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Décisions | Tribunal pénal

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P/1211/2018

JTCO/48/2023 du 26.04.2023 ( PENAL ) , JUGE

Normes : CP.157; LEI.117; LEI.117; CP.139
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

pouvoir judiciaire

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL CORRECTIONNEL

Chambre 20

26 avril 2023

 

MINISTÈRE PUBLIC

X______, partie plaignante, assistée de Me A______

B______, partie plaignante, assistée de Me C______

Y______, partie plaignante, assistée de D______

contre

Y______, née le ______1970, domiciliée ______, prévenue, assistée de Me D______

X______, née le ______1955, sans domicile connu, prévenue, assistée de Me A______


CONCLUSIONS FINALES DES PARTIES :

Le Ministère public s'en rapporte à justice s'agissant de la culpabilité de X______. Il conclut à un verdict de culpabilité de Y______ de tous les chefs d'infraction figurant dans l'acte d'accusation avec la qualification juridique qui leur est donnée, à la condamnation de Y______ à une peine privative de liberté de 3 ans ainsi qu'à une peine pécuniaire de 150 jours-amende à CHF 50.-. Il conclut à ce que le téléphone iPhone noir figurant à l'inventaire manuscrit au nom de X______ soit restitué à sa détentrice, à ce qu'il soit fait bon accueil aux conclusions civiles des parties plaignantes et à ce que Y______ soit condamnée à l'entier des frais de la procédure.

B______, par la voix de son Conseil, conclut à un verdict de culpabilité de Y______ du chef d'usure, persiste dans ses conclusions civiles, subsidiairement, conclut à ce qu'elle soit renvoyée à agir par la voie civile.

X______ par la voix de son Conseil, conclut à ce que Y______ soit reconnue coupable d'usure et persiste dans ses conclusions civiles. Elle conclut à son acquittement des faits qui lui sont reprochés, subsidiairement, à son exemption de toute peine. Enfin, elle conclut à la restitution de son téléphone portable.

Y______, par la voix de son Conseil, conclut à un verdict de culpabilité de X______ du chef de vol. Elle s'en rapporte à justice s'agissant des faits qui lui sont reprochés aux points 1.1.2 et 1.1.3 de l'acte d'accusation et conclut à son acquittement pour le surplus. En cas de condamnation à une peine privative de liberté, elle conclut à ce que celle-ci n'excède pas 7 mois et soit assortie du sursis complet. Elle conclut au rejet des conclusions civiles des parties plaignantes et à ce qu'elle soit condamnée à 1/10 des frais de la procédure. Elle conclut à ce que les objets et valeurs lui appartenant lui soient restitués, subsidiairement, à ce que le séquestre soit maintenu en allocation des frais de la procédure.

EN FAIT

Dans la mesure où seule X______ a annoncé appel, le présent jugement n’est motivé, outre ce qui concerne les faits de vol, uniquement dans la mesure où il concerne le comportement punissable à l’origine du préjudice subi par celle-ci, ainsi que ses prétentions civiles (art. 82 al. 3 CPP).

A.a. Par acte d'accusation du 13 décembre 2022, il est reproché à Y______ d'avoir employé X______, depuis le mois de juin 2001, en qualité de nounou, respectivement de femme de ménage et de cuisinière, alors que celle-ci ne disposait d'aucune autorisation de séjour ni de travail en Suisse, et en exigeant d'elle une activité continue, de jour comme de nuit, sans pause ni jour de congé ou de vacances, tout en la rémunérant de façon "lapidaire", à savoir par :

- un salaire de CHF 1'500.- par mois du début de son engagement jusqu'au déménagement à la rue E______ en juin 2007 ;

- un salaire de CHF 1'300.- par mois de juin 2007 à août 2017 ;

- un salaire de CHF 1'000.- par mois à partir d'août 2017.

Il lui est reproché d'avoir agi alors qu'elle était parfaitement consciente de la précarité de la situation de son employée, soit du fait que celle-ci ne disposait pas d'autorisation de séjour et de travail, qu'elle ne disposait pas d'autre ressource que celle de son salaire et qu'elle était la principale pourvoyeuse de revenus de ses cinq enfants en Equateur et de l'avoir ainsi maintenue dans une dépendance psychologique, économique et financière en ne lui versant qu'un salaire plusieurs fois inférieur aux salaires mensuels prévus par le contrat-type de l'économie domestique, de s'être ainsi organisée, tant sur le plan de sa vie privée que dans sa vie professionnelle, en recourant à de la main d'œuvre payée avec un lance-pierre, afin de maximiser ses revenus, tout en bénéficiant d'une liberté totale pour s'organiser et générer ses revenus, faits qualifiés d'usure par métier au sens de l'art. 157 al. 1 et 2 du code pénal suisse du 21 décembre 1937 (RS 311.00; CP).

b. Il est également reproché à Y______ d'avoir, dans les circonstances décrites ci-dessus, employé X______ de juin 2001 à janvier 2018, alors qu'elle savait que son employée était dépourvue de tout titre de séjour et d'autorisation de travail, faits qualifiés d'infraction à l'art. 117 al. 1 phr. 2 (cas grave) de la loi sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (RS 142.20 ; LEI).

c. Il est enfin reproché à Y______ de ne pas avoir perçu la moindre cotisation sur le salaire, certes insuffisant, qu'elle versait à X______, faits qualifiés d'infraction à l'art. 87 de la loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants du 20 décembre 1946 (RS 831.10 ; LAVS).

d. Par le même acte d'accusation, il est reproché à X______ de s'être, à une date indéterminée avant le 13 septembre 2017, appropriée sans droit, dans un dessein d'enrichissement illégitime, au domicile de Y______, un collier de marque CHOPARD (avec pendentif en or 18k) appartenant à celle-ci, et de l'avoir revendu pour s'enrichir de sa valeur le 13 septembre 2017 au prix de CHF 800.- dans le magasin F______ de la rue de Carouge, faits qualifiés de vol au sens de l'art. 139 CP.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

De l'emploi de X______ au service de Y______

a.a. Le 18 janvier 2018, X______ a déposé plainte pénale auprès de la police judiciaire.

Elle était arrivée d'Equateur à Genève en mai 2001 et avait, dès le mois de juin 2001, répondu à une annonce qu'avait fait paraître Y______ pour un travail de garde d'enfants. Elle avait téléphoné à l'annonceuse et avait convenu avec elle d'une rémunération de CHF 1'500.- par mois, heures supplémentaires en plus, sans discuter le tarif de ces dernières. La semaine de travail devait s'étaler du lundi au vendredi, de 7h00 à 20h00, soit un total de 13 heures quotidiennes.

Elle avait pris son emploi dès le lendemain de cet appel, et du mois de juillet 2001 au mois de janvier 2018, elle avait travaillé sept jours sur sept. Son travail consistait à "tout faire", c’est-à-dire qu'elle avait pour tâches de s'occuper des enfants, de les amener au parc, de faire le ménage, les repas, le service de table, "etc.". Elle était une domestique et à ce titre dépassait régulièrement les heures prévues, notamment en se chargeant du nettoyage jusque tard dans la nuit après le départ d'invités. Elle n'avait jamais noté ses horaires mais elle percevait la somme de CHF 200.- par mois pour ses heures supplémentaires. Elle n'était pas assurée et ses charges sociales n'étaient pas versées. Elle avait été payée en liquide et aucun document écrit n'avait été établi pour attester de son travail.

Un mois après avoir pris son emploi, soit en juillet 2001, elle avait emménagé chez Y______, à la rue G______, sur proposition de cette dernière, laquelle lui avait expliqué qu'elle avait besoin de quelqu'un pour s'occuper de ses enfants, étant donné qu'elle travaillait dans un restaurant de 14h00 à 02h00 du matin. X______ a expliqué qu'à partir de ce moment-là, elle avait commencé à travailler 24h/24h car elle devait s'occuper des enfants durant la nuit lorsque ceux-ci pleuraient. Le matin, elle devait sortir avec les enfants afin que Y______ puisse dormir.

Elle avait déménagé avec la famille de Y______ à ______ autour de 2011 ("il y a 7 ans environ"). A partir de cette date, il lui semblait qu'elle avait été payée CHF 1'300.- par mois. Son salaire avait de nouveau baissé en août 2017, passant à CHF 1'000.- par mois, "car les enfants étaient capables de s'habiller seuls". Dans sa plainte, X______ a déclaré qu'elle n'était plus payée depuis deux mois, soit depuis novembre 2017.

Durant toutes ces années, son travail avait été régulier et une journée "type" pouvait se détailler de la façon suivante : réveil et début du ménage à 07h00, préparation du café et du petit déjeuner de Y______ à 11h00, avant de partir faire les courses, préparation du repas des enfants à 12h00, puis ménage, repassage et autres tâches l'après-midi. La journée de travail prenait fin entre 21h00 et 23h00, après qu'elle avait fait la cuisine.

Outre ces tâches habituelles, il lui était arrivé de s'occuper d'un neveu de Y______, lequel était en situation de handicap, ainsi que d'autres enfants qui étaient ceux des employés du bar de sa patronne, le H______. Enfin, elle avait été chargée de faire des achats pour le H______, ainsi que le ménage de cet établissement à raison d'une à deux fois par semaine.

Elle n'avait jamais été enfermée dans l'appartement, mais elle devait y rester tout le temps car les enfants étaient présents pour la surveiller. Elle n'était jamais seule à la maison et Y______ l'appelait régulièrement pour contrôler sa présence. Durant toutes ces années, elle avait demandé à plusieurs reprises à partir mais Y______ l'avait toujours suppliée de rester. Elle n'avait à Genève ni point de repère, ni famille, ni amis.

X______ a déclaré qu'elle avait toujours mangé à sa faim, en dehors des quatre derniers mois, lors desquels elle n'avait mangé qu'une fois par jour car les courses avaient été insuffisantes. S'agissant de son installation dans l'appartement, elle avait dormi sur un matelas, dans la chambre de I______, le fils de Y______, et avec celui-ci, lequel était âgé de 18 ans et l'insultait régulièrement. Il lui était arrivé de dormir à même le sol lorsque Y______ recevait les enfants de sa nièce.

X______ a déclaré qu'elle n'avait jamais eu de vacances et qu'elle considérait avoir été exploitée.

a.b. Lors de l'audience de confrontation du Ministère public du 2 février 2018, X______ a confirmé sa plainte pénale.

Le salaire convenu à l'engagement était de CHF 1'700.- pour un emploi du lundi au dimanche. Le mari de son amie, qui lui avait permis de répondre à l'annonce, lui avait dit que ce salaire était "bien" et qu'il fallait l'accepter, ce qu'elle avait fait. Son salaire avait baissé à CHF 1'500.- au moment du déménagement dans l'appartement de la rue E______, puis à CHF 1'300.- deux ou trois ans plus tard. Depuis une année, son salaire était de CHF 1'000.-. Elle gardait un peu de cet argent pour elle, (parfois jusqu'à CHF 400.- par mois), et envoyait le reste à ses enfants. Elle avait reçu CHF 100.- à Noël, en 2017. Contrairement à ce que Y______ avait pu affirmer, son employeuse ne lui avait offert le coiffeur qu'à une seule reprise. Par ailleurs, un jour où elle avait mal au dos, cette dernière lui avait offert un massage et un soin du visage. Elle n'avait jamais eu de jour de congé ni de vacances et, lorsque Y______ était en vacances avec ses enfants, elle restait seule à l'appartement.

Elle avait toujours partagé la chambre de I______ qui, lorsqu'il était petit, pleurait toutes les nuits. Elle dormait sur un matelas qui se trouvait dans le tiroir du lit de ce dernier qui n'était pas un lit car il n'y avait pas de sommier, que "cela se cassait régulièrement", que "les parties en bois tombaient". Cela avait été le cas dans les deux appartements, y compris à la rue G______ car les lattes s'étaient cassées.

Les tâches qui lui incombaient avaient évolué au fil du temps, avec l'âge des enfants. Lorsqu'elle n'avait plus eu à s'occuper d'eux, d'autres tâches étaient venues remplacer ce travail. S'agissant de la garde des enfants lorsqu'ils étaient petits, il était exact que Y______ ne travaillait pas le weekend mais il s'agissait d'un moment de la semaine que celle-ci consacrait surtout à se reposer. Elle faisait le ménage tous les jours, faisait les lessives et le repassage, et rangeait les vêtements, en dehors de ceux de marque appartenant à Y______. Elle apportait les vêtements de cette dernière au pressing. Lorsqu'elle avait été invitée en vacances à Ascona et qu'elle avait logé avec Y______, son compagnon et I______ dans un hôtel 5 étoiles, cela avait été pour s'occuper de ce dernier qui était âgé de 3 ans.

X______ a déclaré qu'il était exact que I______ avait fait des allers-retours en foyer d'urgence et que, à partir de 18 ans, il n'avait plus été à la maison, mais cela n'avait pas changé le volume de son travail. Elle devait s'occuper des courses pour la maison, de celles pour le bar (seulement lorsque la personne employée pour le nettoyage du bar était empêchée), et de la poste notamment. Il pouvait lui arriver d'être envoyée faire les courses quatre fois durant la même journée. Elle ne pouvait faire le ménage que lorsque Y______ était partie au travail car cette dernière n'aimait pas le bruit.

Elle n'était jamais rentrée en Equateur depuis son arrivée en Suisse en 2001.

b.a. Y______ a été entendue par la police le 19 janvier 2018 puis par le Ministère public, notamment les 20 et 24 janvier 2018.

Elle était propriétaire du fonds de commerce d'un bar qu'elle gérait et dans lequel elle travaillait de 17h00 à 02h00 du matin, du lundi au vendredi.

Elle avait engagé X______ 13 ou 14 ans auparavant environ, soit à l'époque où le logement familial se situait à la rue G______, pour que celle-ci s'occupe de ses enfants. X______ était payée, logée et nourrie.

Y______ a déclaré qu'elle considérait qu'il était normal que X______ se lève au milieu de la nuit lorsque ses enfants pleuraient puisqu'elle-même était au travail et donc absente. Le salaire de X______, qui n'avait pas changé depuis 14 ans, "pouvait s'élever" à CHF 2'000.- par mois, hors cadeaux que sa famille lui faisait lorsque celle-ci venait en visite. Elle n'avait pas de récépissé de la remise du salaire mais elle retirait toujours, dans un distributeur de billets, l'argent qu'elle versait à son employée. Ni les assurances ni les charges sociales de X______ n'avaient été payées. Elle savait que son employée n'avait ni autorisation de séjour ni autorisation de travail en Suisse.

Selon Y______, la journée "type" de travail de son employée se détaillait de la manière suivante : parfois, X______ préparait le petit-déjeuner avant d'emmener les enfants à l'école, puis elle restait à la maison à regarder la télévision et à effectuer des tâches ménagères. Son employée ne s'occupait que des habits des enfants, elle-même s'occupant des siens car celle-ci ne savait pas programmer la machine à laver correctement. S'agissant de la préparation des repas, Y______ a déclaré que parfois c'était elle qui s'en chargeait et parfois X______. Cette dernière ne s'occupait ni d'autres enfants ni du ménage du H______.

X______ ne partait pas en vacances car elle n'avait pas de famille en Suisse mais elle "allait gambader" durant le weekend avec ses copines. Lorsqu'elle partait en Algérie, X______ n'avait pas de travail à faire, et par conséquent celle-ci bénéficiait de deux à trois semaines de vacances par année lors desquelles elle restait seule dans le logement.

Y______ a d'abord déclaré que, désormais que les enfants étaient grands, X______ "ne fout[ait] plus rien", avant de préciser qu'elle entendait par là que X______ lisait, regardait la télévision et sortait se promener, quand bien même elle s'occupait encore du ménage du logement.

Son employée ne disposait pas de sa propre chambre mais logeait dans celle de son fils I______, dans laquelle se trouvaient deux lits avec sommiers, dont l'un, "lit-tiroir" se rangeait en-dessous de l'autre. L'installation avait été la même à la rue G______ et à la rue E______. Il avait été prévu que X______ dorme sur le lit du haut mais elle n'avait pas été là pour le vérifier. Il était faux de dire que, lorsque des neveux étaient à la maison, X______ se retrouvait à dormir sur le sol, car ce n'était pas les coussins qui manquaient. S'agissant des repas, X______ mangeait la même chose que la famille et il n'était pas vrai que cette dernière n'avait pas mangé à sa faim lors des 4 derniers mois.

b.b. Le 20 janvier 2018, devant le Ministère public, Y______ a déclaré qu'elle rémunérait X______ la somme de CHF 2'000.-, payée en espèces, et que ce montant n'avait jamais diminué.

Elle a maintenu qu'elle n'avait pas déclaré son employée aux assurances sociales, que celle-ci ne s'était jamais occupée d'autres enfants que des siens et qu'elle n'avait jamais été chargée de faire le ménage de son bar. Elle a contesté, contrairement à ce que son fils avait affirmé, que sa sœur lui rendait visite à Genève deux semaines par année.

Confrontée aux déclarations de I______, et après avoir contesté que son employée eût travaillé jusqu'à 23h00, Y______ a finalement déclaré ne pas savoir si X______ travaillait jusqu'à 21h00 passée puisqu'elle-même quittait l'appartement à 14h00 pour se rendre à son travail.

Elle a confirmé que X______ dormait dans un lit gigogne dans la chambre de son fils I______. Il lui semblait que celui qu'elle avait acheté chez Conforama comprenait deux sommiers. Cela dit, elle avait constaté qu'aucun sommier n'était visible sur les photos du lit prises par la police.

c.a.a. I______ a été entendu par la police le 19 janvier 2018 puis par le Ministère public, notamment les 20 et 25 janvier et 2 février 2018.

Il était né en 1998 et connaissait X______, qu'il désignait comme étant sa tante, depuis l'âge de 3 ans. Celle-ci s'était occupée de lui ainsi que de sa sœur J______, laquelle était née en 1994, lorsqu'ils étaient petits. Par la suite, X______ s'était concentrée sur les tâches ménagères. Cette dernière dormait avec lui, dans sa chambre.

Selon I______, X______ ne gagnait "pas énormément" et envoyait son salaire à sa famille. Il lui arrivait parfois de lui demander de l'argent pour sortir, environ CHF 50.- par mois, car X______ était très généreuse et que, d'autre part, il entretenait une relation conflictuelle avec sa mère qui ne lui donnait jamais d'argent de poche. Il avait eu une enfance difficile et avait été placé en foyers à plusieurs reprises.

I______ a déclaré que X______ était sa confidente, qu'il croisait "vite fait" sa mère en semaine étant donné qu'elle travaillait tard et dormait durant la matinée, mais qu'il la voyait un peu plus le weekend. Il a admis avoir insulté X______ à plusieurs reprises.

Il a déclaré que, durant toutes ces années, X______ avait dormi dans un vrai lit. A la rue G______, elle avait dormi dans un lit qui se rangeait sous le sien. A la rue E______, elle avait, dans un premier temps, dormi dans un lit sous la mezzanine avant de dormir sur le matelas dont une photo figurait à la procédure et qui était rangé sous son lit durant la journée.

Lorsqu'il était petit, X______ se levait à 07h00 du matin "pour tout préparer" puis l'emmenait à l'école. Cette dernière le couchait vers 21h00, terminait le ménage puis allait se coucher. Il arrivait que sa mère rentre alcoolisée et prenne des somnifères, ce qui amenait X______ à s'occuper de sa sœur et de lui durant toute la journée. L'intéressée s'occupait également d'autres enfants car Y______ le lui imposait. Celle-ci devait ainsi notamment s'occuper du neveu autiste de sa mère lorsque, deux semaines par année, celui-ci logeait avec sa tante dans l'appartement. A ces occasions, elle ne dormait pas à même le sol mais elle partageait son matelas avec les enfants. Durant le weekend, X______ s'occupait des tâches ménagères et faisait de petites balades. Il était arrivé, à de rares occasions, que Y______ demande à X______ de faire le ménage du H______.

X______ était d'ordinaire toujours présente pour leur ouvrir la porte et il avait compris que quelque chose n'était pas normal lorsque, le 18 janvier 2018, il était rentré chez lui et ne l'y avait pas trouvée. Comme ni sa sœur ni lui n'avaient les clés de l'appartement, il leur avait fallu aller les récupérer sur le lieu de travail de leur mère.

X______ n'avait pas été assurée contre la maladie. Au début, lorsqu'elle tombait malade, Y______ la laissait se reposer, mais avec le temps elle s'en "foutait de plus en plus" et exigeait de X______ qu'elle continue à travailler.

Au cours de sa première audition, I______ a déclaré qu'il n'avait pas envie que sa mère sache la vérité car il était son fils et qu'à ce titre il était censé la défendre.

c.a.b. Le 20 janvier 2018, devant le Ministère public, I______ a déclaré que X______ était rémunérée "au-dessus de CHF 1000.- mais pas beaucoup", ce qu'il avait déduit du fait que celle-ci lui avait dit qu'elle envoyait USD 900.- à ses enfants et gardait CHF 100.- à CHF 200.- pour elle-même. Il s'était souvent demandé comment X______ faisait pour rester. Il était très attaché à elle, confirmait s'être déjà emporté à son égard, et s'en excusait.

c.a.c. Le 25 janvier 2018, devant le Ministère public, I______ a confirmé ses précédentes déclarations. Il a déclaré, s'agissant des périodes où il était absent de l'appartement familial, qu'il avait été placé en foyer de ses 12 ans à ses 15 ans, qu'il avait fait des allers-retours en foyers d'urgence de ses 15 ans à ses 18 ans et qu'à partir de ses 18 ans il avait fait des allers-retours entre les amis chez lesquels il habitait et "chez lui". Durant ses séjours en foyer, il rentrait systématiquement chez lui pendant les weekends et les vacances scolaires.

c.a.d. Le 2 février 2018, devant le Ministère public, I______ a déclaré que X______ ne faisait pas le ménage de l'appartement tous les jours, que le weekend elle ne faisait à manger à quelqu'un que si cela lui était demandé, et qu'autrement elle passait son temps sur son lit au téléphone.

c.b.a. Le 24 janvier 2018, J______ a été entendue par le Ministère public.

Elle a déclaré que X______ était sa nounou depuis ses 7 ans, soit depuis 2001. Cette dernière était sa confidente et vivait dans l'appartement de sa mère. Sa nounou s'était toujours occupée des enfants, du ménage, des repas et des trajets à l'école. Celle-ci se levait de bonne heure, faisait le ménage et lisait ou téléphonait. X______ pouvait sortir faire les courses et s'occupait de la lessive. Elles regardaient la télévision ensemble en fin de journée et mangeaient parfois ensemble le soir. Le weekend, X______ faisait à manger avec sa mère et elle ne faisait pas le ménage. Sa mère avait confiance en sa nounou puisqu'elle et son frère lui avaient "quand même" été "donnés". X______ restait à la maison les soirs de semaine et sortait de temps en temps le weekend, avec la famille de Y______. Elle avait pu donner "un coup de main" pour le nettoyage du H______ au maximum à 5 reprises depuis son arrivée dans la famille.

Selon J______, il était rare que d'autres enfants soient présents dans leur appartement.

Interrogée sur les jours de congés de X______, J______ a dans un premier temps déclaré que la question la laissait perplexe car sa nounou vivait comme une personne de sa famille et faisait ce qu'elle voulait, quand elle voulait. Puis, à la question de savoir s'il existait un moment où son frère et elle n'attendaient pas l'intéressée, elle a répondu qu'ils l'attendaient toujours. Il ne fallait cependant pas imaginer que sa nounou passait son temps à travailler puisqu'il existait des moments où personne n'était à la maison, et que X______ y était aussi chez elle. Cette dernière n'"[avait] pas été enchaînée" et était "un être comme vous et moi".

S'agissant de la rémunération, J______ a déclaré que X______ recevait dans un premier temps CHF 3'000.-, que ce montant avait été diminué à CHF 2'500.- "dernièrement", et de nouveau, "depuis quelques temps", à "un peu moins". X______ était désormais rémunérée à hauteur de CHF 1'000.- seulement – sans savoir depuis quand exactement – car sa mère avait des difficultés financières.

Elle ne comprenait pas pourquoi, sur les photos prises par la police, seul un matelas était apparent alors que le lit était d'habitude dans un tiroir, avec un sommier. Par ailleurs, vu les passages réguliers de son frère J______ en foyer, la chambre de celui-ci était dernièrement "plus devenue" celle de X______.

A une occasion, X______ était partie en vacances à Ascona avec Y______ et J______, dans un bel hôtel. En revanche, sa nounou ne les avait jamais accompagnés en Algérie. X______ avait reçu des cadeaux de la part de ses tantes car tout le monde aimait sa nounou et qu'"à l'époque" beaucoup de monde venait chez eux pour les fêtes. L'une de ses tantes avait par ailleurs rémunéré X______ pour avoir gardé son fils autiste.

c.b.b. Entendue à nouveau par le Ministère public le 2 février 2018, J______ a déclaré que les fêtes de Noël 2017 avaient été assez tristes car elles n'avaient réuni qu'elle-même, sa mère et X______. Y______ avait fait toutes les courses et les avait servies "comme des princesses". Il était faux de prétendre que X______ était rarement seule à la maison puisqu'elle-même passait son temps à l'école, que son frère n'était pas à la maison, et que sa mère partait au travail au plus tard à 14h00. Lorsqu'elle rentrait de l'école, vers 18h00 ou 19h00, elle trouvait sa nounou allongée sur le lit de son frère en train de parler et de rigoler au téléphone avec des membres de la famille de celle-ci.

c.c. Entre le 26 janvier et le 5 février 2018, sur délégation du Ministère public, cinq témoins ont été entendus par la police dans le cadre d'une enquête de voisinage.

c.c.a. K______ a déclaré qu'elle logeait dans l'appartement situé au-dessus de celui de Y______ et que X______ était toujours seule et jamais accompagnée.

c.c.b. L______ déclaré être la concierge du bâtiment et avoir toujours vu X______ seule, à l'exception d'une fois où elle l'avait vue avec Y______.

c.c.c. M______ a déclaré qu'elle logeait sur le même palier que Y______. Selon ce que X______ lui avait dit, celle-ci était la femme de ménage de Y______, "soit la femme qui faisait tout pour la famille". X______ sortait toujours seule et elle ne l'avait jamais croisée en compagnie d'une autre personne. Elle avait souvent proposé à X______ de prendre un café avec elle mais celle-ci avait toujours refusé en expliquant qu'elle n'en avait pas le temps.

c.c.d. N______ a déclaré qu'il vivait dans le même immeuble que X______ et qu'il la voyait souvent, toujours seule, partir ou revenir des commissions avec un chariot.

c.c.e. O______ a déclaré être vendeuse à la Coop où X______ venait faire ses courses trois à quatre fois par semaine. Elle se souvenait de cette cliente qui avait toujours l'air triste, pressée ou fatiguée, venant la plupart du temps toute seule, et qui lui faisait de la peine.

c.d. Plusieurs employés du H______ ont été entendus en qualité de témoin, par la police sur délégation du Ministère public, du 6 février au 4 mai 2018.

c.d.a. B______ avait travaillé en tant que femme de ménage au H______ du mois de mai 2014 au mois de janvier 2018. Elle n'avait rencontré X______ qu'à une seule reprise, au H______.

c.d.b. P______ avait travaillé au H______ d'octobre 2015 à mai 2016. Elle savait que X______ était la nounou employée par Y______. Elle l'avait vue une fois amener des choses au H______.

c.d.c. Q______ avait été hôtesse et danseuse au H______ durant trois ou quatre mois en 2016 et y avait vu X______ une fois, un matin. Elle a déclaré qu'il s'agissait à son avis de la femme de ménage du H______.

c.d.d. R______ avait travaillé au H______ en septembre 2017 et y avait vu X______ environ quatre fois, soit quand elle amenait des choses à Y______ soit quand cette dernière lui confiait des commissions. Elle ne savait pas qui s'occupait du ménage du bar.

c.d.e. S______ avait travaillé au H______ entre août et septembre 2017. Il lui était arrivé deux ou trois fois de croiser X______ en train de faire le ménage dans le bar vers 7 heures ou 8 heures du matin.

c.e. Des proches et des connaissances de Y______ ont été entendus en qualité de témoin du 13 février au 2 juillet 2018.

c.e.a. Entendu par la police sur délégation du Ministère public, T______ a déclaré qu'il avait été l'ami et l'avocat de Y______ et qu'il savait que celle-ci employait une nounou à la maison.

c.e.b. Entendu par le Ministère public, U______ a déclaré avoir rencontré Y______ douze ou treize ans auparavant et avoir eu avec elle une relation intime durant 4 à 5 ans, tout en étant domicilié à Bättwill. Il dormait chez Y______ - rue G______ - lorsqu'il venait à Genève. Il y avait rencontré X______ et avait constaté que celle-ci s'occupait des enfants.

c.e.c. Entendue par la police sur délégation du Ministère public, V______ a déclaré être l'une des sœurs ainées de Y______ et être la mère de quatre enfants. Elle n'était pas venue souvent à Genève mais connaissait X______ qui gardait les enfants de Y______, s'occupait du logement et faisait à manger. Autour de l'année 2011, X______ partageait la chambre de I______ et dormait dans un lit superposé. Elle ignorait comment X______ était logée depuis lors. Lorsqu'elle était venue à Genève, elle n'avait jamais vu X______ sortir.

c.e.d. Entendu par la police sur délégation du Ministère public, W______ a déclaré qu'il avait été en couple avec la sœur de Y______ de 2007 à 2009 environ. X______ était la personne qui s'occupait des enfants de Y______.

c.e.e. Entendu par le Ministère public, AA______ a déclaré qu'il était le compagnon de J______ depuis 8 ans. Il connaissait X______ comme étant la nounou de sa compagne. Il l'avait vue préparer des repas, lesquels lui étaient également parfois préparés par J______, ainsi que faire le ménage "un quart d'heure" avant de s'asseoir lire ou téléphoner. J______ lui avait dit que X______ sortait pour faire les courses ainsi que pour voir des amis. Lors des repas du weekend, c'était Y______ ou J______ qui faisaient le service. Il avait constaté que X______ était absente le dimanche. Le lit de la chambre de I______ était identique à celui de J______, le lit du bas avait un sommier, bien qu'il n'ait pas été "tirer ce lit". Il a également déclaré, contrairement à ce qu'ont affirmé Y______ et les enfants de cette dernière au cours de la procédure, que "tout le monde faisait le ménage" et que c'était "toujours I______ qui faisait la lessive".

c.e.f. Entendu par le Ministère public, AB______ a déclaré être l'ami intime de Y______, qu'il connaissait depuis une dizaine d'années. Il était domicilié en France et logeait à l'hôtel lorsqu'il se rendait à Genève. Il savait que Y______ avait une nounou, car "tout le monde savait ça". Il était possible qu'il l'eût rencontrée sans savoir de qui il s'agissait.

c.e.g. Entendue par la police sur délégation du Ministère public, AC______ a déclaré être la nièce de Y______ et avoir rendu visite à sa tante durant ses vacances, de 2009 à 2014. X______ était la nounou des enfants de Y______ et avait toujours dormi dans la chambre de I______. Dans l'appartement de la rue G______, il y avait "un lit avec un tiroir et avec un matelas dedans". A la rue E______, I______ dormait sur un lit en mezzanine et X______ dormait en dessous sur un canapé-lit. Lors de ses passages, AC______ avait dormi soit avec J______, soit avec sa tante, soit dans le salon. La plupart du temps c'était X______ qui préparait les repas bien que, en famille, les tâches étaient partagées et qu'il fallait parfois forcer X______ à quitter la cuisine pour laisser les autres s'en occuper. X______ assurait le nettoyage de l'appartement, hormis les chambres des enfants, que ces derniers étaient tenus de nettoyer eux-mêmes. Elle n'avait pas de jour de congé fixe mais il arrivait qu'elle passe un weekend chez des copines.

c.e.h. Entendu par la police sur délégation du Ministère public, AD______ a déclaré avoir rencontré Y______ dans un bar genevois par le biais d'amis interposés. Il avait rencontré la nounou de Y______ à deux reprises mais ne l'avait jamais vue au H______.

c.e.i. Entendu par la police sur délégation du Ministère public, E______ a déclaré qu'il avait rencontré Y______ alors qu'il cherchait du travail en qualité d'électricien. Il avait noué une réelle amitié avec Y______, laquelle l'avait beaucoup aidé, et s'était rendu plusieurs fois chez elle pour manger et passer la soirée. X______ avait toujours été présente lors de ces visites et était "la dame de la maison", qui s'occupait du ménage, du repassage et des travaux. Autant qu'il se souvienne, cette dernière n'était jamais allée faire le ménage dans son appartement.

c.e.j. Entendue par la police sur délégation du Ministère public, AF______ a déclaré être une amie de Y______ depuis l'ouverture du H______ en 2002 ou 2004. Elle s'était rendue chez celle-ci à plusieurs reprises et elle y avait rencontré X______, "la femme de ménage". Elle avait arrêté de fréquenter Y______ en 2014 ou 2015.

c.e.k. Entendu par la police sur délégation du Ministère public, AG______ a déclaré qu'il connaissait Y______ depuis environ dix ans et qu'il la croisait dans des bars de temps en temps pour boire un verre. Il avait rencontré X______, qui était la nounou des enfants, au domicile de Y______.

c.f. Le 6 avril 2018, AH______, intervenant en protection de l'enfance, a été entendu par la police sur délégation du Ministère public, en qualité de témoin. Il a déclaré avoir suivi I______ entre 2008 et 2011 puis de mars à novembre 2015. A l'époque où il intervenait pour I______, Y______ employait une dame hispanique qui vivait dans le logement familial et qui jouait le rôle de mère de substitution en s'occupant du logement et des enfants. Cette dame était restée travailler très longtemps chez Y______.

c.g. Le 11 avril 2018, AI______, inspecteur de la police judiciaire, a été entendu en qualité de témoin par le Ministère public. Il avait participé à la perquisition du domicile de Y______. Dans son souvenir, le matelas qui était rangé sous le lit n'était pas dans un tiroir.

c.h. Le 29 août 2018, AJ______ a été entendue en qualité de témoin par le Ministère public. Elle a déclaré être la nièce de X______ et vivre en Italie depuis 2006. Elle était venue rendre visite à sa tante à Genève à trois reprises, en 2007 ou 2008, en 2015 et en 2016, et lui parlait au téléphone un jour sur deux. Lors de ses visites, elle arrivait à Genève le dimanche aux alentours de midi et repartait à Milan en fin d'après-midi. X______ n'avait pas le droit d'avoir un jour de congé. Lors de ses passages, elle partageait sa vie avec sa tante et les deux pleuraient du fait que cette dernière n'avait pas de permis. Lors de ces entrevues, Y______ appelait X______ pour lui demander de revenir à la maison. Elle n'était jamais allée dans l'appartement où vivait sa tante.

C'est au téléphone qu'elle parlait avec X______ du travail de cette dernière. Sa tante lui disait qu'elle était très fatiguée, qu'il ne lui était pas permis de manger, qu'elle devait nettoyer la maison, préparer les repas, et qu'elle devait parfois rester éveillée très tard. X______ pleurait au téléphone, car elle était "le père et la mère" de ses enfants en Equateur, qu'elle devait soutenir. Sa tante lui avait manifesté son souhait de rentrer en Equateur et elle lui avait suggéré de venir en Italie. Cependant, les problèmes de X______ avaient été de plus en plus fréquents et celle-ci subissait des humiliations. AJ______ a indiqué qu'après qu'elle avait eu un enfant, elle n'avait plus eu l'occasion de rendre visite à sa tante, mais elle lui avait dit de ne pas rentrer en Equateur. En janvier 2018, les problèmes les plus importants avaient commencé et X______ avait appelé sa nièce au secours. Au téléphone, elle avait entendu sa tante se faire crier dessus par Y______. Elle avait demandé à sa tante de lui envoyer des photos sur lesquelles elle avait constaté que celle-ci était usée par le travail et le manque d'alimentation. X______ avait été "esclavagisée".

En janvier 2018, Y______ avait tout préparé pour renvoyer X______ en Equateur, si bien qu'elle avait pris contact avec l'ambassade d'Equateur en Suisse. Elle avait parlé en pleurant et avait insisté sur le caractère urgent de la situation, expliquant qu'on ne pouvait pas abandonner une ressortissante dans une telle situation. Elle avait de cette façon été mise en relation avec une association et elle avait convenu avec sa tante que celle-ci l'appellerait lors de sa prochaine sortie afin que la personne de contact de l'association, ou la police, lui vienne en aide.

AJ______ a ajouté qu'elle ne savait pas pourquoi les choses s'étaient aggravées en janvier 2018, mais elle imaginait que, comme les enfants avaient grandi, les services de sa tante n'étaient plus nécessaires. Cela dit, même avant cette détérioration de la situation, "les choses n'étaient pas bien" et X______ travaillait sans bénéficier de jour de congé. Sa tante dormait sur un matelas, dans la chambre du fils de Y______. L'intéressée lui avait dit qu'elle gagnait désormais CHF 1'000.- par mois, mais qu'elle avait gagné "un peu plus au début".

Elle considérait que Y______ avait préparé l'expulsion de X______ car celle-ci avait fait venir deux policiers chez elle, lesquels avaient interrogé sa tante dans le logement et non dans un poste de police.

c.i. Le 2 novembre 2018, AK______ a été entendu en qualité de témoin par le Ministère public. Il connaissait Y______ depuis une douzaine d'années. Il s'était rendu à son domicile à la rue E______ à deux ou trois reprises et y avait rencontré X______ une fois. A cette occasion, cette dernière lui avait servi un café. Y______ lui avait dit qu'elle avait une dame qui s'occupait du ménage et des enfants et qu'elle était contente de celle-ci. Il n'avait pas vu X______ au H______, établissement qu'il fréquentait en fin d'après-midi.

c.j. Le 2 novembre 2018 également, AL______ a été entendue en qualité de témoin par le Ministère public. Elle avait rencontré X______ au marché aux puces de Plainpalais en 2016. Cette dernière faisait le marché car sa patronne n'était pas là. Elle l'avait complimentée sur l'essayage d'une robe et X______ lui avait demandé si elle était chrétienne. Elle lui avait répondu que oui et lui avait demandé si elle se rendait à l'Eglise. X______ avait répondu par la négative, expliquant qu'elle travaillait 7 jours sur 7 et qu'elle devait servir le petit-déjeuner à sa patronne le dimanche. Elle avait parlé environ une heure avec X______, laquelle lui avait dit avoir confiance en Dieu, que celui-ci la sortirait de cette situation. Elle avait demandé à son groupe de prière de prier pour X______, qui était "comme une esclave". Le pasteur du groupe lui avait donné des adresses à contacter pour demander de l'aide mais elle n'avait pas revu X______ avant février 2018, date à laquelle elles s'étaient croisées à un concert de l'église évangélique. Elle lui avait proposé d'aller prendre un café "à l'occasion" mais cela ne s'était jamais fait et elle revoyait aujourd'hui X______ pour la première fois depuis février 2018. Elle avait cependant échangé quelques messages entre février et novembre 2018 avec cette dernière, laquelle lui avait dit qu'elle la ferait peut-être citer comme témoin. Dans son souvenir, l'intéressée lui avait dit gagner CHF 1'300.-

d. Selon le décompte des transactions AM______ établi par le Ministère public le 27 février 2018, X______ a, de 2008 à 2017, envoyé en Equateur la somme de CHF 134'918.50.

e. Le 29 janvier 2018, X______ a consulté à l'unité interdisciplinaire de médecine et de prévention de la violence des HUG. Lors de cet entretien, elle a déclaré qu'elle avait immigré en Suisse en 2001 pour des raisons économiques et qu'elle avait travaillé depuis cette date en tant qu'employée de maison pour une femme qui l'avait exploitée durant 17 ans. Elle a précisé qu'elle avait travaillé 7 jours sur 7, sans bénéficier ni de jours de congé ni de jours de vacances, qu'elle avait été très contrôlée, qu'elle ne pouvait pas se soigner si cela impliquait de manquer le travail, enfin qu'elle avait touché un petit salaire (CHF 1'300.-), dont le montant avait diminué avec le temps.

f. Selon les pièces obtenues suite à l'ordre de dépôt adressé par le Ministère public aux HUG le 27 mars 2018, X______ a déclaré, à l'occasion d'une consultation le 2 mars 2010, qu'elle marchait beaucoup le weekend mais pas la semaine.

g. Selon le rapport de renseignements de la Brigade de lutte contre la traite des êtres humains et la prostitution illicite du 30 octobre 2018, il ressort de l'analyse des extractions effectuées sur les téléphones de Y______, de J______ et de X______, que Y______ avait pour habitude de donner des consignes tant à ses proches qu'à ses employés de façon très autoritaire, voire tyrannique, parfois même agressive lorsqu'elle était alcoolisée, ce qui arrivait très souvent.

En outre, selon ce même rapport, X______ semblait occupée la plupart de la journée, suivant les instructions de Y______ à la lettre. Il semblait qu'elle n'avait pas beaucoup de temps libre à disposition. A la fin de l'année 2017, X______ expliquait à plusieurs de ses interlocutrices qu'elle ne pouvait pas sortir à sa guise du domicile de Y______.

Expertise psychiatrique de la partie plaignante

h.a. Une expertise psychiatrique concernant X______ a été rendue le 23 août 2018.

Au cours de cette expertise, X______ a déclaré qu'elle avait commencé à travailler pour Y______ en 2001. Son travail consistait à s'occuper des enfants, âgés de 3 et 4 ans, du ménage, des courses et des repas. En arrivant en Suisse, son projet était de rester en Suisse quatre ou cinq ans avant de rentrer au pays. X______ n'avait jamais eu de fiancé ou d'ami en Suisse et n'en aurait jamais eu l'occasion à cause du contrôle permanent auquel elle avait été soumise de la part de son employeuse.

X______ a rapporté à l'experte, par "un récit détaillé et avec une participation émotionnelle congruente à ce qu'elle exposait", que Y______ avait toujours adopté une attitude dénigrante et humiliante à son égard. Elle était restée dix-sept ans à son service par peur de partir et de la réaction de Y______. Comme Y______ avait été sa première employeuse en Suisse, elle n'avait pas été armée pour réaliser qu'elle était sous payée. Sa seule obsession avait été de gagner de l'argent pour aider ses fils en Equateur. Elle avait été témoin de nombreux épisodes de violence de la part de Y______ sur ses enfants, ce qui avait causé chez elle une peur de plus en plus intense de ce dont son employeuse aurait été capable si elle avait tenté de fuir. De surcroît, Y______ lui avait régulièrement dit qu'elle avait des amis dans la police, des gens importants et de pouvoir, ce qui l'avait inquiétée, d'une part parce qu'elle imaginait pouvoir être poursuivie pour des accusations infondées, d'autre part à cause de sa situation de clandestine. X______ avait été de moins en moins payée mais, alors qu'elle avait annoncé son désir de partir, elle s'était vue supplier de rester par la sœur de Y______ et s'était laissée convaincre.

Du point de vue symptomatique, au moment de l'expertise, X______ a rapporté des cauchemars répétés dans lesquels Y______ la poursuivait dans l'appartement un couteau à la main, ainsi que des réveils fréquents, en sursaut, avec sudations profuses. X______ avait beaucoup de mal à entendre Y______ mentir à son sujet. Elle avait beaucoup de mal à exprimer ses demandes et mettait constamment les besoins des autres avant les siens. Au sein du foyer "AN______", les intervenantes avaient orienté le travail sur le besoin de X______ de se recentrer sur elle-même et de se reconstruire. Cette dernière se sentait en sécurité au sein du foyer mais non pas à l'extérieur, où elle décrivait une agoraphobie qu'elle n'avait pas connue avant son expérience avec Y______, ainsi que des attaques de paniques, par exemple lorsqu'elle pensait entendre la voix de son employeuse dans le bus. Selon l'expertise psychiatrique, ces symptômes évoquent "clairement" une hallucinose post-traumatique. X______ a par ailleurs développé des techniques d'évitement, notamment de certains quartiers, par peur d'y croiser Y______, ce qui relève de la "conduite d'évitement", symptôme caractéristique des états post-traumatiques.

X______ avait eu l'impression d'être sauvée par la police à un moment où "elle n'y croyait plus".

L'accueil chaleureux qu'elle avait reçu en arrivant au foyer ainsi que le fait d'assumer une plainte en justice permettaient chez elle un travail "de subjectivation et de reprise en main de sa propre existence".

Selon l'expertise psychiatrique, les déclarations de X______ sont plausibles et cohérentes, et, vu la série des symptômes pathognomoniques d'un état de stress post-traumatique constatés, un diagnostic de simulation est exclu. L'état de stress post-traumatique semble avoir été provoqué par des années de maltraitances psychologiques dans le cadre d'une situation d'emprise. Le récit, du fait notamment d'une verbalisation spontanée non structurée, est jugé "hautement crédible" par l'experte.

h.b. Lors de son audition par-devant le Ministère public, AO______ a confirmé son expertise. Elle s'était fondée sur les éléments figurant dans son expertise et avait notamment bénéficié de notes de suite très complètes de la psychologue de l'expertisée. Elle avait parlé avec d'autres connaissances de X______ car il avait été important d'avoir une vision de l'extérieur pour savoir comment l'expertisée se comportait en dehors des entretiens.

Son travail avait consisté à analyser la crédibilité de X______. Elle s'était pour cela référée à la grille SVA qui était applicable et même hautement valable pour les adultes. AO______ ne pouvait pas dire si ce que X______ disait était vrai ou faux mais elle pouvait affirmer que ses propos étaient "hautement crédibles".

Du vol du collier

a.a. Le 24 janvier 2018, entendue en qualité de personne appelée à donner des renseignements, Y______ a déclaré qu'elle avait été contactée par une policière qui lui avait appris qu'un collier lui appartenant lui avait été volé. Elle avait demandé des explications à X______, laquelle lui avait répondu que c'était I______ qui lui avait donné ce collier pour qu'elle le vende.

Elle avait fait appel à son ami policier AP______ afin qu'il l'aide à savoir qui de sa nounou ou de son fils avait menti. Elle avait réuni X______, I______ et AP______ chez elle et ce dernier avait demandé aux intéressés de donner leur version des faits. Cet entretien n'"avait rien donné".

a.b. Le 22 février 2018, Y______ a déposé plainte pénale pour vol contre X______. Entendue par le Ministère public le 23 février 2018, elle a confirmé avoir reçu, trois ou quatre semaines auparavant, un appel de la police judiciaire au sujet d’un collier de marque CHOPARD lui appartenant, lequel avait été vendu par X______ dans un magasin F______.

a.c. Le 15 mars 2018, Y______ a, sur présentation d’une photocopie du collier sur laquelle se trouvait un autre petit objet, confirmé qu'il s’agissait d’un pendentif qui lui appartenait également.

b.a. Lors de son audition par la police, le 18 janvier 2018, X______ a déclaré que, environ quatre mois plus tôt, I______ lui avait remis un collier qu'il avait reçu d'un ami et qu'il lui avait demandé de le vendre à une certaine adresse. Elle s'était exécutée et l'acheteur lui avait payé la somme de CHF 800.-, qu'elle avait remise à I______.

Quelques jours avant son dépôt de plainte, Y______ lui avait présenté AP______, un policier, lequel l'avait confrontée à I______ au sujet d'un vol de collier. Elle avait demandé à I______ de dire la vérité car elle n'entendait pas assumer quelque chose qu'elle n'avait pas fait, sur quoi Y______ lui avait rétorqué qu'elle s'était rendue complice. AP______ et Y______ lui avaient dit que, si elle se déclarait coupable, les choses en resteraient là. Au contraire, si elle ne disait pas la vérité, Y______ devrait payer une amende pour avoir employé quelqu'un sans autorisation de séjour et elle-même serait renvoyée dans son pays.

b.b. Le 2 novembre 2018 devant le Ministère public, X______ a déclaré qu'elle maintenait que I______ lui avait remis le collier en lui demandant d'aller le vendre. La somme d'argent envoyée à ses proches le jour de la vente du collier, et dont le montant coïncidait avec celui du prix de vente, correspondait selon elle à de l'argent que I______ lui demandait de lui donner, comme il le faisait tout le temps, et qu'elle avait, ce jour-là, préféré envoyer à sa famille en Equateur.

Elle a confirmé qu'elle avait remis l'argent issu de cette vente à I______.

c. Lors de son audition du 19 janvier 2018 par la police, I______ a déclaré, au sujet de ce collier, qu'il avait eu vent de cette histoire, une semaine auparavant, par sa mère. Y______ l'avait directement accusé du vol et il lui avait expliqué qu'il n'avait jamais entendu parler de cet événement et que, si un collier avait été volé, ce devait être du fait de X______. Il savait que cette dernière avait dit à sa mère qu'elle lui avait remis l'argent de la vente du collier. I______ a ajouté qu'il ne pouvait pas avoir volé le collier car, à l'époque des faits, il travaillait toute la journée, que de surcroît la porte de la chambre de sa mère était toujours verrouillée et que seule sa sœur et X______ connaissaient la cachette de la clé. Il trouvait cette histoire surprenante car X______ n'était pas une voleuse et qu'elle n'avait à sa connaissance jamais volé quoi que ce soit en dix-sept ans. Il a ajouté qu’un ami de sa mère, qui était policier, s’était rendu chez eux pour discuter du collier et qu'il pensait qu’elle l'avait fait venir pour leur faire peur.

d. Il ressort de la communication du service des bijoux de la police du 19 décembre 2017 que la transaction effectuée dans l'établissement F______ par X______ a eu lieu le 13 septembre 2017.

e. A teneur du décompte communiqué par AM______ au Ministère public le 26 février 2018, le 13 septembre 2017, X______ a expédié la somme de USD 796.02.- (somme déposée : USD 800.-) en Equateur, dont USD 49.75.- à l'attention d'une nièce et USD 746.27 à l'attention de l'un de ses fils.

f. Le 30 novembre 2018, Y______ a versé la somme de CHF 800.- sur le compte du pouvoir judiciaire afin que ce montant soit remboursé à F______.

g. Le 31 décembre 2018, le Ministère public a adressé un ordre de dépôt à F______ pour demander la remise du collier afin d’en permettre le rachat par Y______.

C.a. Bien que dûment convoquée, X______ n'a pas comparu à l'audience de jugement du 25 avril 2023.

Elle a, par l'entremise de son avocate et en amont du procès, le 13 avril 2023, adressé un mémoire écrit au soutien de ses conclusions civiles.

A l'audience de jugement, elle a fait savoir, par l'entremise de son avocate, qu'elle n'avait pas les moyens financiers pour voyager d'Equateur dans le but de se rendre à l'audience de jugement et qu'elle acceptait d'être immédiatement jugée par défaut.

Le tribunal a engagé la procédure par défaut pour les motifs figurant au procès-verbal.

b. Y______ a, par l'entremise de son conseil, déposé un chargé de pièces contenant la décision de l'Office cantonal de l'assurance-invalidité lui octroyant une rente entière à compter du 1er octobre 2020, un rapport d'examen neuropsychologique, et son extrait du registre des poursuites.

Sur question préjudicielle, la pièce déposée par X______, qui constituait une déclaration écrite d'une partie et contrevenait à ce titre au principe de l'oralité des débats, a été écartée de la procédure.

c. Y______ a confirmé avoir employé X______ sans la déclarer et sans payer ses charges sociales, ce dont elle s'est excusée. Elle a également reconnu avoir versé des salaires inférieurs à ceux prévus par la convention collective du secteur. Elle a toutefois contesté avoir commis des faits de maltraitance ainsi que "les heures imposées à faire le ménage". X______ avait été la deuxième maman de ses enfants et elle lui avait fait une confiance totale. De manière générale, Y______ a contesté les faits qui lui étaient reprochés sous le chiffre 1.1.1 de l'acte d'accusation.

En substance, elle a admis que, lorsque ses enfants étaient jeunes, le travail de X______ consistait à s'occuper de ces derniers et à faire un peu de ménage. Elle a dans un premier temps contesté que, comme l'avait déclaré son fils au cours de la procédure, son employée travaillait de 07h00 à 21h00, au prétexte qu'"il n'y avait rien à faire jusqu'à 21h00". Elle a finalement déclaré et admis que les enfants se couchaient à 21h00 et que le fait de s'occuper d'eux constituait bien un travail. Elle a maintenu que X______ ne s'était pas occupée d'autres enfants.

Y______ a déclaré que c'est elle qui s'occupait des enfants le weekend puisque, à cause de son travail, elle n'avait pas beaucoup l'occasion de les voir en semaine. Le weekend, elle faisait le ménage avec X______. Cette dernière n'avait jamais fait le ménage du H______.

S'agissant de la rémunération, Y______ a confirmé ce qu'elle avait déclaré devant le Ministère public, à savoir qu'elle avait toujours versé à X______ un salaire de CHF 2'000.-. Elle a confirmé également que X______ dormait dans la chambre de son fils, sur un lit gigogne avec sommier.

X______ n'avait pas de jour de congé fixe mais, durant le weekend, elle partait se balader avec ses amis quand les enfants étaient devenus autonomes.

Y______ a reconnu l'emploi d'étrangers sans autorisation.

Elle a contesté les conclusions civiles.

S'agissant du vol du collier, Y______ a confirmé sa plainte et déclaré qu'elle avait eu une confiance aveugle envers X______ et que l'idée que celle-ci la vole ne lui avait jamais traversé l'esprit auparavant.

d. Entendue en qualité de témoin, AQ______ a déclaré qu'elle connaissait Y______ depuis une vingtaine d'années. Elle était amie avec cette dernière et connaissait bien sa manière d'être et de fonctionner. Y______ avait été une femme qui travaillait beaucoup, qui était vive et tonique. Son arrestation et son incarcération l'avaient rendue dépressive. Y______ avait perdu du poids et son aspect physique avait changé.

D.a. Y______, née le ______1970 en Algérie, est de nationalité suisse. Elle est divorcée et mère de deux enfants, J______ (28 ans) et I______ (25 ans). Elle a grandi en Algérie, où elle a fait sa scolarité jusqu'à l'âge de 13 ans, puis elle a commencé à travailler. Elle a quitté l'Algérie à 17 ans pour se rendre en France.

Y______ souffre de divers problèmes de santé, lesquels l'ont amenée à bénéficier, depuis le 1er octobre 2020, d'une rente de l'assurance-invalidité entière sur la base d'un degré d'invalidité de 100%. D'un point de vue neuropsychologique, Y______ a connu une aggravation franche de ses troubles mnésiques antérogrades à partir de 2019.

Sa rente mensuelle est de CHF 5'000.-. Elle détient par ailleurs une part de propriété sur la maison de ses parents en Algérie.

Ses charges sont composées de son loyer (CHF 1'610.-) et de sa prime d'assurance-maladie (CHF 570.-). Une saisie sur sa rente a été prononcée à hauteur de CHF 1'600.- par mois en lien avec l'arriéré des cotisations sociales de X______. Enfin, l'extrait du registre des poursuites de Y______ fait état de l'enregistrement de plusieurs actes de poursuites à son encontre.

Selon l'extrait de son casier judiciaire, Y______ n'a pas d'antécédent judiciaire.

Y______ a été condamnée en 2009 pour infraction à l'art. 117 al. 1 phr. 1 LEtr, condamnation qui n'apparaît plus sur l'extrait de son casier judiciaire.

b. X______, née le ______ 1955, est de nationalité équatorienne. Elle a grandi à ______, en Equateur, avec sept frères et sœurs. Elle y a suivi la scolarité obligatoire puis a travaillé en tant que "domestique". Elle a quitté son pays pour la Suisse en 2001, à cause de la situation économique en Equateur, où le revenu moyen s'élevait à USD 60.- et où elle n'arrivait ainsi pas à nourrir sa famille. Elle a cinq enfants de deux pères différents.

X______ est retournée vivre en Equateur avant l'audience de jugement - à laquelle elle ne s'est pas présentée - si bien que sa situation personnelle exacte au jour du jugement est inconnue. S'agissant de la peine qui lui sera infligée, le tribunal se fondera sur la situation financière qui était celle de X______ jusqu'au jour de son départ, étant donné qu'il est peu probable, et en tout état pas établi, que cette situation aurait évolué favorablement.

Selon l'extrait de son casier judiciaire, X______ n'a pas d'antécédent judiciaire.

 

EN DROIT

Culpabilité

1.1.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (RS 0.101 ; CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (RS 101 ; Cst.) et 10 al. 3 du code de procédure pénale du 5 octobre 2007 (RS 312.0 ; CPP), concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1 ; ATF 127 I 28 consid. 2a).

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, ce principe signifie qu'il incombe à l'accusation d'établir la culpabilité de l'accusé, et non à ce dernier de démontrer son innocence. Il est violé lorsque le juge rend un verdict de culpabilité au seul motif que l'accusé n'a pas prouvé son innocence (ATF 127 I 38 consid. 2a; 120 Ia 31 consid. 2c et 2d).

Comme règle de l'appréciation des preuves, le principe in dubio pro reo signifie que le juge ne peut se déclarer convaincu d'un état de fait défavorable à l'accusé, lorsqu'une appréciation objective de l'ensemble des éléments de preuve laisse subsister un doute sérieux et insurmontable quant à l'existence de cet état de fait (ATF 127 I 38 consid. 2a  ; 124 IV 86 consid. 2a; 120 Ia 31 consid. 2c).

1.1.2.1. Se rend coupable d'usure au sens de l'art. 157 ch. 1 al. 1 CP celui qui aura exploité la gêne, la dépendance, l'inexpérience ou la faiblesse de la capacité de jugement d'une personne en se faisant accorder ou promettre par elle, pour lui-même ou pour un tiers, en échange d'une prestation, des avantages pécuniaires en disproportion évidente avec celle-ci sur le plan économique.

1.1.2.2. L'infraction réprimée à l'art. 157 ch. 1 CP suppose la réalisation des éléments constitutifs objectifs suivants: une situation de faiblesse de la victime, l'exploitation de cette situation de faiblesse, l'échange d'une contre-prestation, une disproportion évidente entre l'avantage pécuniaire et la contre-prestation ainsi que l'existence d'un rapport de causalité entre la situation de faiblesse et la disproportion des prestations. Du point de vue subjectif, l'infraction est intentionnelle. Le dol éventuel suffit. L'intention doit porter sur la disproportion évidente entre la prestation et la contre-prestation ainsi que sur la situation de faiblesse de la victime. L'art. 157 CP suppose que l'auteur obtienne l'avantage patrimonial "en échange d'une prestation". L'usure ne peut donc intervenir que dans le cadre d'un contrat onéreux. L'avantage pécuniaire obtenu doit en outre être en disproportion évidente, sur le plan économique, avec la prestation fournie. Elle doit être évaluée de manière objective (arrêt 6B_430/2020 du 26 août 2020 c.2.1 et les références citées).

La loi et la jurisprudence ne fournissent pas de limite précise pour déterminer à partir de quand le déséquilibre entre les prestations est usuraire. Les critères à prendre en considération, parmi lesquels celui des risques encourus, rendent difficile une évaluation en chiffres. Pour qu'elle puisse être considérée comme usuraire, la disproportion doit toutefois excéder sensiblement les limites de ce qui apparaît usuel et normal au regard de l'ensemble des circonstances; elle doit s'imposer comme frappante aux yeux de tout client Dans la doctrine, une limite de l'ordre de 20 % est évoquée pour les domaines réglementés; pour les autres domaines, il y a usure, dans tous les cas, dès 35 % (arrêt du Tribunal fédéral 6B_27/2009 du 29 septembre 2009 c.1.2 et les références citées).  

Enfin, pour arrêter un salaire "net", le Tribunal fédéral a jugé raisonnable de procéder en diminuant le montant du salaire brut de 15% (arrêt du Tribunal fédéral 6B_875/2020, 6B_1006/2020 du 15 avril 2021, c. 4.4).

1.1.2.3. Selon l'art. 157 ch. 2 CP, si l’auteur fait métier de l’usure, la peine sera une peine privative de liberté d'un à dix ans.

L'auteur agit par métier lorsqu'il résulte du temps et des moyens qu'il consacre à ses agissements délictueux, de la fréquence des actes pendant une période déterminée, ainsi que des revenus envisagés ou obtenus, qu'il exerce son activité coupable à la manière d'une profession, même accessoire. Il faut que l'auteur aspire à obtenir des revenus relativement réguliers représentant un apport notable au financement de son genre de vie et qu'il se soit ainsi, d'une certaine façon, installé dans la délinquance (ATF 129 IV 253 consid. 2.1, SJ 2004 I 21, JdT 2005 IV 284 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_880/2018 du 31 octobre 2018 consid. 2.1). L'auteur doit avoir agi à plusieurs reprises, avoir eu l'intention d'obtenir un revenu et être prêt à réitérer ses agissements (ATF 119 IV 129 consid. 3, JdT 1994 I 796). 

1.1.2.4. Selon les conventions collectives applicables (CTT-TED), le salaire réglementé dans l'économie domestique pour les travailleurs sans qualifications particulières (mais prenant en compte les années d'expérience) s'élevait à :

- CHF 3'300.- du 1er juillet 2001 au 30 juin 2004 (CHF 2'400.- + CHF 300.- pour le logement + CHF 600.- pour la nourriture) pour une durée de travail hebdomadaire de 48 heures ;

- CHF 3'400.- du 1er juillet 2004 au 31 décembre 2005 (CHF 2'500.- + CHF 300.- pour le logement + CHF 600.- pour la nourriture) pour une durée de travail hebdomadaire de 48 heures ;

- CHF 3'430.- du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2007 (CHF 2'530.- + CHF 300.- pour le logement + CHF 600.- pour la nourriture) pour une durée de travail hebdomadaire de 46 heures ;

- CHF 3'550.- du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009 (CHF 2'560.- + CHF 345.- pour le logement + CHF 645.- pour la nourriture) pour une durée de travail hebdomadaire de 46 heures ;

- CHF 3'575.- du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011 (CHF 2'585.- + CHF 345.- pour le logement + CHF 645.- pour la nourriture) pour une durée de travail hebdomadaire de 45 heures ;

- CHF 3'625.- du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2012 (CHF 2'635.- + CHF 345.- pour le logement + CHF 645.- pour la nourriture) pour une durée de travail hebdomadaire de 45 heures ;

- CHF 3'900.- du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2013 (CHF 2'910.- + CHF 345.- pour le logement + CHF 645.- pour la nourriture) pour une durée de travail hebdomadaire de 45 heures ;

- CHF 3'969.- du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015 (CHF 2'979.- + CHF 345.- pour le logement + CHF 645.- pour la nourriture) pour une durée de travail hebdomadaire de 45 heures ;

- CHF 4'029.- du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2017 (CHF 3'039.- + CHF 345.- pour le logement + CHF 645.- pour la nourriture) pour une durée de travail hebdomadaire de 45 heures ;

- CHF 4'077.- du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2020 (CHF 3'087.- + CHF 345.- pour le logement + CHF 645.- pour la nourriture) pour une durée de travail hebdomadaire de 45 heures.

Des majorations de salaire pour les heures supplémentaires et pour le travail le dimanche et les jours fériés étaient également stipulées par ces conventions.

1.1.3. Selon l'art. 117 al. 1 LEI, quiconque, intentionnellement, emploie un étranger qui n’est pas autorisé à exercer une activité lucrative en Suisse ou a recours, en Suisse, à une prestation de services transfrontaliers d’une personne qui n’a pas l’autorisation requise est puni d’une peine privative de liberté d’un an au plus ou d’une peine pécuniaire. Dans les cas graves, la peine sera une peine privative de liberté de trois ans au plus ou une peine pécuniaire. En cas de peine privative de liberté, une peine pécuniaire est également prononcée. Selon le deuxième alinéa de cette disposition, quiconque, ayant fait l’objet d’une condamnation exécutoire en vertu de l’al. 1, contrevient de nouveau, dans les cinq années suivantes, à l’al. 1, est puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire. En cas de peine privative de liberté, une peine pécuniaire est également prononcée. Cette infraction est un délit continu (ATF 75 IV 37 consid. 1, 131 IV 83 consid. 2.1.2).

1.1.4. Selon l'art. 87 al. 2 LAVS, celui qui, par des indications fausses ou incomplètes, ou de toute autre manière, aura éludé, en tout ou en partie, l'obligation de payer des cotisations sera puni d'une peine pécuniaire de 180 jours-amende au plus, à moins qu'il ne s'agisse d'un crime ou d'un délit frappé d'une peine plus lourde.

L'art. 87 al. 3 LAVS dispose que celui qui, en sa qualité d’employeur, omet de s’affilier à une caisse de compensation et de décompter les salaires soumis à cotisation de ses salariés dans le délai fixé par le Conseil fédéral en vertu de l’art. 14, sera puni d’une peine pécuniaire de 180 jours-amende au plus, à moins qu’il ne s’agisse d’un crime ou d’un délit frappé d’une peine plus lourde. Cet alinéa a été introduit par le chiffre II 1 de la LF du 17 mars 2017 et n'est entré en vigueur que le 1er janvier 2018.

Le simple fait de ne pas verser les cotisations n'est pas visé par l'art. 87 al. 2 LAVS. La poursuite de cette infraction présuppose qu'une procédure de sommation préalable ait eu lieu (G. WEISSBROT, Les dispositions pénales LAVS, in Panorama III en droit du travail, Recueil d'études réalisées par les praticiens, 2017, p. 421 et la jurisprudence citée). Dans le cadre du projet de loi du 18 décembre 2015 de modification de la loi fédérale concernant des mesures en matière de lutte contre le travail au noir, le législateur a constaté que l'art. 87 al. 2 LAVS (violation de l'obligation de verser des cotisations) était trop restrictif dans la mesure où il ne permettait pas de sanctionner pénalement la pure omission, mais seulement celui qui se rend coupable d'une manœuvre frauduleuse active. Ainsi, "celui qui d'emblée ne s'affilie pas à une caisse de compensation se rend coupable non pas d'une manœuvre frauduleuse active, mais d'une simple omission, et ne peut être puni (…)". Il s'agit pourtant d'une violation à la LAVS toute aussi grave que le comportement aujourd'hui déjà punissable au sens de l'art. 87 al. 2 LAVS qui consiste à déclarer le salaire de certains de ses employés et non celui des autres. Pour pallier ce défaut, le projet de loi a prévu la création d'un alinéa supplémentaire à la suite de l'art. 87 al. 2 LAVS, l'al. 3 en vigueur depuis le 1er janvier 2018 (G. WEISSBROT, op.cit., 2017, p. 439 et 440).

1.1.5. Aux termes de l'art. 139 CP, celui qui, pour se procurer ou procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura soustrait une chose mobilière appartenant à autrui dans le but de se l’approprier sera puni d’une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d’une peine pécuniaire (ch. 1). Le vol commis au préjudice des proches ou des familiers ne sera poursuivi que sur plainte (ch. 4).

1.1.6. Selon l'art. 97 al. 1 CP, l’action pénale se prescrit par 30 ans si la peine maximale encourue est une peine privative de liberté à vie (let. a) ; par quinze ans si la peine maximale encourue est une peine privative de liberté de plus de trois ans (let. b) ; par dix ans si la peine maximale encourue est une peine privative de liberté de trois ans (let. c) ; par sept ans si la peine maximale encourue est une autre peine (let. d). L'art. 97 a CP disposait que l’action pénale se prescrit par 30 ans si l'infraction est passible d'une peine privative de liberté à vie (let. a) ; par quinze ans si l'infraction est passible d'une peine privative de liberté de plus de trois ans (let. b) ; par sept ans si l'infraction est passible d'une autre peine (let. c).

1.2.1.1. En l'espèce, s'agissant des faits qualifiés d'usure reprochés à la prévenue Y______, il est relevé que selon l'horaire décrit par celle-ci à l'audience de jugement, la plaignante X______ travaillait toute la journée. En effet, même si cette dernière devait avoir des moments de libre, il lui incombait de se tenir disponible. Le fait qu’elle n'ait pas eu d'horaire fixe tend à le démontrer. D'ailleurs, confrontée aux déclarations de I______ à teneur desquelles la plaignante X______ travaillait de 07h00 à 21h00, la prévenue Y______ a déclaré qu'elle n'en savait rien puisqu'elle partait travailler à 14h00. Cela est encore corroboré par le fait que I______ n'avait pas de clés, J______ pas toujours non plus et qu'ils s'attendaient à trouver leur nounou à la maison pour leur ouvrir. Il est ainsi établi que la plaignante X______ travaillait ou à tout le moins était à disposition durant toute la journée. Or, toute personne qui est de piquet dans une activité doit être rémunérée, puisqu'elle se tient à disposition. Si la plaignante X______ devait s'occuper de I______ lorsqu'il était petit, il est toutefois difficile de déterminer la fréquence et la durée du travail de nuit. Le travail durant le weekend ne peut pas non plus être établi avec certitude, dans la mesure où il ressort de la consultation médicale auprès des HUG que la plaignante X______ a indiqué ne pas beaucoup marcher la semaine mais marcher durant le weekend, ce qui tend à démontrer que ses activités du weekend étaient différentes de celles de la semaine. Le Tribunal retiendra ainsi un travail de 07h00 à 21h00.

S’agissant du salaire, la plaignante X______ a déclaré que le montant prévu était de CHF 1'700.- à l'engagement, que lors du déménagement à Plainpalais en 2007, il était passé à CHF 1'500.-, que 2 ou 3 ans après cela il était passé à CHF 1'300.-, puis, la dernière année, à CHF 1'000.-. Lesdites déclarations sont corroborées par celles de I______ à teneur desquelles la plaignante X______ ne gagnait pas beaucoup plus que CHF 1'000.- dans la mesure où elle envoyait USD 900.- à ses enfants et gardait CHF 100.- ou 200.- pour elle. Elle a en effet envoyé CHF 134'918.50 en Equateur entre 2008 et 2017, soit en moyenne CHF 13'490.- par an, ce qui correspond à un peu plus de CHF 1'000.- par mois et qui tend à corroborer les déclarations de I______. D'un autre côté, J______ a indiqué un montant de CHF 3'000.- et la prévenue Y______ a déclaré de manière constante, même en début de procédure, alors qu'elle ne souffrait d'aucun problème de mémoire, qu'elle payait la plaignante X______ CHF 2'000.- et elle n'a jamais varié sur ce point. En application du principe in dubio pro reo, c'est ce montant que retiendra le Tribunal.

Il n'est pas établi que la plaignante X______ ne mangeait pas à sa faim. Il conviendra donc d'ajouter le salaire en espèce relatif à la nourriture. En revanche, seule la moitié du salaire en espèce sera retenue en lien avec le logement, dans la mesure où, s'il n'est pas établi par la procédure que le lit ne disposait pas de sommier, la plaignante X______ évoquant des lattes qui se cassaient, le logement de cette dernière, laquelle ne disposait pas d'une chambre à elle, n'était pas en conformité avec la CTT sur l'économie domestique.

Il y a usure dès une différence de 20% dans le domaine réglementé. Si l'on retient un salaire de CHF 2'000.- auquel on ajoute CHF 600.- de 2001 à 2007 et CHF 645.- de 2008 à 2018 comme salaire en nature en lien avec la nourriture ainsi que CHF 150.- de 2001 à 2007 et CHF 172.50 de 2008 à 2018 comme ½ salaire en nature en lien avec le logement pour une activité du lundi au vendredi de 07h00 à 21h00 et ce sans compter les majorations pour heures supplémentaires, jours fériés et indemnités vacances, on obtient un salaire horaire perçu de CHF 9.07 / heure de 2001 à 2007 et de CHF 9.28 / heure de 2008 à 2018, selon les calculs suivants :

-          14 heures / jour x 5 jours x 52 semaines = 3'640 heures / année

-          Pour 2001 à 2007 :

-          CHF 2'750.- x 12 = CHF 33'000.- / année

-          CHF 33'000.- / 3'640 heures = CHF 9.07 / heure

-          Pour 2008 à 2018 :

-          CHF 2'817.50 x 12 = CHF 33’810.- / année

-          CHF 33’810.- / 3'640 heures = CHF 9.28 / heure.

Les salaires réglementés s'élevaient entre CHF 14.13 / heure et CHF 18.53 / heure entre 2001 et 2018, après réduction de 15% des salaires bruts conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral, selon les calculs suivants :

-          Pour 2001 :

48 heures / semaine x 52 semaines = 2'496 heures / année

Salaire en espèce de CHF 2'400.- diminué de 15% = CHF 2'040.-

CHF 2’940.- (soit CHF 2’040.- [salaire en espèce diminué de 15%] + CHF 600.- [nourriture] + CHF 300.- [logement]) x 12 = 35’280.- / année

CHF 35'280.- / 2'496 heures = CHF 14.13 / heure

-          Pour 2018 :

45 heures / semaine x 52 semaines = 2'340 heures / année

Salaire en espèce de CHF 3’087.- diminué de 15% = CHF 2’624.-

CHF 3’614.- (soit CHF 2’624.- [salaire en espèce diminué de 15%] + CHF 645.- [nourriture] + CHF 345.- [logement]) x 12 = 43’368.- / année

CHF 43'368.- / 2'340 heures = CHF 18.53 / heure.

On obtient ainsi une différence avec le salaire perçu s'élevant entre 35.81% et 49.86% entre les années 2001 et 2018, selon les calculs suivants :

-          Pour 2001 :

-          CHF 14.13 / heure - CHF 9.07 / heure = CHF 5.06, soit une différence de 35.81%

-          Pour 2018 :

-          CHF 18.53 / heure - CHF 9.28 / heure = CHF 9.25, soit une différence de 49.86%.

La différence dépassant 20%, le salaire était usuraire.

Le Tribunal a également calculé le nombre d'heures maximales travaillées pour un salaire mensuel de CHF 2'000.- qui ne serait pas usuraire. Il arrive à un salaire usuraire pour une durée de travail hebdomadaire dépassant 56.14 heures en 2001 et 43.86 heures en 2018, sans compter les majorations pour heures supplémentaires, jours fériés et indemnités vacances, selon les calculs suivants :

-          Pour 2001, le salaire était usuraire dès qu’il était inférieur de 20% à CHF 14.13.- / heure.

-          20% de 14.13 = 2.83

-          14.13 – 2.83 = 11.30

-          CHF 2'750.- (salaire mensuel) / CHF 11.30 (taux horaire à partir duquel le salaire est usuraire) = 243.36 heures par mois, soit 2'920.35 heures par année

-          2'920.35 heures / 52 semaines = 56.14 heures / semaine.

-          Pour 2018, le salaire était usuraire dès qu’il était inférieur de 20% à CHF 18.53.- / heure.

-          20% de 18.53 = 3.706

-          18.53 – 3.706 = 14.824

-          CHF 2'817.50 (salaire mensuel) / CHF 14.824 (taux horaire à partir duquel le salaire est usuraire) = 190.06 heures par mois, soit 2'280.76 heures par année

-          2'280.76 heures / 52 semaines = 43.86 heures / semaine.

Dans la mesure où la durée du travail hebdomadaire de la plaignante X______ dépassait 56.14 heures en 2011 et 43.86 heures en 2018, ce résonnement conduit également à un salaire en disproportion évidente avec la prestation fournie.

La prévenue Y______ a exploité la faiblesse de la plaignante X______, laquelle n'avait pas de permis de séjour, ne connaissait pas la Suisse, ne parlait que très peu le français et était isolée socialement n'ayant presque pas d'amis dans ce pays. Cette dernière était totalement dépendante de la prévenue Y______ chez qui elle habitait, n'ayant pas d'autre endroit où dormir et dont elle dépendait financièrement. La prévenue Y______ a par ailleurs profité du fait que la plaignante X______ venait d'un pays où les salaires étaient très bas et serait encline à accepter un tel salaire qui lui semblait généreux, en faisant confiance à son employée alors que ledit salaire était en totale disproportion à teneur du droit suisse avec le nombre d'heures travaillées. Certes, il semble que, dans un premier temps à tout le moins, la plaignante X______ était bien intégrée dans la famille et que la prévenue Y______ lui faisait certains cadeaux et lui offrait certains soins de coiffure ou d'esthétique. Mais cette dernière, pour laquelle il était confortable d'avoir une personne à domicile payée à bas prix, a néanmoins exploité son employée.

Compte tenu de ce qui précède la prévenue Y______ sera reconnue coupable d'usure au sens de l'art. 157 ch. 1 CP.

1.2.1.2. La circonstance aggravante du métier n'est pas réalisée. Même si l'usure pour laquelle la prévenue Y______ est condamnée lui a permis de réaliser des économies sur une longue période pénale, elle n'est en lien qu'avec une personne et une situation. L'on n'est par ailleurs pas dans un cas où celle-ci serait prête à agir un nombre indéterminé de fois, chaque fois que l'occasion se présenterait auprès d'un nombre indéterminé de victimes.

1.2.1.3. Les faits antérieurs au 26 avril 2008 devront être classés pour cause de prescription.

1.2.1.4. La prévenue Y______ sera également reconnue coupable d'emploi d'étrangers sans autorisation au sens de l’art. 117 al. 1 LEI. S'agissant d'un délit continu, la prescription court dès 2018 et les faits ne sont ainsi pas prescrits. La prévenue Y______ ayant fait l'objet d'une condamnation dans les 5 ans, l'aggravante de l'alinéa 2 trouve application en l'espèce.

1.2.1.5. En revanche, l'art. 87 al. 3 LAVS n'est entré en vigueur que le 1er janvier 2018. Auparavant, la simple omission de s'affilier à une caisse de compensation et de s'acquitter des cotisations n'était pas punissable, en l'absence d'une manœuvre frauduleuse active, soit faute d'avoir donné des indications fausses ou incomplètes. Le salaire de janvier 2018 n'ayant pas été dû, ni versé avant l'arrestation de la prévenue Y______, elle sera acquittée de ce chef d'infraction pour toute la période pénale.

1.2.1.6. Par conséquent, la procédure du chef d'usure sera classée pour la période antérieure au 26 avril 2008. La prévenue Y______ sera reconnue coupable d'usure au sens de l'art. 157 ch. 1 CP pour la période postérieure à celle-ci et d'infraction à l'art. 117 al. 1 et 2 LEI. Elle sera en revanche acquittée du chef d'infraction à l'art. 87 LAVS.

1.2.2. Les faits reprochés à la prévenue X______ sont établis par l'envoi en Equateur, le jour-même de la transaction, de la somme correspondant peu ou prou, vu la différence de devises, au prix de vente. La prévenue X______ n'a par ailleurs jamais indiqué dans le cadre de la procédure avoir voulu compenser avec le salaire qui lui était dû. Par conséquent elle sera reconnue coupable de vol au sens de l'art. 139 ch. 1 CP.

Peine

2.1.1. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concernée, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

2.1.2. En vertu de l'art. 34 CP, sauf disposition contraire, la peine pécuniaire est de trois jours-amende au moins et ne peut excéder 180 jours-amende. Le juge fixe leur nombre en fonction de la culpabilité de l'auteur (al. 1). En règle générale, le jour-amende est de CHF 30.- au moins et de CHF 3'000.- au plus. Il peut exceptionnellement, si la situation personnelle et économique de l'auteur l'exige, être réduit jusqu'à 10 francs. Le juge en fixe le montant selon la situation personnelle et économique de l'auteur au moment du jugement, notamment en tenant compte de son revenu et de sa fortune, de son mode de vie, de ses obligations d'assistance, en particulier familiales, et du minimum vital (al. 2).

2.1.3. Le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire ou d'une peine privative de liberté de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits (art. 42 al. 1 CP). Si, durant les cinq ans qui précèdent l'infraction, l'auteur a été condamné à une peine privative de liberté ferme ou avec sursis de plus de six mois, il ne peut y avoir de sursis à l'exécution de la peine qu'en cas de circonstances particulièrement favorables (art. 42 al. 2 CP).

Le juge doit poser, pour l'octroi du sursis – ou du sursis partiel –, un pronostic quant au comportement futur de l'auteur. En l'absence de pronostic défavorable, il doit prononcer le sursis. Celui-ci est ainsi la règle dont le juge ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable ou hautement incertain (ATF 135 IV 180 consid. 2.1 p. 185 s. ; 134 IV 1 consid. 4.2.2 p. 5).

2.1.4. Selon l'art. 52 CP, si la culpabilité de l’auteur et les conséquences de son acte sont peu importantes, l’autorité compétente renonce à le poursuivre, à le renvoyer devant le juge ou à lui infliger une peine.

2.2. En l'espèce, la faute de la prévenue X______ n’est pas négligeable. Elle a trahi la confiance de la plaignante Y______ dont elle bénéficiait.

Elle n'explique pas son mobile, mais on déduit des circonstances que c'était par besoin d'argent, pour l'envoyer à sa famille.

Sa situation personnelle était certes très difficile mais ne justifiait pas qu'elle vole un collier.

La collaboration de la prévenue X______ n'a pas été bonne, celle-ci ayant persisté à contester le vol du collier.

Elle n’a pas d'antécédent, facteur neutre au niveau de la peine.

Compte tenu de la faute de la prévenue X______ qui n'est pas de peu d'importance, cette dernière ne sera pas exemptée de toute peine mais sera condamnée à une peine pécuniaire de 60 jours-amende à CHF 10.-. En l'absence d'antécédent, cette peine sera assortie du sursis, avec un délai d'épreuve de 3 ans.

Conclusions civiles

3.1.1. L'art. 122 al. 1 CPP prévoit que, en qualité de partie plaignante, le lésé peut faire valoir des conclusions civiles déduites de l’infraction par adhésion à la procédure pénale.

En vertu de l'art. 126 CPP, le tribunal statue sur les prétentions civiles présentées lorsqu'il rend un verdict de culpabilité à l'encontre du prévenu (al. 1 let. a). Dans le cas où le jugement complet des conclusions civiles exigerait un travail disproportionné, le tribunal peut traiter celles-ci seulement dans leur principe et, pour le surplus, renvoyer la partie plaignante à agir par la voie civile. Les prétentions de faible valeur sont, dans la mesure du possible, jugées par le tribunal lui-même (al. 3).

Lorsque les preuves recueillies dans le cadre de la procédure sont suffisantes pour permettre de statuer sur les conclusions civiles, le juge pénal est tenu de se prononcer sur le sort de celles-ci, en examinant, pour chacune d'elles, si elles sont justifiées en fait et en droit (arrêts du Tribunal fédéral 6B_434/2018 du 12 septembre 2018 consid. 1.1, 6B_443/2017 du 5 avril 2018 consid. 3.1). En revanche, le juge renvoie la partie plaignante à agir par la voie civile lorsqu'elle n'a pas chiffré ses conclusions de manière suffisamment précise ou ne les a pas suffisamment motivées (art. 126 al. 2 let. b CPP). Par ailleurs, dans le cas où le jugement complet des conclusions civiles exigerait un travail disproportionné, le tribunal peut traiter celles-ci seulement dans leur principe et, pour le surplus, renvoyer la partie plaignante à agir par la voie civile (art. 126 al. 3 CPP). N'importe quel supplément de travail exigé par le jugement des prétentions civiles ne suffit pas pour que le juge pénal se limite à statuer sur l'action civile dans son principe. L'exigence d'un travail disproportionné n'est réalisée que lorsque de longues et difficiles investigations doivent être menées, qui ne concernent pas le volet pénal de l'affaire, mais servent uniquement à établir le préjudice subi par la victime. Tel est le cas lorsque la quotité du dommage est difficile à établir et supposerait des mesures probatoires spécifiques qui auraient pour effet de différer longuement le prononcé du jugement (ATF 122 IV 37 consid. 2c p. 42). Le travail disproportionné doit être occasionné par l′administration des preuves et non par la qualification juridique (arrêt du Tribunal fédéral 6B_434/2018 consid. 1.1)

3.1.2. L'art. 49 CO prévoit que celui qui subit une atteinte illicite à sa personnalité a droit à une somme d'argent à titre de réparation morale, pour autant que la gravité de l'atteinte le justifie et que l'auteur ne lui ait pas donné satisfaction autrement.

Le principe d'une indemnisation du tort moral et l'ampleur de la réparation dépendent d'une manière décisive de la gravité de l'atteinte et de la possibilité d'adoucir de façon sensible, par le versement d'une somme d'argent, la douleur physique ou morale (ATF 132 II 117 consid. 2.2.2).

En raison de sa nature, l'indemnité pour tort moral, destinée à réparer un dommage ne pouvant que difficilement être réduit à une simple somme d'argent, échappe à toute fixation selon des critères mathématiques, de sorte que son évaluation en chiffres ne saurait excéder certaines limites; l'indemnité allouée doit toutefois être équitable (arrêt du Tribunal fédéral 6S.470/2002 du 5 mai 2003 consid. 2.1). Le juge en proportionnera le montant à la gravité de l'atteinte subie et évitera que la somme accordée n'apparaisse dérisoire à la victime (ATF 125 III 269 consid. 2a; 118 II 410 consid. 2).

3.2. En l'espèce, la prévenue Y______ sera condamnée à verser CHF 6'000.- à titre de réparation du tort moral à la plaignante X______.

La plaignante X______ sera par ailleurs renvoyée à agir au civil pour les conclusions en réparation du dommage matériel, lesquelles nécessiteraient un travail disproportionné. En effet, il est en l'état impossible pour le Tribunal, sans mener des investigations complémentaires, de déterminer exactement le nombre d'heures travaillées par la plaignante X______, y compris durant la nuit et les weekends, le nombre d'heures supplémentaires effectuées et le nombre d'heures de vacances impayées.

Inventaires, frais et indemnités

4.1. Selon l'art. 267 CPP, si le motif du séquestre disparaît, le ministère public ou le tribunal lève la mesure et restitue les objets et valeurs patrimoniales à l’ayant droit (al. 1). La restitution à l’ayant droit des objets et des valeurs patrimoniales séquestrés qui n’ont pas été libérés auparavant, leur utilisation pour couvrir les frais ou leur confiscation sont statuées dans la décision finale (al. 3).

4.2. En l'espèce, l'Iphone noir figurant sous chiffre 1 de l'inventaire manuscrit du 26 janvier 2018 au nom de X______ sera restitué à cette dernière.

5.1. Selon l'art. 423 CPP, les frais de procédure sont mis à la charge de la Confédération ou du canton qui a conduit la procédure; les dispositions contraires du code de procédure pénale sont réservées.

L’autorité pénale peut accorder un sursis pour le paiement des frais de procédure. Elle peut réduire ou remettre les frais compte tenu de la situation de la personne astreinte à les payer (art. 425 CPP). L'autorité peut ainsi décider de réduire ou remettre les frais, lorsqu'ils apparaissent comme trop élevés ou disproportionnés, afin d'éviter que leur paiement apparaisse, au vu de la situation de la personne astreinte à les payer, comme une peine déguisée ou qu'il réduise les chances de réinsertion de la personne concernée (Petit commentaire du CPP, 2ème éd., art. 425, p. 1401). L'art. 425 CPP est applicable tant à l’occasion du prononcé de clôture (art. 81 et art. 353 CPP), à l’initiative de l’autorité pénale, qu’après l’entrée en force de celui-ci, à la requête du condamné qui s’est vu imputer des frais de procédure (CR CPP, 2019, Art. 425 CPP). 

Aux termes de l'art. 426 al. 1 CPP, le prévenu supporte les frais de procédure s’il est condamné. Font exception les frais afférents à la défense d’office; l’art. 135, al. 4, est réservé.

5.2. En l'espèce, la prévenue Y______ sera condamnée aux 2/3 des frais de la procédure.

La prévenue X______ sera condamnée à 1/10ème des frais de la procédure, lesquels seront arrêtés à CHF 500.-.

Le solde des frais de la procédure sera laissé à la charge de l’Etat.

6. Les indemnités du défenseur d'office et des conseils juridiques gratuits seront fixées conformément aux articles 135 et 138 CPP.

 

PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL

statuant contradictoirement en ce qui concerne Y______ :

Classe la procédure du chef d'usure (art. 157 ch. 1 CP) pour la période antérieure au 26 avril 2008 (art. 329 al. 5 CPP).

Déclare Y______ coupable d'usure en lien avec le point 1.1.1.1. de l'acte d'accusation (art. 157 ch. 1 CP) et d'infraction à l'article 117 al. 1 et 2 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration (LEI).

Acquitte Y______ du chef d'usure en lien avec le point 1.1.1.2. de l'acte d'accusation (art. 157 ch. 1 CP) et du chef d'infraction à l'article 87 de la loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants (LAVS).

Condamne Y______ à une peine privative de liberté de 18 mois, sous déduction de 84 jours de détention avant jugement et de 31 jours à titre d'imputation des mesures de substitution (art. 40 et art. 51 CP).

Condamne Y______ à une peine pécuniaire de 30 jours-amende (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 20.-.

Met Y______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).

Dit que cette peine est partiellement complémentaire à celle prononcée le 27 août 2009 par le Ministère public du canton de Genève (art. 49 al. 2 CP).

Avertit Y______ que si elle devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, les sursis pourraient être révoqués et les peines suspendues exécutées, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

* * * * *

statuant par défaut en ce qui concerne X______:

Déclare X______ coupable de vol (art. 139 ch. 1 CP).

Condamne X_____ à une peine pécuniaire de 60 jours-amende (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 10.-.

Met X______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit X______ que si elle devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

* * * * *

Condamne Y______ à payer à X______CHF 6'000.-, à titre de réparation du tort moral (art. 49 CO) et renvoie X______ à agir par la voie civile pour le surplus (art. 126 al. 2 CPP : rect. : art. 126 al. 3 CPP).

Déboute B______ de ses conclusions civiles.

Ordonne le séquestre en vue de l'allocation aux frais de la procédure des valeurs patrimoniales figurant sous chiffres 1 et 2 de l'inventaire manuscrit du 19 janvier 2018 au nom de Y______ et sous chiffre 1 de l'inventaire n° 10939520190118 du 18 janvier 2018 (art. 268 CPP).

Ordonne la restitution à Y______ de la photocopie de l'article 157 du code pénal suisse et du bloc à spirale de comptabilité figurant sous chiffres 1 et 2 de l'inventaire manuscrit du 18 janvier 2018 au nom de Y______, des livres de police rouge et brun, de la carte de la police pour AR______ et du contrat pour AS______ figurant sous chiffres 1 à 4 de l'inventaire 10965320180123 du 23 janvier 2018, du téléphone portable Samsung blanc et de l'inscription en langue arabe de nature religieuse figurant sous chiffres 2 et 3 de l'inventaire manuscrit du 18 janvier 2018 au nom de I______, de la clé figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n° 28717320201028 du 28 octobre 2020, des 2 paquets de cigarettes Marlboro Gold, du paquet de RINORAL (120 mg) et des 2 briquets figurant sous chiffres 3 à 5 de l'inventaire n° 10939520190118 du 18 janvier 2018, du collier Chopard ainsi que du pendentif en or 18k conservés dans le coffre du bureau n°523 au Ministère public et de la clé KABA n°8 déposée au Ministère public le 2 juin 2020 et figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n° 28717320201028 (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Ordonne la restitution à I______ du téléphone portable Microsoft noir figurant sous chiffre 1 de l'inventaire manuscrit du 18 janvier 2018 au nom de I______ (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Ordonne la restitution à X______ de l'Iphone noir figurant sous chiffre 1 de l'inventaire manuscrit du 26 janvier 2018 au nom de X______ (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Condamne X______ à 1/10 des frais de la procédure arrêtés à CHF 500.- et Y______ aux 2/3 des frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 14'718.10, y compris un émolument de jugement de CHF 1'500.- (art. 426 al. 1 CPP).

Compense à due concurrence la créance de l'Etat portant sur les frais de la procédure à l'égard de Y______ avec les valeurs patrimoniales séquestrées figurant sous chiffres 1 et 2 de l'inventaire manuscrit du 19 janvier 2018 au nom de Y______ et sous chiffre 1 de l'inventaire n° 10939520190118 du 18 janvier 2018 (art. 442 al. 4 CPP).

Fixe à CHF 10'759.25 l'indemnité de procédure due à Me D______, défenseur d'office de Y______ (art. 135 CPP).

Fixe à CHF 37'310.85 l'indemnité de procédure due à Me A______, conseil juridique gratuit de X______ (art. 138 CPP).

Fixe à CHF 6'691.40 l'indemnité de procédure due à Me C______, conseil juridique gratuit de B______ (art. 138 CPP).

Ordonne la communication du présent jugement aux autorités suivantes : Casier judiciaire suisse, Secrétariat d'Etat aux migrations, Service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir, Office cantonal de la population et des migrations, Service des contraventions (art. 81 al. 4 let. f CPP).

 

La Greffière

Léa Audrey GARCIA

La Présidente

Anne JUNG BOURQUIN

 

 

Voies de recours

La personne condamnée par défaut peut demander un nouveau jugement au Tribunal pénal, rue des Chaudronniers 9, Case postale 3715, CH-1211 Genève 3, dans les 10 jours dès la notification du jugement, par écrit ou oralement. Dans sa demande, la personne condamnée expose brièvement les raisons qui l'ont empêchée de participer aux débats. Le Tribunal rejette la demande lorsque la personne condamnée, dûment citée, fait défaut aux débats sans excuse valable (art. 368 CPP). En parallèle, la personne condamnée peut également faire une déclaration d'appel. Un appel n'est recevable que si la demande de nouveau jugement a été rejetée (art. 371 al. 1 et 2 CPP).

Selon l'art. 399 al. 3 et 4 CPP, la partie qui annonce un appel adresse une déclaration écrite respectant les conditions légales à la Chambre pénale d'appel et de révision, Place du Bourg-de-Four 1, case postale 3108, CH-1211 Genève 3, dans les 20 jours à compter de la notification du jugement motivé.

Si le défenseur d'office ou le conseil juridique gratuit conteste également son indemnisation, il peut interjeter recours, écrit et motivé, dans le délai de 10 jours dès la notification du jugement motivé, à la Chambre pénale d'appel et de révision contre la décision fixant son indemnité (art. 396 al. 1 CPP).

L'appel ou le recours doit être remis au plus tard le dernier jour du délai à la juridiction compétente, à la Poste suisse, à une représentation consulaire ou diplomatique suisse ou, s'agissant de personnes détenues, à la direction de l'établissement carcéral (art. 91 al. 2 CPP).

 

Etat de frais

Frais du Ministère public

CHF

12'849.10

Convocations devant le Tribunal

CHF

270.00

Frais postaux (convocation)

CHF

49.00

Emolument de jugement

CHF

1'500.00

Etat de frais

CHF

50.00

Total

CHF

14'718.10

 

Indemnisation du défenseur d'office de Y______

Vu les art. 135 CPP et 16 RAJ et les directives y relatives ;

Bénéficiaire :  

Y______

Avocat :  

Me D______

Etat de frais reçu le :  

14 avril 2023

 

Indemnité :

Fr.

8'850.00

Forfait 10 % :

Fr.

885.00

Déplacements :

Fr.

255.00

Sous-total :

Fr.

9'990.00

TVA :

Fr.

769.25

Débours :

Fr.

0

Total :

Fr.

10'759.25

Observations :

- 44h15 à Fr. 200.00/h = Fr. 8'850.–.

- Total : Fr. 8'850.– + forfait courriers/téléphones arrêté à 10 % vu l'importance de l'activité déployée (art 16 al 2 RAJ) = Fr. 9'735.–

- 2 déplacements A/R à Fr. 100.– = Fr. 200.–
- 1 déplacement A/R à Fr. 55.– = Fr. 55.–

- TVA 7.7 % Fr. 769.25

Ajout du temps de l'audience de jugement et du temps de lecture du verdict : 9h30 + 2 déplacements (chef d'Etude).

 

Indemnisation du conseil juridique gratuit de X______

Vu les art. 138 al. 1 CPP et 16 RAJ et les directives y relatives ;

Bénéficiaire :  

X______

Avocate :  

Me A______

Etat de frais reçu le :  

14 avril 2023

 

Indemnité :

Fr.

27'766.65

Forfait 10 % :

Fr.

2'776.65

Déplacements :

Fr.

4'100.00

Sous-total :

Fr.

34'643.30

TVA :

Fr.

2'667.55

Débours :

Fr.

0

Total :

Fr.

37'310.85

Observations :

- 138h50 admises* à Fr. 200.00/h = Fr. 27'766.65.

- Total : Fr. 27'766.65 + forfait courriers/téléphones arrêté à 10 % vu l'importance de l'activité déployée (art 16 al 2 RAJ) = Fr. 30'543.30

- 41 déplacements A/R à Fr. 100.– = Fr. 4'100.–

- TVA 7.7 % Fr. 2'667.55

Réductions :

9h00 pour le poste "Conférence" :
- temps de conférence avec la cliente excessif.

37h45 pour le poste "Procédure" :
- temps d'étude du dossier et de préparation d'audiences excessif;
- la "rédaction d'observations plainte pour vol" du 12.12.2018 est comprise dans le forfait courrier/téléphone;
- en application de l'art. 16 al. 2 RAJ, les recherches juridiques font partie de la formation continue de l'avocat-e et n'ont pas à être prises en charge par l'Etat.

2h35 pour le poste "Audiences" :
- temps des audiences des 22.02.2018 (-0h20), 23.02.2018 (-0h15), 26.03.2018 (-1h00) et 03.02.2021 (-1h00 et -1 déplacement) excessif.

Ajout du temps de l'audience de jugement et du temps de lecture du verdict : 9h30 + 2 déplacements (chef d'Etude).

 

Indemnisation du conseil juridique gratuit de B______

Vu les art. 138 al. 1 CPP et 16 RAJ et les directives y relatives ;

Bénéficiaire :  

B______

Avocat :  

Me C______

Etat de frais reçu le :  

3 avril 2023

 

Indemnité :

Fr.

4'881.65

Forfait 20 % :

Fr.

976.35

Déplacements :

Fr.

355.00

Sous-total :

Fr.

6'213.00

TVA :

Fr.

478.40

Débours :

Fr.

0

Total :

Fr.

6'691.40

Observations :

- 4h50 à Fr. 110.00/h = Fr. 531.65.
- 21h45 à Fr. 200.00/h = Fr. 4'350.–.

- Total : Fr. 4'881.65 + forfait courriers/téléphones 20 % = Fr. 5'858.–

- 3 déplacements A/R à Fr. 100.– = Fr. 300.–
- 1 déplacement A/R à Fr. 55.– = Fr. 55.–

- TVA 7.7 % Fr. 478.40

Ajout du temps de l'audience de jugement et du temps de lecture du verdict : 9h30 + 2 déplacements (chef d'Etude).

 

Voie de recours si seule l'indemnisation est contestée

Le conseil juridique gratuit peut interjeter recours, écrit et motivé, dans le délai de 10 jours, devant la Chambre pénale de recours contre la décision fixant son indemnité (art. 135 al. 3 let. a et 396 al. 1 CPP; art. 128 al. 1 LOJ).

Restitution de valeurs patrimoniales et/ou d'objets

Lorsque le présent jugement sera devenu définitif et exécutoire, il appartiendra à l'ayant-droit de s'adresser aux Services financiers du pouvoir judiciaire (finances.palais@justice.ge.ch et +41 22 327 63 20) afin d'obtenir la restitution de valeurs patrimoniales ou le paiement de l'indemnité allouée, ainsi que, sur rendez-vous, au Greffe des pièces à conviction (gpc@justice.ge.ch et +41 22 327 60 75) pour la restitution d'objets.

Notification à Y______, soit pour elle son Conseil, Me D______
Par voie postale

Notification à X______, soit pour elle son Conseil, Me A______
Par voie postale

Notification au Ministère public
Par voie postale