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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/887/2021

AARP/233/2022 du 15.08.2022 sur JTDP/118/2022 ( PENAL ) , REJETE

Descripteurs : VIOLATION DES DEVOIRS EN CAS D'ACCIDENT;ACQUITTEMENT
Normes : LCR.92; LCR.51
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/887/2021 AARP/233/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 15 août 2022

 

Entre

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/118/2022 rendu le 7 février 2022 par le Tribunal de police,

 

et

A______, domiciliée ______, comparant par Me Samir DJAZIRI, avocat, DJAZIRI & NUZZO, rue Leschot 2, 1205 Genève,

LE SERVICE DES CONTRAVENTIONS, p.a. Nouvel Hôtel de Police, chemin de la Gravière 5, 1227 Les Acacias,

intimés.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, le Ministère public (MP) appelle du jugement du 7 février 2022, par lequel le Tribunal de police (TP) a acquitté A______ de contravention aux devoirs en cas d'accident (art. 51 cum 92 al. 1 de la loi fédérale sur la circulation routière [LCR]), mais l'a reconnue coupable de violation des règles de la circulation routière (art. 90 al. 1 LCR) et l'a condamnée à une amende de CHF 100.- (art. 106 du Code pénal [CP] ; peine privative de liberté de substitution : un jour). Les frais de la procédure, arrêtés à CHF 200.-, ont été mis à la charge de A______ et une indemnité de CHF 500.- lui a été octroyée pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure (art. 429 al. 1 let. a du Code de procédure pénale [CPP]).

b. Par acte du 19 avril 2022, le MP conclut à ce que A______ soit également reconnue coupable d'infraction à l'art. 92 al. 1 cum 51 LCR et condamnée à une amende de CHF 2'140.-, la peine privative de liberté de substitution devant être fixée à 21 jours, frais de la procédure à sa charge en intégralité, à l'exclusion de toute indemnité.

c. Selon l'ordonnance (no 3______) du Service des contraventions (SDC) du 15 mai 2020, il est reproché à A______ d'avoir, le 19 décembre 2019 à 09h09 [recte : vers 17h00], au quai du Général-Guisan à Genève, au volant de son véhicule de marque B______ (GE 1______), effectué une marche arrière sans précaution, avec accident et dégâts matériels légers et heurté le véhicule de marque C______ (VD 2______), ainsi que d'avoir manqué à ses devoirs en cas d'accident avec dommages matériels.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a.a. Le 19 décembre 2019, entre 09h09 et 20h21 selon le rapport d'accident, dans le parking souterrain du Mont-Blanc, A______ a, au volant de son véhicule B______ blanc, effectué une marche arrière et heurté le véhicule C______ gris/noir de D______.

A______ a quitté les lieux sans laisser ses coordonnées sur la voiture de D______, ni avertir la police du heurt.

Le 30 décembre suivant, D______ s'est présentée à la police pour annoncer que sa voiture avait été endommagée le 19 décembre 2019. Une photo de sa voiture prise par la police le même jour laisse entrevoir quelques rayures blanches sur le flanc arrière-droit du pare-chocs.

a.b. L'examen des images de vidéo-surveillance extraites montre que le véhicule de A______ effectue une marche arrière, à faible vitesse, pour quitter une place de parc et heurte, avec l'arrière-gauche, le flanc arrière-droit du véhicule de D______, stationné perpendiculairement. Au même moment, une jeune fille chemine à pied dans la direction du véhicule de A______, voit son attention attirée par le heurt et observe brièvement, à distance, la voiture de D______. La piétonne contourne ensuite l'avant de la voiture de A______, puis revient sur ses pas, ouvre la portière droite et échange avec la conductrice, avant de poursuivre sa route. A______ sort de son véhicule, observe et touche la voiture de D______, puis la sienne, avant de la regagner et de quitter les lieux.

a.c. Selon le "détail d'un événement" inscrit le 19 décembre 2019 à 17h04 par la société E______, un client avait constaté que l'arrière-gauche du véhicule GE 1______ avait touché le véhicule VD 2______ au niveau du pare-chocs. Le 22 décembre 2019, une dame était venue remplir le formulaire de demande de recherche d'images avant de se rendre au poste de police.

a.d. Une photo du véhicule de A______, prise le 6 janvier 2020 par la police, ne laisse pas apparaître de dégâts.

b. Contactée par le gendarme F______ le 3 janvier 2020, A______ a d'emblée reconnu avoir touché la voiture de D______, mais exposé ne pas avoir constaté de dégâts, raison pour laquelle elle n'avait pas laissé ses coordonnées.

c.a. Le 10 janvier 2020, A______ et D______ ont signé un constat d'accident à l'amiable au poste de police, lequel indique que le flanc arrière-droit du véhicule de D______ et le flanc arrière-gauche de celui de A______ avaient été endommagés.

c.b. Fin février 2020, D______ a indiqué à la police que son assurance, soit G______, rencontrait des difficultés avec l'assurance de A______, soit H______, pour le traitement des suites de l'accident.

c.c. Contactée téléphoniquement par la police, A______ a alors déclaré avoir signé le constat à l'amiable "sous pression", en reprochant au gendarme F______ de ne pas avoir vérifié les dégâts allégués sur le véhicule de D______.

d. Le 27 mai 2020, A______ a adressé à la Commandante de la police un courrier concernant l'"accident avec de légers dégâts" qui s'était produit le 19 décembre 2019. En substance, elle a répété ne pas avoir constaté de dégâts, ni sur le véhicule de D______ ni sur le sien, le témoin présent lui ayant d'ailleurs déclaré qu'il n'y en avait pas et qu'elle avait dès lors de la chance. Lors d'un premier entretien avec le policier F______, ils s'étaient aperçu qu'il y avait de "très légères traces grises" sur la partie arrière-gauche de son véhicule, lesquelles s'étaient toutefois enlevées facilement avec un chiffon. Elle avait alors évoqué la possibilité d'un constat à l'amiable, tout en demandant à voir les dégâts prétendument causés. Lors d'un deuxième entretien avec ce même agent, D______ s'était présentée sans son véhicule et avait allégué que celui-ci avait subi une simple éraflure. A cette occasion, elle avait signé le rapport amiable sous pression, en se souciant des répercussions sur sa prime d'assurance et alors que les dégâts allégués n'avaient pas fait l'objet d'un constat. D'après l'expertise reçue par la suite, les dégâts existants sur le véhicule de D______, soit une éraflure et une fente sur le pare-chocs, avaient été causés par un impact venant de l'arrière et non du côté latéral. Elle n'avait ainsi pas pu commettre ces dommages, raison pour laquelle elle ne les avait pas constatés lors de l'incident.

e.a. En première instance, A______ a maintenu avoir très légèrement touché, en reculant, la droite du véhicule de D______, garé derrière elle, sans lui causer de dégâts, aux alentours de 17h00. Une dame lui avait d'ailleurs dit qu'elle avait eu beaucoup de chance car il n'y avait rien. Elle était elle-même sortie pour voir s'il y avait quelque chose ou pas et avait vu une légère trace de frottement. Elle avait alors frotté avec sa main ou sa manche et "c'était parti".

Elle avait signé le constat d'accident à la demande du gendarme qui l'avait rédigé. Elle était revenue sur sa décision, car il y avait des choses qui n'étaient pas correctes. Si elle avait vu des dégâts sur le véhicule de D______, elle aurait laissé son numéro, ce d'autant plus qu'elle était assurée.

e.b. A______ a notamment produit une expertise de G______ du 19 février 2020, selon laquelle la partie arrière-droite du véhicule de D______ était accidentée. La partie droite du pare-chocs arrière était perforée, les enjoliveurs d'aile arrière-droite et le pare-chocs arrière étaient légèrement déformés et griffés. Le point d'impact provenait du centre de l'arrière de la voiture. Le coût des réparations s'était élevé à CHF 1'805.15.

C. a. Par décision présidentielle du 23 mai 2022, la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR) a ordonné la procédure écrite (art. 406 al. 1 let. c CPP et 129 al. 4 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 [LOJ]).

b. Aux termes de son mémoire d'appel, le MP persiste dans ses conclusions.

Le TP avait retenu à tort qu'un doute subsistait quant aux conséquences du heurt, au vu des éléments objectifs recueillis et des déclarations contradictoires de l'intimée. Elle avait reconnu avoir quitté les lieux, sans informer D______ et sans avoir fait appel à la police. Les dégâts occasionnés au véhicule touché étaient établis par la photo prise le 30 décembre 2019, le rapport d'expertise de G______ du 19 février 2019 et la plainte de la lésée, qui n'était intervenue que parce que cette dernière avait constaté des dégâts sur son véhicule suite à son stationnement dans le parking du Mont-Blanc le 19 décembre 2019. Ils correspondaient, en outre, au déroulement du heurt décrit par la prévenue, corroboré par les extraits de vidéosurveillance ainsi que par le constat à l'amiable. Aucun élément du dossier ne permettait de considérer que ces dégâts auraient pu survenir à une autre occasion, ni de retenir que la prévenue avait été contrainte, d'une quelconque façon, d'établir un constat à l'amiable, l'ayant elle-même sollicité à teneur de son courrier du 27 mai 2020. Il en ressortait, par ailleurs, qu'elle avait elle-même constaté de légères traces grises sur la partie arrière-gauche de sa voiture, compatibles avec le déroulement du heurt, et qu'elle souhaitait pouvoir régler elle-même le montant des dégâts occasionnés, afin d'éviter une augmentation de sa prime d'assurance.

La faute de l'intimée n'était pas légère, ayant entraîné des conséquences non négligeables. La prévenue avait occasionné des dégâts matériels au véhicule de la lésée et avait quitté les lieux en violant ses obligations en cas d'accident. Ses mobiles relevaient d'une attention insuffisante aux règles de la LCR. Sa collaboration avait été médiocre, l'intéressée persistant à contester toute responsabilité dans l'accident.

c. Sous la plume de son conseil, A______ conclut au rejet de l'appel du MP et à l'octroi d'une indemnité d'un montant de CHF 1'784.60 pour ses frais de défense en appel, état de frais à l'appui facturant 5h35 d'activité à CHF 300.- (dont 1h35 de correspondances et communications diverses, ainsi que 4h00 d'étude du dossier et de rédaction de la réponse [cinq pages utiles]).

Le MP se bornait à substituer, de manière appellatoire, sa propre appréciation des preuves à celle du TP, alors que, s'agissant d'une contravention, le pouvoir de cognition de la CPAR était restreint.

Au demeurant, au vu des éléments du dossier, le TP avait retenu, à juste titre, que le heurt entre le véhicule de l'intimée et celui de D______ n'avait entraîné aucun dégât. Tel que cela ressortait notamment des images de vidéosurveillance, l'intimée était sortie de son véhicule immédiatement après le choc et avait indiqué, de manière constante et crédible, ne pas avoir alors constaté de dommages. C'était la raison pour laquelle, elle n'avait pas laissé ses coordonnées, ni annoncé de sinistre à son assureur, ce qui ne lui aurait posé aucune difficulté. Les marques visibles sur les photos prises par la police ne correspondaient absolument pas à l'endroit où le choc avait eu lieu. D'après les images de vidéosurveillance, celui-ci s'était produit entre l'arrière du véhicule de l'intimée et le flanc arrière-droit du véhicule de D______, alors que les dégâts constatés par la police se trouvaient sur le pare-chocs arrière. L'expertise de G______ produite établissait également que les dégâts se trouvant sur le véhicule de D______ étaient dus à un choc arrière. Aucun élément du dossier ne permettait de retenir l'existence de dégâts sur le véhicule de D______ à l'endroit du choc, ce d'autant que cette dernière n'avait présenté son véhicule que le 30 décembre 2019.

d. Le SDC appuie l'appel du MP, tandis que le TP conclut à la confirmation du jugement entrepris.

EN DROIT :

1. 1.1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du CPP). La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

1.2. Conformément à l'art. 129 al. 4 LOJ, lorsque des contraventions font seules l'objet du prononcé attaqué et que l'appel ne vise pas une déclaration de culpabilité pour un crime ou un délit, la direction de la procédure de la juridiction d'appel est compétente pour statuer.

1.3. En matière contraventionnelle, l'appel ne peut être formé que pour le grief selon lequel le jugement est juridiquement erroné ou l'état de fait a été établi de manière manifestement inexacte ou en violation du droit. Aucune nouvelle allégation ou preuve ne peut être produite (art. 398 al. 4 CPP).

Le pouvoir d'examen de l'autorité d'appel est ainsi limité dans l'appréciation des faits à ce qui a été établi de manière arbitraire (arrêt du Tribunal fédéral 6B_362/2012 du 29 octobre 2012 consid. 5.2). En outre, aucune allégation ou preuve nouvelle ne peut être produite devant l'instance d'appel (art. 398 al. 4, 2e phrase CPP). Il s'agit là d'une exception au principe du plein pouvoir de cognition de l'autorité de deuxième instance qui conduit à qualifier d'appel "restreint" cette voie de droit (arrêt du Tribunal fédéral 1B_768/2012 du 15 janvier 2013 consid. 2.1).

Le libre pouvoir de cognition dont elle dispose en droit confère à l'autorité cantonale la possibilité, si cela s'avère nécessaire pour juger du bien-fondé ou non de l'application d'une disposition légale, d'apprécier des faits que le premier juge a omis d'examiner, lorsque ceux-ci se révèlent être pertinents (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1247/2013 du 13 mars 2014 consid. 1.3).

2. 2.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.) et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large.

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. Comme règle d'appréciation des preuves, la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3 ;
138 V 74 consid. 7 p. 82).

2.2. D'après l'art. 92 al. 1 LCR, celui qui, lors d'un accident, aura violé les devoirs que lui impose la loi sur la circulation routière sera puni de l'amende.

2.2.1. Les devoirs en cas d'accident sont définis à l'art. 51 LCR (BUSSY/RUSCONI/JEANNERET/KUHN/MIZEL/MÜLLER, Code suisse de la circulation routière commenté, 4 e éd. 2015, n. 2.2 ad art. 92).

L'art. 51 al. 1 LCR fait notamment obligation aux personnes impliquées dans un accident de s'arrêter immédiatement (1ère phrase). Cette obligation est une mesure préalable à tous les autres devoirs en cas d'accident (BUSSY et. al., op. cit., n. 1.7 ad art. 51).

Si l'accident n'a causé que des dommages matériels, leur auteur en avertira tout de suite le lésé en indiquant son nom et son adresse. En cas d'impossibilité, il en informera sans délai la police (art. 51 al. 3 LCR).

L'obligation d'avis incombe à l'auteur du dommage (BUSSY et. al., op. cit., n. 3.2 ad art. 51). La valeur et la nature des dégâts causés n'entre pas en ligne de compte s'agissant de la naissance des devoirs en cas d'accident (Y. JEANNERET, Les dispositions pénales de la loi sur la circulation routière, Berne 2007, n. 100 ad art. 92). Le conducteur responsable doit donner son nom et son adresse même si le dommage matériel est peu important (p. ex. dommage de CHF 100.- ; BUSSY et. al., op. cit., n. 3.9 ad art. 51).

Dans un arrêt du 29 novembre 2021, le Tribunal fédéral a eu à connaître du cas d'un conducteur qui, en effectuant une marche arrière au volant de son véhicule pour sortir de son garage, avait heurté un véhicule stationné. Il a alors confirmé que le conducteur avait violé ses devoirs en cas d'accident, en omettant de vérifier sur-le-champ si un impact avait eu lieu et d'aviser le détenteur du véhicule parqué qu'il l'avait possiblement effleuré (arrêt du Tribunal fédéral 6B_335/2021 du 29 novembre 2021 consid. 2, 4.2. et 4.3).

2.2.2. La violation des devoirs en cas d'accident est punissable tant intentionnellement que par négligence (BUSSY et. al., op. cit., n. 1.2 ad art. 92 ; art. 100 al. 1 LCR). En la matière, s'agissant d'un délit d'omission pur, la distinction entre intention, dol éventuel, négligence et absence de culpabilité portera sur la conscience qu'a ou qu'aurait pu et/ou dû avoir l'auteur de la situation qui crée des devoirs à sa charge. Ainsi, viole intentionnellement ses devoirs en cas d'accident le conducteur qui a conscience de se trouver dans une situation d'accident et décide librement de ne pas satisfaire aux devoirs que lui impose la loi dans de telles circonstances. S'agissant de la négligence, elle découlera d'une imperfection non excusable dans la conscience de l'auteur de l'existence des circonstances propres à engendrer des devoirs (Y. JEANNERET, op. cit., n. 131-134 ad art. 92).

L'auteur doit tout au moins s'être rendu compte ou avoir dû se rendre compte qu'il y a eu des dégâts. La personne impliquée ne peut se dispenser d'un avis au lésé ou à la police que si elle est certaine de n'avoir causé aucun dommage (BUSSY et. al., op. cit., n. 3.5 ad art. 51).

2.3. En l'espèce, il est établi et non contesté qu'en date du 19 décembre 2019, en effectuant une marche arrière dans un parking souterrain du Mont-Blanc, l'intimée a heurté, avec le côté arrière-gauche de son véhicule blanc, le flanc arrière-droit de la voiture grise de D______, garée derrière elle.

On admettra avec le MP que différents indices permettent de retenir que l'intimée a, ce faisant, occasionné un dommage matériel à tout le moins léger au véhicule de D______. En effet, quand bien même la lésée a formellement annoncé à la police la survenance de dégâts sur son véhicule le 30 décembre 2019, il ressort du "détail d'un événement" inscrit le 19 décembre 2019 par la société E______, qu'"un client" a constaté que l'arrière-gauche du véhicule appartenant à l'intimée avait touché le véhicule de D______ au niveau du pare-chocs. Le 22 décembre suivant, une "dame", soit vraisemblablement la lésée, a sollicité une recherche d'images, aux fins de se rendre à la police. Ces éléments permettent de croire qu'un dommage, même minime, a été relevé sur le véhicule de D______ à la suite des faits. La photo de la voiture de cette dernière prise par la police le 30 décembre 2019 démontre, au demeurant, quelques rayures blanches sur le flanc arrière-droit, au niveau du pare-chocs. Or, il y a une coïncidence de traces, puisque, d'après les propres explications de l'intimée, elle avait ultérieurement relevé de "très légères traces grises" sur la partie arrière-gauche de son véhicule. Les éventuels dires de la piétonne présente n'apparaissent pas déterminants, dès lors qu'il ressort des images recueillies que celle-ci ne s'est pas rendue près du véhicule touché, de même que le rapport de G______ du 19 février 2019, qui ne peut faire état que d'une reconstitution approximative des faits.

Cela étant, sous l'angle subjectif, l'intimée apparaît crédible lorsqu'elle soutient avoir cru qu'elle n'avait causé aucun dommage et ne pas avoir voulu se soustraire à ses obligations en cas d'accident. En effet, tel que le démontrent les images de vidéosurveillance recueillies, l'intimée est bien sortie de son véhicule à la suite du choc, a observé et touché la voiture heurtée, de même que la sienne. Elle n'a alors constaté qu'une légère trace sur le véhicule touché, mais a affirmé que celle-ci était partie en frottant, ce qui doit lui être concédé au bénéfice du doute. Elle était ainsi certaine, en quittant les lieux, de ne pas avoir provoqué de dommages. Dans ces conditions, on ne saurait retenir à sa charge qu'elle a entendu se dérober, avec conscience et volonté, à ses devoirs en cas d'accident. En tout état de cause, au vu des circonstances précitées, son erreur apparaîtrait encore excusable.

Partant, l'autorité de première instance n'a, en tout état de cause, pas fait preuve d'arbitraire en prononçant l'acquittement de l'intimée du chef de contravention aux devoirs en cas d'accident (art. 51 LCR cum 92 al.1 LCR), cette conclusion devant être confirmée.

Pour le reste, le verdict de culpabilité rendu du chef de violation simple des règles de la circulation routière (art. 90 al. 1 LCR) est acquis (art. 402 CPP) et il ne se justifie pas de revenir sur la sanction assortie, qui consacre une correcte application des critères légaux (art. 47 et 106 CP). Le jugement entrepris doit ainsi être confirmé.

3. L'appel du MP étant rejeté, les frais de la procédure d'appel seront laissés à la charge de l'État (art. 428 CPP ; L. MOREILLON / A. PAREIN-REYMOND, Petit commentaire CPP, Bâle 2016, n. 4 ad art. 428). Il n'y a pas lieu de revoir la répartition des frais de première instance (art. 428 al. 3 CPP).

4. 4.1. L'art. 429 al. 1 let. a CPP prévoit que si le prévenu est acquitté totalement ou en partie ou s'il bénéficie d'une ordonnance de classement, il a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure.

La décision sur les frais préjuge de la question de l'indemnisation (ATF 137 IV 352 consid. 2.4.2 p. 357).

L'autorité pénale amenée à fixer une indemnité sur un tel fondement n'a pas à avaliser purement et simplement les notes d'honoraires d'avocats qui lui sont soumises : elle doit, au contraire, examiner, tout d'abord, si l'assistance d'un conseil était nécessaire, puis, dans l'affirmative, apprécier objectivement la pertinence et l'adéquation des activités facturées, par rapport à la complexité juridique et factuelle de l'affaire, et, enfin, dire si le montant des honoraires réclamés, même conformes au tarif pratiqué à Genève, est proportionné à la difficulté et à l'importance de la cause, c'est-à-dire raisonnable au sens de la loi (ACPR/140/2013 du 12 avril 2013).

4.2. En l'occurrence, la défense de l'intimée en appel ne justifiait raisonnablement pas plus de quatre heures d'activité, soit une heure consacrée aux communications diverses, une heure d'étude du dossier, lequel était déjà bien connu du conseil, et deux heures pour la rédaction de l'écriture produite.

En conséquence, une indemnité de CHF 1'292.40 (4 x CHF 300.- + CHF 92.40 de TVA) sera allouée à l'intimée pour ses frais de défense en appel.

Il ne se justifie pas de revenir sur l'indemnité allouée à ce titre à l'intimée en première instance, au vu de l'acquittement confirmé.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA PRÉSIDENTE
DE LA CHAMBRE PÉNALE D'APPEL ET DE RÉVISION :

 

Reçoit l'appel formé par le Ministère public contre le jugement JTDP/118/2022 rendu le 7 février 2022 par le Tribunal de police dans la procédure P/887/2021.

Le rejette.

Laisse les frais de la procédure d'appel à la charge de l'État.

Alloue à A______ une indemnité de CHF 1'292.40 pour ses frais de défense en appel (art. 429 al. 1 let. a CPP).

Confirme le jugement entrepris, dont le dispositif est le suivant :

"Déclare A______ coupable de violation des règles de la circulation routière (art. 90 al. 1 LCR).

Acquitte A______ de contravention aux devoirs en cas d'accident (art. 51 LCR cum 90 92 [rectification d'office: art. 83 al. 1 CPP] al.1 LCR).

Condamne A______ à une amende de CHF 100.- (art. 106 CP).

Prononce une peine privative de liberté de substitution de 1 jour.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.

Condamne A______ aux frais de la procédure, arrêtés à CHF 200.-. (art. 426 al. 1 CPP).

Condamne l'Etat de Genève à verser à A______ CHF 500.- à titre d'indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure (art. 429 al. 1 let. a CPP)."


 

 

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police et à l'Office cantonal des véhicules.

 

Le greffier :

Alexandre DA COSTA

 

La présidente :

Alessandra CAMBI FAVRE-BULLE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.