit à plusieurs reprises, justifiant son départ des lieux par le choc émotionnel et les souffrances physiques subies, puis dans un second temps, par le fait qu'il était de surcroît souillé d'urine, avant de finalement se retrancher, en appel, derrière le fait qu'il s'agissait d'un véhicule prêté et qu'il ignorait la procédure à suivre en cas d'accident, arguments qui ne lui sont d'aucun secours pour les manquements reprochés puisqu'ils ne justifient en aucun cas son omission. Il ne peut non plus être suivi lorsqu'il allègue avoir eu l'intention de revenir sur place – et corolairement n'avoir jamais eu celle de se soustraire aux mesures idoines – une fois avoir pris ses médicaments, puisqu'il savait que ces derniers étaient susceptibles de l'épuiser et/ou d'altérer ses capacités, les prenant uniquement avant de dormir. Un tel comportement pourrait, par ailleurs, à lui seul, être qualifié d'entrave aux mesures de constatation. Par surabondance, l'appelant allègue désormais en appel avoir voulu "s'en occuper le lendemain", faisant référence au véhicule prêté abandonné, admettant ainsi s'être dérobé à ses obligations immédiates. Enfin, comme souligné à juste titre par le premier juge, l'appelant s'est contredit lorsqu'il a affirmé qu'il n'avait plus touché une seule goutte d'alcool depuis près de sept mois – insinuant, en d'autres termes, qu'aucune incapacité n'était à établir ce jour-là – alors qu'à teneur de la procédure, il en avait consommé à tout le moins le 18 octobre 2020, achevant de décrédibiliser sa posture procédurale.

Pour tous ces motifs, il appert que l'appelant a bien quitté les lieux de l'accident sans prévenir ni attendre l'arrivée de la police, alors qu'il devait se douter, au vu des circonstances, que des mesures visant à vérifier sa capacité à conduire seraient ordonnées. Partant, le jugement sera confirmé.

4. 4.1.1. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

4.1.2. La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1). L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2).

4.1.3. À teneur de l'art. 49 al. 1 CP, si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion. Il ne peut toutefois excéder de plus de la moitié le maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il est en outre lié par le maximum légal de chaque genre de peine.

4.1.4. Aux termes de l'art. 54 CP, si l'auteur a été directement atteint par les conséquences de son acte au point qu'une peine serait inappropriée, l'autorité compétente renonce à le poursuivre, à la renvoyer devant le juge ou à lui infliger une peine.

Tel est notamment le cas si l'auteur a subi des atteintes physiques résultant de la commission même de l'infraction – par exemple s'il a été blessé lors de l'accident qu'il a provoqué – ou psychiques – comme celles qui affectent une mère de famille devenue veuve par suite de l'accident de la circulation qu'elle a causé (ATF 119 IV 280 consid. 2b).

4.1.5. Le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine-pécuniaire lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits (art. 42 al. 1 CP).

L’art. 46 al. 1 CP dispose que si, durant le délai d’épreuve, le condamné commet un crime ou un délit et qu’il y a dès lors lieu de prévoir qu’il commettra de nouvelles infractions, le juge révoque le sursis ou le sursis partiel. Par analogie avec l'art. 42 al. 1 et 2 CP, le juge se fonde sur une appréciation globale des circonstances du cas pour estimer le risque de récidive. Il peut parvenir à la conclusion que l'exécution, le cas échéant, de la nouvelle peine aura un effet dissuasif suffisant, justifiant de renoncer à la révocation du sursis antérieur (ATF 134 IV 140 consid. 4.2 à 4.5).

4.2.1. L'infraction à l'art. 177 CP est réprimé d'une peine pécuniaire de 90 jours-amende au plus, tandis que celle à l'art. 286 CP l'est de 30 jours-amende au maximum. L'infraction simple à la circulation routière est punie de l'amende, tandis que pour la contrefaçon de plaques de contrôle, leur utilisation, ainsi que la dérobade aux mesures de constatation de l'incapacité de conduire, la peine prévue est une peine privative de liberté de trois ans au plus ou une peine pécuniaire.

4.2.2. En l'espèce, la faute de l'appelant est sérieuse puisqu'il a porté atteinte à plusieurs biens juridiques protégés différents, soit au travail de la police, à l'honneur d'autrui et à la sécurité routière.

Sa situation personnelle, certes précaire, n'explique ni n'excuse ses agissements.

Sa collaboration à la procédure ne peut être qualifiée de bonne puisqu'il n'a eu de cesse de varier dans ses déclarations, servant plusieurs versions successives, souvent contradictoires, voire contraires à ses intérêts.

Sa prise de conscience demeure limitée.

Il a des antécédents en matière de circulation routière.

Il y a concours d'infractions passibles d'un même genre de peine. Le prononcé d'une peine pécuniaire, par opposition à une peine privative de liberté, est acquis à l'appelant et apparait au surplus suffisant pour prévenir d'une récidive et ainsi garantir la sécurité publique.

La Cour relève que le lien de causalité n'est, en l'état, pas établi entre les limitations fonctionnelles actuelles alléguées par l'appelant et l'accident de voiture dont il est responsable, étant précisé qu'il se plaint également de maltraitances médicales et de complications post-opératoires en lien avec l'intervention chirurgicale du 14 février 2021. Dans ces conditions, il n'y a pas de place pour une quelconque atténuation et/ou exemption de peine.

L'infraction d'entrave aux mesures de constatation de l'incapacité de conduire étant objectivement la plus grave, elle justifierait à elle seule une peine pécuniaire de 100 jours-amende. Cette peine devrait être aggravée de 15 jours-amende pour tenir compte de l'empêchement d'accomplir un acte officiel (peine hypothétique: 30 jours), de dix jours-amende supplémentaires pour la contrefaçon de plaque de contrôle (peine hypothétique : 20 jours-amende), augmentés de dix jours-amende pour leur utilisation (peine hypothétique : 20 jours-amende), et enfin de 15 jours-amende pour l'injure (peine hypothétique: 30 jours). Ainsi, une peine pécuniaire de 150 jours-amende réprimerait adéquatement l'ensemble de ces infractions. En vertu de l'interdiction de la reformatio in pejus, la peine pécuniaire prononcée par le premier juge de 100 jours-amende, à CHF 30.- l'unité, sera confirmée.

Le sursis est acquis à l'appelant, la durée de son délai d'épreuve fixé à quatre ans sera également confirmée comme paraissant adéquate, de même que la renonciation à révoquer le sursis antérieur.

5. L'appelant, qui succombe, supportera les frais de la procédure de deuxième instance (art. 428 CPP), lesquels comprendront un émolument en CHF 1'500.-.

Vu l'issue de la procédure, il n'y a pas lieu de revoir la répartition des frais de première instance. L'émolument de jugement complémentaire en CHF 600.- sera également mis à sa charge.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement rendu le 2 février 2023 par le Tribunal de police dans la procédure P/19602/2020.

Le rejette.

Condamne A______ aux frais de la procédure d'appel, en CHF 1'855.-, qui comprennent un émolument de CHF 1'500.-.

Confirme le jugement entrepris, dont le dispositif est le suivant :

"Déclare A______ coupable d'injure (art. 177 al. 1 CP), d'empêchement d'accomplir un acte officiel (art. 286 al. 1 CP), d'entrave aux mesures de constatation de l'incapacité de conduire (art. 91 al. 1 let. e LCR) (91a al. 1 LCR [art. 83 al. 1 CPP]), de falsification ou contrefaçon de plaques de contrôle (art. 97 al. 1 let. e LCR), d'utilisation de plaques de contrôle falsifiées ou contrefaites (art. 97 al. 1 let. f LCR) et de violation simple des règles de la circulation routière (art. 90 al. 1 LCR).

Acquitte A______ de diffamation (art. 173 ch. 1 CP) et d'entrave aux mesures de constatation de l'incapacité de conduire (art. 91 al. 1 let. e LCR) pour les faits du 18 octobre 2020.

Condamne A______ à une peine pécuniaire de 100 jours-amende, sous déduction de 1 jour-amende, correspondant à 1 jour de détention avant jugement (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 30.-.

Met A______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 4 ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit A______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Renonce à révoquer le sursis octroyé le 17 avril 2019 par le Ministère public du canton de Genève mais adresse un avertissement à A______ et prolonge le délai d'épreuve de 1 an (art. 46 al. 2 CP).

Condamne A______ aux frais de la procédure, arrêtés à 1'800.- (art. 426 al. 1 CPP).

Laisse le solde des frais à la charge de l'Etat (art. 423 al. 1 CPP).

Fixe à CHF 3'747.95 l'indemnité de procédure due à Me L______, défenseur d'office de A______ (art. 135 CPP).

(…)

 

Fixe l'émolument complémentaire de jugement à CHF 600.-.

Met cet émolument complémentaire à la charge de A______."

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police, à l'Office cantonal de la population et des migrations ainsi qu'au Service de l'application des peines et mesures.

 

La greffière :

Sarah RYTER

 

La présidente :

Catherine GAVIN

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

2'400.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

0.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

200.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

80.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'500.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'855.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

4'255.00