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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/435/2024

DCSO/246/2024 du 04.06.2024 ( PLAINT ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/435/2024-CS DCSO/246/24

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU MARDI 4 JUIN 2024

Plaintes 17 LP (A/435/2024-CS et A/1122/2024-CS) formées en date des 5 février 2024 et 2 avril 2024 par A______ SA.

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du ______ à :

-       A______ SA

c/o B______ SA

______

______ [GE].

- C______ AG

c/o D______ SA

______

______ [VD].

- E______ et consorts

c/o Adriano NESE, avocat

Etude PERREARD DE BOCCARD SA

Rue du Mont-Blanc 3

1201 Genève.

- Office cantonal des poursuites.


EN FAIT

A. a. A______ SA est une société anonyme inscrite au Registre du commerce de Genève dont le siège est à Genève et l'adresse c/o B______ SA, rue 1______ no. ______, [code postal] Genève.

Ses administrateurs inscrits au Registre du commerce sont F______ (administrateur président), G______ (administrateur secrétaire) et H______ (administrateur).

Ces trois derniers sont également administrateurs ou fondés de procuration de B______ SA.

b. Sur réquisition de C______ AG, un commandement de payer 73'410 fr. 80 à titre de loyers impayés pour la période du 1er juillet au 31 décembre 2023 pour une arcade sise au rez-de-chaussée de l'immeuble sis rue 2______ no. ______ à Genève, lui a été notifié le 24 janvier 2024 à l'adresse susmentionnée et réceptionné par I______, réceptionniste (poursuite n° 3______).

c. A______ SA a fait opposition au commandement de payer le 25 janvier 2024, laquelle a été enregistrée par l'Office cantonal des poursuites (ci-après l'Office).

d. Le même jour, A______ SA s'est adressée à l'Office pour se plaindre de la notification irrégulière du commandement de payer qui n'avait pas été remis en mains d'un organe de la société.

e. L'Office a répondu le 29 janvier 2024 que la notification était valablement intervenue en mains d'une de ses employées en l'absence de ses organes.

f. A______ SA a contesté cette position par courrier du 2 février 2024 à l'Office, alléguant que I______ n'était pas l'une de ses employées, n'avait aucun lien avec elle et ne disposait d'aucun pouvoir. Elle exigeait une nouvelle notification et, dans la mesure où l'Office refusait de s'exécuter, elle invitait ce dernier à considérer son courrier comme une plainte au sens de l'art. 17 LP et de le communiquer à l'autorité de surveillance.

B. a. L'Office a transmis ce courrier le 6 février 2024 à la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites (ci-après la Chambre de surveillance) pour valoir plainte.

Celle-ci a été enrôlée sous numéro de cause A/435/2024.

b. Dans ses observations en réponse à la plainte du 15 février 2024, l'Office a conclu à son rejet en persistant dans les explications fournies dans son courrier à la plaignante du 29 janvier 2024.

c. Par déterminations du 4 mars 2024, C______ AG a également conclu au rejet de la plainte pour des motifs similaires.

d. Les parties ont été informées par avis du 5 mars 2024 de la Chambre de surveillance que la cause était gardée à juger.

C. a. Sur réquisition de E______ et consorts, représentés par Adriano NESE, avocat, un commandement de payer à hauteur de 350'000 fr. à titre de prétentions consécutives à l'invalidation d'une convention de remise de commerce, a été notifié le 21 mars 2024 à A______ SA à l'adresse mentionnée plus haut et remis en mains de J______, mandataire (poursuite n° 4______).

b. Par courrier du 2 avril 2024 à l'Office, A______ SA a formé opposition au commandement de payer et s'est à nouveau plainte du mode de notification du commandement de payer. Elle a enjoint l'Office à transmettre son courrier à la Chambre de surveillance s'il n'entendait pas procéder à une nouvelle notification.

c. L'Office a enregistré l'opposition de A______ SA.

D. a. L'Office a également communiqué à la Chambre de surveillance ledit courrier le 3 avril 2024 pour valoir plainte.

Elle a été enrôlée sous numéro de cause A/1122/2024.

b. La Chambre de surveillance n'a pas demandé d'observations aux autres parties et gardé la cause à juger en vue de jonction avec la cause A/435/2024.

EN DROIT

1.             Aux termes de l'article 70 LPA, applicable à la procédure devant la Chambre de surveillance en vertu des articles 9 al. 4 LaLP et 20a al. 3 LP, l'autorité peut, d'office ou sur requête, joindre des procédures se rapportant à une situation identique ou à une cause juridique commune.

En l'espèce, les causes A/1122/2024 et A/435/2024, même si elles n'opposent pas les mêmes parties, reposent sur un complexe de fait similaire. Le même grief est soulevé par la plaignante dans les deux causes et la solution aux deux litiges implique le recours aux mêmes principes juridiques. Il y a par conséquent lieu de joindre les deux procédures.

2.             La plaignante a choisi de déposer ses plaintes contre les notifications des commandements de payer litigieux auprès de l'Office en sachant que celui-ci n'était pas compétent pour en connaître et en l'enjoignant de les transmettre à l'autorité compétente s'il n'entendait pas reconsidérer sa décision.

2.1 La Chambre de surveillance est compétente pour statuer sur les plaintes formées en application de l'article 17 al. 1 LP (art. 13 LP; art. 125 et 126 al. 2 let. c LOJ; art. 6 al. 1 et 3 et 7 al. 1 LaLP) contre les mesures de l'Office ne pouvant être contestées par la voie judiciaire.

La plainte doit être déposée, sous forme écrite et motivée (art. 9 al. 1 et 2 LaLP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicable par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), dans les dix jours de celui où le plaignant a eu connaissance de la mesure (art. 17 al. 2 LP).

2.2 En application de l'art. 32 al. 2 LP, un acte déposé en temps utile auprès d'une autorité de poursuite incompétente – office des poursuites, des faillites ou autorité de surveillance –, notamment une plainte au sens de l'art. 17 LP, est réputé respecter le délai; l'autorité incompétente communique l'acte à l'autorité compétente sans retard.

L'application de l'art. 32 al. 2 LP suppose que le déposant se soit trouvé dans l'erreur sur l'autorité qu'il devait saisir ou, autrement dit, qu'il ait cru de bonne foi adresser son acte à l'autorité compétente pour en connaître. Le fait pour un justiciable de s'adresser consciemment et volontairement à une autorité incompétente alors que l'autorité compétente lui est connue doit à cet égard être qualifié d'abus de droit (ATF 145 III 487 consid. 3.4.5; 100 III 8 et 130 III 515 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral 5A_421/2012 du 20 décembre 2012 consid. 3.1; Staehelin, Basler Kommentar SchKG Ergänzungsband, ad n° 6 b ad art. 32 LP; Baeriswyl, Milani, Schmid, Zurcher Kommentar, Kommentar zum Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, Hrsg.: Kren Kostkiewicz/Vock, n° 16 ad art. 32 LP).

2.3 Selon une partie de la pratique cantonale genevoise, il y a lieu de réserver la situation du plaignant qui s'adresse à l'Office en demandant la reconsidération d'une décision, dans le délai de plainte, et invite parallèlement l'Office, pour le cas où il refuserait d'entrer en matière sur la reconsidération, à transmettre l'acte à l'autorité de surveillance pour valoir plainte (parmi d'autres, décisions de la Chambre de surveillance DCSO/101/13 du 18 avril 2013 consid. 3; DCSO/335/2015 du 15 octobre 2015; DCSO/31/24 du 1er février 2024).

Cette pratique n'est toutefois pas unanime au sein de la Chambre de surveillance (cf. DCSO/23/24 du 1er février 2024), de sorte que la question de la recevabilité de plaintes déposées volontairement auprès de l'Office incompétent pour en connaître se pose.

Elle peut toutefois rester ouverte en l'espèce, les plaintes devant tout état être rejetées pour les motifs suivants.

3. 3.1 A teneur de l'article 65 al. 1 chiffre 2 LP, lorsque la poursuite est dirigée contre une personne morale ou une société, les actes de poursuite sont notifiés à son représentant, à savoir à un membre de l'administration ou du comité, à un directeur ou à un fondé de procuration s'il s'agit d'une société anonyme. Lorsque les personnes ci-dessus mentionnées ne sont pas rencontrées à leur bureau, la notification peut être faite à un autre fonctionnaire ou employé (art. 65 al. 2 LP). Il en découle que la notification d'un acte de poursuite à une personne morale se fait dans les "bureaux" de celle-ci, soit en un lieu où les représentants autorisés déploient leur activité. Il ne s'agit pas forcément du siège statutaire. Le représentant peut également être atteint à son domicile privé, voire en d'autres lieux. La notification a lieu principalement en main d'un représentant autorisé. Ce n'est que subsidiairement qu'elle peut avoir lieu en main d'un employé, lorsqu'elle n'est pas possible en mains d'un représentant (art. 67 al. 1 chiffre 2 LP; Jeanneret, Lembo, Commentaire Romand, Poursuite et faillite, n° 6 ad art. 65 LP; Ruedin, Commentaire Romand, Poursuite et faillite, n° 19 ad art. 67 LP).

La notification à une société de domiciliation et la remise à des employés de cette dernière vaut notification à un représentant autorisé équivalent à un fondé de procuration (ATF 120 III 64 consid. 3 = JdT 1997 II 26; ATF 119 III 57 = JdT 1995 II 137; SJ 2000 II p. 210; arrêt du Tribunal fédéral du 7B.51/2002 du 22 mars 2002 consid. 2; cf. également ATF 96 III 1 = JdT 1971 II 34 pour la notification valable en mains d'employés d'une société domiciliée dans les mêmes locaux).

3.2 En l'espèce, la plaignante est domiciliée auprès d'une régie immobilière connue de la place, B______ SA, rompue aux affaires et à la pratique en matière de poursuites. Les organes de la plaignante sont également organes de dite régie. La notification en mains d'employés de la régie domiciliataire était par conséquent valable, ce que la plaignante et dite régie n'ignoraient certainement pas.

4. La procédure devant l'autorité de surveillance est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP; art. 61 al. 2 let. a OELP) et ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 62 al. 2 OELP). Il ne sera par conséquent pas perçu de frais ni alloué de dépens.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

 

Ordonne la jonction des causes A/1122/2024 et A/435/2024 sous ce dernier numéro de cause.

Rejette dans la mesure de leur recevabilité les plaintes des 5 février et 2 avril 2024 de A______ SA contre la notification des commandements de payer, poursuites n° 3______ et 4______.

 

Siégeant :

Monsieur Jean REYMOND, président; Monsieur Anthony HUGUENIN et Monsieur Luca MINOTTI, juges assesseurs ; Madame Elise CAIRUS, greffière.

 

Le président :

Jean REYMOND

 

La greffière :

Elise CAIRUS

 

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.