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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/2827/2021

AARP/188/2022 du 28.06.2022 sur JTDP/987/2021 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Recours TF déposé le 28.07.2022, rendu le 14.10.2022, IRRECEVABLE
Normes : LPG.11F; LEP.6; aOCOVID19SP.3a; LOJ.129.al4; CPP.398.al4
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/2827/2021 AARP/188/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 28 juin 2022

 

Entre

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/987/2021 rendu le 28 juillet 2021 par le Tribunal de police,

 

et

A______, comparant en personne,

LE SERVICE DES CONTRAVENTIONS, chemin de la Gravière 5, case postale 104, 1211 Genève 8,

intimés.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, le Ministère public (ci-après : MP) appelle du jugement du 28 juillet 2021, par lequel le Tribunal de police (ci-après : TP) a acquitté A______ de ne pas avoir respecté l'obligation de porter le masque de protection (art. 6 et ss de la loi fédérale sur la lutte contre les maladies transmissibles de l'homme [Loi sur les épidémies, LEp] et 3a et ss de l'ordonnance sur les mesures destinées à lutter contre l'épidémie de COVID-19 en situation particulière du 19 juin 2020 [Ordonnance COVID-19 situation particulière, OCOVID-19]) et de refus d'obtempérer à une injonction d'un membre de la police ou d'un agent de police municipale (art. 11F de la loi modifiant la loi pénale genevoise [LPG]), laissant les frais de la procédure en CHF 451.- à la charge de l'Etat.

Le MP entreprend intégralement ce jugement, concluant à ce que A______ soit reconnu coupable de non-respect de l'obligation de porter le masque de protection et de refus d'obtempérer à une injonction d'un membre de la police ou d'un agent de police municipale et condamné à une amende de CHF 550.- ainsi qu'aux frais de la procédure.

b. Selon l'ordonnance pénale rendue par le Service des contraventions (ci-après : SDC) le 11 décembre 2020, il est reproché à A______ de ne pas avoir, à la place 1______, à Genève, le 14 novembre 2020 à 14h50, respecté l'obligation de porter le masque de protection et d'avoir refusé d'obtempérer à une injonction d'un membre de police ou d'un agent de police.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. Il ressort du rapport de contravention établi le 25 novembre 2020 par l'Appointé B______, que lors d'une manifestation non autorisée située sur la place 1______, A______ avait été aperçu en train de déambuler au milieu de la foule sans porter de masque de protection et sans respecter la distance minimale de 1.5 m.

Après avoir présenté à la police un certificat médical stipulant qu'il lui était déconseillé de porter un masque, il avait été invité à sortir de la zone à forte concentration de personnes, ce qu'il avait refusé de faire. Il avait finalement accepté de porter le masque qu'il avait dans sa poche.

Par la suite, il avait retiré son masque et continué à déambuler au cœur de la manifestation en scandant "Liberté, liberté", avant d'être une nouvelle fois interpellé.

b.a. Dans son courrier d'opposition reçu par le SDC le 22 décembre 2020, A______ a expliqué qu'après avoir montré son certificat médical, lequel le libérait de la "mascarade", les deux gendarmes qui l'avaient interpellé lui avaient donné l'ordre de respecter ses distances avec les autres personnes présentes, ce dont il avait "pris note".

Plus tard, deux gendarmes s'étaient approchés de lui pour lui faire savoir qu'il ne respectait pas les distances. Il leur avait alors fait remarquer qu'ils étaient eux-mêmes en train de violer cette règle en s'approchant de lui pour un nouveau contrôle.

b.b. A l'appui de son opposition, il a produit une copie du certificat médical établi le 7 juillet 2020 par le Dr C______, spécialisé en médecine interne générale, dont il ressort que A______ devait être libéré de l'obligation de porter le masque car il lui était "déconseillé" de le porter pour "des raisons de santé".

c. Après avoir pris connaissance de l'opposition de A______, l'Appointé B______ a maintenu, par courriel du 13 janvier 2021, le contenu de son rapport et tout ce qu'il y avait relaté, précisant que "les faits étaient particulièrement clairs".

d. Lors de l'audience de jugement du 28 juillet 2021, A______ a reconnu qu'il ne portait pas de masque lors de la manifestation du 14 novembre 2020, dès lors qu'il se trouvait au bénéfice d'un certificat médical qui l'en exemptait. Lorsqu'il avait présenté ce certificat aux policiers, ces derniers lui avaient dit que "ce n'était pas leur problème" et qu'il devait respecter les distances, ce qu'il avait fait. Ils ne lui avaient pas demandé de quitter la manifestation et, si tel avait été le cas, il se serait exécuté. Les deux gendarmes étaient revenus vers lui un peu plus tard, en lui reprochant de ne pas respecté les distances, ce qui était faux. Il ne se souvenait pas s'ils lui avaient demandé de porter le masque.

C. a. Par décision présidentielle du 21 mars 2022, la Chambre pénale d'appel et de révision (ci-après : CPAR) a ordonné la procédure écrite (art. 406 al. 1 let. c du Code de procédure pénale [CPP] et 129 al. 4 de la loi sur l'organisation judiciaire [LOJ]) ; un délai a été imparti à l'appelant pour le dépôt de son mémoire d'appel.

b. Selon son mémoire d'appel, le MP persiste dans ses conclusions.

Le TP aurait dû examiner avec attention le certificat médical produit par l'intimé, lequel déconseillait seulement le port du masque, dans la mesure où le médecin "coronasceptique" qui l'avait établi avait fait l'objet d'un retrait de son autorisation de pratiquer par les autorités lucernoises pour avoir délivré plusieurs certificats médicaux sans vérification préalable. En outre, après avoir refusé de sortir de la zone de forte concentration de personnes, le prévenu avait finalement accepté de porter le masque momentanément, démontrant qu'aucune raison médicale ne l'en empêchait, contrairement à ce que laissait entendre le certificat litigieux. Il était par ailleurs évident, compte tenu de ses déclarations, que son attitude relevait d'un choix idéologique plutôt que de raisons de santé, n'alléguant pas souffrir d'un quelconque problème médical, de sorte qu'il s'agissait en réalité d'un certificat de complaisance et que le prévenu devait être condamné. En outre, aucun élément du dossier ne permettait de remettre en cause l'exactitude du rapport de police, par ailleurs confirmé par son auteur, un agent public assermenté, et de s'en écarter. Dans tous les cas, à supposer que le prévenu ait compris qu'il était en droit de rester dans la manifestation en respectant les distances de sécurité, il n'avait pas non plus respecté cette dernière injonction, dès lors qu'il avait continué à déambuler au cœur de ladite manifestation, sans masque, et sans respecter les distances sociales, à la suite de son contrôle. Il devait par conséquent être également reconnu coupable pour ne pas avoir obtempéré au injonctions des policiers.

c. A______ conclut à la confirmation du jugement entrepris.

Bien que le MP soutenait que le certificat médical n'était pas valable, les CFF ainsi que les trois hôpitaux dans lesquels il avait été hospitalisé durant la pandémie avaient reconnu et respecté ledit certificat. Le Dr C______ était un "vrai médecin", contrairement à un grand nombre de ses collègues, ayant eu le mérite de dénoncer ce "crime contre l'humanité". Il revenait à la justice d'apporter la preuve de la nécessité des mesures d'urgence qui avaient été instaurées, puisqu'il avait été démontré que le port du masque ne servait à rien, hormis qu'il symbolisait la "soumission de la population aux dirigeants".

d. Le SDC appuie les conclusions du MP, alors que le TP se réfère intégralement au jugement rendu.

e. Par courrier du 26 avril 2022, auquel elles n'ont pas réagi, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger sous dizaine.

D. A______, ressortissant suisse, est né le ______ 1944. Il est divorcé et père de deux enfants. Il est retraité et n'a pas souhaité donner de renseignements au TP sur sa situation financière.

Selon l'extrait de son casier judiciaire suisse, A______ a été condamné :

-       le 21 juin 2007, par la Cour de cassation pénale de D______, à une peine privative de liberté de 21 mois, pour diffamation, calomnies, contrainte et violation de domicile ;

-       le 4 avril 2011, par la Cour de cassation pénale de D______, à aucune peine additionnelle, pour diffamation ;

-       le 28 novembre 2017, par le Tribunal de police de E______, à une peine pécuniaire de 100 jours-amende à CHF 30.- l'unité, pour calomnie ;

-       le 31 mai 2018, par le Tribunal de police de F______, à une peine pécuniaire de 60 jours-amende à CHF 10.- l'unité, pour délit manqué de contrainte et délit à la loi fédérale conte la concurrence déloyale (LCD) ;

-       le 27 juin 2018, par le MP central (Division criminalité économique), à une peine pécuniaire de 20 jours-amende à CHF 30.- l'unité, pour délit à la LCD ;

-       le 21 novembre 2018, par le MP de l'arrondissement de G______, à une peine privative de liberté de 100 jours, pour calomnie ;

-       le 4 décembre 2018, par le MP de l'arrondissement de D______, à une peine privative de liberté de quatre mois, pour calomnie ;

-       le 9 février 2021, par le Tribunal de H______, à une peine pécuniaire complémentaire de 20 jours-amende à CHF 10.- l'unité, pour diffamation ;

-       le 27 août 2021, par l'Obergericht des Kantons Bern, à une peine pécuniaire de cinq jours-amende à CHF 30.- l'unité, pour tentative de non-respect des mesures prescrites par l'ordonnance 2 COVID-19.

EN DROIT :

1. 1.1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 CPP).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

1.2. Conformément à l'art. 129 al. 4 LOJ, lorsque des contraventions font seules l'objet du prononcé attaqué et que l'appel ne vise pas une déclaration de culpabilité pour un crime ou un délit, la direction de la procédure de la juridiction d'appel est compétente pour statuer.

2. 2.1. En matière contraventionnelle, l'appel ne peut être formé que pour le grief selon lequel le jugement est juridiquement erroné ou l'état de fait a été établi de manière manifestement inexacte ou en violation du droit. Aucune nouvelle allégation ou preuve ne peut être produite (art. 398 al. 4 CPP).

Le pouvoir d'examen de l'autorité d'appel est ainsi limité dans l'appréciation des faits à ce qui a été établi de manière arbitraire (arrêt du Tribunal fédéral 6B_362/2012 du 29 octobre 2012 consid. 5.2). En outre, aucune allégation ou preuve nouvelle ne peut être produite devant l'instance d'appel (art. 398 al. 4, 2e phrase CPP). Il s'agit là d'une exception au principe du plein pouvoir de cognition de l'autorité de deuxième instance qui conduit à qualifier d'appel "restreint" cette voie de droit (arrêt du Tribunal fédéral 1B_768/2012 du 15 janvier 2013 consid. 2.1). En revanche, la partie appelante peut valablement renouveler en appel les réquisitions de preuve formulées devant le premier juge et qui ont été rejetées (arrêt du Tribunal fédéral 6B_202/2015 du 28 octobre 2015 consid. 2.2).

Le libre pouvoir de cognition dont elle dispose en droit confère à l'autorité cantonale la possibilité, si cela s'avère nécessaire pour juger du bien-fondé ou non de l'application d'une disposition légale, d'apprécier des faits que le premier juge a omis d'examiner, lorsque ceux-ci se révèlent être pertinents (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1247/2013 du 13 mars 2014 consid. 1.3).

2.2.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.) et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1 ; 127 I 28 consid. 2a).

Comme règle d'appréciation des preuves, la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3).

Lorsque l'appréciation des preuves et la constatation des faits sont critiquées en référence à la présomption d'innocence, le principe in dubio pro reo n'a pas de portée plus large que l'interdiction de l'arbitraire (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3 ; 143 IV 500 consid. 1.1).

2.2.2. Le principe de l'appréciation libre des preuves interdit d'attribuer d'entrée de cause une force probante accrue à certains moyens de preuve, comme des rapports de police. On ne saurait toutefois dénier d'emblée toute force probante à un tel document. Celui-ci est en effet, par sa nature, destiné et propre à servir de moyen de preuve, dans la mesure où le policier y reproduit des faits qu'il a constatés et où il est fréquent que l'on se fonde, dans les procédures judiciaires, sur les constatations ainsi transcrites (arrêt du Tribunal fédéral 6B_55/2018 du 17 mai 2018 consid. 1.1).

2.3.1. Selon l'art. 6 LEp, il y a situation particulière lorsque les organes d'exécution ordinaires ne sont pas en mesure de prévenir et de combattre l'apparition et la propagation d'une maladie transmissible et qu'il existe un risque élevé d'infection et de propagation, un risque spécifique pour la santé publique ou un risque de graves répercussions sur l'économie ou sur d'autres secteurs vitaux ou lorsque l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a constaté la présence d'une urgence sanitaire de portée internationale menaçant la santé de la population en Suisse (al. 1 let. a et b). Le Conseil fédéral peut, après avoir consulté les cantons ordonner des mesures visant des individus et ordonner des mesures visant la population (al. 2 let. a et b).

Si une situation extraordinaire l'exige, le Conseil fédéral peut ordonner les mesures nécessaires pour tout ou partie du pays (art. 7 LEp).

Les autorités cantonales compétentes ordonnent les mesures nécessaires pour empêcher la propagation de maladies transmissibles au sein de la population ou dans certains groupes de personnes. Elles coordonnent leur action (art. 40 al. 1 LEp).

L'art. 83 al. 1 let. j LEp prévoit que quiconque, intentionnellement, contrevient à des mesures visant la population (art. 40) sera puni de l'amende.

2.3.2. Selon l'art. 3 OCOVID-19, dans sa teneur au moment des faits, chaque personne respecte les recommandations de l'Office fédéral de la santé publique (OFSP) en matière d'hygiène et de conduite face à l'épidémie de COVID-19.

Toute personne se trouvant dans les espaces clos et extérieurs accessibles au public des installations et des établissements, y compris les marchés, ainsi que dans les zones d'attente des gares, des arrêts de bus et de tram, dans les gares, les aéroports ou d'autres zones d'accès aux transports publics doit porter un masque facial (art. 3b al. 1 OCOVID-19). Néanmoins, les personnes pouvant attester qu'elles ne peuvent pas porter de masque facial pour des raisons particulières, notamment médicales sont exemptées de cette obligation (art. 3b al. 2 let. b OCOVID-19).

2.3.3. Selon l'art. 5 de l'arrêté d'application de l'ordonnance fédérale sur les mesures destinées à lutter contre l'épidémie de COVID-19 en situation particulière du 19 juin 2020 et sur les mesures de protection de la population du 1er novembre 2020 (ACE011120), dans sa teneur au moment des faits, on entend par masques les masques d'hygiène ou les masques en tissu à l'exclusion des protections faites "maison". Les visières, les masques avec valve, les écharpes et les autres vêtements ne sont pas considérés comme des masques (al. 1). Sont exemptés de l'obligation de porter un masque les personnes qui ne peuvent pas porter de masque pour des raisons particulières, notamment médicales, en lien avec une situation de handicap, ou pour communiquer avec une personne sourde ou malentendante (al. 2 let. b).

Toute personne est tenue de porter un masque dans les zones animées des centres urbains ou des villages dans lesquelles des piétons circulent et les autres domaines de l'espace public, dès que la concentration de personnes présentes ne permet pas de respecter la distance requise (art. 7 let. a et b ACE11120).

La violation des prescriptions édictées dans le présent arrêté est sanctionnée conformément à la LEp (art. 19 ACE011120).

2.4. Au sens de l'art. 11F LPG, celui qui n'aura pas obtempéré à une injonction d'un membre de la police ou d'un agent de la police municipale agissant dans le cadre de ses attributions sera puni de l'amende.

2.5. En l'espèce, le MP fait, ce qui ne saurait être admis en matière contraventionnelle (art. 398 al. 4 CPP), état de nouvelles allégations relatives au Dr C______ qui ne permettent de remettre en question ni le contenu ni la validité du certificat médical, dont il ne paraît pas qu'il ait été établi de manière irrégulière.

Ainsi, le TP a établi sans arbitraire qu'en présentant le certificat litigieux aux gendarmes, le prévenu avait valablement attesté du fait qui lui avait été déconseillé par un membre du corps médical de porter le masque pour des raisons de santé, de sorte qu'il n'était pas tenu à cette obligation au sens des art. 3b al. 2 let. b OCOVID-19 et 5 al. 2 let. b ACE011120, libre à lui d'agir autrement.

Compte tenu de ce qui précède, l'acquittement de l'intimé pour ne pas avoir respecté l'obligation de porter le masque de protection (art. 6 et ss LEp et 3a et ss OCOVID-19) sera confirmé et l'appel rejeté sur ce point.

2.6. S'agissant du refus d'obtempérer à une injonction d'un membre de la police ou d'un agent de police municipale, le TP a retenu que le prévenu avait compris, à la suite de sa première interpellation, qu'il pouvait rester au sein de la manifestation s'il respectait les distances sociales.

Or, selon le rapport de police du 25 novembre 2020, confirmé par écrit par son auteur au SDC, l'injonction de quitter la manifestation avait bien été adressée à l'intimé, les faits étant "particulièrement clairs". Ce rapport n'a certes pas été confirmé oralement par l'agent de police. Cela ne lui ôte toutefois pas la valeur probante inhérente à un tel document, dès lors qu'il ne se heurte à aucun autre élément du dossier et est même en partie reconnu par l'appelant, qui n'exclut pas que les policiers lui aient demandé de mettre son masque. Dans tous les cas, aucun élément au dossier ne permet de penser que le gendarme chercherait à nuire gratuitement à l'intéressé, étant rappelé qu'il l'a dans un premier temps laissé repartir dans la manifestation, puisqu'il avait mis son masque de protection, qu'il a par la suite retiré, ce qui semble d'ailleurs hautement plus vraisemblable que de laisser repartir une personne non masquée au beau milieu d'une horde d'individus en lui demandant simplement de respecter les distances sociales.

Le premier juge a ainsi versé dans l'arbitraire en ne retenant pas que le prévenu avait refusé de se plier aux injonctions des policiers, contrairement audit rapport.

Le prévenu sera partant reconnu coupable de refus d'obtempérer à une injonction d'un membre de la police ou d'un agent de police municipale en application de l'art. 11F LPG.

L'appel sera admis sur ce point et le jugement entrepris modifié en ce sens.

3. 3.1. À teneur de l'art. 106 du code pénal suisse (CP), sauf disposition contraire de la loi, le montant maximum de l'amende est de CHF 10'000.- (al. 1).

Celle-ci, de même que la peine privative de liberté de substitution, doit être fixée en tenant compte de la situation de l'auteur afin que la peine corresponde à la faute commise (al. 3). À l'instar de toute autre peine, l'amende doit donc être fixée conformément à l'art. 47 CP (arrêts du Tribunal fédéral 6B_337/2015 du 5 juin 2015 consid. 4.1 ; 6B_988/2010 du 3 mars 2011 consid. 2.1 et 6B_264/2007 du 19 septembre 2007 consid. 4.5). Le juge doit ensuite, en fonction de la situation financière de l'auteur, fixer la quotité de l'amende de manière qu'il soit frappé dans la mesure adéquate (ATF 129 IV 6 consid. 6.1 = JdT 2005 IV p. 215 ; 119 IV 330 consid. 3 p. 337). La situation économique déterminante est celle de l'auteur au moment où l'amende est prononcée (arrêt du Tribunal fédéral 6B_547/2012 du 26 mars 2013 consid. 3.4).

Un jour de peine privative de liberté de substitution (art. 106 al. 2 CP) correspond schématiquement à CHF 100.- d'amende (R. ROTH / L. MOREILLON [éds], Code pénal I : art. 1-100 CP, Bâle 2009, n. 19 ad art. 106).

3.2. En l'espèce, la faute de l'intimé n'est pas anodine, dès lors qu'elle dénote un certain mépris des lois et de leur respect.

Il n'a par ailleurs fait preuve d'aucune prise de conscience, contestant tout au long de la procédure avoir adopté un comportement fautif et n'ayant de cesse de rejeter la responsabilité sur les agents de police.

Au vu de ces différents éléments, mais aussi de ses nombreux antécédents, l'amende sera arrêtée à CHF 300.- et assortie d'une peine privative de liberté de substitution de trois jours, étant relevé que si le prévenu a refusé de renseigner le TP sur sa situation financière, il n'a pas critiqué le montant de l'amende de CHF 700.- retenu par le SDC dans l'ordonnance pénale du 11 décembre 2020.

L'appel sera partant partiellement admis et le jugement entrepris sera réformé en ce sens.

4. 4.1. Le prévenu supporte les frais de procédure de première instance s'il est condamné (art. 426 al. 1 CPP).

4.2.1. Les frais de la procédure de recours sont mis à la charge des parties dans la mesure où elles ont obtenu gain de cause ou succombé (art. 428 al. 1 CPP).

Pour déterminer si une partie succombe ou obtient gain de cause, il faut examiner dans quelle mesure ses conclusions sont admises en deuxième instance (arrêts du Tribunal fédéral 6B_472/2018 du 22 août 2018 consid. 1.2 ; 6B_620/2016 du 17 mai 2017 consid. 2.1.2). Lorsqu'une partie obtient gain de cause sur un point, succombe sur un autre, le montant des frais à mettre à sa charge dépend de manière déterminante du travail nécessaire à trancher chaque point (arrêts du Tribunal fédéral 6B_636/2017 du 1er septembre 2017 consid. 4.1 ; 6B_634/2016 du 30 août 2016 consid. 3.2). Dans ce cadre, la répartition des frais relève de l'appréciation du juge du fond (arrêt du Tribunal fédéral 6B_620/2016 du 17 mai 2017 consid. 2.1.2).

4.2.2. Si l'autorité de recours rend elle-même une nouvelle décision, elle se prononce également sur les frais fixés par l'autorité inférieure (art. 428 al. 3 CPP).

4.3. En l'espèce, le prévenu sera condamné à supporter la moitié des frais de la procédure préliminaire et de première instance, compte tenu du verdict de culpabilité, le solde étant laissé à la charge de l'Etat.

Le jugement entrepris sera réformé sur ce point.

4.4. En appel, le MP n'obtenant que partiellement gain de cause, la moitié des frais de la procédure d'appel sera laissé à la charge de l'Etat.

L'intimé, qui succombe, supportera l'autre moitié des frais d'appel, comprenant un émolument de CHF 600.- (art. 428 al. 1 CPP).

*****

PAR CES MOTIFS,
L
E PRÉSIDENT
DE LA CHAMBRE PÉNALE D'APPEL ET DE RÉVISION :

 

Reçoit l'appel formé par le Ministère public contre le jugement JTDP987/2021 rendu le 28 juillet 2021 par le Tribunal de police dans la procédure P/2827/2021.

L'admet partiellement.

Annule ce jugement.

Et statuant à nouveau :

Acquitte A______ de ne pas avoir respecté l'obligation de porter le masque de protection (art. 6 et ss de la loi fédérale sur la lutte contre les maladies transmissibles de l'homme et 3a et ss de l'ordonnance sur les mesures destinées à lutter contre l'épidémie de COVID-19 en situation particulière du 19 juin 2020).

Déclare A______ coupable de refus d'obtempérer à une injonction d'un membre de la police ou d'un agent de police municipale (art. 11F de la loi modifiant la loi pénale genevoise).

Condamne A______ à une amende de CHF 300.- (art. 106 CP).

Prononce une peine privative de liberté de substitution de trois jours.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.

Condamne A______ à la moitié des frais de la procédure préliminaire et de première instance, qui s'élèvent à CHF 451.-, y compris un émolument de jugement de CHF 200.- (art. 426 al. 1 CPP), et laisse le solde de ces frais à la charge de l'Etat.

Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 795.-, comprenant un émolument de jugement de CHF 600.-.

Met la moitié de ces frais, soit CHF 397.50, à la charge de A______ et laisse le solde de ces frais à la charge de l'Etat.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police.

 

 

Le greffier :

Alexandre DA COSTA

 

Le président :

Pierre BUNGENER

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.

 

 

 

 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

451.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

120.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

600.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

795.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

1'246.00